Couverture de ECOI_101

Article de revue

Normes de travail fondamentales et échanges sud-nord

Pages 47 à 62

Notes

  • [1]
    Clotilde Granger, Post-Doctorante, EURIsCo – Equipe universitaire de recherche “Institutions : Coordination, Organisation”, Université Paris-Dauphine (clotilde. ggranger@ noos. fr).
  • [2]
    En général, les quelques études empiriques existantes relèvent plus des statistiques descriptives que de l’estimation d’un modèle économétrique. Elles ne prennent donc pas en compte les principaux déterminants des échanges avant d’isoler l’impact spécifique des normes de travail.
  • [3]
    L’explication donnée par van Beers est la suivante : en raison de la plus faible élasticité de la demande de travail qualifié par rapport à la demande de travail non qualifié, le relèvement des normes de travail entraîne une baisse plus importante de la demande de travail non qualifié. Cela se traduit par une diminution plus forte de la rémunération de ce facteur et compense davantage le coût d’un relèvement des normes de travail. Dès lors, la compétitivité des biens intensifs en travail qualifié est plus affectée que celle des biens intensifs en travail non qualifié.
  • [4]
    Par exemple, si le pays concerné est spécialisé dans la production de biens intensifs en travail, l’application d’une norme, telle que l’abolition du travail des enfants, réduit la quantité de main-d’œuvre disponible et conduit à un accroissement des échanges.
  • [5]
    Dans le modèle de Melchior (1996) sur le travail des enfants, cette main-d’œuvre est spécifique au secteur exportateur ; dans ce cas, une réduction de l’emploi des enfants conduit à une diminution des échanges. En revanche, dans le modèle de Hansson et Lundahl (1984) sur la discrimination raciale, le travail des noirs est le facteur mobile ; un renforcement de la discrimination conduit à une diminution de la dotation en travail qui pèse sur les deux secteurs ; l’évolution des échanges est dans ce cas indéterminée.
  • [6]
    L’hypothèse de parfaite substituabilité, par exemple entre le travail des enfants et celui des adultes, signifie qu’un adulte peut faire ce que fait un enfant et inversement, sous réserve de prendre en compte leur différence intrinsèque de productivité (Basu, 1999, p. 1100).
  • [7]
    Siroën (1996) formalise cette idée, à partir de la relation entre l’élasticité-prix de l’offre de travail et le degré de monopsone.
  • [8]
    Dans cette étude, les pays du Nord correspondent aux 21 pays de l’OCDE à revenu élevé ; le reste de l’échantillon est assimilé au Sud.
  • [9]
    La formule qui permet de ramener la somme S à l’intervalle [0 ; 1] et d’obtenir l’indicateur Intf est ((S-4)/12)).
  • [10]
    Par exemple, la Malaisie a la même note que le Sri-Lanka (Intf = 0,5). Elle appartient cependant au groupe des pays ne respectant pas les normes (Dntf3) en raison de l’importance de la discrimination et des entraves aux droits syndicaux ; le Sri-Lanka est lui dans le second groupe, celui des pays respectant partiellement les normes (cf. ANNEXE 1).
  • [11]
    Plus précisément, cet indicateur est défini par :
    Il mesure l’écart relatif des niveaux de développement (notés yi et yj).
  • [12]
    Puisque le modèle est spécifié en logarithme alors que Intfi est en niveau, la variation est donnée par exp(1.17)-1. Pour les pays du Nord, l’effet de la violation des normes fondamentales serait positif et encore plus élevé puisque le coefficient de Intfj est plus grand. Ce résultat est surprenant. Il doit être considérer avec précaution dans la mesure où parmi les pays du Nord qui n’atteignent pas la valeur maximale (Intfj =1) se trouvent les États-Unis et le Japon (cf. infra).
  • [13]
    Les estimations excluant Hong-Kong et Singapour ne sont pas présentées car elles aboutissent strictement aux mêmes conclusions.
  • [14]
    Habituellement, c’est l’indicateur global de la Freedom House, faisant état du respect des libertés à la fois politiques et civiles, qui est utilisé. Ici, seule la composante relative au respect des libertés politiques est prise en compte car la seconde inclut une évaluation du respect des normes de travail fondamentales, sans qu’elle puisse être spécifiquement isolée. Par ailleurs, seul l’indice représentatif de la situation dans les pays du Sud est introduit dans l’équation à estimer puisque cet indice est égal à 1 pour l’ensemble des pays du Nord.
  • [15]
    L’auteur remercie les rapporteurs anonymes ainsi que Aude Sztulman et Jean-Marc Siroën pour leurs remarques et suggestions mais reste seule responsable des erreurs et inexactitudes qui demeureraient.

1La conférence de Singapour semblait avoir mis un terme au débat sur le lien entre les échanges commerciaux et le respect de normes de travail minimales. Lors de cette conférence, il a en effet été établi une séparation stricte entre les questions commerciales, du ressort de l’Organisation mondiale du commerce, et les questions sociales, relevant uniquement des compétences de l’Organisation internationale du travail (OIT).

2Malgré cette décision, réaffirmée au sommet de Doha (2001), l’existence et la nature du lien entre le respect de normes de travail et les échanges commerciaux demeurent une question d’actualité : au niveau international, pour différentes institutions telles que l’OIT ou l’OCDE ; au niveau régional, puisque que de nombreux accords sont assortis de clauses sociales ; au niveau national également dans la mesure où plusieurs lois commerciales, comme le Trade Act américain, conditionnent l’ouverture commerciale au respect de certaines normes de travail ; pour la société civile enfin, qui dans contexte de mondialisation des économies et de l’information, est de plus en plus sensible aux conditions de production dans les différentes régions du monde.

3Le débat sur l’interaction entre l’ouverture commerciale et les normes de travail s’organise autour de trois thèmes principaux : les risques engendrés par la concurrence des pays à faibles normes ; la nécessité d’harmoniser, préalablement aux échanges, les politiques nationales sur la base de normes minimales ; l’opportunité d’utiliser les politiques commerciales pour faire respecter certaines normes de travail. Les discussions se focalisent en fait sur quatre normes reconnues comme “fondamentales” par la communauté internationale. Conformément à la déclaration de l’OIT de juin 1998, il s’agit de la liberté d’association et de la reconnaissance effective du droit de négociation collective, de l’élimination de toute forme de travail forcé ou obligatoire, de l’abolition effective du travail des enfants et de l’élimination de la discrimination.

4Dans ce débat, l’existence d’un lien entre le commerce et la violation des normes fondamentales est en général postulée. Pourtant, la nature de ce lien n’a été que très peu étudiée. Il n’existe en effet que quelques modèles théoriques et de rares études empiriques sur l’impact de la violation des normes fondamentales de travail sur les échanges commerciaux.

5Les modèles théoriques (Brown et al., 1996 ; Hansson, 1981 ; Noor, 1997) montrent qu’il est difficile de déterminer a priori l’ampleur et le sens de l’influence des normes de travail sur le commerce en raison notamment de la pluralité des mécanismes jouant sur le marché du travail. Quelques études empiriques ont cherché à lever cette indétermination (Mah, 1997 ; OCDE, 2000 ; Rodrik, 1996 ; Raynauld et Vidal, 1998 ; van Beers, 1998). La plupart de ces travaux concluent que le degré de respect des normes de travail n’a pas d’impact sur les échanges. Deux études empiriques semblent cependant faire exception, tant par la méthode économétrique utilisée [2] que par les résultats obtenus. Celle de Rodrik (1996) montre qu’il existe une influence positive de la durée du travail et de l’emploi des enfants sur la part des exportations de biens intensifs en travail dans les exportations totales. Celle de van Beers (1998), portant uniquement sur dix-huit pays de l’OCDE et sur cinq normes autres que les normes fondamentales, montre que le relèvement des normes de travail doit conduire à une diminution des exportations intensives en travail qualifié et à une augmentation de celles intensives à la fois en capital et en travail non qualifié [3].

6L’étude ici proposée se situe dans le prolongement de celles de Rodrik (1996) et de van Beers (1998). Elle cherche à mettre empiriquement en évidence l’impact du respect des quatre normes de travail fondamentales sur le volume des échanges. Notre étude se distingue des travaux existants à la fois par l’indicateur du respect des normes utilisé et par l’équation d’ouverture retenue. L’étude proposée est centrée sur les échanges Sud-Nord, qui sont estimés à partir d’un modèle de gravité. Ce modèle est ici augmenté d’un indicateur original et synthétique, mesurant le degré de respect effectif des quatre normes de travail fondamentales.

7La première section de l’article expose les principaux arguments du débat théorique sur les effets à attendre d’un plus grand respect des normes de travail fondamentales sur les échanges commerciaux. Après avoir succinctement présenté l’indicateur du respect des normes fondamentales et l’équation de gravité utilisés, la seconde section est consacrée aux estimations économétriques de l’impact des normes fondamentales sur les échanges.

8Contrastant avec les indéterminations auxquelles aboutissent les analyses théoriques existantes, nos résultats montrent que le non-respect des normes de travail fondamentales par les pays du Sud accroît le volume de leurs échanges avec le Nord.

Effets attendus du respect des normes de travail fondamentales sur les échanges commerciaux

9Dans les modèles traitant du lien entre les performances commerciales et les normes de travail fondamentales (Brown et al., 1996 ; Noor, 1997), le respect de ces normes est modélisé comme une politique qui modifie de manière exogène la dotation en travail : l’abolition du travail des enfants et du travail forcé entraîne une contraction de la dotation en travail ; l’interdiction de la discrimination dans l’emploi se traduira, au contraire, par une augmentation de la quantité de main-d’œuvre disponible. Le respect des droits syndicaux fait exception car, de ce point de vue, il peut être considéré comme neutre. Si les termes de l’échange sont donnés (hypothèse du petit pays), les effets à attendre d’un relèvement des normes fondamentales découlent du théorème de Rybczynski (1955). Ils dépendent donc de la nature de la spécialisation et de l’impact de la norme considérée sur la dotation en travail (Brown et al., 1996) [4]. Si le pays est grand et spécialisé dans la production de biens intensifs en travail, les effets du respect des normes fondamentales sur les volumes échangés peuvent être totalement ou partiellement compensés par des effets inverses sur le prix du bien exporté.

10Ce premier raisonnement qui est le plus fréquemment développé est aussi très discuté car il repose sur les hypothèses restrictives du modèle HOS. Des analyses plus complexes montrent que d’autres mécanismes, intervenant sur le marché du travail, doivent être pris en compte et que le relâchement des hypothèses du modèle HOS conduit à des résultats différents.

11Plusieurs modèles ne considèrent pas le travail comme un facteur homogène et distinguent différentes catégories de travail : celui des enfants et celui des adultes, celui des individus libres et celui des travailleurs forcés. Il est par ailleurs supposé que l’une de ces catégories de travail est un facteur spécifique. Les résultats dépendent alors du caractère mobile ou immobile de la catégorie de travail concernée par l’application de la norme [5].

12Se référant au même cadre d’analyse, certains auteurs font valoir que les catégories de travail concernées par le respect des normes fondamentales (principalement le travail des enfants et le travail forcé) sont spécifiques au secteur des biens non-échangeables. Dans ce cadre, la violation des normes fondamentales n’aurait pas d’influence sur les échanges. Les modèles de Maskus (1997) et Granger (2003) montrent que ce raisonnement est critiquable car il ne prend pas en compte les interactions existant entre les différents secteurs d’activité. Celles-ci peuvent passer par des relations de sous-traitance entre le secteur non-échangeable et les secteurs échangeables ou simplement par la mobilité du facteur travail entre les secteurs.

13Faire la distinction entre différentes catégories de travail permet aussi de prendre en compte les interactions existant entre les offres et demandes pour chaque catégorie de travail.

14Du point de vue de l’offre, il est par exemple possible de supposer que l’offre de travail des adultes dépend de celle des enfants, ou inversement (Maskus, 1997 ; Siroën, 1997). Sous l’hypothèse réaliste que l’élasticité croisée entre ces deux offres est négative, une limitation de l’emploi des enfants doit conduire à un accroissement de l’emploi des adultes. De la même manière, une interdiction de la discrimination à l’encontre des femmes pourrait se traduire par le retrait des enfants du marché du travail. Plus généralement, la prise en compte des interactions entre les différentes offres de travail rend incertaine l’évolution de la dotation en facteurs et donc celle des échanges.

15Du point de vue de la demande de travail, des relations de substitution existent aussi. Plusieurs modèles traitant des conséquences du relèvement des normes fondamentales font ainsi l’hypothèse que le travail est un facteur différencié et que les différentes catégories de travail sont des substituts parfaits (Basu, 1999 ; Hansson, 1981 ; Granger, 2003) [6]. Sous cette hypothèse, l’adoption d’une norme de travail entraîne certes le retrait du marché des travailleurs concernés par l’application de la norme (par exemple, les enfants) ; mais ceux-ci sont remplacés par d’autres travailleurs (par exemple, des adultes). Dans ce cas, la contraction de la dotation globale en travail sera inférieure au nombre de travailleurs qui se sont retirés du marché en raison de l’application de la norme. La réduction de la production et des échanges sera donc, du point de vue de la demande comme de l’offre, de moindre ampleur que ne le laissait supposer la définition de la norme.

16D’autres analyses mettent l’accent sur un autre aspect des normes de travail fondamentales : leur incidence sur le fonctionnement efficient du marché du travail. Les analyses de l’OCDE (1996) et de Maskus (1997) sur la discrimination rappellent que celle-ci limite la liberté de choix des travailleurs concernés et conduit ainsi à une allocation non optimale des ressources. Cette distorsion entraîne une baisse de la production dans le secteur discriminant et une augmentation dans l’autre. Si le secteur discriminant est le secteur exportateur, il y aura alors une diminution des volumes échangés.

17Ce type de raisonnement peut être élargi à l’ensemble des quatre normes fondamentales dans la mesure où, comme le soulignent Maskus (1997) et Siroën (1996), la violation d’au moins l’une de ces normes limite la liberté de choix des travailleurs et fait ainsi obstacle à une allocation optimale des ressources. Plus précisément, la distorsion créée provient dans ce cas de l’exercice du pouvoir de monopsone des employeurs [7]. Les conséquences du non-respect des normes fondamentales sur la dotation en travail, la production et les échanges sont alors indéterminées car elles dépendent de nombreux paramètres. Markusen et Robson (1980) démontrent par exemple que, sous certaines hypothèses restrictives sur le degré de monopsone et sur l’élasticité de substitution entre les différents facteurs de production, l’exercice d’un pouvoir de marché peut conduire à une augmentation de la production dans le secteur monopsonistique. Plus généralement, la distorsion créée par la violation des normes fondamentales peut soit renforcer soit compenser les effets précédemment identifiés sur la dotation en travail.

18Les conséquences du respect des normes de travail fondamentales sur l’efficience dynamique devraient également être prises en compte. En effet, à plus long terme, le respect de ces normes peut jouer sur le niveau de la production, des échanges et plus généralement sur le développement économique dans la mesure où il semble favoriser l’accumulation du capital physique et humain (OCDE, 2000 ; Piore, 1994 ; Siroën, 1996).

19Les analyses théoriques existantes montrent donc que l’impact d’un plus grand respect des normes de travail fondamentales ne se limite pas à un effet purement quantitatif de la variation de la dotation en travail, qui serait mécaniquement égale à la quantité de main-d’œuvre ajoutée ou retirée du marché de l’emploi en raison de l’application de la norme. D’autres mécanismes peuvent jouer : les effets de substitution entre les différentes offres ou demandes de travail ; l’impact des normes fondamentales sur l’allocation des ressources ; leurs conséquences sur l’efficience dynamique. Ces différents effets peuvent s’opposer ou au contraire se renforcer si bien que le sens et l’ampleur de l’influence globale du respect des normes fondamentales sur la quantité de travail effectivement embauchée, la production et le volume des échanges restent théoriquement indéterminés.

Estimations de l’influence des normes de travail fondamentales sur le commerce : le cas des échanges sud-nord

20L’analyse empirique proposée cherche à lever l’indétermination théorique sur les conséquences du respect des quatre normes de travail fondamentales sur le volume des échanges commerciaux.

21L’étude porte plus précisément sur l’impact de ces normes sur le commerce Sud-Nord. Ce choix à une double justification. D’une part, les analyses théoriques s’inscrivent en général dans le cadre des théories néo-classiques du commerce international. Elles se placent alors du point de vue d’un petit pays du Sud, supposé riche en travail non-qualifié et donc spécialisé dans la production de ce type de biens. D’autre part, en matière de respect des normes de travail fondamentales, les pays du Sud s’opposent en général à ceux du Nord : les premiers sont considérés comme “des pays à faibles normes” tandis que les seconds apparaissent comme des “pays à normes de travail élevées”. [8]

Mesure du respect effectif des normes de travail fondamentales

22Les quelques études empiriques existantes sur les normes de travail fondamentales se heurtent toutes à la difficulté de trouver des indicateurs fiables du respect effectif de ces normes. Ainsi, l’indicateur le plus fréquemment utilisé est le nombre de conventions ratifiées par un pays parmi les huit conventions fondamentales de l’OIT (par exemple, Mah, 1996 ; Rodrik, 1997).

23Notre étude utilise un indicateur spécifique et synthétique du respect effectif des quatre normes de travail fondamentales. Construit par nos soins, cet indicateur repose sur l’exploitation d’une base de données associant de nombreuses informations quantitatives et qualitatives sur le respect des quatre normes étudiées. L’ANNEXE 2 résume les critères retenus ainsi que la nature et les sources des données utilisées pour construire cette base. L’ensemble des données collectées a été traité afin de construire un indicateur synthétique du respect des normes fondamentales (Granger, 2003). La démarche adoptée comprend deux étapes.

24Dans un premier temps, chaque norme est d’abord traitée séparément en utilisant une méthode comparable à celle employée par l’OCDE (2001) pour construire sa base sur le respect des droits syndicaux. En fonction du degré des violations observées, les pays sont regroupés en quatre classes, allant de 1 (violation totale) à 4 (respect complet de la norme considérée). En raison de la pauvreté des informations disponibles pour faire état du travail forcé, seules trois classes (1, 3 et 4) ont été définies pour cette norme.

25Dans un second temps et de manière à obtenir un indicateur synthétique, un regroupement transversal aux quatre normes est effectué. Deux méthodes alternatives sont utilisées afin d’obtenir à la fois un indicateur sous forme quantitative (noté Intf) et un autre sous forme qualitative (noté Dntf).

  • Sous forme quantitative, l’indicateur Intf correspond à une variable comprise entre 0 (absence de respect des normes) et 1 (respect des 4 normes) ; il est égal à la somme (notée S) des indices de classes précédemment définies norme par norme, rapportée entre 0 et 1. À titre d’illustration, prenons l’exemple de l’Argentine : les différentes sources d’informations sur ce pays montrent que le travail des enfants, la discrimination et les entraves à la liberté syndicale existent mais restent limités et qu’il n’y a pas de travail forcé. Ce pays appartient donc aux classes 3 pour les trois premières normes et à la classe 4 pour la quatrième. La somme S de ces classes intermédiaires vaut 13, ce qui la rapproche davantage du score maximum de 16 atteint par un pays respectant complètement les normes fondamentales, que du score minimal de 4 obtenu par un État violant gravement toutes les normes. Rapporté entre 0 et 1, ce score conduit à un indicateur synthétique quantitatif égal à 0,75 [9].
  • Sous forme qualitative, l’indicateur Dntf correspond à une variable indicatrice des trios catégories suivantes : respect (Dntf1), respect partiel (Dntf2) ou violation (Dntf3) des quatre normes de travail fondamentales. Comme dans le cas de l’indicateur quantitatif, le regroupement est fait à partir des classes intermédiaires, établies norme par norme. La règle de regroupement est la suivante :
    • dans le groupe des pays respectant les normes (Dntf1 = 1) figurent ceux qui ont un classement intermédiaire égal à 1 ou 2 quelle que soit la norme considérée ;
    • dans le groupe des pays respectant partiellement les normes (Dntf2 = 1) se trouvent les pays qui violent de manière importante une ou deux des quatre normes fondamentales (un ou deux classements intermédiaires égaux à 3 ou un seul égal à 4) ;
    • dans le groupe des pays ne respectant pas les normes ( Dntf3 = 1) se trouvent ceux qui ont violent de manière importante au moins deux des quatre normes fondamentales (un classement intermédiaire égal à 4 et un égal à 3).
Ces deux indicateurs synthétiques ne sont pas strictement équivalents. Étant donné la manière dont ils ont été construits, la variable qualitative Dntf sanctionne davantage les pays qui violent fortement au moins l’une des quatre normes fondamentales tandis que la variable quantitative Intf est toujours une mesure moyenne du respect de ces quatre normes [10].

26L’ANNEXE 1 présente la répartition des 65 pays de notre échantillon entre les trois classes précédemment définies : respect (Dntf1), respect partiel (Dntf2) ou violation (Dntf3) des quatre normes de travail fondamentales. Elle indique également pour chaque pays la valeur de l’indicateur synthétique quantitatif Intf.

L’équation de gravité

27Afin d’estimer l’impact de la violation des normes fondamentales sur les échanges bilatéraux du Sud vers le Nord, l’indicateur synthétique est introduit dans un modèle de gravité. Ce type de modèle permet d’estimer le volume d’échanges entre deux pays compte tenu de leurs caractéristiques économiques, géographiques et culturelles. Récemment, des variables institutionnelles ont été ajoutées à l’équation gravitationnelle (Maurel et Koukharchouk, 2002 ; van Beers, 1998). Le modèle de gravité explique toujours une proportion importante du commerce effectivement observé, quel que soit l’échantillon considéré (modèle Nord-Nord, Nord-Sud, Sud-Sud, Monde-Monde…). Les fondements théoriques du modèle de gravité permettent d’ailleurs de le rattacher à la fois aux nouvelles théories du commerce international expliquant le commerce intra-branche (Helpman et Krugman, 1985) et aux modèles néo-classiques de type HOS analysant le commerce Sud-Nord de type inter-branche (Deardorff, 1995).

28L’équation estimée s’écrit :

Xij : exportations bilatérales d’un pays i du Sud vers un pays j du Nord ;
Yi(Yj) : PNB du pays i (du pays j), évalué en PPA ;
Deco : indicateur de distance économique séparant les pays i et j ;
DRij : indicateur de distance relative séparant les pays i et j ;
Intfi (Intfj) : indicateur du respect des normes de travail fondamentales da ns le pays i (pays j) ;
Zkij : variables indicatrices d’un élément commun (appartenance à l’APEC ou à l’ALENA ;signature des accords de Lomé ; partage d’une langue commune ou d’un ancien lien colonial ; contiguïté).

29Aux côtés des PNB qui mesurent la taille des deux partenaires commerciaux, il est habituel de faire figurer les PNB par habitant afin de capter l’influence du niveau de développement sur les échanges (voir par exemple, Frankel et al., 1997). Mais, plutôt que les niveaux absolus des PNB par habitant, nous utilisons ici un indicateur mesurant leur écart. Soit Deco la variable correspondante. Il s’agit de l’indicateur de distance économique proposé par Freudenberg et al. (1998) et effectivement construit à partir de l’écart des PNB par habitant des pays i et j[11]. Cette variable est introduite sous forme non linéaire afin de prendre en compte l’effet positif de l’écart des dotations factorielles sur le commerce inter-branche et l’effet positif de la similarité des niveaux de vie sur le commerce intra-branche.

30La distance géographique est quant à elle utilisée comme proxy des coûts de transports et plus généralement de l’ensemble des coûts de transactions. Il s’agit ici d’un indicateur de distance relative asymétrique. Notre modèle de gravité, bien qu’étant bilatéral, n’est pas symétrique puisqu’il porte uniquement sur les exportations du Sud vers le Nord. L’indicateur de distance relative séparant deux pays i et j est donc calculé du point de vue du pays i. Il est égal au rapport entre la distance kilométrique absolue séparant les deux pays i et j (Dij) et la distance moyenne séparant le pays i de l’ensemble de ses partenaires commerciaux (DMi.). À la manière de l’indicateur proposé par Wei (2000), la distance moyenne correspond à une moyenne des distances bilatérales absolues pondérées par la par t du partenaire j dans les échanges mondiaux. L’indicateur de distance relative est donc donné par la formule :

31avec

32Puisque l’indicateur synthétique du respect des normes de travail n’existe que pour une seule période (1995-1997), le modèle est spécifié en coupe. Pour chaque estimation, l’hétéroscédasticité a été corrigée en pondérant l’estimateur des MCO par l’inverse du terme créant le plus d’hétéroscédasticité.

Résultats des estimations

33L’estimation du modèle de gravité de base montre que les coefficients obtenus ont le signe attendu (TABLEAU 1 – modèle 1). En particulier, les estimations confirment l’existence d’une relation significative et convexe entre la distance économique séparant deux pays et le volume de leurs échanges bilatéraux. L’effet similarité du revenu et l’effet différence de dotations factorielles sont donc tous les deux observés sur notre échantillon Sud-Nord. Le pouvoir explicatif du modèle n’est que de 53% mais il augmente considérablement lorsque les pays pétroliers sont retirés de l’échantillon (TABLEAU 2 – modèle 3a).

Tableau 1

Impact du respect des normes de travail fondamentales sur le commerce Sud-Nord

Tableau 1
Variable à expliquer : exportations du Sud vers le Nord (Xij) (1) (2a) (2b) PNBi (Yi) 0,21*** (0,04) 0,18*** (0,04) 0,18*** (0,04) PNBj (Yj) 1,01***(0,04) 1,08***(0,04) 1,03***(0,04) Distance éco (Decoij) – 3,13***(0,80) – 3,56***(0,82) – 3,55***(0,82) Distance éco (Decoij)2 1,92*** (0,86) 1,56** (0,81) 1,72*** (0,81) Distance relative (Dij) – 0,69***(0,07) – 0,78***(0,08) – 0,81***(0,08) Contiguïté 0,79**(0,4) 0,85**(0,42) 0,73*(0,43) Dapec 1,14***(0,18) 1,20***(0,18) 1,07***(0,18) Dalena 1,53***(0,55) 1,53**(0,44) 1,50**(0,53) Dlome – 0,35***(0,19) – 0,56***(0,20) – 0,61***(0,2) Passé commun 0,31**(0,24) 0,33*(0,17) 0,31**(0,18) Intfi – 1,17***(0,27) Intfj 3,62***(0,89) Dntf1 Ref Dntf2 0,54***(0,12) Dntf3 0,80***(0,15) Constante R2 ajusté – 26,82***(1,53) 0,53 – 30,82***(2,62) 0,54 – 26,93***(2,78) 0,54 Nombre d’observations 917 917 917 Seuil de significativité : *** 1%, **5% et *10%. Les écarts-types sont notés entre parenthèses. Note : Toutes les variables quantitatives correspondent à une moyenne sur 3 ans (1995-97). Ref : variable indicatrice de référence. Il s’agit des pays du Sud qui respectent les 4 normes. Sources : Xij (IMF, Direction of Trade Statistics, Statistical Yearbook, 1997) ; Y, Decoij et accords commerciaux (World Bank, World Development Indicators, 2003) ; Distij et Langue commune (Base de J. Haveman, http://www.eit.org/Trade.Ressources/Data/Gravity) ;Intf et Dntf, construction de l’auteur.

Impact du respect des normes de travail fondamentales sur le commerce Sud-Nord

Tableau 2

Impact du respect des normes de travail fondamentales sur le commerce (variation de l’échantillon et de la spécification de l’équation de gravité)

Tableau 2
Variable à expliquer : exportations du Sud vers le Nord (Xij) (3a) (3b) (4) PNBi (Yi) 0,88***(0,04) 0,16***(0,04) 0,19*** (0,04) PNBj (Yj) 1,09***(0,03) 1,08***(0,04) 1,08***(0,04) Distance éco (Decoij) – 4,46***(0,75) – 3,68***(0,94) – 3,84***(0,81) Distance éco (Decoij)2 2,94*** (0,80) 1,64** (0,79) 1,76** (0,82) Distance relative (Dij) – 0,94***(0,07) – 0,55***(0,11) – 0,78***(0,08) Contiguïté 0,47 (0,36) – 0,03 (0,59) 0,83**(0,42) Dapec 0,64***(0,16) 1,24***(0,19) 1,23***(0,19) Dalena 0,71***(0,21) 2,12***(0,32) 1,56***(0,45) Dlome 0,18 (0,20) – 0,54**(0,20) – 0,53*(0,20) Passé commun 0,46***(0,13) 0,27 (0,18) 0,32*(0,18) Intfi – 0,50**(0,21) – 0,94***(0,32) – 1,25***(0,28) Intfj 3,38***(1,26) 3,13***(1,03) 3,60***(0,90) Démocratie (PRi) 0,30* (0,17) Constante R2 ajusté – 49,03*** 0,73 (1,65) – 29,65*** 0,53 (1,92) – 31,00*** 0,54 (0,30) Nombre d’observations 774 749 909 Seuil de significativité : *** 1%, **5% et *10%. Les écarts-types sont notés entre parenthèses. Sources : Idem tableau 1. Démocratie (Freedom House ; http://www.freedomhouse.org/ratings/index.htm).

Impact du respect des normes de travail fondamentales sur le commerce (variation de l’échantillon et de la spécification de l’équation de gravité)

34L’indicateur synthétique du respect des normes de travail fonda mentales est ensuite introduit dans le modèle de gravité, sous forme quantitative ( Intfi pour les pays du sud et Intfj pour les pays du Nord) puis sous forme qualitative (Dntfki, k = 1, 2, 3). Dans ce second cas, seule la situation des pays du Sud est prise en compte puisque tous les pays du Nord appartiennent à la première classe ( Dntf1). Comme l’a montré l’argumentation théorique, le signe et la significativité du coefficient associé à ces variables sont a priori indéterminés.

35Contrastant avec cette incertitude, les estimations économétriques aboutissent à des résultats sans ambiguïté. Lorsque l’indicateur quantitatif Intfi est introduit dans l’équation de gravité (cf. modèle 2a), cette variable a un signe négatif et est significative au seuil de 1%. Le coefficient correspondant est en outre élevé : une diminution de 1% du respect des normes fondamentales accroîtrait les exportations du Sud vers le Nord de 2,22%. [12] De la même manière, les variables qualitatives indicatrices de la violation partielle (Dntf2) ou totale (Dntf3) des normes fondamentales apparaissent avec un coefficient positif et significatif au seuil de 1% (cf. modèle 2b). La deuxième variable a en outre un coefficient plus élevé que la première.

36Nos estimations montrent ainsi que le respect des normes de travail fondamentales a bien une influence sur les échanges. Cette conclusion va à l’encontre des arguments selon lesquels la violation des normes de travail n’aurait pas de conséquences sur le commerce soit parce qu’elle concernerait essentiellement le secteur des biens non échangeables, soit parce que ses effets sur les exportations seraient neutralisés par des mécanismes de stabilisation tels que la variation du taux de change.

37Les résultats obtenus permettent en outre de préciser le sens de cette influence : toutes choses égales par ailleurs, la violation des normes fondamentales par les pays du Sud a un impact positif sur le commerce Sud-Nord. Autrement dit, même si c’est au prix d’une allocation non optimale des ressources, la violation des quatre normes fondamentales permet d’accroître les échanges.

38Puisque le modèle est spécifié en coupe, la sensibilité et la robustesse de ces premiers résultants doivent être vérifiées en fonction de l’échantillon de pays retenus (TABLEAU 2 – modèles 3) et de la spécification de l’équation de gravité testée.

39Jusqu’à présent, le Sud a été défini par défaut comme regroupant l’ensemble des pays qui n’étaient pas ceux de l’OCDE et à revenu élevé. Cela a conduit à associer des pays très hétérogènes, aussi bien du point de vue des dotations factorielles que du point de vue du respect des normes de travail fondamentales. Sont notamment inclus les pays pétroliers, Hong-Kong et Singapour, et les pays de l’Est. En matière de normes de travail, les pays pétroliers sont en grande majorité des pays ayant un très faible niveau de normes alors que les deux autres groupes correspondent à des pays ayant des normes de travail élevées.

40Lorsque les estimations sont faites en excluant ces différents groupes de pays, les conclusions restent identiques. Les modèles 3a et 3b rapportent les résultats lorsque les pays pétroliers puis les pays de l’Est ne sont pas pris en compte. [13]

41L’influence d’autres variables, qui auraient été omises dans l’équation de gravité et dont l’effet serait capté par les variables représentatives des normes de travail, a également été testée. Ainsi, la significativité du respect des normes de travail peut également traduire l’influence sur les échanges de choix institutionnels plus généraux. Granger et Siroën (2001) ont démontré que la démocratie avait un impact sur le taux d’ouverture. L’indicateur de respect des normes fondamentales pourrait donc capter cet effet plus général. L’indice de respect des libertés politiques proposé par la Freedom House (PRi) est donc ajouté au modèle [14]. Lorsqu’il est introduit avec les indicateurs de respect des normes fondamentales, l’indice de Freedom House est significatif au seuil de 10% mais sans que cela modifie l’incidence du respect des normes fondamentales : les indicateurs de violation de ces normes demeurent négatifs pour les pays du Sud, positifs pour les pays du Nord et significatifs au seuil de 1% (TABLEAU 2 – modèle 4).

42Des variations dans le choix de l’échantillon comme dans la spécification du modèle n’ont donc pas modifié les conclusions précédemment établies sur l’impact significatif et négatif du respect des normes de travail fondamentales sur les échanges Sud-Nord. La valeur du coefficient associé aux indicateurs synthétiques du respect des normes varie néanmoins significativement d’une estimation à l’autre.

Conclusion

43L’analyse théorique a permis de montrer comment le respect des normes de travail fondamentales influençait le degré d’ouverture commerciale. En raison de la pluralité des mécanismes en jeu sur le marché du travail, elle ne permet cependant de conclure ni sur le sens ni sur l’ampleur de l’impact global de la violation des quatre normes de travail fondamentales.

44Contrastant avec ces incertitudes théoriques, l’analyse empirique montre qu’en l’absence de normes, les échanges Sud-Nord peuvent s’écarter significativement du potentiel de commerce, défini à partir du modèle de gravité. Plus précisément, la violation des normes fondamentales par les pays du Sud accroît le volume de leurs échanges vers le Nord.

45Si la violation des normes fondamentales n’avait eu aucune influence sur l’échange, la question institutionnelle du rôle de l’OMC et “des clauses sociales” aurait été tranchée : normes de travail et commerce seraient des questions séparées relevant d’institutions spécifiques. Dès lors qu’un lien positif a été mis en évidence entre ces deux variables, cette séparabilité doit être remise en cause. Le lien existant entre le commerce et les normes de travail fondamentales peut justifier que le respect de ces normes soit intégré dans les traités commerciaux, qu’ils soient multilatéraux, régionaux ou bilatéraux. Les modalités pratiques envisageables d’une telle prise en compte sont diverses : elles ne se limitent pas à d’éventuelles sanctions envers les pays ne respectant pas les normes ; elles peuvent également prendre la forme de mesures incitatives, qui accordent une plus grande ouverture aux partenaires respectant les normes fondamentales.

46S’il existe effectivement une influence positive de la violation des normes fondamentales sur les échanges, la stimulation du commerce par une telle stratégie risque cependant d’avoir des effets distortifs importants. Les arguments théoriques qui ont permis de discuter l’influence des normes de travail sur les échanges montrent en effet que l’impact positif de la violation des normes est à l’origine de distorsions qui pèsent, notamment, sur l’allocation optimale des ressources ou encore l’accumulation de capital humain. En d’autres termes, les résultats économétriques présentés ne préjugent en rien des conséquences de la violation des normes sur le développement des pays concernés.

47Par ailleurs, ces premières investigations économétriques devraient encore être approfondies. D’une part, la construction d’un indicateur synthétique du respect des normes fondamentales pour une ou plusieurs autres périodes permettrait de procéder à des estimations en panel, ce qui limiterait les problèmes et les biais existant avec des estimations en coupe. D’autre part, l’analyse a été menée à un niveau agrégé. Or, l’utilisation de données commerciales sectorielles permettrait de comparer et de discuter l’impact du respect des normes fondamentales en fonction de l’intensité factorielle, en particulier en travail, des biens échangés.

48C.G. [15]

49Date de réception de l’article : 4 juin 2003

50Date d’acceptation pour publication : 21 septembre 2004


Annexe 1

Indicateur du respect des normes de travail fondamentales

51Le TABLEAU A1.1 présente, pour chaque pays de l’échantillon, l’indicateur synthétique du respect des quatre normes de travail fondamentales :

  • la répartition en trois grandes classes (respect, respect partiel, absence de respect des normes) correspond à la forme qualitative de l’indicateur, c’est-à-dire aux variables muettes Dntf1, Dntf2 et Dntf3 ;
  • les valeurs entre parenthèses correspondent à la forme quantitative de cet indicateur, notée Intf.

Tableau A1.1

Indicateur du respect des normes de travail fondamentales

Tableau A1.1
Pays respectant Pays respectant les normes (29) partiellement Pays ne respectant pas les normes (23) les normes (13) Allemagne (1) Japon (0,92) Israël (0,75) Malaisie (0,5) Indonésie (0,25) Australie (1) Nelle-Zélande (0,92) Russie (0,75) Émirats Arabes Unis (0,42) Kenya (0,25) Autriche (1) Pologne (0,92) Singapour (0,75) Maroc (0,42) Brésil (0,25) Belgique (1) Portugal (0,92) Afrique du Sud (0,67) Turquie (0,42) Côte d’Ivoire (0,25) Canada (1) Rép. tchèque (0,92) Corée (0,67) Syrie (0,33) Nigeria (0,25) Danemark (1) Royaume-Uni (0,92) Venezuela (0,67) Arabie Saoudite (0,33) Pérou (0,25) Finlande (1) Slovaquie (0,92) Chili (0,66) Chine (0,33) R. Dominicaine (0,16) France (1) États-Unis (0,83) Algérie (0,58) Égypte (0,33) Inde (0,08) Irlande (1) Grèce (0,83) Mexique (0,58) Iran (0,33) Philippines (0,08) Norvège (1) Hongkong (0,83) Tunisie (0,58) Viet Nam (0,33) Thaïlande (0,08) Pays-Bas (1) Hongrie (0,83) Colombie (0,5) Zimbabwe (0,33) Bangladesh (0) Suède (1) Roumanie (0,83) Équateur (0,5) Pakistan (0) Suisse (1) Argentine (0,75) Sri Lanka (0,5) Espagne (0,92) Bulgarie (0,75) Italie (0,92)

Indicateur du respect des normes de travail fondamentales

Annexe 2
Tableau A2.1

Critères qualitatifs et indicateurs quantitatifs utilisés pour construire la base de données sur le respect des normes de travail fondamentales

Tableau A2.1
Critères d’appréciation Sources Autres indicateurs quantitatifs Travail des enfants – Données quantitatives (estimation du nombre d’enfants travaillant, taux d’activité…). – Secteur d’activité et type d’emploi. – Conditions de travail et de rémunération. – US Department of Labor, 1994, By The Sweat and Toil of Children, Vol. 1 et 2, Washington D.C. – US Department of State, 1997, Country Report on Human Right Practices for 1997, Washington D.C., section 6.d. Taux d’activité des enfants de 10 à 14 ans (1996). Source : Banque mondiale, World Development Indicators. Travail forcé Existence et importance du travail forcé. – OIT, 2001, Stopping Forced Labour, Partie I, Genève. – OIT, 1998, Rapport de la Commission d’experts pour l’application des conventions et recomman-dations, Rapport III (Partie 1A), Conférence inter-nationale du travail – 86e session, Genève. – US Department of State, 1997, Ibid., section 6 c. Discrimination – Existence et importance de la discrimination raciale dans l’emploi. – Part des minorités dans la population totale. – Comité pour l’Élimination de la Discrimination Raciale (CEDR), Conclusions du Comité, Rapport pour chaque pays. – US Department of State, 1997, Ibid., section 5. – Existence et importance de la discrimination sexuelle et place des femmes dans la société. – Discrimination dans l’emploi. – Discrimination dans l’accès à l’éducation. – Comité sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), Observations finales du Comité, Rapport pour chaque pays. – US Department of State, 1997, Ibid., section 5. – Gender Empowerment Measure. Source : PNUD, 1998, Human development Report 1998. – Part des femmes dans la population active. Source : WDI. – Part des femmes dans le revenu. Source : PNUD, 1998, Ibid Liberté syndicale – Entraves à la création et à l’existence de syndi-cats libres. – Entraves aux droits de grève et de négociation collective. – Protection des adhérents des syndicats. – BIT, 1998, Ibid. – Confédération Internationale des Syndicats Libres, 1998, Rapport annuel des violations des droits syndicaux, Bruxelles. – US Department of State, 1997, Ibid, section 6a et b. – Nombre de grèves et de lockout par an. Source : Laborstat. – Taux de syndicalisation. Source : BIT, 1997, Le travail dans le monde 1997-98, Tableau 1.2

Critères qualitatifs et indicateurs quantitatifs utilisés pour construire la base de données sur le respect des normes de travail fondamentales

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Mots-clés éditeurs : modèle de gravité, normes de travail fondamentales, commerce

Date de mise en ligne : 01/01/2007

https://doi.org/10.3917/ecoi.101.0047

Notes

  • [1]
    Clotilde Granger, Post-Doctorante, EURIsCo – Equipe universitaire de recherche “Institutions : Coordination, Organisation”, Université Paris-Dauphine (clotilde. ggranger@ noos. fr).
  • [2]
    En général, les quelques études empiriques existantes relèvent plus des statistiques descriptives que de l’estimation d’un modèle économétrique. Elles ne prennent donc pas en compte les principaux déterminants des échanges avant d’isoler l’impact spécifique des normes de travail.
  • [3]
    L’explication donnée par van Beers est la suivante : en raison de la plus faible élasticité de la demande de travail qualifié par rapport à la demande de travail non qualifié, le relèvement des normes de travail entraîne une baisse plus importante de la demande de travail non qualifié. Cela se traduit par une diminution plus forte de la rémunération de ce facteur et compense davantage le coût d’un relèvement des normes de travail. Dès lors, la compétitivité des biens intensifs en travail qualifié est plus affectée que celle des biens intensifs en travail non qualifié.
  • [4]
    Par exemple, si le pays concerné est spécialisé dans la production de biens intensifs en travail, l’application d’une norme, telle que l’abolition du travail des enfants, réduit la quantité de main-d’œuvre disponible et conduit à un accroissement des échanges.
  • [5]
    Dans le modèle de Melchior (1996) sur le travail des enfants, cette main-d’œuvre est spécifique au secteur exportateur ; dans ce cas, une réduction de l’emploi des enfants conduit à une diminution des échanges. En revanche, dans le modèle de Hansson et Lundahl (1984) sur la discrimination raciale, le travail des noirs est le facteur mobile ; un renforcement de la discrimination conduit à une diminution de la dotation en travail qui pèse sur les deux secteurs ; l’évolution des échanges est dans ce cas indéterminée.
  • [6]
    L’hypothèse de parfaite substituabilité, par exemple entre le travail des enfants et celui des adultes, signifie qu’un adulte peut faire ce que fait un enfant et inversement, sous réserve de prendre en compte leur différence intrinsèque de productivité (Basu, 1999, p. 1100).
  • [7]
    Siroën (1996) formalise cette idée, à partir de la relation entre l’élasticité-prix de l’offre de travail et le degré de monopsone.
  • [8]
    Dans cette étude, les pays du Nord correspondent aux 21 pays de l’OCDE à revenu élevé ; le reste de l’échantillon est assimilé au Sud.
  • [9]
    La formule qui permet de ramener la somme S à l’intervalle [0 ; 1] et d’obtenir l’indicateur Intf est ((S-4)/12)).
  • [10]
    Par exemple, la Malaisie a la même note que le Sri-Lanka (Intf = 0,5). Elle appartient cependant au groupe des pays ne respectant pas les normes (Dntf3) en raison de l’importance de la discrimination et des entraves aux droits syndicaux ; le Sri-Lanka est lui dans le second groupe, celui des pays respectant partiellement les normes (cf. ANNEXE 1).
  • [11]
    Plus précisément, cet indicateur est défini par :
    Il mesure l’écart relatif des niveaux de développement (notés yi et yj).
  • [12]
    Puisque le modèle est spécifié en logarithme alors que Intfi est en niveau, la variation est donnée par exp(1.17)-1. Pour les pays du Nord, l’effet de la violation des normes fondamentales serait positif et encore plus élevé puisque le coefficient de Intfj est plus grand. Ce résultat est surprenant. Il doit être considérer avec précaution dans la mesure où parmi les pays du Nord qui n’atteignent pas la valeur maximale (Intfj =1) se trouvent les États-Unis et le Japon (cf. infra).
  • [13]
    Les estimations excluant Hong-Kong et Singapour ne sont pas présentées car elles aboutissent strictement aux mêmes conclusions.
  • [14]
    Habituellement, c’est l’indicateur global de la Freedom House, faisant état du respect des libertés à la fois politiques et civiles, qui est utilisé. Ici, seule la composante relative au respect des libertés politiques est prise en compte car la seconde inclut une évaluation du respect des normes de travail fondamentales, sans qu’elle puisse être spécifiquement isolée. Par ailleurs, seul l’indice représentatif de la situation dans les pays du Sud est introduit dans l’équation à estimer puisque cet indice est égal à 1 pour l’ensemble des pays du Nord.
  • [15]
    L’auteur remercie les rapporteurs anonymes ainsi que Aude Sztulman et Jean-Marc Siroën pour leurs remarques et suggestions mais reste seule responsable des erreurs et inexactitudes qui demeureraient.

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