Notes
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[*]
Maitre assistant à l’École supérieure des sciences économiques et commerciales de Tunis, Tunisie. E-mail : f. lachhab@ voila. fr
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[1]
L’algorithme BBQ de Harding et Pagan (2002) correspond au programme de Bry-Boschan sur données trimestrielles (Elachhab, 2007a, b).
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[2]
Les données trimestrielles relatives à l’investissement et la consommation sont obtenues par interpolation cubique des séries annuelles. Faute de données exprimées en prix constants de 1995 et de données sur les prix à l’exportation et les prix à l’importation trimestriels, les exportations et les importations sont exprimées en termes d’indices.
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[3]
L’axiomatique de Dungey et Pagan (2000) établit certaines particularités en ce qui concerne l’étendue et l’amplitude des phases du cycle de croissance. En accord avec cette axiomatique, on admet qu’un cycle dure au minimum 6 trimestres et que l’une de ses phases s’étend sur une durée minimale de 3 trimestres. On admet aussi qu’une phase cyclique a au minimum une amplitude de 0,5%.
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[4]
La Jordanie et le Maroc ont, comme d’ailleurs la Tunisie, une structure industrielle caractérisée par la prédominance du secteur public avec une forte concentration dans la production des biens primaires (phosphate, pétrole..) et le textile. Durant les années 80, ces trois pays ont appliqué des réformes structurelles pour stabiliser leurs économies et rétablir la compétitivité. Les processus de libéralisation qui s’en sont suivis se sont soldés par des refontes de leurs politiques monétaires et de change. Le degré d’intégration de ces pays aux marchés internationaux des capitaux est faible du fait du développement limité de leurs marchés internes. L’afflux des capitaux étrangers est limité et est plus faible que celui adressé aux autres pays en voie de développement d’Asie eu d’Amérique Latine. Leurs échanges commerciaux se font essentiellement avec l’Union européenne avec une faible diversification des produits exportés. Leurs taux d’ouverture sont relativement faibles, ce qui s’explique par des politiques commerciales protectionnistes, essentiellement durant les années 70 et 80. Durant les années 90, les trois pays ont signé des accords d’association avec l’Union Européenne avec comme conséquence une restructuration et une mise à niveau de leur secteur industriel.
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[5]
On s’intéresse, en particulier, aux évolutions cycliques durant la période 1980-2002. Outre la non-disponibilité des données trimestrielles durant les années 70, essentiellement, pour la Jordanie, cette période est aussi marquée par les deux chocs pétroliers dont les effets étaient asymétriques. Durant cette période, la Tunisie était, en effet, un pays exportateur de pétrole.
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[6]
Au cours de cette phase, le cycle tunisien révèle plutôt une phase de reprise conjoncturelle.
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[7]
Pour vérifier la robustesse du résultat de l’absence de l’effet de la composante commune sur les trois cycles, on a identifié le degré de convergence des chocs structurels entre les trois pays et on a mesuré son évolution au cours du temps. L’analyse envisagée utilise des régressions à paramètres évolutifs (time-varying parameter) pour mesurer la convergence des chocs d’offre et de demande dans un modèle espace-état (Boone, 1997). Dans un premier temps, les séries des chocs d’offre et de demande sont déterminées, pour les trois pays, par une analyse VAR structurel. Dans un second temps, un coefficient de convergence dynamique est mesuré par le filtre de Kalman. L’absence, si elle existe, d’une convergence des chocs explique alors la désynchronisation observée entre la Tunisie, le Maroc et la Jordanie. Les résultats montrent que le Maroc présente un degré assez élevé d’hétérogénéité avec la Tunisie aussi bien pour les chocs d’offre que pour les chocs de demande et que cette hétérogénéité se manifeste tout au long de la période d’analyse. Pour la Jordanie, on observe une convergence des chocs avec ceux de la Tunisie durant les années 80 avec une meilleure cohérence relative des chocs de demande que d’offre. Cette convergence reste, tout de même, faible.
1 Mesurer le cycle économique, caractériser ses régularités voire anticiper ses points de retournement constitue un sujet d’études très mobilisateur aussi bien pour les conjoncturistes que pour les analystes. En particulier, la compréhension des évènements économiques à l’origine des mouvements cycliques permet de mieux formuler les politiques de l’État, notamment la gestion à moyen terme des finances publiques et les orientations de la politique monétaire.
2 Dans les pays en voie de développement, les contributions empiriques à l’analyse du cycle économique sont fondamentalement restreintes. L’absence d’informations appropriées, aussi bien du point de vue quantitatif que qualitatif, en est l’une des principales raisons. D’autres raisons, qui se rapportent à la structure économique de ces pays, peuvent, cependant, être également avancées : les pays en voie de développement subissent fréquemment des crises économiques et des changements dans leurs principaux indicateurs macroéconomiques, rendant ainsi très difficile l’identification du cycle (Agénor et alii, 2002).
3 L’objet de cet article est d’établir un diagnostic conjoncturel du cycle économique d’un pays émergent - la Tunisie - à la manière de ceux établis dans les pays développés. Deux innovations sont apportées. En premier lieu, à travers une datation historique du cycle classique (cycle d’affaires) et du cycle de croissance (cycle en déviation) de l’indice de production industrielle (IP), cet article vise à détecter les épisodes de récession économique et d’analyser les comportements des composantes du PIB au cours des ces phases. Il examine, ensuite, le poids réel de deux sources d’impulsion à l’origine des fluctuations : des chocs de demande, de nature transitoire et des chocs d’offre, dont les effets sont permanents. Par ailleurs, cet article tente de répondre aux deux questions suivantes : les régularités empiriques du cycle tunisien sont-elles identiques à celles du Maroc et de la Jordanie, pays dont les structures économiques sont proches ? Vu les trajectoires économiques communes vécus par les trois pays, existe-il une interdépendance cyclique entre les différentes conjonctures ? La réponse à ces deux questions pourrait se révéler fort utile : elle pourrait livrer des enseignements sur le facteur commun partagé par les trois pays et, de fait, sur le poids réel des chocs idiosynchratiques dans l’explication du cycle en Tunisie.
4 Dans les analyses conjoncturelles du cycle économique, il existe deux voies de recherche à la fois concurrentes et complémentaires. La première, est a-théorique et essentiellement statistique, étudie le cycle économique par les méthodes des séries temporelles. La deuxième, repose sur la construction de modèles d’équilibre général simulables. Dans cet article, nous adoptons la première approche pour étudier le cycle économique en Tunisie. Nous utilisons la procédure non paramétrique de Bry-Boscahn (1971) pour décomposer les cycles classique et de croissance en phases cycliques et nous étudions de manière univariée le comportement des composantes du PIB au cours de ces phases. Nous adoptons la modélisation VAR structurel pour déterminer le poids réel des chocs d’offre et des chocs de demande dans le retournement cyclique. Enfin, nous utilisons un modèle à composante inobservable pour étudier la synchronisation potentielle qui peut exister entre la conjoncture tunisienne et les conjonctures marocaine et jordanienne.
5 Les résultats obtenus montrent que (i) les phases de contraction du cycle classique sont très hétérogènes et sont expliquées par les chocs d’offre et de demande externes. L’évolution jointe du cycle tunisien et du cycle de la Zone-euro, montre, en effet, un comportement proche du cycle tunisien avec un léger retard par rapport aux phases de récession du cycle européen. C’est dire que le cycle tunisien subit l’impact négatif des contactions de la Zone-euro (ii) les cycles de croissance des années 70 et 80 sont plus volatiles que ceux des années 90 ; leurs amplitudes sont, en effet, plus élevées. Avant 1990, ces cycles sont plutôt symétriques : la durée des phases ascendantes est à peu prés égale à celle des phases descendantes. Les cycles des années 90 sont, quant à eux, asymétriques (iii) les chocs d’offre dominent la variabilité conjoncturelle de l’IP. La contribution relativement faible des chocs de demande s’explique en partie par la structure des dépenses publiques, qui sont caractérisées par une prédominance des dépenses de fonctionnement et du service de la dette, en partie par le caractère passif de la politique monétaire (iv) l’amplitude mise à part, les régularités empiriques du cycle de croissance sont, dans l’ensemble, différentes de celles observées au Maroc et en Jordanie. Il semble aussi qu’il existe une faible synchronisation entre le cycle de croissance tunisien et les cycles jordanien et marocain, résultat d’une forte composante idiosynchratique et d’un poids faible des chocs communs.
6 Il faut dire que les exercices développés dans cet article reposent sur des méthodes relativement classiques d’analyse du cycle économique. Adapter des méthodes plus sophistiquées telles que les modèles à changement de régimes markoviens ou les analyses factorielles dynamiques, pourrait améliorer la compréhension des résultats et explorer davantage les propriétés de leurs distributions empiriques. Par ailleurs, de futurs travaux pourraient déboucher sur l’étude des effets séparés des interdépendances commerciales et financières ente la Tunisie et la Zone-euro. Cette voie de recherche permet de préciser la nature des mécanismes sous-jacents à la propagation des chocs d’activité européens sur l’économie tunisienne et de quantifier la contribution de chaque partenaire commercial dans cette transmission. Enfin, d’autres voies de recherche pourraient être mentionnées, notamment la construction d’indicateurs, financiers ou réels, capables de prédire les points de retournement du cycle, en particulier ses phases de récession et de ralentissement.
7 Mesurer le cycle économique, caractériser ses régularités voire anticiper ses points de retournement constitue un sujet d’étude de grand intérêt aussi bien pour les conjoncturistes que pour les analystes. En particulier, l’identification des sources d’impulsion à l’origine des fluctuations forme un prologue indispensable à la conduite de la politique économique, notamment la gestion à moyen terme des finances publiques et les orientations de la politique monétaire.
8 Dans les pays en voie de développement, les contributions à la caractérisation du cycle économique sont fondamentalement restreintes. L’absence d’informations appropriées, aussi bien du point de vue quantitatif que qualitatif, en est l’une des principales raisons. D’autres raisons, qui se rapportent à la structure économique de ces pays, peuvent, cependant, être également avancées : les pays en voie de développement subissent fréquemment des crises économiques et des changements dans leurs principaux indicateurs macroéconomiques, rendant ainsi très difficile l’identification du cycle (Agénor et alii, 2002).
9 Depuis quelques années, on a vu se développer plusieurs travaux sur la comparaison des régularités cycliques d’un échantillon de pays ou sur l’identification et la caractérisation des cycles de pays spécifiques. Dans la première perspective, il convient de citer, essentiellement, les travaux d’Agénor et alii (2002) comme ceux de Rand et Tarp (2003) qui ont, respectivement, identifié et comparé les régularités cycliques de pays appartenant à des zones économiques différentes. D’autres travaux se sont intéressés à déterminer les sources d’impulsion et à mesurer leurs contributions dans l’évolution du cycle, en mettant en œuvre des méthodes statistiques différentes telles que les VAR structurels (Hoffmaister et Roldos, 1996,1997 ; Ahmed, 2003) ou encore des approches en termes de calibration-simulation (Kouparitsas, 1997 ; Rodriguez et Mata, 1997).
10 Les analyses empiriques sur les cycles spécifiques ont permis le développement de plusieurs contributions. Une grande attention a été, cependant, accordée aux fluctuations des pays de l’Amérique Latine (Arreaza et Dorta, 2004 ; Chavet, 2002 ; Kydland et Zarazaga, 1997 ; Mejia et Reyes, 1999) et du Sud Est Asiatique (Genberg, 2003 ; Leitner, 2005 ; Rahmen et Yamagata, 2004 ; Zheng et Zhuong, 2002). Pour les pays africains, et encore plus ceux de l’Afrique du Nord, le terrain reste encore vierge. Jusqu’à ce jour, en effet, il n’existe pas d’études sur les fluctuations qui fassent référence et encore moins de chronologies officielles à la manière de celles établies dans les pays développés. Aussi pensons-nous intéressant de contribuer à combler ce vide et d’analyser de plus près le cycle économique en Tunisie.
11 Dans le présent article, les innovations apportées sont de deux ordres : en premier lieu, à travers une datation historique du cycle classique (cycle d’affaires) et du cycle de croissance (cycle en déviation) de l’indice de production industrielle (IP), il s’agit de détecter les épisodes de récessions économiques et d’analyser les comportements des agrégats macroéconomiques au cours des ces phases. Une décomposition du cycle de croissance en cycle court et cycle long et une analyse de leurs principales régularités sont aussi proposées. En second lieu, il s’agit d’examiner, dans quelle mesure, la dynamique des mouvements cycliques peut être expliquée à partir de deux sources indépendantes d’impulsion : des chocs de demande de nature transitoire, d’une part, et des chocs d’offre, d’autre part, dont les effets sont permanents. Une comparaison du cycle tunisien avec les cycles jordanien et marocain, permet de vérifier si ces impulsions sont communes ou plutôt spécifiques à la Tunisie, si elles sont à l’origine d’une synchronisation cyclique ou plutôt d’écart de conjoncture entre les trois pays. Cette dernière approche pourrait se révéler fort utile : elle pourrait livrer des enseignements sur le facteur commun partagé par les trois pays et, de fait, sur le poids réel des chocs idiosynchratiques dans l’explication du cycle en Tunisie.
12 L’article est organisé de la manière suivante : la première section établit un diagnostic conjoncturel du cycle classique et du cycle de croissance en étudiant, de manière univariée, les séries qui permettent de suivre le cycle. La deuxième section évalue le poids réel des chocs d’offre et de demande dans le retournement cyclique, en utilisant un modèle VAR structurel bivarié. Une place importante est réservée à l’évaluation empirique du problème d’agrégation des chocs. La troisième section compare le cycle tunisien avec les cycles marocain et jordanien et étudie la synchronisation potentielle qui peut exister entre les trois conjonctures.
Un repérage et une description du cycle économique
13 On se propose d’établir une chronologie des évolutions conjoncturelles et une description de certaines propriétés cycliques, sur la période 1970-2002, à partir principalement de l’analyse des caractéristiques de l’indice de production industrielle trimestriel (IP), plutôt que du PIB. Des raisons pratiques de disponibilité des données aux fréquences voulues (trimestres) peuvent expliquer ce choix, mais il peut être également justifié par des considérations économiques : les mouvements conjoncturels du PIB sont plus inertes parce qu’ils enregistrent l’impact de forces contra-cycliques, ceux de l’IP présentent une plus nette pureté (Fayolle, 1993).
14 La caractérisation des évolutions conjoncturelles développée dans cet article couvre deux types de cycles : le cycle classique ou le cycle d’affaires (Business Cycle) et le cycle en déviation ou le cycle de croissance (Growth Cycle) (Elachhab, 2007a).
Le cycle classique
15 Le graphique 1 fait apparaître la chronique des points de retournement du cycle classique de l’IP trimestriel, obtenu par application de l’algorithme BBQ [1]. Sur ce graphique, les traits pleins désignent les pics et les traits pointillés désignent les creux. Les phases de contraction (pic-creux) sont colorées en gris.
16 Au regard de ce graphique, il apparaît que l’économie tunisienne a connu cinq cycles sur la période 1970 : 1-2002 : 1. De façon plus précise, il est possible de distinguer six points bas et six points hauts plus ou moins prononcés de l’IP. L’intérêt de ces points peut s’apprécier par l’examen des propriétés statistiques des phases d’expansion et des phases de récession, illustrées dans le tableau 1.
17 Au cours des phases de contraction, l’IP a diminué au taux trimestriel moyen de 1,36%. Ce taux moyen cache, cependant, une très grande variabilité dans l’ampleur des récessions. Durant les récessions de 81 : 2-82 : 3, de 84 : 3-87 : 1 et de 93 : 3-94 : 1, l’IP a diminué respectivement de 5.58%, de 15.58% et de 6,32% du sommet au creux du cycle. Au cours des deux autres récessions, l’IP a seulement diminué de 2,10% du sommet au creux de 74 : 4-76 : 2 et de 2,96% durant celle de 89 : 2-90 : 3. Il est donc difficile d’inférer quoique ce soit de l’ampleur de la diminution de l’IP lors des récessions. Il n’y a donc pas d’homogénéité dans l’amplitude des contractions de l’activité industrielle d’une récession à l’autre (graphique 2). Les récessions résultent de chocs différents et les contractions de l’économie varient en fonction des ajustements réalisés.
le cycle classique, 1970 : 1-2002 : 1
5,0
4,5
4,0
3,5
70 : 3 74 : 4 76 : 2 81 : 2 82 : 3 84 : 3 87 : 1 89 : 2 90 : 3 93 : 3 94 : 1 01 : 2
le cycle classique, 1970 : 1-2002 : 1
IP en récession, indice normalisé à 100 au sommet de chaque cycle
101
100
99
98
Récession 74 : 4-76 : 2
Récession 81 : 2-82 : 3
97 Récession 84 : 3-87 : 1
Récession 89 : 2-90 : 3
Récession 93 : 3-94 : 1
96
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 Différents trimestres, 2 = 1er trimestre de chaque récession
IP en récession, indice normalisé à 100 au sommet de chaque cycle
les phases du cycle classique
Points de retournement | Durée de contraction | Durée d’expansion | Durée du cycle | Durée du cycle | |
creux (C) |
pics (P) |
pic au creux (Pau C) |
creux au pic (C au P) |
pic au pic (P au P) |
creux au creux (C au C) |
1970 : 3 1976 : 2 1982 : 3 1987 : 1 1990 : 3 1994 : 1 Moyenne Médiane Écart type |
1974 : 4 1981 : 2 1984 : 3 1989 : 2 1993 : 3 2001 : 2 |
6 5 10 5 2 5,60 5 2,88 |
17 20 8 9 12 29 15,83 14 7,93 |
26 13 19 17 31 21,20 19 7,22 |
23 25 18 14 14 18,80 18 5,06 |
les phases du cycle classique
18 L’examen du comportement des composantes du PIB [2] au cours des phases de contraction donne une idée sur ce que devraient être les facteurs à l’origine des récessions économiques. L’évolution de ces composantes montre que les exportations et les importations se sont comportées de manière semblable durant les phases de contraction. L’une et l’autre ont enregistré une baisse notable dans certaines phases et une stagnation dans d’autres. La consommation et l’investissement ont tous les deux suivi une voie essentiellement différente. C’est seulement au cours de la phase de contraction de 84 : 3-87 : 1 qu’on a enregistré une baisse importante de l’investissement. Ce n’est donc pas la lenteur de la demande de consommation interne, ni celle de l’investissement, qui explique les mauvaises performances de l’économie tunisienne. Durant les phases de contraction (hormis la phase de 84 : 3-87 : 1 où on a observé non seulement un fléchissement des dépenses, mais aussi une incapacité structurelle du système à maintenir le niveau de l’offre (Elachhab, 2007b), la consommation et l’investissement ont, en effet, augmenté respectivement au taux trimestriel moyen de 1,48 % et de 3,67 %. Les importations ont stagné (le taux de croissance moyen est de 0,32%) et les exportations ont diminué aux taux de 2,17%. Ce sont donc les chocs de demande externes sur les exportations et les chocs d’offre externes sur les importations qui sont les plus aptes à expliquer les mauvaises performances de l’économie tunisienne.
19 Pour visualiser ceci, on a établi l’évolution jointe du cycle tunisien et du cycle de la Zone-euro, notre principal partenaire commercial. L’observation visuelle des deux conjonctures donne à penser qu’il y a un lien historique entre les contractions tunisiennes et celles de l’Europe, lorsqu’on revient à l’examen des seuls points de retournement. Tel que précisé dans Anas et alii (2004), on peut distinguer pour la Zone-euro quatre phases de contraction : la première date de 73-75 et est due à l’impact négatif du premier choc pétrolier, les deux suivantes succèdent au deuxième choc pétrolier et son double prolongement en 80 : 1-81 : 1 et 81 : 4-82 : 4. La quatrième contraction de la Zone-euro fait suite, quant à elle, au repli de l’économie américaine de 90 : 3-91 : 1 et est en outre causée par la crise du Golfe et le climat d’incertitude qui s’en est suivi. Par rapport à ces phases de récession, apparaît un comportement proche du cycle tunisien avec un léger retard par rapport au cycle européen. C’est dire que le cycle tunisien subit l’impact négatif des contactions de la Zone-euro.
20 À ce stade, si l’on reconnaît que l’intégration financière de l’économie tunisienne avec la Zone-euro, au cours des trente dernières années, a été faible (la part de l’investissement direct étranger dans le PIB étant de l’ordre de 1,9% durant la période 1970-2000), on pourrait avancer que ce sont les liens commerciaux (importation et exportation) qui pourraient expliquer l’essentiel de la transmission des contractions européennes à l’économie tunisienne.
composantes du PIB et phases de récessions
3a : investissement
Log Consommation Log Investissement
8,8 9,6
8,4 9,2
8,8 8,0
7,6 8,4
7,2 8,0
6,8 7,6
74 : 4 76 : 2 81 : 2 82 : 3 84 : 3 87 : 1 89 : 2 90 : 3 93 : 3 94 : 1 01 : 2 74 : 4 76 : 2 81 : 2 82 : 3 84 : 3 87 : 1 89 : 2 90 : 3 93 : 3 94 : 1 01 : 2 3c : Exportations 3d : importations Indice des exportations
Indice des importations 2,0 2,0
1,6
1,6 1,2 1,2
0,8 0,8
0,4 0,4
0,0 0,0 74 : 4 76 : 2 81 : 2 82 : 3 84 : 3 87 : 1 89 : 2 90 : 3 93 : 3 94 : 1 74 : 4 76 : 2 81 : 2 82 : 3 84 : 3 87 : 1 89 : 2 90 : 3 93 : 3 94 : 1
composantes du PIB et phases de récessions
cycle tunisien vs cycle de la Zone-euro
5,0
4,5
4,0
3,5
70 : 3 74 : 4 81 : 2 84 : 3 89 : 2 93 : 3 01 : 2 76 : 2 82 : 3 87 : 1 90 : 3 94 : 1
LIP Europe
4,8
4,7
4,6
4,5
4,4
4,3
4,2
4,1
74 : 2 77 : 1 80 : 1 81 : 4 90 : 4 92 : 1 95 : 3 98 : 2 00 : 4 75 : 2 77 : 4 81 : 1 82 : 4 91 : 3 93 : 2 96 : 2 98 : 4
cycle tunisien vs cycle de la Zone-euro
Le cycle de croissance
21 Le graphique 5 reproduit le profil des écarts conjoncturels obtenu par application du filtre passe-bande BP de Baxter et King (1995). Sur ce graphique, les traits pleins désignent les pics et les traits pointillés désignent les creux, déterminés en appliquant l’algorithme BBQ et en utilisant l’axiomatique de Dungey et Pagan (2000) [3].
les phases du cycle de croissance
0,08
0,04
0,00
- 0,04
- 0,08
- 0,12
70 : 3 72 : 3 74 : 3 79 : 3 84 : 3 89 : 2 93 : 2 96 : 2 73 : 2 76 : 2 82 : 3 87 : 1 90 : 3 95 : 1 99 : 4
les phases du cycle de croissance
22 Le découpage établi au tableau 2 met en exergue 7 cycles (creux-creux) facilement identifiables. De façon plus précise, il est possible de distinguer trois cycles mineurs (cycle 1, cycle 2 et cycle 5), d’une durée moyenne de trois ans, et quatre cycles majeurs (cycle 3, cycle 4, cycle 6 et cycle 7), d’une durée de cinq ans.
23 Les graphiques 6 permettent de comparer les cycles majeurs, après centrage sur le sommet du cycle. Sur ces graphiques, il apparaît que les cycles des années 70 et 80 sont plus volatiles que ceux des années 90 ; leurs amplitudes sont, en effet, plus élevées. Il apparaît aussi, qu’avant 1990, les cycles sont plutôt symétriques : la durée des phases ascendantes est à peu prés égale à celle des phases descendantes. Les cycles des années 90 sont, quant à eux, asymétriques. Le dernier cycle de 95 : 1-99 : 4 diffère plus par la durée de sa phase descendante que par celle de sa phase ascendante. Durant cette phase, l’écart conjoncturel de l’IP a augmenté de 11 points en l’espace de 5 trimestres. Au cours du cycle de 90 : 3-95 : 1 on observe la forme d’un W. La phase de reprise conjoncturelle a été plus amortie que les précédentes. En effet, entre le creux de 90 : 3 et le pic de 93 : 2 l’augmentation de l’écart de l’IP n’a été que de 6 points contre 10 et 16 points pour les cycles de 76 : 2-82 : 3 et 82 : 3-87 : 1.
les phases du cycle de croissance
Points de retournement |
Durée du ralentissement conjoncture |
Durée de la reprise l conjoncturelle | Durée du cycle | Durée du cycle | |
creux (C) | pics (P) | pic au creux (P au C) | creux au pic (C au P) | pic au pic (P au P) | creux au creux (C au C) |
1970 : 3 1973 : 2 1976 : 2 1982 : 3 1987 : 1 1990 : 3 1995 : 1 1999 : 4 Moyenne Médiane Écart type |
1972 : 3 1974 : 3 1979 : 3 1984 : 3 1989 : 2 1993 : 2 1996 : 2 2001 : 2 |
3 7 12 10 5 7 14 8,28 7 3,90 |
8 5 13 8 9 11 5 6 8,12 8 2,85 |
8 20 20 19 16 12 20 16,42 19 4,75 |
11 12 25 18 14 18 19 16,71 18 4,82 |
les phases du cycle de croissance
0,04 Cycle 90 : 3-95 : 1 0,04 Cycle 76 : 2-82 : 3 Cycle 95 : 1-99 : 4
Cycle 82 : 3-87 : 1
0,02 0
0 - 0,04
- 0,02 - 0,08 -0,04
- 0,12 -0,06
0 5 10 15 20 25 0 5 10 15 20 25
24 Le caractère atypique de cette phase de reprise conjoncturelle pourrait, probablement, s’expliquer par les retombées positives des politiques entreprises à l’occasion du programme d’ajustement structurel (relative maîtrise du déficit budgétaire, ralentissement de l’inflation, reprise de l’investissement privé) au moment même où l’économie mondiale connaissait une récession et où les produits manufacturiers tunisiens connaissaient une difficulté de pénétration sur les marchés internationaux (Elachhab, 2007b).
25 Pour compléter cette description du cycle de croissance, une analyse des cycles spécifiques de l’investissement, de la consommation, des importations et des exportations est établie. Les mouvements conjoncturels sont mis en évidence à l’aide des moments statistiques d’ordre deux, pratique généralement utilisée par la théorie des cycles. Les informations sur la variabilité, sur la pro-cyclicité et sur la persistance sont respectivement mesurées par l’écart type, la corrélation et l’autocorrélation.
26 L’écart type de l’IP est supérieur à celui de la consommation et inférieur à celui de l’investissement. La volatilité des importations et des exportations est elle aussi plus importante que celle de l’IP. Le caractère pro-cyclique de l’investissement et de la consommation est contesté. Ceci est dû à la nature annuelle des données qui sont transformées en fréquences trimestrielles par interpolation cubique.
régularités cycliques
Variable (X) |
ET (X)/ ET (IP) |
Auto correlation |
Corr (X, IP) |
Consommation Investissement Indice des importations Indice des exportations Exportation/importation |
0,42 1,78 3,50 4,82 2,85 |
0,90 0,93 0,32 0,55 0,44 |
- 0,16 - 0,18 0,14 0,22 0,14 |
régularités cycliques
27 L’observation de la corrélation entre le solde commercial (X/M) et l’IP montre que celui-ci évolue de manière pro-cyclique, ce qui contredit les régularités observées dans la majorité des pays développés (Torre, 1997). Cette cohérence des mouvements pourrait, probablement, s’expliquer soit par une forte réaction des exportations des produits manufacturiers aux expansions de l’IP, soit par l’insensibilité des importations aux fluctuations de la demande domestique.
comparaison des écarts conjoncturels
0,08
0,06
0,04
0,02
0,00
- 0,02
- 0,04
- 0,06
- 0,08
- 0,10 IP
- 0,12 Investissement
- 0,14
1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002 0,3
0,2
0,1
0
- 0,1
IP Balance commerciale - 0,2
1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998 2002
comparaison des écarts conjoncturels
Un cycle marqué par la prédominance des chocs d’offre
28 L’étude des régularités du cycle économique, établie dans la section précédente, permet d’apprécier l’importance accordée aux points de retournement comme outil d’analyse du processus cyclique. Chaque point de retournement est l’aboutissement d’un processus mis en œuvre bien avant et non un événement en soi. Ce processus est la conséquence d’une suite d’évènements, de chocs et la distinction entre ces chocs et la détermination de leurs poids dans le retournement cyclique est d’une importance cruciale.
29 Pour déterminer le poids réel des sources d’impulsion à l’origine des fluctuations, nous retenons la méthodologie VAR structurel (SVAR) de Blanchard et Quah (1989). Cette méthodologie, si elle est intéressante dans une perspective statistique, n’est probablement pas la plus appropriée à l’identification des chocs conjoncturels. Dans cette représentation, en effet, les chocs sont modélisés comme une moyenne empirique des effets d’une multitude d’impulsions individuelles. Faust et Leeper (1997) montrent la sensibilité des résultats à l’hypothèse formulée sur l’interdépendance des chocs.
30 Nous utilisons, tout de même, un VAR bivarié. On choisit alors de retenir le taux de croissance de l’IP comme indicateur à modéliser conjointement avec le taux d’inflation (voir annexe 1). Dans cette représentation, l’identification des chocs structurels est établie en imposant des restrictions de long terme, en particulier les chocs de demande n’affectent pas à long terme la croissance de l’IP.
L’évaluation empirique du problème d’agrégation
31 L’évaluation empirique du problème d’agrégation des chocs réalisée ici repose sur les constats de Faust et Leeper (1997). L’encadré 1 précise ces constats et décrit la méthodologie dont ils relèvent.
L’agrégation des chocs
32 Les composantes de la demande retenues pour évaluer le problème d’agrégation des chocs sont définies par les taux de croissance de la monnaie (M1) et des dépenses publiques (Investissement + consommation). Ces composantes sont utilisées comme approximations respectives des variations de la politique monétaire et de la politique budgétaire. L’utilisation des variations du taux d’intérêt a paru inutile puisque, avant 1987, ces taux étaient fixés par les autorités et ne réagissaient pas aux variations de la masse monétaire.
33 Les coefficients de corrélation entre les chocs d’offre structurels et les composantes budgétaire et monétaire de la politique économique sont reportés au tableau 4. Selon ce tableau, il apparaît que les coefficients de corrélation ne sont pas significativement différents de zéro, ce qui implique que les chocs structurels d’offre sont non corrélés avec les approximations retenues des composantes de la demande. Ce résultat est encore plus plausible si l’on considère la causalité au sens de Granger. Les statistiques de Fisher, associées aux restrictions de causalité, sont présentées dans le même tableau. Il apparaît que l’hypothèse de non-causalité des chocs d’offre par les composantes de la demande est largement acceptée : les chocs d’offre estimés semblent donc constituer une mesure fiable des véritables perturbations d’offre qui affectent l’économie.
L’agrégation temporelle
34 Pour identifier la similitude qui peut exister entre les chocs structurels estimés sur données annuelles et ceux estimés sur données trimestrielles, une comparaison des résultats de la décomposition de la variance de l’erreur de prévision s’impose. Les résultats montrent, dans l’ensemble, une prédominance des chocs d’offre dans l’explication de la variance de l’erreur de prévision de l’IP et de l’IPC et ceci quelle que soit la fréquence des données utilisées (annexe 2). Le poids des chocs d’offre sur données trimestrielles est tout de même plus faible que celui établi sur données annuelles. Cette ressemblance du poids des chocs structurels dans l’explication de la croissance de l’IP et de l’inflation pour les deux types de modèles suggère que les chocs structurels sont identifiés de manière similaire.
35 Plus formellement, en vue d’identifier le problème d’agrégation temporelle, une estimation des équations 5 et 6 (voir encadré 1) a été établie.
36 Le test de Fisher établi sur l’équation 5 fait apparaître une interaction dynamique significative entre chocs d’offre annuels et chocs de demande trimestriels. L’hypothèse nulle W (L4) = 0 est, en effet, rejetée au niveau de 10% de significativité. En agrégeant les chocs, les perturbations d’offre annuelles rendent compte de l’effet de certaines perturbations de demande trimestrielles. Pour l’équation 6, le test de Fisher ne peut rejeter l’hypothèse nulle M (L4) = 0, les chocs de demande annuels constituent une pure agrégation des chocs de demande trimestriels.
coefficients de corrélation et test de causalité (chocs d’offre structurels vs composantes de demande)
Croissance de la monnaie | Croissance des dépenses publiques | |
Corrélation avec chocs d’offre estimés | 0,031 | - 0,010 |
Causalité au sens de Granger |
F-stat : 0,2195 p-value : 0,63096 Conclusion : NR |
F-stat : 0,1194 p-value : 0,88758 conclusion : NR |
coefficients de corrélation et test de causalité (chocs d’offre structurels vs composantes de demande)
Notes : H0 : les composantes de la demande ne causent pas au sens de Granger les chocs d’offre.
H0 NR implique l’impossibilité de rejeter H0.
test de l’agrégation temporelle
Équation 5 |
H0 : W (L4) = 0 df (4,21) |
f-statistic 2,46 |
Prob 0,076 |
Équation 6 |
H0 : M (L4) = 0 df (4,21) |
f-statistic 1,52 |
Prob 0,232 |
test de l’agrégation temporelle
Encadré 1 : le problème d’agrégation des chocs
La modélisation VAR structurel de Blanchard et Quah (1989) développe une vision essentiellement dichotomique des sources de fluctuation, en termes de chocs d’offre, dont les effets sont permanents et des chocs de demande dont l’impact est temporaire. Cette dichotomie a été remise en cause sur le plan des représentations statistiques par les critiques de Faust et Leeper (1997). Constatant que les chocs structurels (du VAR bivarié) ne représentent qu’une moyenne empirique des effets d’une multitude de chocs individuels, ils concluent que l’hypothèse pour laquelle les chocs ne peuvent s’entremêler n’est compatible avec la représentation VAR bivarié que si les réactions des variables du système aux différents chocs d’offre, en l’occurrence chocs de demande, sont identiques. Se trouve, alors, contredite la représentation standard d’une variabilité cyclique due à des chocs conjoncturels fondamentalement indépendants.
Faust et Leeper (1997) ajoutent que, même si les chocs agrégés d’offre et de demande identifiés par le VAR bivarié correspondent aux vrais chocs structurels, les conditions d’identification restent sévères, en particulier si on s’intéresse à la datation historique de leur occurrence. Les réactions dynamiques d’une économie à un choc individuel diffèrent, en tout état de cause, de sa réponse estimée à un choc agrégé. Celle-ci ne peut préserver la datation de tous les chocs individuels que lorsque ces chocs affectent l’économie de la même manière, ce qui n’est pas généralement le cas.
Contrairement à la méthodologie de Faust et Leeper (1997), on évalue dans cet article, le problème d’agrégation en testant si les perturbations estimées d’offre peuvent être expliquées par des facteurs de demande, essentiellement les mesures de politiques économiques : l’indépendance des chocs d’offre supposent que celles ci ne devraient ni inclure ni être conduites par des mesures de politiques économiques. À ce stade, les corrélations entre les variables de la politique économique et les chocs d’offre estimés peuvent donner quelques éléments de réponse. Du moment où les coefficients de corrélation n’indiquent pas sur le schéma causal qui peut exister entre les deux composantes, le test de causalité au sens de Granger peut être utilisé pour vérifier si les composantes de la politique économique apportent une information supplémentaire dans la prévision des chocs d’offre (Ramayandi, 2006).
Le test de causalité est particulièrement simple à mettre en œuvre, il se ramène à tester conjointement la significativité des coefficients associés aux valeurs retardées des composantes de la demande dans l’équation du choc d’offre.
Le problème d’agrégation temporelle est quand à lui analysé en retenant directement la méthodologie de Fauster et Leeper (1997). Pour identifier la similitude entre les chocs structurels estimés sur des données de fréquence annuelles et trimestrielles, on suppose que les perturbations estimées sur données trimestrielles sont correctes et on étudie comment leurs estimations sur des données annuelles permettent de les agréger. Pour conduire le test, on suppose que les chocs annuels sont fonctions linéaires des quatre chocs trimestriels.
37 En résumé, l’évaluation du problème d’agrégation des chocs structurels fournit les éléments d’évidence empirique que les chocs d’offre sont indépendants des composantes de la demande. Ainsi, même si les chocs d’offre annuels ne constituent pas une pure agrégation des chocs d’offre trimestriels, ils s’éloignent très nettement des composantes de la demande au niveau trimestriel.
Décomposition de la variance et fonctions de réponse aux chocs
38 Le tableau 6 détermine la contribution des chocs structurels d’offre à la variance du taux de croissance de l’IP. Selon ce tableau, les chocs d’offre expliquent à peu prés 59% de la variance ?IP à un horizon de un an et 61% à un horizon de quatre ans, durée moyenne du cycle de croissance. Dans Elachhab, (2007b), on a montré que l’impact de ces chocs d’offre s’est exercé, en partie, par les dotations de ressources, en partie, par les réformes institutionnelles et structurelles entreprises durant la période d’analyse.
Horizon (trimestre) | Variance | Chocs d’offre |
1 4 8 12 16 20 |
0,025019 0,025978 0,026505 0,026774 0,026959 0,027088 |
57,23896 59,11684 60,46194 61,04983 61,43491 61,69720 |
39 L’impulsion de demande explique pourtant bien son rôle, qui est de rendre compte de la variance de court terme de l’IP. À un horizon de un an, cette impulsion explique a peu près 41% de la variance de l’IP et de l’ordre de 38% à un horizon de quatre ans.
40 Il est remarquable que ces résultats ressortent d’une représentation vectorielle où les impulsions structurelles, d’offre et de demande, sont agrégées. Des résultats semblables sont atteints dans un représentation qui sépare les chocs internes, d’offre et de demande, des chocs externes (Elachhab, 2007b), ce qui permet de conclure à la robustesse de l’identification retenue. Dans Elachhab (2007b) on a montré que les chocs d’offre internes expliquent à peu près 60% de la variance de l’erreur de prévision de l’IP à un horizon de un an et 54% à un horizon de quatre ans. Quant aux chocs de demande internes, leur contribution est relativement limitée et ne dépasse guère les 35%. Cette faible contribution des chocs de demande s’explique en partie par la structure même des dépenses publiques, qui sont caractérisées par une prédominance des dépenses de fonctionnement et du service de la dette, en partie par le caractère passif de la politique monétaire.
41 À coté de la détermination du poids réel des impulsions d’offre et de demande dans l’explication des fluctuations de l’IP, les fonctions de réponse aux chocs sont établies. Les résultats de la décomposition de variance de l’erreur de prévision de l’IP se retrouvent dans l’ensemble : les fonctions de réaction aux chocs d’offre montrent un effet significatif substantiel dès le premier trimestre ; effet qui s’estompe relativement pour se stabiliser vers le 10ème trimestre à 0,1%. Ces chocs conservent un effet cumulé persistant sur l’IP et produisent une amélioration de la production industrielle aussi bien à court terme qu’à long terme. L’impact maximum est de l’ordre de 1,8% dès le premier trimestre.
42 Quant aux chocs de demande, leur impact est relativement faible et ils n’admettent un effet positif qu’à l’horizon du troisième trimestre. À l’horizon du septième trimestre, l’effet des chocs de demande s’estompe et se trouve au voisinage de zéro. À ce faible rôle des chocs de demande, s’ajoute une instabilité de la nature de leur impact : sur les sept trimestres l’effet est faible et n’admet pas de signe constant.
fonctions de réponse aux chocs
0,02
Choc d'offre
0,01
0
- 0,01
- 0,02
0 5 10 15 20 0,02
Choc de demande
0,01
0
- 0,01
- 0,02
0 5 10 15 20
fonctions de réponse aux chocs
43 En définitive, la chronique des innovations du cycle en Tunisie est constituée par une succession d’impulsions conjoncturelles de nature et d’importance hétérogènes. Elle n’est pas assimilable à une suite de chocs qui seraient de même nature, tels que les chocs technologiques privilégiés par les théoriciens du cycle réel.
Par rapport aux pays émergeant, la conjoncture tunisienne est plutôt marquée par des spécificités nationales
44 Le diagnostic conjoncturel du cycle industriel tunisien ne peut, maintenant, faire l’économie d’une comparaison avec les conjonctures des pays dont les structures économiques sont proches. À ce titre, il serait utile, afin de mettre en perspective les ressemblances et les divergences de la situation tunisienne avec les régularités cycliques de ces pays, d’évaluer leurs écarts conjoncturels et leurs régularités cycliques.
45 Les pays en voie de développement diffèrent sous plusieurs aspects (les institutions, les politiques gouvernementales, les structures industrielles, les structures commerciales) et ceux dont les structures sont similaires s’ajustent de manière identique aux influences sectorielles externes, notamment les chocs de productivité et les chocs de demande dans les pays industrialisés. Deux pays sont retenus : la Jordanie et le Maroc (4).
Une divergence des régularités et une désynchronisation cyclique
46 On pourrait s’attendre à ce que des structures économiques semblables d’un groupe de pays se traduisent par des cycles plus identiques. Pour mesurer les degrés de ressemblance et de divergence des cycles des trois pays, on pourrait se fonder sur l’amplitude, la durée et les pertes (gains) cumulées durant les différentes phases.
47 Les graphiques qui suivent illustrent les écarts conjoncturels des indices de production industrielle de la Jordanie et du Maroc obtenus par application du filtre passe-bande, en même temps que les datations de leurs points de retournement respectifs [5].
48 Ces graphiques montrent que l’alternance des points de retournement est plus fréquente au Maroc et en Jordanie qu’elle ne l’est en Tunisie. Les phases de ralentissement et de reprise conjoncturelles paraissent alors plus courtes. En moyenne, la durée du cycle (P-P) est de l’ordre de 16,7 pour la Tunisie et respectivement de 10,6 pour la Jordanie et 9,1 pour le Maroc (tableau 7). Les mouvements cycliques passent rapidement d’un point de retournement à un autre, ce qui peut s’expliquer par une fréquence relativement élevée des crises subies et un effet relativement limité des politiques de stabilisation.
cycles de croissance, 1980 : 1-2002 : 1
0,08
0,04
0,00
- 0,04
- 0,08
- 0,12
- 0,16
- 0,20 81 : 2 84 : 3 87 : 4 89 : 3 91 : 4 94 : 1 97 : 2 83 : 1 86 : 4 88 : 3 91 : 1 92 : 3 96 : 3 99 : 3 Cycle marocain 0,06
0,04
0,02
0,00
- 0,02
- 0,04
- 0,06
- 0,08 82 : 1 83 : 3 86 : 2 88 : 2 90 : 2 92 : 1 94 : 3 97 : 2 85 : 1 87 : 4 89 : 2 91 : 1 93 : 2 96 : 1 99 : 3
cycles de croissance, 1980 : 1-2002 : 1
49 Pour la Jordanie, l’amplitude des phases de ralentissement et de reprise conjoncturelles vaut en moyenne –14,54 et 14,37 et est deux fois plus intense que celle du Maroc ou de la Tunisie. Il est probable qu’une partie de cette volatilité découle de la nature des chocs subis par l’économie jordanienne. En particulier, les années 80 et le début des années 90 ont connu d’importants chocs financiers négatifs associés à l’influence des perturbations socio-politiques, notamment la première guerre du Golfe et le conflit israélo-palestinien (Mongardine et Saadi-Sedik, 2003 ; FMI, 2004).
50 L’examen de la rigueur des mouvements cycliques révèle des différences importantes pour les trois pays. Pour le Maroc, les gains cumulés au cours des phases de reprise conjoncturelle sont à peu près égaux aux pertes cumulées durant les phases de ralentissement. La conjoncture marocaine est donc caractérisée par des comportements symétriques par rapport à la tendance. Pour la Jordanie et la Tunisie, en revanche, les pertes cumulées sont plus importantes que les gains cumulés.
51 En termes de comouvement et de synchronisation, il apparaît en moyenne une avance du cycle marocain (3 trimestres) et un retard du cycle jordanien (4 trimestres) par rapport au cycle tunisien. À première vue, il se manifeste une assez faible synchronisation entre les trois pays, avec des retards et avances limités. Les coefficients de corrélation sont, en effet, de l’ordre de 0,31 avec le Maroc et 0,36 avec la Jordanie.
52 Les décalages du cycle tunisien par rapport au cycle marocain et au cycle jordanien sont très fréquents, mais on pourrait avancer les faits suivants qui sont simplifiés, mais pas du tout stylisés :
- durant les années quatre-vingt, la Tunisie suit avec retard le cycle marocain. La corrélation cyclique est moyenne et est de l’ordre de 0,44. La corrélation cyclique entre la Tunisie et la Jordanie n’est pas claire : il y a plutôt une avance de la Tunisie mais elle est instable ;
- la première guerre du Golfe est à l’origine de fluctuations très corrélées entre les trois pays et les décalages sont faibles ;
- les cycles des années quatre-vingt-dix sont largement en avance en Tunisie sur ceux de la Jordanie et du Maroc et les corrélations sont faibles.
54 La désynchronisation des trois conjonctures est un fait qui a une certaine généralité. Elle définit une faible interdépendance cyclique entre les trois pays dont il convient d’éclaircir les causes.
Jordanie | Maroc | Tunisie | |||
Fréquence | Différence | Différence | |||
Nombre de ralentissements Nombre de reprises Nombre de cycles (P-P) Nombre de cycles (C-C) |
7 6 6 6 |
- 3 - 1 - 2 - 2 |
7 7 6 7 |
- 3 - 2 - 2 - 3 |
4 5 4 4 |
Durée | |||||
Durée moyenne des ralentissements Durée minimale des ralentissements Durée maximale des ralentissements Durée moyenne des reprises Durée minimale des reprises Durée maximale des reprises Durée moyenne des cycles (P-P) Durée minimale des cycles (P-P) Durée maximale des cycles (P-P) Durée moyenne des cycles (C-C) Durée minimale des cycles (C-C) Durée maximale des cycles (C-C) |
6,71 3 10 4,3 3 6 10,6 7 13 11 7 16 |
2,29 2 4 3,5 2 5 6,1 5 8 3,2 7 3 |
5,4 3 9 4,5 3 6 9,1 7 11 10 6 14 |
3,5 2 5 3,2 2 5 7,5 5 9 7,2 8 5 |
9 5 14 7,8 5 11 16,7 11 20 17,2 14 19 |
Amplitude | Ratio | Ratio | |||
Amplitude moyenne des ralentissements Amplitude minimale des ralentissements Amplitude maximale des ralentissements Amplitude moyenne des reprises Amplitude minimale des reprises Amplitude maximale des reprises |
- 14,54 - 7,24 - 25,30 14,37 8,65 26,14 |
0,60 0,66 0,46 0,66 0,70 0,61 |
- 6,77 - 3,82 - 9,65 7,03 2,85 11,37 |
1,29 1,25 1,23 1,35 2,13 1,41 |
- 8,77 - 4,79 - 11,89 9,53 6,09 16,05 |
Perte cumulée | |||||
Perte cumulée moyenne Perte cumulée minimale Perte cumulée maximale |
- 37,53 - 11,85 - 87,07 |
1,19 0,85 0,85 |
- 19,61 - 6,44 - 33,77 |
2,28 1,56 2,21 |
- 44,88 - 10,09 - 74,88 |
Gain cumulé | |||||
Gain cumulé moyen Gain cumulé minimal Gain cumulé maximal |
30,92 9,02 63,56 |
1,14 1,89 1,32 |
18,45 10,18 31,23 |
1,92 1,67 2,68 |
35,52 17,05 83,90 |
La baisse de la synchronisation peut s’expliquer par la faiblesse des chocs communs et par l’importance des chocs spécifiques
55 Traditionnellement, le cycle d’une économie ouverte peut être décomposé en trois composantes : la première, dite idiosynchratique, est liée à des chocs spécifiques tels que les politiques budgétaires ou monétaires domestiques. La deuxième, appelée commune, est liée à des chocs communs, tels que les chocs pétroliers. Et, enfin, la troisième résulte de la transmission des chocs d’une économie à une autre (Heitz et alii, 2006). Sur la base de cette grille, il est possible de déterminer les facteurs responsables de la désynchronisation cyclique entre la Tunisie, la Jordanie et le Maroc. Pour cela, nous estimons un modèle espace-état (Monfort et alii, 2002), en vue d’isoler un cycle commun et nous déterminons le poids réel de la composante commune et de la composante spécifique dans l’explication du cycle en Tunisie.
56 Le graphique 10 représente la variable inobservée ou le facteur commun au trois cycles obtenu par application du filtre de Kalman. D’après ce graphique, les trois pays auraient connu quatre phases communes de ralentissement conjoncturel : au début des années 80, en 87, en 89 et au milieu des années 90. Trois d’entre elles correspondent aux faits stylisés avec la crise d’endettement externe des pays en voie de développement du début des années 80, la crise du Golfe en 90 et le ralentissement de l’économie mondiale de 94-96 (ralentissement aux États-Unis en 94 : 4-96 : 4 et ralentissement dans la Zone-euro en 95 : 1-96 : 4 (Anas et alii, 2004)]. Durant la phase 87 : 3-88 : 3, on observe un ralentissement similaire pour le Maroc et la Jordanie mais la chronique d’innovation n’est pas tout à fait identique.
57 En fait, la phase décroissante de 87 : 3-88 : 3, plutôt commune aux cycle jordanien et marocain seulement [6], s’apparente plus à une phase similaire aux deux séries qu’à une phase commune. Le cycle similaire traduit une analogie des modes de propagation des fluctuations (même période et mêmes facteurs d’amortissement) dans les deux pays sans pour autant que les chocs qui gouvernent ces fluctuations soient identiques. D’ailleurs, et tel que cela est illustré par les graphiques 11, les deux composantes cycliques durant cette phase de ralentissement sont sensiblement différentes et franchement désynchronisées. Le cycle similaire ne devient commun que lorsque les chroniques d’impulsion qui lui sont appliquées sont parfaitement corrélées (Bentoglio et alii, 2002). Elles ne diffèrent que par leur variance, de sorte que les composantes cycliques des deux pays deviennent parfaitement synchronisées et ne diffèrent que par leur amplitude, chose qui n’est pas visible sur le graphique.
facteur commun des cycles des trois pays
0,6 Composante commune
0,4
0,2
0
- 0,2
- 0,4
- 0,6
- 0,8
1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002
facteur commun des cycles des trois pays
58 Vu le nombre relativement élevé des points de retournement des cycles jordanien et marocain et les décalages plus ou moins marqués des points de retournement des trois conjonctures par rapport à ceux de la composante commune durant ses phases descendantes, l’impact de celle-ci dans l’explication des trois conjonctures paraît plutôt faible (tableau 8).
estimation des paramètres du modèle
Tunisie | Maroc | Jordanie | |
ai |
0,632 (0,074) |
0,131 (0,135) |
0,297 (0,153) |
bi |
- 0,011 (5,22) |
- 0,021 (9,685) |
0,044 (19,487) |
d |
0,674 (0,365) |
estimation des paramètres du modèle
Note : le nombre entre parenthèse désignent les écart types.
Yi, t = ai Yi, t ?1 + bi Zt + ? i, t
Zt = dZ t ?1 + ?t
59 Selon ce tableau, la composante commune paraît n’avoir aucun effet significatif sur les trois cycles. Les coefficients bi sont, en effet, faibles et statistiquement non significatifs [7].
60 Les graphiques qui suivent illustrent le profil du cycle commun (pondéré par le coefficient bi spécifique à chaque pays) conjointement avec les écarts conjoncturels des trois pays. Selon ces graphiques, il apparaît une forte synchronisation du cycle jordanien avec le cycle commun aux quatre points creux. Les cycles des deux autres pays manifestent, quant à eux, des différences importantes. Cette différence des profils est, sans doute, liée à la différence des conjonctures et des objectifs de politiques économiques entreprises dans les deux pays au moment de la réalisation des chocs communs. Les disparités nationales en termes de politiques budgétaires et monétaires forcent les productions industrielles des trois pays à répondre de façon hétérogène. On peut, par ailleurs, ajouter que les secteurs industriels de ces pays ont réagi de façon différente aux chocs, accentuant ainsi la désynchronisation.
Encadré 2 : extraction du cycle commun (Monfort et alii, 2002)
On considère un modèle dynamique à facteurs inobservables où les corrélations croisées entre les n composantes d’un processus stochastique Yt sont générées par k facteurs cachés Z1t , ....... , Zkt avec k ? n. On suppose pour simplifier que Yt dépend linéairement de la matrice des facteurs inobservables Zt, de sorte que le modèle retenu définit un modèle espace-état linéaire, soit :
Les n premières équations, les équations de mesure, décrivent la manière dont les n variables observées de Yt sont générées par les variables cachées de Zt. Les variables exogènes prédéterminées et les variables dépendantes décalées, ut, peuvent contribuer à expliquer les mouvements du processus stochastique Yt. Les k dernières équations, les équations de transitions, décrivent l’évolution autoregressive des variables cachées, celles-ci dépendent aussi des variables exogènes prédéterminées et des valeurs décalées des variables dépendantes.
Dans cet article, on choisit de retenir la spécification :
t ? . ? ? 0 ?2? ? n ?
Le processus stochastique de la variable d’état Zt est supposé suivre un processus autoregressif d’ordre 1, Zt = D Zt ?1+ ? t .
Avec cette représentation espace-état, l’extraction de la composante inobservable peut se faire aisément à l’aide du filtre de Kalman. Ce dernier donne une estimation récursive de la variable d’état à l’instant t conditionnellement à l’information disponible jusqu’en t. Ensuite, un lissage permet d’obtenir l’espérance du vecteur d’état à l’instant t conditionnellement à toute l’information disponible sur l’ensemble de la période d’observation de 1 à T. Le lissage permet donc d’extraire, à chaque instant, la composante inobservable des séries considérées ainsi que les bruits blancs respectifs.
61 On ne peut exclure, cependant, qu’un ancrage, s’il existe, des trois cycles aux points creux du cycle commun ne serait qu’une pure coïncidence. En effet, si l’on reconnaît que chaque économie fluctue selon un rythme qui lui est propre, rien ne permet d’affirmer que le même choc doit engendrer des variations de même durée pour les trois pays. Dans cette logique, les chocs communs n’auraient fait qu’accentuer, en les rendant plus proches, des phases de ralentissement déjà engagées dans les trois pays.
62 Les graphiques 11 a, b et c montrent aussi une différence substantielle de volatilité entre la contribution du cycle commun et les cycles des trois pays. Cette différence est sans doute liée à l’occurrence de chocs spécifiques produisant un différentiel de volatilité idiosynchratique, phénomène qui est très manifeste pour le cycle tunisien.
63 L’observation de l’évolution jointe du cycle tunisien avec sa composante idiosynchratique (graphique 12) montre une asse grande similitude, tant au niveau de la forme qu’au niveau de l’amplitude. Certes, la Tunisie a été touchée par la crise d’endettement externe, par la guerre du Golfe et par le ralentissement européen de 94-96, seulement la conjoncture et les objectifs des politiques économiques étaient différents de ceux du Maroc et de la Jordanie au moment de l’occurrence de ces chocs. La spécificité nationale en termes de politiques économiques, conjoncturelles ou structurelles, est telle que le cycle industriel tunisien apparaît fortement entaché par sa composante spécifique.
cycle de l’IP et contribution de la composante commune
0,04
0,02
0,00
- 0,02
- 0,04
- 0,06
- 0,08
- 0,10
1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 b : Jordanie 0,06
0,04
0,02
0
- 0,02
- 0,04
Composante commune Cycle IP - 0,06
- 0,08
1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 c : Maroc 0,08 Composante commune 0,06 Cycle IP
0,04
0,02
0,00
- 0,02
- 0,04
- 0,06
- 0,08
- 0,10
1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002
cycle de l’IP et contribution de la composante commune
cycle de l’IP tunisien vs composante idiosynchratique
0,06
0,04
0,02
0,00
- 0,02
- 0,04
- 0,06
Cycle IP - 0,08
Composante idiosynchratique - 0,10 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002
cycle de l’IP tunisien vs composante idiosynchratique
Conclusion
64 Cet article confirme la pertinence et l’intérêt de la caractérisation et de la mesure du cycle économique d’un pays émergent, tel que la Tunisie. Il utilise l’indice de production industrielle, particulièrement fiable pour le pays, pour suivre le cycle classique et le cycle de croissance. En plus d’une caractérisation statistique, notamment associée à la description des phases de récession et d’expansion et les phases de reprise et de ralentissement, cet article utilise des méthodes plus élaborées d’identification des sources d’impulsion à l’origine des fluctuations (VAR structurel). Enfin, une comparaison des caractéristiques du cycle tunisien avec celles du Maroc et de la Jordanie, pays dont les structures économiques sont proches, et une analyse de la synchronisation potentielle des trois conjonctures constitue une voie complémentaire à la caractérisation du diagnostic conjoncturel établi.
65 Il faut dire que l’étude présentée dans cet article repose sur des méthodes relativement classiques d’analyse du cycle économique. Adapter des méthodes plus sophistiquées telles que les modèles à changement de régimes markoviens ou les analyses factorielles dynamiques, pourrait améliorer la compréhension des résultats et explorer davantage les propriétés de leurs distributions empiriques. Par ailleurs, de futurs travaux pourraient déboucher sur la construction d’indicateurs, financiers ou réels, capables de prédire les points de retournement du cycle, notamment ses phases de récession et de ralentissement.
Annexe 1 : estimation du VAR structurel
Test de stationnarité
ADF | PP | |
? IP ? IP IPC ? IPC |
4,83 - 11,66 - 2,11 - 2,12 |
4,60 - 11,63 - 1,38 - 11,91 |
IP : indice de production industrielle, IPC : indice des prix à la consommation.
Estimation de la forme réduite
66 L’utilisation des critères SC (Schwarz information criterion) et HQ (Hannan Quin) conduit à retenir quatre retards, rejoignant ainsi la majorité des travaux sur données trimestrielles. Plus encore, pour un retard p = 4 les résidus sont non autocorrélés.
Estimation du VAR ( IP, IPC)
? IP | ? IPC | |
? IP?1 |
0,037 (0,092) |
- 0,033 (0,051) |
? IP?2 |
0,141 (0,091) |
- 0,009 (0,051) |
? IP?3 |
0,043 (0,089) |
0,058 (0,050) |
? IP?4 |
0,107 (0,090) |
0,154 (0,050) |
? IPC?1 |
- 0,118 (0,144) |
0,037 (0,081) |
? IPC?2 |
0,394 (0,125) |
- 0,088 (0,070) |
? IPC?3 |
- 0,092 (0,129) |
0,463 (0,072) |
? IPC?4 |
0,174 (0,146) |
0,357 (0,082) |
R2 | 0,37 | 0,25 |
SEE | 0,025 | 0,014 |
Dw | 2,02 | 2,06 |
Estimation du VAR ( IP, IPC)
? ?Les statistiques entre parenthèses désignent les écarts types
Tests de diagnostic sur les résidus
Variable | Q (10) | N (2) |
? IP |
10,256 (0,418) |
9,633 (0,008) |
? IPC |
8,996 (0,253) |
1,056 (0,589) |
N (2) test de normalité de Jarque-Bera, statistiquement distribué selon une loi ? (2).
Les nombres entre parenthèse désignent les probabilité correspondantes.
Les conditions de stabilité du (Lutkephol, 1991)
Racines du polynôme caractéristique
Racine | Module |
0,964149 - 0,181331-0,804650 i - 0,181331+0,804650 i - 0,74464 0,566068 - 0,094627-0,500819 i - 0,094627+0,500819 i - 0,1588 |
0,964149 0,824829 0,824829 0,74464 0,566068 0,50968 0,50968 0,1588 |
Racines du polynôme caractéristique
Matrice des moments des innovations du VAR
67 La matrice variance covariance des résidus est donnée par :
?0,4E?5 0,000197?
Identification des matrices caractéristiques des effets des chocs structurels
68 La matrice des effets de long terme des chocs structurels est donnée par :
? 0,10147 0,045792?
69 Un choc d’offre admet un effet positif sur le taux de croissance de l’IP et sur l’inflation. Un choc de demande n’a pas d’effet à long terme sur la production industrielle mais se répercute positivement sur les prix.
70 La matrice des effets de court terme est, quant à elle, donnée par :
?0,009301 0,010516?
71 Un choc d’offre admet un effet instantané positif sur ? IP et ?IPC. Un choc de demande se répercute négativement sur ?IP et positivement sur ?IPC.
Annexe 2 : décomposition de la variance
Données trimestrielles
Décomposition de l’IP
Horizon (trimestre) | Variance |
Chocs d’offre |
Chocs de demande |
1 4 8 12 16 20 40 |
0,025019 0,025978 0,026505 0,026774 0,026959 0,027088 0,027363 |
57,23896 59,11684 60,46194 61,04983 61,43491 61,69720 62,24188 |
42,76104 40,88316 39,53806 38,95017 38,56509 38,30280 37,75812 |
Décomposition de l’IP
Décomposition de l’IPC
Horizon (trimestre) | Variance |
Chocs d’offre |
Chocs de demande |
1 4 8 12 16 20 40 |
0,014039 0,015518 0,017931 0,018817 0,019371 0,019784 0,020729 |
43,89067 47,59024 57,77504 60,67666 62,25579 63,34347 65,60482 |
56,10933 52,40976 42,22496 39,32334 37,74421 36,65653 34,39518 |
Décomposition de l’IPC
Données annuelles
Décomposition de l’IP
Horizon (trimestre) | Variance |
Chocs d’offre |
Chocs de demande |
1 2 3 4 5 10 |
0,035031 0,038609 0,041027 0,043035 0,044321 0,048295 |
74,54328 79,04353 80,88307 82,60717 83,59854 86,04113 |
25,45672 20,95647 19,11693 17,39283 16,40146 13,95887 |
Décomposition de l’IP
Décomposition de l’IPC
Horizon (trimestre) | Variance |
Chocs d’offre |
Chocs de demande |
1 2 3 4 5 10 |
0,028107 0,031913 0,037168 0,041077 0,044503 0,056032 |
50,73815 48,03342 59,10131 64,17112 68,66144 79,03383 |
49,26185 51,96658 40,89869 35,82888 31,33856 20,96617 |
Décomposition de l’IPC
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Mots-clés éditeurs : modèles à composante inobservable, Régularités cycliques, synchronisation, VAR structurel
Date de mise en ligne : 01/11/2009
https://doi.org/10.3917/ecop.189.0075Notes
-
[*]
Maitre assistant à l’École supérieure des sciences économiques et commerciales de Tunis, Tunisie. E-mail : f. lachhab@ voila. fr
-
[1]
L’algorithme BBQ de Harding et Pagan (2002) correspond au programme de Bry-Boschan sur données trimestrielles (Elachhab, 2007a, b).
-
[2]
Les données trimestrielles relatives à l’investissement et la consommation sont obtenues par interpolation cubique des séries annuelles. Faute de données exprimées en prix constants de 1995 et de données sur les prix à l’exportation et les prix à l’importation trimestriels, les exportations et les importations sont exprimées en termes d’indices.
-
[3]
L’axiomatique de Dungey et Pagan (2000) établit certaines particularités en ce qui concerne l’étendue et l’amplitude des phases du cycle de croissance. En accord avec cette axiomatique, on admet qu’un cycle dure au minimum 6 trimestres et que l’une de ses phases s’étend sur une durée minimale de 3 trimestres. On admet aussi qu’une phase cyclique a au minimum une amplitude de 0,5%.
-
[4]
La Jordanie et le Maroc ont, comme d’ailleurs la Tunisie, une structure industrielle caractérisée par la prédominance du secteur public avec une forte concentration dans la production des biens primaires (phosphate, pétrole..) et le textile. Durant les années 80, ces trois pays ont appliqué des réformes structurelles pour stabiliser leurs économies et rétablir la compétitivité. Les processus de libéralisation qui s’en sont suivis se sont soldés par des refontes de leurs politiques monétaires et de change. Le degré d’intégration de ces pays aux marchés internationaux des capitaux est faible du fait du développement limité de leurs marchés internes. L’afflux des capitaux étrangers est limité et est plus faible que celui adressé aux autres pays en voie de développement d’Asie eu d’Amérique Latine. Leurs échanges commerciaux se font essentiellement avec l’Union européenne avec une faible diversification des produits exportés. Leurs taux d’ouverture sont relativement faibles, ce qui s’explique par des politiques commerciales protectionnistes, essentiellement durant les années 70 et 80. Durant les années 90, les trois pays ont signé des accords d’association avec l’Union Européenne avec comme conséquence une restructuration et une mise à niveau de leur secteur industriel.
-
[5]
On s’intéresse, en particulier, aux évolutions cycliques durant la période 1980-2002. Outre la non-disponibilité des données trimestrielles durant les années 70, essentiellement, pour la Jordanie, cette période est aussi marquée par les deux chocs pétroliers dont les effets étaient asymétriques. Durant cette période, la Tunisie était, en effet, un pays exportateur de pétrole.
-
[6]
Au cours de cette phase, le cycle tunisien révèle plutôt une phase de reprise conjoncturelle.
-
[7]
Pour vérifier la robustesse du résultat de l’absence de l’effet de la composante commune sur les trois cycles, on a identifié le degré de convergence des chocs structurels entre les trois pays et on a mesuré son évolution au cours du temps. L’analyse envisagée utilise des régressions à paramètres évolutifs (time-varying parameter) pour mesurer la convergence des chocs d’offre et de demande dans un modèle espace-état (Boone, 1997). Dans un premier temps, les séries des chocs d’offre et de demande sont déterminées, pour les trois pays, par une analyse VAR structurel. Dans un second temps, un coefficient de convergence dynamique est mesuré par le filtre de Kalman. L’absence, si elle existe, d’une convergence des chocs explique alors la désynchronisation observée entre la Tunisie, le Maroc et la Jordanie. Les résultats montrent que le Maroc présente un degré assez élevé d’hétérogénéité avec la Tunisie aussi bien pour les chocs d’offre que pour les chocs de demande et que cette hétérogénéité se manifeste tout au long de la période d’analyse. Pour la Jordanie, on observe une convergence des chocs avec ceux de la Tunisie durant les années 80 avec une meilleure cohérence relative des chocs de demande que d’offre. Cette convergence reste, tout de même, faible.