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Article de revue

Les banques comme vecteurs et amplificateurs des chocs financiers : le canal du capital bancaire

Pages 65 à 95

Notes

  • [1]
    Grégory Levieuge, Chercheur, Laboratoire d’Économie d’Orléans (LEO), Faculté de Droit, d’Économie et de gestion (gregory. levieuge@ univ-orleans. fr).
  • [2]
    Si néanmoins les travaux théoriques s’appuient sur un seuil légal d’exigence en fonds propres, c’est parce qu’il réduit à deux le nombre de configurations à étudier : la contrainte est serrée ou non. Voir Peek & Rosengren (1995b) par exemple.
  • [3]
    Voir Myers & Majluf (1984), Bolton & Freizas (2001), Greenwald & Stiglitz (1990), Calomiris & Hubbard (1995), Stein (1998) et Cornett & Tehranian (1994) pour une justification portant sur les firmes et les banques, à la fois sur le plan théorique et empirique.
  • [4]
    C’est ce que trouvent aussi Hancock & Wilcox (1992), Hall (1995) et Haubrich & Wachtel (1993).
  • [5]
    Voir par exemple Shrieves et Dahl (1995) ; Jacques et Nigro (1997) ; Wall et Peterson (1995) ; Moore (1992) ; Cantor et Johnson (1992) ; Baer et McElravey (1993) ; Brinkmann et Horvitz (1995) ; Furfine (2000).
  • [6]
    C’est-à-dire l’ensemble des mécanismes institutionnels assortis aux prêts ou coût du crédit dans un sens très large : tarif, maturité, garanties, lien avec le prime rate, etc.
  • [7]
    Le graphique A1.3 montre que le taux d’intérêt à 10 ans sur obligations d’État a fortement chuté à partir de 2000.
  • [8]
    Les séries de crédits, billets de trésorerie, crédits commerciaux, stocks d’obligations privées et publiques sont exprimées en termes réels (dollars constants de 1996) et en base 1 au trimestre au cours duquel s’est manifesté le choc (2000 Q2). Elles sont ensuite exprimées en log. Les tendances historiques sont construites à partir des taux de croissance respectifs moyens sur la période 1956-2002.
  • [9]
    La baisse du mix amorcée entre t = – 2 et t = – 4 s’explique par la remontée du crédit inter-entreprises. Conjointement, le crédit bancaire connaît une évolution somme toute assez fidèle à sa tendance. Cette diminution prématurée n’est donc pas susceptible de remettre en cause l’identification des effets d’offre, d’autant que le mix demeure au-dessus de sa tendance.
  • [10]
    La variable mix remonte entre t = 4 et t = 6 sous l’impulsion de la baisse conjointe des deux substituts. Mais le crédit bancaire continue de baisser. De plus, si cette courte phase nuance l’effet d’offre au sens strict, le mix n’en demeure pas moins sous sa tendance historique, et 10 trimestres après le krach, il est nettement en dessous de son niveau de 2000 Q2.
  • [11]
    Toutefois, le fait que les conditions de crédits n’aient pas plus augmenté pour les petites entreprises que pour les grandes, comme l’indique le graphique A1.2, tend d’emblée à nuancer le rôle de l’accélérateur financier, au profit du canal du capital bancaire.
  • [12]
    Sauf indication contraire, la période d’estimation des modèles VAR correspond à 1990 Q1 – 2002 Q4. Le nombre de retards est déterminé par application du critère AIC. Les variables intégrées dans le VAR sont stationnaires, différenciées une fois au besoin. Enfin, si aucune relation de co-intégration n’a été décelée, il n’empêche qu’à court terme, la structure de bilan des banques (i.e. leur richesse) peut influer sur leur comportement d’offre. C’est précisément la relation recherchée ici.
  • [13]
    Le taux d’intérêt à trois mois, susceptible d’engendrer une interférence entre le crédit et les indices, a aussi été introduit en tant que variable de contrôle (en différence première par souci de stationnarité). Le tableau A1.1 indique que cela ne perturbe pas les résultats présentés dans le tableau 3.
  • [14]
    Conformément à l’intuition, la causalité inverse est également acceptée : l’abondance de crédits alimente la croissance boursière. De plus, à titre indicatif, la causalité de l’indice proprement bancaire DSB sur les crédits est plus confortablement acceptée au seuil de 5 %.
  • [15]
    Notons que si la variable mix constitue une bonne mesure de l’offre, alors le fait que le lien mix/DSF soit supérieur au lien mix/DSNF constitue un autre signal de l’insuffisance de l’accélérateur financier à expliquer le recul du crédit.
  • [16]
    L’indice pris en compte dans le VAR est la moyenne des deux indices relatifs d’une part aux grandes entreprises et d’autre part aux petites entreprises.
  • [17]
    La construction de l’échantillon est détaillée en annexe 2. Au vu des faits saillants mis en évidence dans la section précédente, l’absence de données relatives aux années 2001 et 2002 limite l’étude des effets de la position en capital des banques en phase de troubles financiers aigus à la seule année 2000.
  • [18]
    La concentration du capital constituerait probablement un meilleur facteur de classification a priori. Mais cette donnée ne figure pas parmi les observations disponibles.
  • [19]
    Suivant la définition figurant dans la base de données, une banque n’est pas considérée comme contrainte si elle affiche un ratio de capital total sur “actif total ajusté” supérieur ou égal à 8 % (voir détails en annexe).
  • [20]
    Seules les banques du second quartile affichent curieusement une croissance des crédits.
  • [21]
    Le problème potentiel de simultanéité entre le crédit et le ratio de capital, tel que l’illustrent les résultats du quatrième quartile, justifie le recours à ce type de méthode. Sinon, un accroissement des crédits, toute chose égale par ailleurs, provoque une baisse des ratios de solvabilité et risque de donner lieu à un lien négatif entre les deux.
  • [22]
    S’ils sauvegardent en partie la solvabilité des banques, les seuils réglementaires amplifient et creusent les cycles (Borio, Furfine et Lowe, 2001).
  • [23]
    Pour une présentation et une discussion détaillée du provisionnement dynamique, voir Jaudoin (2001).
  • [24]
    L’auteur tient à remercier J.-P. Pollin pour ses commentaires, ainsi que les participants de la journée du GDR Économie Monétaire et Financière sur le thème “Prix d’actifs, information et intervention des banques centrales” (26 mars 2003 au CEPII, Paris) et les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leurs suggestions. Il est seul responsable d’éventuelles erreurs.

1La littérature souligne trois canaux de transmission des prix d’actifs à la sphère réelle : effets de richesse, ratio Q de Tobin et accélérateur financier. Cependant, ces mécanismes de transmission accordent une place insuffisante au comportement des intermédiaires financiers. Même dans la théorie de l’accélérateur financier, où la prime d’agence fluctue de manière endogène à la structure de bilan des emprunteurs, les banques se voient accorder un comportement relativement passif. En particulier, l’impact de leur richesse nette (leurs fonds propres) sur les conditions auxquelles elles empruntent et elles prêtent est totalement délaissé. Pourtant, le problème du financement des banques se pose dans les mêmes termes que celui des entreprises. Parce qu’il existe un défaut d’information entre elles et leurs créanciers (asymétrie d’information ayant trait à leurs intentions et à leur résultat), elles doivent supporter une prime de financement externe, fonction de leur position bilancielle. En ignorant cet aspect, ces canaux négligent le fait que les banques sont devenues, avec le processus de libéralisation financière, des acteurs à part entière sur les marchés financiers, comme en témoignent les processus de marchéisation, de mobiliérisation des bilans et le développement spectaculaire des opérations de hors-bilan.

2L’ensemble de la littérature relative au credit crunch – particulièrement prolifique dans le sillage de la mise en place des accords de Bâle au début des années quatre-vingt-dix – souligne avec insistance l’influence déterminante de la position en capital des banques sur leur comportement d’offre de prêts. Partant, si la richesse nette des créanciers influe sur l’octroi de financements, si les banques sont davantage exposées aux marchés financiers, et si elles constituent des bailleurs de fonds essentiels pour certaines firmes, alors un choc financier profond risque de se propager avec vigueur par leur intermédiaire.

3Suivant cette logique, une littérature naissante tente d’éclairer le fonctionnement du mécanisme par lequel les banques creuseraient les cycles économiques. En référence aux travaux récents de Blum & Hellwig (1995), Van Den Heuvel (2002a) et Chami & Cosimano (2001), les termes de “canal du capital bancaire”, ou “accélérateur financier bancaire” sont employés pour désigner la séquence suivante :

4Prix d’actifs ? richesse nette des banques ? offre de crédits? activité économique.

5Un krach boursier par exemple érode la richesse nette des banques, que ce soit par le biais des pertes sur portefeuille d’actifs, des pertes en termes de capitalisation ou de la diminution des bénéfices mis en réserve. Les établissements financiers ont alors deux possibilités : soit ils réduisent leur offre de crédit, soit ils essaient d’émettre du nouveau capital. Cependant, cette alternative est très coûteuse si l’opération s’effectue dans l’urgence et qui plus est dans un contexte de morosité financière. Si bien que finalement, les banques qui subissent une détérioration de leur bilan se voient contraintes de restreindre leurs prêts. Cette restriction pèse sur les capacités productives des firmes dépendantes du financement intermédié et donc sur l’activité macroéconomique.

6Les deuxième et troisième maillons de ce mécanisme sont désormais assez bien connus. D’une part, de nombreux travaux attestent de la sensibilité des banques aux cycles financiers. D’abord, dans la lignée de l’analyse développée par Kindelberger (1996), les crises financières sont l’aboutissement d’un épisode spéculatif auquel le comportement mimétique des banques n’est pas étranger. La perte de vue des fondamentaux profite également à la formation d’une myopie face au désastre (Minsky, 1980). Cédant à l’euphorie ambiante, les banques espèrent réaliser des gains sur des opérations financières déconnectées de la sphère réelle. Pendant la formation d’une bulle, la probabilité subjective d’occurrence de désastre décroît avec le renforcement illusoire de la santé financière des banques, ce qui conduit ces dernières à sous-estimer les risques et à prêter de manière excessive. En réalité, la qualité de l’actif bancaire (mais aussi du passif coté) se détériore sans qu’elles en prennent conscience (Herring, 1999). Dès lors que le retournement de cycle survient, l’exposition excessive au risque se révèle, et une phase de détresse financière marquée par une frilosité tout aussi excessive des banques se substitue à l’euphorie (Miotti et Plihon, 2001). Ensuite, en favorisant le basculement d’une logique d’endettement administré vers une logique de marchés financiers libéralisés, la libéralisation financière a contribué à établir un lien entre activité bancaire et mouvements financiers (Plihon, 1999).

7D’autre part, la corrélation entre l’ output gap et le rapport crédit/PIB n’a cessé de se resserrer au cours des deux dernières décennies, pour atteindre 0,93 sur la période 1992-2002 aux États-Unis. La vaste littérature relative au canal du crédit indique à quel point les décisions des banques en matière d’octroi et de tarification des prêts, influencées par le niveau de risque global et les garanties offertes par les emprunteurs potentiels, influent sur l’activité économique.

8Ces constats établis, cet article se concentre sur l’étude du cœur du canal du capital bancaire, à savoir le lien entre fonds propres et offre de crédits. Nous procédons dans un premier temps à une synthèse des nombreuses contributions qui examinent les caractéristiques pouvant être rattachées à cette articulation centrale. La phase de credit crunch enregistrée aux États-Unis au début des années quatre-vingt-dix a suscité à elle seule une littérature pléthorique, qui souligne l’importance de la santé des banques sur leur comportement d’offre de fonds. Les cas scandinaves et japonais offrent d’autres indices tout aussi probants. Il en ressort que les banques proches des seuils de capitalisation exigés (ou déjà en deçà) ont effectivement tendance soit à rationner le crédit (consommateur de Cooke), soit à imposer des conditions de prêts plus sévères.

9Ces arguments sont dans un second temps évalués à l’aune du comportement des banques américaines au cours du dernier cycle financier. Cet examen statistique est réalisé en deux temps, d’abord sur le plan agrégé, puis sur données individuelles. Les résultats obtenus tendent à indiquer que l’affaiblissement de la richesse nette des banques, consécutif au repli des prix d’actifs au début des années 2000, peut expliquer une partie au moins du ralentissement de l’offre de crédits conjointement observé. Le recul des prêts coïncide en effet avec l’accroissement du nombre de banques jugées contraintes au vu des critères d’exigence en fonds propres. Conformément à la théorie du capital bancaire, ce sont surtout les petites banques, celles qui éprouvent sans doute le plus de difficultés à se recapitaliser, qui sont à l’origine de l’affaissement de l’offre de crédits.

10Enfin, nous concluons sur la pertinence de ce canal comme mécanisme de transmission à part entière de la politique monétaire, qui déplace la question de la neutralisation de l’impact des mouvements des prix d’actifs sur la sphère réelle aux frontières de la politique monétaire et de la politique prudentielle.

L’influence des capitaux propres bancaires sur l’offre de crédit

11Le cœur du canal du capital bancaire concerne l’impact de la structure de bilan des banques sur le volume et/ou les conditions de prêts aux entreprises. Des éléments à la fois théoriques et empiriques permettent d’expliciter ce lien.

Relation théorique entre capital bancaire et crédits

12Sur le plan macroéconomique, Blum et Hellwig (1995) soulignent trois conditions nécessaires à l’existence d’un canal du capital bancaire :

  • H1 : les banques sont contraintes de respecter certaines exigences prudentielles ;
  • H2 : il est coûteux pour les banques de se recapitaliser en temps de détresse financière ;
  • H3 : le prêt bancaire constitue une source de financement externe indispensable pour de nombreuses firmes.
Ces trois hypothèses fondatrices méritent une grande attention. D’abord, on peut s’interroger sur le caractère nécessaire d’une contrainte réglementaire de fonds propres pour fonder un lien entre le capital des banques et leur activité de crédit. Il n’est en effet pas abusif de considérer que les dirigeants ont, en l’absence de toute réglementation, un objectif spontané de fonds propres destiné à limiter le risque de faillite. Ce faisant, la richesse bancaire constitue un signal censé réduire les asymétries d’information qui existent entre les établissements et leurs pourvoyeurs de fonds. En ce sens, une banque faiblement capitalisée et dévaluée en conséquence par les agences de notations subit des pressions financières (Hancock et Wilcox, 1992) qui se traduisent par des difficultés de (re)capitalisation. Du coup, même en l’absence de contrainte légale, on peut raisonnablement s’attendre à ce que la baisse de leur capital force les banques à adopter un comportement plus prudent en termes d’offre de prêts [2].

13Ensuite, l’assertion H2 se fonde sur l’hypothèse d’un marché du capital imparfait. Les créanciers des banques ne connaissent pas parfaitement les intentions de ces dernières, qui supportent en conséquence une prime d’agence. Si bien qu’en cas de troubles financiers aigus, tout capital nouveau ne peut être émis à un prix jugé raisonnable par les dirigeants [3]. Enfin, H3 traduit le fait que le marché du crédit est lui aussi imparfait. Une littérature abondante, fondée sur la théorie de l’agence, démontre qu’il n’y a pas d’autres modes de financement possible que le financement bancaire pour les entreprises à forte asymétrie d’information.

14Sous ces conditions, Blum et Hellwig (1995) montrent qu’un choc récessif réduit la capacité des firmes à honorer leur dette et détériore en conséquence la position bilancielle des banques. Incapables de lever du capital nouveau, ces dernières sont conduites à restreindre leurs crédits, sous peine sinon de violer les exigences de fonds propres. Ce comportement amplifie le mécanisme auto-entretenu de déflation par la dette : “A rigid link between bank equity and bank lending may act as an automatic amplifier for macroeconomic fluctuations, inducing banks to lend more when times are good and to lend less when times are bad, thus reinforcing any underlying shocks” (p. 740). Dans la même veine, Furfine (2000) et Gorton & Winton (1998) montrent que la richesse bancaire n’est pas neutre sur les capacités de financement des banques.

15Au regard de ces conclusions, l’étude de l’incidence des ratios réglementaires – et donc du capital – sur les mécanismes de transmission des chocs de politique monétaire constitue un prolongement logique de cette littérature. Les travaux théoriques de Tanaka (2002), Bolton & Freixas (2001), Van Den Heuvel (2002a) Yuan & Zimmermann (1999) et Chami & Cosimano (2001) creusent justement cette piste. Ce faisant, ils renforcent les arguments avancés jusqu’ici.

16Notons par ailleurs que le cadre comptable régissant la prise en compte des risques n’est pas étranger à la procyclicité du capital des banques. Les dotations pour provisions ne sont enregistrées qu’une fois les pertes avérées. Pourtant, le risque de crédit naît dès la signature du contrat et perdure sur toute sa durée. Le provisionnement “statique” explique donc en partie la mauvaise perception des risques et la dégradation latente des bilans bancaires en phase croissante du cycle. Partant, l’enregistrement des pertes en phase décroissante du cycle pèse d’autant plus sur la position en capital des banques et donc sur l’offre de crédit.

Accumulation d’indices empiriques

17Globalement, deux types de méthode ont été employés pour étudier empiriquement le lien entre capitaux propres et offre de crédits. La première consiste à montrer que la mise en place d’un seuil réglementaire de fonds propres a entraîné une phase d’ajustement des bilans qui a pesé sur la croissance des crédits. La seconde s’appuie sur des données individuelles et vise à montrer que les banques les mieux capitalisées ont été plus généreuses en matière de crédit que leurs homologues moins bien fournies. Dans les deux cas, l’impact supposé des fonds propres est mesuré à l’aune de l’élasticité estimée du taux de croissance du crédit au capital bancaire.

18Dans cet esprit, Bernanke et Lown (1991) indiquent que la baisse du capital des banques a été le facteur le plus déterminant du recul de l’offre de prêts lors de la récession américaine de 1990. Peek et Rosengren (1995a) parviennent à la même conclusion. Suivant le scénario de capital crunch, les pertes induites par l’effondrement des cours immobiliers ont pesé sur les résultats des banques et donc sur leur capital. Partant, de nombreux établissements ont dû vendre des titres et renoncer à prêter. Les auteurs soulignent que la détention de titres publics a davantage augmenté et les prêts davantage diminué par rapport à leur tendance historique, en particulier chez les banques les moins bien capitalisées initialement [4]. De plus, les résultats économétriques ne rejettent pas le lien causal (positif) entre le ratio capital/actifs et la croissance des crédits. En somme, la plupart des travaux étudiant dans cette lignée le lien entre capital des banques, prêts bancaires et ratios prudentiels attribuent effectivement le credit crunch américain aux lourdes pertes en capital des banques, combinées aux nouvelles exigences prudentielles [5].

19Outre les États-Unis, le Japon constitue un sujet d’étude intéressant à plusieurs égards. D’abord, les banques japonaises détiennent un portefeuille d’actions très volumineux, puisqu’elles sont généralement actionnaires des compagnies avec lesquelles elles entretiennent des relations de long terme. Ensuite, étant donnée cette caractéristique, les régulateurs japonais sont parvenus à imposer les plus-values latentes comme partie intégrante du Tier II du ratio Cooke. Par conséquent, autant les fortes croissances boursières et immobilières de la fin des années quatre-vingt ont renforcé les ratios de solvabilité apparents des banques japonaises, autant l’effondrement des cours au début des années quatre-vingt-dix a exigé des ajustements brutaux. Les banques japonaises ont certes accru leurs émissions de dettes subordonnées, afin de limiter la baisse du ratio capital/actifs pondérés. Mais cette réaction n’a pas empêché le ratio Cooke de nombreux établissements de tomber en dessous de la limite réglementaire des 8 %. Ito et Sasaki (1998) rejoignent Honda, Kawahara et Kohara (1995) pour conclure que les établissements affichant les ratios les plus faibles ont eu tendance à réduire leurs prêts. Par conséquent, si comme l’indique Gibson (1995), une fois contrôlés leurs cash-flows et leur valeur de marché, les firmes rattachées aux banques les moins saines ont clairement moins investi que les autres, la faiblesse de certaines institutions doit expliquer une partie de la mauvaise conjoncture nippone.

20Enfin, si les encours de crédit ont continué à augmenter au Japon, quoiqu’à un rythme faible, les banques japonaises vont en réalité surtout se désengager d’une partie de leurs activités à l’étranger, et en particulier aux États-Unis. C’est un point étudié en détail par Peek et Rosengren (1997). Ce faisant, ces auteurs proposent une méthode singulière d’identification des seuls effets d’offre. En effet, les estimations réalisées sur la période 1988-1995 confirment que la baisse du capital des maisons mères a eu un impact significatif sur le comportement de prêt des agences nippones aux firmes américaines (pourtant demandeuses de fonds, au sortir de la récession américaine). Ainsi, ces résultats permettent de lever toute ambiguïté quant à l’incidence de la capitalisation bancaire sur l’offre de prêts.

21Si un large consensus s’accorde donc à admettre l’influence du bilan bancaire sur le volume de financement consenti, le coût et les conditions de crédit [6] sont également visés. Des preuves convaincantes sont apportées par Hubbart, Kuttner et Palia (1999). Leur étude s’appuie sur un échantillon de 11 621 contrats concernant 4 840 banques, rassemblant des informations relatives à la fois aux caractéristiques des prêts, des emprunteurs et des créanciers. Ils montrent d’abord que les banques sous-capitalisées infligent un taux d’emprunt supérieur à la moyenne. En ce sens, ils généralisent les indices relevés par Lown et Peristiani (1996) pour la seule période de credit crunch des années quatre-vingt-dix. Sauf que leur apport est encore plus déterminant, dans la mesure où les caractéristiques de l’emprunteur sont neutralisées. L’effet alors mis en évidence est indépendant de celui théoriquement imputable à l’accélérateur financier. Enfin, ils montrent que ce sont essentiellement les firmes à coût d’information élevé (les petites entreprises ou celles dont la dette n’est pas notée) qui subissent le resserrement du coût et de l’emprunt.

22Ainsi, à la lumière de ces différents travaux empiriques, il est possible d’affirmer que la richesse nette des établissements bancaires influe sur le volume des fonds offerts et/ou sur le coût du crédit. Précisons que, de façon générale, la relation entre capital bancaire et offre de crédit résiste à la prise en compte des ajustements destinés à préserver le capital réglementaire (vente de titres, titrisation, émission de capital nouveau ou de dettes subordonnées).

23Les sections suivantes proposent de prolonger cette recherche d’indices empiriques en se concentrant sur le dernier cycle financier, marqué par une rapide croissance des prix d’actifs entre 1996 et 2000, puis par un effondrement tout aussi spectaculaire. Bien que tous les pays industrialisés soient concernés, cet examen porte sur l’économie américaine, du fait de l’abondance et de la disponibilité des données bancaires. Il s’appuie d’abord sur des données agrégées, puis sur des données individuelles bancaires.

Examen empirique sur le plan agrégé

24Avant d’étudier la manifestation du canal des fonds propres bancaires, il est nécessaire d’évaluer l’évolution de l’offre de crédit dans le sillage de l’effondrement des cours boursiers.

Un ralentissement de l’offre de crédit ?

25De façon générale, les travaux qui gravitent autour du crédit se heurtent au problème de distinction entre les effets d’offre et les effets de demande (Sharpe, 1995).

26Les propositions de méthodes pour contourner cet écueil sont rares. Tout au plus, certaines constructions permettent d’approcher les effets d’offre et, moyennant certaines précautions, d’avoir une idée plus précise sur les ajustements opérés sur le marché du crédit. Ces approximations permettent de renforcer une intuition éveillée par un ensemble d’observations. Dans cette lignée, Kashyap, Stein et Wilcox (1993) – KSW par la suite – ont proposé une méthode d’identification des effets d’offre qui consiste à construire un indice proxy de l’offre de crédits, noté mix et défini par le rapport des crédits bancaires sur le financement total, soit :

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equation im1

28L’idée est de mettre en perspective le crédit bancaire avec ses deux principaux substituts non bancaires : les billets de trésorerie et le crédit inter-entreprise. Suivant cette logique, une baisse du mix, correspondant à une diminution des crédits associée à une augmentation ou une moindre diminution de ses substituts, peut être interprétée comme une baisse de l’offre de crédits. Une diminution de la demande se traduirait au contraire par une stagnation du mix, les substituts déclinant dans les mêmes proportions que le crédit. Plusieurs remarques préliminaires s’imposent.

29D’abord, KSW n’ont pas initialement développé cet indice pour étudier la validité empirique du canal du capital bancaire. Observant que les phases de contractions monétaires coïncidaient avec une baisse du mix, ils pensaient plutôt valider la manifestation du canal du crédit. Mais cette conclusion a été critiquée, notamment par Oliner et Rudebusch (1995, 1996). Selon eux, les mouvements du mix observés par KSW sont en fait une réallocation de tous les types de financement des petites entreprises vers les grandes ; un mécanisme de fuite vers la qualité fait en effet baisser la part des crédits bancaires de l’ensemble des financements puisque les grandes entreprises ont moins recours aux crédits bancaires que les petites. Autrement dit, plutôt qu’une baisse des crédits bancaires conjointe à une hausse des billets de trésorerie, ils observent un accroissement des deux, mais dans des proportions moindres pour le crédit, d’où une baisse du mix.

30En somme, c’est l’interprétation de KSW plus que la variable mix elle-même (d’ailleurs reprise par Oliner et Rudebusch dans leurs travaux), qui s’est trouvée remise en cause. De plus, les mises en garde de Oliner et Rudebusch au sujet de l’utilisation de cette proxy ne visent pas le canal du capital bancaire. En effet, contrairement à ce qui peut être observé en phase de restriction monétaire, le phénomène de fuite vers la qualité se traduit par une ruée sur les titres publics (et non pas vers les bons risques privés) lorsque le choc est d’origine financière [7]. C’est d’ailleurs un point marquant des différents troubles financiers depuis la crise asiatique de 1997.

31Ensuite, si un resserrement monétaire intervient généralement en phase haute du cycle économique, à un moment où les entreprises manifestent la volonté de financer des projets d’investissement, un choc financier combiné à un ralentissement économique est susceptible de se traduire par une baisse conjointe de l’offre et de la demande. D’un côté, parce que la richesse nette des emprunteurs et des créanciers est amoindrie, les banques sont moins enclines à prêter. De l’autre, le climat des affaires incite peu les firmes à investir. L’indice de demande de crédits élaboré par le Senior Loan Officer Opinion Survey indique en effet que 60 % des banques perçoivent un ralentissement important de la demande de prêts à la fin de l’année 2001 (graphique A1.1, annexe 1). Ceci complique a priori la distinction offre/demande, certes. Mais il n’empêche que le recul de l’offre peut être autant, si ce n’est plus, marqué que celui de la demande. Les enseignements pouvant être tirés de la variable mix sont à cet égard précieux.

32Le graphique 1 permet d’abord d’étudier les mouvements de chacune des variables composant le mix (et le mix lui-même) à l’aune de leur tendance historique respective [8]. Les séries sont normalisées à zéro à la date d’occurrence du choc (Q2 2000). La croissance tendancielle de chaque variable est représentée, sur chaque cadran, par une droite sans marque. Les graduations sur l’axe des abscisses traduisent les trimestres avant et après le choc.

Graphique 1

Composantes du mix, mix et éléments de l’actif

Graphique 1

Composantes du mix, mix et éléments de l’actif

33On observe un relâchement spectaculaire des prêts bancaires à partir du cinquième trimestre suivant le choc. Un tel décalage est justifiable par la nature contractuelle des crédits. Le ralentissement du crédit inter-entreprise intervient également au bout de cinq trimestres. Il répond à la baisse induite ou anticipée de l’activité. Enfin, conformément à l’intuition évoquée plus haut, ce krach s’accompagne d’un moindre recours aux billets de trésorerie, passé cinq trimestres. Cette considération ne compromet pas l’identification des effets d’offre de financement, qui concernent à la fois les crédits et les titres privés, mais atteste, si besoin était, de la difficile distinction entre effets d’offre et effets de demande.

34Pour autant, la mise en perspectives des trois modes de financement permet d’établir un constat assez clair. En effet, la variable mix se positionne en dessous de sa tendance historique dès l’amorce du krach [9]. L’écart tend d’ailleurs à se creuser à partir de huit trimestres [10]. Le graphique 2 indique en ce sens que la part des prêts bancaires dans l’actif total des banques américaines chute dans le sillage du krach, avec une diminution plus marquée à compter du troisième trimestre suivant le choc. Par conséquent, il n’est pas possible de rejeter l’hypothèse de baisse de l’offre de prêts bancaires. Les deux derniers cadrans du graphique 1 renforcent cette idée : les titres privés (et étrangers) à l’actif des banques ont considérablement reculé à partir du second semestre de 2000. L’affaiblissement de l’offre de crédits traduit donc un repli général du financement intermédié, plus qu’une substitution dans les modes de financement. De plus, le cadran suivant indique une nette progression du recours des banques aux titres publics, manifestation du phénomène de fuite vers la qualité.

Graphique 2

Ratio crédits bancaires/Actif total des banques américaines

Graphique 2

Ratio crédits bancaires/Actif total des banques américaines

Manifestation conjointe de l’accélérateur financier et du canal du capital bancaire ?

35Le recul de l’offre de crédit peut être rattaché au canal du capital bancaire : face à l’effondrement de la valeur des portefeuilles d’actifs, de leur capitalisation et des bénéfices mis en réserve, les établissements de crédit ont pu être conduits à restreindre leur financement, sous peine sinon de présenter des ratios de solvabilité préoccupants. Mais en même temps, l’effondrement des garanties financières mobilisables par les emprunteurs potentiels a pu inciter les banques à exiger des conditions de financement drastiques. Le graphique A1.2 (annexe 1) indique en effet que les conditions de crédits se sont considérablement durcies depuis l’année 2000. Jusqu’à 60 % des banques interrogées ont reconnu exiger des conditions plus sévères auprès des grandes et moyennes entreprises à la fin de l’année 2000, niveau inégalé depuis la récession du début des années quatre-vingt-dix. Ce resserrement des conditions de crédit se manifeste en particulier par une plus forte exigence en termes de garanties et, dans une moindre mesure, par une augmentation du coût du crédit. Bien que certaines banques attribuent ce comportement à une détérioration courante ou anticipée de leur position en capital, il est difficile au vu de ces statistiques de déterminer si l’évolution observée du mix relève du canal de l’accélérateur financier ou du canal du capital bancaire [11].

36Une variable représentative de la santé financière des banques serait très utile pour isoler les effets imputables au seul canal des fonds propres bancaires. Dans une série d’études, Peek, Rosengren et Tootell (1999a, b, 2000) démontrent de façon très convaincante qu’un indice dérivé du système de notation bancaire CAMEL permet d’améliorer les projections de PIB, de chômage et d’inflation des prévisionnistes (qui ignorent cette information confidentielle). Surtout, ces auteurs apportent la preuve que cet indice traduit bien des effets d’offre. Il serait donc intéressant d’évaluer l’évolution du crédit depuis la fin des années quatre-vingt-dix à l’aune des notations des superviseurs. Malheureusement, cette information est indisponible, puisque confidentielle.

Mise en évidence des effets imputables au seul canal du capital bancaire

37Il faut donc trouver une méthode permettant d’isoler ces deux canaux. Une telle distinction serait possible en comparant la sensibilité de l’offre de crédit à un indicateur de richesse bancaire d’une part, et de richesse des firmes d’autre part. Les indices boursiers, qui sont justement disponibles en termes de secteurs d’activité, peuvent endosser le rôle de proxy de richesse. Ainsi, un moyen détourné de tester la sensibilité des banques à leurs fonds propres consiste à comparer le lien crédit/indice boursier bancaire au lien crédit/indice boursier non bancaire. La supériorité du premier sur le second constituerait alors une indication corroborant l’idée d’une propension des banques à prêter dépendante de leur richesse nette.

38Datastream calcule et fournit les quatre indicateurs suivants :

  • un indice regroupant la valeur de marché des banques (DSB) ;
  • un indice plus large regroupant les établissements financiers (DSF) ;
  • un indice global (DSG) ;
  • un indice global excluant les établissements financiers (DSNF).
À défaut d’un indice non bancaire, l’analyse qui suit se concentre plus précisément sur les indices des financiers (DSF) et des non financiers (DSNF). Certes l’indice DSF est plus large que DSB. L’information qu’il divulgue sur la valorisation des établissements bancaires est en ce sens moins précise. Mais, à la différence de l’indice DSNF, il intègre les banques (c’est ce qui importe qualitativement). La logique qui préside aux tests qui vont suivre est la suivante : est-ce que le lien DSF/crédits est plus éloquent que le lien DSNF/crédits ?

39Une première réponse partielle est fournie par le tableau 1, où figurent les coefficients de corrélation entre l’indice mix, indicateur d’offre de crédits, et les quatre indices boursiers considérés. Le classement suivant peut être établi : l’offre de crédit est plus liée à l’indice bancaire DSB qu’elle ne l’est à l’indice financier DSF. Le coefficient de corrélation affiché par ce dernier est lui-même supérieur à celui de l’indice global. Enfin, cet indice DSG, qui intègre les cotations des banques et des établissements financiers en plus des valeurs industrielles, s’avère être plus lié au crédit que ne l’est l’indice excluant les financiers (DSNF).

Tableau 1

Corrélations entre indices boursiers et variables mix

Tableau 1
1988-2002 ?DSB ?DSF ?DSG ?DSNF ?mix 0,26 0,24 0,19 0,17

Corrélations entre indices boursiers et variables mix

40Ce constat laisse supposer que l’offre de crédit serait effectivement plus sensible à la valeur de marché des financiers qu’à celle des industriels. Mais, parce que la relation entre les indices boursiers et le crédit peut être bi-causale, il est nécessaire d’approfondir cette observation à l’aide de tests de causalité à la Granger. Le tableau 2 rapporte les résultats obtenus à partir d’un VAR bivarié où, par souci de stationnarité, les variables mix et DSi (i = F, NF) sont exprimées en différence première [12]. Les variables dépendantes figurent en colonne, tandis que sur chaque ligne se trouvent les variables explicatives qui s’y rapportent. Les chiffres figurant dans la partie supérieure du tableau représentent les statistiques de Fisher.

Tableau 2

Tests de causalité : DSF, DSNF et mix

Tableau 2
Causalité à la Granger Avec indice DSF Avec indice DSNF ?mix ?DSF ?mix ?DSNF ?mix ?DSF 2,07* 2,46** 1,27 0,56 ?mix ?DSNF 1,54 1,27 1,13 1,40 Mesures de causalité à la Geweke (en %) Avec indice DSF Avec indice DSNF ?DSF ? ?mix ?mix ? ?DSF ?DSF ? ?mix 58,6** 39,2 2,20 ?DSNF ? ?mix ?mix ? ?DSNF ?DSNF ? ?mix 46,8 42,3 10,9 ? = causalité instantanée. Nombre de retards = 9. ** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 5 % et 10 %.

Tests de causalité : DSF, DSNF et mix

41Ces premiers résultats permettent d’observer qu’effectivement, si l’indice DSF cause la variable mix au sens de Granger (à 5 %), ce n’est pas le cas de la variable DSNF. De plus, la partie inférieure du tableau, qui apporte une mesure de causalité fondée sur la méthode de Geweke, indique que 58,6 % du lien total qui unit les variables DSF et mix est expliqué par la causalité qui va de la première vers la seconde (causalité acceptée au seuil de 5 %). Ces résultats résistent à la prise en compte simultanée de DSF et DSNF (tableau A1.1, annexe 1). Enfin, les causalités inverses et instantanées sont toujours rejetées. À titre indicatif, le même exercice réalisé avec l’indice bancaire DSB procure des résultats analogues à ceux obtenus avec l’indice DSF, à la différence près que la causalité de l’offre de crédit sur l’indice bancaire est alors elle aussi significative (à 10 %) et explique 43,5 % de la relation totale. Autrement dit, l’activité de crédit des banques favorise en retour leur valorisation.

42Comme la variable mix n’est qu’une approximation de l’offre du financement intermédié, le même exercice est à présent réalisé plus directement avec la série de crédits. Le calcul préliminaire des coefficients de corrélation fait apparaître une corrélation crédits/DSF supérieure à la corrélation crédits/DSNF. Cette observation est approfondie à l’aide d’un modèle VAR, où cette fois-ci l’output gap est pris en compte pour capter les effets conjoncturels de demande [13]. Le tableau 3 rapporte les résultats obtenus. La partie gauche du tableau indique que l’indice DSF cause le crédit au sens de Granger, au seuil de 10 % [14]. A contrario, la causalité de l’indice industriel (DSNF) est rejetée. Ce dernier résultat tend à conforter la cohérence de l’hypothèse testée, même si ces tests doivent être interprétés avec prudence, étant donné le nombre réduit de degrés de liberté.

Tableau 3

Tests de causalité entre DSF, DSNF et crédits

Tableau 3
Avec indice DSF Avec indice DSNF ?crédits ?DSF OG ?crédits ?DSNF OG ?crédits ?DSF OG 8,05*** 2,28* 4,94*** 2,08* 0,06 1,09 0,65 0,94 10,0*** ?crédits ?DSNF OG 4,03*** 0,44 2,39* 2,87** 0,50 1,96 0,89 0,72 12,5* Nombre de retards = 5. ***, ** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

Tests de causalité entre DSF, DSNF et crédits

43La littérature exposée supra stipule que la richesse nette des établissements financiers doit aussi influer sur les conditions de crédit. Certes, la détermination du coût du crédit est complexe, puisque celui-ci est multidimensionnel. Toutefois, l’ensemble des impératifs institutionnels assortis aux prêts se trouve synthétisé dans l’indice des “standards”, construit par le Senior Loan Officer Opinion Survey (graphique A1.2). Celui-ci intègre les conditions de crédit au sens large : la taille des lignes de crédit, le coût du crédit, les primes, les exigences de garantie, etc. Il existe deux versions de cet indice : l’une relative aux grandes entreprises, l’autre relative aux petites. Cette distinction va permettre d’isoler plus finement les effets imputables à l’accélérateur financier [15].

44Dès lors, si le canal du capital bancaire est en partie responsable de la procyclicité du crédit, en marge de l’accélérateur financier, alors la baisse de la valeur de marché des banques devrait affecter les conditions de financement aux grandes et petites entreprises, indistinctement. En d’autres termes, l’indice DSF devrait causer les conditions de crédit aux grandes entreprises, pour lesquelles l’indice boursier exclusivement industriel (DSNF) ne devrait pas avoir d’impact significatif (ces entreprises étant peu concernées par le mécanisme d’accélérateur financier).

45Cette hypothèse est testée à l’aide de trois modèles. Le premier est un VAR bivarié associant les indices DSF et DSNF à l’indice des conditions de crédit aux grandes entreprises (noté standards). Les résultats figurent dans le tableau 4. Une nouvelle fois, on constate que si l’indice des financiers cause les conditions de crédit aux grandes entreprises au seuil de 5 %, cette causalité est rejetée pour l’indice des non financiers. Selon les mesures de causalité à la Geweke, la causalité de DSF sur standards explique la moitié de la relation unissant les deux variables (au seuil de 5 %). Quoique plus faible en pourcentage, la causalité inverse ne peut être rejetée.

Tableau 4

Tests de causalité : DSF, DSNF et standards

Tableau 4
Causalité à la Granger Avec indice DSF Avec indice DSNF ?standards ?DSF ?standards ?DSNF ?standards ?DSF 0,34 2,68** 2,38* 1,78 ?standards ?DSNF 0,21 1,06 2,17* 3,08** Mesures de causalité à la Geweke (en %) Avec indice DSF Avec indice DSNF ?DSF ??standards ?standards ? ?DSF ?DSF ? ?standards 50,03** 37,17* 12,80** ?DSNF ? ?standards ?standards ? ?DSNF ?DSNF ? ?standards 33,34 54,27** 12,39* ? = causalité instantanée. Nombre de retards = 5. ** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 5 % et 10 %.

Tests de causalité : DSF, DSNF et standards

46Ensuite, afin d’évaluer la robustesse de ces estimations, deux modèles complémentaires sont considérés ; le modèle 2 intègre l’output gap, tandis que le modèle 3 prend en compte l’indice de demande [16] de crédit construit par le Senior Loan Officer Opinion Survey, noté dde (graphique A1.1). Les résultats sont rapportés dans le tableau 5. La prise en considération successive de ces deux variables ne permet pas de rejeter la causalité de l’indice financier sur les conditions de crédit (partie supérieure du tableau), qui demeure au seuil de 5 %, pas plus qu’elle ne permet de révéler une quelconque causalité de l’indice DSNF sur l’indice standard. Les résultats obtenus par ailleurs avec l’indice DSB confortent une nouvelle fois la cohérence des résultats obtenus.

Tableau 5

Robustesse de la causalité entre DSF, DSNF et standards

Tableau 5
Variables explicatives Modèle 2 Modèle 3 ?standards ?DSF OG ?standards ?DSF dde ?standards ?DSF OG dde 0,56 2,48** 0,94 – 2,00 1,53 0,64 – 1,75 1,44 14,8*** – 1,04 3,06** – 2,14* 2,36* 1,86 – 1,31 0,34 0,74 – 16,7*** ?standards ?DSF OG ?standards ?DSNF dde ?standards ?DSNF OG dde 0,58 0,70 0,58 – 2,25* 2,44* 1,37 – 0,92 0,61 12,2*** – 0,55 0,73 – 0,92 1,39 1,62 – 0,69 0,35 0,79 – 5,96** Modèle 2 : période d’estimation = 1990 Q1 – 2002 Q4. Nombre de retards = 5. Modèle 3 : période d’estimation = 1991 Q4 – 2002 Q4. Nombre de retards = 6. ***, ** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

Robustesse de la causalité entre DSF, DSNF et standards

47Si cette méthode doit théoriquement permettre d’isoler les effets imputables au mécanisme d’accélérateur financier, il faut se garder d’une conclusion hâtive condamnant ces derniers. Le tableau A1.3 rapporte que l’indice des seuls industriels (DSNF) cause l’indice des conditions de crédit aux petites entreprises (noté standardP) dans les modèles 2 et 3, aux seuils respectifs de 10 et 5 %.

48Enfin, un dernier test de contrôle permet de confirmer a posteriori que la variable mix est plus un indice d’offre que de demande. Cette vérification consiste à comparer le lien entretenu par cette variable avec un facteur de demande (dde) d’une part, avec un facteur d’offre (standards) d’autre part. Le tableau 6 présente les résultats des tests de causalité obtenus. Conformément à l’attente, il existe un lien très significatif entre les conditions de crédit et la variable mix, la première causant la seconde au seuil de 1 %. Certes, la variable mix est également liée à l’indice de demande, mais la causalité n’est alors acceptée qu’au seuil de 10 %, et le equation im9 associé est plus faible que celui de la précédente relation.

Tableau 6

Test de contrôle sur la variable mix

Tableau 6
Causalités mix/standards et mix/dde ?mix ?mix ?standards ?mix 4,53*** 6,51*** dde ?mix 2,35* 4,12*** – R2 = 0,45 – R2 = 0,38 Estimation : 1991 Q4 – 2002 Q4. Nombre de retards = 4. *** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 1 % et 10 %.

Test de contrôle sur la variable mix

49Ainsi, cette section a permis de montrer que l’indice boursier des établissements financiers – proxy de leur santé financière – est un déterminant de l’offre et des conditions de crédit. Le dernier cycle financier aux États-Unis a donc été témoin de l’influence du mécanisme d’accélérateur financier, en marge de celle – probante – du canal du capital bancaire.

Examen empirique sur données individuelles

50Cette section vise à affiner l’étude précédente en recourant à des observations individuelles. L’examen statistique s’appuie sur la base de données BHC Database qui regroupe les informations essentielles de l’ensemble des établissements financiers régulés par le Federal Reserve System, le Federal Deposit Insurance Corporation et le Comptroller of the Currency. Après nettoyage et cylindrage de la base, l’échantillon de travail se compose de 5 983 banques et s’étend sur la période 1995-2000 [17]. Comme l’existence d’asymétries d’information peut théoriquement influencer la capacité de certaines banques (les plus petites) à se recapitaliser, l’échantillon est partagé en quartiles selon la valeur de l’actif total des individus (en 1996) [18]. L’analyse permet de souligner trois constats.

51D’abord, le nombre de banques contraintes [19] en termes de ratio de capital s’est accru en 2000 (tableau 7). Alors que seulement 9 % des banques ne respectent pas le ratio réglementaire de fonds propres en 1996, elles sont presque 16 % fin 2000. Tous les quartiles sont concernés par cette fragilisation. Les banques du dernier quartile sont très nombreuses à ne pas respecter les mesures prudentielles (28 % en 2000). Plusieurs arguments peuvent expliquer ce constat : moindre difficulté pour se refinancer, plus forte activité de crédit consommatrice de ratio Cooke, argument du too big to fail.

Tableau 7

Part des banques contraintes d’après les critères de BHC Database

Tableau 7
En % Ensemble Quartile 1 Quartile 2 Quartile 3 Quartile 4 1996 9,0 4,2 5,3 9,2 17,3 1999 14,2 8,1 9,5 14,2 25,0 2000 16,0 8,5 11,1 16,3 28,0

Part des banques contraintes d’après les critères de BHC Database

52Ensuite, conformément à la théorie du canal du capital bancaire, il s’avère que ce sont les plus petites banques qui sont les plus sensibles à la structure financière de leur bilan. Le tableau 8 rapporte la valeur du coefficient de corrélation entre le taux de croissance moyen des crédits et la proportion moyenne de banques contraintes au sein de chaque quartile. Conformément à l’attente, le lien est négatif pour les trois premiers quarts de l’échantillon et décroissant avec la taille des banques. Le coefficient de corrélation atteint – 0,91 pour le premier quartile et s’avère plus élevé que celui obtenu pour les établissements du deuxième (– 0,67) et troisième quartile (– 0,37).

Tableau 8

Corrélation entre crédits et part des banques contraintes

Tableau 8
Quartile 1 Quartile 2 Quartile 3 Quartile 4 – 0,911 – 0,671 – 0,343 0,188

Corrélation entre crédits et part des banques contraintes

53Ce lien négatif est illustré sur le graphique 3. Ainsi, les petites banques, les plus sujettes aux asymétries d’information et partant les moins aptes à se recapitaliser en cas d’urgence, sont clairement les plus sensibles à leur position bilancielle. À l’opposé, la relation positive obtenue pour les plus grands établissements – dont l’activité de crédit a été très soutenue au cours de cette période (voir infra) – traduit sans doute le lien inverse suivant lequel plus les crédits augmentent et plus le ratio Cooke diminue.

Graphique 3

Lien entre crédits et nombre de banques contraintes

Graphique 3

Lien entre crédits et nombre de banques contraintes

54Des résultats similaires sont mis en évidence lorsqu’on étudie le lien entre le ratio de capital (défini comme la somme du Tier I et II que divisent les actifs pondérés par les risques) et le crédit. Le tableau 9 montre que ce lien est très élevé pour les petites banques (88 %) et s’estompe avec la taille des établissements ; plus le ratio de capital est élevé (faible) et plus la croissance des crédits est soutenue (faible). Encore une fois, ce sens de causalité ne semble pas convenir aux grandes banques.

Tableau 9

Corrélation entre crédits et ratio de solvabilité

Tableau 9
Quartile 1 Quartile 2 Quartile 3 Quartile 4 0,878 0,513 0,192 – 0,375

Corrélation entre crédits et ratio de solvabilité

55Enfin, à la lumière du tableau 10, si le taux de croissance du crédit est plus faible fin 2000 qu’à l’issue de l’année 1999 pour l’ensemble des banques, cette contraction est particulièrement marquée chez les petites banques. Alors que le taux de croissance moyen du crédit pour l’ensemble de l’échantillon est de 11 % en 2000, il est de 12,8 % pour les banques du dernier quartile et de 8,7 % seulement pour les banques du premier quartile. Qui plus est, le taux de croissance moyen du crédit des petites banques a reculé de près de 18 % entre 1999 et 2000, contre un repli de 8,33 % en moyenne pour l’ensemble des banques [20].

Tableau 10

Évolution moyenne du taux de croissance des crédits à la consommation et à l’investissement (C&I)

Tableau 10
En % Ensemble Quartile 1 Quartile 2 Quartile 3 Quartile 4 Moyenne du taux de croissance des crédits C&I 1999 2000 12,0 11,0 10,6 8,7 10,2 11,4 13,2 11,2 14,0 12,8 Variation entre 1999 et 2000 – 8,33 – 17,92 + 10,53 – 15,15 – 8,57

Évolution moyenne du taux de croissance des crédits à la consommation et à l’investissement (C&I)

56Ainsi, on montre que i) le nombre de banques contraintes a augmenté (dans tous les quartiles), ii) ce sont les petites banques qui sont les plus sensibles à leur ratio de fonds propres, or iii) ce sont justement ces petites banques qui ont le plus freiné leurs crédits. Ces observations peuvent directement être reliées au mécanisme du canal des fonds propres bancaires. Cette idée est renforcée par deux résultats complémentaires. D’une part, les banques du premier quartile, contraintes en 1996, ont eu une activité de crédit plus faible que la moyenne au cours des années suivantes [21]. Le tableau 11 montre que si les banques contraintes en 1996 affichent en 1997 un taux de croissance des crédits inférieur à la moyenne (du quartile et de l’ensemble des banques), c’est surtout en fin de décennie que l’écart à la moyenne est le plus remarquable, puisqu’il atteint trois points.

Tableau 11

Taux de croissance moyen des banques contraintes en 1996

Tableau 11
Quartile 1 Ensemble (moyenne) Contraintes en 1996 Moyenne quartile 1 1997 9,6 11,1 11,3 1998 11,7 8,9 10,0 1999 8,3 10,6 12,0 2000 5,9 8,7 11,0

Taux de croissance moyen des banques contraintes en 1996

57D’autre part, la corrélation entre les crédits et le ratio de capital s’avère d’autant plus forte que ce dernier est initialement faible. C’est ce que montre le tableau 12. La sensibilité du crédit distribué par les banques ayant un ratio de capital inférieur ou égal à 10 % en 1996 est deux fois plus grande, quatre ans plus tard, que celle des banques présentant un ratio initialement inférieur ou égal à 11 %. Notons que les banques initialement les moins capitalisées de ce quartile (ratio inférieur à 10 %) affichent à la fin de l’année 2000 un taux de croissance des crédits plus de deux fois inférieures à la moyenne du quartile (5 % contre 11 %).

Tableau 12

Corrélation entre crédits et ratio de capital suivant la position initiale

Tableau 12
Ratio de capital en 1996 ? 10 % ? 11 % ? 12 % Corrélation en 2000 0,421 0,209 0,125

Corrélation entre crédits et ratio de capital suivant la position initiale

58Enfin, la montée des risques, à partir de 1999, pourrait constituer un autre facteur explicatif du repli de l’activité de crédits, indépendant du canal des fonds propres bancaires. Toutefois, cette explication ne permet pas d’expliquer les différences de comportement entre petites et grandes banques. De plus, les coefficients de corrélation entre le taux de croissance des crédits et le rapport des provisions pour pertes sur crédits s’avèrent très faibles, que ce soit en termes de corrélation instantanée ou croisée (– 0,08 au mieux). La montée des risques est donc largement insuffisante pour expliquer l’affaissement du crédit.

59Ainsi, cet examen sur données individuelles permet de conforter et d’affiner les résultats obtenus sur le plan agrégé. Cette étude peut aussi être considérée comme une première étape en vue d’un travail plus approfondi, fondé sur des estimations en données de panel. Un tel exercice permettrait de tester la sensibilité des banques de tailles différentes aux ratios de capital, d’évaluer le pouvoir explicatif des ratios de capital, à côté d’autres variables pertinentes (taux d’intérêt, provisions, activité, niveau d’endettement initial des emprunteurs), d’affiner l’analyse du comportement des banques contraintes (par exemple en termes de dettes subordonnées) et de contrôler les effets potentiels de substitution. Enfin, une étude portant sur les banques européennes serait sans doute très instructive, dans la mesure où, en 2000, la dégradation de la situation du secteur bancaire et financier y est plus marquée qu’aux États-Unis (Artus, 2002).

Conclusion : les implications pour la politique monétaire

60Cet article vise à souligner la pertinence d’un canal de transmission des prix d’actifs vers la sphère réelle encore peu exploré en tant que tel : le canal du capital bancaire. Son fonctionnement peut être traduit en ces termes : suite à un choc financier négatif, la chute des prix d’actifs érode la richesse nette des banques qui, sous peine de violer les critères prudentiels, ou parce qu’elles risquent de subir des pressions de marché, doivent restreindre leur offre de crédits au secteur privé. Les firmes dépendantes du financement intermédié sont alors dans l’incapacité de se financer, ce qui engendre une baisse de l’activité macroéconomique.

61À défaut d’une littérature homogène centrée autour de cette question, la conjonction de certains faits saillants, d’apports théoriques et empiriques, permet au final de dégager un corpus théorique cohérent, qui place les banques au cœur des cycles économiques, en tant que vecteurs et amplificateurs des chocs financiers. L’examen statistique de la troisième section ne rejette pas la manifestation du canal du capital bancaire lors du dernier cycle financier aux États-Unis. En effet, le ralentissement de l’offre de crédits et le resserrement des conditions de prêts sont intimement liés à la diminution de la richesse nette des établissements de crédits. L’analyse effectuée sur un échantillon de 5 983 banques américaines renforce cette conclusion. D’abord, elle indique que le nombre de banques contraintes s’est accru dans le sillage de l’effondrement boursier. Ensuite, les résultats montrent que ce sont surtout les petites banques, autrement dit les entités les plus sujettes aux asymétries d’information, qui ont freiné leur offre. Ce double constat peut être raccordé au canal des fonds propres bancaires : contraintes ou craignant le devenir, et conscientes de leurs difficultés pour se recapitaliser le cas échéant, les petites banques ont réduit leurs prêts.

62Par ailleurs, si la structure de bilan des créanciers a effectivement un impact sur l’offre de crédit, alors, dans la mesure où la banque centrale a une prise sur la richesse nette bancaire, le canal des fonds propres peut également constituer un canal de politique monétaire. Van Den Heuvel (2002a) propose une modélisation des plus achevées à la fois sur le lien fonds propres/crédits et l’incidence de ce lien en termes de canal de transmission de la politique monétaire. Cet argument jouit depuis peu d’une assise empirique prometteuse. Les travaux de Kishan et Opiela (2000) révèlent que l’effet de la politique monétaire est plus prononcé pour les banques à faible niveau d’actif et affichant un faible ratio de capitalisation. Dans cette lignée, Altunbas, Fazylov et Molyneux (2002) montrent qu’au sein de l’UEM, les banques sous-capitalisées sont plus sensibles que les banques “saines” aux orientations de politique monétaire, quelle que soit la taille de leur actif.

63Or, comme la banque centrale est incapable d’influencer le comportement d’offre de financement des banques dans le cas extrême d’un capital crunch, l’efficacité de la politique monétaire par le biais du canal du capital bancaire n’est pas linéaire. Une politique expansionniste ne permet effectivement pas de relancer l’activité de crédit si les banques ne peuvent augmenter leur offre de fonds sans capital additionnel (qu’il est coûteux de lever). L’expérience japonaise de politique “de taux zéro” rappelle à quel point la santé du milieu bancaire détermine le succès des interventions consistant à inonder le marché de liquidités. En ce sens, ce canal réclamerait une reformulation de la conduite de la politique monétaire (Pollin, 2004 ; Levieuge, 2004), au profit d’une réaction préventive et conditionnelle au contexte financier global (concernant les marchés et les bilans des agents).

64Et comme il est difficile pour les banques centrales de contrôler les mouvements de prix d’actifs, il serait possible d’en limiter les effets par le biais de la politique prudentielle. À cet égard, certains soulignent la nécessité de contrer la nature procyclique des seuils d’exigence en fonds propres [22], qualifiés de “déstabilisateurs automatiques” par Van Den Heuvel (2002b). Une mesure contra-cyclique, qui consisterait à exiger un ratio plus élevé dans les périodes de bonne conjoncture et plus bas dans les périodes de mauvaise conjoncture (Artus et Seltz, 1999) irait dans ce sens. Cette mesure reviendrait en effet à inciter les banques à constituer des fonds propres abondants dans la phase expansive du cycle et à utiliser tout ou partie des bénéfices mis en réserve pour amortir la contraction du crédit en phase récessive.

65Le comportement des banques en matière de provisionnement constitue un autre facteur de procyclicité. Associée aux attitudes spéculatives et à la myopie face au risque, cette forme de comptabilisation explique la mauvaise perception des risques en phase croissante du cycle. Bien que la notion de perte probable soit encore éloignée des pratiques comptables actuelles, une politique de provisionnement ex ante serait souhaitable pour éviter l’octroi excessif de prêts en phase d’expansion et la contraction abusive en phase de ralentissement. C’est le fondement du “provisionnement dynamique [23]”. Obligatoire en Espagne et au Portugal, ce système n’est qu’optionnel, pour l’heure, dans les autres pays européens.

66Plusieurs voies de recherche permettraient d’affiner ces propos. D’abord, les tests réalisés dans la troisième section peuvent être considérés comme une étape en vue d’une étude plus approfondie et plus particulièrement orientée sur l’Europe. Car d’une part, le contexte économique et financier du début des années 2000 a eu des répercussions parfois sévères sur le secteur bancaire (en particulier en Allemagne). Mais, d’autre part, à la faveur des opérations de concentration bancaire, l’Europe compte des établissements financiers de grande taille, apparemment moins sensibles à leur niveau de fonds propres. Et les faillites bancaires sont historiquement moins fréquentes qu’aux États-Unis (Ehrmann, Gambacorta, Martinez-Pagés, Sevestre et Worms, 2001). Des estimations en données de panel, dans la lignée de Hubbard et al. (1999), permettraient de départager ces facteurs ambivalents.

67Ensuite, la déconnexion souhaitable des comportements bancaires avec le cycle financier mérite une analyse approfondie. D’une part, il apparaît nécessaire de démontrer formellement les capacités d’un seuil réglementaire contra-cyclique d’exigence en fonds propres ou celles du provisionnement dynamique à lisser les comportements bancaires et les cycles. Cette démonstration est d’autant plus importante que ce type de mesure prend l’exact contre-pied des projets récurrents de comptabilité des bilans bancaires en juste valeur. D’autre part, la non-linéarité du mécanisme étudié et l’importance des banques dans les mécanismes de transmission des chocs déplacent la question de la prise en compte des mouvements des prix d’actifs par les banques centrales aux frontières de la politique monétaire et de la politique prudentielle. Les complémentarités et la coordination de ces deux types de politique méritent donc d’être étudiées au sein d’un cadre théorique unifié, intégrant l’ensemble des canaux de transmission des prix d’actifs à la sphère réelle, y compris le canal du capital bancaire.

68Date de réception de l’article : 8 octobre 2004

69Date d’acceptation pour publication : 28 novembre 2005

70G. L. [24]


Annexe 1

Source des données agrégées

Précisions sur les données du Senior Loan Officer Opinion Survey

71Le Federal Reserve Board publie une série d’indicateurs ayant trait à l’activité bancaire, dont les deux indicateurs – de conditions de crédits (standards) et de demande – qui sont exploités dans l’article. Ces indices sont construits sur la base de sondages réalisés auprès des banquiers, sur le contexte bancaire tel que perçu au cours du précédent trimestre.

72L’indice représenté sur le graphique A1.1 mesure le pourcentage net des banquiers qui perçoivent un accroissement de la demande de prêts, de la part des grandes et petites entreprises.

Graphique A1.1

Évolution de l’indice de demande de crédits bancaires

Graphique A1.1

Évolution de l’indice de demande de crédits bancaires

73L’indice représenté sur le graphique A1.2 traduit le pourcentage net de banquiers qui prétendent avoir resserré leurs conditions de prêt au cours du trimestre passé (envers les petites et les grandes entreprises).

Graphique A1.2

Indice de resserrement des conditions de crédit

Graphique A1.2

Indice de resserrement des conditions de crédit

tableau im20
Série Source Précisions 1 Crédits bancaires corporate business Flow of Funds Tab. L102 ligne 25 2 Crédits bancaires noncorporate business Flow of Funds Tab. L103 ligne 16 3 Crédits bancaires total Flow of Funds = 1 + 2 4 Billets de Trésorerie Flow of Funds Tab. L102 ligne 21 5 Crédit inter-entreprises (exigible) noncorporate Flow of Funds Tab. L223 ligne 4 6 Crédit inter-entreprises (exigible) corporate Flow of Funds Tab. L223 ligne 3 7 Crédit inter-entreprises (exigible) total Flow of Funds = 6 + 7 8 Déflateur du PIB Datastream Implicit Price Index 9 Indice boursier Datastream Banques Datastream DS Banks 10 Indice boursier Datastream Financiers Datastream DS Financials 11 Indice boursier Datastream Global Datastream DS Market 12 Indice boursier Datastream Non-Financiers Datastream DS Non-Financials 13 PIB réel Datastream Prix constants de 1996 14 Output gap Calcul de l’auteur Filtre HP 15 Indice de demande de crédit Opinion survey Voir plus loin 16 mix Calcul de l’auteur = 3/(3 + 4 + 7) 17 Obligations privées et étrangères à l’actif des banques Flow of Funds Tab. L109 ligne 10 18 Obligations publiques à l’actif des banques Flow of Funds Tab. L109 ligne 6 19 Taux d’intérêt sur obligations publiques à 10 ans Datastream Code GBUS10Y 20 Conditions de crédit aux grandes entreprises Opinion survey Standards 21 Conditions de crédit aux petites entreprises Opinion survey Standards P 22 Actif total des banques Flow of Funds Tab. L109 ligne 1
Graphique A1.3

Taux d’intérêt nominal sur obligation d’État à 10 ans

Graphique A1.3

Taux d’intérêt nominal sur obligation d’État à 10 ans

Tests de causalité complémentaires

Tableau A1.1

Tests de causalité : DSF, DSNF et mix simultanément

Tableau A1.1
Causalité de Variable dépendante ?mix ?DSF ?DSNF ?mix 3,98*** 2,65** 1,15 Nombre de retards : 7. *** et ** = respectivement rejet de HO au seuil de 1 % et 5 %.

Tests de causalité : DSF, DSNF et mix simultanément

Tableau A1.2

Tests de causalité : crédits, DSF, DSNF et taux d’intérêt

Tableau A1.2
Causalité de Variable dépendante ?crédits ?DSF ?DSNF ?tx intérêt ?crédits 5,83*** 2,32* – 3,27** ?crédits 2,79** – 0,43 1,58* Nombre de retards : 4. ***, ** et * = respectivement rejet de HO au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

Tests de causalité : crédits, DSF, DSNF et taux d’intérêt

Tableau A1.3

Causalité entre DSNF et conditions de crédit aux petites entreprises

Tableau A1.3
Variables explicatives Modèle 2 Modèle 3 ?standardsP ?DSNF OG ?standardsP ?DSNF dde ?standardsP 1,53 0,46 0,53 2,28* 0,31 0,72 ?DSNF 2,20* 0,84 0,93 2,52** 0,52 1,27 OG 2,63** 1,26 14,3*** – – – dde – – – 2,30* 1,01 8,51*** Modèle 2 : période d’estimation = 1990 Q1 – 2002 Q4. Nombre de retards = 6. Modèle 3 : période d’estimation = 1991 Q4 – 2002 Q4. Nombre de retards = 6. ***, ** et * = respectivement rejet de H0 au seuil de 1 %, 5 % et 10 %.

Causalité entre DSNF et conditions de crédit aux petites entreprises

Annexe 2

Source des données individuelles

74La source de données BHC Database fournit les informations de bilan et hors-bilan de l’ensemble des établissements financiers régulés par le Federal Reserve System, le Federal Deposit Insurance Corporation et le Comptroller of the Currency. Cette base statistique est disponible auprès du site web de la Banque Fédérale de Chicago. Les observations retenues pour l’étude statistique débutent en 1995 (commencer plus tôt imposerait des calculs fastidieux pour uniformiser les mesures d’ordre prudentiel) et s’achèvent en 2000. Les années 2001 et 2002 étaient indisponibles au moment de l’étude. Les données relatives à 1995 sont uniquement destinées à permettre le calcul d’un taux de croissance des crédits pour l’année 1996. Enfin les observations sont retenues sur une fréquence annuelle correspondant au dernier trimestre de chaque année.

75En vue d’assurer le suivi du même échantillon de banques, les établissements qui n’apparaissent qu’après 1995 ou disparaissent avant 2000 ont été évincés. Ont aussi été exclues les banques ne rapportant aucune activité de crédit C & I. Enfin, d’autres individus ont été écartés à cause de données manquantes. Au final, l’échantillon se compose de 5 983 banques. Le tableau A2.1 offre un aperçu de la distribution des établissements en termes d’actifs. Ceux de 1996 sont utilisés pour distinguer le comportement des banques suivant leur taille.

Tableau A2.1

Actif total des banques – statistiques

Tableau A2.1
En milliers de dollars Année Moyenne Écart-type Médiane Quartile 1 Quartile 2 Quartile 3 Quartile 4 1996 105 865 129 781 63070 33811 63070 121 077 1504 329 2000 153 725 208 692 85613 42927 85613 171 880 2508 549

Actif total des banques – statistiques

76Les observations mobilisées pour l’étude statistique sont rapportées dans le tableau A2.2. À droite de chaque variable figure le code correspondant dans la base de données originale. Le code RCFD6056 fait référence au libellé suivant : “Total Capital ? 8 % of adjusted total assets”, et prend la valeur 1 si la proposition est vérifiée et 0 sinon. Autrement dit, la variable dummy prudentielle est une variable muette qui prend la valeur 1 si l’individu n’est pas contraint au vu du critère d’exigence de fonds propres et 0 sinon. En plus de cette mesure, il est possible de calculer un ratio de capitalisation tel qu’il est défini par la composante 7 du tableau A2.2. Il se distingue du ratio Cooke uniquement par les déductions, parfois complexes, qui figurent au numérateur de ce dernier. Sans perte de généralité, le ratio de capital utilisé ici est donc plus élevé que le Cooke. Mais après vérification de la cohérence entre les banques considérées comme contraintes selon la dummy et les ratios prudentiels calculés, cette construction s’avère satisfaisante.

Tableau A2.2

Liste des variables utilisées et codes correspondants

Tableau A2.2
1 Actif total RCFD2170 2 Crédit C&I RCFD1600 3 Provisions RIAD4230 4 5 Tier 1 capital Tier 2 capital RCFD8274 RCFD8275 6 7 8 Actifs pondérés selon les risques Ratio de capital Dummy prudentielle RCFDA224 (4 + 5)/6 RCFD6056

Liste des variables utilisées et codes correspondants

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : cycles financiers, capital bancaire, politique monétaire et prudentielle, banques

Date de mise en ligne : 01/03/2007.

https://doi.org/10.3917/ecoi.104.0065

Notes

  • [1]
    Grégory Levieuge, Chercheur, Laboratoire d’Économie d’Orléans (LEO), Faculté de Droit, d’Économie et de gestion (gregory. levieuge@ univ-orleans. fr).
  • [2]
    Si néanmoins les travaux théoriques s’appuient sur un seuil légal d’exigence en fonds propres, c’est parce qu’il réduit à deux le nombre de configurations à étudier : la contrainte est serrée ou non. Voir Peek & Rosengren (1995b) par exemple.
  • [3]
    Voir Myers & Majluf (1984), Bolton & Freizas (2001), Greenwald & Stiglitz (1990), Calomiris & Hubbard (1995), Stein (1998) et Cornett & Tehranian (1994) pour une justification portant sur les firmes et les banques, à la fois sur le plan théorique et empirique.
  • [4]
    C’est ce que trouvent aussi Hancock & Wilcox (1992), Hall (1995) et Haubrich & Wachtel (1993).
  • [5]
    Voir par exemple Shrieves et Dahl (1995) ; Jacques et Nigro (1997) ; Wall et Peterson (1995) ; Moore (1992) ; Cantor et Johnson (1992) ; Baer et McElravey (1993) ; Brinkmann et Horvitz (1995) ; Furfine (2000).
  • [6]
    C’est-à-dire l’ensemble des mécanismes institutionnels assortis aux prêts ou coût du crédit dans un sens très large : tarif, maturité, garanties, lien avec le prime rate, etc.
  • [7]
    Le graphique A1.3 montre que le taux d’intérêt à 10 ans sur obligations d’État a fortement chuté à partir de 2000.
  • [8]
    Les séries de crédits, billets de trésorerie, crédits commerciaux, stocks d’obligations privées et publiques sont exprimées en termes réels (dollars constants de 1996) et en base 1 au trimestre au cours duquel s’est manifesté le choc (2000 Q2). Elles sont ensuite exprimées en log. Les tendances historiques sont construites à partir des taux de croissance respectifs moyens sur la période 1956-2002.
  • [9]
    La baisse du mix amorcée entre t = – 2 et t = – 4 s’explique par la remontée du crédit inter-entreprises. Conjointement, le crédit bancaire connaît une évolution somme toute assez fidèle à sa tendance. Cette diminution prématurée n’est donc pas susceptible de remettre en cause l’identification des effets d’offre, d’autant que le mix demeure au-dessus de sa tendance.
  • [10]
    La variable mix remonte entre t = 4 et t = 6 sous l’impulsion de la baisse conjointe des deux substituts. Mais le crédit bancaire continue de baisser. De plus, si cette courte phase nuance l’effet d’offre au sens strict, le mix n’en demeure pas moins sous sa tendance historique, et 10 trimestres après le krach, il est nettement en dessous de son niveau de 2000 Q2.
  • [11]
    Toutefois, le fait que les conditions de crédits n’aient pas plus augmenté pour les petites entreprises que pour les grandes, comme l’indique le graphique A1.2, tend d’emblée à nuancer le rôle de l’accélérateur financier, au profit du canal du capital bancaire.
  • [12]
    Sauf indication contraire, la période d’estimation des modèles VAR correspond à 1990 Q1 – 2002 Q4. Le nombre de retards est déterminé par application du critère AIC. Les variables intégrées dans le VAR sont stationnaires, différenciées une fois au besoin. Enfin, si aucune relation de co-intégration n’a été décelée, il n’empêche qu’à court terme, la structure de bilan des banques (i.e. leur richesse) peut influer sur leur comportement d’offre. C’est précisément la relation recherchée ici.
  • [13]
    Le taux d’intérêt à trois mois, susceptible d’engendrer une interférence entre le crédit et les indices, a aussi été introduit en tant que variable de contrôle (en différence première par souci de stationnarité). Le tableau A1.1 indique que cela ne perturbe pas les résultats présentés dans le tableau 3.
  • [14]
    Conformément à l’intuition, la causalité inverse est également acceptée : l’abondance de crédits alimente la croissance boursière. De plus, à titre indicatif, la causalité de l’indice proprement bancaire DSB sur les crédits est plus confortablement acceptée au seuil de 5 %.
  • [15]
    Notons que si la variable mix constitue une bonne mesure de l’offre, alors le fait que le lien mix/DSF soit supérieur au lien mix/DSNF constitue un autre signal de l’insuffisance de l’accélérateur financier à expliquer le recul du crédit.
  • [16]
    L’indice pris en compte dans le VAR est la moyenne des deux indices relatifs d’une part aux grandes entreprises et d’autre part aux petites entreprises.
  • [17]
    La construction de l’échantillon est détaillée en annexe 2. Au vu des faits saillants mis en évidence dans la section précédente, l’absence de données relatives aux années 2001 et 2002 limite l’étude des effets de la position en capital des banques en phase de troubles financiers aigus à la seule année 2000.
  • [18]
    La concentration du capital constituerait probablement un meilleur facteur de classification a priori. Mais cette donnée ne figure pas parmi les observations disponibles.
  • [19]
    Suivant la définition figurant dans la base de données, une banque n’est pas considérée comme contrainte si elle affiche un ratio de capital total sur “actif total ajusté” supérieur ou égal à 8 % (voir détails en annexe).
  • [20]
    Seules les banques du second quartile affichent curieusement une croissance des crédits.
  • [21]
    Le problème potentiel de simultanéité entre le crédit et le ratio de capital, tel que l’illustrent les résultats du quatrième quartile, justifie le recours à ce type de méthode. Sinon, un accroissement des crédits, toute chose égale par ailleurs, provoque une baisse des ratios de solvabilité et risque de donner lieu à un lien négatif entre les deux.
  • [22]
    S’ils sauvegardent en partie la solvabilité des banques, les seuils réglementaires amplifient et creusent les cycles (Borio, Furfine et Lowe, 2001).
  • [23]
    Pour une présentation et une discussion détaillée du provisionnement dynamique, voir Jaudoin (2001).
  • [24]
    L’auteur tient à remercier J.-P. Pollin pour ses commentaires, ainsi que les participants de la journée du GDR Économie Monétaire et Financière sur le thème “Prix d’actifs, information et intervention des banques centrales” (26 mars 2003 au CEPII, Paris) et les deux rapporteurs anonymes de la revue pour leurs suggestions. Il est seul responsable d’éventuelles erreurs.
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