Diogène 2008/1 n° 221

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Article de revue

À propos de la philosophie micropolitique

Pages 58 à 72

English version

1Annoncée par la publication de La Théorie de la justice de Rawls, la recherche en philosophie politique s’est remise à prospérer sur tous les fronts depuis les années 70. En Chine, elle est devenue au tournant du siècle l’un des domaines philosophiques les plus étudiés. La philosophie politique contemporaine occidentale, de son côté, a eu tendance à se diversifier. Les différentes écoles occidentales marquent une tendance à évoluer selon une orientation différente de celle de la philosophie politique traditionnelle – un renversement où l’on passe de la philosophie macropolitique à la philosophie micropolitique. Une analyse de cette tendance semble susceptible d’ouvrir de nouveaux horizons pour la philosophie politique.

I – La naissance de la philosophie micropolitique

2Pour obtenir une vision claire du changement d’axe de recherche dans la philosophie politique contemporaine, nous devons en premier lieu tenter de définir un certain nombre de notions fondamentales, comme celles de micropolitique, de macropolitique, de macropouvoir et de micropouvoir. D’une manière générale, la philosophie politique examine la nature normative des phénomènes ou questions politiques et la légitimité des systèmes politiques. Elle exprime également des jugements de valeur sur la construction des systèmes politiques et sur le déploiement des activités politiques et développe des réflexions philosophiques fondées sur le logos. Or la fonction essentielle de la politique reste une fonction de médiation sociale consistant à réaménager l’ordre social à travers différents systèmes. En un mot, le noyau de la politique est représenté par le pouvoir et le contrôle. Ce que l’on appelle la « macropolitique » s’intéresse à la structure de pouvoir à grande échelle, centralisé, ainsi qu’aux mécanismes de contrôle tels que l’aménagement du système étatique et l’exercice de son pouvoir. Ce que l’on appelle la « micropolitique » s’intéresse plutôt aux structures de pouvoir à petite échelle, disséminées, ainsi qu’aux mécanismes de contrôle inhérents aux activités sociales et à la vie quotidienne. Selon un point de vue moderne, la macropolitique apparaît donc comme un exercice du pouvoir rationalisé et comme un aménagement de systèmes, alors que la micropolitique intègre différentes formes de pouvoir épistémique et de pouvoir culturel spontané.

3Au regard de cette distinction, la philosophie politique traditionnelle, les études historiques, la sociologie et autres études qui leur sont liées, suivent un axe de recherche relevant essentiellement de la philosophie macropolitique. Toutes ces disciplines s’intéressent à l’exercice du pouvoir d’État, à l’aménagement des systèmes politiques et aux concepts politiques fondamentaux qui leur sont liés, comme la justice, l’égalité, la liberté, la démocratie, les systèmes législatifs, l’autorité, le droit et le devoir, et laissent de côté aussi bien les structures de pouvoir à l’œuvre dans d’autres domaines de la vie sociale que les mécanismes de contrôle qui agissent au niveau de la vie quotidienne. Elles considèrent ces micropouvoirs comme dépendants des macropouvoirs. Pourtant, même si l’étude des macropouvoirs reste toujours un thème de recherche important, une mutation est en train de s’opérer dans les études de philosophie politique. Dans la micropolitique de Michel Foucault ou de Gilles Deleuze, de même que dans la philosophie politique postmarxiste, l’attention a commencé à se porter volontairement vers les phénomènes micropolitiques et les structures de pouvoir correspondantes. Que ce soit l’analyse par Foucault des micropouvoirs disciplinaires, normatifs et disséminés à l’œuvre dans des domaines périphériques tels que l’armée, la prison, l’hôpital ou l’école ; que ce soit l’analyse de Deleuze et d’autres sur la politique du désir ; ou encore l’analyse de Baudrillard sur la politique de marginalisation et de différenciation, toutes sont typiquement des critiques micropolitiques. Dans leur Postmodern Theory, S. Best et D. Kellner (1991 : 24) affirment qu’après le soulèvement de mai 68, maints mouvements sociaux inspirés par la nouvelle gauche ont commencé à « embrasser la cause de la micropolitique comme terrain authentique de la lutte politique ». « La micropolitique, remarquent les auteurs, allait se concentrer sur les pratiques de la vie quotidienne, donnant lieu à une révolution dans le style de vie, dans les discours, dans les corps, dans la sexualité, dans la communication, et dans tout ce qui fournirait les conditions préalables à une nouvelle société, en émancipant les individus de la répression et de la domination sociales » (Best et Kellner 1991 : 116).

4Certes, il convient de préciser que la distinction entre macropolique et micropolitique, entre philosophie macropolitique et micropolitique n’est que relative. Il n’existe aucune frontière nette et absolue entre ces deux domaines. Même les penseurs de la postmodernité, comme Gilles Deleuze et Félix Guattari qui plaident en faveur de la micropolitique, soulignent eux aussi le fait qu’il n’existe pas de distinction radicale entre macropolitique et micropolitique, et que la politique est à la fois l’une et l’autre. Si nous introduisons la notion de philosophie micropolitique, ce n’est donc pas pour rejeter ni remplacer la macropolitique, mais pour élargir l’horizon de la philosophie politique. Pour aller dans le sens des Lumières et de la réflexion moderne, nous devons admettre les limites inhérentes à la philosophie macropolitique traditionnelle. Cette dernière, si l’on veut être précis, rejette ou néglige la dynamique reliant la polymorphe diversité du micropouvoir au macropouvoir. De cette manière, la philosophie macropolitique assimile le pouvoir rationnel et la macropolitique au pouvoir universel et décisif de l’Histoire. Une philosophie de ce type montre les symptômes théoriques typiques des crises de la modernité.

5Macropolitique et macropouvoir forment le noyau des grands récits de la culture rationnelle moderne. Macropouvoir et grand récit sont fondamentalement et inséparablement liés. Les critiques de la modernité émises par les écoles contemporaines se sont souvent concentrées sur les grands récits et métarécits. Les grands récits de projets rationnels de liberté et de libération de l’homme, émanant de la raison des Lumières et de l’esprit contractualiste, les interprétations des vérités absolues dues à la pensée catholique de la raison absolue ou encore un certain déterminisme historique fondé sur l’idée d’un dessin régulateur de l’Histoire – ce sont autant de constructions auxquelles on attribue une fonction de modèles rationnels pour l’histoire sociale moderne, essentiellement parce qu’elles reposent, à un niveau profond, sur la croyance dans le macropouvoir. En d’autres termes, c’est la croyance dans la nécessité, dans le catholicisme et dans le déterminisme de la macropolitique et du macropouvoir qui vient soutenir les grands récits sur la modernité. C’est pour cette raison que Deleuze et Guattari critiquent dans leur micropolitique le sujet organisé et stratifié et son pouvoir, qu’ils qualifient de « machine d’État », tout en plaidant contre l’« impérialisme philosophique », relais de la pensée étatique et grand apôtre de l’ordre universel, de la totalité et du système de castes. Dans ses Pourparlers, 1972-1990, Deleuze affirme clairement qu’il n’aime pas beaucoup l’abstraction – l’Un, la Totalité, la Raison, le Sujet, etc. Dans un autre recueil, il note que « ce type de pensée s’est déjà identifié au modèle qu’il a repris de la machine d’État, et qu’ainsi son but et sa marche, l’ensemble de ses méthodes de recherche, conducteur, canal, mécanisme et ainsi de suite, sont définis par la machine de l’État » (Deleuze 2002 : 151s). Si on laisse de côté le caractère extrême de ces propos, on peut voir que la mise en lumière du rapport entre pouvoir d’État et philosophie ouvre des horizons prometteurs.

6Second point : sur fond de modernité, la macropolitique est devenue l’une des incarnations typiques de la philosophie de la conscience pure et de la philosophie théorique spéculative. Wilhelm Windelband, dans son Histoire de la philosophie (1878), déclare que depuis la Grèce ancienne, deux orientations distinctes se sont dégagées dans l’histoire de la philosophie occidentale : l’une est celle de la philosophie théorique, ou philosophie de la conscience, qui recherche une connaissance universelle, l’autre est celle de la philosophie pratique, ou philosophie de la culture, qui s’oriente vers la valeur et le sens de la vie. L’exploration théorique de la première est tournée vers la détermination d’une logique rationnelle stricte, d’une vérité universelle et d’un système de connaissance sous forme de métaphysique et d’épistémologie ; la seconde, la philosophie pratique initiée par Socrate et les Sophistes, est plutôt tournée vers la mission de l’homme, vers la valeur et le sens de la vie et prend la forme d’éthique et de philosophie morale, de philosophie sociale, d’esthétique, de philosophie de la religion, etc. À l’évidence, la philosophie politique se situe ici du côté de la philosophie pratique. Elle a dû résister à l’universalisation excessive de la spéculation rationnelle en restant attachée à toute la richesse contenue dans la société humaine et dans le monde de la vie. Cependant, avec la macropolitique traditionnelle, la philosophie politique est devenue elle aussi une philosophie théorique, trop aisément influencée par une philosophie de la conscience qui s’est progressivement « naturalisée ». La philosophie spéculative s’est parfaitement habituée à emprunter l’image d’un monde infini proposé par les sciences de la nature dans l’élaboration de son système philosophique, en faisant appel à des concepts tels que la relation de cause à effet, la nécessité, la détermination linéaire, la réductibilité, la calculabilité et l’universalité pour les fondre dans les lois universelles, unitaires et standardisées du monde. Elle a ainsi généré un système métaphysique et épistémologique fondé sur une logique rationnelle, une vérité absolue et des lois universelles. Dans le même temps, elle a fait du monde de la vie, de l’univers éthique et de l’histoire humaine un simple cas de figure de ce monde de la nature mathématisé et rationalisé, en gommant leurs spécificités et leurs individualités par un processus d’abstraction. Parallèlement, la philosophie macropolitique traditionnelle a eu tendance à effacer les structures polymorphes de pouvoir et les mécanismes périphériques de contrôle présents à chaque niveau de la vie sociale et quotidienne. Elle a élevé au niveau de lois et de puissances historiques de la société humaine les activités macropolitiques (l’exercice du pouvoir centralisé, l’aménagement du système étatique…) ainsi que les dynamiques macroéconomiques, mettant de la sorte au centre de sa réflexion un pouvoir politique ou économique rationalisé.

7Une telle analyse des limites internes de la philosophie macropolitique nous amène à la conclusion que si l’on reste limité à ce paradigme, si l’on reste sous l’influence de la philosophie spéculative et d’une philosophie de la conscience à tendance universaliste, alors notre rejet des grands récits, notre volonté de retour au monde de la vie ne resteront qu’un vœu pieux et vide de toute portée réelle. Nous devons par conséquent attacher une valeur considérable au paradigme représenté par la philosophie micropolitique. On peut être sûr que ni la naissance de la modernité ni son évolution ne sauraient être expliquées par le récit d’un macropouvoir totalitaire, centralisé, qui négligerait la diversité des micropouvoirs. De la même manière, pour préserver un ordre social fondé sur la liberté, la justice, l’égalité et la démocratie, et pour défendre l’autonomie de notre monde de la vie contre les risques de « colonisation » par un pouvoir économique ou politique global, il ne faudra pas remplacer un macropouvoir centralisé par un autre, mais plutôt raviver les différents micropouvoirs présents à tous les niveaux de la société et de la vie, pour ainsi former un système diversifié de contrôle social.

II – Sources théoriques de la philosophie micropolitique

8Le paradigme micropolitique n’est pas quelque chose d’entièrement nouveau. Il a représenté une tendance importante du xxe siècle dans nombre de domaines théoriques, parmi lesquels la philosophie, les études historiques et politiques, les disciplines sociologiques. Mais dans le contexte chinois, la philosophie micropolitique, la microhistoire et la critique de la vie quotidienne sont relativement nouvelles. Les gens ont toujours tendance à édifier des théories universelles qui seraient « valables partout » et à faire le récit de grands événements, laissant en dehors du champ théorique le monde de la vie. Pourtant, ce dernier forme la base culturelle sur laquelle les individus tentent de vivre et de prospérer au quotidien. De ce fait, nos sciences sociales regorgent de signifiants généraux, vides, flous, théâtre d’un véritable « carnaval de signifiants ». En un sens, l’abstraction et l’abandon du monde de la vie reste un fléau persistant au sein des sciences philosophiques et sociales.

9Ainsi, pour aborder la question des études de philosophie micropolitique dans le contexte chinois, nous devrons au préalable récapituler quelles sont les différentes sources théoriques de la philosophie micropolitique dans la culture et dans les conceptualisations occidentales du xxe siècle, pour ensuite les intégrer et les assimiler afin de nous en inspirer. Il existe, me semble-t-il, au moins quatre sources théoriques ayant permis de poser des fondations solides de la philosophie micropolitique.

10La première des quatre, c’est la Nouvelle Histoire de l’École des Annales. L’historiographie et la politique (ou la philosophie politique) sont étroitement liées. D’une certaine manière, l’historiographie traditionnelle est une sorte de politique, ou de philosophie politique diachronique. Il faut remarquer que l’historiographie et l’analyse macropolitique ont souvent eu des sujets, des approches ou des thèmes de prédilection communs. La première s’intéressait essentiellement aux monarques, aux grands hommes et aux événements importants, se présentant généralement comme une histoire de la macropolitique. La seconde met plutôt l’accent sur la mise en place du système étatique et sur l’exercice du pouvoir politique, et se présente généralement comme une compilation d’historiographie traditionnelle. Ainsi, lorsque l’École française des Annales lance un défi à l’historiographie traditionnelle au début du xxe siècle, le paradigme de la Nouvelle Histoire se présente en même temps comme un défi lancé à la macropolitique et à la philosophie politique traditionnelle. L’École française des Annales, en l’espace de trois ou quatre générations d’historiens, a développé un nombre considérable d’idées majeures sur l’histoire, qu’elle a ancrées dans des analyses historiques devenues classiques. Nous ne pouvons pas les reprendre ici, mais nous devons néanmoins évoquer deux parmi ces concepts fondamentaux – l’« histoire totale », et la « longue durée ».

11L’« histoire totale » a été l’un des paradigmes de la Nouvelle Histoire proposés par les fondateurs de l’École des Annales, Lucien Febvre et Marc Bloch. En apparence, « total » ou « totalité » sembleraient indiquer une vision totalisante, linéaire, déterministe et fataliste de l’histoire. Mais ce n’est pas le cas. Ce à quoi ils s’opposent, c’est à vision de l’histoire traditionnelle et conçue comme histoire des événements politiques. Ils affirment que l’historiographie devrait s’étendre pour pouvoir traiter chaque détail et chaque niveau de l’histoire humaine, et qu’elle devrait pénétrer tous les domaines de recherche en sciences sociales, plutôt que d’être limitée aux événements politiques.

12La « longue durée » en histoire est la contribution de Fernand Braudel à l’« histoire totale ». Représentant de la seconde génération de l’École des Annales, Braudel joua un rôle essentiel dans la révolution de l’historiographie au xxe siècle. Il estime que dans la réalité sociale il existe un temps social à variables multiples où l’immédiateté et la durée, deux limites temporelles opposées, méritent une attention particulière. D’une manière générale, l’historiographie traditionnelle s’occupe de l’histoire de périodes relativement courtes, s’intéressant à des événements ou à des périodes politiques, c’est-à-dire aux révolutions, aux guerres ou à d’autres événements critiques. Bref, il s’agit d’une histoire événementielle. Pourtant, la société humaine connaît également des phénomènes historiques de longue durée, essentiellement liés à ses structures et au temps de la nature – phénomènes qui ne varient pas ou varient d’une manière extrêmement lente sur une longue période de temps, comme par exemple le climat géologique, l’envi-ronnement écologique, l’organisation sociale, les idées ou les traditions. Braudel s’oppose catégoriquement à l’histoire traditionnelle en tant qu’histoire des événements politiques. Il estime que l’histoire d’une courte période est incapable de montrer l’existence de ces phénomènes durables et leurs mutations, pas plus qu’elle n’est capable de les interpréter. Ce sont les phénomènes de longue durée qui constituent la structure profonde de l’histoire, forment la base du développement historique et déterminent la dynamique des processus historiques.

13La signification de paradigme de la Nouvelle Histoire introduit par l’École des Annales repose sur le fait qu’il ne fonde pas son mode d’interprétation de l’histoire sur des événements de macropolitique isolés, mais replace plutôt les phénomènes politiques dans leur environnement géographique, dans leur tradition culturelle, dans leur structure économique et dans d’autres dimensions historiques structurelles et de longue durée. Cette histoire totale nous révèle le fondement culturel profond des mouvements sociopolitiques et des activités économiques. L’attention des chercheurs se détourne des grands événements historiques et des grands récits politiques, économiques, militaires et diplomatiques, au profit du monde de la vie quotidienne et des mouvements sociaux, mettant en valeur le rôle historique de la culture, de la vie quotidienne et de l’environnement géographique. Le premier des trois volumes de son ouvrage Civilisation, économie et capitalisme : xve-xviiie siècles, intitulé Les Structures du quotidien, Braudel le consacre à la vie quotidienne des gens au cours de ces trois siècles, couvrant tous les aspects et détails tels que l’habillement, la nourriture, l’habitat et les déplacements, et prenant la vie quotidienne comme clé d’interprétation pour cette période de l’histoire.

14La deuxième source théorique est représentée par la théorie du monde de la vie et la critique du quotidien. Les analyses sur la longue durée menées par la Nouvelle Histoire de l’École des Annales s’apparentent de près à la théorie du monde de la vie qui a traversé la philosophie du xxe siècle. Sortir le monde de la vie de l’arrière-plan théorique où il se trouvait pour l’intégrer dans l’horizon rationnel, et ainsi appliquer en pleine conscience le mode de pensée rationnel au monde de la vie, est une réalisation importante de la pensée du xxe siècle. Husserl, Wittgenstein, Schutz, Heidegger, Lefebvre, Habermas, Heller et autres théoriciens, ont contribué, chacun à leur niveau, à cette réorientation philosophique. L’élément essentiel de cette critique du quotidien se résume dans le fait qu’on n’étudiera plus de manière isolée les fonctions déterminantes du macrosocial, comme la politique ou l’économie, mais que ces éléments socio-historiques seront replacés, examinés et évalués au sein de la structure culturelle du monde de la vie.

15La théorie du monde de la vie et la critique du quotidien marquent une réorientation générale de la philosophie au xxe siècle, qui donne naissance à différentes théories du quotidien. Pour Husserl en particulier, le monde de la vie qui se construit à travers les significations en tant qu’intersubjectivité est un monde culturel qui inclut des structures culturelles données, non thématisées, pré-scientifiques et prélogiques aussi différentes que les valeurs et les significations. Les théories de Wittgenstein sur le langage ordinaire et sur les jeux de langage appréhendent ce langage quotidien comme une forme de vie fondamentale. Cette position est très proche de la théorie husserlienne du monde de la vie en ce qui concerne la philosophie des valeurs. Le monde du Mitsein – « l’être-avec » – quotidien du Dasein analysé par Heidegger est un monde dans lequel les sujets existent et communiquent les uns avec les autres à travers l’être en soi, l’affaissement ou l’aliénation. Ce sur quoi il se concentre, c’est bien sûr sur la forme du Mitsein, « l’être-avec », une forme particulière de l’existence. La théorie de « l’Autre » chez Sartre manifeste une même compréhension de la communication vitale que celle de Heidegger. Lefebvre, quant à lui, définit le monde de la vie quotidienne comme le plan sur lequel les individus existent et se reproduisent ; les individus sont créés et se découvrent sur ce plan, dont il souligne qu’il inclut la forme fondamentale de l’existence, à savoir le mode culturel. Schutz définit clairement le monde de la vie quotidienne comme un monde intersubjectif donné, un monde de culture et un réseaux de significations. Lorsqu’il analysait la vie quotidienne comme un domaine de reproduction individuelle, Heller la considérait comme une forme de survie et d’existence, une objectivation de la nature catégorielle des choses-en-soi. Karel Kosik, dans sa Dialectique du concret (1963) critique « le monde du pseudo-concret » et explore en profondeur les caractéristiques du monde de la vie et sa nature historique. Habermas comprend la culture – un moyen de stocker le savoir – comme l’élément constitutif fondamental du monde de la vie.

16Bien que différant profondément par leur approche du monde de la vie, ces théoriciens partagent une conviction essentielle : ils considèrent le monde de la vie comme un monde culturel. Ce qui veut dire que la rationalité philosophique est ancrée dans un héritage donné du savoir humain, dans une pré-pensée culturelle, dans une sensibilité face aux valeurs, dans un ensemble de règles non thématisées, de traditions et de coutumes immanentes à des activités quotidiennes tel que satisfaire aux besoins vitaux élémentaires, tomber amoureux, créer une famille, faire le deuil d’un mort ou communiquer avec les autres. Ainsi, le monde de la vie est étroitement lié au sens et aux valeurs de l’existence ainsi qu’à la dynamique de l’histoire sociale. En tant qu’espace où a lieu la reproduction des individus, en tant qu’arrière-plan ou contexte où se produit la communication intersubjective, en tant que fondement de la reproduction sociale et du mouvement historique de la société, le monde de la vie conditionne et régule la reproduction individuelle et sociale ainsi que l’évolution de la société. Il n’est donc pas difficile de comprendre que la critique du monde de la vie représente une dimension théorique importante de la philosophie micropolitique. Ce fond culturel est indispensable à l’examen rétrospectif de la modernité, à la compréhension de l’agir politique et à l’organisation de la société humaine.

17Le troisième des quatre sources théoriques, c’est la micropolitique postmoderne. Si la Nouvelle Histoire de l’École des Annales ou la critique philosophie de la vie quotidienne sont quelque chose que la philosophie micropolitique peut utiliser, on trouve de bons exemples de philosophie micropolitique chez Foucault, Deleuze, Guattari et Lyotard. Ce qui apparaît le plus nettement dans les analyses de la modernité réalisées par ces quatre philosophes, c’est l’abandon du point de vue centré sur le macropouvoir centralisé au profit d’analyses consacrées aux micropouvoirs multiformes. Ce changement d’approche modifie en profondeur notre appréhension de l’organisation du pouvoir et du système en place, deux problèmes cruciaux de la modernité. Pour rester concis, nous allons évoquer brièvement la critique de la modernité chez Foucault du point de vue micropolitique.

18Foucault, dans son Introduction à L’Archéologie du savoir, commence par un commentaire sur la notion de longue durée développée par l’École des Annales. Il estime que l’intérêt généralisé des historiens pour la longue durée a eu pour conséquence immédiate un rejet de l’idée de continuité linéaire au profit des notions de fracture et de discontinuité. À ce propos, Foucault oppose clairement sa conception postmoderne d’une histoire générale à la conception moderne de l’histoire totale. Il résume les différences de la façon suivante : « Une description globale resserre tous les phénomènes autour d’un centre unique – principe, signification, esprit, vision du monde, forme d’ensemble ; une histoire générale déploierait au contraire l’espace d’une dispersion » (Foucault 1969 : 19). C’est précisément dans un espace narratif de dispersion et de discontinuité que Foucault, au moyen d’une archéologie du savoir plutôt que d’un déterminisme linéaire, nous montre les microstructures nouvelles du pouvoir. Selon lui, le pouvoir émanant du savoir, le pouvoir rationnel, n’est pas le macropouvoir centralisé, juridique et oppresseur formé autour du pouvoir étatique, mais prend la forme de micropouvoirs, qui par définition sont dispersés, changeants, multiformes, sans sujet et que l’on retrouve à différents niveaux de la société et de la vie quotidienne. Il estime également que l’exercice du micropouvoir a conduit à de profondes mutations. Ce nouveau pouvoir n’a recours ni à la loi ni à la force physique, mais fait appel à des moyens de domination différents – tactiques politiques, formatage du corps et de l’esprit. Le micropouvoir, par conséquent, se présente comme un réseau de pouvoir disciplinaire, normatif et omniprésent. C’est pour cette raison précise que Foucault n’est pas très porté sur la critique générale de la modernité et des Lumières. Il préfère dévoiler le système du micropouvoir, total et omniprésent, à travers quelques milieux particuliers et marginaux comme l’hôpital psychiatrique, l’armée, l’école, la prison ou encore les sciences humaines.

19Pour coller à la réalité du micropouvoir, la micropolitique postmoderne adopte une stratégie différente de celle de la macropolitique lorsqu’elle critique la modernité et les Lumières. La crise de la modernité n’est pas le produit d’une oppression totalitaire de la société due à un pouvoir étatique centralisé ; on la retrouve dans la surveillance, dans les jugements, dans l’évaluation et dans la mise au pas de l’individu dont se charge le réseau du micropouvoir, un réseau complexe, disciplinaire, normatif et qui résiste à tout. Il est une prison panoramique sans le moindre espace de liberté. Pour Foucault, le micropouvoir étant disséminé et polymorphe, la lutte politique est aussi disséminée et polymorphe. Il n’existe aucun centre de résistance à grande échelle, aucun cœur de la rébellion. Nous avons affaire à une résistance et à des luttes autonomes et changeantes. Alors qu’il commentait certaines révoltes issues des mouvements écologiques, Foucault fit une fois remarquer que la lutte pour le pouvoir n’avait pas pour objectif de s’emparer du pouvoir d’État, mais de rejeter toute forme de pouvoir.

20La dernière des quatre sources théoriques, c’est la philosophie politique postmarxiste. C’est une opinion répandue qu’après le soulèvement de mai 68 en France, la critique culturelle du marxisme occidental a largement réouvert la voie à la philosophie politique. Les exemples peut-être les plus convaincants sont ceux de Ernesto Laclau, Chantal Mouffe, Bob Jessop et d’autres qui ont marqué un tournant dans le marxisme occidental par leurs études sur l’hégémonie, les stratégies socialistes, les États capitalistes et d’autres sujets. La philosophie micropolitique occupe, de fait, une place non négligeable dans cette philosophie politique postmarxiste. Les conceptions de l’hégémonie développées par Laclau et Mouffe, par exemple, nous en donnent un aperçu.

21Même si les postmarxistes s’efforcent de repenser les concepts fondamentaux de la philosophie macropolitique classique tels que l’État, la société ou les classes, Laclau et Mouffe estiment qu’on se tromperait à considérer l’État comme une variable indépendante dans l’analyse théorique d’une société. Ils sont opposés à toute pratique visant à appréhender l’État via le déterminisme économique, la théorie de la superstructure, l’instrumentalisme de classe ou la théorie autonome de l’État, considérant que l’hégémonie devrait être le concept fondamental en philosophie politique. C’est précisément ce concept qui est au cœur de la stratégie révolutionnaire de Gramsci, l’un des premiers représentants du marxisme occidental. Nous n’exposerons pas ici ses théories de la société civile et de l’hégémonie, mais voudrions faire remarquer qu’en plaçant la société civile et sa culture entre la superstructure et la fondation économique de l’État, Gramsci avait peut-être conscience, qui sait, de rompre avec la prédominance de la macropolitique traditionnelle du fait qu’il désolidarisait l’hégémonie de la structure du macropouvoir de l’État, du pouvoir politique et des actions du gouvernement pour la réintégrer comme partie intégrante de la structure socioculturelle. Dans leurs discussions sur l’hégémonie et sur les stratégies socialistes, Laclau et Mouffe accordent eux aussi une place à l’hégémonie toute différente de celle qu’elle occupe dans la macropolitique traditionnelle. Arguant de leur postulat anti-essentialiste, ils insistent sur la logique de la contingence qui caractérise les relations sociales, sur le rôle de l’hégémonie, central pour relayer les différents facteurs politiques, sur l’impossibilité d’éradiquer la relation d’autorité et de construire une société harmonisée. Ils suppriment ainsi toute idée d’un déterminisme linéaire fondé sur le macropouvoir, l’essentialisme et l’objectivisme, et ouvrent la voie à une lutte démocratique radicale et polymorphe qui n’est au fond que confrontation. Il n’est pas difficile de voir que leur stratégie socialiste relève, d’une certaine façon, de la lutte micropolitique pour l’hégémonie. Ils affirment clairement que ce qui mérite une attention particulière et une réflexion nouvelle, c’est la diversité des mouvements sociaux. Une attention particulière, par exemple, devrait être portée à « la montée d’un nouveau féminisme, aux mouvements de protestation des minorités ethniques, nationales ou sexuelles, aux luttes écologiques et anti-institutionnelles engagées par des couches marginales de la population, au mouvement antinucléaire, aux formes atypiques de lutte sociale dans des pays situés à la périphérie du monde capitaliste – tout cela impliquant une extension des conflits sociaux à toute une série de domaines qui créent le potentiel, mais seulement le potentiel, pour une avancée vers des sociétés plus libres, plus démocratiques et plus égalitaires » (Laclau et Mouffe 1985 : 1).

III – Les enjeux fondamentaux de la philosophie micropolitique

22Nous avons passé en revue les différentes sources théoriques de la philosophie micropolitique et connaissons maintenant leurs idées essentielles. Par manque d’espace, nous n’avons pas pu évoquer bon nombre d’aspects de ces théories. Mais la brève introduction et les commentaires développés ci-dessus suffiront pour nous donner une première idée de la philosophie micropolitique. Pour conclure, nous présenterons les principaux enjeux théoriques de ce paradigme ainsi que quelques conceptions de fond qui le caractérisent.

23En premier lieu, la philosophie micropolitique, par le fait qu’elle déconstruit les grands récits universels, qu’elle supprime le rôle central de la macropolitique et du macropouvoir et qu’elle fait appel aux paradigmes de l’histoire totale et de la longue durée introduits par l’École des Annales, replace la politique dans le cadre d’une histoire complexe et diversifiée de la société humaine. Ainsi elle s’efforce de la comprendre et de l’étudier en forgeant une théorie articulée et plurielle de l’histoire sociale. En ce sens, la philosophie micropolitique se présente donc aussi comme une théorie de l’histoire sociale. D’une part, elle s’oppose à l’idée de séparer le pouvoir macropolitique ou les facteurs macro-économiques de leur lien à l’histoire sociale et de les élever au rang de déterminants inconditionnels de l’histoire en repoussant les autres facteurs à l’arrière-plan, comme étant secondaires et déterminés. D’autre part, elle s’oppose à toute réduction de la diversité des agents historiques et de la pluralité des choix historiques par le biais d’un processus de généralisation calqué sur les pratiques des sciences de la nature. Elle rejette également toute assimilation de l’histoire aux processus naturels gouvernés par les lois de la causalité et du déterminisme. La philosophie micropolitique, en revanche, insiste résolument sur la pluralité de relations, y compris accidentelles, qui unissent les divers facteurs sociohistoriques dans les processus historiques de longue durée, sur les différentes modalités de formation des modèles et des mécanismes de pouvoirs à travers l’histoire, et sur la résistance au pouvoir et à l’action d’autres facteurs. Bref, la philosophie micropolitique considère véritablement l’histoire humaine comme l’histoire de la production de l’homme.

24En deuxième lieu, la philosophie micropolitique accorde une grande importance à la fonction de toutes sortes de micropouvoirs politiques périphérique, polymorphes et changeants, dans le but de proposer une manière d’interpréter le politique combinant à la fois le micropolitique et le macropolitique. Il faut considérer cela comme sa contribution la plus importante. Elle révèle la diversité et la complexité qui caractérisent les systèmes politiques et les mécanismes de pouvoir, et refuse d’identifier l’agir politique avec l’établissement et la succession de macropouvoirs centralisés. D’une part nous ne pouvons pas instaurer un système politique ou un mécanisme de contrôle social – la démocratie par exemple, ou l’État de droit – en nous contentant de proposer des théories bien intentionnées. Si on néglige l’aspect éthico-moral et les multiples structures de micropouvoir présentes à tous les niveaux de la vie sociale, y compris au niveau de la vie quotidienne, aucun système politique ne reposera sur des bases fermes. D’autre part, la réforme ou la rénovation d’un système politique ou d’un mécanisme de contrôle social déraisonnables ne sauraient se réduire au simple remplacement d’un macropouvoir par un autre. Aucune réforme ou rénovation ne sera couronnée de succès si les fonctions des différents mécanismes de micropouvoir sont ignorées.

25Un tel constat est pour nous fort instructif pour comprendre le problème de la modernité, un problème de fond alimenté par les controverses théoriques et pratiques du xxe siècle. Pour la philosophie micropolitique, ni l’instauration de la modernité ni sa crise ne renvoient à un macromécanisme centralisé. La crise de la modernité – c’est-à-dire la crise de la rationalité – ne saurait s’expliquer par l’autocratie d’un macropouvoir centralisé, mais par la spécialisation rationnelle et disciplinaire des micropouvoirs à l’œuvre au niveau de la vie sociale et quotidienne. Dans leur commentaire sur la théorie de Deleuze et Guattari sur la politique du désir, Best et Kellner (1991 : 77) ont écrit : « Comme pour Foucault, leur intérêt se porte en priorité sur la modernité en tant que période historique de domination sans précédent fondée sur la prolifération d’institutions et de discours normatifs qui infiltrent tous les aspects de l’existence sociale et de la vie quotidienne ». Ainsi, la modernité n’est pas une identité concrète que nous pourrions décider de défendre ou de dénoncer. Comme le montre précisément Habermas dans son analyse, bien qu’il existe là un risque qui est inhérent au système et qui peut s’autogénérer dans la société moderne et dans le développement économique, la modernité possède quand même une connotation prescriptive qui génère la confiance. Elle n’est pas quelque chose que nous avons choisi, et nous ne pouvons donc pas nous en débarrasser par une simple décision.

26De la même manière, dans le contexte chinois, le débat sur la modernité et sur les Lumières ne peut se limiter à la question générale de savoir si elle doit être poursuivie ou bien rejetée. Elle ne doit pas se transformer en un grand récit de la philosophie théorique. Au contraire, la première tâche sera de comprendre comment la diversité de la modernité pénètre chaque niveau de la vie sociale et de la vie quotidienne, quelle est l’efficacité du mécanisme de contrôle qui en résulte, et quelle est la profondeur de la crise. Ensuite nous aurons à décider jusqu’à quel point nous devons mobiliser des sources culturelles locales et globales dans le but de la corriger et l’améliorer.

27En troisième lieu, la philosophie micropolitique pénètre profondément dans le monde de la vie quotidienne grâce à ses analyses des mécanismes de micropouvoir. Elle met ainsi en lumière le lien qui existe entre la politique et la culture. La philosophie micropolitique est donc, d’une certaine manière, une philosophie de la culture qui a pour cible le monde de la vie. György Lukács, fondateur du marxisme occidental, compare la vie quotidienne à un fleuve. Il estime que les sciences, les arts et les autres formes de l’esprit proviennent toutes de ce fleuve. En fait, les mondes qui ne sont pas ceux de la vie quotidienne, tel que le monde de la philosophie, le monde de l’art, de la science, le système politique ou le système économique trouvent leurs racines dans le monde de la vie. Comparé au fonctionnement relativement isolé de la politique, de l’économie ou d’autres domaines de ces mondes, le monde de la vie quotidienne apparaît comme une structure non spécialisée de significations culturelles. Les différents mécanismes de micropouvoir qui agissent au quotidien sont donc aussi des mécanismes culturels et des facteurs d’hégémonie culturelle. C’est précisément la raison pour laquelle, même si le postmarxisme marque son retour à la philosophie politique dans le marxisme occidental, il en revient d’une certaine manière à la critique culturelle, qu’il enrichit grâce à son intérêt pour des questions de micropolitique comme l’hégémonie. De la même manière, bien que le renouveau de la philosophie politique accompli par Rawls et par d’autres passe par la reprise de notions de macropolitique telles que la justice, l’égalité, la liberté, la démocratie ou l’État de droit, ces philosophes mettent désormais l’accent sur leur signification culturelle dans le cours de l’histoire moderne. Autrement dit, leur philosophie politique peut être également considérée comme une philosophie de la valeur et comme une philosophie morale.

28La fusion des deux perspectives, philosophie micropolitique et philosophie de la culture, est un événement de grande portée, qui ouvre à l’étude du monde de la vie un horizon plus riche et plus prégnant. La critique du quotidien tend à ramener la philosophie et les sciences sociales vers le monde de la vie des différentes époques et circonstances historiques, mais aussi vers la diversité concrète de la vie quotidienne. Plus important encore, on peut étudier la manière dont l’individu, à chaque période et dans chaque culture, consomme, communique, pense et vit dans sa vie quotidienne, comment cet individu apporte son bagage culturel au sein de la vie publique, et comment l’organisation profonde, l’héritage et les normes du savoir interviennent dans la vie publique. En restant au niveau du monde de la vie, nous pouvons espérer comprendre pourquoi, dans les pays en voie de développement, le mécanisme culturel à l’œuvre au quotidien retarde la mise en place des systèmes macropolitiques modernes, législatifs et économiques, et comment, dans les pays développés, la colonisation du monde de la vie par les systèmes macropolitiques et économiques peuvent être contrés.

29Des notions macropolitiques telles que la justice, l’égalité, la liberté, la démocratie, l’État de droit, le pouvoir ou les droits ne pourront prétendre à être autre chose que de simples slogans abstraits ou de grands récits généralisateurs qu’à la condition d’être intégrés dans le mécanisme culturel immanent aux micro-niveaux de la vie quotidienne.

30(Traduit de l’anglais par Thierry Loisel.)

Bibliographie

Références

  • Best, S. et Kellner, D. (1991) Postmodern Theory. New York : Guilford Press.
  • Deleuze, Gilles (2002) « La Pensée nomade » [1973], dans Id., L’Île déserte et autres textes : textes et entretiens 1953-1974. Paris : Minuit.
  • Foucault, Michel (1969) L’Archéologie du savoir. Paris : Gallimard.
  • Laclau, E. et Mouffe, Ch. (1985) Hegemony and Socialist Strategy: Towards a Radical Democratic Politics. Londres/New York : Verso.

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