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Article de revue

Éloge de la folie et désaveu de la raison dans les Pensées de Pascal

Pages 235 à 246

Notes

  • [1]
    B.?Pascal, Pensées, fr.?31. La numérotation des fragments correspond au classement établi par Philippe?Sellier.
  • [2]
    Fr.?323.
  • [3]
    1 Co?1, 18 et?20-21. La Bible est citée dans la traduction de L.-I. Le Maistre de Sacy.
  • [4]
    Méthodes chez Pascal. Actes du colloque tenu à Clermont-Ferrand, 10-13?juin 1977, Paris, PUF, 1979, p.?297-307.
  • [5]
    Ibid., p.?305-307.
  • [6]
    Ibid., p.?305.
  • [7]
    Ibid., p.?302.
  • [8]
    Ibid., p.?299.
  • [9]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», Courrier du Centre International Blaise?Pascal, no?20, 1998, p.?12.
  • [10]
    Fr.?680, abusivement appelé «pari de Pascal». Pour les fragments longs, je cite la pagination de l’édition des Pensées par G.?Ferreyrolles, Paris, Librairie Générale Française, coll. «Classiques de poche», 2000. La?phrase sur l’abêtissement se trouve p.?465.
  • [11]
    Fr.?680, p.?464.
  • [12]
    Fr.?680, p.?460.
  • [13]
    Ibid.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    «Par raison vous ne pouvez défendre nul des deux» lui déclare l’apologiste (fr.?680, p.?460).
  • [16]
    Fr.?680, p.?461.
  • [17]
    Règles de probabilité appliquées au jeu. Voir L.?Thirouin, Le Hasard et les règles. Le modèle du jeu dans la pensée de Pascal, Paris, Vrin, 1991, p.?107-129. Le chevalier de Méré, joueur et libertin, avait posé à Pascal deux problèmes touchant le jeu. Pascal reprend la question dans une perspective apologétique.
  • [18]
    Fr.?680, p.?463.
  • [19]
    Méthodes chez Pascal, ouvr.?cit., p.?305.
  • [20]
    Cf. Mt?10, 39: «Celui qui conserve sa vie la perdra; et celui qui aura perdu sa vie pour l’amour de moi la retrouvera».
  • [21]
    Fr.?680, p.?463.
  • [22]
    Fr.?680, p.?467.
  • [23]
    Fr.?214.
  • [24]
    «Il n’y a rien de si conforme à la raison que ce désaveu de la raison» (fr.?213). Les éditeurs des Pensées n’ont pas remarqué que ce fragment est une reprise en négatif d’une proposition que saint Bernard oppose à Abélard, dans une lettre adressée au pape Innocent?II (lettre?190, souvent placée parmi les traités de saint Bernard dans les éditions du XVIIe?siècle). Pascal a pu la connaître par la traduction d’Antoine Le Maistre dans La Vie de saint?Bernard [...], Paris, A.?Vitré et Vve?Durant, 1648, p.?544: «Qu’y a-t-il de moins raisonnable, que de s’efforcer de s’élever au-dessus de la raison par la raison seule?»
  • [25]
    Fr.?524.
  • [26]
    Voir L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?8.
  • [27]
    Ibid., p. 11.
  • [28]
    Fr.?60.
  • [29]
    «Regina del mondo». Pascal cite le titre d’un ouvrage qui n’a pu être identifié avec certitude. Fr.?78, p.?71.
  • [30]
    Fr.?78, p.?66.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Ibid., p.?67.
  • [33]
    Ibid., p.?71.
  • [34]
    Voir G.?Ferreyrolles, Pascal et la raison du politique, Paris, PUF, 1984, p.?103-104, et Les Reines du monde: l’imagination et la coutume chez Pascal, Paris, H.?Champion, 1995, p.?26-30.
  • [35]
    Fr.?48. Pascal cite Rm?8, 20-21: «Les créatures [...] sont assujetties à la vanité [...] avec espérance d’être délivrées».
  • [36]
    Fr.?60.
  • [37]
    Voir «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [38]
    Fr.?126.
  • [39]
    Fr.?124.
  • [40]
    Fr.?27.
  • [41]
    Fr.?682, p.?477. Voir également fr.?681, p.?476, et fr.?682, p.?477-478.
  • [42]
    Fr.?195.
  • [43]
    Fr.?681, p.?473.
  • [44]
    Voir fr.?195, 516, 796, p.?628 et 799, p.?631.
  • [45]
    Sg?19, 4, cité au fr.?796, p.?628: «[Les Égyptiens] étaient conduits à cette fin par une nécessité dont ils étaient dignes».
  • [46]
    Fr.?27.
  • [47]
    Liasses?I à XXVIII.
  • [48]
    Fr.?164, p.?115.
  • [49]
    Le fr.?164 conclut la liasse «Contrariétés».
  • [50]
    Fr.?164, p.?115-116.
  • [51]
    Fr.?164, p.?116. Passage rayé par Pascal.
  • [52]
    Cette interprétation va dans le sens de l’étude du titre de la liasse?XVI par Laurent?Thirouin: «Transition de la connaissance de l’homme à Dieu» ne doit pas être comprise comme la transition rhétorique d’une partie anthropologique (connaissance de l’homme) à une partie théologique (connaissance de Dieu), mais comme le mouvement (transitus) qui va de la capacité de l’homme à connaître, c’est-à-dire son ignorance, à Dieu. Voir «“Transition de la connaissance de l’homme à Dieu”: examen d’une liasse des Pensées», Le Rayonnement de Port-Royal. Mélanges en l’honneur de Philippe?Sellier, Paris, Champion, 2001, p.?362.
  • [53]
    Les Essais de Montaigne constituent une autre source essentielle du passage. Sur le rôle de Montaigne dans la réflexion de Pascal sur les sceptiques et les dogmatiques, voir l’Entretien avec monsieur de Sacy.
  • [54]
    Fr.?164.
  • [55]
    É.?Gilson, L’Esprit de la philosophie médiévale, Paris, Vrin, 1989 [1re?éd. 1932], ch.?11. De ce point de vue, saint?Bernard est une source décisive des Pensées. Voir S.?Icard, Port-Royal et saint?Bernard de Clairvaux (1608-1709), à paraître chez H.?Champion, ch.?10.
  • [56]
    Fr.?36.
  • [57]
    1 Co?1, 25.
  • [58]
    Fr.?574.
  • [59]
    Fr.?164, p.?117-118.
  • [60]
    Fr.?164, p.?118.
  • [61]
    Fr.?183.
  • [62]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [63]
    Fr.?289.
  • [64]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [65]
    Ibid., p.?15.
  • [66]
    Fr.?323.
  • [67]
    Fr.?680, p.?467.
  • [68]
    Fr.?46.
  • [69]
    D’une certaine manière, ils recouvrent les trois ordres décrits par Pascal au fr.?339: les corps, les esprits et la charité.
English version

1«?Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie de n’être pas fou?» [1]. Cette affirmation de Pascal montre que le projet d’Apologie de la religion chrétienne, qui nous est parvenu sous le titre de Pensées, s’inscrit dans la tradition de l’éloge de la folie. La source paulinienne transparaît clairement sous la plume de l’apologiste?: «?Après avoir étalé tous ses miracles et toute sa sagesse, [la religion chrétienne] réprouve tout cela et dit qu’elle n’a ni sagesse ni signe, mais la croix et la folie?» [2]. Pascal fait ici référence à un passage de la Première Lettre aux Corinthiens?:

La parole de la croix est une folie pour ceux qui se perdent, mais pour ceux qui se sauvent, c’est-à-dire pour nous, elle est la vertu et la puissance de Dieu. [...] Que sont devenus les sages? Que sont devenus les docteurs de la loi? Que sont devenus ces esprits curieux des sciences de ce siècle? Dieu n’a-t-il pas convaincu la sagesse de ce monde? Car Dieu voyant que le monde, avec la sagesse humaine, ne l’avait point connu dans les ouvrages de la sagesse divine, il lui a plu de sauver par la folie de la prédication ceux qui croiraient en lui [3].

2Étudier l’éloge de la folie dans l’apologétique pascalienne n’est pas une idée nouvelle. Dans le colloque Méthodes chez Pascal, Lane?Heller a donné une communication intitulée?: «?La folie dans l’Apologie pascalienne?» [4]. Il y montre notamment que le texte de saint?Paul est fréquemment cité ou paraphrasé dans les Pensées. Mais cette étude n’a pas épuisé le sujet. En effet, dans les entretiens reproduits dans les actes du colloque, Thérèse?Goyet et Pierre?Magnard critiquent le fait que «?folie?» soit compris dans le même sens, que Pascal désigne la folie du monde ou la folie de la croix [5]. Or, dans la Vulgate, fréquentée assidûment par l’apologiste, la première est dite «?vanitas?» et la seconde «?stultitia?»[6]. De ce problème de méthode découle un problème d’interprétation. Pour Lane?Heller, Pascal placerait le libertin devant une alternative, l’obligeant à choisir entre la folie du monde et la folie de la croix. L’apologiste jouerait folie contre folie?:

Le bouleversement des valeurs mettra les perspectives du libertin sens dessus dessous?: il verra les choses d’un œil neuf. La folie de la religion finira par représenter la vraie sagesse. Il se déclarera impuissant devant la folie du monde et embrassera la folie de la croix [7].

3Si le monde est fou, la folie de la religion chrétienne est sage. De ce renversement du pour au contre, Lane?Heller déduit que pour Pascal, la religion est vraie parce qu’elle est folle, c’est-à-dire sage par rapport à la folie du monde. L’apologiste ferait de la déraison un critère de vérité?:

La tactique pascalienne consiste à reconnaître le bien-fondé du reproche libertin pour se ménager une rencontre sur un terrain d’entente. Pascal profitera de la remarque du libertin pour montrer que la religion ne relève pas du domaine de la raison, mais plutôt de celui du cœur qui est d’un ordre différent de genre. La foi est folie pour la raison?: celle-ci ne saurait voir les raisons du cœur qui la dépassent. Paradoxalement, être raisonnable en religion, c’est rejeter la raison comme critère de vérité pour y substituer la déraison. Il s’agit alors, de toute évidence, de revaloriser le terme de folie, car cette folie est une profonde sagesse [8].

4Le texte des Pensées résiste à cette interprétation. L’apologiste distingue la vanitas de la stultitia. Comme l’a montré Laurent?Thirouin, Pascal désigne comme vain «?un comportement dont la cause ne peut être en aucune manière être élevé au rang philosophique de raison?» [9]. La folie des sages fait partie de ces comportements que Pascal décrit dans la liasse «?Vanité?». Tout autre est l’abêtissement auquel l’apologiste invite le libertin dans Le Discours de la machine[10]?: il s’agit pour l’incroyant de travailler «?non pas à [se] convaincre par l’augmentation des preuves de Dieu, mais par la diminution de [ses] passions?» [11]. L’apologiste refuse de démontrer l’existence de Dieu, car «?la raison n’y peut rien déterminer?» [12]. C’est pourquoi les chrétiens «?qui professent une religion dont ils ne peuvent rendre raison [...] déclarent en l’exposant au monde que c’est une sottise, stultitiam?» [13]. Confronté à l’alternative «?Dieu est, ou il n’est pas?» [14], le libertin ne peut recourir à la raison [15]?; il est donc invité à jouer sa «?béatitude?» [16] en cherchant où se trouve la plus grande probabilité de gain. Selon les calculs des «?partis?» [17], la conclusion s’impose?: «?Partout où est l’infini et où il n’y a pas infinité de hasards de perte contre celui de gain, il n’y a point à balancer, il faut tout donner?» [18]. La stultitia des chrétiens n’est donc pas déraisonnable. Comme l’indique Thérèse?Goyet, «?bêtise, ce n’est jamais déraison?» [19]. Bien au contraire, Pascal désigne comme déraisonnable celui qui ne parie pas que Dieu est?: «?Quand on est forcé à jouer, il faut renoncer à la raison pour garder la vie [20] plutôt que de la hasarder pour le gain infini aussi prêt à arriver que la perte du néant?» [21]. C’est donc à tort que Lane?Heller s’appuie sur l’idée d’un «?Dieu sensible au cœur, non à la raison?» [22], exprimée à la fin du Discours de la machine, pour montrer que la déraison est pour Pascal un critère de vérité en matière de religion. Le titre de la liasse?XIV est d’ailleurs explicite?: «?Soumission et usage de la raison, en quoi consiste le vrai christianisme?». L’apologiste y désigne «?deux excès?»?: «?Exclure la raison, n’admettre que la raison?» [23]. Ce qui est raisonnable en religion, ce n’est pas la déraison mais le «?désaveu de la raison?» [24]. On peut conclure avec Pierre?Magnard qu’«?il ne faut plus chercher dans “folie” le contraire de “raison”?», du moins dans le cas de la stultitia chrétienne.

5En premier lieu, il faut donc distinguer les différentes folies dont il est question dans les Pensées. Les occurrences de «?folie?» se répartissent dans au moins trois ensembles thématiques?: la folie comme fondement du politique, la folie de la science humaine et la folie de la religion chrétienne. Ces trois ensembles correspondent à trois discours développés dans le projet d’apologie?: la vanité, «?l’inutile recherche du vrai bien?» [25] et la vérité de la religion chrétienne. Ces trois discours correspondent également à trois notions bibliques que Pascal connaît par la Vulgate?: vanitas, sapientia et stultitia.

6En second lieu, il faut chercher à saisir l’unité conceptuelle de ces occurrences. En effet, Pascal n’utilise pas un langage technique, mais il fait de termes courants des catégories très précises [26]. Dans le fragment?31, l’adverbe doit retenir particulièrement l’attention?: «?Les hommes sont si nécessairement fous que ce serait être fou par un autre tour de folie de n’être pas fou?». L’apologiste ne se contente pas de constater la folie universelle?; il met en lumière la nécessité qui la régit. La folie du monde est assurément une marque de sa vanité. Mais cette folie, en tant que phénomène universel et nécessaire, n’est pas vaine?: tout au contraire, elle est un «?effet?», c’est-à-dire «?un phénomène considéré comme lieu privilégié d’une question –?un phénomène à travers lequel s’exprime une règle?» [27]. Rendre raison de la folie comme effet semble être le véritable objet du propos de l’apologiste.

LA FOLIE, FONDEMENT DU POLITIQUE

7Le premier usage de «?folie?» est concentré dans la liasse?III, intitulée «?vanité?». L’apologiste y montre que l’ordre social, et l’ordre politique en particulier, est fondé sur la folie?:

La puissance des rois est fondée sur la raison et sur la folie du peuple, et bien plus sur la folie. La plus grande et importante chose du monde a pour fondement la faiblesse. Et ce fondement-là est admirablement sûr, car il n’y a rien de plus sûr que cela que le peuple sera faible. Ce qui est fondé sur la seule raison est bien mal fondé, comme l’estime de la sagesse [28].

8Qu’entend Pascal par «?folie?» lorsqu’il voit dans la folie du peuple le fondement très sûr du politique? Que l’imagination soit la «?reine du monde?» [29]. Son empire est plus puissant que celui de la raison. Pour Pascal, elle est «?maîtresse d’erreur et de fausseté, et d’autant plus fourbe qu’elle ne l’est pas toujours, car elle serait règle infaillible de vérité si elle l’était infaillible du mensonge?» [30]. En cela elle produit des phénomènes vains. L’apologiste précise bien que son discours ne porte pas sur les fous, qui vivent dans un monde imaginaire, mais sur les sages qui se laissent gouverner par l’imagination?:

Je ne parle pas des fous, je parle des plus sages et c’est parmi eux que l’imagination a le plus grand droit de persuader les hommes. La raison a beau crier, elle ne peut mettre le prix aux choses [31].

9Le fou est une donnée sociale que Pascal ne conteste pas et n’interroge pas. Il est le visage démasqué d’une folie universelle, qui est plus proprement l’objet du discours de l’apologiste. L’apologiste n’accorde au fou aucune sagesse paradoxale. En revanche, Pascal décrit un phénomène qu’il interroge?: «?[L’imagination] ne peut rendre sages les fous, mais elle les rend heureux, à l’envi de la raison, qui ne peut rendre ses amis que misérables, l’une les couvrant de gloire, l’autre de honte?» [32]. Il s’agit de l’un des «?effets de cette faculté trompeuse, qui semble nous être donnée exprès pour nous induire à une erreur nécessaire?» [33].

10Comment la folie du peuple se manifeste-t-elle à l’égard de la puissance royale? Pascal en donne un exemple au fragment?59, placé juste avant l’affirmation que la folie est le fondement le plus sûr de l’ordre politique?:

La coutume de voir les rois accompagnés de gardes, de tambours, d’officiers et de toutes les choses qui ploient la machine vers le respect et la terreur font que leur visage, quand il est quelquefois seul et sans ces accompagnements, imprime dans leurs sujets le respect et la terreur parce qu’on ne sépare point dans la pensée leur personne d’avec leur suite qu’on y voit d’ordinaire jointe. Et le monde qui ne sait pas que cet effet vient de cette coutume croit qu’il vient d’une force naturelle.

11L’ordre politique est fondé sur l’imagination et la coutume [34]. C’est une marque de sa vanité. Quel est le but de cette entreprise de démystification? Mettre en lumière la nécessité qui conduit les hommes à subir cette folie?:

Les vrais chrétiens obéissent aux folies néanmoins, non pas qu’ils respectent les folies, mais l’ordre de Dieu qui pour la punition des hommes les a asservis à ces folies. Omnis creatura subjecta est vanitati. Liberabitur[35].

12En décrivant la folie du peuple comme un fondement «?admirablement sûr?» [36], l’apologiste fait apparaître la raison de l’effet, à savoir la Providence qui punit les hommes. Pascal reprend d’ailleurs les mêmes exemples dans la liasse «?Raison des effets?». «?Il faut avoir une pensée de derrière, et juger de tout par là, en parlant cependant comme le peuple?» affirme-t-il au fragment?125. Laurent?Thirouin a montré que Pascal considère ici la relation entre énoncé et énonciation [37]. Il faut «?parler comme le peuple?», c’est-à-dire donner le même énoncé, mais en ayant «?une pensée de derrière?», c’est-à-dire en situant la vérité à son véritable point?: «?La vérité est bien dans leurs opinions, mais non pas au point où ils se figurent?» [38]. Tout est affaire de «?gradation?»?:

Le peuple honore les personnes de grande naissance. Les demi-habiles les méprisent, disant que la naissance n’est pas un avantage de la personne, mais du hasard. Les habiles les honorent, non par la pensée du peuple, mais par la pensée de derrière. Les dévots, qui ont plus de zèle que de science, les méprisent, malgré cette considération qui les fait honorer par les habiles, parce qu’ils en jugent par une nouvelle lumière que la piété leur donne. Mais les chrétiens parfaits les honorent par une autre lumière supérieure.
Ainsi se vont les opinions succédant du pour au contre, selon qu’on a de lumière [39].

13Dans la puissance des rois, Pascal s’attache à décrire ce qui est le plus sûr et le plus universel, la folie du peuple, considérée comme un effet dont la raison est donnée ultimement par la religion chrétienne. Ce dévoilement n’est pas seulement une étape de l’apologie visant à détruire les fausses certitudes pour conduire à la folie de la croix. Le discours sur la vanité est déjà le lieu d’une argumentation apologétique?: la folie est un effet dont l’apologiste, à la différence du libertin, peut donner la raison par une lumière supérieure à la raison. Être sagement fou, ce n’est pas trouver dans la folie un juste regard sur l’homme et sur le monde par delà les apparences?: c’est énoncer une vérité avec le fou, mais depuis le juste point.

LE PROJET DE «?LETTRE DE LA FOLIE DE LA SCIENCE HUMAINE ET DE LA PHILOSOPHIE?»

14Au fragment?457, le propos de l’apologiste passe de la politique à la philosophie politique?:

On ne s’imagine Platon et Aristote qu’avec de grandes robes de pédants. C’étaient des gens honnêtes et comme les autres, riants avec leur amis. Et quand ils se sont divertis à faire leur Lois et leur Politiques, ils l’ont fait en se jouant. C’était la partie la moins philosophe et la moins sérieuse de leur vie, la plus philosophe était de vivre simplement et tranquillement. S’ils ont écrit de politique, c’était comme pour régler un hôpital de fous. Et s’ils ont fait semblant d’en parler comme d’une grande chose, c’est qu’ils savaient que les fous à qui ils parlaient pensent être rois et empereurs. Ils entrent dans leurs principes pour modérer leur folie au moins mal qu’il se peut.

15Le propos favorable aux philosophes qui ont su tirer un ordre de la folie universelle est aussi une dénonciation de la philosophie comme jeu. Platon et Aristote font partie des «?habiles?», pas des «?vrais chrétiens?», car ils n’ont pas donné la raison de la folie qu’ils réglaient. Ils servent ici à démystifier les fous qui se croient rois ou empereurs, mais également à démystifier le discours philosophique. Le propos de l’apologiste sur la folie se déplace subtilement de la vanitas vers la sapientia.

16Grâce à la première liasse, dite «?liasse-table?», on sait que Pascal projetait d’écrire une «?Lettre de la folie de la science humaine et de la philosophie?» [40]. Pour l’identifier, on en est réduit à des conjectures. En effet, il n’est pas sûr que Pascal ait donné suite à son projet, même partiellement. Dans la Lettre pour porter à rechercher Dieu, il est bien question de folie, mais elle caractérise l’égarement des hommes «?qui vivent sans songer à cette dernière fin de la vie?» [41]. Cette folie est un effet dont Pascal donne la raison?: «?C’est un appesantissement de la main de Dieu?» [42], «?un enchantement incompréhensible, et un assoupissement surnaturel, qui marque une force toute-puissante qui le cause?» [43]. En qualifiant cette attitude d’«?aveuglement surnaturel?» [44], l’apologiste met en lumière la nécessité qui règle cette folie –?«?digna necessitas?» selon les termes empruntés à la Vulgate [45]. La Lettre pour porter à rechercher Dieu développe un argument avancé au fr.?195?: «?L’aveuglement de ceux qui ne le cherchent pas [prouve Dieu?]?» –?un Dieu qui conduit les réprouvés à leur perte et les élus à sa gloire. La folie des hommes y fait l’objet d’une argumentation apologétique, mais il n’y est question ni de philosophie ni de science humaine.

17On peut avancer l’hypothèse que le fragment?164 est une ébauche de la Lettre annoncée au fragment?27. Il clôt la liasse «?Contrariétés?», qui précède la liasse «?Divertissement?». Or Pascal précise?: «?Cette Lettre avant Le divertissement?» [46]. Certes, Le Divertissement n’est pas la liasse, mais plus vraisemblablement un texte que Pascal projetait d’écrire. Mais on trouve dans la liasse plusieurs fragments développés, intitulés Divertissement, qui peuvent en être des passages ou des essais. Il est difficile d’établir avec certitude si l’ordre des liasses du projet de juin?1658 [47] correspond à un ordre raisonné ou à un ordre de fait. La question se pose également à propos de la note de Pascal?: «?Cette Lettre avant Le Divertissement?». Parle-t-il du plan de son apologie ou du classement de ses notes? Cette double incertitude interdit d’exclure que le fragment?164 placé juste avant la liasse «?Divertissement?» soit la «?Lettre de la folie de la science humaine et de la philosophie?».

18Pascal y étudie le conflit universel entre les dogmatiques et les pyrrhoniens (les sceptiques), deux catégories qui recouvrent toute la philosophie?: «?Voilà la guerre ouverte entre les hommes, où il faut que chacun prenne parti, et se range nécessairement ou au dogmatisme ou au pyrrhonisme, car qui pensera demeurer neutre sera pyrrhonien par excellence?» [48]. Là encore, il faut être attentif à l’adverbe «?nécessairement?». Le propos de l’apologiste ne porte pas sur la vérité des discours des deux écoles?: il interroge la nécessité qu’il y a, pour tout homme, à choisir un camp ou l’autre. La «?contrariété?» [49] que Pascal constate dans la philosophie est un effet dont il veut rendre raison?:

Que fera donc l’homme en cet état? Doutera-t-il de tout? Doutera-t-il s’il veille, si on le pince, si on le brûle? Doutera-t-il s’il doute? Doutera-t-il s’il est? On n’en peut venir là, et je mets en fait qu’il n’y a jamais eu de pyrrhonien effectif parfait. La nature soutient la raison impuissante et l’empêche d’extravaguer jusqu’à ce point.
Dira-t-il au contraire qu’il possède certainement la vérité, lui qui, si peu qu’on le pousse, ne peut en montrer aucun titre et est forcé de lâcher prise?
Quelle chimère est-ce donc que l’homme, quelle nouveauté, quel monstre, quel chaos, quel sujet de contradiction, quel prodige, juge de toutes choses, imbécile ver de terre, dépositaire du vrai, cloaque d’incertitude et d’erreur, gloire et rebut de l’univers?!
Qui démêlera cet embrouillement [50]?

19La critique de la sapientia philosophique n’est pas un appel à la déraison. Bien au contraire, l’apologiste cherche une raison supérieure, qui rende compte de l’homme dans sa totalité, ce à quoi ne peut prétendre la philosophie?:

Certainement cela passe le dogmatisme et le pyrrhonisme et toute la philosophie humaine. L’homme passe l’homme [51].

20Si le fragment?164 est bien la Lettre annoncée au fragment?27, on comprend mieux ce qu’entend Pascal par «?folie de la science humaine?»?: non pas la folie de la science sur l’homme (l’homme comme objet de connaissance), mais la folie de la science de l’homme (la capacité de l’homme à connaître) [52]. La critique ne porte pas sur le discours des sages, sur les doctrines philosophiques, mais sur l’impuissance de la raison orgueilleuse à rendre compte de l’homme. C’est en cela que la sagesse est une folie. La perspective paulinienne [53] est reprise dans une argumentation apologétique radicale?: l’homme est incapable de connaître, de se connaître.

La nature confond les pyrrhoniens et la raison confond les dogmatiques. Que deviendrez-vous, ô homme qui cherchez quelle est votre véritable condition par votre raison naturelle? Vous ne pouvez fuir une de ces sectes ni subsister dans aucune.
Connaissez donc, superbe, quel paradoxe vous êtes à vous-mêmes?! Humiliez-vous, raison impuissante?! Taisez-vous, nature imbécile?! Apprenez que l’homme passe infiniment l’homme et entendez de votre Maître votre condition véritable que vous ignorez.
Écoutez Dieu [54].

21Pascal est héritier de ce qu’Étienne?Gilson appelle le «?socratisme chrétien?» [55]. Il modifie en profondeur la tradition issue du précepte delphique?: «?Connais-toi toi-même?». Pour l’apologiste, l’homme connaît sa propre misère et son rédempteur lorsqu’il a fait l’expérience de l’impossibilité à se connaître lui-même par lui-même. Les philosophes ont énoncé une vérité en invitant les hommes à se connaître eux-mêmes?; l’apologiste reprend leur énoncé depuis le juste point?:

Non seulement nous ne connaissons Dieu que par Jésus-Christ mais nous ne nous connaissons nous-mêmes que par Jésus-Christ. Nous ne connaissons la vie, la mort que par Jésus-Christ. Hors de Jésus-Christ, nous ne savons ce que c’est ni que notre vie, ni que notre mort, ni que Dieu, ni que nous-mêmes [56].

LA FOLIE DE LA RELIGION CHRÉTIENNE

22Le fragment?164 s’ouvre sur une interrogation des «?principales forces?» des dogmatiques et des pyrrhoniens et se clôt sur ce que Pascal appelle le «?mystère?» du péché originel?:

Sans ce mystère le plus incompréhensible de tous nous sommes incompréhensibles à nous-mêmes. Le nœud de notre condition prend ses replis et ses tours dans cet abîme. De sorte que l’homme est plus inconcevable sans ce mystère, que ce mystère n’est inconcevable à l’homme.

23Sur le plan théologique, on assiste à un écart décisif par rapport à la Première Lettre aux Corinthiens, qui est la source explicite de l’apologiste. Saint?Paul médite sur le mystère de Pâques, Pascal sur le «?mystère?» du péché originel. Sous sa plume, la folie du péché originel se substitue à la folie de la croix?:

Le péché originel est folie devant les hommes, mais on le donne pour tel. Vous ne me devez donc pas reprocher le défaut de raison de cette doctrine, puisque je la donne sans raison. Mais cette folie est plus sage que toute la sagesse des hommes, sapientibus est hominibus[57]. Car sans cela que dira-t-on qu’est l’homme? Tout son état dépend de ce point imperceptible. Et comment s’en fût-il aperçu par sa raison, puisque c’est une chose contre sa raison et que sa raison, bien loin de l’inventer par ses voies, s’en éloigne quand on le lui présente [58].

24Le terme «?point?» doit retenir notre attention. Pour Pascal, le péché originel est la raison supérieure qui rend compte des «?contrariétés?» manifestées par l’ensemble de la philosophie. Il permet de tenir ensemble les intuitions des pyrrhoniens et des dogmatiques?:

Si l’homme n’avait jamais été corrompu, il jouirait dans son innocence de la vérité et de la félicité avec assurance. Et si l’homme n’avait jamais été que corrompu, il n’aurait aucune idée ni de la vérité, ni de la béatitude. Mais malheureux que nous sommes, et plus que s’il n’y avait point de grandeur dans notre condition, nous avons une idée du bonheur et nous ne pouvons y arriver, nous sentons une image de la vérité et ne possédons que le mensonge, incapables d’ignorer absolument et de savoir certainement, tant il est manifeste que nous avons été dans un degré de perfection dont nous sommes malheureusement déchus.
Chose étonnante cependant que le mystère le plus éloigné de notre connaissance, qui est celui de la transmission du péché, soit une chose sans laquelle nous ne pouvons avoir aucune connaissance de nous-mêmes [59]?!

25Pour Pascal, la religion chrétienne est sage quand elle affirme que l’homme est déchu, car elle rend compte de la folie de la sagesse philosophique. Le péché originel et sa transmission sont folie aux yeux des hommes «?car il est sans doute qu’il n’y a rien qui choque plus notre raison?» [60]. Mais il n’est pas déraison, car il éclaire d’une lumière supérieure les contrariétés dans lesquels les philosophes sont nécessairement enfermés. Il est la raison d’un effet.

26Mais la religion chrétienne n’est pas uniquement une sagesse. Elle est à la fois sage et folle. Pascal résume ce paradoxe au fragment?697?:

Contrariétés. Sagesse infinie et folie de la religion.

27Que désigne le mot «?contrariétés?»? La liasse «?Contrariétés?» ou les contrariétés de la religion? Les citations bibliques qui composent le corps du fragment invitent à pencher pour la seconde solution. Pascal semble déduire la sagesse et la folie de la religion des contradictions de l’Écriture Sainte. Son «?obscurité?» [61] «?est l’effet par excellence, le paradoxe que constitue l’existence de l’homme à ses propres yeux?» [62]. Pour rendre raison de cet effet, il faut changer de point, aller à Jésus-Christ en qui «?toutes les contradictions sont accordées?» [63]. Pour Pascal, la folie de la religion éclate avant tout dans la Bible. Pascal en fait un argument apologétique. L’obscurité de l’Écriture est une preuve que la religion chrétienne est vraie, car elle rend compte merveilleusement des contrariétés de l’homme. C’est ce que note Laurent?Thirouin?:

Avant de donner des raisons (une Raison), la religion chrétienne se signale par sa perception remarquable de l’incohérence et de la confusion de l’existence humaine. Un premier argument en sa faveur serait sa capacité descriptive, sa faculté de constater l’obscurité [64].

28Dans un premier sens, la folie de la religion chrétienne est donc une preuve de sa sagesse. «?Ayant su mieux que tout autre désigner les effets (“ces étonnantes contrariétés”), [elle] est capable de les expliquer et de les justifier, mieux qu’aucun autre discours n’a su le faire?» [65]. Cependant, cette sagesse n’est pas la connaissance de Dieu?; elle n’en est que la préparation. Pour Pascal, la sapientia chrétienne dispose à la stultitia décrite par saint?Paul?:

Après avoir étalé tous ses miracles et toute sa sagesse, elle réprouve tout cela et dit qu’elle n’a ni sagesse ni signe, mais la croix et la folie.
Car ceux qui par ces signes et cette sagesse ont mérité votre créance et qui vous ont prouvé leur caractère vous déclarent que rien de tout cela ne peut nous changer et nous rendre capables de connaître et aimer Dieu que la vertu de la folie de la croix, sans sagesse ni signe, et point non les signes sans cette vertu. Ainsi, notre religion est folle en regardant à la cause efficace, et sage en regardant à la sagesse qui y prépare [66].

29La folie de la croix n’est pas un effet. Il n’est pas question d’en rendre raison, mais d’en recevoir la «?vertu?», c’est-à-dire l’efficace. Le terme de «?folie?» est donc entendu ici dans un sens différent de celui mis en lumière jusqu’à présent. Pascal désigne la limite du discours apologétique, qui n’est qu’une préparation de l’incroyant à la venue de la grâce divine. La conversion ne s’accomplit pas avec la seule «?créance?», mais avec le don de la foi, que Pascal définit en opposant le cœur et la raison?: «?C’est le cœur qui sent Dieu, et non la raison?: voilà ce que c’est que la foi?» [67]. Cela ne signifie pas que la folie de la croix soit déraison, car l’apologiste se propose de «?commencer par montrer que la religion n’est point contraire à la raison?» [68]. Le «?désaveu de la raison?» «?si conforme à la raison?» peut donc s’entendre dans un double sens?: impuissance de la raison seule à rendre compte des effets?; impuissance de la raison seule à connaître Dieu.

30* * *

31Le désaveu de la raison semble être l’objet véritable de la conceptualisation de la folie dans les Pensées. Si Pascal s’inscrit dans la tradition de l’éloge paradoxal, la notion est investie d’un sens propre dans son apologie?: la folie est un effet dont la raison n’est accessible qu’à celui qui change de point. Dans chacun des trois discours, la démonstration de l’apologiste vise à cette conversion, au sens étymologique du terme. De plus, les trois discours ne sont pas hétérogènes, mais ils disposent au suivant [69]. Dans les Pensées, l’éloge de la folie n’est pas en premier lieu une critique des fausses sagesses. Pascal interroge plutôt la nécessité qui régit la folie?; son entreprise apologétique consiste à montrer que la religion chrétienne est la seule à en rendre raison. Cette argumentation qui procède par changement de point conclut à une folie qui n’a d’autre raison qu’elle-même?: la folie de la croix. Là s’arrête le discours de l’apologiste.

Notes

  • [1]
    B.?Pascal, Pensées, fr.?31. La numérotation des fragments correspond au classement établi par Philippe?Sellier.
  • [2]
    Fr.?323.
  • [3]
    1 Co?1, 18 et?20-21. La Bible est citée dans la traduction de L.-I. Le Maistre de Sacy.
  • [4]
    Méthodes chez Pascal. Actes du colloque tenu à Clermont-Ferrand, 10-13?juin 1977, Paris, PUF, 1979, p.?297-307.
  • [5]
    Ibid., p.?305-307.
  • [6]
    Ibid., p.?305.
  • [7]
    Ibid., p.?302.
  • [8]
    Ibid., p.?299.
  • [9]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», Courrier du Centre International Blaise?Pascal, no?20, 1998, p.?12.
  • [10]
    Fr.?680, abusivement appelé «pari de Pascal». Pour les fragments longs, je cite la pagination de l’édition des Pensées par G.?Ferreyrolles, Paris, Librairie Générale Française, coll. «Classiques de poche», 2000. La?phrase sur l’abêtissement se trouve p.?465.
  • [11]
    Fr.?680, p.?464.
  • [12]
    Fr.?680, p.?460.
  • [13]
    Ibid.
  • [14]
    Ibid.
  • [15]
    «Par raison vous ne pouvez défendre nul des deux» lui déclare l’apologiste (fr.?680, p.?460).
  • [16]
    Fr.?680, p.?461.
  • [17]
    Règles de probabilité appliquées au jeu. Voir L.?Thirouin, Le Hasard et les règles. Le modèle du jeu dans la pensée de Pascal, Paris, Vrin, 1991, p.?107-129. Le chevalier de Méré, joueur et libertin, avait posé à Pascal deux problèmes touchant le jeu. Pascal reprend la question dans une perspective apologétique.
  • [18]
    Fr.?680, p.?463.
  • [19]
    Méthodes chez Pascal, ouvr.?cit., p.?305.
  • [20]
    Cf. Mt?10, 39: «Celui qui conserve sa vie la perdra; et celui qui aura perdu sa vie pour l’amour de moi la retrouvera».
  • [21]
    Fr.?680, p.?463.
  • [22]
    Fr.?680, p.?467.
  • [23]
    Fr.?214.
  • [24]
    «Il n’y a rien de si conforme à la raison que ce désaveu de la raison» (fr.?213). Les éditeurs des Pensées n’ont pas remarqué que ce fragment est une reprise en négatif d’une proposition que saint Bernard oppose à Abélard, dans une lettre adressée au pape Innocent?II (lettre?190, souvent placée parmi les traités de saint Bernard dans les éditions du XVIIe?siècle). Pascal a pu la connaître par la traduction d’Antoine Le Maistre dans La Vie de saint?Bernard [...], Paris, A.?Vitré et Vve?Durant, 1648, p.?544: «Qu’y a-t-il de moins raisonnable, que de s’efforcer de s’élever au-dessus de la raison par la raison seule?»
  • [25]
    Fr.?524.
  • [26]
    Voir L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?8.
  • [27]
    Ibid., p. 11.
  • [28]
    Fr.?60.
  • [29]
    «Regina del mondo». Pascal cite le titre d’un ouvrage qui n’a pu être identifié avec certitude. Fr.?78, p.?71.
  • [30]
    Fr.?78, p.?66.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Ibid., p.?67.
  • [33]
    Ibid., p.?71.
  • [34]
    Voir G.?Ferreyrolles, Pascal et la raison du politique, Paris, PUF, 1984, p.?103-104, et Les Reines du monde: l’imagination et la coutume chez Pascal, Paris, H.?Champion, 1995, p.?26-30.
  • [35]
    Fr.?48. Pascal cite Rm?8, 20-21: «Les créatures [...] sont assujetties à la vanité [...] avec espérance d’être délivrées».
  • [36]
    Fr.?60.
  • [37]
    Voir «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [38]
    Fr.?126.
  • [39]
    Fr.?124.
  • [40]
    Fr.?27.
  • [41]
    Fr.?682, p.?477. Voir également fr.?681, p.?476, et fr.?682, p.?477-478.
  • [42]
    Fr.?195.
  • [43]
    Fr.?681, p.?473.
  • [44]
    Voir fr.?195, 516, 796, p.?628 et 799, p.?631.
  • [45]
    Sg?19, 4, cité au fr.?796, p.?628: «[Les Égyptiens] étaient conduits à cette fin par une nécessité dont ils étaient dignes».
  • [46]
    Fr.?27.
  • [47]
    Liasses?I à XXVIII.
  • [48]
    Fr.?164, p.?115.
  • [49]
    Le fr.?164 conclut la liasse «Contrariétés».
  • [50]
    Fr.?164, p.?115-116.
  • [51]
    Fr.?164, p.?116. Passage rayé par Pascal.
  • [52]
    Cette interprétation va dans le sens de l’étude du titre de la liasse?XVI par Laurent?Thirouin: «Transition de la connaissance de l’homme à Dieu» ne doit pas être comprise comme la transition rhétorique d’une partie anthropologique (connaissance de l’homme) à une partie théologique (connaissance de Dieu), mais comme le mouvement (transitus) qui va de la capacité de l’homme à connaître, c’est-à-dire son ignorance, à Dieu. Voir «“Transition de la connaissance de l’homme à Dieu”: examen d’une liasse des Pensées», Le Rayonnement de Port-Royal. Mélanges en l’honneur de Philippe?Sellier, Paris, Champion, 2001, p.?362.
  • [53]
    Les Essais de Montaigne constituent une autre source essentielle du passage. Sur le rôle de Montaigne dans la réflexion de Pascal sur les sceptiques et les dogmatiques, voir l’Entretien avec monsieur de Sacy.
  • [54]
    Fr.?164.
  • [55]
    É.?Gilson, L’Esprit de la philosophie médiévale, Paris, Vrin, 1989 [1re?éd. 1932], ch.?11. De ce point de vue, saint?Bernard est une source décisive des Pensées. Voir S.?Icard, Port-Royal et saint?Bernard de Clairvaux (1608-1709), à paraître chez H.?Champion, ch.?10.
  • [56]
    Fr.?36.
  • [57]
    1 Co?1, 25.
  • [58]
    Fr.?574.
  • [59]
    Fr.?164, p.?117-118.
  • [60]
    Fr.?164, p.?118.
  • [61]
    Fr.?183.
  • [62]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [63]
    Fr.?289.
  • [64]
    L.?Thirouin, «Raison des effets: un bilan sémantique», art.?cit., p.?14.
  • [65]
    Ibid., p.?15.
  • [66]
    Fr.?323.
  • [67]
    Fr.?680, p.?467.
  • [68]
    Fr.?46.
  • [69]
    D’une certaine manière, ils recouvrent les trois ordres décrits par Pascal au fr.?339: les corps, les esprits et la charité.
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