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Article de revue

Les conséquences des nouvelles normes de construction sur l’immeuble de demain

Pages 41 à 46

Notes

  • [1]
    Ponts thermiques : pertes de chaleur constatées au niveau des dalles ou des murs de refend.

I – Les normes imposées au bâtiment par le grenelle de l’environnement

1Le Grenelle de l’Environnement doit permettre, d’une part, de diviser par quatre la production de gaz à effet de serre (GES) pour revenir au niveau de 1990 d’ici 2020 et, d’autre part, de réduire de 40 % les consommations d’énergie finale.

2Sachant que le secteur du bâtiment représente à lui seul 46 % de la consommation totale, il n’est pas étonnant qu’il bénéficie d’un plan dédié.

3Les objectifs affichés par le Grenelle de l’Environnement sont, à court terme, de produire dans le neuf des bâtiments basse consommation, c’est-à-dire qui ne produisent pas plus de cinquante kWh/m2. C’est le cas depuis 2011 pour les bâtiments tertiaires, publics et les logements situés en zone ANRU et ce sera effectif d’ici 2013 pour les autres. Cette première étape doit aboutir d’ici 2020 à produire des bâtiments à énergie positive (BEPOS).

II – Rome ne s’est pas faite en un jour… le BBC non plus…

4Pour se donner les moyens d’atteindre ces objectifs, le secteur du bâtiment a connu, fort heureusement, une réglementation évolutive qui a été souvent motivée par un contexte économique aléatoire.

5Les premières réglementations thermiques datent des crises pétrolières des années 70 où, pour la première fois, le coût de l’énergie a été au centre des préoccupations des acteurs de la construction.

6Plusieurs réglementations thermiques se sont ainsi succédées. La dernière en date, et celle applicable actuellement, est la RT 2005. Entre 2005 et maintenant, des approches volontaires sont venues accélérer le processus. Elles ont été motivées par la préoccupation croissante des acquéreurs de logements sur l’impact environnemental de leur acquisition. Nous pouvons ainsi évoquer les normes suivantes :

  • HPE (Haute Performance Energétique) : RT 2005 - 10 % de consommation d’énergie
  • THPE (Très Haute Performance Energétique) : RT 2005 - 20% de consommation d’énergie.

7Le dernier label qui est venu définitivement positionner le secteur du bâtiment dans la mouvance du Grenelle de l’Environnement est le BBC (Bâtiment Basse Consommation) qui vise à produire des bâtiments qui consomment moins de cinquante kWh/m2. Le choix des promoteurs immobiliers de s’inscrire dans cette norme a été principalement motivé par l’avantage commercial du dispositif « Scellier » qui conditionne les déductions fiscales à l’acquisition de logements labellisés BBC. Ainsi, le passage à la RT 2012, dernière réglementation à venir qui officialisera la norme BBC, risque d’être simplifié et nous avons fort à parier qu’elle n’impliquera qu’une révolution mesurée dans le processus de construction.

III – Quelles conséquences pour quelle construction ?

8La norme BBC que nous appliquons aux constructions nouvelles depuis principalement 2009 (date d’application du dispositif « Scellier BBC ») nous impose de respecter plusieurs principes pour répondre à cette nouvelle problématique thermique :

  • une conception bioclimatique de l’édifice ;
  • une forte isolation thermique ;
  • une parfaite étanchéité à l’air ;
  • une bonne performance des équipements techniques (éclairage, chaudière, pompe…) ;
  • le choix du mode de chauffage ;
  • les énergies renouvelables.

A – Une conception bioclimatique

9Dans l’idéal, choisir l’implantation d’un bâtiment permet de travailler la compacité d’un bâtiment mais également son orientation pour profiter de l’apport de lumière naturelle. C’est-à-dire que, pour un moindre coût, notre bâtiment répondra à des notions comme le confort d’été qui deviennent prépondérantes dans l’application de la RT 2012.

10En réalité, la conception bioclimatique prend tout son sens lors de la mise en place des écoquartiers ou de zones d’aménagement concerté. L’implantation des bâtiments va pouvoir ainsi se réfléchir dans une globalité de quartier. La construction d’un bâtiment en diffus, c’est-à-dire dans le cadre d’un renouvellement urbain, est dictée plus en fonction de contraintes réglementaires et commerciales. La question thermique se règlera donc par le choix de l’isolation et des matériaux de construction.

B – Une forte isolation thermique

11L’évolution des réglementations thermiques successives a eu pour conséquence de renforcer l’isolation des parois par l’accroissement de leur épaisseur. Il existe trois façons de traiter l’isolation lors de la construction d’un bâtiment : l’isolation intérieure, l’isolation extérieure et l’isolation répartie.

12Outre les performances d’isolation, le choix de la technique va être guidé par des critères économiques et pratiques, sachant que l’enjeu des nouvelles normes thermiques est de supprimer, ou tout du moins diminuer, les ponts thermiques [1].

13L’isolation intérieure reste ainsi, à ce jour, le système le plus utilisé pour des raisons principalement économiques et pratiques (passage de gaines). Les ponts thermiques seront traités par la mise en place de planelles isolantes au niveau des dalles et l’inertie thermique par l’utilisation de matériaux comme la brique ou le béton cellulaire.

14L’isolation extérieure est, de loin, la technique la plus efficace pour répondre aux nouvelles normes thermiques, notamment concernant la RT 2012 qui impose la quasi suppression des ponts thermiques. Le gros désavantage de ce système est son coût de mis en œuvre qui est souvent la raison de son abandon par le maître d’ouvrage.

C – Une parfaite étanchéité à l’air

15Vous pouvez avoir la plus forte isolation qu’il soit, si votre bâtiment ne dispose pas d’une étanchéité à l’air satisfaisante, les déperditions de chaleur seront telles que l’objectif thermique ne pourra pas être atteint.

16Pour atteindre l’objectif, il est primordial de disposer d’une équipe technique compétente. En effet, il ne s’agit plus de qualités ou de caractéristiques de matériaux mais d’une mise en œuvre qui soit irréprochable. Qui n’a jamais fait l’expérience de passer sa main devant une prise électrique et de ressentir un filet d’air froid lors des saisons d’hiver ? Ainsi, il convient d’avoir tout d’abord des plans techniques cohérents afin d’obtenir une continuité d’étanchéité la plus aboutie. Enfin, la mise en œuvre par l’entreprise ne doit souffrir d’aucun défaut, c’est-à-dire avoir des compagnons formés et concernés par cette problématique.

D – Une bonne performance des équipements techniques

17L’enjeu est d’utiliser des équipements qui soient certes performants mais surtout correctement dimensionnés afin d’éviter l’écueil de la contre production.

18L’exemple le plus caractéristique est l’utilisation des pompes à chaleur où de nombreux exemples médiatisés nous ont montré que certains utilisateurs avaient eu des notes d’électricité qui ne correspondaient pas toujours avec les économies qu’on leur avait fait espérer.

19Le principe de la pompe à chaleur est de capter les calories de l’air ou du sol pour chauffer un logement. Cet appareil marchant à l’électricité, il n’a d’intérêt que si les températures extérieures et intérieures ont peu de différence. Dans le cas contraire, gare aux factures !

20Nous avons appliqué ce système sur l’une de nos opérations. L’ensemble des maisons individuelles a donc bénéficié d’une pompe à chaleur afin de chauffer le sol de la cuisine en basse température. Outre ses avantages sur les économies d’énergie, le système a été plébiscité par les acquéreurs.

E – Le choix du mode de chauffage

21Les calculs thermiques donnent la part belle au chauffage au gaz par rapport au chauffage électrique. L’utilisation de cette énergie nous amène forcément à appréhender différemment la gestion de nos logements. Le chauffage au gaz nécessite un entretien et une maintenance avec, en cas de défaut, un risque accru de sinistres. Enfin, les rejets de fumée en façade afférents à ce type de système causent à terme une dégradation prématurée des enduits.

22Les calculs thermiques favorisent la mise en place de chaudières individuelles plutôt que de chaudières collectives. L’explication principale est la perte de chaleur constatée sur le réseau de distribution.

F – Les énergies renouvelables

23Les énergies renouvelables, bien que très vertueuses, n’apportent que de faibles économies en comparaison des points suscités.

24Les panneaux photovoltaïques qui visent à produire de l’électricité ont connu un engouement important lorsque les conditions de rachat par ERDF étaient très intéressantes. Il n’était pas rare notamment que les bailleurs sociaux fassent le choix de cette énergie pour rechercher une optimisation de leur parc locatif. L’implantation de ces panneaux sur le parc privé est beaucoup plus confidentielle. Des problèmes de sécurité peuvent parfois être relevés en cas d’incendie où les services d’intervention, par manque de formation, hésiteraient à arroser lesdits panneaux à cause du risque d’électrocution. Mais ce souci semblerait se résorber par une connaissance accrue des procédures à suivre. Le solaire thermique reste sur le papier l’énergie renouvelable la plus séduisante. Malheureusement, nous avons souvent constaté que sur un immeuble collectif le coût était trop élevé pour obtenir un temps de retour satisfaisant. Le concept vendu au départ peut parfois se révéler désastreux et les charges de copropriété s’en trouver impactées.

IV – Le bâtiment de demain : le BEPOS (2020)

25Le bâtiment à énergie positive (BEPOS) est, comme son nom l’indique, un ouvrage qui produira plus d’énergie qu’il n’en consomme.

26Nos connaissances techniques actuelles nous permettraient dès aujourd’hui de produire de tels bâtiments. Sa réussite repose essentiellement sur la maîtrise des consommations d’électricité. Le chauffage ne sera pas un problème notamment grâce à l’efficacité énergétique des isolants.

27La consommation d’électricité étant l’enjeu principal de ces bâtiments, le comportement des utilisateurs sera déterminant pour obtenir une efficacité énergétique satisfaisante. Sans changement des habitudes et sans sobriété énergétique, il restera un leurre.

28Nous voyons bien que les économies d’énergie dans le secteur du bâtiment ont amené une première révolution au niveau technique. Une deuxième révolution doit s’opérer au niveau des utilisateurs qui ont dorénavant la seule responsabilité de nous faire entrer définitivement dans l’ère de la construction verte.


Mise en ligne 01/01/2020

https://doi.org/10.3917/dv.073.0041

Notes

  • [1]
    Ponts thermiques : pertes de chaleur constatées au niveau des dalles ou des murs de refend.
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