Notes
- (*)MÉDEE, Université de Lille 1. E-mail : fflorence. huart@ univ-lille1. fr
- (**)LICOS, Université de Louvain, Belgique; Université de Nijmegen, Pays-Bas.
- (***)Université d'Utrecht et Université de Nijmegen, Pays-Bas. Nous remercions les rapporteurs anonymes, dont les commentaires ont stimulé notre réflexion et contribué à l'amélioration de notre analyse.
- (1)Voir Commission Européenne (2001) pour une revue de la théorie des ZMO et son application aux pays de l’UE.
- (2)Pour une introduction aux questions soulevées par l'organisation des politiques macroéconomiques dans l'UEM, voir Buti et Sapir (1998), de Grauwe (1999, chap. 8 et 9).
- (3)L'historique, les fondements, les dispositions et le fonctionnement du PSC sont présentés et discutés dans l'ouvrage collectif édité par Brunila et alii (2001). Eichengreen et Wyplosz (1998) développent un point de vue critique.
- (4)Un bilan d'ensemble des premières années de l'UEM est fait par Sapir et Buti (2001). Pour une évaluation de la politique monétaire de la BCE, voir Artus et Wyplosz (2002), Creel et Fayolle (2002). En ce qui concerne le débat autour du PSC, voir Creel et alii (2002), Mathieu et Sterdyniak (2003).
- (5)Pour une introduction à cette approche, voir Clarida et alii (1999).
- (6)Question discutée dans Federal Reserve Bank of Kansas City (2002), Fatás et Mihov (2002), Solow (2002).
- (7)La littérature repose implicitement sur l'hypothèse que le secteur privé perçoit les règles comme crédibles : les autorités s'engagent à les appliquer. Cela signifie que des mesures d'ordre institutionnel ont été prises pour éliminer les problèmes d'incohérence temporelle. Sans cette hypothèse, l'action des autorités ne serait pas prévisible et ne stabiliserait pas les anticipations des agents économiques.
- (8)L'activité d'une banque centrale indépendante doit faire l'objet d'un contrôle démocratique (c'est la responsabilité). Ce contrôle peut être facilité lorsque la banque centrale adopte une règle de politique monétaire explicitant les principes qui guident son action (c'est la transparence).
- (9)Une bonne introduction à la littérature de la règle de Taylor est la lecture de l'ouvrage collectif édité par Taylor (1999a).
- (10)i.e. des variables dont on anticipe la valeur future, et ce rationnellement (en tenant compte de toute l'information disponible aujourd'hui et de la connaissance du modèle représentatif du fonctionnement de l'économie).
- (11)Sack et Wieland (2000) font le point sur cette préoccupation de stabilité des taux directeurs. Les principales raisons pour lesquelles les banques centrales préfèrent l'ajustement graduel des taux directeurs sont l'incertitude relative aux conditions macroéconomiques et aux paramètres du modèle économique, la crainte de perturber le fonctionnement des marchés financiers, le risque d'une perte de crédibilité due à des modifications soudaines et brutales de la politique monétaire, le besoin de temps pour “construire” un consensus autour d'une modification de la politique monétaire.
- (12)L'introduction d'un terme de stabilisation de l'instrument du taux d'intérêt ne rend pas la règle déstabilisante pourvu que les anticipations rationnelles soient associées à des comportements en partie forward-looking (Taylor, 1999b). A contrario, si les comportements sont entièrement fondés sur l'observation du passé (backward-looking), comme dans le modèle de Rudebusch et Svensson (1999), le lissage du taux d'intérêt se traduit par une plus grande variabilité de l'inflation et de la production, et retarde considérablement (voire empêche) le retour à l'équilibre de l'économie après un choc.
- (13)Les fondements microéconomiques des nouvelles courbes de demande globale (courbe IS) et d'offre globale (courbe de Phillips) sont explicités par Clarida et alii (1999, 2002), Gali et Monacelli (2002).
- (14)Un cadre d'analyse à plus de deux pays aurait pu être adopté, mais il n'aurait pas donné des résultats qualitatifs fondamentalement différents en ce qui concerne les implications de différentes règles de politique économique en UEM.
- (15)Les équations (1) et (2) sont des formes réduites d'un modèle à fondements microéconomiques. En particulier, elles incluent bien l'influence des importations de biens sur l'output gap domestique. Pour une compétitivité prix intra-UEM donnée, l'output gap du pays 1 est influencé positivement par les exportations nettes qui dépendent de la différence entre l'output gap étranger et l'output gap domestique : x x x t t t1 12 2 11 1, , , = ?? ? où ?12 est l'élasticité des exportations du pays 1 par rapport à l'output gap du pays 2 et ?11 est l'élasticité des importations du pays 1 par rapport à l'output gap du pays 1. Il vient que la sensibilité de l'output gap aux exportations nettes est : x x t t1 12 11 2 1, , [ / ( )]= +? ?. En notant ? ? ? 1 12 11 1= +/ ( ), on obtient l'expression dans la courbe IS (1a) qui tient compte de la fuite représentée par les importations.
- (16)McCallum et Nelson (1999), Leith et Malley (2002) apportent les fondements microéconomiques de la présence d'effets d'habitude dans la consommation. Empiriquement, ces effets sont plutôt importants.
- (17)Gali et Monacelli (2002) ont élaboré les fondements microéconomiques de cette nouvelle courbe IS keynésienne pour une petite économie ouverte, en ignorant la politique budgétaire et la compétitivité prix (loi du prix unique supposée vérifiée).
- (18)Cette hypothèse n'affecte pas les résultats qualitatifs, les réponses aux chocs, lorsque la règle est simulée en écart par rapport à l'équilibre (Batini et Haldane, 1999).
- (19)Nous avons vérifié la stabilité du système : dans tous les chocs analysés, toutes les variables retournent tôt ou tard à l'équilibre.
- (20)Cf. Mihov (2001) pour une vue d'ensemble des mécanismes de transmission d'une politique monétaire unique en UEM.
- (21)On vérifie bien que des comportements backward-looking génèrent de l'instabilité dans des modèles à anticipations rationnelles.
1La coordination des politiques macroéconomiques dans la zone euro est organisée par des règles. D'une part, la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) repose sur l'objectif de stabilité des prix, l'indépendance, l'interdiction du financement direct des déficits publics et une règle de croissance à taux constant de la masse monétaire (premier pilier de la stratégie monétaire adoptée par la BCE). D'autre part, les politiques budgétaires nationales doivent être conduites dans le respect des règles de discipline budgétaire du Traité sur l'Union européenne et du Pacte de stabilité et de croissance (PSC), telles que l'interdiction des déficits publics excessifs, l'interdiction du renflouement des États membres en difficulté financière, la poursuite d'un objectif de solde budgétaire équilibré à moyen terme. Ces règles de l'Union économique et monétaire (UEM) sont des règles fixes, inconditionnelles et non-activistes : elles doivent être appliquées quelle que soit l'évolution de la conjoncture économique ; elles ne prévoient pas un ajustement automatique des instruments de politique économique pour stabiliser les fluctuations économiques conjoncturelles. Ainsi, la BCE ne modifie-t-elle pas en principe son taux directeur si les évolutions économiques n'affectent pas ses objectifs à moyen terme de stabilité des prix et de croissance de la masse monétaire. Quant aux gouvernements des pays dont le déficit public est proche de (ou supérieur à ) 3% du PIB, ils sont amenés à contrecarrer l'effet des stabilisateurs budgétaires automatiques par des mesures discrétionnaires pro-cycliques. Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que la reprise économique tarde dans les pays de la zone euro, qui ont été affectés par un ralentissement de l'activité économique à partir de 2001.
2Dans quelle mesure des règles de politique monétaire et budgétaire flexibles, qui adaptent les instruments aux conditions économiques conjoncturelles, pourraient-elles, au contraire des règles fixes de l'UEM, contribuer à amortir les fluctuations de l'inflation et de la production lorsque les économies de la zone euro sont touchées par des chocs ? Cet article analyse la performance de règles de politique économique flexibles en développant une version à deux pays en UEM d'un modèle macroéconomique dynamique inspiré de la Nouvelle économie keynésienne (NEK), fondé sur des comportements d'optimisation inter-temporelle à anticipations rationnelles et sur des rigidités des prix à court terme.
3Ce modèle contient plusieurs éléments originaux. D'abord, il combine des comportements de demande globale et d'offre globale axés à la fois sur les perspectives d'avenir et sur l'observation du passé, c'est-à-dire les variables (de production et d'inflation) à la période courante dépendent à la fois de leurs valeurs futures anticipées (“variables avancées”) et de leurs valeurs passées (“variables retardées”). L'intérêt de cette combinaison est de pouvoir reproduire la persistance que l'on observe en réalité dans l'évolution de la production et de l'inflation. En effet, les modèles de la NEK avec uniquement des variables avancées ne produisent aucune inertie, tandis que les modèles avec seulement des variables retardées impliquent un retour très prolongé vers l'équilibre. Ensuite, c'est un modèle qui ajoute à la règle de politique monétaire (seule politique retenue dans les modèles de la NEK) des règles de politique budgétaire nationales, et qui introduit dans les règles un certain degré d'inertie dans l'ajustement des instruments (taux d'intérêt, dépenses publiques) pour refléter la préférence des autorités publiques à éviter une instabilité de leurs instruments ou l'existence de contraintes institutionnelles sur l'adaptation des instruments. La politique monétaire unique dans l'UEM est conduite selon une règle de Taylor qui ajuste automatiquement le taux d'intérêt en fonction de l'écart de l'inflation à sa cible et de l'écart de la production àson potentiel. Par ailleurs, le modèle s'inspire de la nouvelle “règle budgétaire de Taylor” pour décrire l'ajustement du déficit public des pays en fonction des stabilisateurs automatiques étant donné un objectif de solde budgétaire structurel équilibré. Enfin, le modèle suppose que les pays présentent des disparités économiques structurelles (par exemple, dans la sensibilité de la demande globale au taux d'intérêt réel, le degré de flexibilité des prix, le poids des habitudes dans les décisions de consommation).
4Le modèle est simulé avec différents types de chocs communs ou spécifiques (de demande, d'offre, monétaire, budgétaire). Les effets sont étudiés en tenant compte du degré de flexibilité des règles de politique économique (inertie dans l'ajustement du taux d'intérêt ou des dépenses publiques, taille des stabilisateurs automatiques budgétaires), du mode de formation des anticipations d'inflation et des disparités économiques entre pays. Dans l'ensemble, les résultats des simulations montrent qu'une règle monétaire de Taylor avec une inertie modérée dans l'ajustement du taux d'intérêt (inférieure à celle observée en réalité), associée à des règles budgétaires nationales avec une inertie modérée du déficit public laissant les stabilisateurs automatiques fonctionner, facilitent les ajustements réels et nominaux des économies des pays de l'UEM, en cas de chocs de demande et en cas de chocs d'offre temporaires. De manière générale, la combinaison de ces règles flexibles n'engendre pas nécessairement de conflits d'intérêt dans l'orientation des instruments monétaire et budgétaire, mais il est possible que le poids de l'ajustement soit inégalement réparti entre les instruments et qu'en conséquence, le retour à l'équilibre soit retardé ou empêché. Dans le cas d'un choc de demande, si les autorités budgétaires contrecarrent le jeu des stabilisateurs automatiques pour maintenir le déficit public à son niveau d'avant le choc, alors les variations du taux d'intérêt sont plus fortes. Dans le cas d'un choc d'offre, l'économie est instable si la règle monétaire ne joue pas un rôle de stabilisation, car les stabilisateurs automatiques seuls ne permettent pas l'ajustement des économies. Enfin, si cette combinaison n'est pas souhaitable en cas de choc monétaire commun, elle est utile en cas de choc budgétaire spécifique.
5Le modèle développé dans cet article représente une UEM fermée sur le reste du monde. Les auteurs cherchent à développer une autre version du modèle avec une UEM ouverte, pour mettre en évidence de nouveaux mécanismes d'ajustement aux chocs en tenant compte des effets des modifications du taux de change euro-dollar.
6Dans les années quatre-vingt-dix, une littérature abondante traitait de l'Union économique et monétaire (UEM) européenne sous l'angle de la théorie des Zones monétaires optimales (ZMO), analysant les coûts de l'abandon de la politique monétaire et de l'instrument du taux de change en tant qu'outils de stabilisation macroéconomique et d'ajustements aux chocs asymétriques [1]. L a principale conclusion était qu'en l'absence de mécanismes d'ajustement alternatifs, tels que la mobilité du travail, la flexibilité des prix et salaires ou un budget fédéral, la stabilisation macroéconomique dans l'UEM ne pouvait être réalisée que par la politique monétaire unique de la Banque centrale européenne (BCE), notamment pour les chocs symétriques, et par les politiques budgétaires nationales décentralisées, surtout en cas de chocs asymétriques. Un autre pan de la littérature sur l'UE M, plus récent ( fin des années quatre-vingt-dix), a alors porté sur la définition, la mise en œuvre et les effets des politiques monétaire et budgétaire en UEM [2].
7Le Traité sur l'Union européenne (UE) définit le cadre institutionnel des politiques macro-économiques dans l'UEM (BCE, 2001). La BCE jouit d'un degréd'indépendanceélevé pourconduire la politique monétaire unique et réaliser un objectif prioritaire, la stabilité des prix dans la zone euro. Un objectif secondaire est le soutien à l'activité économique (à la réalisation des objectifs de l'article 2 du Traité). La BCE a adopté une stratégie monétaire reposant sur deux piliers (BCE, 1999) : l'unest une valeurde référencesurlemoyenterme de 4,5 % pour la croissance annuelle de l'agrégat monétaire M3, l'autre est une série d'indicateurs économiques et financiers utilisés pour prévoir l'évolution de l'inflation. Le premier pilier sert à atteindre un taux d'inflation annuel de 2% sur le moyen terme. Implicitement, il repose sur l'équation quantitative de la monnaie et applique la règle de Milton Friedman de progression à taux constant de la masse monétaire. Quant aux politiques budgétaires nationales, elles doivent être conduites dans le respect des règles de discipline budgétaire du Pacte de stabilité et de croissance (PSC), adopté par une Résolution du Conseil européen (juin 1997, Amsterdam). L es É tats membres de l'UEM s'engagent à éviter les déficits publics excessifs (supérieurs à 3% du PIB), sous peine de sanctions éventuellement votées par le Conseil de l'UE, et à poursuivre « un objectif à moyen terme d'un solde budgétaire équilibré ou proche de l'équilibre ». Le PSC s'appuie également sur une procédure de surveillance multilatérale des positions budgétaires et des “programmes de stabilité” des États membres (Commission européenne, 1999). Il vise, de cette manière, à favoriser la coordination des politiques budgétaires nationales et empêcher que des pays individuels ne prennent des décisions budgétaires nuisibles aux autres pays de l'UEM ou à la politique de stabilité des prix de la BCE. Le PSC doit aussi permettreaux pays membres de faire face à des chocs asymétriques en laissant jouer les stabilisateurs automatiques [3].
8En somme, les institutions européennes • BCE (2003) et Commission européenne (EC, 2001,2002, 2003) • défendent une approche fondée sur des règles de politique économique et proscrivent, en revanche, le recours à des mesures discrétionnaires pour amortir les chocs et garantir la stabilité macroéconomique dans l'UEM. Cependant, les règles de politique économique, pour remplir automatiquement une fonction de stabilisation des fluctuations économiques conjoncturelles, doivent être des règles flexibles, qui s'adaptent aux circonstanceschangeantes (Buiter, 1981). Or l'UEM est organisée par des règles fixes. En effet, la BCE suit une règle d'agrégat monétaire sur le moyen terme qui implique une politique monétaire passive sur le cycle, ne permettant pas de stabiliser les fluctuations de la production lorsque les économies sont frappées par des chocs. De même, les règles du PSC donnent davantage de poids à la discipline budgétaire qu'à la flexibilité budgétaire. Qui plus est, elles fourvoient les pays, qui ont de faibles marges de manœuvre pour laisser les stabilisateurs automatiques fonctionner, dans l'adoption de politiques pro-cycliques, incompatibles avec la stabilisation [4].
9Cet article analyse dans quelle mesure des règles de politique monétaire et budgétaire flexibles peuvent stabiliser les fluctuations de l'inflation et de la production en présence de différents chocs macroéconomiques dans l'UEM. Les effetsde règles alternatives sont simulés dans un modèle à deux pays, dans lequel on distingue les effets sur les pays individuels et sur l'UEM dans son ensemble. Le modèle est une version à deux pays en UEM des petits modèles dynamiques stochastiques de la Nouvelle économie keynésienne (NEK). Cette littérature précise les fondements microéconomiques des fonctions de comportement des agents économiques, introduit des anticipations rationnelles avec des comportements forward-looking (i.e. tournés vers l'avenir) et des rigidités nominales, et décrit la politique monétaire par une règle de Taylor [5].
10Dans notre modèle, le comportement des autorités monétaires et budgétaires est décrit par des règles de politique économique. La BCE utilise une règle monétaire pour stabiliser à la fois l'inflation et la production dans la zone euro. Les gouvernements suivent une règle budgétaire destinée à stabiliser la production nationale et à respecter l'objectif du PSC d'un budget équilibré à moyen terme. Dans ce cadre, il existe des interactions étroites dans l'ajustement des instruments monétaire (taux d'intérêt) et budgétaire (dépenses publiques) : les règles impliquent une réaction automatique des conditions monétaires et budgétaires à un changement des conditions macroéconomiques ; l'ajustement des instruments produit des effets sur les économies, ce qui influence en retour les conditions monétaires et budgétaires, et permet in fine l'ajustement des économies aux chocs. Dans l'analyse de ces ajustements, nous insistons sur trois aspects : i) les effets de différentes formes de règles monétaires et budgétaires, ii) les implications d'asymétries entre paysrelativesaux structures économiques, iii) lerôle de différents comportements d'anticipations d'inflation. Il ressort des simulations que la combinaison d'une règle monétaire de Taylor avec ajustement partiel modéré du taux d'intérêt et de règles budgétaires nationales caractérisées par une inertie modérée du déficit public permettant aux stabilisateursautomatiques defonctionner, facilitent les ajustements réels et nominaux des économies.
11L'article est structuré comme suit : nous exposons dansla prochaine partieles principaux éléments de la littérature récente sur les règles de politique monétaire et budgétaire, que nous utilisons dans la partie suivante pour la construction de notre modèle à deux pays avec règles de politique économique en UEM. Nous expliquons alors les résultats des simulations du modèle avec différents chocs, différents paramètres des règles et des économies nationales. Pour finir, nous concluons.
R ègles de politique monétaire et budgétaire : une revue de la littérature récente
12L'approche des politiques économiques fondées sur des règles s'appuie sur les enseignements de la macroéconomie moderne, qui analyse les politiques économiques en tenant compte du comportement d'optimisation inter-temporelle et d'anticipations rationnelles des agents économiques (Taylor, 1993, 2000). À cause de l'incohérence temporelle de la politique optimale, de contraintes institutionnelles, d'une incertitude sur la nature et la diffusion des chocs, les effets de politiques activistes sont incertains, retardés, voire contre-productifs. Bref, les politiques de réglage fin de l'activité économique sont devenues indésirables [6]. Deux grands arguments militent, aucontraire, en faveur desrègles de politique économique :
- elles réduisent l'incertitude et permettent ainsi de stabiliser les anticipations du secteur privé. Dans la mesure où elles constituent des réponses systématiques des autorités monétaires et budgétaires aux conditions macroéconomiques, elles rendent les politiques économiques prévisibles [7]. Par contre, des mesures discrétionnaires au coup par coup, ne sont pas systématiques, et sont donc imprévisibles, alimentant l'incertitude;
- elles favorisent en principe la transparence du processus de décision, qui est un moyen de rendre compatibles l'indépendance et la responsabilité des autorités (de la banque centrale notamment) [8].
13Avant d'exposer la structure de notre modèle, il est utile de présenter les principaux éléments de la littérature • en particulier, les définitions et les applications de la règle de Taylor •, car ils sous-tendent et justifient la forme des règles que nousutilisons dansles simulations denotremodèle.
Règles de politique monétaire : variations autour de la règle de Taylor
14La littérature sur les règles de politique monétaire s'appuie largement sur les travaux de Taylor (1993, 1999a) qui a proposé une règle simple reliant la fixation du taux d'intérêt à court terme à l'écart de production (ou output gap défini comme la différence entre le PIB actuel et le PIB potentiel) et à l'écart d'inflation (déviation du taux d'inflation observé par rapport au taux d'inflation ciblé). Les études empiriques montrent que cette règle de Taylor reproduit bien le comportement du taux d'intérêt aux États-Unis. Elle offre la simplicité et la transparence que la littérature sur les règles met en avant [9]. En outre, pour que cette règle soit stabilisante, le coefficient de réponse du taux d'intérêt à l'écart d'inflation par rapport à la cible doit être supérieur à l'unité (Taylor, 1999b ; Woodford, 2001). Dans ce cas, la hausse du taux d'intérêt nominal se traduit par une hausse du taux d'intérêt réel qui permet de contrer une inflation plus élevée.
15En dépit d'un certain consensus sur la forme fonctionnelle de la règle de Taylor, il existe encore desdésaccordsoudesincertitudesen ce quiconcerne les valeurs des coefficients de la règle (mesurant la réponse du taux d'intérêt à l'écart de production et à l'écart d'inflation), qui peuvent différer d'un pays à l'autre et d'une période à l'autre, et en ce qui concerne la mesure correcte de l'output gap et du taux d'intérêt réel d'équilibre. D'une part, en comparaison avec la règle de base de Taylor (1993a) où les coefficients sur l'output et l'inflation sont de 0,5 et 1,5 respectivement, une valeur plus élevée du coefficient de réponse du taux d'intérêt à l'output gap réduit l'ampleur des fluctuations du PIB réel autour du PIB potentiel, mais accroît l'ampleur des fluctuations du taux d'inflation autour du taux d'inflationcible. Demême, unevaleur plus élevée du coefficient de réponse du taux d'intérêt à l'inflation réduit la variabilité de l'inflation mais au prix d'une plus forte variabilité du PIB réel. Il existe ainsi un arbitrage variabilité de l'inflation • variabilité de la production dans le choix des coefficients de la règle. D'autre part, l'incertitude sur la mesure correcte de la production potentielle et du taux d'intérêt d'équilibre provoque une indétermination dans le taux d'inflation à long terme, comme le montrent Taylor (1999b) et Woodford (2001). Étant donné la possibilité d'utiliser une mesure erronée du PIB potentiel, McCallum (2001) conclut que la banque centrale ne devrait pas réagir fortement à l'output gap.
16Enfin, la règle de Taylor originelle a été modifiée, en particulier par l'introduction de variables anticipées “avancées” ou “tournées vers l'avenir” (forward-looking) [10], l'incorporation d'un objectif decroissance d'un agrégat monétaire (Leeper et Zha, 2000), l'ajout d'un objectif de stabilité de l'instrument des taux d'intérêt (cf. infra) ou la spécification d'une règle en économie ouverte incluant la variable du taux de change. À cet égard, Taylor (2001) a passé en revue les principales règles en économie ouverte et en a fait une estimation pour la zone euro. Il conclut que ces règles ne sont pas plus performantes (en termes de stabilisation de l'inflation et de la production) que les règles sans taux de change. La raison en est que des règles de politique économique en économie fermée renferment déjà (implicitement) la réaction du taux d'intérêt aux variationsdutaux dechange via un effet indirect, celui de l'impact des modifications de taux de change sur l'inflation et la production. De plus, l'introduction du taux de change dans la règle n'est pas désirable car elle pourrait se traduire par des variations fortes des taux d'intérêt en réponse à des fluctuations temporaires du taux de change.
17En conclusion, des études empiriques appliquées aux États-Unis (Taylor, 1999a) et à la zone euro (e.g. Gerlach et Schnabel, 2000) montrent que les spécifications simples de la règle de Taylor, sur le modèle de la règle d'origine, sont généralement plus performantes en termes de stabilisation macroéconomique que des règles plus complexes.
Règles de politique budgétaire : une nouvelle règle de Taylor appliquée au budget
18La littérature sur la définition et l'application de règles budgétaires est moins développée (plus récente) que celle portant sur les règles monétaires. Il existe certes des analyses nombreuses des règles du PSC, mais ces dernières ne constituent pas des règles flexibles facilitant la stabilisation macro-économique ( cf.supra). E n réalité, des gouvernements européens ont récemment complété le PSC en adoptant sur le plan national des règles budgétaires fixant des objectifs numériques ou des règles de procédures pour le contrôle des dépenses (EC, 2001). Ces règles ne sont pas destinées à améliorer la flexibilité budgétaire mais à garantir la discipline budgétaire. L'idée sous-jacente est généralement que des règles de discipline budgétaire doivent faciliter la stabilisation automatique dans la mesure où des excédents budgétaires autorisent les États à laisser les stabilisateurs automatiques fonctionner sans entrave. Cela n'est pas nécessairement vrai dans la période de consolidation budgétaire, puisque les déficits réduisent les marges de manœuvre dans la stabilisation macro-économique.
19Taylor (2000) a eu l'idée d'adapter l'approche de la
règle monétaire au domaine budgétaire. Il montre
qu'une règle budgétaire simple peut être utilisée
pour expliquer les fluctuations des soldes
budgétaires au cours du cycle économique. Cette
règle budgétaire décompose le solde budgétaire en
une composante cyclique et une composante
structurelle :
solde budgétaire total = f (output gap) + solde
budgétaire structurel
où f est une constante, l'output gap est exprimé en
pourcentage du PIB potentiel et les soldes
budgétaires sont exprimés en proportion du PIB.
Taylor en propose l'interprétation suivante : si l'on
pose que le solde budgétaire structurel reflète les
mesures discrétionnaires de la politique budgétaire,
alors la composante cyclique du budget, décrite par
le terme f (output gap), représente l'effet des
stabilisateurs automatiques sur le solde budgétaire
total. Dans cette approche, la valeur du coefficient f
est une mesure de la taille des stabilisateurs
automatiques budgétaires. Cette mesure ne
comprend pas la sensibilité du budget structurel au
cycle économique (influencée par les actions
discrétionnaires contra-cycliques par exemple).
20Taylor estime cette règle de politique budgétaire pour évaluer les rôles respectifs des stabilisateurs automatiques et de la discrétion dans la stabilisation des fluctuations du PIB de l'économie américaine. Il trouve que l'élasticité du budget à l'output gap (le coefficient f) est de 0,4 : une augmentation de 1 point de pourcentage de l'output gap réduit (accroît) le déficit (l'excédent) public de 0,4 point de pourcentage par rapport au PIB. Cette taille des stabilisateurs automatiques budgétaires est plus grande dans l'UE : elle est estimée à 0,5 en moyenne (Buti et alii, 1997 ; European Commission, 2000 ; van den Noord, 2000). Cependant, elle varie entre les pays de l'UE, d'environ 0,3 ou 0,4 dans les pays méditerranéens à environ 0,8 ou 0,9 dans les pays nordiques.
21D'autres études, telles que celles de Leith et Wren-L ewis (2000), Mitchell et alii (2000), Ballabriga et Martinez-Mongay (2002), introduisent dans la règle budgétaire un élément de stabilisation de la dette publique pour assurer la condition de solvabilité intertemporelle. Dans notre approche, nous négligeons cet élément ( c'est une simplification) pour nousconcentrer sur l'analyse de la stabilisation macroéconomique, donc des ajustements dynamiques de court terme, ignorant les implications de long terme de l'ajustement de la dette.
L'ajustement partiel des instruments de politique économique
22L'objectif d'une stabilité des instruments de politique économique, en particulier de lissage du taux d'intérêt (interest rate smoothing) apparaît de plus en plus dans les règles de Taylor, car il rend compte de la pratique des banquiers centraux qui perçoivent la variabilité des taux d'intérêt comme coûteuse (ne serait-ce que par le fait qu'elle accroît l'incertitude pour les agents économiques) et préfèrent, par conséquent, un ajustement graduel des taux d'intérêt à des modifications brutales [11]. Cet élément de lissage ou d'ajustement partiel du taux d'intérêt apparaît dans la règle de Taylor sous la forme de la valeur retardée du taux d'intérêt : ainsi, plus le coefficient attaché au taux d'intérêt de la période précédente est élevé, plus le taux d'intérêt de la période courante est inerte [12]. Par exemple, plusieurs travaux empiriques portant sur l'économie américaine estiment que le coefficient de lissage du taux des fonds fédéraux est significatif avec une valeur de 0,8 à 0,9 le plus souvent, suggérant que la Fed ajuste son principal instrument de manière très graduelle (avant 2001).
23Ce coefficient de lissage peut être interprété comme un degré d'inertie de la politique économique : plus il est élevé, plus la politique économique est inerte. On peut l'appliquer à l'instrument de la politique budgétaire : on parle alors de lissage du déficit (deficit smoothing). Un certain degré d'inertie dans les ajustements budgétaires peut résulter de contraintes institutionnelles ou de difficultés politiques à modifier des programmes de dépenses publiques adoptés dans le passé ou à mener des réformes fiscales drastiques. B allabriga et Martinez-Mongay (2002) ont estimé que la valeur du coefficient d'ajustement partiel du déficit public varie entre 0,47 en Belgique et 0,87 en Irlande. Ceci suggère que la politique budgétaire soit plusinerte en Irlande qu'en Belgique au cours du cycle.
Un modèle de règles de politique monétaire et budgétaire en UEM
24Les principales caractéristiques du modèle sont dérivées de l'approche de la NEK, qui utilise des modèles stochastiques dynamiques quantitatifs à fondements microéconomiques avec anticipations rationnelles en introduisant des comportements tournés vers l'avenir (forward-looking) et des rigidités nominales. La base de ces modèles est constituée de trois équations : une nouvelle courbe IS dite intertemporellequi fait dépendre l'output gap de sa valeur future anticipée, la nouvelle courbe de Phillips keynésienne (NCPK) qui détermine l'inflation en fonction de l'inflation future anticipée et de l'output gap, et une règle monétaire à la Taylor [13]. Des modèles récents combinent les comportements forward-looking et backward-looking dans la courbe IS et la NKPC, car la présence de variables anticipées avancées et de variables retardées dans les équations de comportement permet de reproduire la persistance que l'on observe dans les séries de PIB et d'inflation. D'une part, des équations avec seulement des variables futures anticipées (équations purement forward-looking) conduisent à des séries de PIB etd'inflation qui n'ont aucune persistance (retour à l'équilibre très rapide après un choc), ce qui n'est pas réaliste (McCallum, 2001). D'autre part, des équations avec uniquement des variables retardées (équations purement backward-looking) sont sujettes à la critique de Lucas, car il est peu probable que les comportements restent inchangés à la suite de modifications dans les règles de politique économique (Rotemberg et Woodford, 1999).
25Le modèle décrit une UEM à deux pays [14]. Il comprend plusieurs blocs : l'équilibre des marchés des biens, la dynamique de l'inflation et les règles de politique économique. L es variables sont en logarithme, sauf les taux d'intérêt. Plusieurs aspects du modèle en font une représentation “stylisée” de l'UEM européenne : une banque centrale commune détermine la politique monétaire unique en sorte que le taux d'intérêt nominal à court terme est commun aux deux pays; les autorités budgétaires nationales poursuivent un objectif d'équilibre du solde budgétaire structurel (une disposition du PSC) ; le taux de change nominal des monnaies nationales (remplacées par la monnaie unique) n'influence plus (par définition) les flux commerciaux bilatéraux (le taux de change réel est seulement déterminé par les prix des biens dans les deux pays) ; l'UEM est une grande économie fermée (les deux pays commercent essentiellement entre eux, si bien que l'influence du taux de change de la monnaie unique par rapport aux devises étrangères sur les exportations nettes des deux pays et sur les décisions de la banque centrale est ignorée dans le modèle) ; le calibrage des paramètres du modèle s'appuie sur des données des pays européens. Par cette représentation d'une UEM, nous cherchons à analyser en quoi des règles de politique économique flexibles, par opposition au cadre de règles fixes adopté dans la zone euro (décrit supra), permettent la stabilisation macro-économique dans les économies des pays participants.
Demande globale dans les pays (courbes IS)
27où x représente l'output gap du pays i, i={1,2}, à la i période t, égal à la différence entre le niveau de production actuel, y et le niveau de production i t, d'équilibre, y i.e. x y y t, ? ?; Et l'opérateur de i i t i i , formation des anticipations conditionnelles aux informations disponibles à la période t; p le i t, niveau des prix et ? p le taux d'inflation ; i le i t, E t, taux d'intérêt nominal commun déterminé par la banque centrale commune ; g les dépenses i t, publiques nettes (une valeur positive signifie un déficit public); r le taux d'intérêt réel d'équilibre; ui td, un choc de demande globale (par exemple une modification des préférences des consommateurs ou une impatience à consommer).
28Dans cette forme réduite de l'équation d'équilibre des marchés des biens, l'output gap dépend de sa valeur passée, de sa valeur future anticipée, du taux d'intérêt réel (exprimé en écart par rapport aux taux d'intérêt réel d'équilibre), de l'output gap étranger (de celui du pays partenaire dans l'UEM), du déficit public, de la compétitivité prix au sein de l'UEM et d'un choc de demande [15]. La politique monétaire influence la production par le canal du taux d'intérêt en présence de rigidités des prix à court terme.
29Plusieurs formulations différentes de la courbe IS existent en fonction de la valeur du paramètre ? : i l'output gap de la période actuelle dépend uniquement de ses valeurs passées si ? = 1(Fuhrer i et Moore, 1995; Huh et Lansing, 2000), à la fois de ses valeurs passées et de ses valeurs futures anticipées si 0 1< <? (Clarida et alii, 1999; Leeper i et Zha, 2000) ou seulement de ses valeurs futures anticipées si ? = 0 (McCallum, 2001 ; Woodford, i 2001). L'élément backward-looking (valeurs retardées avec ?i ? 0) peut résulter de coûts d'ajustement ou du poids des habitudes dans les décisions de consommation [16]. L'élément forward-looking (valeurs avancées anticipées avec ? ? 1) découle de la maximisation par des agents i rationnels d'une fonction d'utilité intertemporelle appliquant les principes de lissage de la consommation au cours du temps. La nouvelle courbe IS keynésienne est la courbe IS intertemporelle, purement forward- looking ?i = 0) [17].
Offre globale dans les pays (courbes de Phillips)
31L'inflation à la période actuelle dépend en partie de l'inflation passée et en partie de l'inflation future anticipée. D'autres sources d'inflation sont possibles : une inflation par la demande est reflétée par le terme de l'output gap; une inflation par les coûts peut dériver de l'inflation étrangère, en raison de l'influence des prix des biens importés qui sont utilisés dans le processus de production domestique ou qui sont consommés par les ménages (effet indirect sur les négociations salarialesdomestiques). Enfin, des chocs d'offre us (par exemple sur les i t, salaires domestiques ou le prix du pétrole) affectent aussi l'inflation.
32Le paramètre ? mesure le degré d'inertie dans i l'inflation. Avec ? =1 ( courbe de Phillips i backward-looking), l'inertie des prix réduit la variabilité de l'inflation, mais accroît celle de la production dans l'économie. Avec? = 0, nous avons i une version de la nouvelle courbe de Phillips keynésienne forward-looking où l'inflation dépend uniquement de sa valeur future anticipée E p t t ?+1 (au lieu de l'inflation courante anticipée E p t ? t ? 1 dans la courbe de Phillips traditionnelle augmentée des anticipations) et de l'output gap de la période courante. Dans ce cas, il n'y a pas d'inertie dans l'inflation. Avec 0 1< <?, la courbe de Phillips est i dite “hybride”. Cettedernière spécification implique que des chocs sur l'inflation auront des effets persistants (Fuhrer et Moore, 1995).
33Le paramètre ? (pente de la courbe de Phillips) est un paramètre important car il reflète les rigidités dans l'ajustement des prix et représente donc un déterminant essentiel de la dynamique d'ajustement à court terme des prix et de l'offre globale en cas de chocs.
34De même, les paramètres ? (courbes IS) et ? (courbes de Phillips) déterminent conjointement la persistance endogène de la production et de l'inflation. Plus les variables sont retardées, plus les ajustements aux chocs sont persistants.
Règle de politique monétaire
36
La fixation du taux d'intérêt à court terme par la
banque centrale commune est influencée, suivant
une règle de Taylor, par l'écart d'inflation de l'UEM
(déviations de l'inflation globale dans l'UEM par
rapport au taux d'inflation cible), ? ?p p?, et par
E t E, l'écart de production de l'UEM, x, avec
E t, i r p? + ?, le tauxd'intérêt nominal d'équilibre qui
E E est fonction du taux d'intérêt réel d'équilibre et du
taux d'inflation d'équilibre de long terme (niveau du
taux d'intérêt nominal lorsque l'écart de production
et l'écart d'inflation sont nuls). Le taux d'inflation
global et l'output gap de l'UEM sont définis comme
des moyennes pondérées des performances des pays
individuels :
où ? mesure la taille relative du pays 1 dans l'UEM. La variable utm représente un choc de politique monétaire, c'est-à-dire toute modification non systématique du taux d'intérêt qui est décidée pour des raisons autres que celles décrites par la règle de Taylor (écart d'inflation et écart de production). Il peut s'agir d'une incapacité à suivre la règle (suite à des pressions politiques), de décisions purement discrétionnaires, ou d'autres influences sur le taux d'intérêt (confiance des investisseurs, taux d'intérêt étrangers).
37Dans les simulations du modèle, nous nous
intéressons aussi aux implications d'un certain degré
d'inertie des instruments de politique économique.
En présence de lissage des instruments, la valeur
courante d'une variable représentant l'instrument
(ici, le taux d'intérêt) est exprimée comme une
moyenne pondérée de sa valeur retardée (i.e. valeur
de la période précédente) et de sa valeur optimale
(telle qu'elle est obtenue par la règle de base de
Taylor). C'est pourquoi, l'on fait parfois référence à
un mécanisme d'ajustement partiel dans la règle de
Taylor :
où le paramètre? a une valeur comprise entre 0 et 1 E et désigne le degré de lissage (ou d'inertie) de l'instrument. S'il est égal à zéro, alors on retrouve la forme originelle de la règle de Taylor (équation 3). S'il tend vers 1, alors la banque centrale n'ajuste son taux directeur que très peu en réponse à une modification des conditions macroéconomiques. Un ajustement plus graduel du taux d'intérêt rend la politique monétaire plus prévisible, donc plus efficace pour agir sur la demande globale. Mais en présence de chocs, une moindre variabilité des taux d'intérêt nominaux peut se traduire par une plus grande variabilitédel'inflationetde la production.
Règles budgétaires nationales
39 En suivant l'approche de Taylor (2000), les règles de politique budgétaire expriment que les dépenses publiques nettes sont en partie influencées par le cycle économique, avec ? l'élasticité du budget aux i fluctuations de l'output gap, et en partie influencées par les décisions discrétionnaires g. Nous ajoutons i un choc ug susceptible d'influencer les dépenses i t, publiques nettes de manière imprévisible. Pour analyser le fonctionnement de ces règles dans le cadre du PSC, on peut interpréter la variable g i comme une cible budgétaire, par exemple « une position budgétaire proche de l'équilibre ou en excédent à moyen terme ». Selon la taille des stabilisateurs automatiques, mesurée par ?, un choc i budgétaire ou un choc affectant l'output gap conduira à une déviation du déficit public au-dessus ou au-dessous de la cible.
40À l'instar du mécanisme d'ajustement partiel de
l'instrument du taux d'intérêt, on peut introduire un
certain degré d'inertie dans l'ajustement du déficit
(dépenses publiques nettes) vers sa cible, mesuré par
le paramètre ?i :
Par exemple, dans les cas où le déficit public approche de la valeur de référence de 3 pour cent du PIB, les autorités budgétaires peuvent se comporter de manière plus prudente et vouloir empêcher que le déficit ne varie trop. Des facteurs institutionnels peuvent aussi expliquer l'ajustement graduel du déficit (cf. partie suivante). Enfin, lorsque le paramètre ? est nul, on retrouve la règle budgétaire i de Taylor originelle sans degré d'inertie dans l'ajustement de l'instrument budgétaire.
Simulations des ajustements macroéconomiques dans l'UEM
41Nous utilisons le modèle pour simuler les effets de différents chocs en UEM : des chocs communs ou spécifiques, de demande ou d'offre globale, monétaire ou budgétaire. Nous voulons analyser le rôle de différents éléments dans l'ajustement aux chocs : i) les règles de politique monétaire et budgétaire, ii) les structures économiques des pays, iii) les comportements d'anticipations. E n particulier, les chocs ont des effets asymétriques sur les économies des pays participant à l'UEM dès lors que les paramètres structurels de ces économies diffèrent.
Méthode et calibrage
42Les chocs macroéconomiques { , , , }u u u u d s m g peuvent être décrits par un processus stationnaire auto-régressif d'ordre 1, u u t t t = + ? ? ? 1 avec 0 1? <? et ?t un bruit blanc,? ?? ( , )N 02. Les chocs apparaissent à la période 0 et sont temporaires. En fixant? = 0, ils ne sont pas anticipés. Pour résoudre le modèle dans les cas où les anticipations sont purement forward-looking, nous imposons dans l'algorithme des anticipations compatibles avec le modèle. Nous utilisons la méthode Stacked-Newton qui est connue pour sa robustesse dans le calcul des solutions des modèles de petite taille avec anticipations rationnelles(Leith etMalley, 2002). Le tableau 1 montre les valeurs des paramètres retenues pour le scénario de référence, dans lequel les pays sont identiques. Nous introduisons par la suite des différences entre pays. Les valeurs choisies sont compatibles avec les résultats d'études qui estiment les paramètres pour les pays européens ou les calibrent pour les simulations.
43L'élasticité de la production au taux d'intérêt réel, ?, a été estimée à 1,2 en moyenne dans les pays de i l'UE (Krause, 2003), avec des valeurs estimées entre 0,8 et 0,9 dans huit pays (Belgique, Finlande, France, Italie, Portugal, Danemark, Suède et Royaume-Uni), supérieures à l'unité dans cinq pays (Autriche, Allemagne, Irlande, Pays-Bas et Espagne) et une valeur minimale de 0,5 en Grèce. L'élasticité revenu des exportations nettes, ?, est calculée à partir des i estimations de l'élasticité des importations au revenu domestique, ?ii, et de l'élasticité des exportations au revenu étranger, ? (cf. note 15). En ij utilisant des estimations de l'équipe Mimosa (1996), l'élasticité ? est égale à 0,5 en moyenne dans les i pays de la zone euro. L'élasticité prix des exportations nettes, ?, est égale à la somme des i valeurs absolues desélasticités prix des importations et des exportations moins l'unité (un signe positif signifie que la condition de Marshall-L erner-Robinson est vérifiée). Pour les biens manufacturés, la valeur moyenne de ? est de 0,5 i dans la zone euro, avec une valeur de 0,3 pour l'Allemagne et la France (calculs à partir des estimations de l'équipe Mimosa, 1996).
44Le multiplicateur budgétaire, ?, mesure l'impact i des modifications des recettes fiscales et des dépenses publiques sur le PIB réel. Le modèle QUEST de la Commission européenne donne des multiplicateurs budgétaires à court terme plus faibles que ceux du modèle Interlink de l'OCDE en raison de sa nature forward-looking (EC, 2001, 2002). Le multiplicateur est estimé à 0,6 en moyenne dans l'UE (valeur variant de 0,5 à 0,7 entre les pays) selon le modèle QUEST.
45L es paramètres ? ?, et ? qui déterminent la persistance et la stabilité du système économique, ont été estimés pour les pays de la zone euro (Smets, 2000 ; Doménech et alii, 2001 ; Sahuc, 2002 ; Djoudad et Gauthier, 2003) : entre 0,44 et 0,57 pour ? (comportements backward-looking dans la courbe IS), entre 0,46 et 0,62 pour ? (comportements backward-looking dansla courbede Phillips) etentre 0,06 et 0,18 pour ? (pente de la courbe de Phillips). Gagnon et Ihrig (2002) estiment le degré d'influence des prix importés sur les prix domestiques (paramètre µ ) entre 0,05 et 0,25 pour les pays de i l'OCDE. Ils utilisent une valeur de 0,1 pour leurs simulations. Notons qu'une valeur élevée de ceteffet de débordement de l'inflation étrangère sur l'inflation domestique peut générer une instabilité dans la dynamique d'ajustement des prix.
46Dans notre analyse des chocs en UEM, nous considérons différentes règles monétaires et budgétaires selon leur degré de flexibilité, c'est-à-dire selon la vitesse et l'ampleur de l'adaptation des instruments de politique économique (taux d'intérêt et déficit public) aux changements de la conjoncture. Nous apprécions ce degré de flexibilité à partir de deux éléments : le degré d'inertie dans l'ajustement des instruments (? et ? ) etle coefficient deréaction des instruments Ei aux variations de la production (? et ? ). Nous Ei avons retenu trois régimes différents de règles.
paramètres de base
paramètres de base
47La règle monétaire est identique dans les régimes (a) et (b). Elle correspond à la règle de Taylor (1993a), augmentée du mécanisme d'ajustement partiel : les coefficients de réponse du taux d'intérêt à l'écart d'inflation et à l'écart de production sont respectivement v = 1,5 et ? = 0,5, tandis que le EE degré d'inertie de l'instrument du taux d'intérêt est ? = 0,8 (valeur observée empiriquement). Pour E simplifier, la cible d'inflation ? p et le taux d'intérêt E réel d'équilibre r sont supposés constants et normalisés à zéro [18]. Ces deux premiers régimes diffèrent en ce qui concerne les règles budgétaires nationales : le degré d'inertie du déficit public est nul dans le régime (a) et très élevé dans le régime (b) : ? est fixé à 0 et 0,9 respectivement. La i sensibilité cyclique du déficit public ( )? est de 0,5 i en moyenne dans l'UE (cf. supra). Une valeur de zéro assignée à la cible budgétaire (ou budget structurel), g, vise à rendre compte d'un objectif de i budget équilibré sur le moyen terme établi dans le PSC. Quant au régime (c), nous avons spécifié des règles plus flexibles en ce sens que non seulement le degré d'inertie des instruments est moins élevé ( , )? ?= = 0 6, mais aussi la banque centrale réagit E i davantage aux fluctuations cycliques des variables économiques réelles, avec un coefficient de réponse à l'output gap plus élevé (?E = 09, ). En résumé, le degré de flexibilité des règles monétaire et budgétaire est le plus élevé dans le régime (c), l'inertie des instruments est la plus élevée dans le régime (b), tandis que le régime (a) est un cas intermédiaire où les stabilisateurs automatiques peuvent jouer pleinement car l'inertie du déficit public est nulle.
48B ien entendu, les résultats des simulations dépendent des valeurs choisies des paramètres. Nous avons procédé à de nombreuses simulations avec des valeurs différentes des paramètres. Leschangements dans ces valeurs modifient l'amplitude de ces effets. Mais certains affectent aussi le degré de persistance dans les effets des chocs, c'est-à-dire la vitesse d'ajustement des économies. Il s'agit des changements relatifs au poids des habitudes dans les décisions de consommation (? ), à l'influence de l'inflation passée dans la formation des prix (?), à la persistance même des chocs (?) et au degré d'inertie des instruments de politique économique (?) [19]. Les effets macroéconomiques des différents chocs sur les deux pays et sur l'UEM dans son ensemble sont reproduits sous la forme de graphiques.
Choc de demande spécifique
49Un choc de demande positif (de un pour cent) touche le pays 1 à la période 0. Dansce premier cas defigure, les deux pays sont identiques et ont des paramètres structurels donnés dans le tableau 1 (supra).
50Le choc entraîne une hausse de la production et de l'inflation dans le pays 1, qui est en partie transmise au pays 2 par trois canaux : les flux commerciaux, la compétitivité prix et la variation du taux d'intérêt commun. Dans un premier temps, la hausse du PIB et de l'inflation dans le pays 1 permet au pays 2 d'exporter davantage vers le pays 1 grâce aux effets revenu (augmentation des importations du pays 1 pour répondre en partie à la hausse de la demande globale) et prix (meilleure compétitivité prix du pays 2 par rapport au pays 1). La règle monétaire implique une hausse du taux d'intérêt commun en réponse à un output gap positif et à la hausse de l'inflation dans les deux pays. Cette hausse du taux d'intérêt nominal est plus forte dans le régime (c) en raison d'une inertie plus faible dans l'ajustement de l'instrument monétaire et d'un coefficient de réaction du taux d'intérêt à l'output gap plus élevé dans la règle monétaire. Elle se traduit par un taux d'intérêt réel positif dans les deux pays (plus élevé dans le pays 2 où l'inflation est moindre), ce qui réduit l'output gap (il devient négatif) et l'inflation (baisse des prix). Par conséquent, la banque centrale abaisse le taux d'intérêt nominal, puis le relève lorsque la production et les prix augmentent.
51E n l'absence de mesures budgétaires discrétionnaires dans les deux pays, qui maintiennent leurs budgets structurels à l'équilibre, les fluctuations de l'output gap se traduisent par l'apparition d'un solde budgétaire total excédentaire à l'impact du choc (plus important dans le régime (a) où l'inertie du déficit public est nulle), puis déficitaire (sauf dans le régime (b) où l'inertie du déficit public est très forte). Si on compare les régimes (a) et (b), on peut mettre en évidence une relation entre le degré d'inertie de l'instrument budgétaire et la variabilité des variables économiques : la variabilité de l'output gap est plus faible dans le régime (a) alors que la variabilité de l'inflation est plus faible dans le régime (b). Ce résultat est dû au rôle des stabilisateurs automatiques budgétaires quicontribuentàamortir les fluctuations du PIB dans le régime (a) mais pas dans le régime (b). En outre, dans le régime (b), sans le jeu des stabilisateurs automatiques ( les autorités budgétaires cherchent à maintenir le solde budgétaire à son niveau qui prévalait avant le choc), la hausse du taux d'intérêt à l'impact du choc se traduit par une diminution plus forte de la production et des prix, donc par une baisse subséquente plus forte du taux d'intérêt, ce qui permet d'amortir plus rapidement la baisse des prix.
52La variabilitédutauxd'intérêt estla plus fortedans le régime (c), car cet instrument de la politique monétaire y est moins inerte et plus réactif aux variations de l'output gap que dans les autres régimes. Il en résulte que la variabilité de l'inflation et de l'output gap est la plus faible dans ce régime, et le retour à l'équilibre y est plus rapide. Ce résultat s'explique aussi parlerôlede la politique budgétaire, qui, dans ce régime, est caractérisée par une inertie moyenne du déficit public, permettant aux stabilisateurs automatiques de fonctionner dans une certaine mesure. On peut également noter que dans les deux autres régimes, la variabilité du taux d'intérêt est plus faible que celle du déficit public dans le régime (a) tandis que c'est l'inverse dans le régime (b). Ainsi, une forte inertie dans l'ajustement de l'instrument budgétaire fait reposer le poids de l'ajustement sur la politique monétaire et se traduit • nous l'avons vu • par une plus forte variabilité de la production. Cela suggère qu'une coordinatio entre la politique monétaire et les politiques budgétaires • dans la conception des règles de stabilisation automatique • puisse faire partager de manière plus égale le poids des ajustements par les différents instruments disponibles pour amortir des chocs de demande spécifiques dans l'UEM.
choc de demande positif spécifique au pays 1
choc de demande positif spécifique au pays 1
53Enfin, les variations dans les différentiels de PIB et de prix entre pays montrent que le choc de demande spécifique provoque de faibles divergences réelles et nominales au sein de l'UEM (les pays étant identiques).
choc de demande négatif commun
choc de demande négatif commun
Choc de demande commun
54Un choc de demande négatif (de un pour cent) frappe les deux pays de l'UEM (on peut penser au ralentissement économique mondial en 2001). La taille des stabilisateurs automatiques est supposée plus importante dans le pays 2 que dans le pays 1 : ?1 = 0,3 et ?2 = 0,8.
55Le choc réduit la production et l'inflation dans l'UEM. La règle monétaire commune et les règles budgétairesnationales amortissent l'effet récessifdu choc. S'il n'y a pas d'incompatibilité dans l'orientation des politiques monétaire et budgétaire, les efforts de stabilisation peuvent peser plus ou moins sur l'instrument monétaire ou sur les instruments budgétaires nationaux. Nous avons vu, en effet, qu'une stabilisation budgétaire plus faible reporte le poids de l'ajustement sur la politique monétaire (et vice versa). Étant donné la symétrie du choc et les structures économiques proches des pays, qui ne diffèrent qu'au regard des stabilisateurs automatiques, les divergences nominales (différentiel d'inflation) et réelles (différentiel de PIB) provoquées par le choc sont relativement faibles. Elles sont à l'évidence plus grandes dans le régime (a) où les stabilisateurs automatiques fonctionnent le plus (car il n'y a aucune inertie dans l'instrument budgétaire).
56En raison destabilisateursautomatiques plus forts, le pays 2 enregistre des fluctuations de la production et de l'inflation plus faibles, mais des fluctuations du déficit public plus grandes que celles du pays 1. Naturellement, lorsque l'inertie du déficit public est très forte (régime b), la stabilisation budgétaire automatique ne joue pas, si bien que les ajustements dans les deux pays sont similaires. Nous retrouvons aussi les mêmes conclusions que dans le cas précédent : la variabilité de l'inflation et de la production est la plus faible et le retour à leurs valeurs d'équilibre est le plus rapide dans le régime (c), où les règles de politique économique sont dans l'ensemble, plus flexibles ; la variabilité de la production est la plus forte dans le régime (b) où l'inertie des instruments monétaire et budgétaire est globalement plus forte.
57Précisons qu'avec une influence déterminante des habitudes dans les décisions des consommateurs (valeur plus élevée de ?i ) ou de l'inflation passée dans l'évolution des prix (valeur plus élevée de ? ), i les variables du PIB et de l'inflation s'ajustent plus lentement, de sorte que le rôle du degré d'inertie des instruments monétaire et budgétaire est plus important dans la stabilisation (pour compenser une grande inertie dans les comportements, il faut un ajustement plus rapide des instruments, sans quoi le retour à l'équilibre n'est pas possible, sinon très prolongé, après le choc).
Choc d'offre commun
58Un choc d'offre négatif (de un pour cent) touche les
deux pays de l'UEM à la période 0. Il peut s'agir
d'une hausse non anticipée du prix du pétrole comme
celle apparue récemment (ou des salaires). Les pays
diffèrent désormais dans le degré de flexibilité des
prix, qui est plus élevé dans le pays 1 :
En comparaison des chocs de demande dans les cas précédents, le choc d'offre a des effets plus importants sur les variables macroéconomiques et les divergences réelles et nominales entre pays dans l'UEM. Il se traduit initialement par une stagflation et des déficits publics. À l'impact du choc, la banque centrale commune relève le taux d'intérêt commun pour réduire l'inflation dans l'UEM, puis l'abaisse progressivement. Rappelons que la règle monétaire de la banque centrale attache un poids plus important à la stabilisation de l'inflation qu'à la stabilisation de la production.
59La banque centrale parvient à ramener le taux d'inflation moyen vers sa cible, le plus rapidement dans le régime (c) et le moins rapidement dans le régime (b). La hausse initiale du taux d'intérêt est la plus forte dans le régime (c) car l'inertie de l'instrument monétaire est plus faible, l'inflation est plus forte tandis que la baisse de la production est moins forte (en partie, en raison de la stabilisation budgétaire). Cette hausse du taux d'intérêt est très faible dans le régime (b), car la production chute davantage (l'inertie de l'instrument budgétaire empêche les stabilisateurs automatiques budgétaires d'amortir la baisse de la production). Dans tous les cas, la variabilité de laproduction est plus grande que celle del'inflation. La variabilité de la production est la plus faible dans le régime (c) et la plus forte dans le régime (b), tandis que la variabilité de l'inflation est la plus faible dans le régime (b) et la plus forte dans le régime (c). On retrouve bien l'arbitrage entre variabilité de l'inflation et variabilité de la production, rendu plus aigu en présence de chocs d'offre. Toutefois, ici, la combinaison de la règle monétaire et de la règle budgétaire permet d'atténuer l'arbitrage : lorsque les stabilisateurs automatiques budgétaires peuvent fonctionner sans délai (régime a), la différence de variabilité entre la production et l'inflation est la plus faible. Sans les stabilisateurs budgétaires automatiques (régime b), cette différence est la plus forte, ce qui retarde l'ajustement réel dans l'UEM.
60La nature des ajustements dans les pays dépend aussi des caractéristiques structurelles nationales. De ce point de vue, l'ajustement réel de l'économie de l'UE M est retardé par l'ajustement réel de l'économie du pays 2, qui est plus lent (inflation, récession et déficits publics élevés prolongés) à cause de la rigidité des prix. On constate ainsi que le degré de flexibilité des prix est un élément déterminant de l'ajustement aux chocs : en dépit de règles de politique économique conçues pour être stabilisatrices, une flexibilité des prix faible dans un pays ralentit l'ajustement réel de son économie et de l'économie globale de l'UEM (selon sa taille), et se traduit par des résultats divergents entre pays (amples fluctuations des différentiels de prix et de PIB par rapport au pays où la flexibilité des prix est plus forte).
choc d'offre négatif commun
choc d'offre négatif commun
61Finalement, la combinaison de règles monétaire et budgétaire caractérisées par un degré d'inertie moyen des instruments et une plus grande réactivité des instruments aux fluctuations économiques réelles (régime c) permet d'amortir les effets réels et nominaux du choc. Ce résultat conforte l'idée que dans une économie où les agents ne raisonnent pas complètement en fonction des seules valeurs futures anticipées, mais aussi en fonction des valeurs passées des variables économiques (i.e. dans des modèles hybrides), un certain degré de stabilisation par la politique monétaire, mais aussi par la politique budgétaire, est nécessaire pour la stabilité de la dynamique d'ajustement de l'économie, et ce, même en cas de choc d'offre (pourvu qu'il soit temporaire). Il est aussi possible d'assouplir l'arbitrage dans la variabilité de l'inflation et de la production en agissant sur les paramètres des règles de politique économique : d'une part, sur le poids que la banque centrale attache à la stabilisation de l'inflation et de la production, d'autre part, sur la taille des stabilisateurs automatiques (celle-ci n'est toutefois pas modifiable dans le court terme).
Choc de taux d'intérêt commun
62Une baisse non anticipée du taux d'intérêt commun (de un pour cent à la période 0) dans l'UEM (comme en septembre 2001 dans la zone euro) a des effets dont l'ampleur peut différer d'un pays à l'autre, s'il existe des asymétries dans les structures ou comportements économiques nationaux, impliquant des mécanismes de transmission de la politique monétaire différents [20]. Pour étudier cette possibilité, nous supposons que la demande globale dans le pays 2 a une sensibilité plus forte au taux d'intérêt réel (? = 0,5 et ? = 1,2). Nous posons 12 aussi que les anticipations d'inflation sont différentes. Dans le pays 1, elles sont telles que l'inflation courante ne dépend que de l'inflation passée (courbe de Phillips backward-looking avec ? 1= ). Dans le pays 2, elles sont telles que l'inflation 1 courante ne dépend que de l'inflation future anticipée (courbe de Phillips forward-looking avec ?2 = 0). Dans ce cadre d'hypothèses, la capacité d'ajustement de l'économie du pays 2 apparaît plus grande car, non seulement elle réagit davantage aux modifications du taux d'intérêt, mais aussi le mode d'anticipations réduit fortement la persistance de l'inflation.
63La baisse du taux d'intérêt nominal se traduit dans l'immédiat par un taux d'intérêt réel négatif, qui engendre un output gap positif, un excédent budgétaire et une hausse des prix. À la période suivante, la règle monétaire ajuste le taux d'intérêt nominal à la hausse en réponse à ces variations de la production et de l'inflation. Cet ajustement est néanmoins insuffisant pour entraîner un taux d'intérêt réelpositif etréduirel'inflationdans le pays 1, d'une part, parce que les fluctuations de l'inflation sont moins amples que celles de la production (la banque centrale met davantage l'accent sur la stabilisation des premières) et, d'autre part, parce que l'inflation est persistante dans le pays 1 (anticipations tournéesvers le passé). Dans le régime (c), étant donné que l'ajustement de l'instrument monétaire est moins inerte et plus réactif aux fluctuations de la production, le taux d'intérêt réel devient positif dès la première période dans le pays 2 (la baisse des prix aidant). En dépit d'une sensibilité de la demande globale au taux d'intérêt réel nettement plus forte dans le pays 2 que dans le pays 1, et malgré un taux d'intérêt réel négatif dans le pays 1, la baisse de la production, dans la période qui suit le choc, est moins forte dans le pays 2, qui gagne en compétitivité prix par rapport au pays 1 (le pays 2 exporte davantage vers le pays 1, tandis que les exportationsdecedernier versle pays 2diminuent).
64Les fluctuations économiques sont plus amples, la dynamiquede l'ajustement plus instableet leretour à l'équilibre plus long danslepays 1quedans lepays 2, à cause de la différence dans la nature des anticipations d'inflation (tournées vers le passé dans le pays 1, tournées vers l'avenir dans le pays 2) [21]. Ceci dit, l'ajustement peut être facilité par le rôle de stabilisation des règles de politique économique. À cet égard, la comparaison entre les trois régimes enseigne que seules des règles flexibles avec une inertie moyenne et un partage du poids de l'ajustement par les instruments monétaire et budgétaire (régime c) peuvent amortir les fluctuations économiques et aider au retour à l'équilibre, même lorsque les anticipations sont totalement backward-looking dans un pays (la tâche de la banque centrale est certes facilitée par la plus grande capacité d'ajustement du pays 2). En revanche, les autres règles ne permettent pas de stabiliser rapidement les économies nationales, à cause de l'absence d'inertie ou de la totale inertie de l'instrument budgétaire. Dans le régime (a), les stabilisateurs automatiques amortissent la diminution de la production, ce qui contrecarre l'effet de la règle monétaire et retarde l'ajustement de l'économie : dans la mesure où l'ajustement du taux d'intérêt est graduel, la hausse du taux d'intérêt n'est pas suffisante pendant la période qui suit le choc, si bien qu'il se produit un “sur-ajustement” du taux d'intérêt à la période suivante, pour réduire la production et l'inflation. Quant au régime (b), les évolutions économiques y sont les plus défavorables : une plus grande variabilité de la production, de l'inflation et de l'instrument du taux d'intérêt, de plus grandes divergences dans les performances économiques nominales et réelles des pays, et un retour très long vers l'équilibre. Ainsi, une très forte inertie dans l'instrument budgétaire, qui ne permet pas aux stabilisateurs automatiques de fonctionner, gêne davantage le rôle de stabilisation de la règle monétaire que lorsque les stabilisateurs automatiques fonctionnent. Ceci s'explique par les évolutions économiques dans le pays 1 : l'inertie du déficit public s'ajoute à la persistance de l'inflation et renforce ainsi le poids du passé dans les évolutions économiques présentes. Le poids de l'ajustement repose alors sur le taux d'intérêt qui est, par conséquent, très variable (en dépit du mécanisme d'ajustement partiel introduit dans la règle monétaire). Dans le pays 2, l'inertie de l'instrument budgétaire maintient le solde budgétaire légèrement excédentaire, mais cela ne permet pas de ramener progressivement l'output gap vers l'équilibre, car l'instabilité économique réelle du pays 1 est transmise à l'économie du pays 2.
choc de taux d'intérêt commun
choc de taux d'intérêt commun
65Ainsi, le choc commun produit-il des effets similaires mais d'une amplitude différente dans les pays, en raison de sensibilités différentes des demandes globales au taux d'intérêt et de modes d'anticipations d'inflation différents. L es divergences nominales et réelles sont atténuées dans le régime (c) grâce à la combinaison de règles monétaire et budgétaire flexibles.
choc budgétaire spécifique au pays 1
choc budgétaire spécifique au pays 1
Choc budgétaire spécifique
66Une politique budgétaire discrétionnaire
expansionniste est menée dans le pays 1 (hausse des
dépenses publiques nettes une fois pour toutes de un
pour cent à la période 0). Ce pays est supposé être
plus grand et moins sensible aux modifications du
taux d'intérêt commun que le pays 2 :
L'expansion budgétaire se traduit dans l'immédiat par un output gap positif et une hausse des prix dans le pays 1 qui, compte tenu de sa taille, pèse sur les conditions monétaires de l'UEM : le taux d'intérêt commun est relevé, à deux reprises, c'est-à-dire à l'impact du choc etàla période suivante. La première hausse du taux d'intérêt nominal n'est pas suffisante pour entraîner un taux d'intérêt réel positif dans le pays 1, en raison de l'ajustement graduel de l'instrument et d'un coefficient de réaction du taux d'intérêt plus élevé par rapport à l'inflation que par rapport à l'output gap (les fluctuations de la production sont plus grandes que celles de l'inflation). Ce relèvement du taux d'intérêt nominal est plus fort dans le régime (b), car la très forte inertie du déficit public empêche les stabilisateurs automatiques de réduire l'output gap et l'inflation. On observe encore que dans ce régime, l'inertie du déficit public fait reposer l'ajustement sur le taux d'intérêt, mais la politique monétaire seule ne permet pas d'amortir les fluctuations économiques réelles etnominales. L'ajustement versl'équilibre en est très retardé. À l'inverse, lorsque l'inertie du déficit public est nulle (régime a), les stabilisateurs automatiques budgétaires peuvent contribuer à l'ajustement, ce qui permetà la banque centrale de ne pas modifier beaucoup le taux d'intérêt. L a variabilité de l'inflation et celle de la production, ainsi que la vitesse d'ajustement, sont à peu près équivalentes dans le régime (a) et dans le régime (c). Contrairement aux conclusions tirées dans l'analyse des autres chocs, le régime (c) n'est pas le plus performant en présence d'un choc budgétaire, puisqu'un tel chocestpar nature mieux amorti parles stabilisateurs automatiques.
67Les conséquences de cette expansion budgétaire du pays 1 sur le PIB et l'inflation du pays 2 dépendent de la règle monétaire de la banque centrale commune et du degré d'inertie du déficit public. L'augmentation du PIB à l'impact du choc est plus forte dans le régime (b) car le taux d'intérêt réel est négatif. Elle est très faible dans les deux autres régimes à cause d'un taux d'intérêt réel positif (la sensibilité de la demande globale au taux d'intérêt réel est forte dans ce pays), qui est plus élevé dans le régime (c), car la banque centrale réagit davantage aux fluctuations de l'output gap et relève, par conséquent, le taux d'intérêt nominal plus fortement que dans le régime (a). Deux autres raisons expliquent que l'effet sur le PIB du pays 2 est insignifiant dans ces deux régimes : l'efficacité de l'expansion budgétaire dans le pays 1 est limitée ; l'effet revenu positif (relance des exportations nettes grâce aux différentiels favorables de prix et de PIB) est compensé par un effet financier négatif (taux d'intérêt réel positif). Quant aux pressions inflationnistes dans le pays 2 (dues à l'augmentation de la production domestique et à l'inflation importée du pays 1), elles sont très faibles dans le régime (a) car les stabilisateurs automatiques amortissent les fluctuations de la production et de l'inflation dans les deux pays (l'inflation importée en est réduite). Dans le régime (b), le pays 2 connaît une variabilité plus forte de l'inflation, parce que les règles monétaire et budgétaire ne permettent pas la stabilisation des économies. Enfin, le choc crée un excédent budgétaire dans le pays 2, mais il est très faible et rapidement corrigé (naturellement moins dans le régime b).
68Notons, pour finir, qu'un des arguments en faveur du Pacte de stabilité et de croissance (PSC) est de prévenir les effets de débordement (spillovers) négatifs de politiques budgétaires expansionnistes nationales sur les autrespays de l'UEM. Lesrésultats de notre modèle conduisent à nuancer ce risque, puisque l'impact sur le PIB et le solde budgétaire du pays 2 est positif, et ce, en dépit d'une plus forte sensibilité de la demande globale de ce pays aux changements de taux d'intérêt. Certes, l'inflation du pays 2 augmente dans un premier temps. Au total, on ne peut pas préjuger des effets d'une expansion budgétaire menée isolément dans un pays car ils dépendent d'un ensemble de facteurs et de leur interaction complexe. Il faut tenir compte non seulement des déterminants de la demande globale et de l'offre globale dans les pays, mais aussi du degré de flexibilité des règles de politique économique.
Conclusions
69Des travaux de la NEK portent sur le fonctionnement et les effets de règles de politique économique. Nous avons voulu appliquer cette approche à l'UEM européenne. Pour cela, nous avons construit un modèle type NEK à deux pays en UEM pour simuler la dynamique d'ajustement réel et nominal des économies en présence de chocs divers et de règles de stabilisation automatique (i.e. sans mesures discrétionnaires) monétaires et budgétaires plus ou moins flexibles. Les résultats des simulations apportent plusieurs conclusions.
70L'efficacité des règles de politique économique dépend de la nature des chocs, de la réaction différente des économies nationales à ces chocs (leur capacité d'ajustement) et de la répartition du poids des ajustements entre les instruments monétaire et budgétaire. Ainsi, les règles de stabilisation automatique peuvent-elles faciliter les ajustements dans un pays maisles retarder dans un autre pays de l'UEM, en fonction des spécificités nationales dans les comportements et les structures économiques. Le mode de formation des anticipations et le degré de flexibilité des prix sont, à cet égard, déterminants.
71Dans un modèle “hybride”, dans lequel les comportements sont en partie dépendants des évolutions économiques passées (comportements partiellement backward-looking), une règle monétaire à la Taylor avec ajustement partiel du taux d'intérêt nepermet pas d'amortirles effetsnominaux et réels des chocs et de stabiliser les fluctuations économiques si les autorités budgétaires ne laissent pas jouer les stabilisateurs automatiques (inertie très forte du déficit public). Dans ce cas, le poids de l'ajustement repose sur la seule politique monétaire et la variabilité de la production est toujours plus grande, quel que soit le type de choc. En outre, une forte inertie des instruments de politique économique renforce la persistance de l'inflation et de la production, engendre de l'instabilité et retarde les ajustements.
72De manière générale, la combinaison d'une règle monétaire commune flexible (spécifiée par une inertie moyenne de l'instrument du taux d'intérêt • c'est-à-dire une inertie inférieure à celle observée empiriquement • et une plus grande réactivité aux fluctuations du PIB) et de règles budgétaires nationales flexibles (caractérisées par une inertie moyenne du déficit public permettant aux stabilisateurs automatiques budgétaires de fonctionner) facilitent mieux les ajustements des économies. Elle assouplit aussi l'arbitrage entre variabilité de l'inflation et variabilité de la production.
73L'analyse apporte également des éclairages sur l'organisation des politiques macroéconomiques dans la zone euro. La politique monétaire et les politiques budgétaires nationales y ont été peu réactives au ralentissement économique en 2001. D'une part, la BCE a ajusté son taux directeur avec une grande inertie et une faible réactivité à l'évolution du PIB, en comparaison du comportement de la Fed par exemple. En outre, la baisse du taux directeur n'a pas été suffisante dans des pays où l'inflation diminuait (en Allemagne), si bien que la politique monétaire a été pro-cyclique pources pays. D'autre part, étant donnédes positions budgétaires défavorables dans les grands pays de la zone euro, au regard desrègles du Pacte de stabilité et de croissance, les politiques budgétaires ont été marquées elles aussi par une forte inertie et ont été, de surcroît, pro-cycliques : les stabilisateurs automatiques budgétaires n'ont pas pu fonctionner car les gouvernements ont cherché à réduire leurs déficits publics (notamment en Allemagne, en France et en Italie). En somme, les politiques macroéconomiques n'ont pas joué un rôle de stabilisation. Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que la reprise économique ait tardé dans la zone euro. Notre analyse montre que des règles de stabilisation automatique flexibles aident au retour à l'équilibre après un choc (de demande ou d'offre).
74Enfin, nous envisageons de poursuivre l'analyse en modifiant certains aspects du modèle. En effet, nous avons construit un modèle d'UEM en économie fermée. Nous pouvons relâcher cette hypothèse en supposant que l'UEM est ouverte sur le reste du monde. Si les économies nationales sont sensibles aux variations du taux de change euro-dollar, nous pourrons alors mettre en évidence de nouveaux mécanismes d'ajustement aux chocs en tenant compte des effets des modifications du taux de change.
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Mots-clés éditeurs : politique budgétaire, politique monétaire, règles de Taylor, UEM
Date de mise en ligne : 01/03/2008.
https://doi.org/10.3917/ecop.173.0043Notes
- (*)MÉDEE, Université de Lille 1. E-mail : fflorence. huart@ univ-lille1. fr
- (**)LICOS, Université de Louvain, Belgique; Université de Nijmegen, Pays-Bas.
- (***)Université d'Utrecht et Université de Nijmegen, Pays-Bas. Nous remercions les rapporteurs anonymes, dont les commentaires ont stimulé notre réflexion et contribué à l'amélioration de notre analyse.
- (1)Voir Commission Européenne (2001) pour une revue de la théorie des ZMO et son application aux pays de l’UE.
- (2)Pour une introduction aux questions soulevées par l'organisation des politiques macroéconomiques dans l'UEM, voir Buti et Sapir (1998), de Grauwe (1999, chap. 8 et 9).
- (3)L'historique, les fondements, les dispositions et le fonctionnement du PSC sont présentés et discutés dans l'ouvrage collectif édité par Brunila et alii (2001). Eichengreen et Wyplosz (1998) développent un point de vue critique.
- (4)Un bilan d'ensemble des premières années de l'UEM est fait par Sapir et Buti (2001). Pour une évaluation de la politique monétaire de la BCE, voir Artus et Wyplosz (2002), Creel et Fayolle (2002). En ce qui concerne le débat autour du PSC, voir Creel et alii (2002), Mathieu et Sterdyniak (2003).
- (5)Pour une introduction à cette approche, voir Clarida et alii (1999).
- (6)Question discutée dans Federal Reserve Bank of Kansas City (2002), Fatás et Mihov (2002), Solow (2002).
- (7)La littérature repose implicitement sur l'hypothèse que le secteur privé perçoit les règles comme crédibles : les autorités s'engagent à les appliquer. Cela signifie que des mesures d'ordre institutionnel ont été prises pour éliminer les problèmes d'incohérence temporelle. Sans cette hypothèse, l'action des autorités ne serait pas prévisible et ne stabiliserait pas les anticipations des agents économiques.
- (8)L'activité d'une banque centrale indépendante doit faire l'objet d'un contrôle démocratique (c'est la responsabilité). Ce contrôle peut être facilité lorsque la banque centrale adopte une règle de politique monétaire explicitant les principes qui guident son action (c'est la transparence).
- (9)Une bonne introduction à la littérature de la règle de Taylor est la lecture de l'ouvrage collectif édité par Taylor (1999a).
- (10)i.e. des variables dont on anticipe la valeur future, et ce rationnellement (en tenant compte de toute l'information disponible aujourd'hui et de la connaissance du modèle représentatif du fonctionnement de l'économie).
- (11)Sack et Wieland (2000) font le point sur cette préoccupation de stabilité des taux directeurs. Les principales raisons pour lesquelles les banques centrales préfèrent l'ajustement graduel des taux directeurs sont l'incertitude relative aux conditions macroéconomiques et aux paramètres du modèle économique, la crainte de perturber le fonctionnement des marchés financiers, le risque d'une perte de crédibilité due à des modifications soudaines et brutales de la politique monétaire, le besoin de temps pour “construire” un consensus autour d'une modification de la politique monétaire.
- (12)L'introduction d'un terme de stabilisation de l'instrument du taux d'intérêt ne rend pas la règle déstabilisante pourvu que les anticipations rationnelles soient associées à des comportements en partie forward-looking (Taylor, 1999b). A contrario, si les comportements sont entièrement fondés sur l'observation du passé (backward-looking), comme dans le modèle de Rudebusch et Svensson (1999), le lissage du taux d'intérêt se traduit par une plus grande variabilité de l'inflation et de la production, et retarde considérablement (voire empêche) le retour à l'équilibre de l'économie après un choc.
- (13)Les fondements microéconomiques des nouvelles courbes de demande globale (courbe IS) et d'offre globale (courbe de Phillips) sont explicités par Clarida et alii (1999, 2002), Gali et Monacelli (2002).
- (14)Un cadre d'analyse à plus de deux pays aurait pu être adopté, mais il n'aurait pas donné des résultats qualitatifs fondamentalement différents en ce qui concerne les implications de différentes règles de politique économique en UEM.
- (15)Les équations (1) et (2) sont des formes réduites d'un modèle à fondements microéconomiques. En particulier, elles incluent bien l'influence des importations de biens sur l'output gap domestique. Pour une compétitivité prix intra-UEM donnée, l'output gap du pays 1 est influencé positivement par les exportations nettes qui dépendent de la différence entre l'output gap étranger et l'output gap domestique : x x x t t t1 12 2 11 1, , , = ?? ? où ?12 est l'élasticité des exportations du pays 1 par rapport à l'output gap du pays 2 et ?11 est l'élasticité des importations du pays 1 par rapport à l'output gap du pays 1. Il vient que la sensibilité de l'output gap aux exportations nettes est : x x t t1 12 11 2 1, , [ / ( )]= +? ?. En notant ? ? ? 1 12 11 1= +/ ( ), on obtient l'expression dans la courbe IS (1a) qui tient compte de la fuite représentée par les importations.
- (16)McCallum et Nelson (1999), Leith et Malley (2002) apportent les fondements microéconomiques de la présence d'effets d'habitude dans la consommation. Empiriquement, ces effets sont plutôt importants.
- (17)Gali et Monacelli (2002) ont élaboré les fondements microéconomiques de cette nouvelle courbe IS keynésienne pour une petite économie ouverte, en ignorant la politique budgétaire et la compétitivité prix (loi du prix unique supposée vérifiée).
- (18)Cette hypothèse n'affecte pas les résultats qualitatifs, les réponses aux chocs, lorsque la règle est simulée en écart par rapport à l'équilibre (Batini et Haldane, 1999).
- (19)Nous avons vérifié la stabilité du système : dans tous les chocs analysés, toutes les variables retournent tôt ou tard à l'équilibre.
- (20)Cf. Mihov (2001) pour une vue d'ensemble des mécanismes de transmission d'une politique monétaire unique en UEM.
- (21)On vérifie bien que des comportements backward-looking génèrent de l'instabilité dans des modèles à anticipations rationnelles.