Notes
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[*]
LAREA-FSEG, Université de Dschang.
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[**]
LAREA-FSEG, Université de Yaoundé II-Soa.
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[1]
Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale.
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[2]
Economic and Monetary Community of Central Africa.
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[3]
Auteur correspondant. E-mail : davom99@gmail.com.
Les auteurs tiennent à remercier vivement les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leurs critiques et suggestions pertinentes, qui ont permis d’améliorer substantiellement la version préliminaire de cet article. Ils remercient également Mireille Sandji, Blaise Gnimassoun, Samuel Guérineau, Alexandru Minea, Landry Bikai et Joseph Keneck Massil pour la relecture des versions antérieures de ce papier. Ils restent, toutefois, seuls responsables des éventuelles erreurs ou insuffisances qui pourraient encore subsister dans le texte. -
[4]
Cf. les différentes études menées pour évaluer les multiplicateurs budgétaires après la mise en œuvre des plans de relance (Ilzetzki et al., 2013 ; Auerbach et Gorodnichenko, 2013 ; Kraay, 2014 ; Minea et Mustea, 2015 ; etc.).
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[5]
Par exemple l’incitation fiscale pour stimuler la recherche-développement.
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[6]
Les unions monétaires ont été créées il y a cinquante ans et ont précédé l’intégration commerciale. Il convient de signaler que cette antériorité de l’intégration monétaire a facilité le processus d’intégration.
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[7]
Elle comprend six pays membres : Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et République centrafricaine.
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[8]
Elle comprend huit pays membres : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.
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[9]
La BEAC est la banque centrale commune aux six pays membres de la CEMAC.
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[10]
Les indicateurs de surveillance multilatérale s’apprécient comme les conditions nécessaires pour le respect des critères de convergence. Ce sont des critères de second rang regroupés dans un tableau de bord macroéconomique. Ils sont composés de six groupes de variables et indicateurs : (i) les variables relatives à la production des biens et services ; (ii) les variables relatives aux finances publiques et à la dette ; (iii) les variables relatives à la monnaie ; (iv) les variables relatives à la balance des paiements ; (v) les indicateurs d’intégration communautaire ; (vi) les indicateurs sociaux.
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[11]
Le Comité de convergence de la zone franc a défini les indicateurs complémentaires de convergence en 2005 et 2006. L’objectif de ces derniers est de mieux apprécier l’effort des autorités pour mettre en œuvre la convergence structurelle. Ainsi, les indicateurs qui font l’objet d’un suivi dans les rapports de surveillance multilatérale sont : (i) le solde budgétaire de base structurel rapporté au PIB nominal, qui doit être positif ou nul ; (ii) le solde budgétaire de base hors pétrole rapporté au PIB hors pétrole, qui doit être positif ou nul ; (iii) le solde budgétaire primaire hors pétrole, en pourcentage du PIB hors pétrole, qui doit être positif ou nul ; (iv) le taux d’inflation sous-jacente, dont la norme est inférieure ou égale à 3 %.
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[12]
Il est défini comme la différence entre les recettes totales hors dons et les dépenses totales hors investissements financés sur ressources extérieures.
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[13]
Une dépense ordonnancée ou mandatée par l’État et non payée après 120 jours est considérée comme un arriéré.
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[14]
Il faut relever à ce niveau qu’une variable muette capte toutes les modifications intervenues dans l’année considérée. En particulier, s’agissant de l’année 1994, on pourrait inclure dans cette variable la création de la CEMAC et la dévaluation du franc FCA.
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[15]
L’article 1er de la directive du 3 août 2001 présente les critères de convergence comme « des variables macroéconomiques dont le non-respect peut entraîner l’adoption par le Conseil des ministres d’une directive à l’encontre de l’État membre concerné lui demandant d’élaborer et de mettre en œuvre un programme d’ajustement approprié ».
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[16]
Selon la Banque mondiale, elle consiste en des dépenses pour des ajouts aux immobilisations corporelles de l’économie, plus les variations nettes des inventaires.
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[17]
La population active totale comprend les personnes âgées de 15 ans et plus (généralement 64 ans, qui est l’âge de départ à la retraite), correspondant à la définition de la population active économiquement de l’Organisation internationale du travail. Cette définition comprend à la fois les travailleurs et les demandeurs d’emploi.
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[18]
Voir par exemple Levin et al. (2002), Im et al. (2003), etc.
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[19]
Elle vaut 0 pour les pays de la CEMAC (UEMOA) avant 2001 (1999) et 1 après.
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[20]
Les estimations faites avec les « dummies pays » n’améliorent guère les résultats, même s’ils ont tendance à valider la significativité de l’inflation seulement.
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[21]
Il convient de relever que ces différents facteurs expliquent aussi globalement le déficit de croissance des pays membres de la CEMAC.
1 – Introduction
1La crise financière internationale de 2007-2008, qui s’est rapidement muée en une crise économique, a renouvelé l’intérêt pour l’analyse de la politique budgétaire. C’est dans cette perspective que les différents plans de relance engagés dans presque tous les États à travers le monde ont permis de raviver les débats sur les vertus stabilisatrices de cet instrument de régulation conjoncturelle. En effet, l’ampleur de la crise financière internationale a contraint les gouvernements à intervenir massivement avec des coûts budgétaires estimés à 4,5 % du PIB aux États-Unis et 3,9 % du PIB dans la zone euro (Laeven et Valencia, 2013). En Afrique, si la crise des années 1980 avait contraint plusieurs pays à mettre en place des plans d’ajustement structurels (PAS) se traduisant par des restrictions budgétaires de grande ampleur, celle de 2008 s’est en revanche accompagnée d’un assouplissement budgétaire, notamment dans les pays pétroliers disposant d’excédents de ressources, à travers l’adoption des politiques contra-cycliques suggérées et soutenues par le Fonds monétaire international (FMI), à des fins de protection des couches les plus vulnérables.
2La mise en œuvre de ces différentes politiques, tout en agissant positivement sur la croissance économique [4], expose plus particulièrement les pays appartenant à une union monétaire à des risques de dérapages budgétaires se traduisant par des effets de débordements et des externalités négatives en termes de gonflement des dettes, de déficits publics, etc. La crise de la zone euro en est une parfaite illustration. Elle remet surtout en cause la stratégie du choix de l’euro sans un approfondissement de l’union budgétaire (Bénassy-Quéré et al., 2016).
3La politique budgétaire constitue, avec la politique monétaire, l’un des principaux leviers de la politique économique de l’État. Elle consiste à utiliser certains instruments budgétaires (dépenses publiques, endettement public, prélèvements fiscaux, etc.) pour influer sur la conjoncture économique. De ce fait, elle peut exercer des effets favorables à long terme sur la croissance de deux manières : directement en stimulant la formation de capital, l’emploi et l’innovation, ou indirectement en influençant les décisions des agents économiques [5]. Cependant, ces effets positifs dépendent de deux principales conditions. La première est proposée par les économistes libéraux pour qui la politique budgétaire ne peut stimuler la croissance économique au-delà du niveau déterminé par les facteurs de production et le progrès technologique dans une perspective de long terme, ceci en fournissant un environnement stable et prévisible permettant le fonctionnement optimal des différents marchés d’une part, et en maintenant un niveau et une structure de la fiscalité et des dépenses publiques qui soient les plus favorables à la production d’autre part. La deuxième condition est fondée sur l’incohérence temporelle des politiques économiques mise en évidence par Kydland et Prescott (1977). En effet, il est apparu qu’au même titre que la politique monétaire, la politique budgétaire est soumise à cette incohérence temporelle, et de ce fait sujette à un biais pour le déficit. Celui-ci procède soit de la tragédie des biens communs de Hardin (1968) transposée au domaine budgétaire par Weingart et al. (1981), soit du court-termisme caractéristique de l’horizon des décisions des autorités politiques au détriment des objectifs de long terme (Cukierman et Meltzer, 1989 ; Alesina et Tabellini, 1990).
4De l’autre côté, dans une perspective de court terme, si la politique budgétaire peut efficacement jouer le rôle de régulation conjoncturelle, il s’avère que son utilisation active génère également d’importantes instabilités en termes de volatilité de la production (Fatas et Mihov, 2003) et de l’inflation (Rother, 2004). Bien plus, dans leur étude, Fatas et Mihov (2003) ont mis en évidence une relation négative entre la volatilité de la production et la croissance économique à long terme. S’il est véritablement établi que l’utilisation discrétionnaire de la politique budgétaire réduit la croissance, alors les gains en termes de bien-être à retirer de la limitation du pouvoir des autorités publiques pourraient être importants (Barlevy, 2004).
5La solution aux différents problèmes de stimulation de la croissance à long terme et de la stabilisation macroéconomique à court terme, auxquels fait face la politique budgétaire, est de soumettre la conduite de celle-ci aux règles, afin de donner aux agents privés une parfaite information ainsi qu’une parfaite visibilité sur les inflexions à venir, et de constituer un point d’ancrage pour leurs anticipations.
6Au sein d’une union monétaire en particulier, ces règles permettent également dans le cadre d’un policy mix équilibré de coordonner les politiques budgétaires nationales et la politique monétaire commune. Leur nécessité est renforcée pour au moins trois raisons supplémentaires. La première est la limitation des conflits d’objectif lorsque les décisions sont prises séparément sans aucune concertation (Buti et al., 2001 ; Foresti, 2013). La deuxième raison, développée respectivement par Sanchez (2013) et Hughes Hallett et al. (2014), met l’accent sur la complexité au sein d’une union monétaire des interactions stratégiques entre les politiques budgétaires et monétaires, qui expose de façon permanente les autorités de la politique économique au problème de free riding. La troisième raison est relative à l’affaiblissement de la crédibilité de la Banque centrale dans son engagement anti-inflationniste, ce qui résulterait d’une gestion discrétionnaire des politiques budgétaires (Dixit et Lambertini, 2001, 2003 ; Sanchez, 2012 ; Badaru et Levieuge, 2013).
7Les problèmes soulevés ces dernières années par la gestion des règles budgétaires au sein de l’Union européenne interpellent fortement les autorités des pays de la zone franc qui se sont inspirées de la démarche européenne pour construire leur intégration. Pour ces derniers pays en effet, la nécessité des règles budgétaires, voire du fédéralisme budgétaire, s’est imposée au milieu des années 1990 à la suite d’au moins deux événements majeurs. En premier lieu, l’échec des PAS, préconisés par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale dans le but d’aider ces pays à sortir de la sévère crise économique des années 1980, a rendu inévitable la dévaluation du franc CFA en 1994. La réussite de cette opération exigeait un encadrement des politiques budgétaires nationales, dont la gestion indisciplinée avait été considérée comme un élément déclencheur de la crise économique (Devarajan, 1997 ; Stasavage, 1996). En deuxième lieu, le choc de la dévaluation de 1994 a donné l’occasion aux décideurs publics de la zone franc de relancer le processus d’intégration, en panne depuis plusieurs années malgré une incontestable originalité [6]. Globalement, à travers cette relance, les réformes initiées visaient à consolider la coopération monétaire en intégrant la dimension réelle de l’intégration économique. L’évolution la plus importante a été la création, en mars 1994, de la CEMAC [7] pour remplacer l’Union douanière des États de l’Afrique centrale (UDEAC) qui existait depuis 1964, mais dont les résultats en matière de coopération et d’échanges sont restés parmi les plus faibles de tous les regroupements régionaux du monde. La CEMAC est désormais constituée de l’Union monétaire d’Afrique centrale (UMAC), qui est chargée de la dimension monétaire de l’intégration, et de l’Union économique de l’Afrique centrale (UEAC) pour les aspects de l’économie réelle. Il convient de préciser que les mêmes réformes ont été menées dans l’autre composante africaine de la zone franc où l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) [8] a remplacé l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA), créée en 1963. Cette nouvelle stratégie repose désormais sur la définition des règles de coopération dans différents domaines (transports, énergie, forêts, etc.). Elle s’est également appuyée sur les travaux qui mettent l’accent sur le rôle des institutions dans le processus d’intégration (De Melo et al., 1993). Ces différentes réformes ont non seulement permis aux pays de la CEMAC de préparer leurs économies respectives à s’adapter progressivement aux mutations de l’économie internationale dans le cadre de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), mais bien plus à atténuer les effets du choc lié au rattachement de leur monnaie à l’euro en 1999. Une des composantes importantes de ce vaste programme de réformes a été l’élaboration d’un dispositif de coordination des politiques économiques, essentiellement basé sur des règles budgétaires.
8À l’origine, le dispositif de la surveillance multilatérale en Afrique centrale a été mis en place en 1993 et administré par la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) [9]. Cependant, après la signature du traité de la CEMAC en 1994, cette gestion a été confiée au Conseil des ministres de la zone pour s’assurer du suivi collégial des politiques macroéconomiques. En vertu du titre III de la convention régissant l’UEAC de 1994, ratifiée en 1999, ce suivi a été transféré au Secrétariat exécutif de la CEMAC en 2001, transformé en Commission de la CEMAC depuis 2007. La directive du 3 août 2001 a fixé les critères et les indicateurs macroéconomiques de convergence. Suivant une démarche globale, afin de renforcer la coordination du processus de convergence dans les deux sous-zones, il a été institué en septembre 1999 un Comité de convergence de la zone franc. Ce comité joue le rôle d’instance technique de coordination entre les institutions de l’UEMOA, de la CEMAC, des Comores et de la France.
9Dans la CEMAC plus spécifiquement, la coordination des politiques macroéconomiques est organisée autour des critères de convergence, des indicateurs de surveillance multilatérale [10] et des indicateurs complémentaires de convergence [11]. Au nombre de quatre, les critères de convergence représentent le socle du mécanisme de coordination. Si, globalement, ces critères ont de solides justifications théoriques et empiriques, ils souffrent néanmoins d’un certain nombre de critiques. Il convient de préciser que ces débats ne sont pas exclusifs à la CEMAC. Les mêmes réflexions ont alimenté et continuent d’alimenter les débats dans d’autres unions monétaires en Europe et en Afrique de l’Ouest notamment.
10Le premier critère porte sur le solde budgétaire de base [12], qui doit être positif ou nul. Le ciblage de cette variable fondamentale de la politique budgétaire répond à plusieurs objectifs. En effet, un excédent budgétaire permet d’apurer l’intégralité des intérêts de la dette d’un État, d’assurer une partie du financement de ses investissements et d’exercer un rôle déterminant dans la gestion des chocs spécifiques qui peuvent affecter son espace économique. Cependant, trois séries de limites ont pu être mises en évidence dans les différentes évaluations de ce dispositif. En premier lieu, tel qu’il est défini, ce solde budgétaire autorise le financement d’investissements sur des ressources financières mobilisées à l’extérieur au détriment d’emprunts intérieurs à l’Union sans aucun fondement théorique (Guérineau et Guillaumont Jeanneney, 2014). En second lieu, il présente l’inconvénient de s’éloigner de la réalité, puisqu’il n’intègre pas l’aide extérieure qui occupe pourtant une place importante dans les finances publiques des pays de la CEMAC (Avom, 2007). Cet éloignement est plus marqué dans la mesure où sa définition n’autorise qu’un équilibre ou un excédent permanent, interdisant l’éventualité d’un déficit même en cas de forte récession (Guérineau et Guillaumont Jeanneney, 2014). En troisième lieu, à l’exception de la Centrafrique (dont le sous-sol regorge néanmoins d’importants gisements miniers), tous les pays membres de la CEMAC sont des producteurs de pétrole. En conséquence, d’importantes ressources financières tirées de l’exploitation de ces produits primaires permettent aux différents pays de respecter assez aisément le critère du solde budgétaire de base positif ou nul sans qu’un véritable effort d’ajustement budgétaire soit fait par les États.
11Le deuxième critère porte sur l’inflation dont le taux en glissement annuel doit être inférieur ou égal à 3 %. Bien que ce seuil ne fasse pas l’objet d’un consensus au sein de la CEMAC, il existe toutefois dans la littérature de solides justifications théoriques et empiriques. En effet, l’objectif de stabilité des prix est considéré comme la contrainte que les autorités monétaires s’assignent pour assurer l’ancrage nominal. Il a été en outre retenu pour au moins deux raisons complémentaires : d’une part, le principe de cohérence de Tinbergen et d’autre part, l’existence d’une relation forte entre la quantité de monnaie en circulation et le niveau général des prix. Sur le plan empirique, les études de McCandless et Weber (1995), King (2002) et De Grauwe et Polan (2005) montrent globalement l’existence d’une corrélation entre le taux de croissance de la quantité de monnaie en circulation et le niveau général des prix. L’étude menée par Mankiw et al. (1992) a montré que l’inflation a des coûts sur la croissance économique. Dans le cadre d’une union monétaire comme la CEMAC en particulier, sur la base de la contribution pionnière de Fleming (1971) qui postule que les pays membres doivent avoir un différentiel de taux d’inflation minimal pour éviter les solutions isolationnistes et des politiques de dévaluation compétitive, le ciblage de cet indicateur permet une minimisation des écarts d’inflation entre les pays membres de la zone et prévient, de ce fait, les risques de mésalignement des taux de change réels (Owoundi, 2016) et de détérioration de la compétitivité (N’Kodia, 2011). En outre, il convient de mentionner que cette cible est proche de l’objectif de la zone euro, lié à la fixité et à la marge donnée par les contrôles existant sur les flux de capitaux.
12Cependant, malgré ces fondements théoriques, empiriques et contextuels, le FMI (2014) émet des sérieuses réserves sur la pertinence de ce critère dans le cadre de la surveillance multilatérale, au motif qu’il relève davantage de la politique monétaire commune confiée à la BEAC que des politiques budgétaires mises en place au niveau national. Dans la même perspective, l’on peut également s’interroger sur le choix d’un seuil d’inflation de 3 % retenu par les autorités de la CEMAC. Globalement, la définition numérique de l’objectif d’inflation peut, compte tenu de la diversité conjoncturelle, paraître trop basse, et induire des coûts potentiels en termes d’activité économique et d’emploi, tout en exposant les pays de la CEMAC au risque déflationniste. À long terme, c’est le chiffre de 3 % qui est lui-même contestable bien que pouvant être considéré comme une politique pro-pauvre contribuant à la préservation du pouvoir d’achat des personnes pauvres, plus vulnérables aux fortes variations des prix.
13Le troisième critère est relatif à l’endettement public, dont le taux doit être inférieur ou égal à 70 % du PIB. En effet, les conséquences d’un endettement excessif sont particulièrement coûteuses pour les finances publiques et la maîtrise de celui-ci est devenue depuis plusieurs décennies un enjeu majeur de la politique budgétaire en général (Creel et Sterdyniak, 1995). Cependant, dans l’ensemble les différentes tentatives réalisées pour mettre en évidence les conséquences en termes de perte de croissance économique d’un endettement public excessif aboutissent à des résultats contradictoires (Panizza et Presbitero, 2012 ; Reinhart et al., 2012 ; Pescatori et al., 2014). À ce niveau aussi, les mêmes réserves pourraient être émises à l’endroit du seuil d’endettement public fixé à 70 % du PIB qui ne constitue pas une garantie contre les problèmes d’insolvabilité et d’illiquidité. À cet effet, il convient surtout de souligner que cet indicateur ne renseigne pas véritablement sur le caractère soutenable de la dette et nécessite, pour une meilleure appréciation de son évolution, une analyse approfondie des conditions de son financement (N’Kodia, 2011). En particulier, Ary Tanimoune et Plane (2005) ont relevé dans l’UEMOA, en prenant l’exemple du Bénin, que les accumulations structurelles d’arriérés de paiements publics ont conduit ce pays à passer plusieurs fois devant le Club de Paris sans pour autant avoir franchi le seuil des 70 %, alors que d’autres pays, qui avaient largement dépassé ce pourcentage, n’avaient pas connu les mêmes difficultés. En plus, depuis la fin des années 1990, la mise en place de différentes opérations de désendettement initiées par la communauté financière internationale au titre de l’initiative Pays pauvres très endettés (PPTE), a largement contribué à la stabilisation puis à la forte baisse du ratio d’endettement de l’ensemble des pays membres de la zone CEMAC. Dans un tel contexte, le seuil de 70 % fixé par les autorités se révèle ainsi inefficace pour limiter l’endettement des pays et surtout pour protéger leur croissance économique contre ce supposé « fléau ».
14Le quatrième critère prescrit la non-accumulation des arriérés [13] intérieurs et extérieurs sur la gestion de la période courante. Ce critère permet d’évaluer les difficultés de financement que pourraient rencontrer les pays membres de la zone franc en général, et ceux de la CEMAC en particulier. En effet, le fonctionnement de la zone franc se caractérise par un strict encadrement des déficits budgétaires assuré par des instituts d’émission au travers des différents mécanismes institutionnels. En situation de basse conjoncture et en l’absence d’une politique monétaire accommodante pour y remédier, on assiste quasi automatiquement à la formation d’arriérés de paiement internes et externes. Dans ce cas bien précis, le rôle des retards de paiement s’apparente à celui d’une variable d’ajustement budgétaire et génère des effets néfastes. Plusieurs pays de la zone ont utilisé ce canal pour financer leurs déficits budgétaires, participant ainsi à l’appréciation des taux de change réels qui s’est soldée par la dévaluation du franc CFA intervenue en 1994 (Stasavage, 1996). La principale critique adressée à ce critère est la difficulté liée à son évaluation qui dépend de la volonté des autorités nationales des pays membres qui, la plupart du temps, cherchent à véhiculer une bonne image de leur pays en masquant les mauvaises performances de leurs économies.
15Après ce bref rappel des critères du dispositif de la surveillance multilatérale, l’objectif qui est fixé à ce papier est de vérifier si leur mise en œuvre a contribué substantiellement à l’amélioration des performances macroéconomiques, notamment la croissance économique dans la CEMAC. Plus spécifiquement, il s’agit d’étudier l’impact du respect de chaque critère de convergence sur la croissance économique observée. Autrement dit, les pays qui respectent les critères enregistrent-ils de meilleures performances en termes de croissance économique ? À notre connaissance, jusqu’à ce jour, une telle problématique n’a pas encore été étudiée empiriquement dans la CEMAC. La plupart des travaux consacrés à la convergence dans la zone franc se sont limités à une évaluation empirique de l’effectivité de la convergence (respect ou non des critères) en mobilisant essentiellement les outils statistiques (Avom, 2007). Les travaux recourant aux techniques économétriques ont, quant à eux, procédé à l’estimation de la sigma-convergence portant sur les différentes valeurs ciblées par les critères et indicateurs de convergence des pays de l’UEMOA et de la CEMAC (Ary Tanimoune et Plane, 2005 ; Fouda Owoundi, 2009 et N’Kodia, 2011). D’autres études, notamment celle réalisée par Guillaumont Jeanneney et Tapsoba (2011), montrent que les critères de convergence de l’UEMOA créent un biais pro-cyclique plus fort de la dépense publique pendant les récessions que dans les autres pays africains. De même, Ary Tanimoune et al. (2008) mettent en évidence l’existence d’un effet de seuil de l’effort budgétaire sur l’output gap conditionnellement au taux d’endettement public des pays de l’UEMOA. Cette dernière étude semble assez proche de la problématique de cet article. Mais elle s’en écarte toutefois dans la mesure où elle évalue l’effet global des politiques budgétaires sur le produit intérieur brut, et non pas l’effet des critères de convergence sur la croissance économique. Par ailleurs, elle porte uniquement sur les pays de l’UEMOA, dont les caractéristiques économiques se distinguent fortement de celles des pays de la CEMAC.
16À la suite de cette introduction, la structure de cet article se présente comme suit. La seconde section expose la méthodologie adoptée en apportant les justifications théoriques au choix du modèle et les différentes variables, présente les données, les traitements qui ont été apportés ainsi que les tests réalisés. La troisième section présente et analyse les résultats des différentes estimations. La quatrième, quant à elle, conclut et souligne les mesures de politiques économiques pour les différents acteurs de la CEMAC.
2 – Méthodologie
17La méthodologie sera déclinée en deux temps. Premièrement, nous présentons la spécification du modèle et ses fondements théoriques. Deuxièmement, les différentes variables sont justifiées, les données ainsi que les tests appropriés présentés.
2.1 – Spécification théorique et dérivation de la forme estimable
18Pour évaluer l’impact de la mise en place des critères de convergence sur la croissance économique des pays membres de la CEMAC, nous nous inspirons du modèle de Mankiw et al. (1992). C’est un modèle de croissance de Solow (1956), augmenté du capital humain. L’éducation est assimilée à un capital faisant l’objet d’une accumulation comme dans le modèle de Lucas (1988). La production a trois usages. Elle est tout d’abord considérée comme un investissement classique, ensuite comme une dépense en éducation et enfin comme une dépense de consommation. Il existe dans le modèle de Mankiw et al. (1992) deux variables intensives : le capital physique par travailleur et le capital humain par travailleur, induisant une source supplémentaire d’hétérogénéité des taux de croissance. C’est donc une fonction de production avec deux stocks de capital au lieu d’un. Mankiw et al. (1992) montrent que leur fonction de production augmentée du capital humain permet également de rendre compte de façon satisfaisante des écarts de revenu par habitant, toujours en contrôlant (ou en éliminant) l’influence du taux d’épargne et de la croissance démographique. Enfin, les écarts de capital humain, ajoutés aux écarts de capital physique par tête, permettent de rendre compte empiriquement des écarts de revenu par habitant. Dans ce modèle, les rendements marginaux restent décroissants dans chacun des deux stocks de capital (physique et humain), ce qui suffit pour conserver les conclusions de Solow sur le rattrapage (conditionnel) des économies.
19La forme canonique du modèle de Mankiw et al. (1992) est spécifiée de la manière suivante :
21Y est le PIB en volume, K le capital physique, H le capital humain, L le travail. A représente le progrès technique, supposé neutre. ε est une perturbation aléatoire. La forme log-linéaire du modèle (1) est donnée par :
24Cette équation est ensuite spécifiée en panel, puisque l’article porte sur un ensemble de pays (Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, République centrafricaine et Tchad). À cet effet, en considérant les dimensions temporelle et individuelle, on retient la forme suivante :
26où α0 est le logarithme du progrès technique. Sous cette spécification, φi est l’effet fixe pays, μt l’effet fixe temporel et εit le reste de la perturbation.
27Dans les travaux empiriques, l’équation (3) est rarement estimée sous cette forme. Elle est généralement augmentée des variables de contrôle ou d’intérêt, dans l’optique de capter certains effets spécifiques. Dans le cadre de cet article, le modèle de base est augmenté premièrement de deux variables muettes qui capturent la mise en place des dispositifs de surveillance multilatérale dans la CEMAC, et deuxièmement de quatre variables dyadiques qui capturent le respect des critères de convergence. L’objectif ici n’est pas de mesurer la vitesse de convergence dans la CEMAC, mais d’apprécier comment la mise en œuvre des critères de convergence et l’effort réalisé par les pays en matière de respect de ces critères ont impacté la croissance économique. À cet effet, la démarche adoptée procède en deux temps.
28Dans un premier temps, nous essayons de savoir si la mise en œuvre des critères de convergence, réalisée en 1994 et 2001, a structurellement eu un impact positif et significatif sur la croissance observée dans les différents pays de la CEMAC. Il convient de rappeler que les premiers critères de convergence ont été adoptés en 1994 avec la création de la CEMAC, et redéfinis en 2001 dans le cadre du Pacte de convergence et de croissance. La prise en compte de ces deux réformes est captée par deux variables muettes, Dum1994 et Dum2001 respectivement. Elles prennent la valeur 0 avant 1994 (respectivement 2001), et la valeur 1 après 1994 (respectivement 2001). Cette approche, qui capte l’effet global de la mise en œuvre des réformes sur la croissance économique, est modélisée dans l’équation (4) [14] ci-après :
30Dans un deuxième temps, nous captons l’effet du respect de chaque critère par les pays sur leur sentier de croissance. Cet article retient pour la modélisation les quatre critères de convergence présentés dans l’introduction, à cause de leur prééminence (généralement considérés comme les critères de premier rang) [15] et de l’évaluation qui en est faite chaque année (disponibilité des données). Il s’agit du critère de l’inflation (C1), du critère du solde budgétaire de base hors dons (C2), du critère d’endettement (C3) et du critère de la non-accumulation des arriérés de paiement (C4). Cette approche, qui s’avère plus fine, attribue la valeur 1 au critère si celui-ci est respecté par un pays donné pour une année donnée, et 0 sinon. La spécification retenue pour capter ces effets spécifiques liés aux critères est alors la suivante :
32Les données sur les critères de convergence de 1994 à 2001 n’étant pas disponibles, nous retenons par conséquent la période allant de 2001 à 2013.
2.2 – Présentation des variables, description des données et tests de diagnostic
33Trois groupes de variables sont utilisés dans cet article. Le premier est composé uniquement du taux de croissance économique qui est la variable endogène, notée y. Il est mesuré comme le taux de pourcentage annuel de croissance du PIB au prix du marché. Il peut, selon Romer (2001), être mis en relation avec les autres variables traditionnelles du modèle de croissance. Toutefois, à cause de la volatilité de cette variable, nous retenons finalement le taux de croissance du PIB par tête. Le deuxième groupe est constitué de variables explicatives traditionnelles du modèle de croissance. Il s’agit : (i) du capital physique (k), mesuré par la formation brute de capital, encore appelée investissement intérieur brut [16]; (ii) du capital humain (h), mesuré par le taux brut d’inscription scolaire. Il correspond au pourcentage de la population ayant été inscrite à un niveau d’études – ici le secondaire – au moment où les personnes se sont retrouvées dans le groupe d’âge correspondant au niveau d’étude en question. La mesure de cette variable est largement discutée dans la littérature. Contrairement aux approches qualitatives qui fournissent des résultats moins biaisés, cette mesure postule que le rendement d’une année d’éducation est le même dans les pays (Altinok, 2006 ; Hanushek et Woessmann, 2007) ; (iii) du travail (l), mesuré par la proportion de la population active [17] par rapport à la population totale. Enfin, le troisième groupe est constitué de la variable d’intérêt, relative à la mise en place des dispositifs de surveillance multilatérale de 1994 et de 2001 et au respect des critères de convergence. Elle est mesurée comme une variable muette. Dans sa construction structurelle (modèle 4), elle est capturée par deux muettes qui prennent la valeur 1 avant 1994 et avant 2001, et 0 après ces deux dates. Dans sa considération spécifique au respect des critères (modèle 5), elle est égale à 1 en t si, à cette date, le pays j a respecté le critère i donné, et 0 sinon.
34Les données sont extraites de deux principales bases : le World Development Indicators de la Banque mondiale pour les variables quantitatives, la BEAC et les différents rapports de la surveillance multilatérale de la CEMAC pour les données sur la convergence. Deux périodes différentes sont retenues dans cette étude, à savoir la période 1975-2013 pour l’effet structurel et la période 2001-2013 pour l’effet spécifique au respect des critères de convergence. Les statistiques descriptives des différentes variables quantitatives (incluant celles du test de robustesse) sont synthétisées dans le tableau 1.
Statistiques descriptives des variables
Statistiques descriptives des variables
35La validité d’une étude en panel nécessite la réalisation de certains tests de diagnostic, dans l’optique de garantir la robustesse des résultats. Dans ce papier, nous effectuons particulièrement les tests de racine unitaire, d’endogénéité et de validité des instruments, la méthode des variables instrumentales étant choisie pour l’estimation des modèles. S’agissant de la stationnarité en particulier, plusieurs tests sont utilisés pour les données de panel [18], leur pertinence dépendant de la nature de l’échantillon et/ou des données. Ainsi, en présence d’un échantillon non cylindré, d’un nombre d’années trop grand par rapport au nombre de pays (ce qui est le cas dans cet article où T = 39 et N = 6), c’est le test de Fisher qui est généralement indiqué (Choi, 2001). Ce test est spécifié suivant plusieurs lois, à savoir l’inverse du Khi-Deux, l’inverse de la loi de Gauss, le logit inversé et l’inverse modifié du Khi-Deux. En adoptant une spécification avec tendance et dérive (constante), nous obtenons les résultats reportés dans le tableau 2. Ces résultats montrent que toutes les variables sont globalement stationnaires en niveau selon toutes les spécifications.
Tests de racine unitaire des variables quantitatives
Tests de racine unitaire des variables quantitatives
Note : ***, ** et * : significatif à 1 %, 5 % et 10 % respectivement.36Par ailleurs, le modèle de croissance, dans sa spécification empirique, pose un problème d’endogénéité lié au fait que la plupart des variables explicatives sont corrélées au terme d’erreur. Dans ce contexte, l’utilisation des moindres carrés ordinaires sur données empilées ou des estimateurs tels que ceux des effets fixes et/ou des effets aléatoires conduisent à des résultats généralement biaisés. Pour corriger efficacement un tel biais, l’on fait généralement recours à l’estimateur GMM en différences premières d’Arellano et Bond (1991), ou GMM en système de Blundell et Bond (1998). Toutefois, ces estimateurs ne sont robustes que lorsque le nombre d’individus ou de pays (N) est supérieur au nombre d’années (T) (Roodman, 2007). L’échantillon étant constitué des 6 pays de la CEMAC et l’étude couvrant la période 1975-2013, il paraît alors évident que l’application d’une telle méthode aboutisse à des résultats peu concluants. Pour contourner cette contrainte, on pourrait également être amené à estimer le modèle sur des sous-périodes (où T = 5 ans par exemple), notamment avant et après la date de la réforme dans l’optique de capter l’effet structurel. Mais étant en présence d’un échantillon non cylindré, le nombre d’observations requis pour une étude économétrique ne serait pas toujours garanti. Bien plus, l’effet structurel étant capté par une variable dummy, la probabilité d’observer une multicolinéarité parfaite entre cette variable et le terme constant serait très forte ; ceci parce que les pays de l’échantillon sont tous membres de la même zone d’intégration, et ont la même référence en ce qui concerne la date de prise en compte de l’effet structurel (année de la réforme). Une dernière solution est d’augmenter le nombre de pays et de capter l’effet recherché à l’aide d’une autre variable dummy. Mais la construction d’une telle variable est impossible, car l’effet recherché, qui s’apparente à un break structurel, ne couvre pas toute la période d’étude.
37Pour toutes ces différentes raisons, nous recourons à l’estimateur des variables instrumentales (IV), qui s’apparente à l’estimateur des doubles moindres carrés (2MC). Ce dernier est efficace lorsque l’on soupçonne un biais d’endogénéité, et lorsque le modèle est non cylindré sous sa spécification en données de panel. Toutefois, des questions relatives à l’identification du modèle, au repérage des variables endogènes, au choix des instruments ainsi qu’à leur validité restent toujours largement discutées.
38L’identification des variables endogènes est faite à partir du test de Durbin (1954), Wu (1973) et Hausman (1978) et la validité des instruments à partir du test de Sargan (1958). Ainsi, en soupçonnant le capital physique (Romer, 1986) et le capital humain (Lucas, 1988) comme étant des variables endogènes dans la relation de croissance, la statistique de Fisher, issue du test de Durbin-Wu-Hausman, est égale à 0,24, avec une p-value de 0,7835. Ce résultat conduit au rejet de l’hypothèse d’exogénéité. Ces variables sont ensuite instrumentées par leurs différences premières. Quant au test de Sargan, il renseigne qu’on ne peut pas rejeter la validité des instruments choisis au seuil de 1 %.
3 – Résultats et interprétation
39À partir des modèles (4) et (5) spécifiés ci-dessus, nous estimons deux types d’effets : un effet structurel et des effets spécifiques.
3.1 – Estimation de l’effet structurel
40Pour capter l’effet structurel de la surveillance multilatérale dans la CEMAC, nous appliquons l’estimateur des variables instrumentales sur un panel formé des six pays de la CEMAC couvrant la période 1975-2013, avec prise en compte des conditions initiales des pays (PIB par tête de 1975). Nous régressons à cet effet, pour le modèle de base, le taux de croissance du PIB (y) sur le capital physique (k), le capital humain (h) et la main-d’œuvre (l). Les deux variables d’intérêt sont DUM1994 et DUM2001, le capital physique et le capital humain ayant été instrumentés par leurs différences premières. Ces variables d’intérêt captent l’effet structurel des réformes budgétaires intervenues en 1994 et 2001. Les résultats de l’estimation, qui sont contrôlés par les variables muettes temporelles, conduisent à deux principaux enseignements (voir tableau 3).
Effet structurel des critères de convergence sur la croissance en zone CEMAC
Effet structurel des critères de convergence sur la croissance en zone CEMAC
Note : les nombres entre parenthèses sont les Z-stat.***, ** et * : significatif à 1 %, 5 % et 10 %.
41En premier lieu, les variables traditionnelles donnent des résultats ambigus par rapport aux prédictions théoriques. En effet, si le stock de capital explique positivement le taux de croissance des économies de la CEMAC, le capital humain (lorsqu’il est pris en compte), a en revanche tendance à le détériorer. L’une des explications possible serait liée à la qualité même de cette variable dans le contexte des pays de l’échantillon considéré. Ainsi, d’une manière générale, les pays d’Afrique sub-saharienne présentent, par rapport à la moyenne mondiale, des structures d’éducation et de formation de qualité médiocre, caractérisées par un faible ratio enseignants/élèves. À titre d’exemple, la Banque mondiale (2003) estime, à partir d’une enquête effectuée au Cameroun, qu’environ 29 % d’adultes (22-44 ans) ne savent ni lire, ni écrire. Ce retard a tendance à s’accumuler et à se répercuter sur le niveau général de l’éducation et donc sur la productivité de la main-d’œuvre. Des résultats similaires expliquant le lien négatif entre le capital humain et la croissance ont été obtenus dans la littérature empirique (Lau et al., 1991 ; Pritchett, 2000 ; Islam, 1995). En particulier, estimant les effets de l’éducation par niveau scolaire pour cinq régions, Lau et al. (1991) trouvent que le niveau primaire a un effet négatif en Afrique et dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, est non significatif en Asie du Sud et en Amérique Latine, et positif seulement en Asie de l’Est. Une explication théorique de ce résultat a été proposée par Altinok (2006), Hanushek et Woessmann (2007). En effet, selon ces auteurs, l’idée qu’une année d’éducation dans un pays donné procure un rendement identique dans un autre pays n’est pas toujours vérifiée (cas des pays riches et des pays pauvres). Ainsi, les travaux empiriques qui prennent en compte les indicateurs quantitatifs de l’éducation aboutissent à des résultats biaisés, dans le sens où ils considèrent le capital humain comme un facteur de production homogène. Une autre explication (empirique) est liée à la sophistication des techniques d’estimation, comme cela est le cas dans cet article. Plus surprenant encore, ces techniques démontrent que l’éducation agit négativement sur le revenu agrégé, et parfois de façon très significative (Gurgand, 2006). La main-d’œuvre (population active) se présente comme un facteur déprimant la croissance dans la CEMAC. Toutefois, elle est non significative lorsqu’elle est conjointement prise en compte avec le capital humain.
42En second lieu, les règles budgétaires de la surveillance multilatérale, adoptées en 1994 puis modifiées en 2001, n’ont pas fondamentalement favorisé la croissance dans la sous-région. Si l’effet semble élevé et positif, il est cependant non significatif, comme le montre la spécification la plus complète (estimation [6]) qui prend en compte conjointement les deux réformes, le capital humain ayant été exclu à cause de l’absence d’observations. Ce résultat confirme celui d’Ary Tanimoune et Plane (2005), qui trouve dans le cas de l’UEMOA un effet incertain du Pacte de convergence sur les performances des pays membres.
43L’estimation de l’effet structurel peut sembler excessif et contre-intuitif puisque l’on modélise la convergence comme une variable globale qui tient simplement compte d’un changement de situation. À cet effet, nous essayons d’affiner l’analyse en mettant en évidence les effets du respect par les États membres des critères de convergence pris individuellement sur la croissance économique.
3.2 – Estimation des effets spécifiques des critères de convergence
44Afin de capter l’effet spécifique de chaque critère de convergence, nous estimons le modèle (5). Pour cela, nous retenons, en fonction de la disponibilité des données sur les critères de convergence, la période 2001-2013 (la prise en compte des conditions initiales des pays ici fait référence au PIB par tête de 2001). En procédant à une estimation par la méthode IV comme précédemment, nous obtenons les résultats consignés dans le tableau 4. Ces derniers montrent que le stock de capital physique, lorsqu’il est significatif, tend à détériorer la croissance économique dans la CEMAC. Ce signe pourrait se justifier non seulement par l’absence, mais bien plus par la qualité du capital disponible. Selon qu’il soit physique (infrastructures) ou financier (crédits), la qualité du capital (mauvais état des infrastructures de transport et de communication par exemple) ainsi que son accessibilité (rationnement de crédit dans un contexte de surliquidité bancaire) ne garantissent pas une croissance élevée et durable dans la sous-région. En revanche, la main-d’œuvre potentielle se présente comme un moteur de croissance dans la CEMAC. Main-d’œuvre qualifiée ou non, ce facteur, qui est le plus abondant dans cette sous-région, conforte la théorie des dotations factorielles, malgré le renouvellement de la théorie du commerce international, et s’impose toujours dans une certaine mesure comme un fondement de l’explication de la spécialisation de certains pays en développement. Toutefois, en considérant individuellement les critères de convergence, quatre enseignements peuvent se dégager.
45Le respect du critère d’inflation a un effet positif mais non significatif sur la croissance économique (estimation A). Cet effet devient très faiblement significatif au seuil de 10 % en l’absence du capital humain, lequel s’avère être un gros « consommateur » de degrés de liberté, réduisant considérablement la taille de l’échantillon (estimation B). Mais ce respect ne résulte pas systématiquement de la mise en œuvre de politiques spécifiques destinées à contenir les pressions inflationnistes. En effet, l’évolution de l’inflation semble davantage influencée par la transmission des fluctuations des prix internationaux sur les marchés des matières premières et des chocs internes exogènes tels que la sécheresse. Par ailleurs, la Banque centrale ne dispose pas d’instruments appropriés pour contrôler l’inflation, surtout lorsque celle-ci semble provenir des dépenses budgétaires. De plus, le seuil de 3 % ne correspond pas au taux d’inflation optimal, selon de nombreux auteurs (Sarel, 1996 ; Khan et Senhadji, 2001 ; Combey et Nubukpo, 2008 ; Bikai et Kamgna, 2012). Toutefois, il convient de relever que la stabilité monétaire et financière, objectif de la Banque centrale, peut affecter indirectement la croissance économique. Elle permet par exemple aux activités productives de bénéficier d’un environnement stable et porteur de prospérité. Ainsi, dotés de structures et de perspectives financières solides, les opérateurs économiques, qui constituent ainsi de meilleurs risques pour les établissements de crédit, sont plus disponibles pour solliciter l’appui des banques, qui peuvent éventuellement combler leurs besoins de liquidité en recourant aux guichets de la BEAC dans le cadre de sa politique de refinancement. Il apparaît en conséquence qu’une inflation modérée et faiblement volatile est un des déterminants de la croissance économique et du financement des économies.
46Le respect du critère du solde budgétaire de base hors dons a tendance à exercer un effet dépressif sur l’activité des économies de la CEMAC (estimations C et D). Ce critère contraint les États à plus d’austérité dont l’objectif, à terme, est de dégager une épargne budgétaire et de garantir la qualité de la dépense publique. Il encourage également les politiques budgétaires pro-cycliques, ce qui accentue la volatilité des cycles (Guillaumont Jeanneney et Tapsoba, 2011).
47Toutefois, le niveau critique nécessaire pour stimuler significativement la croissance économique n’est pas encore atteint. Dans plusieurs États, cette politique d’austérité se traduit par la baisse des dépenses d’investissement et même de consommation, ce qui conduit à un sous-investissement en infrastructures de base, et donc à une fragilisation de la dynamique de croissance et du système productif (Ary Tanimoune et Plane, 2005).
Effets spécifiques des critères de convergence sur la croissance économique en zone CEMAC
Effets spécifiques des critères de convergence sur la croissance économique en zone CEMAC
Note : les nombres entre parenthèses sont les Z-stat.***, ** et * : significatif à 1 %, 5 % et 10 %.
48Le respect du critère de la dette publique est négativement corrélé à la croissance dans la CEMAC (estimations E et F), privant les différents pays des ressources pour répondre aux énormes besoins d’investissements. En effet, respecter le seuil d’endettement se traduit certes par un service de la dette moins important vis-à-vis des bailleurs de fonds, donnant plus d’opportunités aux États quant à la capacité de financement des activités locales. Mais, il convient toutefois de relever qu’un endettement excessif peut se traduire par un détournement d’activité, sous la forme d’un effet d’éviction traduisant le risque de réaction des anticipations des ménages suite à un déficit non anticipé. Le théorème dit d’« équivalence ricardienne », encore appelé théorème « Ricardo-Barro », a popularisé les mécanismes psychologiques de réaction des ménages face à un déficit financé par l’endettement. Un argument de poids, en vogue au cours des années récentes, est la « Fiscal Theory of Price Level » (FTPL), selon laquelle le déficit budgétaire et l’endettement non anticipé qui lui est associé entraineraient une hausse du niveau général des prix.
49Enfin, le critère des arriérés de paiement reste également non significatif (estimations G et H). En effet, les arriérés de paiement sont un signal du manque de crédibilité du gouvernement à faire face à ses engagements. Or, dans la plupart des pays de la CEMAC, l’économie est structurée autour des marchés publics qui alimentent les petites et moyennes entreprises, lesquelles, toutes choses étant égales par ailleurs, sont supposées créer de la valeur ajoutée. Même s’il existe un débat quant à leur comptabilisation, il convient toutefois de relever que leur accumulation obère la croissance économique, notamment dans certains pays comme la RCA, le Congo et le Tchad.
50En captant l’effet des critères dans un modèle unique (estimations I et J), les résultats ne sont guère améliorés. Seuls les arriérés de paiement restent faiblement significatifs dans la spécification sans capital humain.
51Les estimations « courtes » (2001-2013) évaluent si la croissance est plus élevée dans un pays l’année où un critère de convergence est respecté. Elles supposent donc que l’effet est immédiat, et ne s’intéressent qu’aux différences de croissance entre les pays membres. Elles ne peuvent évaluer l’effet global du dispositif, car si celui-ci augmentait la croissance moyenne de tous les pays, cet effet serait capté dans la constante. Pour capturer l’effet propre à chaque pays, nous calculons le coefficient de corrélation entre le taux de respect du nombre de critères (pourcentage du nombre de critères respectés sur le total) par an et le taux de croissance économique dans chaque pays. Les résultats de cette analyse reportés dans le tableau 5 montrent de manière globale une absence de relation entre les deux indicateurs, ce qui conforte nos premiers résultats.
Corrélation entre le taux de respect des critères de convergence et la croissance
Corrélation entre le taux de respect des critères de convergence et la croissance
Note : le seuil de significativité choisi est 5 %.52Ces résultats semblent en définitive montrer que la croissance économique observée d’après les données officielles, manifestement plus forte en CEMAC que dans l’UEMOA et d’autres régions d’Afrique est, au moins pour une large part, imputable aux exportations pétrolières et plus généralement des matières premières qui bénéficient de l’effet prix sur les différents marchés. La place cruciale occupée par le pétrole dans les économies des pays de la CEMAC est assez bien illustrée dans le tableau 6.
Part du pétrole dans le PIB, le budget et les exportations (2014) des pays de la CEMAC
Part du pétrole dans le PIB, le budget et les exportations (2014) des pays de la CEMAC
53Cependant, il conviendrait de relever qu’au sein de la CEMAC, il existe une forte hétérogénéité structurelle dans la production pétrolière qui semble bien évidemment avoir entravé le processus de convergence macroéconomique.
4 – Analyse de la sensibilité des résultats
54Pour valider la non-significativité de la mise en place des critères de convergence sur la croissance économique dans la CEMAC, nous effectuons deux tests de sensibilité. Le premier intègre les conditions initiales des pays ainsi que certaines variables macroéconomiques. Le second intègre dans les échantillons les pays membres de l’UEMOA. Il est conduit en deux temps : nous estimons d’abord les effets structurels et spécifiques dans deux modèles différents (un pour la CEMAC et l’autre pour l’UEMOA), et ensuite les mêmes effets dans un modèle unique, dans l’optique de capter l’efficacité du dispositif de surveillance multilatérale dans la zone franc africaine globalement en matière de croissance économique.
4.1 – Sensibilité des résultats aux conditions initiales et aux variables de contrôle
55Afin de procéder à la vérification de la stabilité des signes des variables d’intérêt, nous augmentons les modèles (4) et (5) de quelques variables de contrôle. Il s’agit notamment :
- du taux d’ouverture (TO), entendu en première approximation comme le rapport du commerce total de marchandises au PIB (il s’agit de l’ouverture observée qui se distingue de la politique d’ouverture). Dans la littérature, le lien ouverture/croissance transite par deux principaux canaux : le canal des exportations et le canal des importations. En ce qui concerne le premier canal, les exportations sont une source de revenu qui favorise l’investissement. Quant au second, les importations peuvent notamment booster la croissance à travers le transfert de technologies et favoriser le learning by doing (Grossman et Helpman, 1992). L’effet attendu est positif ;
- du nombre de lignes téléphoniques fixes (Tel). C’est une variable proxy du capital public ou des infrastructures au sens de Barro et Sala-I-Martin (1990). L’effet attendu est positif, car le développement infrastructurel facilite l’accès aux biens publics, qui présentent des rendements d’échelle et favorisent des externalités positives vis-à-vis de l’économie ;
- des crédits à l’économie en pourcentage du PIB (Cred). L’impact des crédits à l’économie sur la croissance peut être évalué à travers les variations du taux d’intérêt. Une étude menée par Nubukpo (2002) conclut par exemple qu’un choc positif sur les taux directeurs de la BCEAO (politique monétaire restrictive) se traduit par un effet négatif sur la croissance économique. L’effet attendu serait donc positif ;
- de la profondeur financière (Pf). Dans la littérature économique, le lien entre développement financier et croissance économique a conduit à deux principales conclusions. La première met en évidence l’existence d’une corrélation positive (King et Levine, 1993). La deuxième quant à elle établit une évolution croissante (par exemple Ravallion [1995], Dollar et Kraay [2001]). L’effet attendu est positif, car les systèmes financiers apportent le financement nécessaire à l’accumulation du capital, et favoriseraient, de ce fait, la diffusion des nouvelles technologies. Ainsi, un système financier bien développé est capable de mobiliser l’épargne et de l’orienter vers des investissements rentables tout en garantissant une forte profitabilité (Bassanini et Scarpetta, 2001) ;
- du taux d’inflation (Inf). La relation entre l’inflation et la croissance est généralement étudiée par l’intermédiaire de l’investissement. À cet effet, la plupart des travaux montrent que l’investissement pâtit d’une forte inflation (voir Edey [1994], Bruno et Easterly [1998], etc.). On s’attendrait ainsi à un effet négatif, en raison de l’augmentation attendue du coût des facteurs ;
- du volume des réserves (Res). De manière générale, les réserves de change sont positivement liées à la croissance, car leur accumulation déprécie la monnaie locale et permet de relancer les exportations (Dooley et al., 2003), dans la mesure où leur détention peut être considérée comme une forme de subvention (Jeanne, 2012). De plus, les réserves de change, bien que coûteuses à court terme, génèrent des gains de productivité à long terme selon la thèse du learnig by exporting (Korinek et Deven, 2010). L’effet associé à une telle variable serait positif. Il conviendrait de préciser cependant que la contrepartie de la garantie illimitée accordée au franc CFA par le Trésor français traduite à travers la centralisation de 50 % des réserves de change des pays membres de la zone franc dans le « compte d’opérations », contraint ces pays à geler une partie importante de leurs ressources, si bien que la relation positive entre les réserves de change et la croissance sera moins robuste dans cet espace économique. Bien plus, en agissant comme un goulet dans le court terme, cette centralisation pourrait être considérée comme un facteur d’instabilité de par la difficulté potentielle des pays membres à accéder à des intrants importés ;
- du taux de change effectif réel (TCER). Une surévaluation significative du TCER tendra à freiner la croissance économique alors qu’une évolution contraire aura pour effet de l’accélérer. En d’autres termes, le désajustement du taux de change (notamment la surévaluation) est considéré comme néfaste pour la croissance, car il diminue la compétitivité internationale du pays. Il peut conduire à une réduction de l’efficience économique, à travers une mauvaise allocation des ressources, une augmentation du capital et un affaiblissement de la profitabilité dans les industries où les prix relatifs sont réduits (Edwards, 1988 ; Sekkat et Varoudakis, 1998).
56Les conditions initiales sont prises en compte ici, comme le PIB par tête de l’année initiale, car si certains pays de la CEMAC ont des niveaux de PIB par tête initial inférieur à un certain seuil, les effets externes ne seront pas suffisants pour entretenir la croissance.
57Ainsi, en augmentant les modèles (4) et (5) de ces variables, et en les estimant par la même méthode, nous obtenons les résultats reportés dans le tableau 7. Ils indiquent que malgré la prise en compte des conditions initiales et des variables macroéconomiques de contrôle, la surveillance multilatérale n’a pas été favorable à la croissance économique dans la CEMAC. Toutes les dummies structurelles et celles relatives au respect des critères de convergence sont restées sans effet sur la croissance.
Sensibilité des résultats aux conditions initiales et aux variables de contrôle macroéconomiques
Sensibilité des résultats aux conditions initiales et aux variables de contrôle macroéconomiques
Note : les nombres entre parenthèses sont les écarts-types.*** p < 0.01, ** p < 0.05, * p < 0.1.
4.2 – Sensibilité des résultats en présence des pays de l’UEMOA
58En vue de généraliser les résultats obtenus dans cet article, il semble important de les mettre en perspective avec ceux des pays membres de l’UEMOA, l’autre composante majeure africaine de la zone franc. En effet, les deux unions monétaires ont adopté les mêmes critères de convergence sensiblement à la même période (8 décembre 1999 pour l’UEMOA et 3 août 2001 pour la CEMAC). Il est donc utile de se demander si la mise en œuvre des dispositifs de la surveillance multilatérale a produit les mêmes résultats dans les deux unions. Pour y parvenir, nous re-spécifions les équations (4) et (5), et nous augmentons l’échantillon avec les pays de l’UEMOA. Nous estimons ensuite les deux types d’effets étudiés dans cet article, à savoir l’effet structurel (2001 pour la CEMAC et 1999 pour l’UEMOA), capté par la variable « réforme » [19] (tableau 8) sur la période 1975-2013, et les effets spécifiques des critères (tableau 9) sur la période 2001-2013.
Sensibilité des résultats aux réformes de 2001 (CEMAC) et de 1999 (UEMOA)
Sensibilité des résultats aux réformes de 2001 (CEMAC) et de 1999 (UEMOA)
Note : les nombres entre parenthèses sont les Z-stat.*, ** et *** : significatif à 1 %, 5 % et 10 %.
Sensibilité des résultats du respect des critères de convergence avec les pays de l’UEMOA
Sensibilité des résultats du respect des critères de convergence avec les pays de l’UEMOA
Note : les nombres entre parenthèses sont les Z-stat.*, ** et *** : significatif à 1 %, 5 % et 10 %.
59Le modèle, lorsqu’il est contrôlé par les dummies temporelles [20] et estimé par la méthode des variables instrumentales, fournit des résultats similaires, à savoir une absence de lien causal entre la mise en œuvre des critères de convergence et la croissance économique dans les deux unions. Les résultats sont insensibles aux différentes spécifications (CEMAC, UEMOA, UEMOA et CEMAC). Le résultat quant à l’effet spécifique des réformes est ambigu. En effet, aucune spécification du tableau 8 ne montre clairement comment le respect des critères de convergence pris globalement parvient à expliquer positivement et significativement la croissance des États membres de la CEMAC.
5 – Explication des contre-performances du dispositif de la convergence sur la croissance
60La convergence des économies implique que celles-ci tendent à s’homogénéiser progressivement. Or, les économies de la CEMAC sont caractérisées par de profondes hétérogénéités qui réduisent l’efficacité du processus de convergence (voir graphique 1). Ces hétérogénéités illustrent les difficultés à définir des critères de convergence communs à tous les pays membres de la CEMAC et à s’accorder sur les seuils optima d’une part, et les difficultés pour des pays subissant des chocs asymétriques récurrents à respecter des critères identiques d’autre part. Ces hétérogénéités sont multiples et peuvent se résumer selon deux types : les hétérogénéités structurelles et les hétérogénéités macroéconomiques.
Hétérogénéités dans la CEMAC
Écart du PIB par tête à la moyenne en USD (1964-2013)
Écart du PIB par tête à la moyenne en USD (1964-2013)
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du PIB par tête
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du PIB par tête
Écart d’inflation à la moyenne en % (1986-2013)
Écart d’inflation à la moyenne en % (1986-2013)
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du taux d’inflation
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du taux d’inflation
Écart du taux de change effectif réel (2000-2013)
Écart du taux de change effectif réel (2000-2013)
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du TCER
Moyenne de l’écart par rapport à la moyenne du TCER
Hétérogénéités dans la CEMAC
61Parmi les hétérogénéités structurelles, on relève les inégalités de taille de la population, celles liées aux dotations en ressources naturelles en général et pétrolières en particulier, qui sont les principales sources de financement des pouvoirs publics dans cinq des six pays de la zone. En effet, parmi les pays de la CEMAC, seule la Centrafrique ne tire pas ses ressources publiques de l’exploitation du pétrole. De plus, au sein des pays pétroliers, la dépendance des ressources budgétaires au pétrole est très inégale. À titre d’illustration, alors que la Guinée équatoriale tire plus de 85 % de ses recettes budgétaires du pétrole, le Cameroun en tire à peine 20 %. Globalement, cette dépendance au pétrole ne s’accompagne pas d’une amélioration significative des indicateurs sociaux. Elle semble au contraire renforcer le déficit démocratique. En effet, sur la base de la contribution pionnière de Ross (2001), Aslaksen (2010) et Tsui (2010) montrent que les pays africains producteurs de pétrole sont les moins démocratiques. Plus récemment, Omgba (2015) argue que, parmi les pays producteurs de pétrole, la distance entre la date du début d’exploitation de cette ressource et celle de l’accession du pays à l’indépendance est positivement corrélée au niveau de démocratie qui y prévaut. Il explique ce faible niveau de démocratie par le temps passé sous la domination coloniale qui favorise le développement des institutions extractives et la formation d’une élite agissant pour empêcher les indispensables réformes politiques, même après l’indépendance. À son tour, ce déficit démocratique génère et entretient les défaillances institutionnelles qui affectent la gouvernance nationale et se répercutent au niveau communautaire [21]. Cette situation explique du moins partiellement les contre-performances enregistrées en matière de convergence macroéconomique.
62Quant aux hétérogénéités macroéconomiques, celles qui peuvent être mises en évidence au sein de la CEMAC sont potentiellement nombreuses. La forme la plus analysée est celle qui est liée au mésalignement du taux de change réel du franc CFA. Dans cette perspective, Couharde et al. (2012) montrent que le processus d’ajustement des taux de change effectifs réels (TCER) dans la zone CFA est bien asymétrique, et que cette asymétrie diffère toutefois fortement selon les pays. Leurs travaux confortent les analyses menées plus tôt par Abdih et Tsangarides (2010) qui trouvent que, suite à un choc, le retour à l’équilibre du taux de change s’effectue deux fois moins vite dans la zone CEMAC que dans la zone UEMOA. De même, Gnimassoun (2012) établit que si les fondamentaux des économies de la zone expliquent essentiellement le mésalignement observé du franc CFA, celui-ci est également sensible aux fluctuations de la monnaie d’ancrage que constitue l’euro. Les graphiques ci-dessous vont dans le même sens que les résultats de ces différents auteurs et montrent que, dans la CEMAC en particulier, les hétérogénéités macroéconomiques vont au-delà du TCER et concernent également le PIB par tête ainsi que l’inflation.
6 – Conclusion
63L’objectif de l’article était d’évaluer la contribution à la croissance économique induite de la mise en œuvre des règles budgétaires de la surveillance multilatérale. À cet effet, nous avons utilisé le modèle de croissance développé par Mankiw et al. (1992) augmenté des différents critères de convergence de la CEMAC. Nous sommes parvenus à deux principaux résultats : (i) le respect ou non des règles budgétaires de la surveillance multilatérale, adoptées en 1994 et modifiées en 2001, a été principalement lié à l’évolution de la conjoncture mais pas au résultat des politiques délibérées mises en œuvre à cet effet et, de ce fait n’a pas fondamentalement favorisé la croissance économique dans la sous-région. Si l’effet semble élevé et positif, il reste non significatif ; (ii) en captant l’effet des critères considérés individuellement dans un modèle global, les résultats n’ont guère été améliorés.
64Nous expliquons les contre-performances du dispositif de convergence sur la croissance par les profondes hétérogénéités structurelles et macroéconomiques des pays membres. Celles-ci illustrent, d’une part, les difficultés à définir des critères de convergence communs à tous les pays, et d’autre part, les obstacles des pays subissant des chocs asymétriques récurrents pour respecter des critères identiques. Ces résultats plaident pour des réformes dont l’objectif est de renforcer l’efficacité de la convergence macroéconomique au sein de la CEMAC.
65En définitive, la crainte des effets négatifs qu’induirait une éventuelle crise, du fait du maintien du dispositif actuel, a été suffisante pour faire aboutir la nouvelle réforme. Bien plus, l’expérience douloureuse de vingt ans d’ajustement structurel, et les enseignements de la récente crise européenne, ont également contribué à aplanir les divergences et à faire émerger un consensus politique ayant facilité la conduite à terme et avec succès de la réforme.
66Les études réalisées par le FMI (2014) et Guérineau et al. (2015) ont constitué des documents de travail intéressants ayant guidé les autorités de la CEMAC vers l’aboutissement rapide de la réforme. Ces études ont alimenté et surtout éclairé le débat récurrent sur le choix des critères et des seuils. Par exemple, et à titre d’illustration, autant il s’est dégagé un consensus sur le choix du critère d’endettement, autant le seuil à retenir a suscité des réticences de la part des gouvernements. En effet, selon les études réalisées par le FMI, le seuil d’endettement des pays de la CEMAC varierait de 35 % du PIB pour la RCA à 50 % pour le Cameroun. Or, à la faveur de l’initiative Pays pauvres très endettés, la plupart de ces pays ont vu leur taux d’endettement diminuer en dessous de 20 % du PIB. Alors que le FMI proposait de ramener le seuil de 70 % actuellement à 50 %, les gouvernements ne se sont pas montrés très favorables à cette proposition à cause de leurs immenses besoins en ressources, nécessaires pour financer les grands projets d’infrastructure afin d’acter leur émergence.
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Mots-clés éditeurs : croissance économique, panel, convergence, variables instrumentales, CEMAC
Mise en ligne 08/03/2017
https://doi.org/10.3917/edd.294.0043Notes
-
[*]
LAREA-FSEG, Université de Dschang.
-
[**]
LAREA-FSEG, Université de Yaoundé II-Soa.
-
[1]
Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale.
-
[2]
Economic and Monetary Community of Central Africa.
-
[3]
Auteur correspondant. E-mail : davom99@gmail.com.
Les auteurs tiennent à remercier vivement les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leurs critiques et suggestions pertinentes, qui ont permis d’améliorer substantiellement la version préliminaire de cet article. Ils remercient également Mireille Sandji, Blaise Gnimassoun, Samuel Guérineau, Alexandru Minea, Landry Bikai et Joseph Keneck Massil pour la relecture des versions antérieures de ce papier. Ils restent, toutefois, seuls responsables des éventuelles erreurs ou insuffisances qui pourraient encore subsister dans le texte. -
[4]
Cf. les différentes études menées pour évaluer les multiplicateurs budgétaires après la mise en œuvre des plans de relance (Ilzetzki et al., 2013 ; Auerbach et Gorodnichenko, 2013 ; Kraay, 2014 ; Minea et Mustea, 2015 ; etc.).
-
[5]
Par exemple l’incitation fiscale pour stimuler la recherche-développement.
-
[6]
Les unions monétaires ont été créées il y a cinquante ans et ont précédé l’intégration commerciale. Il convient de signaler que cette antériorité de l’intégration monétaire a facilité le processus d’intégration.
-
[7]
Elle comprend six pays membres : Cameroun, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad et République centrafricaine.
-
[8]
Elle comprend huit pays membres : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.
-
[9]
La BEAC est la banque centrale commune aux six pays membres de la CEMAC.
-
[10]
Les indicateurs de surveillance multilatérale s’apprécient comme les conditions nécessaires pour le respect des critères de convergence. Ce sont des critères de second rang regroupés dans un tableau de bord macroéconomique. Ils sont composés de six groupes de variables et indicateurs : (i) les variables relatives à la production des biens et services ; (ii) les variables relatives aux finances publiques et à la dette ; (iii) les variables relatives à la monnaie ; (iv) les variables relatives à la balance des paiements ; (v) les indicateurs d’intégration communautaire ; (vi) les indicateurs sociaux.
-
[11]
Le Comité de convergence de la zone franc a défini les indicateurs complémentaires de convergence en 2005 et 2006. L’objectif de ces derniers est de mieux apprécier l’effort des autorités pour mettre en œuvre la convergence structurelle. Ainsi, les indicateurs qui font l’objet d’un suivi dans les rapports de surveillance multilatérale sont : (i) le solde budgétaire de base structurel rapporté au PIB nominal, qui doit être positif ou nul ; (ii) le solde budgétaire de base hors pétrole rapporté au PIB hors pétrole, qui doit être positif ou nul ; (iii) le solde budgétaire primaire hors pétrole, en pourcentage du PIB hors pétrole, qui doit être positif ou nul ; (iv) le taux d’inflation sous-jacente, dont la norme est inférieure ou égale à 3 %.
-
[12]
Il est défini comme la différence entre les recettes totales hors dons et les dépenses totales hors investissements financés sur ressources extérieures.
-
[13]
Une dépense ordonnancée ou mandatée par l’État et non payée après 120 jours est considérée comme un arriéré.
-
[14]
Il faut relever à ce niveau qu’une variable muette capte toutes les modifications intervenues dans l’année considérée. En particulier, s’agissant de l’année 1994, on pourrait inclure dans cette variable la création de la CEMAC et la dévaluation du franc FCA.
-
[15]
L’article 1er de la directive du 3 août 2001 présente les critères de convergence comme « des variables macroéconomiques dont le non-respect peut entraîner l’adoption par le Conseil des ministres d’une directive à l’encontre de l’État membre concerné lui demandant d’élaborer et de mettre en œuvre un programme d’ajustement approprié ».
-
[16]
Selon la Banque mondiale, elle consiste en des dépenses pour des ajouts aux immobilisations corporelles de l’économie, plus les variations nettes des inventaires.
-
[17]
La population active totale comprend les personnes âgées de 15 ans et plus (généralement 64 ans, qui est l’âge de départ à la retraite), correspondant à la définition de la population active économiquement de l’Organisation internationale du travail. Cette définition comprend à la fois les travailleurs et les demandeurs d’emploi.
-
[18]
Voir par exemple Levin et al. (2002), Im et al. (2003), etc.
-
[19]
Elle vaut 0 pour les pays de la CEMAC (UEMOA) avant 2001 (1999) et 1 après.
-
[20]
Les estimations faites avec les « dummies pays » n’améliorent guère les résultats, même s’ils ont tendance à valider la significativité de l’inflation seulement.
-
[21]
Il convient de relever que ces différents facteurs expliquent aussi globalement le déficit de croissance des pays membres de la CEMAC.