Couverture de ECOP_152

Article de revue

Les investissements directs français à l'étranger et l'emploi en France

Pages 171 à 188

Notes

  • (*)
    Direction des Relations Économiques Extérieures – Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. E-mail : vvincent. aussilloux@ dree. org Au moment de la rédaction de cet article V. Aussilloux travaillait à la Direction de la Prévision.
  • (**)
    CATT – Université de Pau et des Pays de l’Adour.
  • (1)
    On peut notamment se référer au rapport Arthuis (1993), qui développe une telle analyse.
  • (2)
    Voir pour quelques références génériques Mundell (1957), Markusen (1983), Wong (1986) et Baldwin (1994).
  • (3)
    L’équivalence entre équilibre à prix flexibles des facteurs et équilibre à prix rigides prévaut de façon très générale sous les hypothèses que les préférences des consommateurs sont identiques, homothétiques et que leur offre de facteurs est inélastique. Voir Bec et alii (1998).
  • (4)
    Sur la sensibilité des résultats aux hypothèses choisies dans un modèle avec mobilité des biens et fixité des facteurs, on peut consulter Bec et alii (1998). Pour un résumé technique, voir Aussilloux et Cheval (1999).
  • (5)
    Voir Aussilloux (1997) pour constater que les comportements stratégiques des entreprises peuvent induire des effets contre intuitifs de l’investissement sur l’emploi, dans le cadre de l’analyse factorielle en concurrence imparfaite.
  • (6)
    Les importations de biens intermédiaires peuvent représenter plus de 50% des importations totales (Fontagné et alii, 1996). En 1992, c’est le cas pour les importations de l’Union Européenne à 12 en provenance des États-Unis (50,2 %), de l’AELE (58 %) ou du Canada (61,3 %). Les importations de biens intermédiaires des États-Unis en provenance de l’ex-URSS représentent plus de 75 % des importations bilatérales totales. Dans le cas de la France, 66 % des importations totales sont des importations de biens intermédiaires (Fontagné, 1991).
  • (7)
    Au niveau mondial, on évalue le commerce intra-firme à environ un tiers du commerce total (Markusen, 1995). Voir également la note n°28.
  • (8)
    Voir notamment Caves (1982) pour une justification détaillée de l’argument ainsi que Mucchielli (1999) pour une revue exhaustive des théories en présence.
  • (9)
    Voir notamment Markusen (1995), Brainard (1993), Carr et alii (1998).
  • (10)
    La segmentation horizontale est dominante pour Brainard (1993 et 1997), Markusen (1984), Horstmann et Markusen (1987 et 1992), Markusen et Venables (1997 et 1998). La segmentation verticale est dominante pour Fors et Kokko (1999). Le modèle hybride est dominant pour Carr et alii (1998), Ekholm (1995,1997,1998a, 1998b), Markusen et Maskus (1999) ainsi que Markusen (1997).
  • (11)
    La Banque de France fonde la distinction entre investissements directs et de portefeuille sur ce critère, depuis 1996.
  • (12)
    Critère distinctif employé par la Banque de France jusqu’en 1996.
  • (13)
    En 2000, le seul rachat d’Orange par France Télécom couvre ainsi plus du quart des investissements français sortants (DREE, 2002).
  • (14)
    Le stock d’investissement est mesuré par la valeur comptable de la part du capital - le seuil de participation pris en compte est de 10 % - et des réserves détenues dans la société non résidente, augmentée des prêts et avances de la société mère à la filiale.
  • (15)
    Cf. Klodt et Maurer (1996).
  • (16)
    Klodt et Maurer (op. cit.) font la même constatation dans le cas allemand.
  • (17)
    Cf. Houdebine et Topiol-Bensaïd (1999).
  • (18)
    Cf. Hatem (1998), op. cit. Voir aussi le rapport 1999 de la CNUCED, p. 51.
  • (19)
    Voir Wheeler et Mody (1992), Jost (1997), Martin et Velasquez (1997), Pain et Lansbury (1997) et Hubert et Pain (1999), entre autres.
  • (20)
    Sur la relation entre taux de change et flux entrants d’IDE, voir Benassy-Quéré et alii (1999).
  • (21)
    Voir, sur données américaines, Brainard et Riker (1997a et b) ; sur données suédoises, Hatzius (1997a) ; sur données allemandes, Döhrn (1997); sur données françaises, Chédor et Mucchielli (1998). Voir aussi Slaughter (1995), Slaughter et Swagel (1997), Hatzius (1997b), et Zhao (1998). Pour une revue de ces études, voir Andersen et Hainaut (1998).
  • (22)
    Voir notamment Lipsey (1994 ), Blomström et alii (1997) et Lipsey (1999).
  • (23)
    Voir sur ce point Graham et Krugman (1989, p. 62) ou Moran (1997).
  • (24)
    Voir pour des interrogations du même type Guimbert et Levy-Bruhl (2002), dans ce même numéro.
  • (25)
    Voir Feliciano et Lipsey (1999) sur données américaines.
  • (26)
    Voir Blomström, Lipsey et Kulchycky (1988), Lispsey et Weiss (1984), Lipsey et Kravis (1988), Lipsey (1994) et Blomström et alii (1997).
  • (27)
    Pour les États-Unis, Lipsey et Weiss (1984), Blomström et alii (1988), Hufbauer et alii (1994), Lipsey (1994), Andersen et Hainaut (1998) trouvent également une relation positive mais faible. Pour l’Allemagne, le Japon et l’Autriche, le même type de résultats est observé (Pfaffermayr, 1994 ; Klodt et Maurer, 1996; Andersen et Hainaut, 1998).
  • (28)
    En 1994, le poids des échanges intra-groupe dans les échanges totaux de la France était de 40 % à l’exportation et de 18 % à l’importation.
  • (29)
    Les effets nets de l’IDE apparaissent considérablement plus limités pour la France si l’on s’appuie sur des estimations purement nationales. En effet, les résultats présentés ici sont menés sur la base de calculs sur les données d’une quinzaine de pays industriels (1984-1993). En moyenne 1 dollar d’IDE sortant donne lieu à 1,9 dollars d’exportations nettes et 1 dollar d’IDE entrant donne lieu à 1,6 dollars d’importations nettes. Si les calculs sont menés sur la France seule, 1 dollar d’IDE sortant donne lieu à 0,4 dollar d’exportations nettes seulement et 1 dollar d’IDE entrant donne lieu à 0,8 dollar d’importations nettes.
Les opinions exprimées ici sont propres à leurs auteurs et ne sauraient refléter en aucune manière le point de vue des institutions auxquels ils appartiennent. Les auteurs tiennent à remercier Corinne Darmaillacq pour sa collaboration active à cette étude ainsi que le rapporteur anonyme.

1L’influence de l’investissement direct à l’étranger (IDE) sur les niveaux d’emploi et de salaires est théoriquement équivoque. En revanche, d’après les données statistiques, l’IDE français s’inscrit dans une stratégie de conquête de parts de marché à l’étranger : la majorité des IDE est réalisée dans le secteur des services et à destination des pays de l’OCDE. Les études empiriques confirment que le coût du travail est un facteur secondaire de la décision d’implantation à l’étranger. Le niveau de l’emploi et des salaires dans la maison mère apparaît d’ailleurs positivement corrélé avec l’activité des filiales à l’étranger. S’il ne semble pas y avoir substitution avec l’investissement domestique, l’investissement sortant semble au contraire exercer une influence positive sur le niveau des exportations.

2Le grand public, ainsi que certains observateurs, redoutent que les sorties de capitaux nationaux ne correspondent à une exportation d’emplois français vers les pays à bas salaires [1]. Même si on ne peut observer une modification sectorielle du niveau de l’emploi en liaison avec les flux d’investissement direct à l’étranger (IDE), il n’est cependant pas exclu que ces flux entraînent des modifications de la demande en emplois qualifiés et peu qualifiés. Rappelons toutefois qu’on ne peut raisonner à production constante. En effet, les IDE français induisent généralement des gains en parts de marché à l’étranger plus importants que ceux réalisés par une simple stratégie d’exportation. Cette progression des entreprises françaises sur les marchés étrangers, qui passe par une implantation directe, s’accompagne généralement d’une intensification des exportations à destination de ces pays, ce qui est favorable à l’emploi en France.

3Afin d’éclairer quelque peu le débat sur les “délocalisations”, quatre remarques préliminaires peuvent être formulées, elles seront développées par la suite :

  • les créations ab nihilo de sites de production à l’étranger représentent uniquement 6,5 % de l’investissement international et 18,9 % si on y ajoute les joint-ventures. A contrario, la très grande majorité des investissements réalisés le sont par rachats d’entreprises et de capacités de production déjà existantes. Or ces types d’investissements directs sont d’autant moins reliés à une diminution de l’emploi dans le pays source qu’ils ne se substituent que marginalement à des flux d’exportations ;
  • les flux d’investissements directs français à l’étranger sont majoritairement dirigés vers d’autres pays industrialisés. Les pays à bas coûts salariaux ne représentent ainsi qu’un faible pourcentage du stock d’investissements sortants de la France ;
  • les études économiques montrent que les firmes et les secteurs les plus actifs sur le plan de l’IDE sont ceux qui ont un leadership technologique plutôt que ceux qui sont victimes de la concurrence des pays à bas salaires. Ces conclusions s’appliquent notamment dans le cas de la France : ce sont bien les firmes et les secteurs les plus dynamiques qui s’internationalisent ;
  • la croissance particulièrement forte de l’IDE dans le secteur tertiaire alors que, dans la plupart des cas, les services doivent être produits là où se trouvent les consommateurs, suggère qu’une partie substantielle des filiales viennent soutenir les exportations plutôt qu’elles ne les concurrencent.

4L’article est construit de la manière suivante. Après un examen théorique des relations entre IDE, échanges et emploi dans la première partie, la seconde partie rappelle certains faits stylisés concernant la nature de l’investissement français sortant : les investissements français à l’étranger sont, d’une part, majoritairement à destination des pays développés et, d’autre part, le plus souvent destinés à soutenir l’exportation des entreprises les plus dynamiques. La troisième partie est consacrée à l’étude du lien entre l’IDE et le coût du travail, pour montrer que celui-ci ne semble pas être un déterminant majeur de l’investissement à l’étranger. La quatrième partie traite de l’influence directe, au niveau micro-économique, de l’IDE sur l’emploi, le niveau des qualifications et les salaires, dans la firme à la source de l’investissement. La dernière partie s’interroge finalement sur les effets indirects de l’IDE sur l’emploi via la substitution éventuelle avec l’investissement intérieur et via la complémentarité probable entre le commerce et l’investissement.

Liens théoriques entre IDE sortant et emploi dans le pays d’origine

Les effets d’équilibre général de l’investissement à l’étranger dans la théorie factorielle

5Les modèles d’équilibre général en économie internationale fournissent un cadre de travail pour compren dre certaines d es causes et des conséquences globales du mouvement international des facteurs initié par les firmes multinationales [2]. Le modèle de base suppose la libre adaptation de la rémunération des facteurs. Toutefois, lorsqu’on envisage une rigidité à la baisse du salaire par exemple, une moindre demande du facteur travail se traduit par un chômage de type classique. Dans ce qui suit, on parlera indifféremment de baisse du salaire réel ou de hausse du chômage, la seule différence résidant, dans ce type d’analyse, dans l’existence ou non de rigidités sur le marché du travail [3].

6Le modèle canonique de Mundell (1957) considère deux pays à dotations homogènes en facteurs (capital et travail) où le seul bien disponible n’est pas échangeable mais où les facteurs de production peuvent migrer d’un pays à l’autre. Dans ce modèle, lorsque le rendement réel du capital est plus élevé à l’étranger, une partie du capital national émigre afin de rétablir l’égalité des rémunérations factorielles. Le processus de production de la nation devient par conséquent moins capitalistique : le produit marginal du capital augmente et celui du travail diminue. Cela se traduit par une baisse du salaire national (ou une hausse du chômage) lorsque tous les marchés, dont celui des facteurs de production, sont considérés comme concurrentiels. À l’étranger, les rendements factoriels évoluent en sens contraire : l’entrée de capital induit une hausse du salaire réel et érode le rendement du capital. Ainsi, dans le modèle de base, le travail s’oppose à l’émigration du capital domestique à l’étranger mais accueille favorablement une entrée de capital étranger. Dans le cas d’une sortie de capitaux, il est à noter toutefois que comme le revenu de la nation augmente, grâce au rapatriement des revenus du capital délocalisé, les gagnants sont potentiellement en mesure de compenser les perdants.

7Sous certaines conditions, les conclusions théoriques du modèle canonique persistent lorsqu’on introduit la possibilité d’un échange de biens. Il est cependant nécessaire pour cela que chaque pays produise un seul bien pour la consommation nationale et l’exportation ou que tous les biens que chacun produit utilisent du capital et du travail dans les mêmes proportions et ce, pour n’importe quel ensemble de prix des facteurs.

8En rev anche, les résultats changent substantiellement si chaque nation produit plus d’un bien et si les fonctions de production diffèrent en intensités factorielles. Dans ce cas, l’évolution de la structure des échanges tend à compenser la réallocation internationale des facteurs.

9Dans le cadre d’un modèle 2 2 2× × (deux pays, deux facteurs, deux biens), si la nation possède plus de capital par travailleur que le pays étranger, elle tend à exporter des biens intensifs en capital et à importer des biens intensifs en travail, tant que les préférences des consommateurs dans les deux pays ne viennent pas jouer en sens contraire. Dans ce cadre, si une partie du capital national migre vers l’étranger, les avantages comparatifs nationaux se réduisent et, avec eux, l’intensité des échanges internationaux. Dans chaque pays, on assiste alors à un mouvement des facteurs de production vers les secteurs non exportateurs. Ce déplacement des facteurs atténue les effets de la sortie des capitaux sur la rémunération du travail dans le pays domestique. En effet, la diminution de la production dans le secteur exportateur (intensif en capital) relâche plus de capital et moins de travail que le secteur non exportateur (intensif en travail) n’en absorbe de par sa croissance. Finalement, la mobilité intersectorielle des capitaux à l’intérieur du pays vient atténuer les effets de la sortie de capitaux (la baisse de la rémunération du facteur travail), par rapport au cas à un seul bien.

10Dans le cas limite, il est même possible d’envisager que l’ajustement de la structure de production et des échanges du pays face à une sortie de capitaux pourrait être telle que les rémunérations nationales du travail et du capital ne soient pas modifiées. Il en est notamment ainsi, si la nation est un petit pays dont les prix des biens à l’exportation et à l’importation sont établis de manière concurrentielle sur les marchés internationaux. Dans ce cas, les termes de l’échange du pays ne sont pas affectés par la sortie de capitaux. En raison d’une diminution de la quantité de capital disponible dans l’économie, l’investissement à l’étranger tend à accroître le coût du capital et à diminuer celui du travail. Cela génère des profits supplémentaires pour l’industrie nationale qui concurrence les importations (relativement intensives en travail) et diminue ceux de l’industrie nationale des biens exportés (relativement intensifs en capital). Selon le même raisonnement que dans le cas précédent, les facteurs se déplacent alors vers l’industrie des biens non exportés. Puisque les termes de l’échange sont donnés, cette réallocation de facteurs se poursuit jusqu’à ce que les proportions capital – travail dans les deux industries soient revenues à leurs niveaux qui précédaient la sortie de capital perturbatrice. Il résulte de ce raisonnement que les niveaux originels de rémunération ou d’emplois sont compatibles avec un flux d’investissements vers l’étranger.

11Finalement, les rémunérations réelles peuvent être relativement peu perturbées par des mouvements internationaux de capitaux, lorsqu’ils sont exogènes. Ceci peut demeurer vrai même lorsque les rendements factoriels dans un pays dépendent de ses termes de l’échange. En effet, dans le cas de l’analyse classique heckscher-ohlinienne (échanges de biens mais immobilité des facteurs de production entre pays), on sait que les prix des facteurs peuvent s’égaliser internationalement comme l’a montré Samuelson (1948 et 1949). Si maintenant on suppose que les capitaux peuvent être mobiles et qu’on se situe dans la zone d’égalisation du prix des facteurs, les flux de capitaux ne modifient pas le prix des facteurs, lorsque les prix des biens restent inchangés. Dans ce cas, les flux de capitaux n’ont pas d’effets sur les salaires et donc sur le chômage classique.

12L a théo rie classiq ue – le mod èle Heckscher-Ohlin-Samuelson et sa variante développée par Mundell ainsi que leurs différentes extensions – s’avère donc insuffisante pour rendre compte de la relation entre les mouvements de capitaux et le niveau de l’emploi. D’une part, les résultats sont extrêmement liés aux hypothèses retenues sur le nombre de facteurs, le nombre de biens échangeables ou non, le nombre de pays, leur taille, etc., ce qui exclut d’en inférer une relation simple et univoque [4]. D’autre part, dans ce cadre d’analyse, la relation entre l’investissement à l’étranger et l’emploi est la résultante de la relation entre l’investissement et les échanges. Concernant ce second point, c’est donc plutôt à la nature substituable ou complémentaire des biens exportés et des biens produits par des filiales à l’étranger que la théorie nous renvoie. Il semble par conséquent plus pertinent de s’interroger sur les motifs de l’investissement international (substitution ou complémentarité avec la production nationale) que peut éclairer l’étude des formes de l’intégration des entreprises au niveau international.

La relation théorique entre IDE, échanges et emploi en fonction des formes de l’intégration internationale des firmes

13 Le modèle de Heckscher-Ohlin-Mundell ne nous renseigne guère sur le commerce et les investissements entre pays où les dotations factorielles, les capacités technologiques et les niveaux de revenu sont semblables, pas plus qu’il n’intègre les biens différenciés et la concurrence imparfaite [5]. Ces caractéristiques dominent pourtant actuellement les flux d’investissements internationaux. Le commerce mondial concerne également dans une grande proportion des produits intermédiaires [6] ou des produits qui sont échangés entre filiales d’un même groupe [7]. Ces évolutions, pour lesquelles le modèle Heckscher-Ohlin fournit peu d’explications, suggèrent que le lien entre le commerce et l’investissement international pourrait être bien plus complexe que la simple relation de substituabilité décrite par le modèle factoriel traditionnel.

14Pour l’ensemble de ces raisons, ainsi que celles que nous avons vues dans la section précédente, le modèle classique ne permet pas d’identifier une relation claire entre le montant des investissements à l’étranger et le niveau de l’emploi national. Il importe dès lors de prendre en compte le mode d’organisation, horizontal ou vertical, des firmes multinationales afin de déterminer les liens entre les investissements sortants, les échanges et l’emploi domestique [8].

15– Dans le cas d’une intégration horizontale de la firme multinationale, les filiales et la maison-mère produisent chacune des biens identiques pour leur marché local. Ce mode d’organisation est justifié par l’intérêt d’une exploitation en propre, à l’international, des actifs spécifiques détenus par la firme au niveau local comme les brevets, les marques de fabrique mais également les savoir-faire relatifs aux techniques de gestion, de marketing, etc. La théorie de l’internalisation justifie également l’organisation horizontale des multinationales par un accès élargi et meilleur marché aux ressou rces financières [9]. Classiquement, les auteurs postulent qu’une telle organisation conduit à une substitution des échanges par l’IDE, dans la mesure où les exportations sont remplacées par des ventes locales sur les marchés étrangers. Toutefois, même dans ce type d’organisation horizontale, une implantation sur un marché étranger se traduit généralement par une intensification des flux d e pro duits intermédiaires.

16En outre, les multinationales s’appuient de plus en plus sur la flexibilité que leur procure une organisation horizontale en jouant sur les évolutions, sur les différents marchés, du taux de change, du taux d’utilisation des capacités et de la demande. Le lien entre l’investissement direct dans un pays tiers et la production dans le pays d’origine fluctue ainsi au cours du temps, en fonction de l’évolution de ces variables. De ce fait, il est difficile de conclure d’un point de vue théorique sur le s ens de la relation entre le niveau d’investissement entre deux pays et le montant global des échanges bilatéraux et ce, y compris dans un mode dominant d’organisation horizontale des multinationales.

17– Dans le cas d’une intégration verticale de la firme multinationale, les différentes unités se spécialisent de manière à se compléter les unes les autres par l’échange international de produits intermédiaires et de produits finis. Les activités sont concentrées dans un nombre relativement restreint de grandes unités qui commercent entre elles. Cette intégration est notamment favorisée par la libéralisation des éch ang es internatio nau x, l’utilisation de technologies dissemblables à différents stades de la production, les écarts dans les prix des facteurs entre pays, l’intensification des économies d’échelle au niveau de chaque ligne de produits, etc. Dans ce schéma, les IDE et les échanges sont logiquement complémentaires, dans la mesure où les investissements à l’étranger renforcent la compétitivité sur les marché étrangers et accroissent les échanges de biens intermédiaires et de produits finis vers les filiales. Ces types de liens sont bénéfiques pour les exportations et a priori pour l’emploi dans la maison-mère.

18De plus, un investissement en capacités de production est très souvent coup lé à des investissements en matière de distribution, de marketing, qui se traduisent par d’importants gains en parts de marché. Ces gains en parts de marché se traduisent en retour par un accroissement des flux de produits connexes en raison notamment de l’effet de notoriété de la marque ou du renforcement du réseau de distribution.

19Il est à noter que cette forme d’internationalisation verticale des entreprises est favorisée par des différences de dotations et, par conséquent, de prix relatifs des facteurs de production.

20– Il reste que le modèle actuel d’insertion internationale des entreprises est très certainement une forme hybride des deux types d’insertion verticale et horizontale, ce que Markusen (1997) a désign é comme le “ modèle de capital connaissance“ [10].

21Les liens entre les échanges, les IDE et l’emploi apparaissent ainsi plus complexes que ne le laisse penser l’analyse factorielle ou l’analyse classique de l’organisation des firmes multinationales. Ils ne peuvent se réduire à une analyse purement théorique. Il semble par co nséquent particulièrement nécessaire d’éclairer cette relation à partir des résultats des analyses empiriques.

Investissement direct français à l’étranger : faits stylisés

22Les investissements étrangers se scindent en deux catégories principales : les investissements directs et les investissements de portefeuille. Même s’il est parfois difficile de faire la distinction, on considère généralement qu’un investissement est un IDE lorsque l’investisseur étranger détient plus de 10 % des actions ordinaires dans l’entreprise. C’est un seui l arbitraire mais conforme aux recommandations de l’OCDE et du FMI [11]. Il correspond généralement à un investissement de long terme suffisant pour influencer les décisions de gestion de l’entreprise. Le second critère de distinction peut reposer sur la durée pendant laquelle est maintenu l’investissement : en deçà d’une année, l’investissement est de portefeuille, au-delà, il représente un investissement direct [12].

23Les IDE sont constitués des opérations de fusion-acquisition, des joint-ventures, des accords avec mise en commun de ressources spécifiques et des investissements dits " greenfield", qui correspondent à l’établissement ou à l’extension de filiales créées ab nihilo par la maison-mère.

Figure 1

flux d’investissements directs français à l’étranger et étrangers en France

Figure 1
Figure 1 : flux d’investissements directs français à l’étranger et étrangers en France %Milliards d’Euros 120 50 45 100 40 Sorties 35 80 Entrées 30Sorties en % de la FBCF Entrées en % de la FBCF 60 25 20 40 15 10 20 5 0 0 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 Source : Banque de France, annexes au rapport annuel, 2000.

flux d’investissements directs français à l’étranger et étrangers en France

Banque de France, annexes au rapport annuel, 2000.

24Jusqu’en 1986, les investissements français à l’étranger représentaient moins de 3 % de l’investissement intérieur brut défini par la FBCF. Depuis, leur part n’a cessé de progresser, atteignant un point haut en 1999, à 45 % (cf. graphique1). L’année 1999, comme l’année 2000, représentent cependant des années particulièrement atypiques caractérisées par des opérations d’ampleur exceptionnelle liées notamment à la "bulle" spéculative sur les valeurs du secteur des télécommunications [13]. Sur moyenne période, le ratio “sorties d’investissement / FBCF“ français est d’ailleurs en phase avec la moyenne de l’Union européenne à quinze (cf. graphique 2) alors que le stock d’investissements français à l’étranger rapporté au PIB reste en deçà de la moyenne européenne (cf. graphique 3).

25Au même titre que la Suisse ou la Belgique, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont une tradition ancienne d’insertion dans l’économie mondiale, ce qui explique des ratios IDE/FBCF et IDE/PIB particulièrement élevés (cf. graphique 3).

Figure 2

flux d’IDE sortants en pourcentage de la FBCF pour quelques pays, 1985-1999 (en %)

Figure 2
Figure 2 : flux d’IDE sortants en pourcentage de la FBCF pour quelques pays, 1985-1999 (en %) % 90 80 1985-1994 1995 70 1996 1997 60 1998 1999 50 40 30 20 10 0 Pays Union France Allemagne Italie Pays-Bas Espagne Royaume- Etats-Unis Japon industrialisés européenne Uni Source : CNUCED

flux d’IDE sortants en pourcentage de la FBCF pour quelques pays, 1985-1999 (en %)

CNUCED
Figure 3

stocks d’IDE sortants en pourcentage du PIB pour quelques pays, 1980,1985,1990,1995 et 1999 (en %)

Figure 3
Figure 3 : stocks d’IDE sortants en pourcentage du PIB pour quelques pays, 1980,1985,1990,1995 et 1999 (en %) % 70 60 1980 1985 50 1990 1995 1999 40 30 20 10 0 Pays Union France Allemagne Italie Pays-Bas Espagne Royaume- Etats-unis Japon industrialisés européenne Uni Source : CNUCED

stocks d’IDE sortants en pourcentage du PIB pour quelques pays, 1980,1985,1990,1995 et 1999 (en %)

CNUCED

Les IDE français sont très majoritairement à destination des pays développés

26Les flux d’investissement directs français à l’étranger se dirigent principalement vers d’autres pays industrialisés. Les pays à bas coûts salariaux ne représentent ainsi qu’un faible pourcentage du stock d’investissement sortant de la France [14] (cf. graphique 4).

27Ainsi, pour l’année 1996, le stock d’IDE français à l’étranger est concentré à 90,9 % sur l’OCDE, à 63,5 % sur l’UE à quinze mais seulement à 4,9 % sur l’Amérique Latine, à 2,7 % sur les pays d’Asie en développement rapide, à 2,1 % sur l’Afrique, à 1,1 % sur l’Europe de l’Est et à 0,4 % sur le Maghreb (cf. graphique 4).

Figure 4

stocks des investissements français à l'étranger par pays en fin d'année

Figure 4
Figure 4 : stocks des investissements français à l'étranger par pays en fin d'année Millions d’Euros 150 000 Europe de l'Est 135 000 Maghreb Pays d'Asie (à dev. rapide) 120 000 Afrique Amérique Latine Reste du monde 105 000 Etats-Unis + Canada Reste du monde UE15 90 000 Etats-Unis + Canada 75 000 60 000 45 000 UE15 30 000 15 000 0 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 Source : Banque de France, annexes au rapport annuel, 1997.

stocks des investissements français à l'étranger par pays en fin d'année

Banque de France, annexes au rapport annuel, 1997.

28Au premier janvier 2000, la répartition des quelques 3 565 milliers d’emplois dans les filiales à l’étranger suit celle des stocks d’IDE : 65,4 % des emplois à l’étranger des groupes français sont dans les pays industrialisés, dont 35,7 % dans l’UE à quinze, et seulement 11,1 % en Amérique latine, 9,2 % en Asie, 7,4 % en Afrique et 4,6 % dans les pays de l’ex-bloc de l’Est (cf. tableau 1). Toutefois, entre 1998 et 2000, la part des IDE sortants français à destination des pays hors OCDE a nettement augmenté, notamment vers les pays émergents. L’emploi dans les filiales françaises situées dans ces pays s’est ainsi accrû de 42 % pour atteindre près de 26 % de l’effectif total.

Les IDE français semblent très majoritairement destinés à soutenir l’exportation des entreprises les plus dynamiques

29L’étude des échanges intra-groupes des entreprises françaises semble minimiser l’importance des considérations de coût de production comme déterminant de la multinationalisation. En effet, les filiales étrangères de groupes français sont le plus souvent des filiales de commercialisation et s’insèrent dans une stratégie d’implantation à proximité de la demande. Il est également probable que les firmes françaises des secteurs intensifs en main-d’œuvre cherchent à p rotéger leur compétitivité par le développement de réseaux de so us-traitance au moins autant que p ar l’implantation de filiales de production.

30Les études économiques démontrent notamment que les firmes et les secteurs les plus actifs sur le plan de l’IDE sont ceux qui ont un leadership technologique plutôt que ceux qui sont victimes de la concurrence des pays à bas salaires [15]. Dans le cas de la France, l’étude menée par Messerlin (1995) a montré que ce sont les branches créatrices nettes d’emploi sur le sol national qui sont majoritairement à l’origine des flux sortants d’IDE [16].

31À titre d’exemple, le secteur textile est souvent considéré comme faisant l’objet de stratégies de délocalisation, qui relèveraient de considérations de coûts de production. Ce secteur représente une infime fraction des flux d’IDE français sur la période 1998-2000 (voir tableau 2 en annexe). Le secteur tertiaire quant à lui accroît sa part dans les flux d’investissements directs français à l’étranger alors qu’il dépassait déjà 52 % des flux totaux en 1996 [17].

Tableau 1

implantations françaises à l’étranger (au 1er janvier 2000)

Tableau 1
Tableau 1 : implantations françaises à l’étranger (au 1er janvier 2000) 2000 1998 Évolution Filiales Effectifs Filiales Effectifs Filiales Effectifs Nombre % Nombre % Nombre % Nombre % % % Total 19 177 100 3 565 017 100 15 823 100 2 528 488 100 21,2 41 Pays industrialisés 10 622 55,4 2 332 152 65,4 8 907 56,3 1 592 259 63,0 19,3 46,5 Union Européenne 7 304 38,1 1 272 901 35,7 5 947 37,6 1 132 217 44,8 22,8 12,4 Hors Union Européenne 3 318 17,3 1 059 251 29,7 2 960 18,7 460 042 18,2 12,1 130,3 Pays en transition et en développement 8 555 44,6 1 232 865 34,6 6 916 43,7 936 229 37,0 23,7 31,7 PECO et CEI 1 919 10,0 164 017 4,6 1 606 10,1 121 349 4,8 19,5 35,2 Amérique Latine 1 259 6,6 394 434 11,1 866 5,5 267 828 10,6 45,4 47,3 Asie 2 616 13,6 327 501 9,2 2 049 12,9 184 511 7,3 27,7 77,5 Proche et Moyen Orient 794 4,1 83 829 2,4 575 3,6 49 382 2 38,1 69,8 Afrique(1) 1 967 10,3 263 084 7,4 1 820 11,5 313 159 12,4 8,1-16,0 32 pays émergents(2) 5 886 30,7 923 354 25,9 4 815 30,4 649 350 25,7 22,2 42,2 Source : Recensement 2000 des implantations françaises à l’étranger - DREE (1) Bénin, Burkina, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo, Zaïre. (2) Afrique du Sud, Algérie, Argentine, Brésil, Chili, Chine, Colombie, Corée du Sud, Egypte, Hongkong, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Israël, Kazakhstan, Malaisie, Maroc, Mexique, Pakistan, Philippines, Pologne, Rép. Tchèque, Roumanie, Russie, Singapour, Taïwan, Thaïlande, Turquie, Ukraine, Vénézuela, Vietnam. Lecture : sur la ligne “ total ”, la deuxième colonne indique que 19 177 filiales françaises sont implantées à l’étranger. Elles emploient 3 565 017 personnes (4ème colonne). Leur nombre a augmenté de 21,2 % entre 1998 et 2000 entraînant une hausse de 41,0 % des effectifs employés.

implantations françaises à l’étranger (au 1er janvier 2000)

Recensement 2000 des implantations françaises à l’étranger - DREE
Tableau 3

décomposition du stock d’IDE sortants de la France par secteur d’activité et par région (2000)

Tableau 3
Tableau 3 : décomposition du stock d’IDE sortants de la France par secteur d’activité et par région (2000) Nombre de filiales Effectifs En %(*) Production Commerce Services Production Commerce Services TOTAL 52 15 33 55 12 33 Union européenne 48 21 31 51 17 32 Autres pays industrialisés 57 13 30 56 7 37 PECO + ex-URSS 50 15 35 67 16 17 Afrique 52 13 36 65 10 24 Amérique latine 56 8 36 38 12 50 Asie en développement 56 14 30 65 16 19 Moyen-Orient 48 11 41 61 4 35 Source : recensement 2000 des implantations françaises à l’étranger - DREE. (*) Le total sur cent se lit en ligne respectivement pour les filiales et les effectifs.

décomposition du stock d’IDE sortants de la France par secteur d’activité et par région (2000)

recensement 2000 des implantations françaises à l’étranger - DREE.

32En 1996, selon les chiffres de la balance des paiements, l’industrie ne représente que 29,2 % des stocks d’IDE sortants de France, l’énergie 10,3 %, les holdings 14,7 % et les services marchands 36,2 % (dont la moitié sont des sociétés de crédit). L’industrie représente donc un stock d’IDE de 45 milliards d’euros, équivalant à 18,2 % du capital fixe net industriel (hors industrie agro-alimentaire). Par ailleurs, la croissance particulièrement forte de l’IDE dans le secteur tertiaire (cf. graphique 5) combinée au fait que, dans la plupart des cas, les services sont fournis là où se trouvent les consommateurs, suggère qu’une partie substantielle des filiales de production viennent soutenir les exportations plutôt qu’elles ne les concurrencent. En améliorant la distribution des biens du pays d’origine, les filiales à l’étranger permettent de maintenir ou d’étendre les parts de marché à l’exportation.

Figure 5

stocks des investissements français à l'étranger par secteurs d'activité en fin d'année

Figure 5
Figure 5 : stocks des investissements français à l'étranger par secteurs d'activité en fin d'année Millions d’Euros 160 000 Holdings Opérations immobilières 140 000 Services non marchands HoldingsServices marchands Bâtiment et Génie civil 120 000 Industrie Energie Agriculture et IAA 100 000 Services marchands 80 000 60 000 40 000 Industrie 20 000 Energie Agriculture et IAA 0 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 Source : Banque de France, annexes au rapport annuel, 1997.

stocks des investissements français à l'étranger par secteurs d'activité en fin d'année

Banque de France, annexes au rapport annuel, 1997.

Le coût du travail ne semble pas être un déterminant majeur des IDE

33L’étude de Hatem (1998) rappelle de manière utile que les créations de sites de production à l’étranger représentent uniquement 6,5 % de l’investissement international et 18,9 % si on y ajoute les joint-ventures. Par conséquent, la très grande majorité des investissements réalisés le sont par rachats d’entreprises et de capacités de production déjà existantes. Ces types d’investissements directs sont d’autant moins reliés à une diminution de l’emploi dans le pays source qu’ils ne viennent que très marginalement se substituer à des flux d’exportations.

34Par ailleurs, dans la même étude, une enquête est menée sur l’investissement international auprès de quelques 300 firmes multinationales [18]. Les résultats de l’enquête soulignent que l’accès au marché local constitue la première motivation de l’IDE. Ceci est vrai aussi bien au moment de la décision initiale d’investissement à l’étranger qu’au moment du choix final du site. Cette dernière étape intègre également d’autres éléments tels que le risque politique et social, la qualité de la main-d’œuvre et des infrastructures ou encore le niveau limité de la bureaucratie et de la pression fiscale. Finalement, les coûts directs stricto sensu (salaires, prix des terrains, etc.) paraissent jouer un rôle relativement secondaire dans la décision d’internationalisation et dans le choix de localisation (cf. figure 5). Cependant, selon cette étude, les IDE manufacturiers se montrent plus sensibles aux coûts de production que ceux réalisés dans le secteur des services. De la même façon, les IDE à destination de l’Asie s’avèrent plus marqués par des considérations de coûts de production que ceux dirigés vers l’Europe de l’Ouest et les États-Unis.

35D’après les études économétriques relatives aux facteurs qui favorisent les flux entrants d’IDE, le coût du travail influence la localisation mais plus faiblement que d’autres déterminants [19]. En effet, dans l’analyse des IDE entre pays développés, le coût relatif du travail apparaît généralement comme un facteur secondaire de localisation. Il sert essentiellement à choisir entre deux sites d’accueil, une fois prise la décision d’investissement.

36Ainsi, dans le cas des investissements français en Europe, Ferrer (199 8) confirme q ue les déterminants de la localisation sont prioritairement le degré d’industrialisation de la région et la concentration dans cette région d’activités similaires à celles pratiquées par la filiale. Le salaire horaire semble n’avoir qu’une influence peu significative sur le choix de localisation des filiales de groupes français en Europe.

37Mayer et Mucchielli (1999) évaluent pour leur part l’importance de différents déterminants de la localisation des firmes japonaises en Europe à la fois au niveau national et régional. Plusieurs spécifications économétriques sont testées. Lorsque le modèle décrit exclusivement le choix de localisation entre plusieurs régions ou entre plusieurs pays, le coût du travail ressort comme un des éléments de la décision de localisation. En revanche, lorsque les auteurs retiennent une spécification économétrique dans laquelle les entreprises choisissent d’abord le pays puis la région de localisation, la variable coût du travail n’est significative qu’au niveau régional. Elle ne semble pas déterminer le choix entre pays.

38Concernant les IDE allemands à destination des autres pays européens, Hubert et Pain (2000) précisent que le coût du travail n’apparaît pas comme un facteur déclenchant de l’IDE allemand sortant. L’étude confirme que le coût du travail intervient, tout de même, quant au choix de localisation entre différentes implantations. Les auteurs notent cependant que les principaux facteurs à la base de la croissance des IDE allemands sont plutôt la croissance de la demande en Europe, mesurée par la croissance du PIB, et la croissance des actifs des firmes allemandes fondés sur la détention de savoir-faire technologiques.

39Andersen et Hainaut (1998) envisagent, pour 21 pays développés, les déterminants des IDE entrants et sortants à la fois en flux cumulés et en stock. Les estimations suggèrent que les IDE sont déterminés principalement par l’intensité du commerce entre pays, par la taille du marché boursier, par l’intensité des investissements dans les technologies de l’information et par l’intensité, pour le pays source, du ratio investissement domestique sur PIB. Toutefois, dans cette étude, les coûts relatifs semblent importants puisque les pays dont le taux de change se déprécie et qui se caractérisent par un faible coût du travail paraissent attirer relativement plus d’investissements étrangers [20].

40Martin et Velasquez (1997) notent que les facteurs qui motivent les IDE au sein des pays de l’OCDE sont tout d’abord la taille et le dynamisme du marché intérieur du pays ainsi que la qualité des infrastructures et de la main-d’œuvre. En revanche, la distance entre le pays source et le pays destinataire tend à réduire le montant des investissements bilatéraux alors que les différences en dotations factorielles entre pays, qui déterminent le coût du travail, apparaissent non significatives.

41Lorsque sont pris également en compte les pays en développement comme pays d’accueil de l’IDE, le coût du travail n’apparaît pas nécessairement plus significatif. Les études s’accordent toutefois pour lui attribuer un rôle dans le choix de localisation mais celui-ci est nettement plus mineur que celui dévolu aux considérations de taille de la demande, de dépenses de recherche-développement ou encore aux effets d’agglomération.

42En considérant une large gamme de destinations en Europe et hors d’Europe, Hubert et Pain (1995 et 1998) montrent que le coût du travail dans le pays d’accueil est un déterminant peu important de la décision de localisation des IDE allemands. Dans le cas de ces deux études, la sensibilité au coût du travail serait cependant plus forte pour l’IDE allemand sortant à destination des pays non européens plutôt qu’européens. Dans une étude postérieure, Hubert et Pain (1999) établissent également qu’un coût du travail élevé dans le pays d’origine représente un élément qui peut favoriser, mais de manière modérée, la sortie des capitaux. L’apparente contradiction avec les résultats de Hubert et Pain (2000) peut s’expliquer, selon les auteurs, par la prise en compte des seules destinations européennes de l’IDE allemand dans l’étude la plus récente.

Figure 6

importance relative des différents critères de localisation (0 : sans importance;

Figure 6
Figure 6 : importance relative des Croissance du marchéProfit potentiel différents critères de localisation Taille du marché (0 : sans importance; Risque politique et social Protection de l'IDE Environnement économique Ouverture du pays d'accueil aux IDE Réglementation Fiscalité Infrastructures Absence de bureaucratie Proximité d'autres marchés Accès au travail qualifié Environnement industriel Existence d'un actif stratégique Existence d'accord sur l'IDE Zone clé pour la restructuration Incitations à l'implantation Peur du protectionnisme Coût du travail Accès à la technologie Qualité et/ou coût du terrain Matières premières Ressources financières Proximité de firmes compétitives Sources : Hatem (1998) 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5

importance relative des différents critères de localisation (0 : sans importance;

Hatem (1998)

43Wheeler et Mody (1992) ont mis en exergue le rôle prédominant des effets d’agglomération, de la qualité des infrastructures ainsi que d’un tissu de sous-traitants de qualité et d’un marché domestique en expansion dans le choix de localisation des IDE américains sortants à destination de quarante-deux pays industrialisés et en développement. Le coût du travail semble jouer de manière déterminante sur le choix de localisation uniquement dans le cas des IDE à destination des pays en développement et pour le secteur particulier de l’électronique. Dans ce secteur, le coût du travail ne semble pas avoir une importance significative dans le choix de localisation entre pays développés. En revanche, dans le secteur manufacturier dans son ensemble, la variable retrouve une influence mais nettement en retrait par rapport aux considérations de taille de la demande ou d’effets d’agglomération.

44Andersen et Hainaut (1998) font également apparaître une relation négative entre le niveau de l’emploi d’une filiale locale et le coût du travail dans le pays de localisation. Ici, le coefficient négatif apparaît plus fort lorsque l’échantillon de pays ne regroupe que des pays développés. Dans cette étude et contrairement aux études citées précédemment, il semblerait, par conséquent, que le coût du travail soit une variable plus importante dans le choix de localisation lorsqu’elle se situe à des niveaux élevés. Elle serait de moindre importance pour déterminer la délocalisation de pays développés vers des pays en développement.

45Même si les études économétriques ne s’accordent pas sur le caractère significatif du coût du travail pour déterminer le pays de localisation selon que l’on considère des pays développés ou en voie de développement, il ressort clairement que le coût du travail ne représente qu ’un déterminant relativement marginal du choix d’investir à l’étranger. La décision d’implanter une filiale dans un pays étranger apparaît nettement plus reliée à des considérations stratégiques de développement à long terme de la part de marché de l’entreprise ou de maîtrise de savoir-faire technologiques.

Quelle est l’influence directe de l’IDE sur l’emploi dans la firme source ?

Une liaison positive entre le niveau de l’emploi dans la maison-mère et celui des filiales

46Diverses études économétriques [21] ont cherché à évaluer, dans différents pays, le lien entre le niveau de l’emploi de la maison-mère et celui de ses filiales. Ces études envisagent des fonctions de coût de la maison-mère, dans lesquelles les coefficients de salaires relatifs s’interprètent comme des élasticités de substitution entre les travailleurs de différentes zones géographiques. Un faible degré de substitution entre les travailleurs embauchés par la maison-mère et ceux embauchés par une filiale sise à l’étranger est alors mis en évidence. En effet, les études dénotent p lutôt une relation de complémentarité entre les travailleurs des filiales installées dans les pays industrialisés et ceux des filiales situées dans les pays émergents.

47Pour la France, Chédor et Mucchielli (1999) soulignent l’influence faible mais positive de la production des filiales françaises sur l’emploi français, lorsque sont considérées indifféremment des implantations dans les pays en développement et dans les pays industrialisés. En revanche, les études semblent révéler un degré élevé de substitution entre les travailleurs des filiales situées dans différents pays émergents.

48Finalement, ces résultats semblent confirmer l’existence d’une structure de production verticale par laquelle les multinationales tentent de minimiser leurs coûts en distribuant globalement la production en fonction des différences de qualifications et de rémunérations. Toutefois, ces travaux laissent à penser que les déplacements d’emplois du pays source vers le pays d’accueil sont généralement modérés, lorsqu’ils existent.

49Il reste, que pour diverses raisons, les élasticités de substitution entre le travail dans le pays source de l’investissement et dans le pays d’accueil de l’IDE peuvent sous-estimer les effets de l’investissement à l’étranger sur l’emploi national. En effet, ces estimations peuvent être biaisées par le fait que seules les filiales manufacturières sont prises en compte.

50De plus, alors que les travailleurs de la société mère et des filiales peuvent apparaître complémentaires une fois les filiales installées, des déplacements ont pu avoir lieu durant le processus de redistribution international de la production et de l’emploi, en fonction des coûts relatifs et des salaires. Ainsi, Brainard et Riker (1997a et b) soulignent, en premier lieu, que l’emploi des filiales se déplace préférentiellement vers les économies émergentes dans lesquelles les salaires ont diminué en termes relatifs par rapport aux salaires des pays développés. En second lieu, le développement de structures de production verticales et transnationales doit impliquer, selon ces mêmes auteurs, des “déplacements” de production ou de travailleurs, de préférence faiblement rémunérés, par rapport à la situation où la totalité de la production est assumée par la maison-mère.

51Il est à noter que ces estimations capturent des modifications à la marge dans l’allocation du travail et de la production en tre les différentes localisations, plutôt que des changements discrets associés à des fermetures et à des ouvertures d’entreprises.

52Enfin, dans l’estimation sur panel, l’emploi total et le salaire moyen de chaque localisation sont obtenus en agrégeant divers types de travail et en faisant une moyenne des salaires par employé. En traitant les différents types de travail comme un facteur composite de production, on risque de trouver des relations de substitution fallacieuses reflétant en réalité des différences dans la composition du travail. Par exemple, si une filiale accroît sa production en ajoutant des “cols bleus“ à un cœur donné de “cols blancs“, alors l’expansion de l’emploi peut amener un déclin du salaire composite même si les salaires sous-jacents pour chaque type de travailleurs n’ont pas bougé. Dès lors, on trouverait une corrélation négative entre l’emploi et les salaires de la firme pour des raisons étrangères à une quelconque substitution entre différentes localisations.

Une relation potentiellement négative entre l’emploi non-qualifié dans la maison-mère et le niveau de production des filiales

53Des travaux empiriques sur données américaines [22] semblent effectivement confirmer l’existence de déplacements d’emplois. Leurs auteurs font une régression économétrique du niveau de l’emploi de la maison-mère sur les niveaux de production de la maison-mère et de ses filiales, à la fois dans les pays émergents et dans les pays industrialisés. Il apparaît alors que l’activité des filiales situées dans les pays émergents aurait une influence négative sur la demande de travail non-qualifié dans les pays industrialisés. Pourtant, ce résultat n’a pas été confirmé pour la Suède, pays où les coûts salariaux sont élevés : les activités des filiales accroissent essentiellement la demande de travailleurs liés à la production dans le pays d’origine, suggérant ainsi que, dans le cas de ce pays, les activités localisées à l’étranger relèvent plus d’activités de gestion, de recherche, de direction ou de distribution et qu’elles génèrent des flux additionnels de produits connexes. Lipsey, Blomström et Ramstetter (2000) obtiennent des résultats similaires dans le cas du Japon.

54Pour la France, Chédor et Mucchielli (1998) mettent en évidence qu e l’ex pan sion des firmes multinationales françaises dans les pays développés apparaît positivement corrélée avec le niveau de l’emplo i qualifié et non-qualifié dans la maison-mère. En revanche, il ressort de cette étude que l’augmentation de la production des filiales situées dans les pays en développement n’aurait aucun impact significatif sur le volume d’emplois qualifiés de la maison-mère et même une influence faiblement positive sur les emplois non-qualifiés.

55Par ailleurs, comme l’ont montré Fontagné et Pajot (1997), on peut également souligner que les États-Unis et la France présentent des différences en termes d’insertion dans l’économie mondiale : en matière d’inv estissement, la France est majoritairement tournée vers les pays industrialisés, en particulier l’Europe, alors que les États-Unis, insérés différemment dans le processus de mondialisation, orientent davantage leur flux vers les pays en développement. Les flu x d’investissement sortants semblent répondre dans les deux pays à des motifs différents. Pour les États-Unis, les IDE sortants renvoient à une stratégie de substitution des exportations de la maison-mère par les ventes sur place des affiliées, sans que la maison-mère compense cet effet par des exportations massives de compléments de gammes ou de composants et sans que les exportations de ses fournisseurs soient fortement entraînées. Pour la France, les IDE sortants correspondraient plutôt à la volonté d’intégrer au niveau mondial un réseau croisé de filiales de production et de vente liées entre elles par des échanges de produits finaux et de consommations intermédiaires.

56Les travaux économétriques sur cette question sont confrontés à l’hétérogénéité des firmes dans l’échantillon étudié. Cet effet de composition de l’échantillon est mis en évidence par Lipsey (1999) dans son étude du niveau de l’emploi de la maison-mère en fonction des ventes de cette dernière et de celles de ses filiales. Un effet négatif significatif du niveau de l’emploi dans les filiales est observé mais il devient faiblement positif quand on estime la même équation en logarithme. Sachant que la forme logarithmique augmente le poids des observations de plus faible dimension, la différence de signes des coefficients suggère que l’influence négative vient des filiales les plus grandes.

57Par ailleurs, l’influence de l’IDE sur l’emploi analysée à un niveau microéconomique risque d’être négligeable à un niveau macro-économique : excepté pour de courtes périodes, l’investissement sortant, comme le commerce, n’a qu’une influence extrêmement marginale sur la demande de travail agrégée de long terme. Néanmoins, tout comme le commerce, l’IDE est susceptible de modifier la composition des emplois dans le pays d’origine ainsi que l’allocation des facteurs [23].

Les entreprises françaises détenant une filiale à l’étranger et les filiales françaises de groupes étrangers paient des salaires plus élevés

58La production à l’étranger peut affecter le niveau moyen de qualification de la maison-mère via deux canaux. En premier lieu, les opérations requérant peu de qualification peuvent être allouées aux filiales étrangères, en particulier celles installées dans les pays en développement. Il s’ensuit des niveaux de qualification et de salaire moyen plus élevés dans la maison-mère. En second lieu, les niveaux plus élevés d’activité peuvent requérir davantage de personnels dans la maison-mère pour la supervision et la gestion financière, ce qui renforce le premier effet.

59Kravis et Lipsey (1988) établissent une relation positive entre les niveaux de salaires dans les filiales étrangères et dans les établissements installés dans le pays source. Dans l’étude déjà citée précédemment, Lipsey (1999) étudie également la relation entre le niveau des salaires chez la maison-mère et le niveau de la production de la maison-mère et des filiales. En étudiant séparément cette relation dans le cas des pays en développement et dans le cas des pays développés, il n’observe aucune relation entre la production des filiales et le niveau de salaires de la maison-mère. Il reste difficile à ce stade de déduire de ces deux études une conclusion robuste quant à la relation entre le salaire moyen et le niveau d’activité dans les filiales à l’étranger, d’une part, et dans la maison-mère, d’autre part.

60En effet, les changements dans la structure des salaires au sein de la maison-mère semblent liés à la situation macro-économique du pays d’origine comme le montrent Blomström et Kokko (2000). Ces auteurs observent en premier lieu que le jeu de la destruction-création d’emplois des grandes entreprises multinationales suédoises sur leur sol d’origine concerne une part importante de l’emploi total de ces entreprises. En moyenne, chaque année, un emploi sur cinq est externalisé (essentiellement par le biais de ventes de filiales suédoises) et presque autant d’emplois sont nouvellement intégrés à l’entreprise (essentiellement par le biais de rachats de filiales également suédoises). En étudiant les changements dans la structure des emplois que ces ventes et ces rachats de filiales impliquent, les auteurs remarquent, en second lieu, que ces changements semblent extrêmement liés au contexte économique de la Suède. En effet, dans la seconde moitié des années quatre-vingt, qui se caractérisait par un contexte économique peu performant pour ce pays, les filiales nouvellement incorporées au sein des multinationales offraient des salaires plus faibles que les filiales vendues par celles-ci. En revanche, après un certain nombre de réformes institutionnelles qui ont amélioré le climat économique de la Suède, la première moitié des années quatre-vingt-dix a vu la tendance se renverser : les emplois internalisés étaient caractérisés par des salaires plus élevés que les emplois externalisés. Ainsi, cette étude tend à montrer que la relation entre la détention de filiales et le niveau de rémunération au sein de la maison-mère est fluctuante car elle est vraisemblablement influencée par le contexte macro-économique du pays d’origine des multinationales.

61Dans le cas de la France, l’analyse du contenu en emploi des filiales par Hou deb ine et Topiol-Bensaïd (1999) tend, à première vue, à confirmer la relation potentiellement négative entre le niveau de l’emploi non-qualifié dans la maison-mère et le niveau de production des filiales. En effet, les auteurs constatent que les firmes françaises détenant au moins une filiale à l’étranger ont recours, sur le sol français, à une part plus importante de travail qualifié.

62Cependant, même si cette étude observe une corrélation entre internationalisation et productivité des firmes françaises, elle ne nous renseigne pas directement sur le sens de la relation de causalité [24]. En effet, la question reste entière de savoir si cette part plus faible de travailleurs non-qualifiés dans la maison-mère s’explique par un coût du travail éventuellement plus bas à l’étranger ou plutôt par une incitation plus forte aux gains de productivité des firmes multinationales. Cette incitation plus grande pourrait s’expliquer par une concurrence internationale exacerbée, par un apprentissage à l’étranger de techniques de production plus économes en ce type de travail ou encore pour tout autre type de raison.

63Dans la même étude, Houdebine et Topiol-Bensaïd apportent toutefois un élément de réponse à ces interrogations sur le sens de la relation de causalité. En effet, ces auteurs observent que, même lorsque les effets de structure de qualification sont corrigés, il existe un écart positif en termes de salaires en faveur des entreprises françaises détenant une filiale à l’étranger par rapport à celles qui n’en détiennent pas. Ceci affaiblit l’argument de la recherche d’un meilleur coût du travail comme déterminant de la délocalisation des entreprises puisque la pression à la baisse des salaires semble moins forte dans celles qui ont une filiale par rapport à la moyenne des entreprises.

64Houdebine et Topiol-Bensaïd (1999) constatent également que les filiales de groupes étrangers en France font appel à une main-d’œuvre plus qualifiée avec un coût moyen du travail plus élevé que les entreprises françaises [25]. En effet, dans l’industrie l’écart de salaire observé des filiales de groupes étrangers est de 16 % avec l’ensemble des entreprises françaises et de 12 % avec celles appartenant à un groupe. Dans les services, l’écart est encore plus marqué puisqu’il est respectivement de 56 % et 54 % suivant que les salaires sont comparés à ceux de l’ensemble des entreprises ou uniquement à ceux pratiqués dans les entreprises appartenant à un groupe. Il semble donc que le désavantage en matière de coûts salariaux de production que peut connaître la France par rapport à d’autres pays ne conduise pas les filiales de groupes étrangers implantées sur le territoire à chercher à réduire ces coûts outre mesure.

Existe-t-il un effet d’éviction de l’investissement direct sortant sur l’investissement intérieur et sur les flux de commerce ?

Un risque de substitution entre l’investissement sortant et l’investissement intérieur

65L’IDE se substitue-t-il à l’investissement domestique ? Les flux d’investissements directs vers les pays en développement modifient-ils les rapports capital/travail nationaux originels, déplaçant les capacités de production vers les pays émergents ? Diverses études empiriques [26] concluent à un effet négatif de l’IDE des firmes sur l’investissement domestique. Mais il s’agit d’analyses en équilibre partiel et l'on peut parfaitement imaginer que les opportunités d’investissements domestiques délaissées seront mises à profit par d’autres firmes domestiques.

66Au niveau macro-économique, Feldstein (1994) montre que chaque dollar de flux d’IDE réduit l’investissement domestique aux États-Unis d’environ un dollar. Sachant que seulement le cinquième du stock de capital détenu à l’étranger par les firmes américaines a été financé par des sources américaines, le résultat de Feldstein semble démon trer que chaque dollar marginal d’immobilisation dans les filiales étrangères des mu ltinatio nal es américaines réduit leur investissement aux États-Unis d’environ 20 cents. Toutefois, là aussi, l’analyse ne tient pas compte des retours sur capital qui sont perçus par les mu ltinatio nal es américaines et au moins partiellement investis aux États-Unis. Le maintien et le développement de la part de marché mondiale et américaine permises par ses IDE se traduisent également par des potentialités d’investissements renouvelées qui ne sont pas prises en compte.

Un lien positif entre les échanges et l’investissement à l’étranger

67Pour la France, l’étude de Fontagné et Pajot (1997) ou celle de Chédor et Mucchielli (1998) [27] présente l’IDE comme un complément au commerce, susceptible de renforcer les exportations. Ce lien positif entre IDE et commerce provient notamment de l’importance des échanges intra-firmes qui découlent de l’IDE, comme le montrent Chédor et alii (2000). Ce commerce recouvre les échanges entre filiales domestiques et étrangères d’une même firme ainsi que le transit d’un produit fini de la maison-mère à une filiale de commercialisation [28].

68L’implantation de filiales à l’étranger favorise également l’accès aux marchés étrangers d’autres produits de la maison-mère. La création de filiales locales de production permet en particulier une meilleure connaissance des spécificités locales de consommation ou de distribution. Elle assure également une meilleure notoriété de la marque et des produits de la maison-mère sur le marché extérieur. L’annonce de l’implantation de Toyota en France a par exemple conduit à une augmentation sensible des ventes de “Yaris” avant même le début de la production locale de ce modèle. Cela a également des effets positifs sur les flux d’exportation des biens non produits localement. Par exemple, suite à l’implantation de plusieurs sites de production de Renault en Amérique du Sud, on peut s’attendre à ce que la notoriété renforcée de la marque aboutisse à un volume d’exportations accru d’autres modèles de la firme ou de composants vers cette zone.

69Il est à noter que des échanges intra-firmes existent également en sens contraire, de la filiale vers la maison-mère. Cependant, l’IDE sortant aurait un impact plus fort sur les exportations que sur les importations du pays source, comme le montrent Chédor et alii (2000). Une augmentation de l’IDE de 10 % entraînerait une augmentation de 2,4 % des exportations contre un accroissement de 0,2 % des importations. Il reste que l’étude de la relation de causalité entre les exportations et l’investissement direct à l’étranger pose un certain nombre de problèmes du point de vue économétrique. En effet, on retrouve au niveau des études économétriques le même débat qui existe au niveau des théoriciens. D’un côté, le bon niveau pour appréhender cette relation peu t-être celui des op érateurs économiques, si l’objet est d’étudier la relation de substituabilité ou de complémentarité entre IDE et exportations au niveau décisionnel le plus fin. D’un autre côté, le bon niveau d’étude peut également être à un niveau sectoriel ou macro-économique si l’on s’attache à décrire les éventuels effets d’entraînement de l’investissement direct à l’étranger sur les relations d’échanges entre deux pays. Dans ce second cas, on choisit de ne pas ignorer les effets potentiellement positifs de l’investissement direct sur les exportations d’autres op érateurs d omes tiques (sous-traitants, fournisseurs, etc.) qui n’ont pas directement investi.

70En se plaçant délibérément de ce second point de vue, Fontagné et Pajot montrent que l’IDE contribue en ce sens à notre excédent commercial et par conséquent à la création d’emplois. En 1994, environ 10,7 milliards d’euros d’exportations nettes pouvaient être expliqués par le stock d’IDE français à l’étrang er, contre 6,1 à 7,60 milliard s d’importations nettes associées à la présence étrangère en France, soit un solde net positif de l’ordre de 3,1 à 4,6 milliards d’euros, lorsque l’on attribue à la France un comportement moyen estimé sur une quinzaine de pays industrialisés [29]. Ces chiffres sont à comparer à 163,6 milliards d’exportations et 156,3 milliards d’importations de produits manufacturés en 1994, soit une exportation nette de 7,2 milliards. La contribution de l’IDE à notre excédent manufacturier serait donc loin d’être négligeable.

Conclusion

71La recherche de bas salaires n’apparaît pas représenter un motif majeur de délocalisation. En effet, la majorité des investissements sortants sont à destination des pays développés ; ils sont réalisés dans les services destinés à soutenir les exportations de biens manufacturés et dans les branches créatrices nettes d’emplois en France. Même si les études économétriques soulignent majoritairement l’influence du niveau du coût du travail, celle-ci se manifeste une fois prise la décision d’investir à l’étranger, pour le choix d’une localisation à l’intérieur d’un pays, plutôt qu’entre les pays.

72Une fois l’investissement à l’étranger réalisé, ses effets sur l’emploi semblent largement dépendre du type d’activités délocalisées. En effet, si l’influence directe de l’IDE sur l’emploi dans le pays source est négative pour les États-Unis, il n’en va pas de même pour la Suède, les activités délocalisées étant différentes.

73Les motifs de l’investissement direct à l’étranger semblent également varier entre les pays. Les IDE sortants américains renvoient plutôt à une stratégie de substitution des exportations de la maison-mère par les ventes sur place des affiliées. Dans le cas de la France, les IDE sortants correspondraient majoritairement à la volonté d’intégrer au niveau mondial un réseau croisé de filiales liées entre elles par des échanges de produits finaux et de consommations intermédiaires.

74Il reste qu’au niveau microéconomique, on peut semble-t-il détecter un effet d’éviction de l’investissement direct sortant sur l’investissement domestique. Mais, par ailleurs, dans le cas de la France, Fontagné et Pajot (1997) ou Chédor et Mucchielli (1998) ont démontré que l’IDE sortant assure un surplus net d’exportations, via notamment les échanges intra-firmes de produits connexes et de consommations intermédiaires.

75En conclusion, la recherche de meilleurs coûts de production ne semble pas correspondre à l’un des déterminants majeurs de l’IDE français. Celui-ci apparaît préférentiellement relever de stratégies de gains de parts de marché au niveau mondial, gage de la compétitivité future des entreprises.


Annexe

Tableau 2

moyenne des flux d’investissements français à l’étranger par secteurs pour les années 2000, 1999 et 1998

Tableau 2
Tableau 2 : moyenne des flux d’investissements français à l’étranger par secteurs pour les années OCDE UE États-Unis Allemagne A Monde en mio. d’euros Structure en % Structure par région en % d 1) Agriculture et pêche 14 0 86 70 35-2 2) Mines et carrières 34 0 67 65 20 0 dont : Houille, Pétrole, Gaz 7 0 82 45 91 0 3) Produits manufacturés 14 681 13 91 70 11 1 dont : Produits alimentaires 888 1 56 22 20 2 Textiles et habillement 100 0 97 76 67 12 Bois, édition et imprimerie 295 0 108 * 203 * 7 4 Produits pétroliers raffinés et autres 17 0 932* 1196* 10 60 Produits chimiques 2 537 2 91 48 27 0 Caoutchouc et matières plastiques 348 0 91 33 1 9 Métaux ferreux et non-ferreux 768 1 99 163 4 4 Construction mécanique 348 0 107* 66 25 8 Équipement bureau et informatique 625 1 107 * 40 22 0 Matériel de communication 405 0 93 44 20-7 Véhicules à moteur 2 484 2 95 15 0-9 Autres matériels de transport 2 279 2 100 82 4 2 4) Électricité, gaz naturel et eau 15 819 15 97 6 33 1 5) Bâtiment et génie civil 478 0 77 22 7 13 6) Récupération, réparation, commerce 5 200 5 90 85 13 3 7) Restauration et hébergement 133 0 100 32 51 0

moyenne des flux d’investissements français à l’étranger par secteurs pour les années 2000, 1999 et 1998

graphique des
Monde Structure en % OCDE UE États-Unis Allemagne Argen 8) Transports et communications 19 742 18 97 97 5 2 0 dont : Transports intérieurs 543 0 95 8 77 3 1 Transports maritimes et cabotage-7 0 195* 40 220 * -5 0 Transport aérien-40 0 99 58 43 30 0 Télécommunications 18 327 17 98 102 * 2 2 0 9) Intérmédiation financière 19 278 18 92 46 8 5 0 dont : Intermédiation monétaire 2 961 3 64 52 10 1-2 Assurances et activités annexes 310 0 90 50 31 0 0 10) Opérations immobilières et commerciales 40 348 37 96 57 27 24 0 dont : Opérations immobilières 818 1 99 91-2 6 0 Informatique 1 045 1 90 24 68 3 0 Recherche et développement 54 0 94 72 7 62 0 Autres activités commerciales 35 956 33 99 57 26 27 0 dont : conseil en affaire et gestion 34 463 32 99 57 26 28 0 dont : holdings de gestion 34 028 31 99 57 26 28 0 Publicité 579 1 98 52 40 5 0 11) Autres services 688 1 84 64 11-11 0 12) Montants non ventilés 5 872 5 100 120* -25 3 1 Total (hors bénéfices réinvestis non ventilés ) 108 845 100 94 59 19 10 0 Aide à la lecture : la 2ème colonne indique en millions d’euros l’investissement direct français dans le monde; la 3ème colonne présentent en % la part de chaque branche dans le des IDE français sortants concernent les produits manufacturés; les colonnes suivantes renseignent sur la structure géographique des IDE sortants pour chaque branche : par OCDE. Un chiffre négatif correspond à un désinvestissement dans la zone. * Par le jeu de la moyenne des flux d’IDE sortants sur trois ans, qui peuvent être positifs ou négatifs, les pourcentages par zone peuvent être supérieurs à 100 %. Source : Banque de France, Annexes au rapport annuel, 2000.

Banque de France, Annexes au rapport annuel, 2000.

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Notes

  • (*)
    Direction des Relations Économiques Extérieures – Ministère de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. E-mail : vvincent. aussilloux@ dree. org Au moment de la rédaction de cet article V. Aussilloux travaillait à la Direction de la Prévision.
  • (**)
    CATT – Université de Pau et des Pays de l’Adour.
  • (1)
    On peut notamment se référer au rapport Arthuis (1993), qui développe une telle analyse.
  • (2)
    Voir pour quelques références génériques Mundell (1957), Markusen (1983), Wong (1986) et Baldwin (1994).
  • (3)
    L’équivalence entre équilibre à prix flexibles des facteurs et équilibre à prix rigides prévaut de façon très générale sous les hypothèses que les préférences des consommateurs sont identiques, homothétiques et que leur offre de facteurs est inélastique. Voir Bec et alii (1998).
  • (4)
    Sur la sensibilité des résultats aux hypothèses choisies dans un modèle avec mobilité des biens et fixité des facteurs, on peut consulter Bec et alii (1998). Pour un résumé technique, voir Aussilloux et Cheval (1999).
  • (5)
    Voir Aussilloux (1997) pour constater que les comportements stratégiques des entreprises peuvent induire des effets contre intuitifs de l’investissement sur l’emploi, dans le cadre de l’analyse factorielle en concurrence imparfaite.
  • (6)
    Les importations de biens intermédiaires peuvent représenter plus de 50% des importations totales (Fontagné et alii, 1996). En 1992, c’est le cas pour les importations de l’Union Européenne à 12 en provenance des États-Unis (50,2 %), de l’AELE (58 %) ou du Canada (61,3 %). Les importations de biens intermédiaires des États-Unis en provenance de l’ex-URSS représentent plus de 75 % des importations bilatérales totales. Dans le cas de la France, 66 % des importations totales sont des importations de biens intermédiaires (Fontagné, 1991).
  • (7)
    Au niveau mondial, on évalue le commerce intra-firme à environ un tiers du commerce total (Markusen, 1995). Voir également la note n°28.
  • (8)
    Voir notamment Caves (1982) pour une justification détaillée de l’argument ainsi que Mucchielli (1999) pour une revue exhaustive des théories en présence.
  • (9)
    Voir notamment Markusen (1995), Brainard (1993), Carr et alii (1998).
  • (10)
    La segmentation horizontale est dominante pour Brainard (1993 et 1997), Markusen (1984), Horstmann et Markusen (1987 et 1992), Markusen et Venables (1997 et 1998). La segmentation verticale est dominante pour Fors et Kokko (1999). Le modèle hybride est dominant pour Carr et alii (1998), Ekholm (1995,1997,1998a, 1998b), Markusen et Maskus (1999) ainsi que Markusen (1997).
  • (11)
    La Banque de France fonde la distinction entre investissements directs et de portefeuille sur ce critère, depuis 1996.
  • (12)
    Critère distinctif employé par la Banque de France jusqu’en 1996.
  • (13)
    En 2000, le seul rachat d’Orange par France Télécom couvre ainsi plus du quart des investissements français sortants (DREE, 2002).
  • (14)
    Le stock d’investissement est mesuré par la valeur comptable de la part du capital - le seuil de participation pris en compte est de 10 % - et des réserves détenues dans la société non résidente, augmentée des prêts et avances de la société mère à la filiale.
  • (15)
    Cf. Klodt et Maurer (1996).
  • (16)
    Klodt et Maurer (op. cit.) font la même constatation dans le cas allemand.
  • (17)
    Cf. Houdebine et Topiol-Bensaïd (1999).
  • (18)
    Cf. Hatem (1998), op. cit. Voir aussi le rapport 1999 de la CNUCED, p. 51.
  • (19)
    Voir Wheeler et Mody (1992), Jost (1997), Martin et Velasquez (1997), Pain et Lansbury (1997) et Hubert et Pain (1999), entre autres.
  • (20)
    Sur la relation entre taux de change et flux entrants d’IDE, voir Benassy-Quéré et alii (1999).
  • (21)
    Voir, sur données américaines, Brainard et Riker (1997a et b) ; sur données suédoises, Hatzius (1997a) ; sur données allemandes, Döhrn (1997); sur données françaises, Chédor et Mucchielli (1998). Voir aussi Slaughter (1995), Slaughter et Swagel (1997), Hatzius (1997b), et Zhao (1998). Pour une revue de ces études, voir Andersen et Hainaut (1998).
  • (22)
    Voir notamment Lipsey (1994 ), Blomström et alii (1997) et Lipsey (1999).
  • (23)
    Voir sur ce point Graham et Krugman (1989, p. 62) ou Moran (1997).
  • (24)
    Voir pour des interrogations du même type Guimbert et Levy-Bruhl (2002), dans ce même numéro.
  • (25)
    Voir Feliciano et Lipsey (1999) sur données américaines.
  • (26)
    Voir Blomström, Lipsey et Kulchycky (1988), Lispsey et Weiss (1984), Lipsey et Kravis (1988), Lipsey (1994) et Blomström et alii (1997).
  • (27)
    Pour les États-Unis, Lipsey et Weiss (1984), Blomström et alii (1988), Hufbauer et alii (1994), Lipsey (1994), Andersen et Hainaut (1998) trouvent également une relation positive mais faible. Pour l’Allemagne, le Japon et l’Autriche, le même type de résultats est observé (Pfaffermayr, 1994 ; Klodt et Maurer, 1996; Andersen et Hainaut, 1998).
  • (28)
    En 1994, le poids des échanges intra-groupe dans les échanges totaux de la France était de 40 % à l’exportation et de 18 % à l’importation.
  • (29)
    Les effets nets de l’IDE apparaissent considérablement plus limités pour la France si l’on s’appuie sur des estimations purement nationales. En effet, les résultats présentés ici sont menés sur la base de calculs sur les données d’une quinzaine de pays industriels (1984-1993). En moyenne 1 dollar d’IDE sortant donne lieu à 1,9 dollars d’exportations nettes et 1 dollar d’IDE entrant donne lieu à 1,6 dollars d’importations nettes. Si les calculs sont menés sur la France seule, 1 dollar d’IDE sortant donne lieu à 0,4 dollar d’exportations nettes seulement et 1 dollar d’IDE entrant donne lieu à 0,8 dollar d’importations nettes.
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