Couverture de ECOP_208

Article de revue

Transition écologique et investissements verts

Pages 57 à 75

Notes

  • [*]
    Délégué général du Conseil économique pour le développement durable.
    E-mail : dominique.bureau@developpement-durable.gouv.fr.
  • [1]
    c (r, q) = rv + (rq) f est donc de la forme c (r, q) = rh (q) avec, compte tenu de l’identité de Roy, f = h' et v' = qf '. L’élasticité de substitution au point considéré vérifie
    equation im84
  • [2]
    Le paramètre « a » doit donc être vu comme reflétant la productivité marginale nette du capital.
  • [3]
    Alternativement, on peut introduire la covariable λt du stock de ressource à l’instant t, dont la dynamique est régie par equation im85. Le principe de Pontryagin établit alors que equation im86 ce qui signifie qu’à l’optimum la valeur actualisée de la ressource est constante : il est en effet indifférent de déplacer à la marge le profil des prélèvements.
  • [4]
    Ici égales au prix de la ressource, car les coûts d’extraction ont été supposés nuls. Sinon, c’est à celles-ci que s’appliquerait la règle de Hotelling.
  • [5]
    Cette hypothèse ne vise qu’à la simplicité de l’exposé. L’extension du modèle à des fonctions d’utilité dont l’élasticité (y) de l’utilité marginale du revenu est constante est immédiate : la principale modification des résultats concerne la dynamique de la consommation et du capital associé, dont le taux vaut alors (a − ρ) / y.

1 Derrière la notion de croissance soutenable, il y a la prise de conscience que la croissance économique utilise actuellement des biens et services dont la production dégrade l’environnement, notamment ceux associés à l’énergie, qui sont à l’origine de l’accumulation de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. L’épuisement des actifs naturels correspondants ou leur détérioration très rapide la menace à terme.

2 La prise en compte du risque climatique et, plus généralement, celle des perspectives de raréfaction de certains actifs naturels justifient donc l’attention portée à limiter les pressions sur les ressources environnementales et à ce que ces actifs puissent continuer à fournir les ressources et services dont dépend notre bien-être. Cette ligne de réflexion conduit à considérer que les investissements contribuant à ces objectifs, c’est-à-dire les investissements pour la transition écologique, soient considérés comme prioritaires.

3 Cependant, l’idée qu’il faudrait intégrer un biais délibéré vers l’investissement « vert » en sortie de crise financière reste considérée comme hétérodoxe par beaucoup de responsables économiques et financiers.

4 Pour éclairer ce débat, un cadre d’analyse intégré des liens entre croissance économique et rareté de certains actifs naturels est proposé, qui permet d’étudier l’articulation entre les différents volets - allocatifs, distributifs et macroéconomiques - de la politique économique pour rétablir la soutenabilité de la croissance.

5 À cet égard, on peut agir au niveau de la consommation ou au niveau de la production, donc sur la demande pour les biens et services qui utilisent comme facteur de production l’environnement, ou en recherchant des modes de production de ceux-ci en réduisant l’impact environnemental : par exemple, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, en recherchant des comportements de consommation plus sobres en énergie ou en développant les énergies renouvelables.

6 La composition optimale de ces deux types d’actions et, en conséquence, le rôle de l’accumulation de capital vert dans la transition à opérer dépendent des valeurs relatives des élasticités concernant cette demande d’une part, et de la substituabilité entre capital vert et environnement dans leur fonction de production, d’autre part.

7 Si le gisement de réduction mobilisable du côté de la demande de biens polluants ne suffit pas, une réallocation importante du capital, vers le capital vert, est nécessaire, qui requiert une politique macroéconomique appropriée, dégageant une épargne suffisante et orientée vers ce type d’investissement.

8 Certes, le déploiement de ceux-ci sera progressif et doit se faire « par ordre de mérite ». Il demeure cependant une correction immédiate des structures de production à réaliser, qui doit être intégrée dans les stratégies macroéconomiques. Dans le cas où la productivité du capital vert est relativement faible, son accumulation, nécessaire pour s’adapter à l’épuisement des actifs naturels, tend, de plus, à prélever progressivement une part substantielle de l’épargne. Dans le cas plus favorable, le taux d’épargne rejoint progressivement son niveau habituel.

9 L’introduction, dans un modèle de croissance de type AK, d’un actif non renouvelable permet ainsi d’esquisser un cadre pour construire des modèles de croissance intégrant les arbitrages entre : consommation de bien courant et consommation de services énergétiques ; entre facteurs de production de ces services ; entre capital vert, capital productif et consommation. Les différentes facettes d’une politique de transition énergétique ou écologique peuvent ainsi être passées en revue, notamment ses impacts sur l’accumulation du capital vert, puis sur le partage optimal entre épargne et consommation.

10 Dans leur rapport au G20 en 2009, Edenhofer et Stern mettaient en avant une double crise, économique et écologique, du fait du risque climatique. Ce diagnostic les conduisait à recommander que la sortie de crise s’attache à promouvoir une stratégie globale de croissance de long terme, prenant en compte ce risque et, plus généralement, les perspectives de rareté de certains actifs naturels, en veillant à ce que ceux-ci puissent continuer à fournir les ressources et services environnementaux dont dépend notre bien-être. Concrètement, ils plaidaient pour que les investissements contribuant à ces objectifs, comme ceux dans les énergies renouvelables soient considérés comme prioritaires.

11 Cette recommandation reflète les conclusions de nombreux travaux de prospective s’intéressant, par exemple, à la transition énergétique et la « décarbonation » du secteur électrique (AIE, 2010) ou, a fortiori, à celles, beaucoup moins engagées à ce jour comme le montrait la « feuille de route » de la Commission européenne de 2011, des bâtiments, des villes ou des transports. En effet, ces transformations nécessitent de nouvelles infrastructures (et en amont de la recherche et développement (R&D), de l’innovation, des démonstrateurs, ...), et une réallocation forte des investissements, des équipements utilisant les combustibles fossiles vers des technologies propres.

12 Ces études estiment souvent qu’une part importante de ces investissements constituent des mesures « sans regret », rentables pour les agents concernés même en l’absence de prix du carbone significatif. Leur crainte (cf. Grandjean et alii, 2011) est que l’épargne ne soit pas assez orientée vers le financement de ces investissements « verts », ou ne soit pas à la hauteur de l’ampleur de l’effort d’investissement considéré comme nécessaire. L’horizon souvent très long des équipements considérés (réseaux et centrales électriques, infrastructures de transports et urbaines), et la difficulté à en répartir les risques notamment pour les technologies et filières émergentes, constituent par ailleurs des obstacles à leur financement (CEDD, 2011).

13 L’idée qu’il faudrait intégrer un biais délibéré vers l’investissement « vert » en sortie de crise financière apparaît cependant hétérodoxe à beaucoup de responsables économiques et financiers, d’autant qu’elle leur paraît antinomique avec la maîtrise des dettes publiques et le besoin, mis en exergue par la crise financière, de renforcer le contrôle des risques dans la régulation financière.

14 Certes, il est objecté à cela que les investissements à réaliser concernent autant le secteur privé que le secteur public, et qu’ils visent fondamentalement à préserver les capacités de croissance et réduire les risques à long terme. Toutefois cet argument est loin de suffire pour résorber le fossé qui demeure entre des préoccupations, toutes légitimes. En effet, les uns soulignent avec raison qu’un accès trop facile à l’emprunt n’est pas sans danger, et que ce n’est pas un substitut « naturel » au niveau généralement insuffisant du signal-prix établi par les politiques environnementales. Les autres relativisent la portée de cet argument si la transition écologique passe essentiellement par de l’investissement. De plus, ils discutent la pertinence de modèles qui posent comme hypothèse que l’économie évolue au voisinage de sentiers de croissance équilibrée, alors que l’épuisement de certaines ressources leur semble justement de nature à l’invalider, ceci constituant même l’essence des problèmes de soutenabilité.

15 Les controverses qui ont suivi la « Stern Review » (2007) à propos de l’évaluation de la rentabilité économique et sociale des investissements d’atténuation du risque climatique constituent une toile de fond pour ces controverses. Cependant ce n’est pas le seul, ni même peut-être l’élément déterminant, dès lors que l’analyse développée par Edenhofer et Stern (op. cit.) prend soin de justifier la balance coûts-bénéfices de ces investissements.

16 À cet égard, le développement de l’évaluation du coût des dommages, ou, symétriquement, celle de la valeur des services environnementaux et des actifs naturels, a constitué, ces quinze dernières années, un champ de recherches et d’études extrêmement fécond, qui permet aujourd’hui de disposer de références -certes à utiliser en étant conscient de leurs incertitudes- pour évaluer les politiques ou projets d’investissements, par rapport aux enjeux d’environnement et les risques à long terme (Bureau, 2012). La rentabilité économique générale des investissements verts peut ainsi faire l’objet d’estimations, même si elle pose encore de redoutables problèmes (Gollier, 2013).

17 Toutefois, pour juger de la priorité à accorder, aujourd’hui, aux investissements verts, il convient d’en discuter précisément le « timing », pour apprécier l’ampleur de la « bosse » qui devrait être financée à court-terme. À cet égard, les « macroéconomistes » interrogent :

18

  • l’ampleur alléguée des mesures « sans-regret », qu’ils associent à une inefficacité apparente des marchés extrême, dont l’origine devrait être explicitée ;
  • la rentabilité « immédiate » de ces projets. Certes, la bonne exploitation des courbes d’apprentissage peut justifier une action précoce et expliquer que les dates optimales de réalisation des projets « verts » soient peu sensibles à la conjoncture macroéconomique. Pour autant, celles-ci restent dépendantes des trajectoires de prix, notamment des ressources naturelles, ou du carbone, d’où des questions aussi sur l’efficacité de la programmation des investissements par rapport à leur ordre de mérite ;
  • enfin, l’affectation des instruments, au regard de la typologie classique de Musgrave, qui sépare nettement les fonctions de stabilisation et de redistribution, de celles d’allocation des ressources. Dans cette perspective, il est mis en avant, qu’une fois établis les prix écologiques nécessaires pour assurer l’internalisation des différentes raretés des ressources naturelles, la conduite de la politique macroéconomique se poserait dans les termes « usuels », sous-entendu, sans qu’il y ait lieu de prendre en compte à ce niveau la structure de l’investissement et les besoins d’investissements verts.

19 Cependant, « stricte affectation » des instruments ne signifie pas totale indépendance des régulations. Ainsi, la mise en place du signal-prix environnemental appelle généralement des mesures redistributives compensatoires. De même, peut être nécessaire un accompagnement macroéconomique, pour garantir que l’accumulation du capital s’effectue au rythme approprié.

20 Pour le décrire, il faut, en premier lieu, identifier et qualifier les interactions et canaux de transmission. Par exemple, les problèmes macroéconomiques seront potentiellement plus aigus si les investissements « verts » sont lourds et « s’ajoutent » aux autres besoins d’investissement. En fait, cette question demeure controversée (Corfee-Morlot et alii, 2012). Plus généralement, comme ce fut le cas au début des années 1990 avec les débats sur les besoins d’infrastructures pour la croissance, trouver un langage commun entre, ici les économistes des ressources naturelles, et les macroéconomistes, ou entre les experts des politiques concernées, est difficile.

21 La prospective sectorielle raisonne à partir de modèles technico-économiques, en général sans bouclage macroéconomique, mais qui s’attachent en revanche à distinguer entre le rôle de l’efficacité énergétique et celui de l’introduction de nouvelles technologies « décarbonées » pour produire l’énergie, car les besoins d’investissement résultants sont différents. L’analyse macroéconomique utilise des fonctions de production très globales et postule une croissance tendanciellement équilibrée à long-terme qui n’intègre pas les contraintes résultant de l’épuisement de certains actifs naturels. Il apparaît donc nécessaire de développer des approches plus intégrées.

22 On se propose ici d’établir un prototype de tel cadre pour l’analyse des liens entre croissance économique et rareté de certains actifs naturels, et par là, de base de dialogue entre les différents volets de la politique économique. Pour cela, il faut a minima : pouvoir distinguer l’évolution des modes de consommation de celle des modes de production ; et enrichir l’analyse des modèles de croissance avec actifs naturels, en explicitant, au sein du capital productif, la dynamique des infrastructures ou équipements qui conditionnent directement la transition écologique, ce que sous-tend le vocable « investissements verts ».

23 À cet égard, il faut une description du processus de remplacement des ressources naturelles par ce capital « vert » qui soit plus réaliste que celle des modèles « backstop ». Dans ce cas, les deux types d’actifs (capital vert, alors associé à des innovations d’un côté, et ressource épuisable, de l’autre) sont supposés parfaitement substituables, si bien que les trajectoires optimales consistent en général à utiliser d’abord les actifs naturels, et à n’introduire le nouveau capital qu’au-delà de leur épuisement. Au contraire, les scénarios de prospective sectorielle évoqués ci-dessus (ou certains modèles plus élaborés, comme celui développé par Amigues et alii à propos de la capture-stockage du carbone, 2012) décrivent un processus beaucoup plus progressif, reflétant implicitement une substituabilité imparfaite entre actifs naturels et capital vert pour produire les services énergétiques ou environnementaux, obligeant à préserver une quantité suffisante des premiers pour les générations futures mais, en contrepartie, à engager tôt l’accumulation de capital vert.

24 L’analyse d’un tel modèle de croissance permet de passer en revue les différents aspects, « micro » ou « macroéconomiques », de la politique économique dans un contexte de transition écologique. La première partie décrit le modèle, et établit une typologie des scénarios (optimaux) possibles de réallocation du capital entre capital courant et capital « vert ». La seconde partie étudie, dans l’hypothèse où les économies d’énergie finale ne suffisent pas ou sont vite trop coûteuses, les impacts de cette dynamique sur l’évolution souhaitable du taux d’épargne et l’accumulation du capital.

Les réallocations du capital nécessaires à la transition écologique

25 Le modèle combine un modèle de croissance productive stylisé auto-entretenue (modèle prototype de croissance endogène, dit « AK », qu’utilisent aussi Guéant et alii (2012) pour étudier le taux d’actualisation à utiliser pour évaluer les projets visant à préserver la qualité de l’environnement) ; et un modèle canonique en économie des ressources, de gestion sous plafond d’une ressource épuisable. De cette manière, on se donne les moyens d’éclairer les débats entre ceux qui ont confiance dans les ressorts de l’économie et ceux qui craignent qu’elle ne bute sur les limites de la planète : le modèle AK reflète l’optimisme des premiers, sous réserve que l’effort d’investissement soit suffisant ; le modèle de ressource épuisable formalise des contraintes écologiques strictes.

26 Outre la combinaison de ces deux éléments contrastés eu égard aux possibilités et contraintes mises sur la croissance, sa spécificité est de considérer que la ressource épuisable constitue « un input » pour la production de certains services fournis aux ménages (« énergétiques, ou écologiques »), l’autre « input » nécessaire, et imparfaitement substituable, étant du capital « vert ». Après avoir présenté le modèle et caractérisé les scénarios de croissance optimale, on analyse leur conditions générales de réalisation. On montre notamment, que selon les caractéristiques de l’offre et de la demande pour les services utilisant la ressource naturelle, les réallocations de capital à opérer, entre capital productif et capital vert, peuvent être très typées.

Le modèle

27 La figure 1 ci-dessous schématise la structure du modèle, construit pour intégrer les arbitrages entre : consommation de bien courant et consommation de services énergétiques ou écologiques ; entre facteurs de production de ces services ; entre capital vert, capital productif et consommation.

28 Au niveau des ménages, le modèle distingue deux biens, la consommation de bien courant (C), et celle des services « énergétiques ou écologiques » (equation im1) dont la production combine : des inputs (F) prélevés dans les actifs naturels ; et du capital vert (V). On suppose que les deux biens de consommation se combinent de manière additive quasi-linéaire dans la fonction d’utilité U, et on noteu (equation im2) : le consentement brut à payer pour ces services utilisant les ressources naturelles comme facteur de production (u’ > 0, u’’< 0) ; et D(p) la fonction de demande qui s’en déduit, si p est le prix de ces services (D’ (p) < 0).

29 La fonction d’utilité des consommateurs à l’instant t est donc de la forme equation im3, avec U croissante, strictement concave, deux fois continûment dérivable, et telle que l’utilité marginale d’une consommation nulle est infinie. Le modèle est écrit en temps continu, en notant ρ le taux de préférence pur pour le présent de la fonction d’utilité intertemporelle (W).

Figure 1

structure du modèle

figure im4

structure du modèle

auteur, adapté d’une présentation de Gilles Lafforgue.

30 La fonction de production E(V, F) des services énergétiques ou écologiques est à rendements constants et quasi-concave. Est associée à cette fonction de production la fonction de coûts par unité de production c (r, q), r étant le coût d’usage du capital vert, et q le coût relatif de la ressource naturelle par rapport à celui de l’usage de capital vert. On note f(q) et v(q) les demandes d’inputs correspondantes (pour une production unitaire) en ressource naturelle et capital vert, vérifiant les propriétés habituelles (cf. Bourguignon et alii - chap. II, 1992) [1].

31 Par ailleurs, on suppose que le capital total productif (K) se décompose entre du capital à tout faire (K-V), et le capital « vert » (V). Le capital à tout-faire (équipements, bâtiments, mais aussi capital humain et connaissances) permet de produire à la fois le bien de consommation courant et le bien d’investissement servant à l’accumulation du capital, avec une rentabilité marginale constante (a, avec a > ρ, et donc, potentiellement une croissance auto-entretenue). La production de bien courant vaut donc Y = a (K-V).

32 Pour alléger le formalisme du modèle et en faciliter la lecture, on considèrera nuls [2] les taux de dépréciation du capital et les coûts d’extraction de la ressource. On note K0 le stock de capital disponible à l’instant initial et S0 le stock de ressource naturelle résiduel disponible à cette date. La contrainte de non-renouvelabilité de celle-ci pourra s’interpréter, soit comme une contrainte sur un certain stock de ressources, par exemple fossiles ou minérales, mais aussi, alternativement, comme un seuil strict sur les concentrations admissibles de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.

33 S’agissant d’une externalité de « stock » (les dommages à chaque instant étant fonction du cumul passé des émissions) pour laquelle les dommages demeurent faibles tant que n’est pas dépassé un certain seuil de concentration, et catastrophiques au-delà (par exemple 550 ppm), on peut en effet formaliser le problème de gestion intertemporelle de ces émissions comme celui d’une ressource épuisable : c’est l’hypothèse du modèle dit ‘‘à plafond’’, étudié par Chakravorthy et alii (2006) et Lafforgue et alii (2008), qui postule que les trajectoires d’émissions sont contraintes par l’obligation de ne pas dépasser un certain seuil pour leur cumul : tout se passe en effet comme si on disposait d’un budget d’émissions limité, à se partager entre générations, les émissions à chaque instant constituant par ailleurs un facteur de production de l’économie. Ce facteur est donc prélevé sur l’actif que constitue le plafond global.

34 Cette formalisation est courante, mais peut être enrichie, en combinant, comme le font Amigues et alii (2011), un tel plafond global et des dommages en « flux ».

35 Au niveau de la caractérisation mathématique des trajectoires optimales, il n’y a pas besoin de distinguer entre ces différentes interprétations possibles du modèle, selon qu’il s’agit de ressources fossiles, minérales ou du climat (ainsi formalisé). En revanche, les conditions institutionnelles de réalisation devront évidemment préciser selon que la ressource naturelle considérée fait, ou non, l’objet de droits de propriété établis.

36 S’agissant plus particulièrement du carbone, qui relève d’un double plafond, par rapport aux ressources fossiles disponibles, et par rapport aux capacités d’absorption atmosphériques, pour ne pas dérégler le climat, notre interprétation préférée sera celle de la contrainte climatique, sans droits de propriété établis. En effet, notre budget carbone « émissions » est de l’ordre de quatre fois inférieur aux ressources fossiles estimées. Dans ce cas, F est donc le flux d’émissions de gaz à effet de serre et S0 le « budget carbone » qui demeure disponible par rapport au plafond admissible de leur concentration dans l’atmosphère.

37 L’essence des exercices auxquels nous voulons nous livrer consiste à imaginer qu’à l’instant t = 0, la société prend conscience que la rareté des ressources naturelles est beaucoup plus forte que ce qui était antérieurement imaginé (equation im5). Pour cela, on s’intéressera donc à la statique comparative des trajectoires optimales en fonction de S0 , dont on note W * (K0 , S0 ) l’issue en termes de bien-être intertemporel.

Optimum

38 Si, pour identifier l’orientation des réallocations à envisager, on fait l’hypothèse idéale d’un capital total parfaitement mobile entre ses deux formes (V ou K-V), disponible en quantité suffisante pour ne pas avoir à introduire d’autre contrainte dans le programme d’optimisation, et plus généralement, qu’il existe des scénarios compatibles avec les contraintes sur l’épuisabilité des ressources, l’accumulation du capital et les « besoins » des consommateurs, le problème de croissance optimale à considérer s’écrit, en indiçant par t les flux à l’instant t :

equation im6
⎧⎪Max W = ∫0U(Ct + u (E(t ))e−ρt .dt
avec E(t = E(Vt, Ft)
(1) ⎪⎪⎨ ∫0Ft .dtS0
K̇t = a (KtVt ) − Ct

avec K(t = 0) = K0

39 La contrainte de rareté intertemporelle pour la ressource naturelle s’exprimant formellement comme la fonction objectif, on peut résoudre ce programme en introduisant son multiplicateur de Lagrange (λ). Notant (μt ) la variable adjointe de l’équation d’accumulation du capital, l’hamiltonien de cette économie convexe s’écrit alors [3] :

equation im7
(
H = U (Ct + u (Et )) e−ρt − λFt
+ μt [a (KtVt ) − Ct]

40 Les trajectoires optimales pour la consommation des ressources épuisables Ft , l’accumulation du capital Kt , les structures de production et de consommation vérifient donc (si equation im8F, V, KV > 0, cf. infra) :

equation im9
⎧ (K) μ̇ = − aμ soit μ = μ .eat
ttρt tat t 0
(Ct) e . U'=μ0.e

(2) ⎪⎨ et lim μt Kt = 0

(Vt ) EV' (tVt, Ft ).u' (E(t ) = a

⎩⎪ (Ft) EF'(Vt, Ft).u'(E(t) = (λ / μ0)eat

41 Les trois premières équations reflètent un modèle de croissance à taux d’intérêt constant (a), égal à la productivité marginale du capital, dans lequel le partage entre consommation et investissement est optimal à tout instant, si bien que la valeur sociale (μt ) du bien courant est indépendante de l’usage qui pourrait en être fait, consommation (que l’on utilisera comme numéraire), ou investissement.

42 Si, pour décentraliser cet optimum, on prend le bien courant comme numéraire, le coût d’usage du capital « vert » à considérer vaut aussi (a), qui représente le coût d’opportunité d’affecter du capital à la production des services énergétiques ou écologiques, plutôt qu’à celle de bien courant.

43 Par ailleurs, ce scénario de croissance optimal est associé à un prix de la ressource épuisable (πt = (λ / μ0 ) eat ) qui suit la règle de Hotelling, c’est-à-dire croissant comme le taux d’actualisation (a), et prenant une valeur initiale adaptée à la contrainte globale sur le stock S0.

44 L’équation (Vt ) exprime alors l’égalité, à la marge, entre le consentement à payer pour un supplément de ces services à l’instant t, et le coût marginal de production qu’il faut engager pour satisfaire cette demande supplémentaire, si l’on suppose que l’input utilisé pour cela est du capital vert.

45 L’équation (Ft ) exprime la même égalité, si l’on utilise comme input la ressource épuisable. L’égalité de ces deux coûts marginaux reflète l’optimalité de la structure de production de ces services par rapport aux prix relatifs des deux facteurs.

46 Face à ce système de prix on a donc, à tout instant : l’égalité entre le prix des facteurs et leur taux marginal de transformation ; celle entre le consentement marginal à payer pour ces services et leur coût marginal ; et l’égalité entre les emplois de la ressource épuisable et sa disponibilité globale. L’équilibre de marché ainsi défini soutient donc les trajectoires optimales.

47 Cette caractérisation vaut aussi lorsque l’on réintroduit la possibilité éventuelle queequation im10ou que les isoquantes de E(F, V) coupent les axes. Par exemple, dans le cas où les deux facteurs sont très substituables, il est envisageable de se passer totalement de la ressource épuisable à partir d’un certain instant, ce qui se réalise quand son prix devient suffisamment élevé. Dans ce cas, la condition (Ft ) devient une inégalité stricte, qui exprime qu’au prix atteint par πt , il est préférable de ne plus utiliser le facteur épuisable.

48 Compte tenu que la fonction d’utilité a été supposée séparable entre C et equation im11, et sans effet-revenu pour la demande de services « écologiques ou énergétiques », les trajectoires du capital vert V et des prélèvements F ne dépendent que de S0, qui détermine le « prix » initial de la ressource épuisable. En revanche, elles sont indépendantes de K0 .

49 Le modèle se résout donc récursivement, la partie concernant les services liés aux ressources naturelles ne dépendant que de (a) -considéré comme une donnée structurelle intangible- et de S0. La trajectoire de V peut ensuite être intégrée dans l’équation d’accumulation pour déterminer celle du taux d’épargne. Commençons donc par décrire le volet sectoriel, c’est-à-dire les trajectoires des variables directement liées à la ressource épuisable, en posant :

equation im12
(3) Π0 (S0 ) = λ / μ0 et q0( S0 ) = Π0( S0 ) / a

50 Avec ces notations pour les prix liés à la ressource à l’instant 0, le prix de celle-ci et le prix relatif des facteurs de production des services énergétiques ou écologiques (qt ) valent respectivement :

equation im13
(4) πt = Π0 (S0 ).eat et qt = q0( S0 ) eat

51 On peut ainsi décrire les différentes formes de trajectoires envisageables pour F et V selon les caractéristiques des fonctions de production et de consommation des services (equation im14).

52 La figure 2 illustre le cas de base où les isoquantes de la fonction de production E(F, V) ne coupent pas les axes, c’est-à-dire où la substituabilité entre input épuisable et capital vert demeure limitée.

Figure 2

cas d’une faible substituabilité des facteurs de production

figure im15
Évolution de la structure de production
v
E
Isoquante
E(v, f) = 1
E
vtt
a
E
v00
π0 πtft f0 f

cas d’une faible substituabilité des facteurs de production

auteur.

53 Comme on a supposé la production de ces services à rendements constants, la structure de production peut être décrite en considérant seulement l’isoquante pour une unité de production, les demandes totales étant obtenues en les multipliant par le niveau de demande. Celui-ci décroît par ailleurs au cours du temps, compte tenu de l’accroissement du prix de la ressource épuisable, qui accroît le prix de ces services.

54 Partant du point E0 correspondant à la structure de prix (π0, a) pour les facteurs de production, le relèvement progressif de π conformément à la règle de Hotelling (4) implique donc que la structure des facteurs de production substitue du capital vert à la ressource épuisable, suivant la direction indiquée sur l’isoquante.

55 Ce processus prend éventuellement fin si la demande pour les services correspondants devient nulle à partir d’un certain instant. Ceci ne sera cependant envisageable que si le consentement marginal à payer pour leur première unité consommée est borné.

56 Lorsque la substituabilité entre facteurs est telle que les isoquantes coupent les axes, il peut s’ajouter à cela une phase préalable, où seul le facteur épuisable est utilisé. Par ailleurs, si le service fourni est un bien essentiel, dont la demande est toujours strictement positive, le capital vert sera seul utilisé au-delà d’un certain instant (cf. figure 3).

57 Dans le cas extrême d’une substitution parfaite entre facteurs de production, l’isoquante est un segment de droite. La phase intermédiaire où les deux facteurs sont utilisés simultanément disparaît : on retrouve ainsi comme cas-limite celui des technologies dites « Backstop ».

Figure 3

cas où les isoquantes coupent les axes

figure im16
Forte substituabilité entre F et V
v
vmax
E E0
vt Cas de base
t
Cas d’une ressource « plus » abondante
a
v0
π0 πt ftf0fmax f

cas où les isoquantes coupent les axes

auteur.

Prix de la ressource épuisable

58 Notant pt le prix des services equation im17 à l’instant t, l’équilibre de marché associé à l’optimum peut être réécrit avec la fonction de demande D(pt ) associée à equation im18, et les fonctions de coût associées à E(Vt , Ft ), dont le coût moyen c (a, qt ) est, compte tenu de l’hypothèse de rendements constants, égal au coût marginal (avec la structure de facteurs adaptée aux prix relatifs). Cet équilibre vérifie donc :

equation im19
pt = c (a, qt ) et E(t = D(pt)

((
Ft= f (qt) Etet Vt= v(qt) E t
(5) ⎨

avec
⎩⎪0∞Ftdt = S0

59 Ce système définit implicitement la fonction q0 (S0 ), dont se déduit la trajectoire complète du prix des facteurs pour la production du bien equation im20, compte tenu de la règle de Hotelling, ainsi que celle de son coût unitaire de production et par là celle de sa demande. Plus précisément, q0 (S0 ) vérifie :

equation im21
(6) S0 = ∫0 D(c (a, q0( S0 ) eat )). f (q0( S0 ).eat ).dt

Typologie des scénarios de réallocation du capital

60 Dans le cadre étudié, la politique publique consiste premièrement à établir la « vérité des prix » : il faut s’assurer que la trajectoire de prix de la ressource naturelle suit la règle de Hotelling, pour diminuer progressivement l’usage de cette ressource ; et il faut que son niveau initial soit compatible avec sa disponibilité globale. L’impact du signal-prix correspondant passe alors par deux canaux. D’une part, il affecte directement la demande des services produits à partir de cette ressource et du capital vert.

61 D’autre part, l’anticipation de l’accroissement du prix de la ressource rentabilise les investissements en capital « vert » permettant de l’économiser, au niveau de leur production de ces services.

62 Plus grandes seront les possibilités de substitution des ressources naturelles, soit au niveau de la demande, soit à celui de la fonction de production de ces services, plus facile sera la transition écologique. Néanmoins, selon les caractéristiques des fonctions u et E, les poids respectifs de ces deux mécanismes seront variables, et par là les enjeux macroéconomiques d’accumulation et de réallocation du capital à considérer.

63 Si l’on considère, par exemple, le cas où la fonction de production E(V, F) est une fonction de Cobb-Douglas et que l’élasticité-prix de la demande pour ces services vaut 1, alors V ne dépend pas en fait de S0 . Il n’y a donc pas, dans ce cas particulier, de problème macroéconomique avec l’investissement vert. L’intérêt du modèle est qu’il permet de caractériser les situations où un tel problème peut émerger, la prise de conscience de la raréfaction des ressources naturelles disponibles appelant un supplément de capital vert important.

64 Pour les identifier, il faut différencier l’équilibre défini par (5) et (6), suite à une variation de S0 . Les calculs sont analogues à ceux habituels en incidence fiscale (cf. Salanié, 2002). En premier lieu, on remarque qu’une réduction de S0 conduit nécessairement à un relèvement du prix de la ressource à l’instant initial et donc de l’ensemble de sa trajectoire (compte tenu de (4)).

Proposition 1. equation im22

65 En effet, on a D' ≤ 0 et f ' ≤ 0 en tout point. Si l’on différencie la formule (6), il vient donc :

equation im23
q0' (S0 ) <0 et donc Π'0 (S0 ) < 0

66 Cette statique comparative exprime que, suite à une hausse du prix de la ressource, la demande pour celle-ci subit deux impacts allant dans le même sens : la substitution des facteurs dans la production des services l’utilisant comme facteur de production ; et la réduction de la demande pour ces services avec la hausse de leur prix, du fait de la répercussion dans ce dernier de la hausse de celui de la ressource.

67 Ces deux effets jouent en revanche de manière contradictoire sur le niveau de capital vert mis en œuvre. Sa trajectoire suit en effet :

equation im24
Vt = v (qt ) D(c (a, qt )), soit (notation) : Vt = V (qt)

68 Si l’on note η, l’élasticité-prix de la demande (D), et σ l’élasticité de substitution de la fonction de production E(V, F) au point considéré (qui mesure la variation relative de la combinaison des facteurs en fonction de leur prix relatif), on a donc, compte tenu des propriétés des fonctions de demande de facteurs de production :

equation im25
V' (q) / V(q) = (1/ q)[a.q. f(q) / c (a, q)] (σ − η)

69 Proposition 2. Si on considère des fonctions de demande et de production à élasticités constantes, une raréfaction de la ressource (Δ S0 < 0) appelle un accroissement (respectivement une diminution) du besoin en capital vert (V) à tout instant, et donc notamment, en t = 0, si l’élasticité de la demande η est inférieure (respectivement supérieure) à l’élasticité de substitution σ dans la production des services énergétiques ou écologiques.

70 En effet, l’anticipation que la ressource disponible est réduite conduit à un relèvement de sa trajectoire de prix, et donc aussi du prix relatif des facteurs et du prix des services qu’elle permet de produire. Si l’élasticité de la demande est forte, l’ajustement se fait essentiellement au niveau de la demande, c’est-à-dire des « économies d’énergie » (par exemple), et c’est par ce canal que joue la « vérité » des prix de la ressource. Dans cette configuration, il n’y a pas besoin de capital vert supplémentaire, et donc pas de contrainte macroéconomique particulière pour gérer la transition écologique.

71 En revanche, si ces services sont des biens essentiels, inélastiques, l’ajustement ne peut se faire qu’au niveau du mode de production de ces services. Il passe alors essentiellement par un accroissement de capital vert, le rôle du signal-prix dans ce cas étant de rendre rémunérateurs les investissements économisant la ressource naturelle. C’est donc sa prévisibilité qui est alors déterminante. Dans ce cas, la trajectoire optimale pour le capital vert marquera, comme celle du prix de la ressource, un saut à l’instant t = 0, c’est-à-dire au moment où l’on prend conscience de la rareté plus aiguë des ressources naturelles.

72 En effet, il y a alors à prendre la mesure que cette rareté, qui n’avait pas été anticipée antérieurement, signifie que les structures productives héritées du passé sont devenues inadaptées. Il serait donc souhaitable de les corriger immédiatement, en opérant une réallocation instantanée du capital productif vers le capital « vert » (sous réserve évidemment d’éventuelles contraintes à prendre en compte sur cet ajustement et la mobilité du capital, que nous examinerons dans la dernière partie). Dans ces conditions, l’observation, rappelée en introduction, qu’il y aurait un effort d’investissement vert important à réaliser dès maintenant ne doit pas forcément surprendre.

73 Par exemple, une part importante du parc de bâtiment a été réalisée dans un contexte d’énergie supposée indéfiniment peu chère. La simple réévaluation de la prospective des prix de l’énergie justifie ainsi la réalisation immédiate de certaines opérations d’isolation ou de changements de sources d’énergie sur ce parc. En résumé, les marchés n’ayant aucune raison d’avoir anticipé le risque climatique avant que les scientifiques ne l’aient documenté, il n’y a pas lieu d’être surpris d’avoir à corriger la trajectoire d’accumulation du capital vert au moment où l’on en prend conscience.

74 Le tableau 1 illustre l’analyse qui précède dans quelques cas polaires.

Tableau 1

statique comparative

σ η Facteurs complémentaires Fonction de Cobb-Douglas Facteurs parfaitement substituables
Demande inélastique Pas de solution soutenable Accroissement Modèle Backstop V0 = 0
Élasticité unitaire u = Log Diminution V inchangé idem
figure im26

statique comparative

Impact sur V d’une dimintution du stock de ressource S0
auteur.

75 S’il est exact qu’il existe des gisements d’économies d’énergie comportementales, mobilisables immédiatement, celles-ci semblent insuffisantes pour réaliser des scénarios de type « facteur 4 » en matière de gaz à effet de serre : la réduction des émissions de ces gaz par les transports, les villes, et le secteur électrique nécessite en effet des investissements lourds. Le scénario (η < σ), dans lequel il faudrait pouvoir immédiatement réallouer du capital pour disposer de plus de capital « vert » semble donc la configuration la plus réaliste (même si le canal d’ajustement par la demande, à l’origine des effets-rebonds, ne peut être négligé). C’est donc ce scénario que l’on approfondira dans la deuxième partie, pour en évaluer les conséquences sur la politique d’accumulation du capital.

La réalisation de l’optimum de 1er rang : implications pour la conception des politiques publiques

76 La règle de Hotelling, qui se transmet ensuite au niveau de l’équilibre de marché des secteurs liés à l’utilisation des ressources épuisables, peut émerger du fonctionnement du marché de cette ressource, si celui-ci existe, -ce qui suppose que les droits de propriété sur celle-ci soient définis-, et s’il est concurrentiel. Elle reflète alors, qu’à l’équilibre, aucun producteur n’a intérêt à changer son plan de production intertemporel, son profit actualisé (ici au taux a) restant inchangé au 1er ordre. Si, par ailleurs, ceux-ci anticipent parfaitement le plafond de ressources (S0 ), et que la production, en aval, des services utilisant la ressource épuisable est elle-même concurrentielle (ou que la production de ces services est réalisée directement par les ménages), l’équilibre concurrentiel sous prévision parfaite de ces secteurs d’activités s’identifie alors aux conditions du système (5), (6).

77 En revanche, si, comme c’est le cas lorsque l’on interprète S0 comme un plafond sur le cumul des émissions de gaz à effet de serre, la ressource naturelle est initialement en libre-accès, non régulé, le fonctionnement des marchés spontané conduira à son épuisement précoce. Sa gestion efficace requiert de lui fixer un prix adapté, pour orienter les comportements de consommation des services associés et rendre rémunérateurs les investissements privés en capital vert. En particulier, son évolution doit être conforme à la règle de Hotelling.

78 Cela peut se faire, soit par un système de type « cap and trade » (marché de licences concurrentiel sous plafond global), soit par le biais de la fiscalité environnementale. Les voies et moyens pour cela (de même que la description plus fine des actifs naturels à considérer, en fait multiples : ressources fossiles mais aussi minérales -probablement encore plus contraintes-, qualité de l’atmosphère, biodiversité) sont le domaine de l’économie de l’environnement et des ressources naturelles, qui, à la suite de Weitzman, a précisé les conditions de choix entre les deux types d’instruments lorsque l’on quitte l’hypothèse d’information parfaite où ils sont équivalents, et les implications distributives des règles d’allocation des droits initiaux. Plus récemment, Acemoglu et alii (2012) ont précisé la panoplie d’instruments à mettre en œuvre -écotaxes et aides à la recherche- pour orienter l’innovation dans ce contexte, Henriet et alii (2014) en déclinant les enjeux dans le contexte de la « décarbonation » de l’économie française.

79 S’agissant de ce volet allocatif de la politique économique, le modèle n’appelle pas de commentaire particulier, par rapport aux points généraux d’attention mis en exergue par Guesnerie et alii (2012). Ce qui nous intéresse ici est plutôt qu’il permet de passer en revue les interactions éventuelles entre cette régulation de la ressource naturelle, et la conduite des autres volets de la politique économique : redistribution et stabilisation macroéconomique.

80 En effet, contexte de premier rang, où l’affectation des instruments est stricte, ne signifie pas que ces différents volets puissent totalement s’ignorer. Par exemple, la mise en place du signal-prix efficace appelle éventuellement la mise en œuvre de mesures redistributives compensatoires, pour en corriger les éventuels effets indésirables, par exemple sur le pouvoir d’achat des plus pauvres. Par ailleurs, on verra ci-dessous comment la politique macroéconomique doit aussi s’assurer que le processus d’accumulation du capital permet de constituer le stock de capital vert au niveau approprié.

81 Dans la mesure où le modèle ne considère qu’un consommateur représentatif, son éclairage sur les problèmes redistributifs intragénérationnels est limité. Il permet toutefois de rappeler que si ces services répondent à des besoins de première nécessité des ménages, l’importance des « rentes » dans le revenu total est appelée à augmenter et cela peut aiguiser certains problèmes de précarité, comme on le voit pour l’énergie. En effet, la règle de Hotelling, combinée à un coût d’usage du capital vert constant, détermine une dérive du prix relatif des services utilisant la ressource épuisable, par rapport aux biens de consommation courante.

82 Il importe de bien l’anticiper, si l’on veut écarter les tensions inflationnistes résultant des conflits dans leur appropriation ; et, avant cela, assurer l’acceptabilité de la « vérité des prix » de ces ressources. À cet égard, les difficultés que rencontre la mise en place de taxes carbone reflètent bien un tel conflit, entre équité et efficacité, sachant qu’elle impliquerait un transfert important de rentes, entre les producteurs de combustibles fossiles, qui verraient leurs rentes se réduire, et l’État qui percevrait les rentes « carbone » ainsi créées. La Norvège, qui taxe fortement les revenus venant de l’exploitation de ses ressources fossiles et les affecte à la gestion de ses régimes de retraites constitue un exemple d’anticipation de ces questions. Si ces dimensions n’étaient pas intégrées dans la conduite de la politique économique, on peut craindre que l’impact d’une réduction de la disponibilité des actifs naturels sur la croissance future soit bien supérieur à l’effet estimé en supposant que l’on atteint toujours le 1er rang, comme on le fera ci-dessous.

83 Là encore, l’ampleur du problème potentiel dépend des élasticités σ et η. En effet l’ampleur des rentes [4] à l’instant t vaut :

equation im27
πtFt = a.qt.D(c (a, qt )) f (qt)

84 L’élasticité de cette grandeur par rapport à q vaut donc :

equation im28
⎡⎛aqf⎞ ⎛av⎞ ⎤
1−⎢⎜ ⎟η+⎜ ⎟σ⎥
⎣⎝c⎠ ⎝c⎠ ⎦

85 Le premier terme correspond à l’effet ex ante, qui se trouve réduit du fait de la diminution de la demande pour la ressource naturelle. Les deux élasticités jouent là dans le même sens, avec des pondérations qui reflètent la structure des coûts de production des servicesequation im29. Si l’on reprend le cas de la fonction de production Cobb-Douglas et de la demande d’élasticité unitaire, cette élasticité totale est nulle, l’effet ex ante et l’effet comportements se compensant exactement. Le montant des rentes n’est donc pas affecté. Si, en revanche, la demande d’input épuisable est, au total, très élastique à son prix, ce montant diminue. Ce n’est donc que dans le cas où celle-ci est peu élastique que les problèmes redistributifs deviennent critiques.

86 L’acceptabilité sociale de la dérive du prix des ressources naturelles s’avère donc délicate quand les services qu’elle permet de produire sont, au moins pour partie, considérés comme des biens essentiels. Ainsi, on observe en pratique que toute évolution forte des prix pétroliers déclenche des demandes de compensations, pour les carburants ou les combustibles, arguant que les trajets domicile-travail sont ‘‘subis’’, de même que les dépenses de chauffage.

87 Cependant les politiques à mettre en œuvre pour traiter cette dimension distributive sont contraintes : non seulement un « tarif social », sous forme de réduction des prix des produits concernés est à proscrire, car allant à l’encontre des principes de la politique de 1er rang qui prescrit d’éviter de distordre le système de prix, et de traiter les questions redistributives par des transferts aussi forfaitaires que possible ; mais il faut même rappeler que ce subventionnement risque in fine d’être sans impact par rapport à l’effet distributif recherché.

88 Proposition 3. Un subventionnement uniforme des ressources naturelles est intégralement capté par leurs producteurs.

89 Ce résultat est associé à l’hypothèse d’un stock de ressource exogène : il tient à ce que (Dasgupta et alii, 1980 ; Chakravorthy et alii, 2003, Daubannes et Lasserre, 2011), dans un modèle de ressource épuisable concurrentiel, une taxe ou subvention uniforme n’affectent pas les trajectoires d’exploitation de celle-ci.

90 En effet, interprétons d’abord le modèle en supposant que les ménages autoproduisent ces services, comme cela est le cas pour le chauffage et les transports individuels ; et imaginons que, par souci de préserver leur pouvoir d’achat en ces domaines, la puissance publique subventionne avec un taux uniforme la ressource épuisable (supposée par ailleurs faire l’objet de droits de propriété établis).

91 Le prix à la production de celle-ci suivra encore la règle de Hotelling, et il en ira donc de même pour le prix relatif des deux facteurs de production du bien equation im30. Le simple examen de la formule (6) permet alors d’apprécier l’impact d’une telle subvention.

92 En effet, le plafond de ressources étant inchangé (S0 ), la trajectoire de ce prix relatif ne sera donc pas affectée, ni donc celle du prix « à la consommation » de la ressource, puisque le coût d’usage du capital vert est par ailleurs fixé (a). En d’autres termes, seule la structure de ce prix aura été modifiée, ce qui signifie donc que la subvention publique aura été intégralement accaparée par les producteurs de la ressource naturelle, …

93 Plus généralement, notons τ le taux de subvention envisagé et π' le prix de l’input épuisable pour les producteurs de service equation im31 Notant encore π le prix à la production de ce bien, on a donc π' = (1− τ) π, et π suit une règle de Hotelling si le secteur correspondant est compétitif. On a donc πt = π0 .eat et donc qt = π0 . (1− τ) eat / a. Mais l’équation (6) implique donc que :

equation im32
μ0(1− τ) = q0( S0 ) = π'0 / a
a

94 La subvention est donc capitalisée par les producteurs de la ressource : ex ante, elle diminue le prix des services produits à partir de celle-ci ; mais ceci en accroît la demande ; le marché de la ressource naturelle étant alors déséquilibré, les producteurs l’anticipent et augmentent leur prix à due concurrence.

95 Venons-en maintenant à notre sujet premier, l’accumulation optimale du capital et le partage entre investissement et consommation dans une telle économie. Ceux-ci vérifient :

equation im33
K̇taKt = − aVtCt = − (aVt +u (E(t ))

U' −1 (μ0 .e−(a− ρ)t)


avec K(t = 0) = K0 et la condition de transversalité

Vt et E(t définis par (5) et (6)

⎪⎩

96 Le second membre de cette équation différentielle linéaire est donc la somme de deux termes, ce qui suggère que la dynamique d’accumulation combinera deux processus bien distincts, le premier correspondant à la constitution du capital vert au niveau approprié, et le second à l’arbitrage classique entre épargne et investissement dans un modèle de type AK. Le processus d’accumulation ne suit donc pas un sentier de croissance équilibrée. Pour en préciser la forme, on considèrera, dans la partie suivante, le cas particulier où la demande de services equation im34) correspond à un besoin fixe, incompressible.

97 Avant cela, il est utile de récapituler les résultats obtenus, par rapport aux questions posées en introduction. Il apparait ainsi que les intuitions « écologistes » sur la nécessité d’opérer une réallocation immédiate du capital au moment où est prise la mesure des contraintes sur les ressources naturelles, et sur l’inadéquation de raisonnements à la marge de sentiers de croissance équilibrée peuvent être fondées, mais sous conditions : la rentabilité des investissements verts doit être évaluée, par rapport au taux d’actualisation a ; les configurations, où les enjeux macroéconomiques de la transition écologique sont critiques, dépendent des élasticités σ et η. Il est donc crucial de bien les documenter.

98 Un autre élément important concerne la spécification des contraintes sur les ressources naturelles. À cet égard, on a considéré l’hypothèse extrême d’une ressource épuisable, ce qui conduit à la règle de Hotelling. Les travaux visant à proposer une valeur tutélaire du carbone s’attachent justement à préciser la validité de cette règle (Quinet, Baumstark et Gollier, 2009), notamment lorsque l’on prend en compte l’incertitude (Gollier, 2013). En effet, se référer à des externalités de stocks (cf. rapport Stiglitz-Sen, 2009) ne suffit pas pour qualifier l’évolution de cette valeur : si les dommages sont linéaires avec les concentrations de polluants, la politique optimale est de mettre une écotaxe uniforme ; la règle de Hotelling n’émerge qu’avec un seuil de concentrations à ne pas dépasser. Ce profil d’évolution est donc à préciser au cas par cas, en fonction des caractéristiques des coûts d’extraction de la ressource et des dommages (Bureau, 2009).

99 L’aménagement du modèle sur ce point – comme l’enrichissement de celui-ci pour mieux décrire le fonctionnement des secteurs liés aux ressources naturelles, coûts d’ajustement, par exemple, ou plus généralement du côté de l’offre – ne poserait pas cependant de difficulté majeure. En effet, tant que l’on conserve les hypothèses du modèle AK et l’absence d’effet revenu pour la demande des services equation im35, les trajectoires pour F, V et equation im36 correspondent simplement à la maximisation du surplus sectoriel actualisé (au taux a) qui est associé au fonctionnement des secteurs de la ressource naturelle et de la production de ces services : les calculs habituels d’équilibre partiel correspondants demeurent valides, et il n’y a ensuite qu’à intégrer leurs résultats dans l’équation d’accumulation du capital.

Besoins d’épargne et transition écologique : une illustration

100 On considère plus spécifiquement le cas extrême où la demande de services utilisant de la ressource naturelle est totalement inélastique. L’ajustement pour que les prélèvements sur la ressource demeurent compatibles avec sa disponibilité globale ne peut donc se faire qu’en accumulant du capital vert s’y substituant. Tout d’abord on caractérise complètement la solution du modèle (dans un cas particulier), ce qui permet de visualiser les trajectoires optimales pour l’accumulation du capital, et le taux d’épargne suite à un choc sur l’évaluation du stock de ressource. On peut préciser ainsi les règles d’évaluation de la politique macroéconomique dans un tel contexte. Puis on introduit une contrainte sur la mobilité du capital, entre capital à tout faire et capital « vert ».

Trajectoires optimales

Hypothèses de l’exercice

101 Pour incorporer dans ce modèle un niveau minimal incompressible equation im37de consommation en bien equation im38, il faut – à l’instar de ce qui sous-tend le modèle de Stone, par exemple – considérer que la fonction d’utilité courante est de la forme equation im39, la fonction u n’étant définie que si equation im40 Si on suppose de plus qu’il n’y a pas de satisfaction supplémentaire à consommer plus que le minimum incompressible, u est constante quand elle est définie. On supposera que la valeur correspondante vaut 0, et que U est de type Log.

102 En d’autres termes, on considère que, si la demande fixe de services (equation im41) est satisfaite, la fonction d’utilité vaut (U(C) = Log (C)). Elle correspond donc à un indice relatif d’aversion pour le risque unitaire [5]. Si ce besoin n’était pas assuré, ceci revient à considérer qu’elle vaudrait « moins l’infini ». En pratique, les trajectoires acceptables requièrent donc, qu’à chaque instant, le capital vert et la ressource épuisable soient disponibles en quantités suffisantes pour permettre la fourniture de equation im42.

103 À cet égard, on suppose que la fonction de production des services utilisant comme input la ressource naturelle et le capital vert E(Vt , Ft ) est une fonction de Cobb-Douglas (σ = 1), soit equation im43. Pour avoir à tout instantequation im44 il faut donc qu’à tout instant, on ait :

equation im45
1/ (1 − α)
E
F = ⎜ ⎟ V− α / (1− α)
A

104 Sous réserve de normalisations appropriées, la satisfaction du besoin fixe equation im46 impliquera donc, quand le capital vert vaut V, un prélèvement sur la ressource épuisable :

equation im47
F = V−β avec β>0 ; β = α / (1−α)

105 Au final, remplacer 1 % d’input naturel F nécessite donc de disposer de (1/β) % de capital vert supplémentaire : si β est élevé, le prélèvement à opérer sur le capital courant est faible ; et élevé, si β est faible.

Sentiers d’accumulation du capital

106 Ayant intégré ces spécifications et contraintes, le programme à résoudre devient :

equation im48
⎧⎪Max W = ∫0log (Ct ).e − ρt .dt
avec E(= E

⎪∫
Vt−β .dtS0
(7) ⎨0
car F = V−β

K̇t = a (KtVt ) − Ct

avec K(t = 0) = K0

107 Avec les mêmes notations que précédemment, on a :

equation im49
β+1
(8) Π0( S0 ) = (a / β) ⎜⎝⎛a ββ+1 S0⎟⎠⎞− β

108 donc Π' (S0 ) <0

109 et :

equation im50
a
t
* β +1
(9) Vt = V0
(S0 ).e

110 avec equation im51

111 En d’autres termes, une réduction de 1 % du stock de ressource disponible, anticipé en t = 0, nécessite un accroissement de (1 / β) % du capital vert. Au-delà, le capital vert s’accumule au taux a / (β + 1) par unité de temps.

112 Le niveau de stock S0 de ressource disponible affecte proportionnellement la trajectoire des prélèvements sur la ressource, puisque l’on a :

equation im52
β
(10) Ft = a β S0eaβ+1.t
β+1

113 On a par ailleurs, pour tout t :

equation im53
(a−ρ) t
(11) Ct = (1/ μ0 ) e

114 La consommation de bien courant suit donc une trajectoire de croissance auto-entretenue, à un taux constant (a − ρ), qui dépend de la préférence pour le présent de la société, et, sous réserve que le stock initial de capital ne soit pas trop faible (K0 > (β / (β+1)) V0 ), la trajectoire optimale pour l’accumulation du capital est la somme de deux exponentielles :

equation im54
(12) Kt = ⎛⎜⎝ββ+1⎟⎠⎞V0 eβa+1.t + ⎜⎝⎛K0 − ββ+1V0⎠⎞⎟ e(a−ρ).t

115 La première reflète le processus d’accumulation du capital vert pour réaliser la transition écologique, au taux a / (β + 1) et avec un poids initial d’autant plus fort que le stock de la ressource naturelle est limité ; la seconde, celui de capital productif, pour soutenir la croissance économique, à un taux (a − ρ) d’autant plus élevé que le taux de préférence pour le présent est faible. La consommation en t = 0 vaut par ailleurs :

equation im55
⎛ β+1 ⎞
(13) C0 = (1/ μ0 ) = ρ⎜⎝K0 − β V0⎟⎠

116 Elle est naturellement réduite quand le besoin de capital vert s’accroît. Surtout, elle dépend du taux de préférence des ménages pour le présent (ρ). Finalement, la valeur de la fonction objectif vaut :

equation im56
(14)
⎛ β+1 ⎞
LogKV
W* (K0, S0 ) = Logρ (ρ) + aρ−2 ρ + ⎝0 ρ β0

117 Elle vérifie évidemment, pour ce qui concerne les valeurs sociales des deux actifs :

equation im57
(15) ∂W*
K00
W*
S
et0 =Π (S)
W* 0 0
K0

118 Les trajectoires pour la consommation de bien courant C, le prélèvement sur les ressources naturelles F, et l’accumulation de capital vert V sont donc à taux de croissance constants, respectivement :

equation im58
a −ρ, − a β, a / (β+1).
β+1

Statique comparative

119 Si l’on imagine qu’à l’instant t =0, la société prend conscience que le stock de ressources disponibles S0 est réduit relativement de equation im59 les trajectoires des différentes variables sont donc simplement déterminées par les sauts que cela implique pour celles-ci à l’instant initial :

equation im60
Log (F0+ ) − Log (F0 ) = − Δ < 0


Log (V+ ) − Log (V ) = ⎜⎛ 1⎟⎞ Δ > 0
0 0 ⎝β⎠
⎪⎪⎨
(16)
Log (C0+ ) − Log (C0 ) = Log ⎛⎝⎜K0 − ββ+1V0+ ⎠⎞⎟

⎪ −Log⎛⎜K −β+1V⎞⎟<0
⎩⎪ ⎝0 β0

120 Les figures 4 et 5 illustrent cette statique comparative, en distinguant selon le positionnement relatif du taux de croissance du capital vert par rapport à celui du capital commun et de la consommation du bien courant (les différentes variables étant rapportées à leur valeur initiale de référence et exprimées en logarithme).

Figure 4

cas 1. Productivité marginale du capital vert élevée, transition relativement facile

figure im61
Trajectoires cas 1 (β>ρ/ (a −ρ))
Log (Xt / X0-)
C
V
Δ/β
1
- Δ
F
t

cas 1. Productivité marginale du capital vert élevée, transition relativement facile

auteur.
Figure 5

cas 2. Productivité marginale du capital vert faible, transition relativement difficile

figure im62
Trajectoires cas 2 (β<ρ/ (a −ρ))
Log (Xt / X0-) V
Δ/β
C
1
- Δ
F
t

cas 2. Productivité marginale du capital vert faible, transition relativement difficile

auteur.

121 De manière plus systématique, on peut exprimer, à tout instant, les fonctions de politiques optimales en fonction des deux variables d’état K et S. On a en effet :

equation im63

⎪⎪F(Kt, St ) = (β / (1+β)) aSt
⎪ ⎛1+β⎞1/β−1/β
⎨⎪V(Kt, St ) = ⎝⎜ β ⎟⎠ (aSt)
⎪ ⎛1+ β⎞(1+β )/β
C(Kt, St ) = ρKt − ρ⎜ ⎟ (aSt )−1/β
⎝β⎠

122 La dernière équation caractérise l’effort que les ménages devront consentir pour la transition énergétique ou écologique. Y est associé au taux d’épargne courant :

equation im64
⎛⎞
(ρ − aβ )t
K̇t ⎛ρ⎞ ⎜ V0eβ+1 ⎟
(17) st = Yt = 1 − ⎜⎝ ⎟⎠ / ⎜1+ ⎛ β+ 1 ⎞ ⎟
⎜ β⎜KV ⎟⎟
⎝ ⎝0 β0⎠⎠

123 Avec en particulier :

equation im65
⎡ β+1 ⎤
KV
(18) s0 = 1 − ⎛⎝⎜ ρ⎞⎠⎟
⎢⎢0K 0βV0 0 ⎥⎥
⎢⎥
⎣⎦

124 Ce taux d’épargne en t = 0 est une fonction croissante de V0 . Un choc défavorable sur S0 implique donc, non seulement une réallocation immédiate de capital pour disposer d’un stock suffisant de capital vert, mais, ensuite un effort d’investissement accru, pour continuer la transition écologique.

125 Par ailleurs, la trajectoire ultérieure de ce taux d’épargne dépend de la position relative du taux de croissance du capital vert a / (β + 1) par rapport à celui de la consommation (a − ρ) : si la productivité du capital vert est élevée, il tend vers le taux (1− (ρ / a)) du modèle de croissance sans actif naturel. Si elle est faible, les besoins d’investissements en capital vert, pour se passer progressivement de la ressource naturelle, finissent par absorber l’essentiel de la production (en termes de part relative). En effet, dans la formule donnant la trajectoire d’accumulation du capital, c’est alors la première exponentielle, liée à l’accumulation du capital vert, qui croît le plus vite. Pour autant, la consommation s’accroît à taux constant : la capacité de l’économie à réaliser une croissance auto-entretenue (hypothèse du modèle AK), combinée à la possibilité de remplacer aisément les prélèvements sur la ressource par du capital vert, permet donc de réaliser des scénarios de croissance.

126 La figure 6, qui considère des cas très typés a = 10 %, β = 1 ; V0 / K0 = 0,2 ; ρ = 2, 5 et 8 %) suggère cependant que cette dynamique du taux d’épargne est lente. Mais elle contraste bien l’évolution de ce taux en fonction du temps, selon que :

127

  • la préférence pour le présent est relativement faible (cas 1). Alors le taux d’épargne initial est élevé, et le taux de croissance du capital courant supérieur à celui du capital vert. Le taux d’épargne décroît donc, et il tend vers la valeur du modèle AK standard,
  • la préférence pour le présent est relativement élevée (cas 2). Le taux d’épargne initial est faible mais il doit être augmenté progressivement pour assurer la constitution de capital vert nécessaire pour se passer de la ressource épuisable,
  • le cas limite correspond à la situation où les deux composantes du capital croissent au même taux.

128 En d’autres termes, si la productivité du capital vert est élevée, ou si la préférence des ménages pour le présent est faible, les besoins de constitution de capital vert pourront aisément être satisfaits du point de vue macroéconomique, soit parce que ceux-ci demeurent limités, soit parce que la croissance est forte. L’effort à consentir est plus sérieux sinon, et pas seulement transitoire.

Figure 6

typologie des trajectoires pour la part de l’épargne, application de la formule (17)

figure im66
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 26 28 30 32 34 36 38 40
rho = 0,02 rho = 0,05 rho = 0,08

typologie des trajectoires pour la part de l’épargne, application de la formule (17)

auteur.

129 Proposition 4. Le taux d’épargne tend asymptotiquement vers 1− (ρ / a) si β > ρ / (a − ρ), et vers 1 si l’inégalité est inverse et stricte (il est constant et égal à S0 si il y a égalité). Dans tous les cas, ce taux d’épargne doit être accru, notamment en t=0, lorsque le stock disponible de ressource naturelle est réévalué à la baisse.

L’évaluation des politiques

130 L’épargne qui a été calculée ci-dessus fournit une indication de l’effort réalisé au profit des « générations futures », mais seulement pour ce qui concerne le bien courant. Elle ne rend compte que de manière incomplète des possibilités de consommations futures, qui dépendent à la fois du capital qui leur sera transmis, mais aussi du stock de ressource naturelle S qui leur est légué à un instant donné. Si l’on suppose que celles-ci les utiliseront au mieux, le bien-être ultérieur, actualisé à cet instant t, qu’elles peuvent en escompter, est mesuré par W* (K, S), et c’est donc par rapport aux variations de cette grandeur que peut être appréciée l’épargne (ou l’investissement) « véritable » de l’économie.

131 Ainsi, si l’on imagine que, pendant un court instant (entre 0 et t, t → 0), l’économie dévie de sa trajectoire, déterminant un écart ΔC de consommation courante, et ΔF de prélèvement sur la ressource épuisable, les actifs légués en t seront modifiés de ΔK = aΔY − ΔC et ΔS = −ΔF.

132 Exprimée en prenant comme numéraire la consommation, et actualisée en t = 0, la variation d’épargne véritable induite vaudra donc (cf. Pearce et Atkinson, 1993) :

equation im67
ΔGS = (Δe−ρtW* ) / μ0 → ΔK + Π0ΔS

133 Proposition 5. L’évaluation de l’investissement « véritable » de l’économie doit intégrer (en net) la valeur sociale de la dégradation des actifs naturels. Dans cette économie, supposée optimisée, la valorisation correspondante doit être effectuée en considérant le prix régulé Π0 .

134 La comptabilité nationale devrait alors considérer l’écofiscalité comme des « prix », reflétant la valeur sociale des biens, le PIB à considérer étant donc un PIB « vert », duquel sont déduites les consommations de ressources naturelles (« monétarisées »). Ces deux approches, de l’épargne véritable et du PIB vert, doivent être vues comme les deux faces d’une même pièce, puisque : ΔPIBvert = ΔC + ΔGS.

135 Dans ce contexte, l’évaluation des projets publics considérerait sans hésitation un taux d’actualisation a, et un prix de la ressource Π0eat. Cependant, ce système de prix doit donc être utilisé pour évaluer les projets publics, mais aussi, par la « comptabilité nationale », pour qualifier, en termes de bien-être, la soutenabilité d’une trajectoire macroéconomique. Dans le cas de cette économie, ce résultat reflète directement les conditions d’optimalité, et les prix correspondants sont les prix réels, supposés établis grâce à l’écofiscalité, par exemple. Toutefois Arrow, Dasgupta et Mäler (2003) ont montré que ce principe de cohérence entre les évaluations micro- et macroéconomiques valait aussi pour des économies imparfaites.

136 À titre d’illustration de leur résultat, on peut considérer le cas où les Autorités publiques prendraient conscience de contraintes de soutenabilité accrues en t = 0, mais ne seraient pas capables d’infléchir leur politique avant t = τ, le délai τ reflétant, par exemple les contraintes d’économie politique pour relever l’écofiscalité à son niveau optimal. Si l’on fait l’hypothèse, par exemple, qu’entre 0 et τ, l’économie suit son cours, les comportements de consommation et d’épargne restant inchangés, on aura :

equation im68
W0 = W* (K0, S0 ) +e−ρτ [W* (Kτ , Sτ + S0+S0)
W* (Kτ , Sτ )]

137 avec Kτ , equation im69 correspondant aux trajectoires optimales définies précédemment, quand on dispose de K0 , equation im70 en t = 0 (i.e. les trajectoires qui se poursuivent entre 0 et τ). Notons par ailleurs δ le coefficient d’actualisation entre 0 et τ sur cette trajectoire un temps imparfaite, c’est-à-dire :

equation im71
δ = e−ρτU' (Cτ+ ) /U' (C0)

138 Un prélèvement supplémentaire d’une unité de ressource naturelle en t=0 représente alors une désépargne véritable égale à :

equation im72
ΔGS = − δ. Π0( Sτ + S0+S0 ).

139 Ainsi, le prix à considérer pour comptabiliser un tel prélèvement n’est pas le prix courant de la ressource, qui n’a pas encore intégré le renforcement de la contrainte sur la ressource détecté à ce moment, mais le prix (actualisé en t = 0) qui sera mis en place en t = τ, et reflètera l’état alors dégradé de la ressource. C’est bien ainsi que l’on procède pour le calcul économique quand on considère une valeur « tutélaire » du carbone dans l’évaluation des projets publics. Mais c’est donc ce même prix qui devrait servir pour évaluer l’épargne véritable au niveau macroéconomique des « comptes nationaux ».

Contraintes sur la réallocation du capital

140 Dans tout ce qui précède, on a supposé possible une réallocation immédiate de capital, du capital courant vers du capital vert, au moment où l’on constate que l’état des ressources naturelles est plus contraignant que ce que l’on imaginait. De cette manière, on a pu apprécier simplement les besoins en capital vert que requiert la transition écologique.

141 Cependant, il faut reconsidérer cette hypothèse de mobilité parfaite entre les deux formes de capital. En effet, de manière réaliste, ce capital vert ne pourra se constituer que progressivement, au travers de nouvelles générations d’équipements. Dans ces conditions, l’effort d’investissement qui sera nécessaire pour réaliser la transition écologique sera fortement accru par rapport à ce qui a été envisagé jusqu’à présent, où la restructuration de capital initial ne nécessitait pas d’investissement supplémentaire. Pour illustrer cette idée, on ajoute au programme d’optimisation une contrainte formalisant une capacité de production limitée pour les investissements verts. On pose donc :

equation im73
(1 + n) a t
VtV0 eβ+1 avec n ≥ 0

142 Dans cette formule, n représente donc le coefficient de rattrapage maximal que l’on peut envisager sur le capital vert, par rapport à son taux de croissance « normal » a / (β + 1), vu ci-dessus, qui s’appliquera à nouveau une fois que son niveau adéquat aura été retrouvé, à un instant que l’on notera T. Par ailleurs, on suppose qu’à l’instant initial le stock de capital vert (V) est inférieur à celui equation im74 qui serait souhaitable pour réaliser les scénarios optimaux décrits ci-dessus. On caractérise l’écart correspondant par référence à l’excès (θ) de prélèvement de ressource qui en résultera en t=0, soit :

equation im75
* −β
1 + θ = [V0 / V0
(S0 )]

143 La trajectoire optimale sous cette contrainte supplémentaire est toujours caractérisée par un taux d’actualisation a, la valeur sociale du bien courant valant μt = μ0 .eat , et la consommation croissant au taux a −ρ sur l’ensemble de celle-ci, avec C0 = (1/ μ0 ).

144 En revanche, entre 0 et T, la croissance de Vt est limitée par la contrainte supplémentaire sur le rythme d’accumulation possible du capital vert, qui détermine par ailleurs les flux de consommation de ressource naturelle pendant cette période (equation im76), et par là, l’évolution du stock résiduel de ressource (S). Ce régime prend fin quand :

equation im77
(1 + n) a T
* β +1
V0
(St ) = Vt =V0 e

145 On a alors :

equation im78
aβ
⎛ θ⎞−(1 + n)β
1T
⎜1− ⎟ / (1+θ) = e
+
n

146 Proposition 6. Cette économie n’est soutenable que si n>θ.

147 En effet, dans le cas contraire, la nécessité de satisfaire des besoins essentiels incompressibles en services écologiques ou énergétiques, combinée avec l’insuffisance permanente de capital vert, provoque l’épuisement accéléré de la ressource, et donc un cercle vicieux qui aboutit à l’impossibilité de satisfaire ces besoins au-delà : l’incapacité à accumuler tôt le capital vert au niveau approprié obère la croissance future. Étudions maintenant le cas plus favorable.

148 Entre 0 et T, le processus d’accumulation du capital vérifie :

equation im79
(19) K̇t = a (KtVt ) − (C0 ) e(a−ρ)t

149 avec K(t = 0) = K0

150 et, pour assurer la continuité de Ct en T :

equation im80
⎛ β+1 ⎞
C0e(a−ρ)T = (1/ μ0 ) e(a−ρ)T =ρ⎜KTVT
⎝ β⎠

151 Si n ≠ β on aura, entre 0 et T :

equation im81
a
(20) K = − β+1 V .e(a+n)β +1 t + C0 e(a−ρ)t
t n−β0 ρ
n−β
+ β+1 n V .eβ +1 aT .eat
β n−β0

152 avec :

equation im82
n−β
(21) C0 / ρ = K0 − β+1 V0 [n eβ +1aT −1]
n−β β

153 Ceci résume en fait deux configurations différentes :

154

  • si n > β, l’accumulation de capital vert peut se faire à un rythme élevé, supérieur à celui (a) d’accumulation maximal du capital global dans cette économie. La trajectoire optimale de rattrapage consiste à engager un processus d’accumulation du capital global aussi rapide que possible, pour rétablir vite le niveau de capital vert qui serait souhaitable ;
  • si n < β, le rythme d’accumulation du capital vert est très contraint, et ne justifie pas de chercher à accumuler trop vite le capital global, ce qui irait à l’encontre des arbitrages intertemporels sur le profil de consommation. La logique est alors plutôt « additive », le processus de rattrapage sur le capital vert venant seulement s’ajouter à l’accumulation « normale » du capital (taux a − ρ).

155 Dans tous les cas, ce processus de rattrapage se traduit (cf. formule (21)) par un renforcement de l’investissement en t =0, l’accumulation accrue de capital vert en début de période se substituant à l’impossibilité de transférer immédiatement du capital courant en capital vert à l’instant initial. Ce résultat vaut aussi dans le cas frontière, où le taux maximal d’accumulation du capital vert vaudrait juste a (dans ce cas la « première exponentielle » dans la formule (20) est remplacée par une fonction de type teat ).

Figure 7

besoins d’épargne pour établir le capital vert au niveau approprié, évolution du taux d’épargne( %) associé aux formules (19) à (21)

figure im83
30,0
29,8
29,6
29,4
29,2
29,0
28,8
28,6
28,4
28,2
28,0
0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5 5,5 6 6,5 7 7,5 8 8,5 9 9,5 10
n = 1,5 n = 2,5 n = 3,5 n = 4,5

besoins d’épargne pour établir le capital vert au niveau approprié, évolution du taux d’épargne( %) associé aux formules (19) à (21)

auteur.

156 La figure 7 décrit l’évolution du taux d’épargne en fonction du temps, pour différentes valeurs de n (1,5 ; 2,5 ; 3,5 ; 4,5) lorsque l’on part d’une situation d’insuffisance de capital vert (avec a = 6 %, ρ= 4,5 %, θ = 0,6 et β =3, ce qui correspond donc au cas-limite où les taux de croissance tendanciels des deux types de capital sont égaux).

157 On vérifie donc que ces trajectoires sont continues en t = T puisque les trajectoires de la consommation courante et de la production le sont. Par ailleurs, le taux d’épargne final se trouve accru si la contrainte sur l’ajustement du capital vert est forte, car il y alors un prélèvement excessif sur la ressource épuisable pendant une plus longue période. Avec ce jeu de paramètres, il apparaît aussi que l’impact sur le taux d’épargne initial dépend essentiellement de θ, et moins de n, qui affecte en revanche la durée du rattrapage.

158 Dans tous les cas, la transition écologique implique ici un accroissement transitoire de l’effort d’investissement.

Conclusion

159 Derrière la notion de croissance soutenable, il y a la prise de conscience que la croissance économique utilise actuellement des services notamment les énergies émettrices de gaz à effet de serre, dont la production dégrade les actifs naturels et que leur épuisement ou détérioration très rapide la menace à terme. Pour rétablir et corriger cela, il faut agir notamment sur la demande de ces services, ou trouver des modes de production plus économes de ces ressources. La composition optimale de ces deux types d’actions dépend de la comparaison des élasticités relatives à la demande pour ces services d’une part, et à la substituabilité entre capital vert et ressources naturelles, d’autre part.

160 Dans tous les cas, la croissance verte nécessite en premier lieu d’instaurer le signal-prix approprié. C’est le rôle des politiques environnementales. Mais il faut aussi en maîtriser les enjeux redistributifs et assurer le financement dans de bonnes conditions de l’investissement vert.

161 Si, comme le suggèrent beaucoup d’études sectorielles, le gisement correspondant au premier canal est limité, une réallocation importante du capital, vers le capital vert, est nécessaire, qui requiert une politique macroéconomique appropriée dégageant une épargne suffisante et orientée vers ce type d’investissement. Certes, leur déploiement sera progressif et doit se faire « par ordre de mérite ». Cependant, il y a aussi à réaliser une correction immédiate des structures de production, qui réclame un effort d’investissement « prioritaire ».

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Mots-clés éditeurs : épargne véritable, investissement vert

Mise en ligne 06/01/2017

https://doi.org/10.3917/ecop.208.0057

Notes

  • [*]
    Délégué général du Conseil économique pour le développement durable.
    E-mail : dominique.bureau@developpement-durable.gouv.fr.
  • [1]
    c (r, q) = rv + (rq) f est donc de la forme c (r, q) = rh (q) avec, compte tenu de l’identité de Roy, f = h' et v' = qf '. L’élasticité de substitution au point considéré vérifie
    equation im84
  • [2]
    Le paramètre « a » doit donc être vu comme reflétant la productivité marginale nette du capital.
  • [3]
    Alternativement, on peut introduire la covariable λt du stock de ressource à l’instant t, dont la dynamique est régie par equation im85. Le principe de Pontryagin établit alors que equation im86 ce qui signifie qu’à l’optimum la valeur actualisée de la ressource est constante : il est en effet indifférent de déplacer à la marge le profil des prélèvements.
  • [4]
    Ici égales au prix de la ressource, car les coûts d’extraction ont été supposés nuls. Sinon, c’est à celles-ci que s’appliquerait la règle de Hotelling.
  • [5]
    Cette hypothèse ne vise qu’à la simplicité de l’exposé. L’extension du modèle à des fonctions d’utilité dont l’élasticité (y) de l’utilité marginale du revenu est constante est immédiate : la principale modification des résultats concerne la dynamique de la consommation et du capital associé, dont le taux vaut alors (a − ρ) / y.
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