Couverture de EE_0901

Article de revue

Chapitre 4. Politique budgétaire

Pages 137 à 160

Notes

  • [1]
    L’indicateur peut être ajusté d’une manière discrétionnaire en fonction de tous les postes exceptionnels qui ne sont pas pris en compte dans les transferts nets en capital.
  • [2]
    Eurostat ne publie pas de données ventilant la dette des pays selon qu’elle est à taux fixe ou à taux variable, mais tout pays dont la dette est dans une forte proportion à taux variable pourra être également touché.
  • [3]
    Les nouvelles prévisions se bornent à mettre à jour les dépenses liées au vieillissement dans les pays qui ont sensiblement réformé leur système de retraite. Les estimations ont été également élargies au revenu net du patrimoine de l’État, élément qui est relativement négligeable dans presque tous les cas et qui représente un faible montant compte tenu de l’incertitude qui entoure de telles prévisions. Les mises à jour pour 2009 reposeront sur des projections démographiques révisées.
  • [4]
    Les « circonstances exceptionnelles » sont définies comme un événement inhabituel qui échappe au contrôle du gouvernement et qui a une incidence majeure sur le solde budgétaire, ou une récession économique grave comportant soit une baisse annuelle du PIB, soit une insuffisance cumulative de la production pendant une période prolongée du fait de la faiblesse de la croissance. Les nouveaux motifs instaurés par le Pacte révisé sont les suivants : i) mise en œuvre de réformes structurelles, ii) dépenses d’encouragement à l’innovation et à la R-D, iii) assainissement budgétaire antérieur en période de forte croissance économique, iv) situation d’endettement viable, v) qualité des finances publiques et vi) contributions financières en vue de favoriser la solidarité internationale et d’atteindre les objectifs de l’Union européenne.
  • [5]
    Voir par exemple, l’encadré 7.1, « Allégements fiscaux en faveur du logement et volte-face de la politique », OCDE (2006b).
  • [6]
    Voir l’encadré 3.1 : « Quelle est l’importance de la protection sociale?? », OCDE (2008b).
  • [7]
    En portant le niveau d’efficience à au moins 95 centile. Voir le graphique 12 de Sutherland et al. (2007).
  • [8]
    L’efficience C est définie comme le rapport entre les recettes effectives de TVA et la consommation, divisé par le taux normal de TVA.

1La situation budgétaire s’est renforcée au cours des dernières années avec l’amélioration des soldes budgétaires, ce qui a permis certains progrès dans le traitement des problèmes posés par la stabilité budgétaire à long terme, grâce à une réduction de la dette et à des mesures destinées à faire face aux pressions qui s’exerceront à long terme dans de nombreux pays. Cette évolution favorable a été facilitée par le dynamisme des recettes liées au cycle économique, grâce notamment aux bénéfices des entreprises et à la forte hausse des prix des actifs. Il est donc probable que la situation budgétaire se dégradera dans de nombreux pays au cours des années à venir. Cela constituera un élément d’appréciation majeur du succès apparent du Pacte révisé de stabilité et de croissance. Le risque existe que les évolutions sur les marchés de capitaux exercent une pression considérable sur les finances publiques.

Il n’y a pas eu beaucoup de progrès durables vers la viabilité budgétaire

2La situation budgétaire de la zone euro s’est améliorée au cours des dernières années : le déficit public a été ramené de 2.6 % du PIB en 2005 à 0.6 % en 2007. Cette réduction s’explique pour l’essentiel par une amélioration apparente du solde budgétaire sous-jacent, bien que l’évolution du cycle économique ait été favorable et ait contribué à la réduction de l’emprunt public (graphique 4.1). Les résultats obtenus ont été meilleurs que dans nombre d’autres grandes économies développées. Du fait de cette évolution, la dette publique brute de la zone euro selon la définition de Maastricht a été ramenée de 70.4 % à 66.5 % du PIB au cours de la même période.

Graphique 4.1

Soldes budgétaires

Graphique 4.1

Soldes budgétaires

En pourcentage du PIB/PIB potentiel

3L’examen des différents pays de la zone euro fait apparaître une situation contrastée. La Finlande, le Luxembourg et l’Espagne ont dégagé de solides excédents en 2007 (graphique 4.2). Aucun pays de la zone euro n’est actuellement soumis à la procédure de déficit excessif, mais la plupart d’entre eux ont enregistré des déficits budgétaires en 2007. Dans quatre pays – Grèce, France, Portugal et Italie – ce déficit a été proche de 2 % du PIB ou supérieur à ce chiffre. Cela reflète en partie la faiblesse des performances économiques. Presque tous les pays de la zone euro ont dégagé un excédent primaire en 2007. Pour certains pays fortement endettés tels que la Belgique et l’Italie, les excédents primaires corrigés des fluctuations conjoncturelles ont été suffisamment importants pour contribuer à des réductions notables de l’endettement en pourcentage du PIB. Certains pays faiblement endettés tels que la Finlande et les Pays-Bas ont également enregistré un excédent primaire compatible avec la poursuite de l’assainissement de leurs finances publiques. En revanche, la France et la Grèce devraient prendre de nouvelles mesures pour réduire l’encours de leur dette.

Graphique 4.2

Soldes budgétaires et dette publique brute

Graphique 4.2

Soldes budgétaires et dette publique brute

En pourcentage du PIB/PIB potentiel, 2007

4Le recours à la comptabilité créative et aux mesures exceptionnelles a été limité au cours des dernières années, ce qui s’explique en partie par la forte progression des recettes publiques, qui a réduit la pression exercée sur les gouvernements pour qu’ils prennent de telles initiatives. L’OCDE a mis au point un nouvel indicateur du solde budgétaire sous-jacent (Joumard et al., 2008). Il comporte un ajustement pour tenir compte à la fois du cycle économique, conformément à la méthodologie bien établie de l’OCDE (Girouard et André, 2005), et des versements exceptionnels définis comme des écarts par rapport à l’évolution tendancielle des transferts nets en capital versés par les administrations publiques [1]. Cet indicateur exclut les postes exceptionnels tels que la titrisation d’arriérés fiscaux et les transferts liés aux systèmes de retraite. Bien que ces opérations aient été fréquentes dans le passé dans des pays tels que la Belgique, l’Italie et le Portugal et qu’elles aient souvent dépassé 1 % du PIB (Koen et van den Noord, 2005), les opérations exceptionnelles ont eu peu d’impact sur le solde budgétaire depuis 2005, sauf dans le cas de la Grèce, où elles ont néanmoins diminué en volume.

5L’amélioration de la situation budgétaire de la zone euro au cours des dernières années s’explique dans une large mesure par l’accroissement des recettes publiques. Cette vigueur a correspondu en partie au jeu des stabilisateurs automatiques. Cependant, la croissance des recettes a été particulièrement dynamique entre 2005 et 2007, même si l’on tient compte des facteurs cycliques normaux, de sorte que les recettes sous-jacentes ont fait apparaître un accroissement en pourcentage du PIB potentiel (graphique 4.3). L’amélioration des recettes sous-jacentes qui a été enregistrée est due en grande partie à des recettes exceptionnelles de l’impôt sur les sociétés et d’impôts liés aux gains en capital et au patrimoine (Joumard et André, 2008). Les indicateurs conventionnels des soldes sous-jacents ne prennent pas en compte ces facteurs lors de l’ajustement en fonction du cycle économique, mettant davantage l’accent sur la manière dont les salaires et l’emploi évoluent au cours du cycle et sur les conséquences de cette évolution pour les recettes publiques. Bien que l’incertitude soit également très marquée quant à l’écart de production et à l’écart de chômage, certaines données montrent que, pour la plupart des pays de la zone euro, l’incertitude concernant la relation entre les recettes fiscales et la production est encore plus grande?; l’incertitude concernant les écarts de chômage et de production est « d’importance mineure » pour tous les pays sauf l’Allemagne et l’Italie (Koske et Pain, 2008). Cette évolution souligne également l’importance des cycles des prix des actifs, dont la durée peut être plus longue que celle d’un cycle économique ou, pour certains pays, des hausses de prix des actifs et des périodes de forte expansion du secteur de la construction liées à une croissance de rattrapage exceptionnelle et de longue durée. Dans de tels cas, le dynamisme des recettes publiques peut être structurel ou de longue durée, mais non permanent. De tels résultats ont plus de chances d’être observés au sein d’une union monétaire, où l’absence de politique monétaire nationale peut rendre les périodes prolongées d’expansion ou de récession plus fréquentes au niveau des pays.

Graphique 4.3

La croissance des recettes a amélioré la situation budgétaire sous­jacente

Graphique 4.3

La croissance des recettes a amélioré la situation budgétaire sous­jacente

Variation annuelle, en pourcentage du PIB potentiel

6L’amélioration des résultats budgétaires a permis, jusqu’à un certain point, d’abaisser les taux d’imposition (graphique 4.4). S’ils ne donnent pas un aperçu complet de la manière dont les recettes publiques sont collectées, dans la mesure où les changements de politique peuvent aussi porter sur les bases d’imposition, les taux ont en général baissé pour les impôts sur les sociétés et, à un certain degré, pour les impôts sur le revenu. Les taux de TVA ont augmenté en Allemagne, en Grèce, aux Pays-Bas et au Portugal. La réduction des taux de l’impôt sur les sociétés peut s’expliquer en partie par la concurrence fiscale et par la préférence qui est désormais donnée aux bases d’imposition les moins mobiles, comme celles de la TVA, en réponse à la mondialisation. Cela nécessite une modification du mode de prélèvement des impôts. Cette évolution a peut-être été dissimulée au cours des dernières années par le dynamisme des autres sources de recettes, mais les pressions résultant de la mondialisation constituent un défi pour l’avenir.

Graphique 4.4

Taux d’imposition

Graphique 4.4

Taux d’imposition

En pourcentage
1. 2006 pour les taux marginaux d’imposition du revenu.
2. Moyenne non pondérée.
3. Le taux normal de TVA a diminué d’un point au Portugal en juillet 2008.

7L’impact de la vigueur récente des recettes publiques explique en grande partie l’amélioration observée de la situation budgétaire sous-jacente en 2007 et pourrait conduire à un brusque retournement. Par conséquent, pour éviter que la procédure de déficit excessif ne soit déclenchée en cas d’évolution conjoncturelle défavorable, il faudrait, soit améliorer l’évaluation des soldes budgétaires sous-jacents pour tenir compte de ces considérations en période d’expansion, soit viser un solde budgétaire moyen plus élevé pour tenir compte de l’amplitude accrue des variations cycliques. Des estimations montrent que la prise en compte de ces facteurs nécessite l’application au déficit structurel d’une marge additionnelle d’environ 0.2 % du PIB en moyenne pour la zone euro afin que le déficit effectif soit maintenu en deçà de la même limite inférieure (Morris et Schuknecht, 2007). Bien que l’évaluation des programmes de stabilité et de convergence de la Commission tienne déjà compte d’un grand nombre de facteurs et que les indicateurs admis et simples d’ajustement cyclique qui sont déjà incorporés dans le processus présentent certains avantages, il serait très souhaitable de donner plus d’importance à d’autres indicateurs de la situation structurelle et d’adopter une stratégie budgétaire qui permette de mieux faire face aux chocs résultant de l’évolution des prix des actifs. Une solution possible serait d’adopter une méthode similaire à celle du Système européen de banques centrales (Bouthevillain et al., 2001), qui consiste à formuler des prévisions de la situation budgétaire d’une manière plus désagrégée, en envisageant séparément les différents flux de recettes. Mais les méthodes de ce type restent imparfaites en ce qu’elles ne prennent pas en compte les variations cycliques des élasticités fiscales et ne règlent pas le problème qui se pose pour mesurer correctement le niveau d’équilibre à long terme des bases d’imposition. Une analyse plus détaillée pourrait se justifier, mais une telle méthodologie suppose qu’on surmonte de nombreuses difficultés.

8Malgré le dynamisme dont elle a fait preuve récemment, la croissance des recettes publiques devrait désormais ralentir non seulement du fait du fléchissement de l’activité économique, mais aussi à cause des pressions que subissent désormais les recettes de l’impôt sur les sociétés et des impôts liés au patrimoine et aux gains en capital. Ces dernières années, la situation budgétaire s’est trouvée encore améliorée par la baisse des dépenses en pourcentage du PIB : cette part, corrigée des fluctuations conjoncturelles, a baissé d’un point pour revenir à 44 % depuis 2003. Cela s’explique cependant dans une large mesure par la forte compression des dépenses en Allemagne : si l’on exclut ce pays, la réduction correspondante de la part des dépenses corrigée des fluctuations conjoncturelles n’est que de 0.2 % pour la zone euro. Cette évolution est satisfaisante en comparaison avec l’augmentation de la part des dépenses publiques observée au Royaume-Uni, mais elle l’est moins par rapport à des pays comme le Canada, qui ont réduit plus rapidement la part de leurs dépenses tout en ayant un niveau de départ plus faible. De plus, il semblerait que le contrôle des dépenses ne soit pas très ferme et que celles-ci fassent apparaître en permanence un glissement important par rapport aux plans annoncés (CE, 2008). Malgré les conditions économiques favorables, les dépenses publiques dans la zone euro étaient, en 2007, supérieures d’environ 1 % à ce qu’indiquaient les plans établis deux ans plus tôt. Ce glissement indique que les pays s’engagent dans un ralentissement cyclique avec une situation budgétaire plus faible que d’ordinaire.

9Le déficit budgétaire effectif de la zone euro devrait passer, selon les prévisions de l’OCDE, de 0.6 % à 1.4 % du PIB en 2008 à mesure que l’économie subit un ralentissement et que les recettes publiques fléchissent, tandis que la situation budgétaire se détériorera encore plus en 2009 et 2010. La dégradation prévue du solde budgétaire est supérieure à ce que laisserait prévoir le cycle économique à lui seul et elle serait particulièrement grave dans des pays tels que l’Irlande et l’Espagne. Cette évolution s’explique dans une large mesure par un ralentissement des recettes publiques, bien qu’il soit probable que la progression des dépenses soit quelque peu freinée au cours des prochaines années. On devrait sans doute observer une faible incidence positive des recettes publiques sur le solde budgétaire du fait de la hausse des prix du pétrole (encadré 4.1).

Encadré 4.1. Prix du pétrole et recettes fiscales

La hausse des prix du pétrole majore les recettes fiscales par un certain nombre de voies. Tout d’abord, les produits pétroliers, et plus particulièrement les carburants, sont lourdement taxés. Aux prix courants, les droits d’accise représentent environ la moitié du coût de l’essence dans la plupart des pays. La TVA est d’environ 16 % en moyenne et elle est perçue sur le prix droits d’accise compris. Du fait du niveau élevé des droits d’accise, qui dépendent du volume et non de la valeur du carburant, le prix après impôt de l’essence augmente beaucoup moins que proportionnellement à la valeur du produit sous-jacent, bien qu’en raison des taux relativement élevés de TVA, la variation absolue soit plus forte que celle qui serait normalement enregistrée. En général, le fuel domestique est soumis à des droits d’accise plus faibles et à des taux de TVA identiques ou légèrement plus bas. L’incidence sur les recettes publiques pourrait être atténuée par le fait que la hausse des prix réduit la consommation d’hydrocarbures. En outre, l’incidence de la hausse des prix du pétrole sur les revenus réels entraîne un ralentissement économique et fait baisser encore plus les recettes fiscales.
Graphique 4.5

Taxation de l’essence1

Graphique 4.5

Taxation de l’essence1

1. Les calculs se basent sur un prix de l’essence de EUR 0.60 par litre hors taxes.
En second lieu, les recettes fiscales peuvent progresser du fait de l’augmentation de la valeur de la production de pétrole. Parmi les pays de la zone euro, seuls les Pays-Bas perçoivent des redevances importantes du fait de l’extraction de pétrole et de gaz. Cependant, les compagnies pétrolières sont redevables d’impôts sur les bénéfices des sociétés considérables dans de nombreux pays et leurs bénéfices ont été fortement stimulés par la hausse des prix du pétrole. En outre, deux pays ont adopté des taxes sur les bénéfices « exceptionnels » des compagnies pétrolières : en Italie, les taux de l’impôt sur les sociétés applicables aux compagnies pétrolières ont été relevés en fonction des circonstances économiques et des prix du pétrole, et le Portugal a instauré un impôt exceptionnel sur les réserves des compagnies pétrolières. En définitive, il convient de surveiller de près l’impact des prix de l’énergie sur les recettes et il ne faudrait pas hypothéquer par des engagements de dépenses toute augmentation récente des recettes liée aux prix de l’énergie.
Le prix élevé du pétrole pose d’autres problèmes de politique économique. Certains font valoir que les impôts sur les combustibles devaient être abaissés pour compenser la hausse du prix du pétrole. Dans l’accord de Manchester de 2005, les États membres de l’Union européenne se sont engagés à éviter de prendre des mesures qui stimulent artificiellement la demande de pétrole lorsque les prix sont élevés en effaçant les signaux de prix et en évitant ainsi l’ajustement nécessaire. Mais cet accord autorise les mesures ciblées à court terme pour atténuer l’impact du niveau élevé des prix de l’énergie sur les ménages défavorisés au moyen de paiements forfaitaires ou par augmentation des transferts sociaux. Quelques pays ont annoncé des augmentations de certaines prestations sociales pour faire face à l’accroissement du coût des combustibles. De telles mesures doivent rester exceptionnelles et être ciblées avec soin sur les catégories les plus vulnérables.

Viabilité de la dette

10Le rapport entre la dette publique et le PIB constitue un indicateur de la viabilité budgétaire à long terme parallèlement au solde budgétaire courant, bien qu’il soit nécessaire de prendre en compte les engagements éventuels résultant des politiques courantes afin d’avoir un schéma complet. Au cours de la période 2002-07, la plupart des pays de la zone euro ont réduit le niveau de leur endettement par rapport au revenu national (tableau 4.1). Dans la plupart des pays de la zone euro, mais pas dans tous, le taux de croissance du PIB a excédé le taux d’intérêt implicite sur les emprunts publics et a donc plus que rempli la condition de base de solvabilité. Des excédents primaires substantiels ont fortement contribué à la consolidation dans un certain nombre de pays où la dette a été sensiblement réduite. La contribution potentielle de la croissance du PIB à la réduction de la dette est généralement limitée pour les pays de la zone euro.

Tableau 4.1

Viabilité de la dette

Tableau 4.1
Excédent primaire Intérêt net Croissance Autres1 Variation totale de l’endettement net Autriche –0.2 2.0 –1.4 –1.6 –1.3 Belgique –3.3 3.9 –3.4 –1.2 –4.0 Finlande –2.8 –0.2 2.2 –7.1 –7.9 France 0.6 2.2 –1.5 –2.8 –1.5 Allemagne 0.0 2.3 –1.1 –0.4 0.7 Grèce 0.5 3.8 –5.4 –4.0 –5.1 Irlande –1.2 0.0 –0.5 –1.1 –2.8 Italie –0.9 4.0 –2.9 –1.8 –1.6 Luxembourg –0.1 –0.6 3.5 –0.6 2.1 Pays-Bas –0.9 1.6 –1.3 –0.5 –1.0 Portugal 1.0 2.5 –1.4 –0.3 1.8 Espagne –2.2 1.3 –2.0 –1.3 –4.2 Zone euro –0.5 2.4 –1.9 –1.1 –1.1 1. Écart statistique et marge d’erreur. Source : OCDE, base de données des Perspectives économiques, no 84.

Viabilité de la dette

Contribution à la variation entre 2002 et 2007, annualisée en % du PIB

11La viabilité d’un montant donné de dette dépend en partie du taux d’intérêt auquel le secteur privé est disposé à prêter à l’État. Depuis le début de la crise des marchés de capitaux, les taux d’intérêt à long terme de la dette publique ont augmenté dans de nombreux pays de la zone euro, soit de plus de 50 points de base dans plusieurs cas par rapport aux taux de la dette publique allemande (graphique 4.6), qui a peut-être bénéficié d’un effet de « ruée vers la qualité ». Cette évolution pourrait être une conséquence temporaire de la crise du marché et s’expliquer par des effets de liquidité plus que par une modification permanente de la perception par le marché de la viabilité des différentes situations budgétaires : l’augmentation observée au départ en Irlande a été relativement importante malgré le fait que l’endettement net de l’État représente une part plus faible du revenu que dans la plupart des autres pays de la zone euro. Cependant, cela pourrait aussi dénoter un changement d’appréciation du marché et le retour d’une différenciation permanente de la dette publique européenne. Pour un pays qui connaît une augmentation permanente de 50 points de base du coût de l’emprunt, l’impact en situation d’équilibre sur ses finances publiques est substantiel s’il est lourdement endetté. En outre, pour une grande partie de la dette publique, les échéances sont relativement longues, de sorte que l’incidence d’un changement dans le coût d’emprunt courant n’affecte les finances publiques qu’à la marge. Toutefois, la dette dont l’échéance à l’émission est inférieure à un an représente plus de 15 % du PIB en Italie et au Portugal, de sorte que la situation budgétaire est plus sensible aux taux d’intérêt à court terme dans ces pays [2]. L’épisode actuel nous rappelle les risques que comporte le postulat selon lequel les conditions d’emprunt ne se détérioreront jamais.

Graphique 4.6

Écart au niveau des dettes publiques

Graphique 4.6

Écart au niveau des dettes publiques

Taux d’intérêt à long terme par rapport au taux allemand

12Toutefois, le principal défi pour la viabilité budgétaire à long terme provient des effets du vieillissement démographique et du coût croissant de la santé sur les dépenses publiques plutôt que du stock de dette publique qui figure déjà au bilan?; la valeur actualisée d’ici à 2050 de l’augmentation des dépenses publiques liée au vieillissement pour la zone euro est plus élevée que l’encours actuel de la dette. De nouvelles prévisions concernant la situation budgétaire d’ici 2050 dans le cadre des politiques existantes ont été publiées (CE, 2008) et ont mis à jour la base des données budgétaires les plus récentes estimations publiées en 2006 [3]. Pour la zone euro dans son ensemble, les dépenses liées au vieillissement devraient augmenter de 2.5 % du PIB entre 2010 et 2030, et dépasser ensuite de 4.4 %, en 2050, la part qu’elles représentaient dans le PIB en 2010. Les estimations actuelles des augmentations de coûts sont à peu près conformes à celles de 2006, bien que la réforme des retraites adoptée au Portugal ait fortement contribué à réduire les engagements futurs. Ces estimations à long terme sont entourées d’une grande incertitude et les analyses antérieures effectuées par l’OCDE faisaient apparaître une variation de la charge liée aux soins de santé et à la dépendance supérieure de plus de 3 % du PIB à celle calculée par la Commission (OCDE, 2006a).

13L’une des caractéristiques des mesures prises en prévision du vieillissement démographique est le recours limité au préfinancement des engagements futurs du secteur public, prenant notamment la forme de la constitution de réserves pour les retraites ou de fonds d’investissement souverains parmi les pays de la zone euro. Seuls l’Espagne, la Finlande, la France, l’Irlande et le Portugal ont mis en place de tels dispositifs et les actifs accumulés dans la plupart de ces pays sont faibles en pourcentage du PIB par rapport aux autres pays de l’OCDE possédant des fonds similaires (OCDE, 2008a). Bien que le fait d’alimenter de tels fonds soit équivalent à un amortissement de la dette publique, cela peut permettre d’investir dans des actifs à rendement plus élevé que les obligations publiques, même si en contrepartie le niveau de risque est plus élevé. De plus, cela peut constituer un instrument efficace de communication pour expliquer les problèmes que pose l’augmentation future de la charge représentée par les retraites, et un bon moyen de s’engager dans un assainissement budgétaire significatif et durable. Le préfinancement peut être utile pour obtenir la viabilité budgétaire à long terme s’il se double des réformes nécessaires dans deux domaines, le système de retraite et les structures économiques, afin de réduire le coût futur des retraites et d’accroître le revenu national.

Le Pacte révisé de stabilité et de croissance n’a pas encore été véritablement mis à l’épreuve

14Une profonde révision du Pacte de stabilité et de croissance a été approuvée par le Conseil des affaires économiques et financières (ECOFIN) en mars 2005. Le Pacte de stabilité et de croissance répond à trois objectifs : assurer la viabilité à long terme des situations d’endettement public, éviter une dérive déficitaire au niveau national pour les pays appartenant à l’union monétaire et parvenir à la « neutralité budgétaire », de sorte qu’en temps normal les effets cycliques de la politique budgétaire soient limités aux stabilisateurs automatiques. À première vue, la révision a été une réussite, dans la mesure où les positions budgétaires se sont améliorées et où les procédures de déficit excessif qui restaient ouvertes contre les pays de la zone ont été closes. Une évaluation plus large montre que le Pacte révisé de stabilité et de croissance a permis certaines améliorations de la viabilité budgétaire, bien que plusieurs faiblesses subsistent, et ces progrès sont conformes à l’impression selon laquelle l’amélioration de l’adhésion nationale au processus révisé a fonctionné selon la manière souhaitée.

15Aucun pays de la zone euro ne faisait l’objet d’une procédure de déficit excessif en octobre 2008, alors qu’une procédure avait été lancée contre la Hongrie et le Royaume-Uni. Le Portugal et l’Italie ont fait l’objet de cette procédure de 2005 à 2008. La France, l’Allemagne et la Grèce ont été soumises à cette procédure pendant un certain nombre d’années jusqu’en 2007. Bien que le Pacte révisé ait assoupli légèrement les critères d’identification des déficits excessifs en donnant une définition moins restrictive de la « grave récession économique » et en énumérant expressément plusieurs facteurs à prendre en compte avant de déterminer qu’il y a déficit excessif [4], la double condition selon laquelle le déficit doit rester proche des 3 % du PIB et que le dépassement doit être temporaire avant de pouvoir faire intervenir ces facteurs limite beaucoup la possibilité d’utiliser cette plus grande souplesse pour échapper à la discipline du Pacte : les pays ont été jugés en déficit excessif chaque fois que le déficit dépassait 3 % du PIB. C’est un signe encourageant que les conditions révisées n’ont pas réduit la portée du Pacte, bien que cela puisse aussi s’expliquer par des circonstances économiques relativement favorables. Étant donné que la limite de 3 % du déficit est définie en termes effectifs et non en termes structurels, on ne pourra véritablement tester le Pacte révisé de stabilité et de croissance qu’au fur et à mesure du ralentissement économique.

16La révision de 2005 a renforcé le rôle du « volet préventif » du Pacte de stabilité et de croissance en mettant davantage l’accent sur la viabilité à long terme. Cela complète le « volet dissuasif » en faisant une plus large place aux appréciations économiques dans le système de réglementation. Chaque pays a un objectif précis à moyen terme (OMT) pour le solde budgétaire structurel, qui est un excédent, un équilibre ou un déficit ne devant pas excéder 1 % du PIB. L’OMT a pour objet de faire bénéficier les pays d’une situation structurelle suffisamment forte pour éviter la survenance de déficits réels supérieurs à 3 % du PIB – ce qui déclencherait la procédure de déficit excessif – et pour disposer d’une marge de manœuvre budgétaire à moyen terme. En outre, il vise à préciser davantage ce que serait une politique budgétaire viable à moyen terme. Pour les pays qui n’ont pas atteint leur OMT, il est prévu que le solde budgétaire structurel s’améliorera chaque année de 0.5 point (valeur de référence) le long du sentier d’ajustement. En période de basse conjoncture, les pays disposent d’une certaine marge de manœuvre pour réduire leurs efforts d’ajustement, mais ils doivent progresser plus rapidement que 0.5 point lorsque l’économie connaît une forte expansion. Le renforcement du « volet préventif » du Pacte a eu des résultats variables. En 2007, la moitié des pays de la zone euro n’avaient pas atteint leur OMT (graphique 4.7). Cependant, l’Italie et le Portugal, dont les résultats étaient encore éloignés de leur OMT, ont amélioré leur solde budgétaire structurel d’au moins 1 % du PIB en 2007 et l’Allemagne a également réalisé des progrès notables. Au contraire, l’Autriche, la Belgique et la Grèce n’ont atteint que la norme standard d’environ 0.5 % du PIB. Il n’y a pas eu d’amélioration du solde structurel en France et on a observé un certain dérapage des résultats parmi les pays qui ont déjà atteint leur OMT tels que l’Irlande. Même ce résultat pourrait paraître excessivement favorable étant donné l’incidence de la forte hausse des recettes fiscales sur le niveau des soldes structurels au cours des dernières années. Le Pacte préconise le renforcement des mesures d’assainissement lorsque la conjoncture est favorable, mais compte tenu du caractère transitoire de l’amélioration des recettes publiques, les résultats effectifs ont été inférieurs aux attentes, dans la mesure où la plupart des pays ont tout juste atteint la norme minimum malgré la forte expansion des recettes. L’efficacité de cette approche est sapée par l’absence de définition opérationnelle claire de la « conjoncture favorable » et des progrès supplémentaires souhaitables pour l’amélioration de la situation budgétaire structurelle. La situation de l’économie est principalement appréciée en fonction du niveau et de l’évolution de l’écart de production (CE, 2006), même si l’on tient également compte d’indicateurs complémentaires tels que le taux d’utilisation des capacités. Certes, il est intrinsèquement difficile de mesurer la situation conjoncturelle de l’économie, mais un point de vue commun sur la situation de chaque économie ferait apparaître plus clairement les résultats que chaque pays doit obtenir. En avril 2007, les membres de l’Eurogroupe, qui rassemble de façon informelle les ministres des finances des pays de la zone euro, se sont réunis à Berlin et se sont engagés à cette occasion à respecter leur OMT en 2010 au plus tard, si les conditions conjoncturelles le permettent (Eurogroupe, 2007). En mai 2008, dans un contexte marqué par des perspectives économiques incertaines, les membres de l’Eurogroupe se sont engagés à préserver une situation budgétaire structurelle saine et à progresser dans la réalisation de leur OMT le cas échéant. L’Eurogroupe a donné un signal de plus grande flexibilité en octobre 2008 face à la nouvelle dégradation des perspectives.

Graphique 4.7

Progrès vis-à-vis de l’objectif budgétaire à moyen terme (OMT)

Graphique 4.7

Progrès vis-à-vis de l’objectif budgétaire à moyen terme (OMT)

Solde structurel en pourcentage du PIB
1. L’objectif à moyen terme des Pays-Bas est représenté par le milieu de la fourchette –0.5 à –1.0.

17On constate une amélioration de la mise en œuvre nationale du Pacte, qui renforce ainsi le cadre budgétaire. Par exemple, les pays admettent de plus en plus que les prévisions de la Commission servent de base pour la fixation des objectifs, même si certains États membres ont préféré établir leur programme en vue de remplir leurs engagements sur la base de leurs propres prévisions, plus optimistes. L’utilisation des mesures exceptionnelles a également diminué : cela pourrait s’expliquer par une moindre incitation à recourir à de tels subterfuges du fait que les OMT sont fondés sur la situation structurelle, abstraction faite de telles mesures. Cependant, le report de la charge de l’ajustement budgétaire reste répandu, certains pays prévoyant d’intensifier davantage leurs efforts d’ici trois ou quatre ans que dans l’immédiat (CE, 2008). En mai 2008, la Commission a adressé à la France ses premières « observations », rendues publiques dans le cadre du code de conduite adopté par ECOFIN en 2005, en raison de ses résultats macroéconomiques structurels insuffisants et des retards intervenus dans son assainissement budgétaire. Il n’est pas encore possible de dire quelle sera l’efficacité de ces observations.

18L’une des caractéristiques du volet « préventif » du cadre budgétaire est que les pays ont eu la possibilité de fixer leur propre OMT sans avoir à prendre en compte expressément les impératifs de viabilité à long terme. La plupart des pays de la zone euro ont adopté l’équilibre budgétaire comme OMT. La Finlande a porté son objectif d’excédent budgétaire de 1.5 % à 2 % du PIB en 2006 et la Belgique, dont la dette publique est encore relativement élevée, vise un excédent de 0.5 % du PIB. Les Pays-Bas, le Luxembourg et le Portugal ont comme OMT un déficit. Cette configuration d’objectifs est éloignée des écarts entre les besoins des différents pays, l’Italie et la Grèce se fixant chacune un objectif d’équilibre malgré un endettement élevé et (surtout pour la Grèce) les pressions exercées par le vieillissement de la population, alors que l’Irlande a pour objectif l’équilibre malgré son faible endettement et un programme d’investissement public massif. Les différences d’OMT entre les pays fortement endettés sont particulièrement préoccupantes. Il y a donc lieu de se féliciter que, conformément aux conclusions du Conseil ECOFIN du 9 octobre 2007, de nouveaux OMT prenant en compte les engagements implicites doivent être fixés au printemps de 2009. Pour certains pays, cela devrait entraîner un changement important, mais nécessaire, dans leur stratégie budgétaire à moyen terme, notamment en modifiant le sentier d’ajustement à court terme. Étant donné les problèmes budgétaires qui se posent dans la zone euro, il ne faudrait pas que la nouvelle méthodologie entraîne un assouplissement d’ensemble des normes.

Le rôle de la politique budgétaire dans le cycle économique

19La place de la politique budgétaire dans l’évolution cyclique est restée très différente selon les pays (graphique 4.8). On a assisté à un resserrement de la politique budgétaire en Finlande et en Allemagne tandis que la situation économique s’améliorait. Au contraire, la Grèce et la France auraient dû mener une politique budgétaire plus rigoureuse au cours de la phase d’expansion. L’Italie et le Portugal ont été contraints d’adopter des restrictions budgétaires alors que la situation économique était déprimée. Toutefois, on ne tient pas compte dans ce constat du dynamisme exceptionnel des recettes publiques au cours des dernières années, sans lequel beaucoup de pays auraient dû prendre des mesures d’austérité budgétaire et mener par conséquent, dans certains cas, une politique qui aurait été plus procyclique. Il est possible aussi que le résultat ex post de la politique budgétaire sous-estime la volonté qu’avaient les pouvoirs publics de mener une politique contracyclique car les résultats ont tendance à être plus procycliques que les objectifs sur la base des informations disponibles en temps réel (Cimadomo, 2008).

Graphique 4.8

Cyclicité de la politique budgétaire

Graphique 4.8

Cyclicité de la politique budgétaire

2007
1. Variation du déficit primaire corrigé des fluctuations cycliques.

20En général, rien ne justifie véritablement dans la plupart des pays de la zone euro des mesures discrétionnaires de politique budgétaire lorsque l’économie se ralentit. Dans la zone euro, les stabilisateurs automatiques sont déjà de plus grande ampleur que dans la plupart des autres économies de l’OCDE, et ce pour trois raisons : un secteur public de plus grande dimension, des taux marginaux d’imposition plus élevés et des prestations sociales et une indemnisation du chômage qui sont plus généreuses. En outre, lorsqu’une économie subit un choc négatif à la fois du côté de l’offre et du côté de la demande, il n’y a pas lieu de chercher à stimuler par la politique budgétaire la demande globale au-delà du niveau réduit de la production potentielle. Pour les petits pays, l’impact de la politique budgétaire sera probablement limité en tout état de cause, puisque le multiplicateur sera plus faible du fait de la forte propension à importer (Hoeller et al., 2002). À moyen terme, la plupart des économies de la zone euro devront faire face à des problèmes complexes pour maintenir ou assurer la viabilité budgétaire, ce qui limite la marge de manœuvre en période de ralentissement conjoncturel. Le Pacte de stabilité et de croissance révisé entend ménager cette marge de manœuvre lorsque les pays ont atteint leur OMT, mais peu d’entre eux se trouvent dans cette situation. Toutefois, la crise financière actuelle aggravant le ralentissement économique, les mesures budgétaires de stimulation de la demande peuvent se justifier davantage qu’en temps normal vu le caractère exceptionnel des événements qui se produisent dans le secteur financier. Elles doivent correspondre à des mesures qui peuvent être mises en place rapidement et qui procureront un soutien immédiat à l’économie. Ces mesures devront être rapides, temporaires et ciblées. Les ressources supplémentaires mises en œuvre devront viser les secteurs où elles peuvent contribuer efficacement aux réformes structurelles, tout en soutenant les revenus des ménages les plus pauvres. La viabilité à moyen terme des finances publiques n’étant pas pleinement assurée, les mesures budgétaires devront être temporaires et s’inscrire dans une orientation favorisant à l’avenir la viabilité. La politique la plus appropriée sera fonction des pressions économiques et financières auxquelles les pays se trouvent confrontés, de la situation de départ pour la viabilité à moyen terme, de l’impact budgétaire des mesures de soutien direct du système financier et des effets du financement plus coûteux de la dette.

Aspects budgétaires de l’instabilité financière

21La tourmente financière qui a débuté en août 2007 a eu une incidence relativement limitée sur les situations budgétaires de la zone euro jusqu’en octobre 2008, mais les pressions se sont accentuées depuis lors pour deux raisons : le coût des mesures d’urgence qu’ont prises les gouvernements pour stabiliser les marchés de capitaux et la dégradation des perspectives économiques sous l’influence des événements financiers. L’instabilité financière peut avoir des répercussions budgétaires de trois types. En premier lieu, le recul de l’activité sur les marchés financiers exerce un effet immédiat sur les recettes fiscales, par exemple du fait de la réduction des impôts sur les gains en capital qui résulte de la baisse du nombre de transactions ou de chutes des prix des actifs. En second lieu, le gouvernement peut utiliser ses actifs pour soutenir le système financier. Cela peut se produire à la fois lorsque la banque centrale fournit une aide d’urgence en cas de crise de liquidité et, plus généralement, lorsque les banques sont recapitalisées ou soutenues par d’autres moyens. Une telle intervention peut résulter soit de garanties explicites des pouvoirs publics, notamment dans le cas d’un dispositif d’assurance des dépôts, soit d’une intervention discrétionnaire pour soutenir le système financier. En troisième lieu, l’instabilité financière entraîne un fléchissement de l’activité économique générale, aboutissant à la fois à une augmentation des dépenses et à une réduction des recettes à mesure que les stabilisateurs automatiques entrent en jeu. L’encadré 4.2 examine l’évolution récente et plus ancienne du coût de l’instabilité financière. L’impact budgétaire potentiel de cette instabilité constitue une raison importante de faire en sorte que les activités financières soient efficacement réglementées (chapitre 3).

Encadré 4.2. Coût de l’instabilité financière

L’impact budgétaire de la crise financière actuelle est sensiblement plus marqué depuis que les tensions se sont accentuées sur les marchés de capitaux à la mi-septembre 2008. Un grand nombre de pays de la zone euro et dans le reste du monde ont mis à disposition des financements de grande ampleur pour stabiliser le système financier (voir le chapitre 3). Le plafond pour l’assurance-dépôts dans l’Union européenne a été relevé à 50 000 EUR, voire davantage pour certains pays. L’Allemagne, l’Autriche et la Grèce garantissent expressément tous les dépôts bancaires. Ces mesures alourdissent sensiblement les engagements implicites, puisque les dépôts bancaires représentent dans la plupart des pays de la zone euro environ 60 % du PIB [1]. L’Espagne, la Grèce, l’Irlande et le Portugal ont étendu la garantie à d’autres exigibilités, ce qui peut nettement augmenter les engagements implicites. De plus, dans certains pays, l’État a recapitalisé ou repris certaines institutions financières. Ces opérations sont loin d’être négligeables dans trois pays de la zone euro impliqués dans le sauvetage de Fortis et Dexia, à savoir la Belgique (2.2 % du PIB), le Luxembourg (7.6 %) et les Pays-Bas (3.5 %). En outre, l’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne et la France ont créé des fonds qui sont chargés d’acquérir des institutions financières ou de les capitaliser, ou qui peuvent acquérir d’autres actifs pour stabiliser le système financier. Les financements correspondants restent à débourser, mais pour les pays qui ont mis en place de tels fonds, ceux-ci représentent en général entre 2 et 5 % du PIB. Ces opérations augmenteront en principe le passif et l’actif bruts et pourront n’avoir aucun impact sur le passif net du secteur public [2]. Pour l’ensemble de la zone euro, environ 2 % du PIB ont été affectés au soutien du système financier au moyen d’interventions directes, et des garanties dont la valeur est de l’ordre de 15 % du PIB ont été accordées, en plus de la garantie des dépôts.
L’évolution de ce coût sera fonction de celle de la crise financière et aussi des mesures prises. Les épisodes passés de faillites d’institutions financières et d’instabilité du secteur financier peuvent donner une idée des éventuels résultats : les coûts budgétaires de l’intervention publique dans les crises bancaires peuvent être très importants, même parmi les pays de l’OCDE dont les marchés de capitaux sont très développés. Honohan et Klingebiel (2003) ont procédé à une estimation des coûts budgétaires directs des crises bancaires jusqu’en 2003 (tableau 4.2). Cette évaluation directe inclut les coûts immédiats des défauts de remboursement des prêts de la banque centrale, les injections de fonds propres dans les banques insolvables ou en difficulté, la valeur capitalisée des prêts à des banques ou à des emprunteurs insolvables, et le coût des remboursements aux déposants et autres créanciers. Dans les pays de l’OCDE, la plupart des coûts ont été liés aux recapitalisations. Cette évaluation pourrait surestimer les coûts directs à moyen terme, dans la mesure où elle indique la valeur actualisée nette des soutiens courants s’ils se poursuivent, tandis que les pouvoirs publics pourraient être en mesure de récupérer une partie de leurs dépenses en vendant les participations qu’ils ont acquises dans des institutions en difficulté lorsque la situation des banques et des marchés s’améliorera. Les coûts directs dépendent en partie de la manière dont les autorités décident de réagir. Compte tenu de cet indicateur spécifique des coûts budgétaires, une approche stricte est préférable à une approche accommodante car elle est moins coûteuse à court terme et elle réduit l’aléa moral et, par conséquent, la probabilité de sinistres futurs. Cependant, ces considérations doivent être mises en balance avec les coûts globaux pour les finances publiques et l’impact économique des chocs subis par les institutions financières.
Le tableau 4.2 présente également des estimations des coûts budgétaires correspondant à la perte de production lors des crises précédentes. Dans certains cas, la défaillance d’une institution n’entraîne pas un tel coût, dans la mesure où elle n’a pas d’impact important sur l’économie dans son ensemble. Toutefois, ces coûts peuvent aussi être élevés et il est nécessaire d’arbitrer entre le soutien direct aux banques et l’incidence probable sur l’ensemble de l’économie.
Tableau 4.2

Coût budgétaire des crises bancaires antérieures

Tableau 4.2
Épisode Coût budgétaire direct Coût budgétaire de la perte de production1 Total Australie 1989-1992 1.9 0.0 1.9 Finlande 1991-1994 11.0 11.1 22.1 France 1994-1995 0.7 0.0 0.7 Japon 1992-2 n.d. 9.1 n.d. Nouvelle-Zélande 1987-1990 1.0 6.8 7.8 Norvège 1987-1993 8.0 10.4 18.4 Corée 1997-2 n.d. 3.6 n.d. Suède 1991-1994 4.0 3.6 7.6 États-Unis 1981-1991 3.2 1.8 5.0 1. Sur la base d’une estimation de la croissance de la production tirée du tableau 7 d’Honohan et Klingebiel (2003) et de l’élasticité du solde budgétaire par rapport au PIB tirée du tableau 9 de Girouard et André (2005). Laeven et Valencia (2008) ont fourni d’autres estimations du coût de certains de ces épisodes. 2. Épisode en cours au moment de l’analyse initiale. Le coût fiscal direct n’est pas indiqué pour faciliter la comparaison car ce coût dépend du degré auquel le coût initial peut être récupéré à mesure que se règle la crise. Source : Honohan et Klingebiel (2003) et Girouard et André (2005).

Coût budgétaire des crises bancaires antérieures

En pourcentage du PIB
La tourmente actuelle a mis en lumière le rôle des banques centrales dans l’apport de liquidité aux marchés de capitaux et aux institutions financières (chapitre 1). Cela expose les actifs publics au risque de contrepartie par le biais des opérations monétaires. Bien que l’importance des prêts de la BCE au secteur privé n’ait pas fortement augmenté, les risques que comporte sa position se sont peut-être aggravés dans la mesure où les différentes institutions emprunteuses sont affaiblies et où la qualité des actifs donnés en garantie s’est détériorée, à la fois parce que les différents types d’actifs sont devenus plus risqués et parce que la composition des garanties s’est modifiée. En principe, l’augmentation des marges d’évaluation devrait compenser ce risque, mais il est également possible que celui-ci se soit aggravé. En 2007, la BCE disposait d’un capital égal à environ 5 % de ses actifs, sur lesquels 15 % correspondent à l’encours des refinancements, de sorte qu’elle dispose d’une certaine capacité de résistance à des pertes.

22L’éventualité de crises financières ne joue pas un rôle explicite dans le cadre de la politique budgétaire de l’Union européenne et elle n’est pas directement mentionnée parmi les « circonstances exceptionnelles » dans lesquelles les règles budgétaires peuvent être temporairement transgressées, alors qu’un tel événement peut naturellement être considéré comme échappant au contrôle des pouvoirs publics. De plus, une crise financière future pourrait en définitive entraver le fonctionnement normal de la politique monétaire, soit si les taux d’intérêt devaient être ramenés à leur plancher égal à zéro, soit si la transmission de la politique monétaire devait devenir inefficace en raison des tensions sur les marchés de capitaux. Dans de telles circonstances, des opérations de politique monétaire non conformes à l’orthodoxie financière pourraient être réalisées, mais une politique budgétaire expansionniste dans l’ensemble de la zone pourrait également être nécessaire en dernier ressort. Ces circonstances seraient exceptionnelles et pourraient exiger une réaction ad hoc à la situation spécifique. Malgré tout, il serait utile de réfléchir au cadre le plus adéquat pour faire face à des événements de cette gravité.

23La crise des marchés de capitaux internationaux pose la question de savoir quelles sont les mesures de politique budgétaire qui peuvent être utilisées à des fins de stabilisation. Un changement de l’orientation d’ensemble de la politique budgétaire constituerait probablement un instrument inefficace pour freiner le cycle du crédit, mais il serait possible d’utiliser des instruments budgétaires spécifiques pour renforcer la stabilité financière. Il existe des dispositifs efficaces qui permettent d’assurer une certaine stabilisation automatique. En particulier, l’impôt sur les gains en capital réduit l’incitation à spéculer. Des impôts immobiliers bien conçus réduisent les gains nets d’une valorisation des logements. Les arguments en faveur d’une imposition appropriée des logements sont particulièrement forts de ce point de vue : les données dont on dispose montrent clairement qu’un régime fiscal avantageux du logement accroît l’instabilité des marchés dans ce secteur (van den Noord, 2005). Les impôts immobiliers sont très faibles dans la zone euro et les valeurs estimatives sont inférieures aux prix du marché. En ce qui concerne les autres actifs, les dispositions concernant le report des pertes sur les exercices ultérieurs dans le cadre de l’impôt sur les sociétés pourraient également influer sur la prise de risque en influant sur le rendement fiscal des pertes sur les investissements à risques. Outre les caractéristiques structurelles du système fiscal, des mesures discrétionnaires pourraient être appliquées plus largement pour tenir compte des cycles du crédit et des prix des actifs. Ce type de politique ferait intervenir les mêmes considérations que le recours à la politique monétaire ou à la réglementation pour poursuivre le même objectif, mais il est clair que des changements imprévus et importants concernant, par exemple, les droits de mutation sur les logements peuvent avoir une incidence sur le marché immobilier. De telles mesures présentent, jusqu’à un certain point, les mêmes difficultés que les autres types d’intervention budgétaire pour ce qui est du calendrier à retenir, mais leur mise en œuvre pourrait être plus simple dans ce cas du fait que l’objectif est de faire face à une forte hausse persistante des prix des actifs, et pas de réagir au bon moment à l’effondrement de ces prix. L’expérience montre qu’il pourrait être malaisé de s’engager dans une telle politique en période d’expansion économique car il est politiquement difficile de prendre des mesures susceptibles de réduire les gains prévisibles de la hausse des prix des actifs [5]. Cela justifierait un plus large recours aux stabilisateurs automatiques plutôt qu’à une politique discrétionnaire. Bien que l’on ne dispose guère de données d’expérience sur l’utilisation d’instruments budgétaires lorsqu’il s’agit de naviguer à contre-courant ou lorsque la politique monétaire risque de devenir inefficace, il y aurait lieu d’étudier à moyen terme la conception de ce type d’instruments et de prêter attention aux effets de la conception de la politique budgétaire sur les cycles de crédit et les fortes hausses des prix des actifs.

Les impôts et les dépenses publiques devraient être mieux conçus pour promouvoir la croissance

24L’efficience de l’intervention publique dans l’activité économique constitue un important levier par lequel l’action menée peut contribuer à des résultats économiques satisfaisants à long terme, ainsi qu’à des niveaux de fiscalité conformes aux préférences nationales pour les niveaux de dépenses considérés. Étant donné les pressions qui résultent des dépenses liées au vieillissement de la population et la discipline requise pour parvenir à la viabilité budgétaire, il faut améliorer l’efficience du secteur public afin de fournir des services publics de haute qualité à l’avenir. En tant que telle, la politique budgétaire a un rôle important à jouer dans la réalisation des objectifs de la Stratégie de Lisbonne.

25Des efforts ont été entrepris pour développer l’analyse et la surveillance de la qualité des finances publiques dans le cadre du Pacte de stabilité et de croissance (CE, 2008). Ils relèvent de six aspects de la politique budgétaire qui peuvent avoir une incidence sur la croissance :

  • La taille de l’administration.
  • Le niveau et la viabilité des situations budgétaires.
  • La répartition et l’efficience des dépenses publiques.
  • La structure et l’efficience des systèmes de recettes publiques.
  • Les réglementations et institutions budgétaires qui peuvent influer sur les quatre facteurs énumérés ci-dessus.
  • L’interaction des éléments non budgétaires avec la politique budgétaire, notamment les réglementations concernant les marchés de produits et la protection de l’emploi ainsi que les charges administratives.
Comme le reconnaît la Commission (CE, 2008), la relation entre la politique budgétaire et le bien-être économique et social est difficile à évaluer. Par conséquent, la qualité des finances publiques ne peut pas être traitée exactement de la même manière que l’application des dispositions du traité dans le cadre du Pacte. Toutefois, étant donné le poids des administrations dans les économies nationales de la zone euro, le secteur public joue un rôle très important dans la détermination des résultats d’ensemble. Il faut par ailleurs que les objectifs de viabilité liés au Pacte se traduisent par les politiques les plus efficaces dans les autres domaines, à la fois pour maximiser les avantages du Pacte et pour bénéficier d’une forte adhésion du public.

26Les dépenses publiques représentent en moyenne 45 % du PIB dans la zone euro, chiffre nettement supérieur à la moyenne de l’OCDE. Bien que ces dépenses soient un peu plus faibles en Irlande, au Luxembourg et en Espagne, la plupart des pays de la zone euro ont des administrations d’assez grande dimension. Cela s’explique en partie par un choix de société quant à la question de savoir quels sont les biens et services fournis et par quels moyens, et aussi dans quelle mesure on utilise les dépenses directes pour atteindre des objectifs sociaux plutôt que les incitations dans le cadre du système fiscal [6]. Mais cela peut aussi être le reflet, jusqu’à un certain point, d’une maîtrise insuffisante des finances publiques, caractérisée par une tendance à accroître les dépenses plutôt qu’à améliorer les services rendus grâce à une plus grande efficience. Il est difficile de trouver des données indiscutables concernant la taille optimale de l’administration et son incidence sur la croissance (CE, 2008), faute de pouvoir distinguer correctement les effets de taille des autres caractéristiques de l’intervention de l’État.

27La répartition des dépenses varie beaucoup selon les pays de la zone euro (graphique 4.9). Certaines catégories de dépenses peuvent être plus favorables à la croissance économique que d’autres, bien qu’une mauvaise utilisation des crédits affectés à des catégories utiles de dépenses publiques soit également possible. L’investissement en infrastructures et en capital humain, sous forme de dépenses d’éducation, devrait générer des revenus à l’avenir. Les taux de chômage élevés et les prestations sociales généreuses ont un coût élevé, dû essentiellement à la situation défavorable du marché de l’emploi.

Graphique 4.9

Dépenses totales des administrations publiques par fonction

Graphique 4.9

Dépenses totales des administrations publiques par fonction

En pourcentage du PIB, 2006

28L’investissement en infrastructures représente une faible proportion de l’ensemble des dépenses publiques dans les pays de la zone euro et sa part dans la production est en général beaucoup plus faible qu’au cours des années 60 et 70. L’incidence des infrastructures sur la croissance est difficile à évaluer, d’autant plus que le parc d’infrastructures a tendance à augmenter à mesure que les sociétés s’enrichissent. Un examen récent des travaux réalisés à ce sujet fait apparaître un effet positif, bien que moindre que ne l’indiquaient les études les plus anciennes, et variable en fonction des circonstances particulières (Romp et de Haan, 2007). Cela est confirmé par des travaux empiriques préliminaires de l’OCDE qui font apparaître un impact positif dans certains pays et secteurs, mais plus faible lorsqu’il existe déjà un stock important d’équipements publics. Toutefois, ce n’est pas seulement le montant des dépenses d’infrastructures qui est important, mais aussi l’efficacité de leur conception et de leur utilisation. La propriété publique peut entraver l’utilisation efficiente des infrastructures, tandis qu’une réglementation efficace applicable aux propriétaires d’infrastructures du secteur privé et des mesures telles que l’instauration de redevances d’encombrement sont des moyens efficaces d’utiliser au mieux les ressources en capital.

29L’efficience des dépenses publiques dépend aussi du volume de production dans chaque domaine par rapport au montant des ressources utilisées. L’évaluation du volume de production présente une difficulté intrinsèque étant donné que la plupart des services publics ne sont pas échangés sur des marchés concurrentiels et n’ont pas un prix explicite (Atkinson, 2005). En ce qui concerne l’éducation, les indicateurs de résultats scolaires montrent qu’il est possible de dégager des conclusions fermes quant à la productivité relative des différents systèmes d’éducation sur la base de méthodes d’enveloppement des données, bien que les estimations soient entachées d’une grande incertitude (Sutherland et al., 2007). D’après ces indicateurs, un certain nombre de pays de la zone euro obtiennent des résultats constamment insuffisants. La Belgique, l’Espagne, la Grèce et l’Italie pourraient toutes relever leur score PISA d’au moins 10 % si elles se rapprochaient de la limite d’efficience sans ressources supplémentaires (ou elles pourraient atteindre le même résultat à un coût sensiblement plus faible) [7]. Il existe des possibilités considérables d’amélioration des résultats d’ensemble en faisant en sorte qu’un plus grand nombre d’écoles adoptent de meilleures pratiques au sein de leur pays. Une plus grande autonomie de décision des établissements scolaires et l’évaluation comparative permettent d’atteindre des niveaux d’efficience plus élevés (Sutherland et Price, 2007). Le suivi périodique des élèves tend à améliorer l’efficience, alors que des écoles de petite taille et une sélection fondée sur la résidence s’accompagnent d’une moindre efficience. Le renforcement de la flexibilité et de la responsabilité pourrait relever sensiblement le pourcentage de diplômés d’universités dans un certain nombre de pays de la zone euro, et l’absence de frais de scolarité réduit l’incitation des établissements d’enseignement supérieur à répondre aux attentes de leurs étudiants et l’incitation des étudiants à optimiser leurs études (Oliveira Martins et al., 2007), outre l’augmentation du coût pour le contribuable et l’insuffisance de financement de l’enseignement supérieur qui en résulte. L’analyse de l’efficience des dépenses de santé est plus difficile, notamment parce que les avis divergent davantage quant aux indicateurs appropriés de performance (Häkkinen et Joumard, 2007).

30La façon dont la fiscalité est conçue pour obtenir un certain niveau de recettes a une incidence sur la croissance et le bien-être (Johansson et al., 2008). L’imposition de la consommation a moins de répercussions sur les résultats économiques que les impôts sur le revenu des personnes physiques, ces derniers étant au reste moins nocifs que les impôts sur les bénéfices des sociétés. Le dosage approprié dépend en partie de la préférence de la société pour l’équité dans la mesure où les impôts sur la consommation ont tendance à imposer une charge relativement lourde aux ménages les moins favorisés. Dans beaucoup de pays de la zone euro, l’efficience C de la taxe sur la valeur ajoutée est faible, ce qui signifie qu’il y a beaucoup d’exonérations, de sorte que la base d’imposition réelle est beaucoup plus étroite que la base d’imposition potentielle [8]. Le faible niveau d’efficience C montre que des gains seraient possibles non seulement en termes d’efficience économique, mais aussi d’égalité, en élargissant l’assiette de la TVA. Des impôts immobiliers bien conçus offrent la possibilité d’augmenter les recettes publiques en occasionnant encore moins de distorsions économiques que les impôts sur la consommation. Toutefois, dans plusieurs pays de la zone euro, les impôts immobiliers sont mal conçus et le prélèvement fiscal correspondant est également faible. Par conséquent, dans ces pays, il y a de nombreuses raisons de réformer ces impôts, à la fois pour améliorer l’efficience économique et pour éviter l’instabilité financière.

31Le rôle de la politique budgétaire est particulièrement important étant donné que, dans la zone euro, beaucoup d’autres éléments ne favorisent guère la performance économique (chapitre 1). En particulier, la réglementation des marchés de produits entrave la concurrence dans de nombreux pays et la réglementation du marché du travail est très stricte (graphique 4.10). En outre, l’effet conjoint des systèmes d’impôts et de prestations sociales applicables à la main-d’œuvre peut être préjudiciable à l’emploi (Bassanini et Duval, 2006). Des coins fiscaux élevés peuvent également accroître le chômage lorsque les coûts minimums de main-d’œuvre sont élevés en réduisant la possibilité de transférer la charge sur la main-d’œuvre. Des réformes bien conçues de la fiscalité et des dépenses seraient donc souhaitables pour améliorer les résultats économiques. Les principales recommandations de ce chapitre concernant la politique budgétaire sont résumées dans l’encadré 4.3.

Graphique 4.10

Les politiques structurelles sont moins orientées vers le marché

Graphique 4.10

Les politiques structurelles sont moins orientées vers le marché

1. Échelle de 0 à 6, du moins au plus restrictif.
2. Impôt sur le revenu plus cotisations salariales et patronales moins prestations en espèces en pourcentage des coûts salariaux pour un couple marié disposant d’un seul revenu et ayant deux enfants, à 100% du salaire moyen.
3. Moyenne non pondérée.
Source : OCDE (2007), Objectif croissance – Réformes économiques?; OCDE (2008), Les impôts sur les salaires 2006/2007?; Conway, P., V. Janod et G. Nicoletti (2005), « Product Market Regulation in OECD Countries: 1998 to 2003 », Documents de travail du Département des affaires économiques de l’OCDE, n° 419, OCDE, Paris. StatLink : http:// dx. doi. org/ 10. 1787/ 526560506837

Encadré 4.3. Principales recommandations de politique budgétaire

  • Les stabilisateurs automatiques, qui jouent un rôle relativement important dans l’UE, peuvent aider à amortir le ralentissement économique, dans le respect du plafond de déficit de 3 % du PIB. Les pays qui subissent un ralentissement plus marqué et qui ont une marge de manœuvre pourraient prendre des mesures temporaires et ciblées.
  • L’application des « facteurs exceptionnels et temporaires » instaurée par le Pacte révisé de stabilité et de croissance, qui permet des manquements limités et temporaires à la règle des 3 %, ne doit être utilisée qu’avec parcimonie afin de ne pas affaiblir l’effet dissuasif de cette règle.
  • L’évaluation des soldes budgétaires structurels et de la situation budgétaire sous-jacente devrait donner davantage d’importance aux informations obtenues à partir d’une analyse détaillée des recettes publiques et à la variabilité des élasticités fiscales afin d’obtenir une image plus claire du rôle des prix des actifs et de l’évolution des autres facteurs économiques.
  • La méthode de fixation des objectifs à moyen terme en vertu du Pacte devrait tenir compte avec plus de rigueur des engagements implicites liés au vieillissement démographique et permettre une meilleure appropriation nationale de ces objectifs. Il faudrait aussi envisager un plus large préfinancement du coût budgétaire du vieillissement parallèlement à des réformes des retraites et des réformes structurelles.
  • Il faudrait aller plus loin dans le sens d’une réalisation viable des objectifs à moyen terme en décidant plus clairement et plus objectivement des cas dans lesquels il y a lieu d’accomplir des progrès plus importants que le minimum requis.
  • Il faudrait faire en sorte de renforcer la contribution de la politique budgétaire à l’amélioration du niveau de vie. Les pays de la zone euro pourraient tirer avantage de mesures d’optimisation des dépenses pour l’éducation et la santé. De nouvelles modifications du dosage des impôts devraient être envisagées, cette décision relevant néanmoins de chaque pays. Un ferme cadre de gouvernance budgétaire pourrait également contribuer à la viabilité des dépenses sociales et accroître d’une façon générale l’efficience des dépenses.

Bibliographie

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Notes

  • [1]
    L’indicateur peut être ajusté d’une manière discrétionnaire en fonction de tous les postes exceptionnels qui ne sont pas pris en compte dans les transferts nets en capital.
  • [2]
    Eurostat ne publie pas de données ventilant la dette des pays selon qu’elle est à taux fixe ou à taux variable, mais tout pays dont la dette est dans une forte proportion à taux variable pourra être également touché.
  • [3]
    Les nouvelles prévisions se bornent à mettre à jour les dépenses liées au vieillissement dans les pays qui ont sensiblement réformé leur système de retraite. Les estimations ont été également élargies au revenu net du patrimoine de l’État, élément qui est relativement négligeable dans presque tous les cas et qui représente un faible montant compte tenu de l’incertitude qui entoure de telles prévisions. Les mises à jour pour 2009 reposeront sur des projections démographiques révisées.
  • [4]
    Les « circonstances exceptionnelles » sont définies comme un événement inhabituel qui échappe au contrôle du gouvernement et qui a une incidence majeure sur le solde budgétaire, ou une récession économique grave comportant soit une baisse annuelle du PIB, soit une insuffisance cumulative de la production pendant une période prolongée du fait de la faiblesse de la croissance. Les nouveaux motifs instaurés par le Pacte révisé sont les suivants : i) mise en œuvre de réformes structurelles, ii) dépenses d’encouragement à l’innovation et à la R-D, iii) assainissement budgétaire antérieur en période de forte croissance économique, iv) situation d’endettement viable, v) qualité des finances publiques et vi) contributions financières en vue de favoriser la solidarité internationale et d’atteindre les objectifs de l’Union européenne.
  • [5]
    Voir par exemple, l’encadré 7.1, « Allégements fiscaux en faveur du logement et volte-face de la politique », OCDE (2006b).
  • [6]
    Voir l’encadré 3.1 : « Quelle est l’importance de la protection sociale?? », OCDE (2008b).
  • [7]
    En portant le niveau d’efficience à au moins 95 centile. Voir le graphique 12 de Sutherland et al. (2007).
  • [8]
    L’efficience C est définie comme le rapport entre les recettes effectives de TVA et la consommation, divisé par le taux normal de TVA.
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