Couverture de DRS_090

Article de revue

La résistance à la tarification des services d’aide et d’accompagnement à domicile comme résistance à un instrument d’action publique

Pages 393 à 412

Notes

  • [1]
    Thomas Frinault, La dépendance, un nouveau défi pour l’action publique, Rennes : Presses Universitaires de Rennes, coll. « Res Publica », 2009.
  • [2]
    Conseil de l’Emploi, des Revenus et de la Cohésion sociale, Le service à la personne, Paris : La Documentation française, rapport n° 8, 2012.
  • [3]
    Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès, Sociologie de l’action publique, Paris : Armand Colin, coll. « 128 », 2012, p. 99.
  • [4]
    Christopher Hood, The Tools of Government, Londres : Macmillan, 1983 ; Lester M. Salamon (ed.), The Tools of Government: A Guide to the New Governance, Oxford : Oxford University Press, 2002.
  • [5]
    Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès (dir.), Gouverner par les instruments, Paris : Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2005 ; Pierre Lascoumes et Louis Simard, « L’action publique au prisme de ses instruments », Revue française de science politique, 61, 2011, p. 5-22.
  • [6]
    Stéphane Beaud et Florence Weber, Guide de l’enquête de terrain, Paris : La Découverte, coll. « Guides repères », 2003.
  • [7]
    Solène Billaud, Cécile Bourreau-Dubois, Agnès Gramain, Helen Lim, Florence Weber et Jingyue Xing, La prise en charge de la dépendance des personnes âgées : les dimensions territoriales de l’action publique, rapport final, convention MiRE/DREES, BETA (université de Lorraine), CMH (ENS/EHESS/CNRS), 2012.
  • [8]
    Jean-Pierre Le Bourhis et Pierre Lascoumes, « Les résistances aux instruments. Formes et modèles d’analyse au sein d’un corpus d’études de cas », communication présentée au colloque « Les instruments d’action publique. Mise en discussion théorique » (version de travail), Science Po Paris, 6-8 janvier 2011.
  • [9]
    Robert Lafore, « La décentralisation de l’action sociale. L’irrésistible ascension du “département providence” », Revue française des affaires sociales, 4, 2004, p. 28.
  • [10]
    Agnès Gramain et Jingyue Xing, « Tarification publique et normalisation des processus de production dans le secteur de l’aide à domicile pour les personnes âgées », Revue française des affaires sociales, 2-3, 2012, p. 218-243.
  • [11]
    Pour une analyse plus approfondie à propos des normes de tarification, voir ibid.
  • [12]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du conseil général G, 17 janvier 2011.
  • [13]
    Articles R314-22 et R314-23 du Code d’action sociale et des familles.
  • [14]
    Jean-Pierre Hardy, Financement et tarification des établissements et services sociaux et médico-sociaux, Paris : Dunod, coll. « Santé social », 2010.
  • [15]
    Chef du service de la tarification du département G, 15 octobre 2010.
  • [16]
    Courrier adressé au chef du service de la tarification du CG G envoyé par le directeur du service X, 13 juillet 2010.
  • [17]
    Directeur et comptable du SAAD A du département G, 25 novembre 2010.
  • [18]
    Comptable du service X, 25 novembre 2010.
  • [19]
    Chef du service de la tarification du CG M, 27 septembre 2011 ; chef du service de la tarification du CG V, 9 novembre 2011.
  • [20]
    Nous avons observé l’intervention d’autres élus locaux, comme les maires, qui ne sont pas élus du conseil général. Mais comme nous nous focalisons sur l’échelle départementale, nous ne traitons pas ce phénomène ici.
  • [21]
    François-Xavier Devetter, Florence Jany-Catrice et Thierry Ribault, Les services à la personne, Paris : La Découverte, coll. « Repères », 2009 ; Emmanuelle Lada, « Les recompositions du travail d’aide à domicile en France », Formation emploi, 115, 2011, p. 9-23.
  • [22]
    Bernard Balzani (dir.), Les services à la personne, Paris : La Documentation française, coll. « Les études de la DF », 5313-14, 2010.
  • [23]
    Christian Bidegaray, Stéphane Cadiou et Christine Pina (dir.), L’élu local aujourd’hui, Grenoble : PUG, coll. « Libres cours », 2009.
  • [24]
    Dans le département G, 43 % des élus du conseil général étaient maires ou maires adjoints.
  • [25]
    Pierre-Olivier Caille, « Le cumul des mandats au regard des expériences étrangères », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, 6, 2000, p. 1701-1743 ; « The Causes and Consequences of the “cumul des mandats” », French Politics, numéro spécial, 4, 2006.
  • [26]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, Paris : Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2010.
  • [27]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [28]
    Directrice du SAAD au CCAS de la ville V, 8 mars 2011.
  • [29]
    Chef adjoint du service de la tarification du CG G, 26 novembre 2011.
  • [30]
    Ibid., 26 novembre 2011.
  • [31]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [32]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, op. cit.
  • [33]
    Chef du service de la tarification du CG G, 10 janvier 2011 ; chef du service de la tarification du CG M, 27 septembre 2011.
  • [34]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [35]
    Article L3241-5 du Code général des collectivités territoriales.
  • [36]
    L’article R314-51 prévoit que l’affectation du résultat du budget général des services tarifés est « décidée par l’autorité de tarification », en tenant compte des circonstances « qui expliquent le résultat ».
  • [37]
    Compte rendu d’une réunion entre les directeurs généraux des services et le chef du service de la tarification du CG G, 10 février 2010.
  • [38]
    Suite à un rapport de la Cour des comptes recommandant la transparence dans la gestion du financement de la sécurité sociale, le régime A national a « clarifié sa position par rapport aux associations qu’elle [la caisse A] avait fait émerger » depuis 2000. Mais, jusqu’à notre enquête en 2010, cette caisse et l’association Y partageaient les locaux. Le directeur actuel de services Y est un ancien employé du régime de sécurité sociale.
  • [39]
    Directeur du SAAD Y, 29 mars 2011.
  • [40]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [41]
    Tarificateur chargé de la tarification du service Y du CG G, 11 mars 2011.
  • [42]
    Ibid.
  • [43]
    Tarificatrice dans le département M, 28 septembre 2011.
  • [44]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, op. cit., p. 33.
  • [45]
    « Mémoire en défense » du CG G devant un tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale, décembre 2009.
  • [46]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [47]
    Rencontre entre le directeur adjoint chargé de la solidarité, le directeur des personnes âgées et trois présidents locaux du service S, avril 2009. Archive consultée dans le CG G en janvier 2011.
  • [48]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [49]
    Rencontre entre le directeur adjoint chargé de la solidarité, le directeur des personnes âgées et trois présidents locaux du service S, avril 2009. Archive consultée dans le CG G en janvier 2011.
  • [50]
    Lygia Sigaud, « Le courage, la peur et la honte. Morale et économie dans les plantations sucrières du Nordeste brésilien », Genèses, 25, 1996, p. 72-90.
  • [51]
    Tarificateur chargé du service Y du CG G, 11 mars 2011.
  • [52]
    Comptable du SAAD X, 25 novembre 2011.
  • [53]
    Directeur d’un SAAD agréé du département G, un des principaux fondateurs d’un groupement des services d’aide à domicile privés à but lucratif, 1er octobre 2010.
  • [54]
    Nous avons observé une disparité dans la fixation du tarif de solvabilisation pour les services agréés dans nos départements enquêtés : en 2010, certains CG appliquent le tarif CNAV de 2007 (17,50 €), d’autres le tarif CNAV de 2011 (18,80 €).
  • [55]
    Les politiques de financement dans le cadre de l’APA sont en fait plus disparates que ne le laisse penser cet encadré qui ne reprend que les deux systèmes les plus répandus. Voir Solène Billaud, Cécile Bourreau-Dubois, Agnès Gramain, Helen Lim, Florence Weber et Jingyue Xing, La prise en charge de la dépendance des personnes âgées, op. cit., pour une description des différentes pratiques de solvabilisation.
  • [56]
    Mission relative aux questions de tarification et de solvabilisation des services d’aide à domicile en direction des publics fragiles, Paris : IGAS, coll. « Rapport IGAS », 2010.
  • [57]
    Certaines études en économie ont analysé l’impact du mode de tarification et de financement sur l’usage des deniers publics et sur les comportements des praticiens. Voir Principes et enjeux de la tarification à l’activité à l’hôpital (T2A), Paris : IRDES, coll. « Document de travail », 23, mars 2009.

1 Les recherches sur la prise en charge des personnes âgées dépendantes ont largement progressé, mais la régulation du secteur des services d’aide et d’accompa­gnement à domicile (SAAD) par les pouvoirs publics reste peu étudiée en sociologie  [1]. Pourtant, depuis la mise en place de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) en 2002, plusieurs dispositifs et réglementations ont été instaurés pour encadrer le soutien public aux services aux personnes âgées dépendantes. Les pouvoirs publics non seulement financent une grande partie du coût de la prise en charge de la dépendance, mais aussi, encadrent, contrôlent, labellisent les structures.

2 Ces interventions publiques se décident pour l’essentiel à l’échelle du territoire départemental. Le conseil général (CG), c’est-à-dire la collectivité locale départementale, est notamment chargé, depuis 2002, de l’autorisation des SAAD, tandis que les services déconcentrés de l’État central sont en charge, depuis la loi Borloo en 2005, d’une procédure parallèle de régulation, dite d’agrément, destinée à simplifier l’entrée dans le secteur des services à la personne  [2].

3 La procédure d’autorisation, confiée aux conseils généraux, est plus complète : elle peut en effet s’accompagner d’une procédure de tarification, c’est-à-dire de la fixation, par la collectivité locale, du prix facturé aux clients par le producteur tarifé. À la différence de services agréés, les services autorisés par le conseil général renoncent donc à leur autonomie de fixer leur prix. D’après la loi, le conseil général doit fixer ce tarif en analysant les budgets prévisionnels transmis par chaque SAAD. Il s’agit donc d’un processus de tarification individualisé : chaque service a son propre tarif.

4 La tarification peut être considérée comme un instrument d’action publique, c’est-à-dire comme « un dispositif à la fois technique et social [soutenu par une conception de la régulation] qui organise des rapports sociaux spécifiques entre la puissance publique et ses destinataires en fonction des représentations et des significations dont il est porteur »  [3]. En adoptant ce point de vue, nos analyses s’inscrivent dans la lignée de la réflexion sur les technologies de gouvernement et dans celle des travaux autour des « instruments » (tools) d’action publique (IAP), concept fondé par Christopher Hood et développé depuis quarante ans dans les pays anglophones  [4]. En France, cette notion a été approfondie et prolongée par des équipes de recherche menées par Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès  [5].

5 Plus que l’instrument lui même, ce sont les résistances des SAAD à l’instrument « tarification » que nous analyserons ici. Le terme « résistance » permet de traduire le rapport de force entre le régulateur et les services tarifiés : les SAAD sont soumis au pouvoir décisionnaire du conseil général en matière de fixation de leur tarif horaire. S’intéresser aux résistances, c’est donc s’intéresser aux actions menées par les dominés (SAAD) dans le but de modifier les décisions prises par le dominant (conseil général), à différents stades de la procédure, et sous des formes plus ou moins conflictuelles (oppositions ou contestations) voire paisibles (négociations).

6 Quels sont les différents modes de résistance employés par les services d’aide et d’accompagnement à domicile dans le processus de la tarification ? Pourquoi les résistances s’organisent-elles ? Et pourquoi de telle ou telle manière ? C’est à ces questions que nous tentons ici de répondre. Tout d’abord, nous présenterons la méthode de recherche et les matériaux utilisés (I) ; puis, nous examinerons les trois principales formes de résistance repérées sur le terrain : celles observées dans le cadre des négociations techniques prévues par la loi, mais aussi les recours politiques au sein du conseil général et du pouvoir judiciaire (II) ; enfin, nous analyserons les caractéristiques et les facteurs explicatifs de ces modes de résistance (III).

I. Méthode et matériaux

7 Cette analyse se fonde sur une enquête ethnographique  [6], réalisée dans six départements métropolitains s’inscrivant dans une recherche collective sur les dimensions territoriales de l’action publique, dirigée par Agnès Gramain et Florence Weber  [7]. Le matériau employé, obtenu principalement dans deux des six départements (G et M), porte sur les résistances des SAAD dans la procédure de tarification. Il se compose de dossiers de demande de tarification déposés par des SAAD, de rapports de tarification arrêtés par le conseil général, de communications (courriers, compte rendu des réunions etc.) entre les agents administratifs chargés de la tarification du conseil général et les directeurs des SAAD, ainsi que d’entretiens avec les directeurs et les comptables de certains des SAAD tarifés, les agents tarificateurs du conseil général et leurs responsables hiérarchiques. Dans le département G, nous avons pu réaliser en outre des observations au moment de négociations entre tarificateurs et directeurs des SAAD concernés.

Encadré 1 – Méthode et matériaux

Cet article se fonde sur les enquêtes ethnographiques réalisées dans les institutions politiques locales et dans les SAAD en 2010 et en 2011 de deux départements, ici nommés G et M (voir tableaux 1 et 2). Ces données sont complétées par des enquêtes collectives menées dans quatre autres départements de 2010 à 2012 sur les dimensions territoriales de l’action publique (C, N, R, V).
Le département G présente une population plus pauvre, plus rurale et plus âgée que la moyenne française. Le conseil général y a développé une politique de maintien à domicile en milieu rural. Dans ce conseil général, l’enquête a été menée sur une période de neuf mois de 2010 à 2011, et quelques compléments ont été demandés en 2012. Nous avons obtenu un stage dans le service en charge des politiques de solidarité en 2011 où nous avons pu observer les négociations entre les tarificateurs, leurs chefs hiérarchiques et les SAAD tarifés. Nous avons également interrogé une dizaine de directeurs de SAAD et quatre comptables.
Dans le département M, le taux de bénéficiaires de l’APA est beaucoup plus faible que la moyenne nationale. L’enquête dans ce conseil général a eu lieu en 2011 sous la forme d’un stage intensif d’une semaine avec une quinzaine d’étudiants. Nous avons réalisé des entretiens avec les chefs de service de la tarification, les agents tarificateurs, ainsi que les directeurs et les comptables de deux SAAD tarifés. Nous avons consulté les rapports de tarification, les notes de travail et les courriers de communication entre les agents tarificateurs et les SAAD tarifés.

Tableau 1 – Indicateurs sociodémographiques concernant les deux principaux terrains

Terrain d’enquêteDépartement MDépartement GFrance métropolitaine
Part des dépenses d’APA* dans les dépenses d’aide sociale obligatoires, en % (2008) **16-18> 2217,70
Part de bénéficiaires de l’APA résidant en domicile ordinaire, en % (2006) ***Environ 60Environ 70
Part des personnes de plus de 75 ans dans la population, en % (2006)7-8> 8,28,20
Nombre de bénéficiaires de l’APA par 1000 habitants de 75 ans et plus (2003) ****< 155> 185170

Tableau 1 – Indicateurs sociodémographiques concernant les deux principaux terrains

* Allocation personnalisée d’autonomie.
** Finances des départements 2008, Direction générale des collectivités locales (DGCL).
*** Base ANDASS (Association nationale des directeurs d'action sociale et de santé des conseils généraux).
**** François Jeger, « L’allocation personnalisée d’autonomie : une analyse des disparités départementales en 2003 », Études et résultats (Drees), 372, 2005.

Tableau 2 – La tarification dans les départements M et G

DépartementsMG
Nombre de SAAD * tarifés528
dont
CCAS * et CIAS *07
SAAD privés à but non lucratif516
SAAD privés commerciaux-5
Poids des structures tarifées dans le nombre d’heures APA * solvabilisées15 %92 %
Valeur des tarifs en 2011
minimum18,9617,53
maximum19,3021,78
référence17,85-
fourchette théorique+/- 10 %-

Tableau 2 – La tarification dans les départements M et G

* SAAD : service d’aide et d’accompagnement à domicile ; CCAS : centre communal d’action sociale ; CIAS : centre intercommunal d’action sociale ; APA : allocation personnalisée d’autonomie.

8 Grâce à ces matériaux, notre article se propose de préciser les instruments d’action publique dans le secteur des SAAD et d’aborder des thématiques complémentaires permettant de retravailler la notion d’instrument. L’articulation entre la méthode ethnographique et les concepts en science politique nous amène à nous servir des outils d’analyse existants, tout en proposant un nouvel usage. L’approche ethnographique permet en effet d’explorer d’autres points de vue, différentes échelles d’action publique et temporalités de mise en œuvre de ces instruments dans l’action publique.

9 Les travaux en science politique ont tendance à « adopter le point de vue de leur concepteurs, metteurs en œuvre ou principaux utilisateurs »  [8]. Peu de travaux portent sur les conflits, les résistances ou l’opposition engendrés par les instruments, ou sur les limites rencontrées par ceux-ci dans leur fonctionnement au quotidien. C’est ce que vise cet article : étudier les modes de résistance en adoptant le point de vue des cibles des instruments, c’est-à-dire ici les SAAD.

10 Compte tenu des nombreux travaux qui se concentrent sur le moment de l’instau­ration d’un instrument, on s’intéresse ici plutôt à son fonctionnement au quotidien ainsi qu’aux résistances dont le but est d’influencer les décisions produites par cet instrument.

11 Les travaux sur les instruments d’action publique utilisés à l’échelle des départements sont rares, alors même que cette échelle présente deux intérêts : les politiques sociales sont, depuis 2004, largement décentralisées à cet échelon. Par ailleurs, les conseils généraux, comme les communes, assument une « fonction de proximité » en matière d’action publique  [9], ce qui peut avoir un effet sur la mise en œuvre et le fonctionnement d’un instrument de régulation publique.

II. Les modes de résistance employés par les SAAD tarifés dans la procédure de tarification

12 Le Code de l’action sociale et des familles (CASF) prévoit que le président du conseil général fixe un tarif individuel propre à chaque SAAD concerné. Il précise la méthode à suivre pour procéder à cette tarification : plus de quarante articles de la partie réglementaire du CASF (articles R314-1 à R314-208) fixent le type de documents budgétaires et comptables que les SAAD doivent fournir à l’autorité de tarification, le mode de calcul du tarif, le type de dépenses à considérer, ou encore l’affectation des excédents et des déficits. Cependant, le CASF laisse des marges de manœuvre aux conseils généraux « dans le choix des dépenses que ceux-ci jugent légitimes », ainsi que dans l’élaboration des normes départementales en matière de tarification. Dans la pratique, les agents administratifs du conseil général comparent en effet les dépenses prévisionnelles proposées par les SAAD avec celles théoriques, calculées à partir de normes concernant les conditions de production de l’aide aux personnes âgées dépendantes. C’est sur cette comparaison qu’ils se basent pour valider ou refuser le montant de chaque type de dépense inscrit dans le budget prévisionnel proposé par le SAAD.

13 Ces références normatives se construisent principalement, d’après nos enquêtes de terrain, autour de quatre points  [10] : « la structure de qualification de la main d’œuvre, le nombre d’heures d’intervention à domicile par temps plein, l’affectation des charges de structure et les frais de déplacements »  [11]. Nos enquêtes révèlent une tendance à la technicisation dans la procédure de tarification : on observe une multiplication de normes et les référentiels de travail ont été récemment perfectionnés dans les deux départements enquêtés. L’usage de ces outils techniques est uniquement réservé aux agents tarificateurs du conseil général : considérant que le processus de tarification est « trop technique et trop tatillon »  [12], les élus n’interviennent jamais dans le calcul précis de chaque type de dépense et le président du conseil général se contente le plus souvent de valider les propositions de tarif de ses agents administratifs. Cependant, c’est à lui que revient la décision finale en cas de désaccord ou de conflit entre tarificateurs et tarifés.

14 Les décisions relatives à la tarification, décisions normatives et, à première vue, contraignantes ne sont cependant pas totalement coercitives : les gouvernés résistent régulièrement contre ces décisions. Certains cherchent à contourner les normes départementales ainsi qu’à modifier les résultats produits par cet instrument en mobilisant différentes ressources ; d’autres vont encore plus loin en luttant contre la mise en œuvre de l’instrument.

II.1. Les recours prévus par la loi : négociations dans la procédure de tarification

15 La procédure de tarification elle-même, telle qu’elle est prévue par le CASF est contradictoire : l’article R314-3 mentionne que les SAAD doivent déposer leur proposition budgétaire pour l’année N+1 au conseil général au plus tard le 31 octobre de l’année N. Les agents du conseil général chargés de la tarification doivent analyser les budgets prévisionnels proposés et envoyer aux SAAD leur avis de modification motivés  [13]. Selon l’article R314-24, chaque service tarifé dispose de huit jours après la réception du budget modifié par le conseil général pour motiver un désaccord de manière circonstanciée, en « indiquant notamment les raisons qui rendent impossible, selon lui, le respect du niveau de recettes ou de dépenses que l’autorité de tarification se propose de retenir ». Les services ne peuvent donc pas se contenter de dire « mes propositions sont raisonnables, je n’ai aucune marge de manœuvre… », ils doivent le prouver  [14]. La loi prévoit ainsi un cadre de négociation formelle : il s’agit en pratique de négociations techniques se développant entre les tarificateurs du conseil général ou leurs chefs administratifs et les directeurs de services tarifés, c’est-à-dire des négociations entre « experts » de la tarification.

16 Dans les deux départements enquêtés, les trois quarts des services tarifés ont recours à la négociation formelle prévue dans le cadre législatif. Cependant, il existe aussi des formes de négociation technique informelle comme les communications téléphoniques, la rencontre entre les directeurs de service et les chefs administratifs du conseil général, etc. Si l’on considère les négociations formelles comme une résistance paisible et « un passage obligatoire »  [15] pour avoir ensuite recours à d’autres voies, les négociations informelles sont, elles, facultatives et dépendent des règles institutionnelles de chaque conseil général ainsi que des relations entre les conseils généraux et les différents SAAD : alors que, dans le département G, nous avons observé peu de négociations informelles, dans le département M, les tarificateurs téléphonent souvent aux SAAD lorsqu’ils calculent le tarif.

17 Dans un cas comme dans l’autre, il s’agit de négociations techniques et précises. Par exemple, dans le département G, en réponse à l’avis de modification du conseil général sur le budget prévisionnel proposé, le directeur d’un SAAD a contesté plusieurs calculs réalisés par le tarificateur de conseil général en 2010. Dans son courrier, il remet en cause la clé de répartition utilisée par le conseil général pour ventiler les charges communes entre différentes activités dont certaines donnent lieu à financement public. Il conteste en particulier le taux de conversion entre les prestations d’aide à domicile et celles de portage de repas : alors que la norme départementale considère qu’une heure d’aide à domicile équivaut à deux portages de repas en termes de coût de production, le directeur considère que « les repas peuvent être intégrés sur la base d’un quart d’heure par repas », c’est-à-dire qu’une heure d’aide à domicile équivaut à quatre portages de repas, car « un livreur distribue jusqu’à cinq repas en une heure »  [16].

18 Du point de vue du service régulé, ces négociations techniques cherchent à influencer le résultat produit par la tarification. L’objectif est d’obtenir un tarif horaire plus élevé, en particulier pour les activités qui sont financées par les deniers publics. D’après les courriers envoyés par les directeurs de services et destinés aux tarificateurs du conseil général G, la stratégie mise en place le plus fréquemment consiste à remettre en cause les normes départementales en s’appuyant sur la connaissance empirique du processus de production, et sur les conditions spécifiques au SAAD, qui justifieraient un surcoût qui n’est pas inclus dans le calcul du conseil général.

19 Si l’on regarde les résultats obtenus par ces négociations formelles et informelles, on voit qu’ils sont presque nuls. L’examen des rapports budgétaires contenant l’avis de modifications du conseil général, des courriers de contestation envoyés par les directeurs de services tarifés et des rapports budgétaires définitifs arrêtés par le président du conseil général montre que peu de négociations formelles ont été prises en compte par ce dernier ; de même, aucune proposition cherchant à contourner les normes départementales en ayant recours aux conditions spécifiques de production n’a été acceptée. Plusieurs directeurs de SAAD tarifés ont évoqué la question de l’inefficacité de la négociation formelle lors de nos entretiens : « On a une procédure de recours, on fait des demandes. Mais ça a quand même peu de chance d’aboutir… ils ne nous écoutent jamais  [17]. ». En outre : « Oui, on écrit au conseil général, mais bon, après ils font ce qu’ils veulent  [18]. » Même dans les départements M et V, où les services tarifés bénéficient pourtant d’une facilité de négociation informelle avec les tarificateurs, ils n’ont jamais réussi à contourner les normes départementales concernant le plafond du tarif horaire qui définit le montant maximum appliqué à tous les services concernés  [19].

II.2. Les recours aux intermédiaires politiques : les élus locaux

20 Confrontés à l’inefficacité des négociations techniques pour obtenir un tarif horaire plus élevé et un financement public plus important, les SAAD tarifés mettent en place d’autres formes de résistance à la tarification, comme le recours aux réseaux d’influence politique locaux, notamment aux élus du conseil général. On peut distinguer trois formes d’intervention d’intermédiaires politiques dans le processus de tarification, en fonction de la position de ces intermédiaires par rapport aux services tarifés et de leurs intérêts propres  [20] : les élus du conseil général interviennent en effet, en tant que maires d’une commune, mais aussi en tant que présidents d’un SAAD public tarifé ou encore pour des raisons de « clientèle ».

L’intervention des élus en tant que maires d’une commune

21 L’intervention des maires peut s’inscrire d’abord dans une logique d’emploi local. Le développement des services à la personne est en effet considéré comme un instrument de politique de l’emploi, non seulement par l’État central, mais aussi par les collectivités locales  [21]. À l’échelle d’une commune ou d’un canton, la situation financière des services tarifés a un impact sur le taux d’emploi local, notamment celui des femmes  [22], et peut donc constituer un enjeu électoral important  [23]. Or, la situation financière des services tarifés est étroitement liée aux résultats de la tarification, car les heures en partie financées par l’argent public dans le cadre de l’APA représentent la majeure partie des activités réalisées par ces SAAD. Par exemple, dans le département G, pour chacun des trois plus gros SAAD du département, la part des heures réalisées chez des bénéficiaires de l’APA représente plus de 65 % de l’activité globale. La tarification, parce qu’elle détermine directement ou indirectement la survie économique et financière des SAAD, a donc un effet non négligeable sur l’emploi local et sur la carrière politique des maires.

22 Sur le terrain, nous n’avons observé qu’un seul cas d’intervention d’un élu du conseil général en tant que maire : celui-ci a intercédé en faveur des SAAD implantés sur son territoire municipal en exigeant pour eux une hausse de tarifs, notamment pour ceux qui se trouvent en déficit financier. Ce cas montre explicitement une tension « multi-rôles » chez les élus du conseil général qui sont en même temps maires  [24] : en effet, en tant qu’élu du conseil général, ils sont responsables d’assurer un bon usage de l’argent public à l’échelle du département ; en tant que maires, ils ont pour mission de protéger le marché du travail local et de lutter contre le chômage. Intervenir, en tant que maire, témoigne probablement d’une hiérarchisation de ces deux missions contradictoires, voire de l’idée que le rôle de maire a un effet plus direct et plus connu sur la carrière politique.

23 Ce phénomène relève des tensions « multi-rôles » liées à la situation de cumul des mandats, qui fait l’objet d’un traitement abondant en science politique et permet d’illustrer le cumul à plusieurs échelles locales alors que les analyses considèrent habituellement les conflits d’intérêt entre l’échelon central et local  [25], parfois sous l’angle de la « corruption »  [26].

L’intervention des élus en tant que présidents d’un SAAD public tarifé

24 Le deuxième type d’intervention des intermédiaires politiques est lié au statut particulier des centres communaux d’action sociale (CCAS), établissements publics qui sont présidés par le maire d’une commune. Certains CCAS possèdent leurs propres SAAD qui sont également soumis à la régulation publique de l’État via l’agrément qualité, ou à celle du conseil général via l’autorisation.

25 Dans nos enquêtes, nous avons observé l’intervention de quatre élus du conseil général dans la négociation des tarifs entre les tarificateurs et les CCAS tarifés dont ils étaient présidents. Très souvent, pour eux, il ne s’agit pas uniquement de négocier une hausse ou une baisse du tarif horaire, mais plutôt de négocier la répartition des financements publics versés aux CCAS tarifés par les conseils généraux et les communes. Dans le cas des CCAS, deux financeurs sont en effet mêlés à l’affaire : le conseil général subventionne une partie des usagers qui s’adressent au CCAS, tandis que la commune subventionne directement son CCAS, soit par une aide en nature, comme le prêt gratuit des locaux ou des équipements, soit par des subventions d’équilibre, qui sont en principe interdites, mais qui existent toujours  [27]. Le directeur du CCAS de la ville de V, dans le département G, reçoit ainsi à deux titres bien distincts des subventions versées par la ville afin de « maintenir le fonctionnement du service du CCAS » : « une subvention régulière en nature : leurs locaux ; frais de transports, notamment les voitures de service ; frais des équipements… ; une subvention d’équilibre en fin d’année »  [28]. Ces charges sont imputées sur les dépenses communales et sont déduites dans le calcul du tarif par le conseil général. Ainsi, pour certains CCAS, le calcul du tarif à facturer, qui sert de base aux remboursements versés par le conseil général, ne couvre presque que les dépenses liées aux personnels et à l’exploitation. Les points de négociation entre les CCAS et le conseil général portent donc principalement sur la répartition de certaines charges : par exemple, qui doit payer en premier les nouveaux véhicules ? Les fonds alloués par le conseil général sont-ils subsidiaires à ceux de la commune ou l’inverse ? Après la crise économique, ces questions ont été mises en lumière plus nettement encore : souffrant de pression budgétaire, certains maires ont en effet souhaité imputer plus de charges sur les financements publics via l’APA, cette allocation bénéficiant, qui plus est, de fonds mixtes provenant du conseil général mais aussi de l’État central. Ces maires ont donc demandé au conseil général de prendre en compte, dans le calcul du tarif, et donc dans la base de remboursement par l’APA, certaines dépenses, qui étaient financées auparavant par la commune, y compris des dépenses liées à l’exploitation courante.

26 Ce deuxième type d’interventions révèle à nouveau une tension « multi-rôles » entre échelons départemental et local, mais qui porte, cette fois-ci, explicitement sur le partage des charges de financement entre la commune et le conseil général. L’analyse plus détaillée du cas des CCAS permet d’ailleurs de révéler un partage implicite, non plus des financements, mais des responsabilités politiques entre l’échelle communale et départementale. En effet, on peut observer que les tarificateurs des conseils généraux valident le plus souvent les budgets des CCAS alors même qu’ils ne respectent pas les référentiels départementaux, en particulier pour ce qui concerne le temps de travail. Le statut de fonctionnaire territorial des salariés et les mesures de protection de l’emploi mises en place dans les CCAS se traduisent, en effet, dans le processus de tarification, par un « temps de travail moyen sur l’année beaucoup plus faible que le référentiel départemental »  [29]. Si les tarifs arrêtés pour les CCAS sont souvent parmi les plus bas dans la liste de tarifs des SAAD autorisés, leurs véritables coûts de revient sont beaucoup plus élevés que ceux des autres types de SAAD tarifés. Quand un service du CCAS présente un tarif de l’heure à 18 €, très souvent, son véritable coût de revient se situe aux alentours de 22 €, le différentiel étant financé par le budget communal. Or, non seulement le tarificateur du conseil général valide un budget non compatible avec le référentiel départemental, mais il considère même « ne pas avoir le droit de l’exiger »  [30], afin de « respecter le choix de gestion possible des élus locaux »  [31]. Ce faisant, il agit d’ailleurs dans l’intérêt budgétaire propre du conseil général, et contre celui des finances publiques en général : si les CCAS coûtent très cher à la société, le tarif décidé par le conseil général ne couvrant en fait que 85 % à 90 % du prix de revient réel de l’heure d’aide pour le CCAS, il est relativement bon marché pour les usagers et pour le département.

27 Cette situation permet de souligner le partage implicite qui se fait, en matière de responsabilité politique, dans l’usage des deniers publics, entre les différents pouvoirs locaux. Il apparaît en effet que le conseil général n’adopte pas un point de vue global mais qu’il cantonne sa responsabilité politique au seul budget départemental. Dans le cas des CCAS, il complète les financements pour le fonctionnement des SAAD sans exiger de changements pour améliorer la gestion du personnel : il a donc un rôle de financeur plutôt que de contrôleur.

L’intervention des élus pour des questions de « clientèle »

28 Au-delà des interventions en tant que maires ou présidents des CCAS, nous avons observé une troisième forme de mobilisation des élus locaux : leur comportement relève, dans ce troisième cas, d’une forme de « clientélisme »  [32], au sens où ils débordent de leur rôle d’élus en privilégiant certains acteurs (ici, certain SAAD) au détriment de l’intérêt général. Durant nos enquêtes de terrain, nous avons repéré deux cas de figure.

29 Premier cas, certains élus interviennent dans le processus de tarification pour négocier au bénéfice de directeurs de SAAD avec lesquels ils entretiennent des relations amicales entre élites économiques locales. Mais, selon les chefs des services de tarification, ce phénomène est « de plus en plus rare »  [33]. Dans les deux départements de l’enquête, nous n’avons observé qu’un cas en 2010 : un proche d’un élu du conseil général a bénéficié des services d’un SAAD, qui était sous procédure de sauvegarde de justice depuis 2008. Cet élu a demandé au directeur général du service administratif du conseil général de ne pas laisser ce service faire faillite  [34]. Le Code général des collectivités locales interdisant au conseil général de verser une subvention d’équilibre aux SAAD  [35], ce qui aurait permis de prendre en charge directement le déficit de ce service, le directeur général et son adjoint ont joué sur le tarif horaire : ils ont demandé au chef du service de tarification d’intégrer une partie importante de déficit dans le calcul du tarif de ce service  [36], ce qui induit des hausses répétées de tarif horaire (2,6 € de plus par heure en 2009 et 0,6 € en 2010). Dans un contexte de contrainte budgétaire pour la collectivité locale, les autres services tarifés ont connu des hausses plus limitées en 2010 par rapport aux tarifs de 2009 avec en moyenne 0,4 € de plus. Le chef du service de tarification n’était favorable ni à l’intégration du déficit dans le tarif horaire de ce service, ni à une telle hausse de tarif puisqu’il considère que « reprendre le passif sur 10 ans dans les budgets prévisionnels revenait à subventionner indirectement l’asso­ciation et créait un précédent pour les futures associations en situation de sauvegarde »  [37]. Malgré cela, il a finalement accédé à la demande de l’élu et de ses chefs hiérarchiques en accordant les hausses de tarif horaire.

30 Le deuxième cas de figure caractérise les élus du conseil général qui interviennent pour les services tarifés qui ont été historiquement créés et contrôlés par des institutions sociales, importantes localement, notamment par les caisses de retraite liées à des secteurs d’activité dominants dans le département. Nos entretiens nous ont révélé la présence d’un tel cas dans deux départements (G et M). Les caisses de retraite ont une influence politique importante en matière d’action en faveur des personnes âgées, non seulement en raison de leur mission initiale, mais également parce qu’elles ont, dans certains départements, contribué à la mise en œuvre de l’APA : des assistants sociaux employés par ces caisses de retraite ont participé aux visites à domicile chez les personnes demandant l’APA pour évaluer leur éligibilité et élaborer les plans d’aide à mettre en place grâce à cette allocation de 2002 à 2007. Même s’ils ont dû devenir juridiquement indépendants des caisses de retraite depuis 2002, les SAAD qu’elles ont créés bénéficient encore aujourd’hui d’un rapport politique particulier avec le conseil général  [38], ce dont témoigne la composition des conseils d’administration. Par exemple, parmi les 24 membres du conseil d’administration d’un des SAAD du département G, on trouve des représentants de la caisse de retraite dont ce SAAD (ici nommé Y) dépendait initialement et deux conseillers généraux.

31 Un exemple, dans le département G en 2010, permet d’illustrer cette forme d’influence politique. Le service de tarification du conseil général a imposé, au SAAD Y, un plafond d’activité annuelle : les heures d’aide effectuées au-delà de ce volume horaire ne pouvaient plus donner lieu à financement par le conseil général dans le cadre de l’APA. Cette décision avait pour objectif de réduire le montant global de financement APA récupéré par le SAAD, très implanté localement, et pouvait conduire à un déficit si l’activité du SAAD dépassait le plafond. Le directeur du SAAD concerné a informé de ce risque les deux conseillers généraux, membres de son conseil d’adminis­tration. Vingt jours après, le président du SAAD a été reçu par le président du conseil général pour discuter de la contrainte d’activité et de financement concernant les heures dépassées. Lors de cette audience, une « solution » a été accordée par le président du conseil général qui a proposé de porter les activités supplémentaires au compte administratif deux ans plus tard. Le service a ainsi contourné la décision administrative prise par le service de tarification. Cet exemple n’est pas une exception. Dans un entretien, le directeur du service explique : « Il y a des moments où les politiques se passent devant. Si on peut  [39]. » Le directeur adjoint chargé de la solidarité du conseil général nous a d’ailleurs expliqué que le directeur de ce service « écrit systématiquement au président du conseil général, et que ça transite, il y a l’aspect de lobbying »  [40].

32 Dans ce cas de figure, certaines décisions relatives à la tarification (voire même au changement de tarif) sont directement prises par les élus, ou par les chefs administratifs du conseil général sur leurs indications. Les tarificateurs doivent donc faire le calcul à partir d’un tarif donné afin de correspondre à des résultats prédéterminés. Ce phénomène d’intervention des élus a été également confirmé par des tarificateurs. Dans l’entretien avec l’agent chargé de la tarification du SAAD mentionné ci-dessus, celui-ci explique : « Le problème [de ce SAAD] c’est aussi qu’ils ont énormément de poids politique. C’est-à-dire qu’ils font jouer ça comme... enfin, ils peuvent avoir directement accès au président du conseil général ou au directeur général du service administratif pour demander des choses, ça arrive  [41]. » Et il indique que le conseil général fait preuve d’une « tolérance plus importante » dans la tarification de ce SAAD, par rapport à la tarification des autres services d’aide  [42]. Ce phénomène n’est pas un cas particulier, lié au département G ; dans le département M, un tarificateur du conseil général a lui aussi expliqué, qu’il avait été obligé de « faire ses calculs du tarif à partir d’un chiffre négocié entre les élus et la caisse de retraite »  [43].

33 Dans ce cas encore, on peut lire l’intervention de conseillers généraux dans le processus de tarification comme un effet du caractère « multidimensionnel du rôle politique », qui est une « source permanente de tensions entre des facettes divergentes du métier d’élu »  [44]. Cependant, alors que, dans les deux premiers cas analysés, la tension s’exerce entre différentes échelles d’intérêt collectif, de localisme (commune, canton, département), il s’agit, dans le troisième type d’intervention, d’une forme de clientélisme qui vient s’opposer au rôle d’élu local. Quel que soit le type d’intervention, les tensions se cristallisent cependant autour d’une même question, celle de l’allocation de ressources entre les différents producteurs : s’agit-il de les traiter tous de la même manière ou de favoriser certains pour divers motifs ?

II.3. Les recours au pouvoir judiciaire

34 Certains services tarifés vont encore plus loin en ayant recours au pouvoir judiciaire. Sur notre terrain d’enquête, ce mode de résistance a été peu employé par les services tarifés : nous n’avons observé qu’un seul cas.

35 L’article L.351-1 du CASF prévoit la possibilité de recours judiciaires contre les décisions relatives à la tarification, qui ont lieu auprès du tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale (TITSS). À la fin 2009, un SAAD a intenté un procès au conseil général G devant un TITSS. Ce service dénonçait l’absence d’une tarification « réelle » en 2007 et 2008, et demandait au conseil général de rembourser les différences causées par l’écart entre le tarif de remboursement du conseil général et le coût de production réel pour les années concernées  [45]. D’après le contenu de leurs requêtes, du mémoire de défense du conseil général G et de nos entretiens avec le directeur de ce service ainsi qu’avec le chef administratif du conseil général, l’objectif de ce SAAD n’était pas uniquement de modifier une décision technique et d’obtenir un bénéfice monétaire, comme par exemple le fait d’augmenter le tarif de deux euros. Il était aussi de lutter contre la politique du conseil général. En effet, en 2007, celui-ci avait décidé de pratiquer un tarif directif, déconnecté du coût de production du SAAD, puisqu’il n’arrivait pas à « mettre en place une tarification correcte » à cause de la taille importante de ce SAAD et du « manque de transparence dans leurs comptes »  [46]. En dénonçant l’absence de tarification réelle, ce SAAD remet donc plus largement en cause la politique menée par le conseil général en matière de tarification.

36 Ce contentieux a eu lieu dans un contexte conflictuel entre ce SAAD (qu’on appellera X) et le conseil général. En 2009, le service X commençait à craindre une discrimination administrative et tarifaire par rapport aux autres SAAD tarifés par le conseil général. Dans un courrier adressé par le directeur du SAAD au directeur administratif du conseil général, nous pouvons lire : « Le sentiment d’injustice ressenti par le service X est une vieille histoire… En 2007 et 2008, accorder 18 € à Y [autre SAAD] et 15,99 à X est bien une injustice. » Lors d’une rencontre entre les présidents de ce SAAD et les élus du conseil général, l’un de ces présidents a imputé cette différence de tarifs à l’influence d’un groupe d’institutions liées au monde agricole, qu’il a qualifié de « triangle vert »  [47]. Le directeur administratif du conseil général a insisté sur l’« inexistence de favoritisme, chaque SAAD étant tarifé selon sa réalité »  [48]. Mais, au vu des tarifs de 2007 et 2008, « à X, on dit que le conseil général bloque et veut “tuer” le X »  [49]. Ces extraits d’entretiens, du courrier et du compte rendu de la rencontre montrent que l’on quitte ici non seulement le champ technique du calcul du tarif, mais même celui de la politique de tarification pour entrer sur le terrain de luttes politiques locales dont le secteur de l’aide aux personnes dépendantes ne serait qu’une expression. Dans ce cas, la tarification est employée par le service tarifé comme un traceur de la politique départementale, et le recours devant le tribunal comme un outil de lutte politique contre le conseil général et ses alliés.

37 Une fois que les services tarifés mobilisent ces pouvoirs « extérieurs », ils entrent en conflit avec le conseil général et ce processus est irréversible : le recours aux procès conduit à une interruption des relations personnelles et professionnelles  [50]. Le SAAD X est par exemple resté en forte tension avec le conseil général autour de cet instrument. En 2010, confronté comme d’autres SAAD à l’imposition d’un volume horaire d’activité par le conseil général, il a intenté une deuxième action devant le TITSS.

III. Les caractéristiques des modes de résistance et leurs facteurs explicatifs

38 Les différents modes de résistance à la tarification publique utilisés par les services d’aide et d’accompagnement à domicile que nous venons de décrire sont intéressants en eux-mêmes, mais aussi pour ce qu’ils disent de l’action publique elle-même, c’est-à-dire du contexte institutionnel dans lequel ils s’inscrivent et de la nature même de l’instrument contre lequel ils sont organisés.

Tableau 3 – Caractéristiques des différents modes de résistance dans les départements G et M

Négociations techniquesIntermédiations politiquesRecours contentieux
Mode d’actionIndividuel
Fréquence en 2010-2011 75 % des services tarifés25 % des services tarifés1 cas
Ressources mobiliséesExpertise comptable, expériences de productionRéseau d’influence politique localeExpertise comptable, justice
ObjectifModifier les décisions techniquesModifier les décisions
techniques
Luttes politiques
Efficacité++
Réversibilité++

Tableau 3 – Caractéristiques des différents modes de résistance dans les départements G et M

III.1 Le pouvoir politique local comme contexte institutionnel de la tarification des SAAD

39 Les différents modes de résistance décrits plus haut font apparaître plusieurs traits caractéristiques du pouvoir politique à l’échelle locale. Ils révèlent tout d’abord une double relation entre la sphère technique et la sphère politique de la tarification. Au cours de l’intervention des intermédiaires politiques locaux, les services tarifés cherchent à contourner les normes départementales de la tarification et à modifier des décisions produites lors du processus en mobilisant leurs réseaux politiques locaux. Les pouvoirs politiques sont ainsi employés par les services tarifés comme un outil de lutte technique, puisqu’il ne s’agit pas de lutter contre l’existence et la mise en œuvre de la tarification, mais contre le résultat technique produit par cet instrument. A contrario, dans le cas du recours au pouvoir judiciaire, le service tarifé ne cherche pas à modifier des décisions techniques (comme obtenir une hausse de tarif de 0,5 €), mais plutôt à lutter contre la politique de tarification, et plus généralement la politique de régulation du secteur, menée par le conseil général. L’aspect technique de l’instrument est alors utilisé comme outil de lutte politique par le SAAD tarifé dans la confrontation avec le pouvoir local.

40 Nous constatons ainsi une articulation à double sens entre la sphère politique et la sphère technique d’un instrument de régulation politique, qui se trouve utilisé dans les pratiques de résistance des services tarifés : les ressources politiques peuvent servir à contourner la sphère technique d’un instrument et, inversement, la sphère technique peut être mobilisée dans la lutte politique contre le pouvoir public.

41 Ils soulignent, ensuite, que les élus locaux bénéficient d’un pouvoir d’influence important dans les décisions techniques prises par les agents administratifs. Quels que soient leurs intérêts, les interventions individuelles des élus dans le fonctionnement de l’instrument d’action publique ont une meilleure efficacité en termes de modification des décisions que les négociations techniques avec les agents administratifs. Les tarificateurs eux-mêmes le reconnaissent. L’un d’entre eux a ainsi évoqué sa position difficile face aux élus du conseil général : « Quand les élus interviennent, on ne sait pas quoi faire  [51]. » Ce rapport de force entre élus et agents administratifs est connu des services tarifés qui s’en servent pour organiser la résistance à la tarification : « l’intervention des élus est souvent efficace »  [52] reconnaît, dans un entretien, le comptable d’un SAAD du département G. Ce phénomène peut être qualifié de caractéristique institutionnelle faisant partie du contexte de la tarification.

42 Ils illustrent enfin les conséquences du cumul des mandats et des rôles sociaux, à l’échelle locale. Les maires, par exemple, exécutent les délibérations qu’ils ont soumises au conseil ; ils dirigent leur administration et sont, à l’occasion, élus au conseil général. Ils constituent un réseau d’influence politique locale avec d’autres élites économiques sur leurs territoires. Le pouvoir d’influence sur les décisions des élus, qui est considéré comme une caractéristique institutionnelle, est mobilisé soit directement par certains d’entre eux qui occupent la position de présidents de SAAD publics tarifés ou de maires, soit par d’autres institutions qui dirigent un service tarifé ou d’autres services privés. La résistance dans la procédure de tarification apparaît ainsi encastrée dans un contexte institutionnel local où se trouvent des élus locaux cumulant plusieurs fonctions, et bénéficiant d’un pouvoir d’influence prédominant.

III.2. Le rapport entre les modes de résistance et la nature de l’instrument

43 La comparaison des divers modes de résistance utilisés dans la procédure de tarification permet aussi de mettre en évidence les caractéristiques propres de l’instrument d’action publique qu’est la tarification des SAAD, dans sa forme actuelle. Il apparaît tout d’abord que les actions de résistance à la tarification sont réalisées de manière « isolée » : les négociations techniques se passent toujours entre un SAAD tarifé et un/des agents administratifs ; le recours aux élus locaux ou au tribunal ne concerne qu’un des SAAD tarifés. Dans aucun des départements enquêtés, un groupe d’intérêt n’a été organisé par les services tarifés ; aucune résistance n’a été non plus conduite de manière collective.

44 Cette caractéristique attire d’autant plus l’attention que les services d’aide agréés, qui ne sont pas soumis à la tarification mais qui bénéficient, eux aussi, des financements accordés aux personnes âgées dépendantes par le conseil général, dans le cadre de l’APA, agissent très différemment : ils mènent leurs actions de résistance collectivement et ont organisé des groupes d’intérêt dans plusieurs départements en France  [53] afin de négocier le tarif qui sert de base pour calculer le remboursement dont bénéficient les allocataires de l’APA qui s’adressent à un service agréé (dit « tarif de solvabilisation »). Un groupement de services agréés privés à but lucratif ayant plus de cinquante adhérents a, par exemple, attaqué quatre conseils généraux, dont un où nous avons enquêté, au tribunal interrégional avec pour objectif d’augmenter le tarif de solvabilisation. Cette action collective a été efficace : deux des quatre conseils généraux ont accordé une hausse du tarif trois mois après la réception de la citation du tribunal. Compte tenu de la possibilité et de l’efficacité de l’action collective des services agréés, on peut se demander pourquoi les services tarifés résistent « individuellement » à la tarification.

Encadré 2 – La solvabilisation de l’aide à domicile

(a) Services d’aide à domicile agréés
Dans un département, quel que soit le prix facturé au bénéficiaire, celui-ci est remboursé sur la base d’un tarif unique, fixé par le conseil général, souvent en référence au tarif de remboursement pratiqué par la caisse nationale d’assurance vieillesse CNAV  [54]. Par exemple, en 2011, pour un bénéficiaire de l’APA devant acquitter un ticket modérateur de 10 % et habitant dans le département M où le tarif de solvabilisation était de 17,85 €, le conseil général participe à hauteur de 90 % x 17,85 €, soit 16,07 € par heure d’aide apportée à ce bénéficiaire, quel que soit le SAAD agréé choisi, et donc quel que soit le prix horaire facturé à ce bénéficiaire.
…/…
…/…
(b) Services d’aide à domicile autorisés et tarifés
Dans ce cas, le tarif facturé au bénéficiaire est fixé par le conseil général, et c’est sur la base de ce tarif, propre à chaque SAAD, que le conseil général calcule sa participation financière  [55]. Par exemple, si le bénéficiaire cité ci-dessus reçoit une prestation d’un service dont le tarif arrêté est de 19 €, le conseil général participera à hauteur de 90 % x 19 €, soit 17,10 € par heure, alors que s’il est aidé par un autre service avec un tarif arrêté de 20 €, le conseil général participera à hauteur de 90 % x 20 €, soit 18 € par heure.

45 C’est ici, non pas le contexte de mise en œuvre, mais la nature même de l’instru­ment qui explique cette caractéristique des modes de résistances des services autorisés : sa configuration technique prévue par la loi conditionne la formation d’intérêts communs ainsi que les modalités de la mobilisation collective. Puisque la tarification est un processus individualisé, qui ne tient compte pour un service donné que du coût de revient et des recettes de ce service, une hausse de tarif ne peut se justifier que, service par service, en fonction des conditions de production qui lui sont propres. La modification du tarif d’un service ne justifie en rien de modifier celui d’un autre. Ainsi, la nature de cet instrument va à l’encontre de la formation d’intérêts communs dans la confrontation locale avec l’autorité tarifaire. À l’inverse, la configuration de l’instrument de solvabilisation pour les SAAD agréés – c’est-à-dire le mode de financement public de ces derniers, qui exige d’appliquer un tarif de solvabilisation identique pour tous les services agréés – encourage l’action collective et l’organisation de groupes d’intérêt : le changement de ce tarif de solvabilisation a un impact pour tous les services agréés. Obtenir une augmentation de ce tarif constitue donc un objectif commun, partagé.

46 Il faut cependant apporter une nuance sur ce point. Au niveau national, plusieurs groupes d’intérêt ont été organisés pour la lutte contre les modalités de tarification, dans un contexte de déficit général des services d’aide à domicile  [56]. Les frontières entre les résistances individuelles et collectives ne sont donc pas figées par la nature de l’instrument : elles dépendent également des échelles ciblées.

47 Une deuxième caractéristique de l’instrument, sa temporalité, apparaît déterminante pour comprendre la forme que prennent les résistances : la tarification se déroule une fois par an. En s’inscrivant dans une telle régularité, cet instrument offre aux tarificateurs et aux SAAD tarifés un temps d’apprentissage et la possibilité d’un jeu répété. Cela peut avoir de multiples effets sur les modes de résistance :

48

  • — ce temps d’apprentissage peut faciliter les négociations entre différents acteurs, car les tarificateurs perfectionnent leur outil de travail ; cependant, les services tarifés peuvent mieux connaître les normes départementales de tarification ;
  • — les services tarifés peuvent prendre connaissance de la règle institutionnelle (présentée en II.2), ainsi que mobiliser leur réseau d’influence politique locale pour modifier une décision de tarification ;
  • — cependant, si l’on prend en compte la temporalité des mandats politiques locaux, le caractère annuel de la répétition des négociations peut parfois déstabiliser le phénomène du clientélisme, en cas de changement politique.

Conclusion

49 Dans cet article, nous avons analysé les modes de résistance des services d’aide et d’accompagnement à domicile autorisés par les conseils généraux dans la procédure de tarification qui leur est appliquée, conformément au Code de l’action sociale et des familles. L’étude des résistances à la tarification propose un angle d’approche original mettant en lumière les dimensions économique et sociale de la pratique de l’action publique à l’échelle des départements. Notre recherche nous amène à distinguer différentes formes de résistance des services tarifés à l’encontre des décisions coercitives produites par cet instrument, à travers le cas des négociations techniques prévues par la loi, des recours politiques auprès des conseillers généraux et des recours au pouvoir judiciaire. L’analyse des facteurs explicatifs de ces modes de résistance met en lumière l’influence essentielle de cet instrument d’action publique sur les processus d’émergence de la contestation. Peu étudié jusqu’à présent  [57], l’instrument de la tarification dans le secteur des services d’aide à domicile concentre pourtant des enjeux sociaux majeurs, tant dans le domaine sociologique (problématiques du vieillissement, des normes et des réseaux sociaux) que dans les domaines financier, politique et juridique (réglementations nouvelles, décentralisation et déconcentration des pouvoirs en France, conflits et clientélisme).

50 Depuis nos enquêtes de terrain, une réforme prévue par la loi du 28 décembre 2011 a mis en place l’expérimentation d’un nouveau modèle dans plusieurs départements. Il propose une tarification horaire en fonction du type de services rendus et un financement sous forme de forfait global. Par conséquent, nos analyses sur l’effet propre de l’instrument offrent de nouvelles pistes de réflexion à propos de l’impact de ces nouvelles modalités de tarification sur les modes de résistance, ainsi que sur la situation financière du secteur.

Notes

  • [1]
    Thomas Frinault, La dépendance, un nouveau défi pour l’action publique, Rennes : Presses Universitaires de Rennes, coll. « Res Publica », 2009.
  • [2]
    Conseil de l’Emploi, des Revenus et de la Cohésion sociale, Le service à la personne, Paris : La Documentation française, rapport n° 8, 2012.
  • [3]
    Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès, Sociologie de l’action publique, Paris : Armand Colin, coll. « 128 », 2012, p. 99.
  • [4]
    Christopher Hood, The Tools of Government, Londres : Macmillan, 1983 ; Lester M. Salamon (ed.), The Tools of Government: A Guide to the New Governance, Oxford : Oxford University Press, 2002.
  • [5]
    Pierre Lascoumes et Patrick Le Galès (dir.), Gouverner par les instruments, Paris : Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2005 ; Pierre Lascoumes et Louis Simard, « L’action publique au prisme de ses instruments », Revue française de science politique, 61, 2011, p. 5-22.
  • [6]
    Stéphane Beaud et Florence Weber, Guide de l’enquête de terrain, Paris : La Découverte, coll. « Guides repères », 2003.
  • [7]
    Solène Billaud, Cécile Bourreau-Dubois, Agnès Gramain, Helen Lim, Florence Weber et Jingyue Xing, La prise en charge de la dépendance des personnes âgées : les dimensions territoriales de l’action publique, rapport final, convention MiRE/DREES, BETA (université de Lorraine), CMH (ENS/EHESS/CNRS), 2012.
  • [8]
    Jean-Pierre Le Bourhis et Pierre Lascoumes, « Les résistances aux instruments. Formes et modèles d’analyse au sein d’un corpus d’études de cas », communication présentée au colloque « Les instruments d’action publique. Mise en discussion théorique » (version de travail), Science Po Paris, 6-8 janvier 2011.
  • [9]
    Robert Lafore, « La décentralisation de l’action sociale. L’irrésistible ascension du “département providence” », Revue française des affaires sociales, 4, 2004, p. 28.
  • [10]
    Agnès Gramain et Jingyue Xing, « Tarification publique et normalisation des processus de production dans le secteur de l’aide à domicile pour les personnes âgées », Revue française des affaires sociales, 2-3, 2012, p. 218-243.
  • [11]
    Pour une analyse plus approfondie à propos des normes de tarification, voir ibid.
  • [12]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du conseil général G, 17 janvier 2011.
  • [13]
    Articles R314-22 et R314-23 du Code d’action sociale et des familles.
  • [14]
    Jean-Pierre Hardy, Financement et tarification des établissements et services sociaux et médico-sociaux, Paris : Dunod, coll. « Santé social », 2010.
  • [15]
    Chef du service de la tarification du département G, 15 octobre 2010.
  • [16]
    Courrier adressé au chef du service de la tarification du CG G envoyé par le directeur du service X, 13 juillet 2010.
  • [17]
    Directeur et comptable du SAAD A du département G, 25 novembre 2010.
  • [18]
    Comptable du service X, 25 novembre 2010.
  • [19]
    Chef du service de la tarification du CG M, 27 septembre 2011 ; chef du service de la tarification du CG V, 9 novembre 2011.
  • [20]
    Nous avons observé l’intervention d’autres élus locaux, comme les maires, qui ne sont pas élus du conseil général. Mais comme nous nous focalisons sur l’échelle départementale, nous ne traitons pas ce phénomène ici.
  • [21]
    François-Xavier Devetter, Florence Jany-Catrice et Thierry Ribault, Les services à la personne, Paris : La Découverte, coll. « Repères », 2009 ; Emmanuelle Lada, « Les recompositions du travail d’aide à domicile en France », Formation emploi, 115, 2011, p. 9-23.
  • [22]
    Bernard Balzani (dir.), Les services à la personne, Paris : La Documentation française, coll. « Les études de la DF », 5313-14, 2010.
  • [23]
    Christian Bidegaray, Stéphane Cadiou et Christine Pina (dir.), L’élu local aujourd’hui, Grenoble : PUG, coll. « Libres cours », 2009.
  • [24]
    Dans le département G, 43 % des élus du conseil général étaient maires ou maires adjoints.
  • [25]
    Pierre-Olivier Caille, « Le cumul des mandats au regard des expériences étrangères », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, 6, 2000, p. 1701-1743 ; « The Causes and Consequences of the “cumul des mandats” », French Politics, numéro spécial, 4, 2006.
  • [26]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, Paris : Presses de Sciences Po, coll. « Académique », 2010.
  • [27]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [28]
    Directrice du SAAD au CCAS de la ville V, 8 mars 2011.
  • [29]
    Chef adjoint du service de la tarification du CG G, 26 novembre 2011.
  • [30]
    Ibid., 26 novembre 2011.
  • [31]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [32]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, op. cit.
  • [33]
    Chef du service de la tarification du CG G, 10 janvier 2011 ; chef du service de la tarification du CG M, 27 septembre 2011.
  • [34]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [35]
    Article L3241-5 du Code général des collectivités territoriales.
  • [36]
    L’article R314-51 prévoit que l’affectation du résultat du budget général des services tarifés est « décidée par l’autorité de tarification », en tenant compte des circonstances « qui expliquent le résultat ».
  • [37]
    Compte rendu d’une réunion entre les directeurs généraux des services et le chef du service de la tarification du CG G, 10 février 2010.
  • [38]
    Suite à un rapport de la Cour des comptes recommandant la transparence dans la gestion du financement de la sécurité sociale, le régime A national a « clarifié sa position par rapport aux associations qu’elle [la caisse A] avait fait émerger » depuis 2000. Mais, jusqu’à notre enquête en 2010, cette caisse et l’association Y partageaient les locaux. Le directeur actuel de services Y est un ancien employé du régime de sécurité sociale.
  • [39]
    Directeur du SAAD Y, 29 mars 2011.
  • [40]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [41]
    Tarificateur chargé de la tarification du service Y du CG G, 11 mars 2011.
  • [42]
    Ibid.
  • [43]
    Tarificatrice dans le département M, 28 septembre 2011.
  • [44]
    Pierre Lascoumes, Favoritisme et corruption à la française, petits arrangements avec la probité, op. cit., p. 33.
  • [45]
    « Mémoire en défense » du CG G devant un tribunal interrégional de la tarification sanitaire et sociale, décembre 2009.
  • [46]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [47]
    Rencontre entre le directeur adjoint chargé de la solidarité, le directeur des personnes âgées et trois présidents locaux du service S, avril 2009. Archive consultée dans le CG G en janvier 2011.
  • [48]
    Directeur adjoint chargé de la solidarité du CG G, 9 février 2011.
  • [49]
    Rencontre entre le directeur adjoint chargé de la solidarité, le directeur des personnes âgées et trois présidents locaux du service S, avril 2009. Archive consultée dans le CG G en janvier 2011.
  • [50]
    Lygia Sigaud, « Le courage, la peur et la honte. Morale et économie dans les plantations sucrières du Nordeste brésilien », Genèses, 25, 1996, p. 72-90.
  • [51]
    Tarificateur chargé du service Y du CG G, 11 mars 2011.
  • [52]
    Comptable du SAAD X, 25 novembre 2011.
  • [53]
    Directeur d’un SAAD agréé du département G, un des principaux fondateurs d’un groupement des services d’aide à domicile privés à but lucratif, 1er octobre 2010.
  • [54]
    Nous avons observé une disparité dans la fixation du tarif de solvabilisation pour les services agréés dans nos départements enquêtés : en 2010, certains CG appliquent le tarif CNAV de 2007 (17,50 €), d’autres le tarif CNAV de 2011 (18,80 €).
  • [55]
    Les politiques de financement dans le cadre de l’APA sont en fait plus disparates que ne le laisse penser cet encadré qui ne reprend que les deux systèmes les plus répandus. Voir Solène Billaud, Cécile Bourreau-Dubois, Agnès Gramain, Helen Lim, Florence Weber et Jingyue Xing, La prise en charge de la dépendance des personnes âgées, op. cit., pour une description des différentes pratiques de solvabilisation.
  • [56]
    Mission relative aux questions de tarification et de solvabilisation des services d’aide à domicile en direction des publics fragiles, Paris : IGAS, coll. « Rapport IGAS », 2010.
  • [57]
    Certaines études en économie ont analysé l’impact du mode de tarification et de financement sur l’usage des deniers publics et sur les comportements des praticiens. Voir Principes et enjeux de la tarification à l’activité à l’hôpital (T2A), Paris : IRDES, coll. « Document de travail », 23, mars 2009.
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.14.81

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions