Notes
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[1]
L’article a bénéficié d’un soutien de la Fondation pour les Etudes et Recherches sur le Développement International (FERDI).
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[2]
Émilie Caldeira, CERDI-CNRS, Université d’Auvergne. Email : emilie.caldeira@udamail.fr
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[3]
Grégoire Rota-Graziosi, Département des affaires fiscales, Fonds Monétaire International. Email : grotagraziosi@imf.org
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[4]
Nous considérons dans cette revue la concurrence fiscale horizontale, i.e. celle entre des juridictions de même niveau. La concurrence fiscale verticale, dont une analyse théorique est proposée par Keen et Kotsogiannis (2002) existe en particulier dans certains pays fédéraux en développement comme le Nigeria ou la République Démocratique du Congo, mais demeure encore peu étudiée (cf. Wilson, 1999 et Brueckner, 2003 pour une revue théorique et empirique de la concurrence fiscale).
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[5]
Même si les transferts intergouvernementaux participent au succès ou à l’échec de la décentralisation en assurant notamment une certaine péréquation, ils ne sont pas à l’origine de celle-ci. Ils seront néanmoins abordés dans la troisième section relative aux effets macroéconomiques de la décentralisation.
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[6]
Le modèle de Seabright (1996) est développé dans un contexte où les communautés sont homogènes. Hypothèse souvent faite dans le cadre de pays développés, considérant les faibles coûts de mobilité interjuridictionnelle, elle est souvent peu pertinente dans les pays en développement.
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[7]
Contribuant à appuyer ce dernier argument, Reinikka et Svensson (2004) montrent que seulement 13 % des transferts d’éducation du gouvernement central en Ouganda ont finalement atteint les écoles primaires.
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[8]
Voir notamment les formalisations de Grossman et Helpman (1996) et Bardhan et Mookherjee (2000).
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[9]
Des études ont mis en évidence la capture des gouvernements locaux par de puissantes élites locales. Par exemple, Hartmann et Boyce (1983) ont décrit comment de riches agriculteurs au Bangladesh ont détourné un programme d’aide à l’irrigation de la Banque Mondiale qui devait bénéficier aux agriculteurs les plus défavorisés.
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[10]
Estache et Sinha (1995) montrent également, à partir de deux échantillons de pays, un développé, un en développement, que la décentralisation tend à accroître les dépenses en infrastructure.
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[11]
De même, Khaleghian (2003) établit un effet positif de la décentralisation sur la vaccination des enfants dans les pays les plus pauvres.
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[12]
Ce contre-argument est limité pour au moins deux raisons (Hankla, 2009). Premièrement, il est peu probable que le gouvernement central soit aussi efficace que les gouvernements locaux pour reconnaître les préférences locales et y répondre. Deuxièmement, il semble délicat pour ce dernier d’adopter explicitement des politiques différenciées sur son territoire.
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[13]
D’autres auteurs ont testé cet argument dans les pays développés. Voir, par exemple, Ashworth et Heyndels (1997) pour la Belgique, Bordignon, Cerniglia, et Revelli (2003) pour l’Italie, Schaltegger et Kuttel (2002) pour la Suisse et Revelli (2006) pour l’Angleterre.
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[14]
Caldeira (2012a) démontre l’existence d’une « concurrence par comparaison » en l’absence de démocratie locale en Chine.
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[15]
En particulier, si les taux de taxe ou les dépenses publiques locales sont des compléments stratégiques, il y a un risque de multiplicité d’équilibres de Nash. Ceux-ci peuvent être ordonnés sous certaines conditions suivant le critère de Pareto. Le problème de coordination consiste alors à passer d’un équilibre où les taux de taxes ou les dépenses publiques locales sont faibles à un autre équilibre où ces variables sont plus élevées. De façon plus générale, un problème de coopération apparaît lorsqu’une situation est meilleure (Pareto dominante) pour tous les joueurs (gouvernements locaux ou population), mais n’est pas l’équilibre de Nash. La coopération vise alors à modifier les comportements des joueurs ou la structure du jeu-même (jeu répété par exemple) pour faire de cette situation hors équilibre un équilibre de Nash.
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[16]
Cai et Treisman (2005) soulignent qu’elle peut affaiblir la discipline des unités les plus faiblement fournies.
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[17]
Ces études sont nombreuses dans les pays développés. Kelejian et Prucha (1998), Sole-Olle (2006), Redoano (2007) ou Foucault, Madies, et Paty (2008) ont fourni des preuves empiriques de l’existence d’interactions stratégiques au niveau des dépenses publiques respectivement aux États-Unis, en Espagne et en France.
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[18]
“The central government may not know what to do, the local government may not know how to do it” (voir Bardhan, 2002, page 189).
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[19]
Cet argument est sans doute moins fort dans les pays en développement compte tenu de la plus faible mobilité de la population.
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[20]
Au contraire, à partir de données de panel, Sepulveda et Jorge Martinez-Vazquez (2011) montrent que la décentralisation accroît la pauvreté mais contribue à réduire les inégalités si le gouvernement central représente une part significative de l’économie (20 %).
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[21]
De manière similaire, les résultats de Reinikka et Svensson (2004) tendent à montrer que la capture par les officiers locaux des subventions nationales à l’éducation est moindre dans les communautés les plus riches.
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[22]
Les études traitant de l’impact de la décentralisation sur la cohésion nationale ont des conclusions diverses. Certaines montrent que la décentralisation peut réduire l’unité nationale et accroître les conflits (Treisman, 1999 et Tranchant, 2010). D’autres, au contraire, concluent que la décentralisation peut éviter la désintégration d’États divisés (Lijphart, 1977).
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[23]
Voir Boex et Martinez-Vazquez (2005) pour une revue des différentes formules d’allocation.
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[24]
Les études empiriques sur ce thème sont nombreuses : voir Case (2001) pour l’Albanie, Porto et Sanguinetti (2001) pour l’Argentine, Banful (2010) et Miguel et Zaidi (2003) pour le Ghana, Khemani (2007) et Cole (2009) pour l’Inde, Alperovich (1984) pour Israël, Caldeira (2012b) pour le Sénégal et Boex (2003) pour la Tanzanie.
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[25]
Comme il est préférable que les recettes fiscales des collectivités locales soient stables, elles proviennent généralement de bases à la fois peu mobiles et peu élastiques.
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[26]
Gramlich (1987) avait déjà mis en lumière que les déficits des États fédéraux aux États-Unis dans les années 1980 avaient réduit le rôle de l’État central dans les politiques contra-cycliques.
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[27]
En d’autres termes, la menace du gouvernement central de ne pas intervenir en cas de difficultés du gouvernement local n’est pas crédible.
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[28]
Parmi ces arguments, le mauvais fonctionnement des marchés financiers, des ressources financières et des dépenses futures peu prévisibles, des connaissances techniques financières et capacités managériales trop faibles, et une incitation du décideur politique à emprunter puisqu’il en bénéficie immédiatement tandis que la charge de cet emprunt est reportée dans le temps.
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[29]
Comme Smoke (2001) le fait remarquer, la plupart des gouvernements locaux dans les pays en développement ont encore un rôle modeste et peu d’entre eux ont la possibilité d’avoir des déficits ou accès aux marchés des capitaux.
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[30]
L’effet final de la décentralisation sur la croissance a été étudié par Zhang et Fu Zou (1998), Wollera et Phillips (1998), Davoodi, Xie, et Zou (1999), Lin et Liu (2000), Akai et Sakata (2002), et Martinez-Vazquez et McNab (2003).
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[31]
Nous ne prétendons pas à l’exhaustivité mais avons procédé à une sélection de travaux parmi ceux qui nous semblaient les plus pertinents.
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[32]
Si les pays d’Afrique sub-saharienne ont participé à la vague de décentralisation, les études économétriques les concernant sont rares.
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[33]
En effet, les stratégies de développement étant alors basées sur la planification centrale, la décentralisation s’opposait à la nécessité d’un gouvernement central fort, capable de construire une nation dans des sociétés ethniquement fragmentées et de contrôler des économies vulnérables.
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[34]
Par exemple, les Enquêtes Démographiques et de Santé mises en place par la Banque Mondiale dans un grand nombre de pays africains sont généralement représentatives au niveau départemental alors que la décentralisation s’opère au niveau communal.
1 – Introduction
1Au début des années 1990, plusieurs pays en développement se sont engagés dans un processus de décentralisation. Celui-ci visait à redéfinir le rôle de l’État et à réformer le secteur public. Alors que les gouvernements centraux avaient perdu une partie de leur légitimité du fait de leur incapacité à promouvoir le développement économique, la décentralisation est apparue comme un moyen de réduire leur rôle en fragmentant leur autorité et en introduisant plus de concurrence et de contre-pouvoirs.
2De plus, dans des pays où les menaces de conflits ethniques et de mouvements séparatistes sont réelles, cette réforme devait permettre d’atténuer les tensions en autorisant une certaine autonomie politique locale. Largement soutenu par les agences de développement internationales, le transfert de compétences au niveau local a également été guidé par la volonté de promouvoir la démocratie locale et de rendre ainsi les décideurs publics plus redevables et efficaces.
3Si l’analyse de la décentralisation a suscité, comme nous le verrons, un certain engouement ces trois dernières décennies, cette notion reste délicate à définir, renvoyant à des arrangements institutionnels aussi variés que les pays qui se sont engagés dans ce processus.
4Une clarification terminologique s’impose alors. D’un point de vue du droit constitutionnel, la notion de décentralisation n’a pas la même portée selon que l’État concerné soit unitaire ou fédéral. Pour le premier type, la souveraineté, qui peut être partiellement cédée aux unités locales constituantes, réside initialement au niveau central. Pour les États fédéraux, les gouvernements indépendants des territoires constituants et le gouvernement central décident conjointement du partage des compétences. De plus, tandis que le pouvoir dans les États unitaires est délégué aux gouvernements locaux par une loi selon la seule volonté de l’État, dans les États fédéraux, la répartition du pouvoir est prévue par la constitution et ne peut être modifiée aisément.
5L’existence d’un État unitaire ou fédéral ne préjuge pas néanmoins du degré de décentralisation. Ce dernier, difficilement mesurable, dépend de la répartition qualitative et quantitative des compétences entre les différents niveaux de gouvernements. Dans ce cadre, il est indispensable de distinguer les notions de déconcentration, de délégation et de dévolution (suivant par exemple Rondinelli et al. 1989, Bird et Vaillancourt, 1998 ou Gauthier et Vaillancourt, 2002). La déconcentration a pour seul but d’améliorer l’efficacité opérationnelle de l’action de l’État. Elle consiste en un transfert de responsabilités de l’État central à des agents d’une circonscription territoriale, alors subordonnés à l’autorité hiérarchique du gouvernement central. La délégation correspond au transfert de pouvoir et de responsabilité dans un domaine bien défini à des entités semi-autonomes, agissant au nom de l’État central mais disposant d’une relative autonomie budgétaire. La dévolution implique enfin le transfert de compétences, de responsabilités et de la décision politique, à des personnes morales de droit public, gouvernées par des élus locaux. Sous cette forme la plus avancée, la décentralisation confère aux élus locaux un pouvoir décisionnel substantiel pour mobiliser leurs propres ressources financières et déterminer leur politique de dépenses et leur domaine de compétences (décentralisation budgétaire). Ils sont redevables devant les habitants électeurs de leur juridiction (décentralisation politique). Les trois degrés de décentralisation coexistent généralement de fait. Cependant, l’analyse portera ici davantage sur la décentralisation en son sens le plus complet, la dévolution.
6Suivant la théorie du fédéralisme budgétaire (« fiscal federalism »), les effets attendus de la décentralisation peuvent être classés selon les trois fonctions de l’État définies par Musgrave (1959) : allocation des ressources, redistribution et stabilisation de l’activité économique. La première fonction, celle d’allocation des ressources (que produire ? pour qui ? à quel prix ?) est la plus étudiée dans la littérature.
7Nous distinguons deux mécanismes qui peuvent justifier une plus grande efficacité allocative de l’État décentralisé : le principe de proximité politique et celui de compétition. En rapprochant les décideurs politiques des citoyens (principe de proximité), la décentralisation vise à améliorer la connaissance des besoins et des préférences des populations par les décideurs (Hayek, 1948) d’une part, et la responsabilité et l’efficacité des gouvernements locaux (Seabright, 1996), d’autre part. Parallèlement, la compétition inter-juridictionnelle [4] que la décentralisation induit (principe de compétition), devrait améliorer l’adéquation de l’offre de biens et services publics aux préférences des habitants (Tiebout, 1956 et Oates, 1972) et stimuler la recherche d’efficacité par les gouvernements locaux (Salmon, 1987, Besley et Case, 1995). En concentrant notre revue sur l’analyse de ces deux mécanismes, nous écartons d’autres dimensions importantes de tout processus de décentralisation, en particulier la question des transferts intergouvernementaux [5].
8Les particularités des pays en développement questionnent la pertinence des principes de proximité politique et de compétition. En effet, ceux-ci reposent sur plusieurs hypothèses – telles que l’existence d’une démocratie locale, d’une conscience politique des citoyens, d’une mobilité inter-juridictionnelle des habitants ou encore de l’absence de comportements de recherche de rente par les élites locales – qui peuvent apparaître peu réalistes dans les pays les plus pauvres (Prud’homme, 1995 et Bardhan, 2002). De plus, quel que soit le niveau de développement du pays, l’offre décentralisée de biens et services publics est considérée inefficace en présence d’économies d’échelle et d’effets de débordement des biens publics considérés (Lockwood, 2002 et Besley et Coate, 2003). Enfin, la question de l’insuffisance des capacités techniques, administratives ou fiscales des gouvernements locaux peut limiter sérieusement les effets positifs attendus de la décentralisation.
9L’analyse de l’impact de la décentralisation sur les fonctions de redistribution et de stabilisation est moins étudiée. Le fédéralisme fiscal établit que ces fonctions doivent rester du ressort de l’État central, voire d’une autorité supranationale (Tanzi, 1996). La décentralisation apparaît en effet comme une menace à la cohésion économique ou sociale de la nation par les inégalités qu’elle est susceptible d’induire. Elle risque également de compromettre la stabilité économique en permettant une certaine indiscipline budgétaire des gouvernements locaux par leur capacité d’emprunt qu’elle peut entraîner.
10Cette revue de la littérature des effets théoriques de la décentralisation s’accompagne d’un bilan des études empiriques testant l’existence de tels effets dans les pays en développement (tableaux 1, 2 et 3). Nous soulignerons également certaines lacunes de cette littérature. Les études empiriques sont confrontées à plusieurs difficultés méthodologiques : manque de données, problème de la comparabilité entre les pays et de l’endogénéité même de la décentralisation. Ensuite, alors que certaines questions, telles que la pertinence du principe de proximité, ont été largement étudiées, d’autres n’ont été que rarement abordées. C’est le cas notamment du principe de compétition, qui constitue pourtant un argument essentiel en faveur de la décentralisation.
11Dans cet article, les effets théoriques attendus de la décentralisation sont présentés suivant la théorie du fédéralisme budgétaire de première et de seconde génération (Oates, 2005). Les différents tests empiriques associés à ces effets sont présentés et leur pertinence dans le cadre particulier des pays en développement est discutée. L’article est structuré comme suit. La section 2 s’intéresse à la relation entre la décentralisation et l’efficacité allocative de la fourniture des biens et services publics (fonction d’allocation). La section 3 analyse les effets macroéconomiques de la décentralisation (fonctions de redistribution et de stabilisation) et aborde la question des transferts inter-juridictionnels. La conclusion (section 4) identifie les lacunes de la littérature empirique à partir du bilan des analyses empiriques présentées et souligne les défis méthodologiques à relever pour une analyse plus rigoureuse et systématique de la décentralisation.
2 – Les effets de la décentralisation sur l’efficacité allocative de la fourniture des biens et services publics
12L’analyse de l’impact de la décentralisation sur la fourniture des biens et services publics a une place prépondérante dans la littérature récente relative au fédéralisme budgétaire dans les pays en développement. Les effets attendus de la décentralisation sont une meilleure allocation des biens et services publics fournis et une plus grande efficacité de leur production. Ces effets résultent de deux mécanismes distincts : le principe de proximité et celui de compétition. La décentralisation entraîne un rapprochement géographique entre les décideurs politiques et la population, permettant une baisse des asymétries informationnelles (sous-section 2.1). Elle crée également une compétition entre les décideurs locaux, supposée stimuler la recherche d’efficacité par ces derniers (sous-section 2.2). Cependant, l’efficacité allocative de la décentralisation est limitée par l’existence d’économie d’échelle, d’effets de débordement ou encore de capacités techniques, administratives ou fiscales limitées (sous-section 2.3).
2.1 – Le principe de proximité
13De nombreux arguments en faveur de la décentralisation sont avancés dans la littérature sur le fédéralisme budgétaire. La plupart d’entre eux sont liés au principe de proximité. En rapprochant les décideurs politiques des citoyens, la décentralisation réduit les asymétries informationnelles entre eux. Ainsi, les décideurs politiques locaux ont une plus grande connaissance des besoins et des préférences des habitants de leur juridiction. Ils seraient également davantage redevables face à des électeurs mieux informés. Cependant, ce rapprochement peut induire également un risque de corruption plus élevé, en particulier dans des pays en développement où les contrôles sont défaillants.
14L’avantage informationnel des gouvernements locaux démontré par Hayek (1948) et Oates (1972) est généralement reconnu. Pour preuve, il est fréquent de déléguer aux décideurs locaux le choix des bénéficiaires des programmes anti-pauvreté à l’intérieur de leur juridiction (voir, par exemple, le projet « Trabajar » en Argentine ou « Food-for-Education » au Bangladesh). Les gouvernements locaux sont censés détenir plus d’information, à moindre coût, sur les membres de leur communauté et être ainsi plus à même de reconnaître les ménages les plus pauvres, d’autant que la nature de la pauvreté peut varier d’une juridiction à l’autre. L’existence d’un avantage informationnel au niveau local, par essence difficile à tester, a été rigoureusement évaluée. Analysant la gestion décentralisée d’un programme d’assistance en Albanie, Alderman (2002) a montré que les décideurs publics locaux ont effectivement accès à certaines informations dont ne dispose pas l’autorité centrale. Cet avantage informationnel permet un meilleur ciblage des populations pauvres à l’intérieur des juridictions et ainsi une plus grande efficacité des programmes mis en place. Le tableau 1.1 présente plusieurs études empiriques relatives à cet avantage informationnel : outre Alderman (2002) déjà cité, Ravallion (1999) apprécie ainsi le programme « Trabajar » en Argentine ; Galasso et Ravallion, (2005) ou Bardhan et Mookherjee (2006) estiment le ciblage de programmes similaires respectivement en Inde entre 1978 et 1998 et au Bangladesh en 1996 et 1997.
15La plus grande proximité que permet la décentralisation devrait également favoriser la participation des citoyens et, en retour, la responsabilité des décideurs politiques. Les citoyens sont plus enclins à participer à la vie politique locale, considérant que celle-ci a un impact plus direct sur leur condition de vie. Leur participation, en termes d’élections et d’interactions avec les décideurs locaux, serait ainsi renforcée par la décentralisation, alors vecteur de démocratisation (Blair, 2000). La population locale peut, en outre, contrôler plus aisément les décideurs locaux qu’une autorité centrale distante. Par conséquent, les gouvernements locaux, soumis à la pression des citoyens, sont incités à une plus grande efficacité dans la fourniture des biens et services publics. Seabright (1996) compare l’allocation des pouvoirs entre le gouvernement central et les gouvernements locaux comme moyens alternatifs pour inciter les décideurs à agir dans l’intérêt des citoyens. Cet auteur établit que, si la décentralisation a des coûts en termes de coordination politique, elle est associée à une plus grande responsabilité des décideurs, entendue comme une probabilité plus importante que le bien-être d’une juridiction détermine la réélection du gouvernement en place.
16Tandis que l’avantage informationnel des gouvernements locaux vis-à-vis du gouvernement central au regard des besoins des populations locales est généralement reconnu en particulier dans les pays en développement, l’argument d’une plus grande responsabilité des premiers demeure, quant à lui, débattu. Celui-ci repose notamment sur l’hypothèse selon laquelle la démocratie locale fonctionne effectivement. Une hypothèse qui suppose un certain niveau d’alphabétisation et une conscience politique des citoyens, des conditions pouvant paraître peu réalistes dans les pays les plus pauvres (Bardhan et Mookherjee, 2006).
17L’amélioration de la responsabilité des décideurs publics grâce à la décentralisation nécessite aussi l’absence (ou presque) de conflits distributionnels au niveau local (Galasso et Ravallion, 2005) [6]. Dans le cas contraire, cette proximité peut favoriser la capture par les élites locales de la rente informationnelle dont ils disposent vis-à-vis de leurs électeurs et du gouvernement central. En effet, celui-ci peut ne pas connaître parfaitement les coûts réels des services publics locaux ou le niveau effectivement fourni de ces services [7]. De plus, dans un système décentralisé, les gouvernements locaux sont certes soumis à une pression électorale, mais ils sont aussi plus vulnérables à la capture par les élites locales qu’un représentant de l’État central [8]. Ainsi, Bardhan et Mookherjee (2005) concluent que, si l’allocation intra-juridictionnelle des ressources devrait s’améliorer avec la décentralisation, l’allocation inter-juridictionnelle pourrait, quant à elle, se dégrader comme la conséquence de gouvernements locaux prédateurs proches ou équivalents aux élites locales [9].
Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
DP = données de panel, DT = données transversales, EF = effets fixes, MCO = moindres carrés ordinaires, TE = technique économétrique, VD = variable dépendante, VI = variable indépendante.Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
DMC =doubles moindres carrés, DP = données de panel, DT = données transversales, EF = effets fixes, ES = équations simultanées, I =instrument, MCO = moindres carrés ordinaires, MCP = moindres carrés pondérés, MV = maximum de vraisemblance, PO = probit ordonné, TE = technique économétrique, VD = variable dépendante, VI = variable indépendante.Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
Le principe de proximité dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
DMC =doubles moindres carrés, DP = données de panel, DT = données transversales, EF = effets fixes, ES = équations simultanées, I =instrument, MCO = moindres carrés ordinaires, MCP = moindres carrés pondérés, MV =maximum de vraisemblance, PO = probit ordonné, TE = technique économétrique, VD = variable dépendante, VI = variable indépendante.18Prud’homme (1995) et Bardhan (2002) soulignent également le risque d’une corruption plus importante qu’entraîne la décentralisation dans les pays en développement. En multipliant les centres de décisions publiques, la décentralisation offre davantage d’opportunités de corruption. Les décideurs locaux ont plus de facilité à établir des relations privilégiées avec les groupes d’intérêt locaux et sont plus sensibles à la pression de ces derniers. Tanzi (1994) estime également que la corruption est plus forte au niveau local puisqu’elle est stimulée par la proximité des agents qui favorise les relations personnelles, plus propices à la corruption. Les obstacles à la corruption sont également moins nombreux au niveau local. Nécessitant la coopération des politiciens et des administrations, la corruption est en effet plus aisée au niveau local où l’indépendance entre ces deux entités est moins formelle. En outre, les contrôles et la pression des médias sont moins importants et ne jouent donc pas leur rôle désincitatif. Si la corruption est effectivement plus répandue au niveau local qu’au niveau national, alors, la décentralisation s’accompagne d’un accroissement de celle-ci et d’une hausse possible du coût de la fourniture des services publics.
19La nature de la relation entre décentralisation et corruption demeure néanmoins indéterminée. Ainsi, les analyses empiriques présentées dans le tableau 1.2 apprécient généralement l’effet d’une mesure de la décentralisation sur un indice de corruption pour 50 à 80 pays selon les études. Leurs conclusions sont partagées : Huther et Shah (1998), Barenstein et de Mello (2001) et Fisman et Gatti (2002) qui étudient respectivement 80, 78 et 55 pays, concluent que la décentralisation budgétaire réduit la corruption et améliore la qualité de la gouvernance ; a contrario, Treisman (2000) et Fan, Lin, et Treisman (2009), par leur analyse transversale de respectivement 54 et 80 pays, montrent que les États décentralisés ont des niveaux de corruption plus élevés.
20Considérant les avantages attendus d’une plus grande proximité entre les décideurs politiques et la population, plusieurs études empiriques présentées dans le tableau 1.3 évaluent l’efficacité d’une fourniture décentralisée de biens ou services publics. La plupart de ces analyses établissent un impact positif. Ainsi, Faguet (2004) révèle que la composition des biens publics fournis a changé en Bolivie après la décentralisation répondant mieux aux besoins des populations concernées. De même, Bird et Rodriguez (1999) concluent à l’effet favorable de la décentralisation sur l’accès à la santé, à l’éducation primaire, au logement et aux infrastructures aux Philippines [10]. Galiani, Gertler, et Schargrodsky (2008) ont des résultats similaires en matière d’éducation en Argentine entre 1994 et 1999. Au niveau macroéconomique, Robalino, Picazo, et Voetberg (2001) établissent une corrélation négative entre le degré de décentralisation et les taux de mortalité, alors qu’Enikolopov et Zhuravskaya (2007) obtiennent un impact positif de la décentralisation sur des indicateurs de santé [11] et d’éducation dans 95 pays développés et en développement entre 1975 et 2000. D’autres analyses empiriques ont néanmoins des résultats plus mitigés : Azfar et Livingston (2010) trouvent peu d’indice d’une meilleure fourniture locale des services publics en Ouganda en 2000 ; Winkler et Rounds (1996) montrent que la décentralisation de l’éducation au Chili a considérablement réduit le nombre d’emplois dans l’éducation affectant les résultats aux tests d’évaluation de connaissance.
2.2 – Le principe de compétition
21Selon la littérature classique du fédéralisme budgétaire, appelée fédéralisme de première génération par Oates (2005), la décentralisation devrait entraîner une compétition entre juridictions. Suivant les prédictions théoriques des approches fondatrices de Tiebout (1956) et de Oates (1972), la compétition entre gouvernements locaux devrait améliorer l’adéquation entre l’offre et la demande de biens et services publics et favoriser une plus grande efficacité des politiques publiques. Les gouvernements locaux peuvent offrir différents types et niveaux de services publics et les individus, parfaitement informés et mobiles, peuvent se déplacer dans les juridictions qui satisfont le mieux leurs préférences. La décentralisation permet ainsi de fournir aux habitants des différentes juridictions des biens publics différenciés, en accord avec leurs préférences, qui peuvent être hétérogènes au niveau national mais qui deviennent homogènes au sein des juridictions par le biais de la mobilité géographique. En présence d’hétérogénéité ethnique, culturelle ou linguistique des populations et lorsque les caractéristiques pertinentes sont distribuées géographiquement au sein du territoire national, la décentralisation devrait alors être un moyen efficace de satisfaire des besoins particuliers (Tanzi, 1996).
22Si l’argument précédent paraît particulièrement pertinent dans des pays en développement, souvent largement fragmentés, Tanzi (1996) souligne que, dans ces pays, la taille et les frontières des juridictions sont souvent le résultat d’accidents historiques plus que de considérations économiques. Il y a ainsi peu de chances pour que les caractéristiques des populations soient distribuées géographiquement entre les juridictions. Prud’homme (1995) remet quant à lui fondamentalement en question l’argument de la meilleure adéquation de l’offre aux préférences dans le contexte des pays en développement. Il considère que la principale différence entre les juridictions locales ne se trouve pas dans leurs préférences respectives. Il ne s’agit pas de révéler les préférences hétérogènes des habitants des différentes juridictions mais de satisfaire leurs besoins fondamentaux, connus de tous. De ce point de vue, les gains en termes de bien-être associés à une meilleure adéquation de l’offre aux préférences sont minimes. Faguet et Sanchez (2008) montrent d’ailleurs que la décentralisation en Colombie a conduit au développement des services publics de première nécessité dans les juridictions de petite taille, auparavant négligées par le gouvernement central. Ce résultat tend à confirmer que les attentes des populations locales concernent principalement les services de base. Enfin, d’autres auteurs, tels que Treisman (2007), estiment que le gouvernement central peut offrir des biens et services publics différenciés selon les préférences sur son territoire, rendant alors superflu l’avantage attendu de la décentralisation en termes de réponse aux préférences locales [12].
23La littérature a également largement mis en exergue les gains d’efficience associés à la compétition interjuridictionnelle dans la fourniture des biens publics locaux. À travers leur « vote avec les pieds » (Tiebout, 1956), les citoyens, en particulier les investisseurs, peuvent encourager les gouvernements locaux à accroître l’efficience de leurs politiques publiques. En effet, sachant que les populations peuvent se déplacer dans les juridictions voisines, les gouvernements locaux entrent en compétition pour attirer les populations et ainsi accroître leur base d’imposition. Ce phénomène accroît la responsabilité des décideurs politiques et décourage la corruption puisque ces derniers tentent d’offrir la meilleure qualité de services publics au moindre coût (Qian et Roland, 1998). Certains estiment néanmoins que l’hypothèse de mobilité des agents parfaitement informés, « votant avec leurs pieds » en réponse à l’offre de services publics, n’est pas applicable dans ces pays. Bardhan (2002), notamment, considère que la mobilité des habitants est limitée et qu’elle n’est pas, quand elle existe, guidée par de telles considérations.
24Les populations locales peuvent, même en l’absence de mobilité, initier une compétition entre les décideurs locaux. Dans un contexte d’asymétries informationnelles, les électeurs peuvent comparer les performances de leur gouvernement local avec celles des juridictions voisines pour identifier d’éventuels comportements opportunistes et juger du mérite de leurs décideurs locaux à rester en poste (Salmon, 1987). Les inefficiences ne peuvent alors pas être directement observées par les électeurs mais sont déduites de cette « concurrence par comparaison ». Cette comparaison induit une compétition inter-juridictionnelle puisque les décisions prises par les gouvernements voisins affectent, à travers les flux d’information qu’elles engendrent, la probabilité du gouvernement local d’être réélu. L’amélioration de l’efficacité des dépenses publiques dans les juridictions voisines force le gouvernement local à adopter le même comportement pour ne pas être signalé comme un « mauvais » gouvernement et sanctionné lors des élections. Dans ce cas, la compétition horizontale est un outil de discipline des gouvernements, les incitant à être plus efficaces, à réduire les gaspillages, la corruption et les dépenses publiques non-productives. Besley et Case (1995) ont proposé une formalisation de la concurrence par comparaison (« yardstick competition ») et fourni des preuves empiriques de ce phénomène à partir de données concernant les États-Unis de 1960 à 1988 [13].
25Cependant, étant donné la jeunesse de la démocratie dans nombre de pays en développement, l’existence de cet outil de discipline y est discutée [14]. En effet, alors que le mécanisme de sanction est le vote, Prud’homme (1995) considère que, loin de révéler des préférences en termes de politiques fiscales, le choix des électeurs est plus largement basé sur des appartenances ethniques, des affinités personnelles ou la fidélité à un parti politique.
26Il n’existe pas de consensus sur l’effet final de la concurrence intergouvernementale sur le bien-être des citoyens. Si les gouvernements sont supposés bienveillants, alors la concurrence entraîne des externalités négatives réduisant le bien-être des populations. En d’autres termes, l’équilibre de Nash est dominé au sens de Pareto par des situations qui nécessitent une certaine coopération ou coordination entre gouvernements [15]. La concurrence fiscale peut entraîner une course vers le bas notamment en matière de taux d’imposition, qui se traduit par une offre sous-optimale de biens ou services publics locaux [16] (Zodrow et Mieszkowski, 1986 et Wildasin, 1988). Si en revanche les gouvernements sont supposés être des Léviathan maximisant leur intérêt particulier, la concurrence est alors un moyen de limiter les comportements de prédation d’élus supposés opportunistes ou, en d’autres termes, d’apprivoiser le Léviathan (Brennan et Buchanan, 1977, Weingast, 1995, Besley et Smart, 2002, Brülhart et Jametti, 2007 ou Weingast, 2009).
27Alors que l’argument de la compétition a été largement testé dans les pays développés, peu d’études ont tenté d’évaluer sa pertinence dans les pays en développement [17]. Le tableau 2 présente quelques analyses empiriques menées au niveau microéconomique : Arze, Martinez-Vasquez, et Puwanti (2008) établissent l’existence d’une concurrence par comparaison relative aux dépenses publiques en Indonésie en 2004 ; Chavis (2009) montre que le coût au mètre carré des routes décroît avec le nombre de villages indonésiens qui sont en compétition pour l’obtention de subvention entre 1998 et 2003. Caldeira et al. (2012a) proposent un modèle théorique d’interactions stratégiques entre les gouvernements locaux au niveau des dépenses publiques, prenant en compte l’extrême pauvreté de certaines juridictions locales. Dans un jeu non coopératif avec des contraintes de ressources pour les décideurs, Caldeira et al. (2012a) montrent que l’existence d’une compétition interjuridictionnelle est conditionnelle à un niveau de ressources locales minimum et apportent une validation empirique à partir de l’expérience du Bénin entre 2002 et 2008. Au niveau macroéconomique, Arikan (2004) établit empiriquement une relation négative entre le niveau de corruption et le nombre de juridictions qui sont en concurrence. Au contraire, Akin, Hutchinson, et Strumpf (2005) mettent en évidence un problème d’effets de débordement entre les juridictions, consécutif à la décentralisation des services de santé en Ouganda, entraînant une réduction dans l’offre de bien public. Le niveau des effets de débordement entre les juridictions est considéré comme une condition critique de l’efficacité de la décentralisation, comme la sous-section suivante l’illustre.
Le principe de compétition dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
Le principe de compétition dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
DMC = doubles moindres carrés, DP = données de panel, DT = données transversales, EF = effets fixes, GMM : generalized method of moments, I =instrument, MCO = moindres carrés ordinaires, MV = maximum de vraisemblance, TE = technique économétrique, VD = variable dépendante, VI = variable indépendante.2.3 – La question de l’offre de biens et services publics
28La littérature sur le fédéralisme budgétaire se focalise assez largement sur la demande, ignorant parfois la question de l’efficacité de l’offre des biens publics. Pourtant, les effets positifs attendus de la décentralisation en matière d’efficacité allocative souffrent d’au moins deux limites résultant de la présence d’économies d’échelle ou d’effets de débordement.
29Lorsque la production de biens et services publics a des rendements d’échelle croissants, comme certains services intensifs en capital (électricité, transport etc.), une production à plus grande échelle réduit les coûts moyens. Il existe, dans ce cas, un arbitrage entre la baisse des coûts et l’adéquation de l’offre aux préférences locales. Les effets de débordement dans la consommation ou la production des biens publics locaux sur les juridictions voisines entraînent, quant à eux, une offre locale de biens et services publics sous-optimale en absence de coopération. Il est alors nécessaire de définir l’espace de production de sorte à internaliser les externalités.
30Le théorème de la décentralisation de Oates (1972) résume ces considérations en concluant que chaque service public doit être fourni par la juridiction (gouvernement central ou local) qui permet au mieux d’internaliser les avantages et les coûts d’une telle prestation. La décentralisation est alors le produit d’un arbitrage entre d’une part la réponse aux préférences locales et la capacité à internaliser les externalités et d’autre part la réalisation d’économies d’échelle (Lockwood, 2002). Besley et Coate (2003) confirment l’analyse d’Oates en montrant que la performance relative de la fourniture locale des biens publics dépend de l’importance des différences de préférences et des externalités entre les juridictions.
31En outre, il est difficile de supposer que les capacités techniques et administratives sont identiques aux différents niveaux de gouvernement. La production des biens publics peut bénéficier d’économies de gamme plus importantes au niveau central (Prud’homme, 1995). Les gouvernements centraux sont davantage capables d’attirer les personnes les plus qualifiées, non seulement grâce à des salaires plus élevés mais aussi parce qu’ils offrent de meilleures perspectives de carrière (Murphy, Shleifer, et Vishny, 1991). Dans le contexte des pays en développement, Bardhan (2002) considère que le personnel technique local manque de formation et d’interactions avec les autres professionnels. Finalement, même si les préférences étaient révélées et que le gouvernement local souhaitait les satisfaire, le problème demeure l’inadéquation des ressources disponibles aux dépenses nécessaires et le manque de qualification et de compétences locales permettant de répondre aux attentes. Bardhan (2002) en conclut que le gouvernement central ne sait probablement pas ce qu’il faut faire tandis que le gouvernement local ne sait pas comment le faire [18].
3 – Les effets macroéconomiques de la décentralisation
32Alors que, dans la littérature sur le fédéralisme budgétaire, les effets microéconomiques positifs attendus de la décentralisation en constituent ses principales justifications, les effets macroéconomiques espérés seraient plutôt négatifs. Réduisant les marges de manœuvre de l’État central, le transfert de compétences aux gouvernements locaux compromet les fonctions de redistribution et de stabilisation. En outre, la décentralisation est généralement associée à un risque d’inégalité accrue, soulevant les questions des transferts intergouvernementaux et d’indiscipline budgétaire liée à la capacité d’emprunt des gouvernements locaux (i.e. contrainte budgétaire douce). La sous-section 3.1 présente les effets de la décentralisation sur la redistribution des ressources et les inégalités, la sous-section suivante portant sur les relations entre décentralisation et stabilité économique.
3.1 – Décentralisation, redistribution et inégalités
33Il existe un relatif consensus au sein de la littérature selon lequel la fonction de redistribution des revenus devrait rester de la responsabilité du gouvernement central. En effet, seul le gouvernement central est en mesure de transférer des ressources des juridictions les plus aisées vers les plus pauvres. Si la redistribution des revenus entre ménages est une compétence des gouvernements locaux, les ménages disposant d’un revenu similaire avant redistribution sont susceptibles d’être traités différemment selon les variations de revenu moyen entre juridictions et les divergences de politique redistributive entre les juridictions. De plus, sous l’hypothèse de populations mobiles, les juridictions les plus généreuses se trouveraient rapidement incapables de soutenir leur politique de redistribution, attirant les ménages les plus pauvres par les bénéfices qu’elles leur offrent et faisant fuir les riches par les taxes élevées qu’elles leur imposent [19]. Enfin, les ressources fiscales et les capacités administratives des gouvernements locaux des pays en développement sont souvent trop limitées pour envisager des politiques redistributives efficaces (Smoke, 2001). Ainsi, la décentralisation, par le transfert de ressources qu’elle induit, réduit la marge de manœuvre de l’État central pour mener des politiques de redistribution. Comme les gouvernements locaux peuvent difficilement conduire ce type de politiques, la décentralisation réduit in fine l’efficacité des politiques de redistribution au niveau national.
34En outre, la décentralisation contribuerait à un accroissement permanent des inégalités (Prud’homme, 1995 et Manor, 1999). D’une part, dans un système décentralisé, si les juridictions financent leurs activités à partir de leurs propres ressources, les plus riches d’entre elles ont davantage de services publics. Étudiant le cas chinois, West et Wong (1995) mettent en évidence un accroissement des inégalités en matière d’accès à l’éducation et à la santé entre les provinces [20]. Ces inégalités initiales s’accentuent avec la mobilité des populations : les juridictions les plus riches, ayant des bases fiscales plus importantes, peuvent proposer des taux de taxation plus faibles pour le même niveau de services publics, attirant de nouveaux résidents et, par là-même, augmentant encore leur potentiel fiscal. La décentralisation n’a pas un effet uniforme sur l’ensemble du territoire, son impact dépendant largement des capacités fiscales et techniques des gouvernements locaux et de celles des citoyens à se faire entendre. Selon Galiani, Gertler, et Schargrodsky (2008), la décentralisation de l’éducation en Argentine a ainsi eu un impact moyen positif sur le niveau scolaire, mais elle a eu des effets négatifs dans les juridictions les plus pauvres, où les populations n’ont pas la capacité de faire entendre et respecter leurs préférences [21]. La décentralisation bénéficie alors aux populations déjà avantagées, creusant l’écart avec les plus pauvres. Caldeira et al. (2012b) établissent des résultats similaires dans leur étude de l’effet de la décentralisation au Bénin : la décentralisation a un impact moyen positif sur l’accès aux services de base mais tend à accroître les inégalités d’accès entre et à l’intérieur des juridictions locales. L’écart entre les juridictions les plus aisées et celles les plus défavorisées peut compromettre la cohésion économique et sociale de la nation [22].
35Face au risque d’accroissement des inégalités, la littérature s’accorde sur la nécessité d’associer à la décentralisation un système de transferts intergouvernementaux stable, équitable et efficace (Buchanan, 1950, Oates, 1972 et Gramlich, 1977). La forme et le système d’allocation de ces transferts soulèvent néanmoins de nombreuses questions (Boadway et Shah, 2007, Martinez-Vazquez et Searle, 2007). Pour Smart (2007) ou Egger, Koethenbuerger, et Smart (2010) notamment, les transferts du centre réduiraient les incitations des collectivités locales à la mobilisation de leurs propres ressources et conduiraient à une certaine indiscipline budgétaire des juridictions locales (voir sous-section 3.2). Ainsi, au-delà des capacités fiscales et des besoins locaux, les formules d’allocation des transferts devraient considérer les efforts budgétaires fournis par les gouvernements locaux [23]. En revanche, Caldeira et Rota-Graziosi (2014) montrent que l’effet d’éviction des transferts sur les ressources locales propres (hypothèse largement admise dans la littérature concernée) n’est pas toujours vérifié même dans un modèle très simple de maximisation du bien-être. Ces auteurs établissent que des transferts inconditionnels peuvent stimuler les ressources locales propres, illustrant leur analyse avec le cas béninois. De plus, même en présence de formules d’allocation, une abondante littérature empirique a mis en lumière que la distribution des transferts entre les juridictions n’avait pas pour seul objectif d’atténuer les problèmes d’iniquité et d’inefficacité [24]. L’État central peut utiliser les transferts budgétaires pour maximiser ses chances de réélection (Grossman, 1994 et Banful, 2010) ou mener une politique partisane (Cox, 1986 et Case, 2001). Enfin, l’existence d’un système de transferts intergouvernementaux efficace et équitable ne garantit pas pour autant que les ressources distribuées aux juridictions les plus pauvres bénéficient finalement aux ménages les plus défavorisés (Prud’homme, 1995).
3.2 – Décentralisation, stabilisation et (in)discipline budgétaire
36La politique budgétaire, instrument indispensable pour stabiliser l’économie, est un outil difficilement manipulable au niveau local pour au moins trois raisons. Tout d’abord, les gouvernements locaux sont peu incités à supporter pleinement le coût d’une politique qui bénéficiera, en partie, aux juridictions voisines du fait des effets de débordement induits par la grande ouverture et les liens qui unissent les entités locales (Prud’homme, 1995). Ensuite, les moyens des gouvernements locaux pour poursuivre des politiques contra- cycliques sont limités : les recettes budgétaires locales sont souvent peu élastiques au revenu (Smoke, 2001) [25] et les déficits budgétaires ainsi que l’endettement des gouvernements locaux sont, au mieux, limités, compte tenu du risque d’indiscipline budgétaire. Enfin, alors que les gouvernements locaux de certains pays industrialisés peuvent jouer un rôle de stabilisation [26], ceux des pays en développement représentent généralement un faible pourcentage du secteur public en termes d’emplois et de dépenses et n’auraient donc qu’un impact marginal au niveau national. Ainsi, la décentralisation, en transférant des ressources aux gouvernements locaux, induit une baisse de la marge de manœuvre du gouvernement central qui ne peut pas être compensée par les actions locales et réduit donc l’efficacité des politiques macroéconomiques de stabilisation.
37Considérant que les fluctuations macroéconomiques sont particulièrement importantes dans les pays en développement particulièrement vulnérables à des chocs exogènes (prix, climat…), la coordination des politiques de stabilisation au niveau central est essentielle. Gramlich (1987) estime cependant que les autorités locales peuvent jouer un rôle de stabilisation, notamment si les cycles économiques ne sont pas parfaitement corrélés entre les juridictions.
38Au-delà de leur incapacité à mettre en place des politiques de stabilisation face à des fluctuations économiques de court terme, les gouvernements locaux peuvent mettre en péril la stabilité macroéconomique d’un point de vue structurel (Tanzi, 1996). En l’absence de règle légale ou constitutionnelle claire et ferme, il existe effectivement un risque d’indiscipline budgétaire des gouvernements locaux, soulevant la question de la nature de la contrainte de discipline budgétaire d’une part, et de la possibilité de recours à l’emprunt par ces derniers d’autre part. La contrainte budgétaire douce (« solf budget constraint ») et ses conséquences néfastes ont été notamment étudiées par Kornai (1979), Qian et Roland (1998) et Kornai, Maskin, et Roland (2003). Les décideurs locaux risquent de dépenser plus que ne leur permettent leurs ressources sachant que les transferts du gouvernement central viendront, ex post, combler leurs déficits. La possibilité d’un financement par le gouvernement central incite le gouvernement local à augmenter les dépenses publiques puisqu’il bénéficiera seul de ces dépenses et que le coût sera finalement supporté par l’ensemble de la population nationale. La contrainte budgétaire douce entraîne un problème d’aléa moral lié aux comportements stratégiques des gouvernements locaux et à l’incapacité du gouvernement central à s’engager de façon crédible ex ante à ne pas accorder ex post le soutien budgétaire à un gouvernement local en difficulté financière. Les gouvernements locaux ont ainsi la possibilité d’extraire des ressources du gouvernement central, parce qu’ils ont un pouvoir politique sur lui, et surtout parce qu’ils savent qu’une inaction du gouvernement central pourrait avoir des conséquences systémiques nationales [27]. De façon similaire, les gouvernements locaux sont incités à se sur-endetter, forçant le gouvernement central à puiser dans ses ressources pour lui venir en aide. Ainsi, bien que l’emprunt soit indispensable pour répartir la charge de l’investissement dans le temps, ce risque d’indiscipline s’ajoute aux arguments avancés contre l’utilisation de cet outil par les autorités locales [28]. Ces comportements budgétaires irresponsables peuvent finalement conduire à d’importants déficits nationaux comme en Argentine, en Afrique du Sud ou au Brésil dans les années 1990 (Prud’homme, 1995). Ils réduisent les marges de manœuvre du gouvernement central mettant en danger la situation macroéconomique nationale à long terme (Tanzi, 1996) [29].
39Peu d’études empiriques se sont consacrées à évaluer les effets macroéconomiques de la décentralisation (cf. tableau 3 pour une présentation). La plupart des analyses sont descriptives et anecdotiques et les résultats des études empiriques sont mitigés. Shah (1998) et Huther et Shah (1998) concluent que les systèmes budgétaires décentralisés sont associés à une meilleure gouvernance macroéconomique. King et Ma (2001) trouvent également que les pays décentralisés ont des taux d’inflation moins élevés. Au contraire, Wibbels (2000) met en évidence un effet négatif du fédéralisme budgétaire sur les performances macroéconomiques se traduisant par des niveaux d’inflation et des déséquilibres budgétaires plus importants. Certaines analyses sont plus nuancées. Ainsi, De Mello (2000) montre que la décentralisation, lorsqu’elle est associée à une dépendance des autorités locales aux transferts, conduit à la dégradation des finances publiques nationales. Rodden (2002) révèle que des déficits persistants apparaissent lorsque les gouvernements locaux sont simultanément dépendants des transferts et autorisés à emprunter [30].
Les effets macroéconomiques dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
Les effets macroéconomiques dans la littérature empirique testant les effets de la décentralisation dans les pays en développement
DP = données de panel, DT = données transversales, EA = effets aléatoires, EF = effets fixes, GMM : generalized method of moments, MCG = moindres carrés généralisés, MCO = moindres carrés ordinaires, SURE = seemingly unrelated regression equation, TE = technique économétrique, TMC = triples moindres carrés, VD = variable dépendante, VI = variable indépendante.4 – Conclusion
40Les tableaux 1, 2 et 3 présentent les principales analyses économétriques traitant des effets de la décentralisation dans les pays en développement [31]. Ces dernières sont classées en trois catégories selon qu’elles soient relatives au principe de proximité (tableau 1), au principe de compétition (tableau 2) ou aux performances macroéconomiques (tableau 3). Ce bilan permet de mettre en évidence les principales difficultés auxquelles sont confrontées les études économétriques sur ce thème, qui constituent des défis pour les recherches futures. Cette conclusion identifie également les sujets relativement moins traités, qui méritent de plus amples recherches.
41Malgré l’engouement en faveur de la décentralisation dans les pays en développement, les études économétriques sur le sujet demeurent relativement rares [32]. Une explication est certainement le manque de données fiables pour juger de manière systématique des conséquences de cette réforme. Les gouvernements locaux dans les pays en développement ont en effet longtemps joué un rôle fiscal et politique minime, cantonnés à de simple relais administratifs [33]. Ainsi, marquée par une histoire de forte centralisation politique, la collecte de données sur les finances publiques locales est loin d’être systématique. De plus, il existe un décalage entre l’introduction de la décentralisation et la disponibilité des données d’enquête au niveau local, devenu un niveau d’analyse pertinent [34]. Un effort de collecte de données est indispensable pour comprendre les réalités de la décentralisation, évaluer rigoureusement ses effets, et être à même de formuler des recommandations de politique publique.
42Au-delà de la faible disponibilité des données, les études macroéconomiques se heurtent à une autre difficulté : celle de l’hétérogénéité des pays. Les formes de décentralisation étant aussi diverses que les pays qui les mettent en place, il est hasardeux de fonder une étude économétrique des effets de la décentralisation sur une comparaison internationale. Ce problème est aggravé par le fait que les données exploitées au niveau macroéconomique sont souvent transversales (Huther et Shah, 1998, Treisman, 2000, Barenstein et de Mello, 2001, Fisman et Gatti, 2002 ou Fan, Lin, et Treisman, 2009). Dans ce cas, l’introduction d’effets fixes, qui captent l’effet des caractéristiques inobservables et invariantes dans le temps des différents pays, n’est pas possible. De plus, l’exploitation de données de panel, qui permet théoriquement de dépasser cet obstacle, fait face au problème fréquent de faible variance temporelle des indicateurs de décentralisation qui rend inefficiente l’estimation de leurs effets (Enikolopov et Zhuravskaya, 2007). L’utilisation de méthodes d’estimation plus sophistiquées peut aider à l’obtention de résultats économétriques plus robustes. Notamment, l’estimateur à décomposition vectorielle des effets fixes, développé par Plumper et Troeger (2007), permet de prendre en compte l’hétérogénéité des pays tout en évitant l’inefficience associée à l’estimation de l’effet de variables à faible variance temporelle. Une autre approche, quand les données sont disponibles et représentatives au niveau local, consiste à se focaliser sur l’étude des juridictions à l’intérieur d’un même pays, comme le font par exemple Galiani, Gertler, et Schargrodsky (2008), Azfar et Livingston (2010) ou Caldeira et al. (2012b). Se concentrer sur un pays évite en effet la difficulté de contrôler pour l’ensemble des variables institutionnelles et autres caractéristiques fixes dans le temps, propres à chaque pays, qui peuvent influencer le degré de décentralisation et les performances (qualité de la gouvernance, corruption, performances macroéconomiques etc.) et ainsi biaiser les résultats.
43Généralement, l’analyse des effets de la décentralisation prend en compte les problèmes d’endogénéité résultant de l’omission de variables explicatives pouvant être corrélées avec la décentralisation et une potentielle causalité inverse. En effet, le degré de décentralisation – qu’il soit mesuré comme la part des recettes publiques locales dans le total des recettes, la part des dépenses publiques locales dans les dépenses publiques totales ou comme une variable binaire – peut difficilement être considéré comme étant une variable exogène. Au niveau macroéconomique, il est fréquent d’utiliser les origines légales du pays (Barenstein et de Mello, 2001 et Fisman et Gatti, 2002) ou la taille du pays (Enikolopov et Zhuravskaya, 2007) comme instruments. Ces derniers ont néanmoins le défaut d’être constants dans le temps. Au niveau microéconomique, il y a de fortes chances pour que les juridictions les plus aptes à créer de la richesse, qui ont alors vraisemblablement de meilleurs indicateurs de résultats, soient aussi les plus décentralisées. Galiani, Gertler, et Schargrodsky (2008) corrigent rigoureusement le problème d’endogénéité grâce à la mise en place d’une stratégie d’identification quasi-expérimentale. Les variables politiques, comme l’affiliation partisane, sont également pertinentes, car elles peuvent influencer le niveau des transferts reçus et, par là même, le niveau de décentralisation (voir Caldeira et al, 2012b). La recherche d’un instrument reste un défi et sa pertinence dépend toujours du contexte particulier de l’étude.
44Enfin, certains effets semblent bénéficier de plus d’attention que d’autres. En particulier, alors que le principe de proximité a été largement analysé, le principe de compétition, argument essentiel en faveur de la décentralisation et testé assez systématiquement dans les pays développés, n’a fait l’objet que de rares études dans les pays en développement (Arikan, 2004, Akin, Hutchinson, et Strumpf, 2005, Arze, Martinez-Vasquez, et Puwanti, 2008, Chavis, 2009 et Caldeira et al., 2012a). De plus, parmi elles, Chavis (2009) et Arikan (2004) n’analysent pas les interactions stratégiques en tant que telles, la compétition étant simplement mesurée par le nombre de juridictions censées se faire concurrence. La rareté de ce type d’études dans les pays en développement résulte de l’absence supposée de comportements stratégiques des gouvernements locaux. Cette hypothèse souvent implicite dans la littérature s’appuie soit sur la faible mobilité des populations empêchant le « vote par les pieds », malgré une urbanisation importante des pays étudiés, soit sur l’absence d’une réelle compétition électorale au niveau local (concurrence par comparaison) malgré des preuves de politique partisane en matière de transferts intergouvernementaux. Pourtant, sans ignorer les spécificités propres aux pays en développement, Caldeira et al. (2012a) ont montré que la décentralisation dans les pays en développement pouvait induire sous certaines conditions des comportements stratégiques similaires à ceux observés dans les pays développés.
45La littérature empirique sur la décentralisation dans les pays en développement a de nombreux défis à relever pour permettre une analyse plus rigoureuse de la décentralisation et de sa capacité à tenir effectivement ses promesses – principalement, améliorer les performances du secteur public. Largement encouragée par les organisations internationales, la décentralisation n’apparaît pas, au regard des études empiriques menées jusqu’alors, comme étant une panacée. La compréhension de ses limites sera améliorée par une analyse systématique de ses effets qui nécessite un effort permanent de collecte de données sur les finances publiques locales dans les pays en développement. De plus, les conséquences de la décentralisation étant fortement dépendantes du contexte dans lequel elle est mise en place, la nécessité de multiplier les recherches empiriques sur les effets de la décentralisation n’en est que plus grande.
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Mots-clés éditeurs : revue de la littérature, décentralisation, pays en développement
Mise en ligne 19/02/2015
https://doi.org/10.3917/edd.284.0005Notes
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[1]
L’article a bénéficié d’un soutien de la Fondation pour les Etudes et Recherches sur le Développement International (FERDI).
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[2]
Émilie Caldeira, CERDI-CNRS, Université d’Auvergne. Email : emilie.caldeira@udamail.fr
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[3]
Grégoire Rota-Graziosi, Département des affaires fiscales, Fonds Monétaire International. Email : grotagraziosi@imf.org
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[4]
Nous considérons dans cette revue la concurrence fiscale horizontale, i.e. celle entre des juridictions de même niveau. La concurrence fiscale verticale, dont une analyse théorique est proposée par Keen et Kotsogiannis (2002) existe en particulier dans certains pays fédéraux en développement comme le Nigeria ou la République Démocratique du Congo, mais demeure encore peu étudiée (cf. Wilson, 1999 et Brueckner, 2003 pour une revue théorique et empirique de la concurrence fiscale).
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[5]
Même si les transferts intergouvernementaux participent au succès ou à l’échec de la décentralisation en assurant notamment une certaine péréquation, ils ne sont pas à l’origine de celle-ci. Ils seront néanmoins abordés dans la troisième section relative aux effets macroéconomiques de la décentralisation.
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[6]
Le modèle de Seabright (1996) est développé dans un contexte où les communautés sont homogènes. Hypothèse souvent faite dans le cadre de pays développés, considérant les faibles coûts de mobilité interjuridictionnelle, elle est souvent peu pertinente dans les pays en développement.
-
[7]
Contribuant à appuyer ce dernier argument, Reinikka et Svensson (2004) montrent que seulement 13 % des transferts d’éducation du gouvernement central en Ouganda ont finalement atteint les écoles primaires.
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[8]
Voir notamment les formalisations de Grossman et Helpman (1996) et Bardhan et Mookherjee (2000).
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[9]
Des études ont mis en évidence la capture des gouvernements locaux par de puissantes élites locales. Par exemple, Hartmann et Boyce (1983) ont décrit comment de riches agriculteurs au Bangladesh ont détourné un programme d’aide à l’irrigation de la Banque Mondiale qui devait bénéficier aux agriculteurs les plus défavorisés.
-
[10]
Estache et Sinha (1995) montrent également, à partir de deux échantillons de pays, un développé, un en développement, que la décentralisation tend à accroître les dépenses en infrastructure.
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[11]
De même, Khaleghian (2003) établit un effet positif de la décentralisation sur la vaccination des enfants dans les pays les plus pauvres.
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[12]
Ce contre-argument est limité pour au moins deux raisons (Hankla, 2009). Premièrement, il est peu probable que le gouvernement central soit aussi efficace que les gouvernements locaux pour reconnaître les préférences locales et y répondre. Deuxièmement, il semble délicat pour ce dernier d’adopter explicitement des politiques différenciées sur son territoire.
-
[13]
D’autres auteurs ont testé cet argument dans les pays développés. Voir, par exemple, Ashworth et Heyndels (1997) pour la Belgique, Bordignon, Cerniglia, et Revelli (2003) pour l’Italie, Schaltegger et Kuttel (2002) pour la Suisse et Revelli (2006) pour l’Angleterre.
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[14]
Caldeira (2012a) démontre l’existence d’une « concurrence par comparaison » en l’absence de démocratie locale en Chine.
-
[15]
En particulier, si les taux de taxe ou les dépenses publiques locales sont des compléments stratégiques, il y a un risque de multiplicité d’équilibres de Nash. Ceux-ci peuvent être ordonnés sous certaines conditions suivant le critère de Pareto. Le problème de coordination consiste alors à passer d’un équilibre où les taux de taxes ou les dépenses publiques locales sont faibles à un autre équilibre où ces variables sont plus élevées. De façon plus générale, un problème de coopération apparaît lorsqu’une situation est meilleure (Pareto dominante) pour tous les joueurs (gouvernements locaux ou population), mais n’est pas l’équilibre de Nash. La coopération vise alors à modifier les comportements des joueurs ou la structure du jeu-même (jeu répété par exemple) pour faire de cette situation hors équilibre un équilibre de Nash.
-
[16]
Cai et Treisman (2005) soulignent qu’elle peut affaiblir la discipline des unités les plus faiblement fournies.
-
[17]
Ces études sont nombreuses dans les pays développés. Kelejian et Prucha (1998), Sole-Olle (2006), Redoano (2007) ou Foucault, Madies, et Paty (2008) ont fourni des preuves empiriques de l’existence d’interactions stratégiques au niveau des dépenses publiques respectivement aux États-Unis, en Espagne et en France.
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[18]
“The central government may not know what to do, the local government may not know how to do it” (voir Bardhan, 2002, page 189).
-
[19]
Cet argument est sans doute moins fort dans les pays en développement compte tenu de la plus faible mobilité de la population.
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[20]
Au contraire, à partir de données de panel, Sepulveda et Jorge Martinez-Vazquez (2011) montrent que la décentralisation accroît la pauvreté mais contribue à réduire les inégalités si le gouvernement central représente une part significative de l’économie (20 %).
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[21]
De manière similaire, les résultats de Reinikka et Svensson (2004) tendent à montrer que la capture par les officiers locaux des subventions nationales à l’éducation est moindre dans les communautés les plus riches.
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[22]
Les études traitant de l’impact de la décentralisation sur la cohésion nationale ont des conclusions diverses. Certaines montrent que la décentralisation peut réduire l’unité nationale et accroître les conflits (Treisman, 1999 et Tranchant, 2010). D’autres, au contraire, concluent que la décentralisation peut éviter la désintégration d’États divisés (Lijphart, 1977).
-
[23]
Voir Boex et Martinez-Vazquez (2005) pour une revue des différentes formules d’allocation.
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[24]
Les études empiriques sur ce thème sont nombreuses : voir Case (2001) pour l’Albanie, Porto et Sanguinetti (2001) pour l’Argentine, Banful (2010) et Miguel et Zaidi (2003) pour le Ghana, Khemani (2007) et Cole (2009) pour l’Inde, Alperovich (1984) pour Israël, Caldeira (2012b) pour le Sénégal et Boex (2003) pour la Tanzanie.
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[25]
Comme il est préférable que les recettes fiscales des collectivités locales soient stables, elles proviennent généralement de bases à la fois peu mobiles et peu élastiques.
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[26]
Gramlich (1987) avait déjà mis en lumière que les déficits des États fédéraux aux États-Unis dans les années 1980 avaient réduit le rôle de l’État central dans les politiques contra-cycliques.
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[27]
En d’autres termes, la menace du gouvernement central de ne pas intervenir en cas de difficultés du gouvernement local n’est pas crédible.
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[28]
Parmi ces arguments, le mauvais fonctionnement des marchés financiers, des ressources financières et des dépenses futures peu prévisibles, des connaissances techniques financières et capacités managériales trop faibles, et une incitation du décideur politique à emprunter puisqu’il en bénéficie immédiatement tandis que la charge de cet emprunt est reportée dans le temps.
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[29]
Comme Smoke (2001) le fait remarquer, la plupart des gouvernements locaux dans les pays en développement ont encore un rôle modeste et peu d’entre eux ont la possibilité d’avoir des déficits ou accès aux marchés des capitaux.
-
[30]
L’effet final de la décentralisation sur la croissance a été étudié par Zhang et Fu Zou (1998), Wollera et Phillips (1998), Davoodi, Xie, et Zou (1999), Lin et Liu (2000), Akai et Sakata (2002), et Martinez-Vazquez et McNab (2003).
-
[31]
Nous ne prétendons pas à l’exhaustivité mais avons procédé à une sélection de travaux parmi ceux qui nous semblaient les plus pertinents.
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[32]
Si les pays d’Afrique sub-saharienne ont participé à la vague de décentralisation, les études économétriques les concernant sont rares.
-
[33]
En effet, les stratégies de développement étant alors basées sur la planification centrale, la décentralisation s’opposait à la nécessité d’un gouvernement central fort, capable de construire une nation dans des sociétés ethniquement fragmentées et de contrôler des économies vulnérables.
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[34]
Par exemple, les Enquêtes Démographiques et de Santé mises en place par la Banque Mondiale dans un grand nombre de pays africains sont généralement représentatives au niveau départemental alors que la décentralisation s’opère au niveau communal.