Notes
-
[1]
Docteur Julien Chevalier, Une maladie de la personnalité : l’inversion sexuelle, Lyon, A. Storck, Paris, Masson 1893, p. 219.
-
[2]
Ibid., p. 227.
-
[3]
Ibid. p. 220 et 224.
-
[4]
Havelock Ellis, Études de Psychologie sexuelle, Tome I, « L’inversion sexuelle », édition critique établie sous la direction du professeur Hesnard, traduction par A. Van Gennep, Paris, Tchou, « Bibliothèque des introuvables » 2003, p. 456-457. (Première édition : Sexual inversion, 1897). En 1908, on peut même lire: « Le féminisme, qui était au début la monomanie de l’égalité, est devenu l’apologie de l’instinct bestial. Il exhale une odeur équivoque de luxure. L’une de nos plus éhontées féministes, une certaine Renée Vivien, ne s’est-elle pas faite, dans un livre de mauvais vers, que les femmes riment dans leurs moments éperdus, la prêtresse moderne des ‘amours lesbiennes’ ? Cette Sapho mêle sans cesse à son “lyrisme” des déclarations féministes ». Théodore Joran, Au cœur du féminisme, Paris, Savaète 1908, p. 27.
-
[5]
Maria Deraismes, « Les femmes en culottes », L’Écho de Paris, 13 octobre 1891. Cité par Christine Bard, Les Filles de Marianne, Histoire des féminismes, 1914-1940, Fayard 1995, p. 204.
-
[6]
Barbey d’Aurevilly, Les Bas-bleus, Paris, Victor Palmé 1878, p. XIX, Genève, Slatkine reprints 1968. Cette citation sera reprise, légèrement modifiée et tronquée, sans nom d’auteur mais avec la mention « sous la plume d’un de nos confrères », dans l’introduction de Louis Estève au livre de Willy, Le Troisième sexe, Paris-Édition 1927, p. 7.
-
[7]
Dans ce drame bourgeois, l’un des protagonistes conseille notamment à un ami de s’éloigner d’une femme dont il s’est épris, en lui révélant qu’elle est en réalité l’amante de son épouse : « Fuis-la, tu entends. Ou sinon, tu es perdu ! Tu passeras ta vie à courir après un fantôme que tu ne rejoindras jamais ! Car on ne les rejoint jamais. Ce sont des ombres. Il faut les laisser se promener entre elles dans leur royaume d’ombres ! Ne pas s’en approcher. Elles sont dangereuses. » Édouard Bourdet, La Prisonnière, pièce en trois actes, représentée pour la première fois le 6 mars 1926 sur la scène du théâtre Femina, Paris, Librairie théâtrale 1926, p. 101.
-
[8]
Le Petit Robert, dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, texte remanié et amplifié sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey, Paris, Le Robert 1993. C’est moi qui souligne.
-
[9]
Ernst Ludwig von Wolzogen, Le Troisième sexe, traduit de l’allemand par le prince B. Karageorgevitch, Paris, Calmann-Lévy 1904, 3e édition, [première édition : 1902], p. 180-182. C’est moi qui souligne.
-
[10]
Id., p. 184.
-
[11]
Id., p. 184-185.
-
[12]
Guillaume Apollinaire, Œuvres poétiques, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade » 1994, p. 896. C’est moi qui souligne.
-
[13]
Roland Barthes, Le Neutre, Cours au Collège de France (1977-1978), texte établi, annoté et présenté par Thomas Clerc, Paris, Seuil/IMEC 2002, p. 261-262.
-
[14]
Id., p. 31.
-
[15]
Id., p. 83.
-
[16]
Claude Cahun, Aveux non avenus, Paris, Éditions Carrefour 1930, p. 176.
-
[17]
Bryher, Beowulf, préface d’Adrienne Monnier, traduit par Hélène Malvan, Paris, Mercure de France 1948, p. 14-15. C’est moi qui souligne. Dans « Notre amie Bryher », Adrienne fait encore cette remarque : « Son vêtement, impossible d’en parler ; il ne se distingue absolument par rien ; tout y est neutre à l’extrême. J’ai simplement envie, quand je la vois, de brosser son béret, comme pour Sylvia. » (Les Gazettes, Paris, Gallimard, « L’Imaginaire » 1996, p. 266).
-
[18]
Rue de l’Odéon, Paris, Albin Michel 1989, p. 53. La phrase exacte est : « Il y a rue de l’Odéon une Librairie qui vous aime bien. Peut-être passerez-vous un jour devant elle. » Lettre d’Adrienne Monnier à Jules Romains, fin 1915 ou début 1916, Correspondance Adrienne Monnier-Jules Romains, I- 1915-1919, dans Bulletin des amis de Jules Romains, n° 75-76, automne 1995, p. 19.
-
[19]
Alice Stronach, A Newnham Friendship, London, Blackie 1901, p. 385. « Don’t be one of them, dear friend. Don’t be a neutral. »
-
[20]
Ernst von Wolzogen, op. cit., p. 303-305.
-
[21]
Id., p. 306-307.
-
[22]
Ruth Margarete Roellig, Les Lesbiennes de Berlin, préface de Magnus Hirschfeld, Lille, Cahiers GayKitschCamp 2001, p. 17. (Première édition : 1928).
-
[23]
Id., p. 18.
-
[24]
Joséphin Péladan, De l’androgyne, théorie plastique, Paris, E. Sansot 1910.
-
[25]
Adrienne Monnier, Rue de l’Odéon, Paris, Albin Michel 1989, p. 186. (Première édition : 1960).
-
[26]
Joséphin Péladan, De l’Androgyne…, op. cit., p. 55.
-
[27]
Id., p. 31.
-
[28]
Id. p. 37-38.
-
[29]
Id., p. 76.
-
[30]
d., p. 89.
-
[31]
Louis Estève, L’Énigme de l’androgyne, Paris, éditions du monde moderne 1927, p. 59.
-
[32]
Id., p. 87.
-
[33]
En 1929, la revue Hermétisme ouvrait une enquête sur le spiessisme, où Georges Normandy écrivait notamment : « La doctrine puissamment originale de cet écrivain très attachant et très audacieux a crée d’impressionnants remous dans les milieux littéraires et philosophiques. » Cité dans Camille Spiess, Mon autopsie, Éjaculations autobiographiques, Nice, éditions Athanor 1938, p. 163-164.
-
[34]
Camille Spiess, Mon autopsie, Éjaculations autobiographiques, op. cit., p. 106.
-
[35]
Id., p. 159.
Je voudrais bien savoir si les femmes nouvelles, dans leurs agapes, échapperont à l’ivrognerie et à l’ordure.
Qu’entendez-vous par « femmes nouvelles » ? demanda l’officier de cavalerie.
Mais le troisième sexe qui est en train de se former.
1Du Symbolisme à l’entre-deux-guerres, la littérature et la médecine élaborent, ensemble et séparément, dans des ouvrages de plus en plus nombreux, un discours qui se fixe sur une énigme : le troisième sexe. Aberration, légende, mirage, maladie mentale ou erreur de la nature ? Le troisième sexe désigne le sexe douteux, celui qui n’a pas de nom, rassemblant dans son orbe l’Adam primordial, l’ange, l’éphèbe, l’androgyne, l’hermaphrodite, le travesti, l’homme efféminé, la femme hommasse, le pédéraste, le sodomite, la tribade, la saphiste, les transsexuels, les dégénérés. Autour de 1900, on adjoint même à cette tribu inquiétante la femme qui travaille et « sort de sa condition », celle qui par conséquent se « désexualise » ou « s’asexualise ». Dans sa préface au livre de Willy sur le Troisième sexe (1927), décrivant le Paris de Sodome et de Gomorrhe, Louis Estève rappelle en effet le rôle d’un roman aujourd’hui oublié dans la généalogie et la popularisation du terme, au titre identique : Le Troisième sexe (1902), d’Ernst August von Wolzogen. Or contrairement à ce que son titre laisse supposer, Wolzogen ne s’attache pas dans son livre aux homosexuels mais aux femmes indépendantes, sans mari mais avec un emploi, qu’il nomme « les neutres ». La neutralité, comme annulation du masculin et du féminin, sous les effets de la vie moderne ? Le thème revient en effet en boucle dans le corpus du troisième sexe, bien qu’il semble s’appliquer prioritairement aux femmes émancipées et singulièrement aux lesbiennes.
La femme émancipée
2En passant de la saphiste des boudoirs à la lesbienne qui exerce un métier et s’exprime, l’homosexuelle est devenue à l’orée du xxe siècle une catégorie, une « espèce » eût dit Michel Foucault. Dès 1893, le docteur Julien Chevalier tissait déjà un lien ténu entre travail et lesbianisme, dans son étude sur l’inversion, en introduction à son passage sur le saphisme :
On ne compte plus les femmes typographes, dessinateurs, comptables, caissières, courtières, agents d’affaires ; certaines administrations les emploient par centaines. Dans les carrières libérales, même concurrence ; nous avons la femme journaliste, médecin ; la femme avocat s’annonce ; l’ingénieur viendra, n’en doutez pas. Dans l’art, c’est pire ; la femme l’encombre. La femme peintre, sculpteur, compositeur, romancier, sont autant de manières d’être où se manifeste cette prétention à l’assimilation. Inutile d’insister : par l’indépendance de la profession et du talent, la femme en est arrivée à se suffire à elle même [1].
4Conséquences : « L’explosion presque subite du vice lesbien est chose si contemporaine de l’évolution des mœurs qu’il est difficile de ne pas y voir une relation de cause à effet./ Depuis plusieurs années, le lesbosisme [sic] a pris, à Paris et dans la plupart des capitales, des proportions inquiétantes… [2] »
5Pour le médecin, « la femme fait plus que s’émanciper, elle se masculinise », elle « s’engarçonne à plaisir [3] ». Elle pratique des sports violents, ne connaît plus de la pudeur et de l’innocence que les noms. C’est une virago agressive ou une névrotique, atteinte du « mal des âmes », une désabusée, une « littéraire ».
6Quelques années plus tard, l’assimilation des femmes émancipées, indépendantes, et des lesbiennes ne fait plus de doute. Dans son ouvrage de référence sur l’inversion sexuelle, Havelock Ellis pouvait ainsi écrire :
Il a été dit par maints observateurs, bien placés pour observer ces faits en France, en Allemagne et en Angleterre, que l’homosexualité augmente chez les femmes. Cela semble vrai : notre civilisation moderne encourage à plusieurs égards cette tendance. Le mouvement moderne d’émancipation des femmes, pour l’équivalence des droits et des devoirs, des libertés et des responsabilités, de l’instruction et du travail, doit être regardé, en son tout, comme un mouvement sain et inévitable. Mais il emporte avec lui divers désavantages. Il a entraîné une augmentation de la criminalité et de la folie féminine, avec tendance à atteindre la moyenne masculine. Rien d’étonnant à ce qu’on ait à enregistrer l’augmentation de l’homosexualité, qui appartient à un groupe connexe de phénomènes. […] On a enseigné aux femmes l’indépendance et le dédain de la vie domestique qui entraîne toujours une dépendance ; rien d’étonnant à ce qu’elles veuillent mettre la théorie en pratique et cherchent l’amour là où elles trouvent du travail. Je ne dis pas que les promiscuités soient la cause directe de l’inversion sexuelle ; mais elle développent les névroses et facilitent l’imitation, et ceci avec d’autant plus de gravité que l’anomalie congénitale se rencontre avec une fréquence spéciale chez les femmes d’une haute intelligence qui, volontairement ou non, influencent les autres [4].
8En se bornant à constater le mouvement moderne « et ses désavantages », Ellis apporte une pierre supplémentaire à ce qui constitue une différence fondamentale dans l’histoire des homosexuels et des lesbiennes : quand le personnage du pédéraste, considéré comme un dégénéré, un déviant sexuel, est né sous le microscope de la science criminelle et médicale, celui de la lesbienne ne prend sa consistance véritable que par le biais du progrès social. Le premier est une invention de la psychiatrie, la seconde une création du politique. Ce clivage capital est au fondement de deux constructions de l’identité qui, sans être séparées, demeurent irrémédiablement distinctes.
9L’assimilation de la femme émancipée et de la lesbienne masque mal un autre danger : l’involution du dimorphisme, la terreur de l’indifférenciation, prélude à une « extinction de la race ». Au sein même du mouvement féministe, nombreuses sont celles qui se défient des lesbiennes masculines comptées dans leurs rangs. Leur désapprobation marquée pour la mode « garçonne » et une virilisation contraire à leurs idéaux, leur mépris pour des militantes portant culottes comme Madeleine Pelletier ou Violette Morris (championne olympique qui s’était fait couper les seins pour conduire son automobile avec plus d’aisance) en sont autant de témoignages. L’une des pionnières du féminisme, Maria Deraismes, n’affirmait-elle pas, en se faisant l’écho d’une opinion largement répandue parmi les militantes :
Je veux qu’une femme reste femme, qu’elle conserve sa grâce qui est en même temps sa force. Je suis l’ennemie de ces vêtements laids et douteux qui font de nous des êtres hybrides et je ne sais quels intermédiaires neutres et louches entre l’homme et la femme. À qui a-t-on affaire avec ces figures sans sexe auxquelles on ne peut décemment appliquer un nom [5] ?
11Intermédiaires neutres, figures sans sexe et sans nom : c’est précisément dans cette zone indéfinie que va se construire l’identité de la lesbienne moderne, en usant de cette indifférenciation comme stratégie pour déjouer les paradigmes et trouver sa place. Ni homme par le sexe, ni femme par le genre (ou du moins dans ses présupposés culturels les plus rigides), elle entend désormais s’inventer en dehors des canons ordinairement prescrits.
12Dès 1878, Barbey d’Aurevilly avait deviné la montée du péril dans son pamphlet contre les Bas-bleus, ces femmes qui écrivent et ne seraient que des « hommes, – du moins en prétention –, et manqués » :
Il est, dans l’histoire de l’humanité, des époques de véritables hermaphrodisme social, où l’homme s’effémine et la femme s’hommasse, et quand ces fusions contre nature se produisent, c’est toujours, pour que l’ordre soit troublé davantage, la femelle qui absorbe le mâle, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus là ni mâle ni femelle, mais on ne sait quelle substance neutre, pâtée à vainqueur pour le premier peuple qui voudra se l’assimiler [6] !
14Infiniment complexe, cette notion de neutre apparaît donc très tôt comme un fil rouge dans l’histoire des femmes désirant « sortir de leur condition » et dans l’histoire du lesbianisme en particulier. Généralement péjorative, voire insultante, elle pointe ces « insexuées » ni chair ni poisson composant l’immense majorité des homosexuelles qui ne se reconnaît pas dans le modèle du couple butch/femme (virile/féminine). Êtres sans sel ni relief, elles ressembleraient à ces portraits mélancoliques de lesbiennes peints par Romaine Brooks, dont les silhouettes androgynes et les visages fermés émergent d’un halo gris, entre camaïeu et fondu-enchaîné, pareils à ces « ombres » et ces « fantômes » dénoncés par Édouard Bourdet, dans sa pièce La Prisonnière [7]. Comme en deuil de leur sexe, elles ne sourient pas et propagent un malaise d’autant plus difficile à cerner qu’il est indistinct, diffus. Tous les manuels de psychiatrie évoquant « l’indiscrétion » légendaire des pédérastes buttent ainsi avec les lesbiennes sur le problème opposé : leur discrétion, le silence dont elles entourent leurs mœurs, leur « effacement » rendraient leur personnalité impréhensible – écueil qui leur évita longtemps d’être comptabilisées dans les statistiques et auscultées par la science.
15Cette invisibilité des lesbiennes sera souvent vécue tantôt comme le stigmate d’une honte mal vécue, tantôt comme la marque de leur inadaptabilité au monde, le symbole, en tout cas, d’une marginalité restée sans explications, à l’intérieur même du groupe mixte des homosexuels. Le terme de « neutre », on l’a dit, est d’abord un concept péjoratif ou qui procède du moins toujours par la soustraction, le retranchement. Le dictionnaire s’en explique, en égrenant les différentes acceptions : « qui n’appartient à aucun des belligérants, à aucune des parties adverses ; qu’on décide de maintenir en dehors des hostilités ; qui s’abstient de prendre parti, de s’engager d’un côté ou de l’autre ; qui n’est ni acide, ni basique ; se dit d’un corps qui n’est chargé ni par l’électricité positive, ni par l’électricité négative ; qui est dépourvu de passion, qui reste froid, détaché, objectif. » Pour la grande majorité, les lesbiennes, sans mari, sans enfants, privées des joies de la maternité, ni féminine, ni masculine et prétendument dépourvues de sexe, correspondent idéalement à ce vaste ensemble, auquel il convient d’ajouter deux définitions complémentaires dont on verra par la suite la pertinence : « qui appartient à une catégorie grammaticale où ne se manifeste pas le contenu mâle/femelle, la forme masculin/féminin ; se dit des insectes (fourmis, abeilles, termites), dont les organes sexuels sont atrophiés et qui protègent ou approvisionnent la communauté (par ex. : fourmis-soldats, fourmis-ouvrières) [8] ».
16C’est à ces images que se réfère Ernst von Wolzogen dans son livre Le Troisième sexe, en introduisant son propos dans le cadre d’un souper entre hommes, où l’un des protagonistes demande ce que Arnolphe Rau, théoricien du « troisième sexe » et héros principal du récit, entend par « femmes nouvelles ». On excusera la longueur de la citation, qui condense un aspect très important de l’histoire des mentalités :
– Je comprends par l’expression, le troisième sexe, toutes les femmes qui, par une disposition naturelle ou par une suite de circonstances, en arrivent à ne plus se considérer comme des êtres aux droits et aux devoirs strictement limités ; mais simplement comme des cohumains. […] Ces « neutres » devaient, jadis, rester tout de même dans les barrières étroites de l’existence féminine, car la loi et les mœurs leur interdisaient l’accès des carrières qui, physiquement et intellectuellement, étaient considérées comme l’apanage exclusif du sexe fort. Elles passaient inaperçues dans l’existence comme des phalènes aux heures du soir, et sur leurs tombes on lisait seulement qu’elles furent de bonnes vieille filles. Le développement de l’état économique vers le capitalisme brutal est cause que l’armée des vieilles filles s’est accrue d’un innombrable surcroît : bataillons tantôt volontaires, tantôt contraints. […] La plupart d’entre elles n’abandonnent pas définitivement leur désir d’union et restent femmes. Elles se voient avec rancune les esclaves du travail et ne savent pas apprécier leur liberté individuelle. Mais une minorité, qui augmente tous les jours, apprend à trouver satisfaction dans le travail – et celles-là sont les recrues du troisième sexe. L’émancipation actuelle des femmes a pour but l’insurrection raisonnée de l’armée des vieilles filles. On les mécontente, on leur inocule l’orgueil de la science et on les excite par le fouet de l’ambition à rivaliser avec l’homme dans tous les domaines de la culture. Le troisième sexe doit être une preuve vivante de l’égalité intellectuelle de l’homme et de la femme [9].
18Le troisième sexe, c’est donc bien la femme qui travaille et aspire à l’égalité des sexes. Mais, dans son renoncement inéluctable à être une « vraie » femme, à quelle sexualité cette « neutre » peut-elle prétendre ? L’un des convives a tôt fait de répondre par une allusion transparente, en évoquant le nombre considérable des « amazones du troisième sexe [10] ». Tout cela serait « abominable, dégoûtant » ou plus simplement « triste » selon les opinions. Détail capital, il s’avère que la défense du troisième sexe relèverait directement du politique, comme l’indique la suite de la scène :
– Dieu merci, vous n’êtes pas socialiste, j’espère ? cria le comte en trinquant avec l’orateur à travers la table.
– Non, absolument pas, dit celui-ci ; car, si le socialisme devait être un fait accompli avant les temps révolus, il ne servirait qu’à hâter le développement d’une société qui aurait les abeilles pour exemple. Et je considère l’État-ruche comme le plus grand des malheurs qui puisse accabler l’humanité ; car il interromprait désastreusement l’évolution naturelle vers le règne du surhomme.
– L’État-ruche ? répéta le prince d’un air approbateur. Ouvriers, bourdons et reines, hum ! hum ! – horrible perspective – quoiqu’on puisse considérer la création artificielle d’un troisième sexe contre la volonté de la nature comme un triomphe du génie humain. L’État-ruche s’adapterait on ne peut mieux à un développement, grâce auquel l’humanité, au lieu de dîner, ne prendrait que des pilules nutritives et, au lieu d’aimer, enverrait les femmes couver chacune à son tour [11].
20L’image de l’abeille et de la femme moderne assimilée à la neutralité n’a pas seulement intégré le discours sur les mœurs dans la littérature populaire. Dans Les Mamelles de Tirésias, premier drame « surréaliste », joué en 1917 mais écrit en 1903, Guillaume Apollinaire met en scène une petite révolution : Thérèse, qui veut travailler et ne plus faire d’enfants, devient Tirésias. On l’acclame bientôt comme homme politique et chef d’armée, tandis que son mari se lamente :
Fameux représentants de toute autoritéVous l’entendez c’est dit je crois avec clartéLa femme à Zanzibar veut des droits politiquesEt renonce soudain aux amours prolifiquesVous l’entendez crier Plus d’enfants Plus d’enfantsPour peupler Zanzibar il suffit d’éléphantsDe singes et de serpents de moustiques et d’autruchesEt stériles comme est l’habitante des ruchesQui du moins fait la cire et butine le mielLa femme n’est qu’un neutre à la face du ciel. [12]
22Le mari décide alors d’avoir une progéniture sans femme. Il réussira ce miracle en mettant au monde 40 049 enfants du jour au lendemain. Comme quoi, tout finit toujours par s’arranger.
23Le choix de nombreuses lesbiennes de l’entre-deux-guerres d’entrer dans un espace créatif débarrassé des spécifications du genre pour se fondre dans cette « zone neutre » d’un état-ruche qui leur permettrait d’être reconnues pour leur seuls talents appartient en droite ligne à cette conception. Conception qui n’a rien de passif, comme le souligne Roland Barthes dans la présentation de son Cours au Collège de France sur « Le Neutre », dont « l’intitulé authentique » aurait pu être : « le Désir de Neutre ». Car, ajoutait-il, le neutre « ne correspondait pas forcément à l’image plate, foncièrement dépréciée qu’en a la Doxa, mais pouvait constituer une valeur forte, active [13]. » Le Neutre, c’est-à-dire « tout ce qui déjoue le paradigme » ou encore ce qui « annule ou contrarie le binarisme implacable du paradigme par le recours à un troisième terme [14] » s’avère un concept particulièrement pertinent à l’analyse du « troisième sexe ». Le neutre comme refus de soumission, espace de liberté à la fois fluctuant et intenable, action sans régime, sous la plume de Barthes, dépasse de beaucoup les questions sexuées pour s’universaliser et, mieux que de se définir, trouver des occurrences dans tous les domaines de la vie quotidienne : « le Neutre, c’est la moire : ce qui change finement d’aspect, peut-être de sens, selon l’inclinaison du regard du sujet [15]. »
« Neutre est le seul genre qui me convienne toujours »
24Or c’est bien cet espace indéfini, décloisonné et changeant que veulent construire les lesbiennes aspirant à l’indifférenciation, rétives aux catégories scientifiques de « l’homosexuelle » comme à l’enfermement dans l’image de « la femme ». Dès les années 1910 et durant toute l’entre-deux guerres, un très grand nombre d’entre elles vont offrir une éloquente illustration de ce phénomène, notamment dans la vie culturelle. Préférant au statut de « femme qui travaille » celui d’« artiste » (au sens neutre, l’un des rares mots épicènes de la langue française, à s’employer indifféremment avec un article masculin ou féminin), elles entendent sortir des spécifications sexuées qui les enferment et n’aiment rien mieux que de « brouiller les cartes », à l’instar de Claude Cahun, photographe et écrivaine : « Masculin ? Féminin ? Mais ça dépend des cas. Neutre est le seul genre qui me convienne toujours. S’il existait dans notre langue on n’observerait pas ce flottement de ma pensée. Je serais pour de bon l’abeille ouvrière [16]. » Or, quel parallèle Adrienne Monnier, la célèbre libraire de la rue de l’Odéon, emploie-t-elle dans sa préface à Beowulf de Bryher, en évoquant la société d’outre-Manche ? « La retenue dans les mœurs n’est pas tant naturelle aux Anglais qu’elle ne leur est fortement apprise, en vue du meilleur rendement social – comme les ouvrières dans les ruches sont asexuées. Les noms des choses, dans la langue anglaise, ne sont ni au féminin ni au masculin, ils n’ont pas de genre, ce qui est beaucoup plus sensé et beaucoup plus reposant [17] ».
25Il n’est pas anodin non plus qu’Adrienne Monnier ait choisi que son papier à en-tête la signale comme « A. Monnier ». Sa rencontre avec Jules Romains, dans les premiers mois de La Maison des Amis des Livres, la confirmera dans son intuition. Adrienne racontera plus tard lui avoir envoyé un billet qui disait à peu près ceci : « Il y a au 7 de la rue de l’Odéon, une librairie qui aime vos œuvres. » Elle poursuit son récit : « (Comme vous voyez, je n’étais ni homme ni femme, mais librairie.) Il vint peu de temps après (il portait encore la barbe) et demanda : Monsieur Monnier. Ah ! que je fus contente de n’avoir pas laissé deviner mon sexe [18]. »
26Si Adrienne Monnier et ses semblables n’ont pas inventé l’idée du neutre, elles lui donnent à cette époque une lumière, une énergie inaccoutumées. De valeur assimilée à la fadeur, au manque, voire à l’échec, le neutre devient l’axe et l’instrument d’une libération, ordonne la nomenclature d’une identité nouvelle et d’un espace où pouvoir vivre libre. Dans un roman d’Alice Stronach publiée en 1901, l’une des protagonistes suppliait une amie, vivant en communauté avec d’autres femmes qui travaillaient : « Ne sois pas l’une d’elles, ma chérie. Ne soit pas une neutre [19].» L’inquiétude de la Belle Époque devant une émancipation des femmes vécue comme une neutralité stérilisante s’est transformée en une réalité vivante et constructrice des Années Folles : une véritable stratégie.
27Ce troisième sexe-là, neutre, est bel et bien spécifique aux lesbiennes. Dans son roman, Wolzogen prend soin de préciser qu’une des héroïnes, Claire de Fries, femme émancipée et docteur en médecine, malgré les apparences, ne fait pas partie de ce cercle. Le jour du mariage de Claire avec un docteur en philosophie, Arnolphe Rau prend à nouveau la parole pour affiner son propos :
Pour moi, qui ai jeté dans la circulation le terme « troisième sexe », ce mariage acquiert une importance symptomatique. Notre chère amie Claire passe certainement pour une émancipée […]. Appartient-elle au sexe que j’ai énoncé ? Est-elle une chose humaine, ni chair ni poisson, dont toutes les facultés cérébrales ne sont tendues que vers un examen de médecine ? Vous, femmes, qui êtes fières de ce que votre sœur a déjà accompli dans le dur combat pour l’affirmation de sa libre volonté, vous direz peut-être qu’elle est une « sur-femme », qui a vaincu les faiblesses de sa nature et l’humble besoin de la protection masculine ; mais moi, en ma qualité d’homme, je dis – et tout homme qui la connaît dira comme moi – elle n’est pas une femme-homme ou une femme-chose, mais tout simplement une femme ; indubitablement du second sexe. Son être respire le charme, le parfum de la femme, et il ne lui serait pas possible de traverser la vie sans amour [20].
29Le rôle des « vraies » femmes serait ainsi de se libérer mais surtout en se gardant de s’assimiler à ce « véritable troisième sexe », à savoir les inverti-e-s sexuelles, dont on retrouve la définition traditionnelle : « des âmes d’hommes délayées dans des enveloppes féminines sans charme […]. Pauvres âmes du purgatoire, pour qui personne ne prie […] [21] ». Le purgatoire, comme les limbes, espace sans contours, intermédiaire, en suspension : l’image correspond en effet au domaine privilégié du troisième sexe, ce lieu « hors », cet ailleurs déjouant le paradigme de l’enfer et du paradis.
30Si cet espace ne connaît pas de frontières ni de limites fixes, il a peut-être une couleur ou plutôt une tonalité : la teinte intermédiaire, comme l’on dit, justement, du « sexe intermédiaire » ou du genre neutre appelé, dans certaines langues comme le japonais ou le croate, « le genre du milieu ». Dans une étude sur Les Lesbiennes de Berlin parue en 1928, on peut lire par exemple : « Quelqu’un a décrit un jour l’agitation singulière de ces gens qui ne sont “ni noirs, ni blancs” comme un “tableau en mauve” ; et de là le concept de cette couleur tendre, douce, à peine affirmée, s’est transmise à tout le milieu [22] ». « La Chanson mauve » deviendra même un hymne populaire homosexuel, dont le refrain répète : « Nous aimons la nuit en mauve au parfum suffocant / C’est comme ça : des autres nous sommes différents [23] ! » C’est dans le même esprit qu’Adrienne Monnier choisit le gris pour couleur symbole de sa boutique ou de son habillement qui ne variera jamais, ou que Romaine Brooks fait inscrire sur sa carte de visite : « peintre du gris harmonieux ».
Résurgences de l’androgyne
31Ni noir, ni blanc ou, si l’on veut, ni masculin, ni féminin : l’androgyne, emblème du personnage déjouant les paradigmes, demeure à l’époque une figure étendard dont se réclament de nombreuses lesbiennes. La génération bercée par la littérature symboliste n’a pas brûlé ses idoles et, de personnage de roman, l’androgyne est devenu objet d’études savantes et de réflexions aux accents messianiques, comme chez Joséphin Péladan, auteur en 1910 d’un essai intitulé De l’androgyne, théorie plastique [24].
32Relire aujourd’hui cette « théorie » peut prêter à sourire. Le style ampoulé, un vocabulaire amphigourique servant une conception parfois confuse, ne doit pas faire oublier l’impact durable de ce texte, qui ramassait dans ses pages un courant très prégnant. Qu’une femme aussi intelligente qu’Adrienne Monnier, amie de Walter Benjamin et éditrice de Joyce, l’ait considéré comme un « écrit ravageur, qui n’a peut-être pas cessé ses ravages », peut par exemple avoir valeur de témoignage. La libraire ajoutait même : « J’en fus personnellement impressionnée au suprême degré, au degré qui me fit mépriser ma forme féminine et comprimer mes seins, comme une religieuse ou comme une amazone [25]. »
33Péladan se veut d’emblée définitif : « L’Androgynomorphisme n’est pas une façon de concevoir, c’est la seule [26]. » Si l’androgyne est bel et bien « l’Archétype » de toutes œuvres d’art et le symbole du génie, c’est un archétype d’un genre bien particulier – masculin, en l’état : l’androgyne est « un jeune homme gracieux [27] » ; il « commence à l’enfant de chœur, au premier communiant et ne passe pas l’adolescence : sept années, de 13 à 20, telle est la vie brève de ce miracle [28] ». Cette première entorse au mythe d’origine, qui impose une sexuation à un être primitivement indéterminé, n’empêche pas Péladan d’inclure dans cette catégorie l’ange qui « n’a point de sexe », Jeanne d’Arc ou la cantatrice de l’époque, madame Caron, qui incarnait alors Fidelio sur la scène… Autrement dit, peu importe le sexe biologique, tant que le genre – c’est-à-dire l’image, l’allure, et le rôle traditionnellement dévolus au garçon – conserve son intégrité. Péladan ne s’embarrasse pas de contradictions : « Être beau, résume-t-il, c’est appartenir à un troisième sexe, impassible, intangible [29] », concluant par cette envolée lyrique : « O moment indécis du corps comme de l’âme, nuance délicate, intervalle imperçu de musique plastique, sexe suprême, mode troisième ! Los à toi [30] ! ».
34Camille Spiess, philosophe anarchiste de droite, puisera à cette source pour faire de l’androgyne le pivot de sa vision eschatologique du monde et son idéal, sous la forme de l’adolescent qui réalise et incarne un concept qui lui est cher : « la neutralité ou activité-passive [31]. » En chantant la « neutralité », la « chasteté », la « continence » et en dissociant la pédérastie noble (spirituelle) de la vulgaire inversion sexuelle (matérielle), Camille Spiess croisait un courant de plus en plus sensible dans certains cercles intellectuels de l’entre-deux guerres qui élevait le troisième sexe au rang d’élite – l’amour grec, pur et désintéressé du Corydon de Gide (1922) peut se lire dans ce sens. Mais de figure utopique, pacifique, l’Androgyne, en tant qu’« esprit hermaphrodite », « incarnation individuelle de l’humanité régénérée » va, au fil de ses livres, devenir le « parangon de la race » seul capable d’être « le Médiateur de la rédemption humaniste, surchrétienne [32]. » Cette dérive, assortie d’un antisémitisme virulent et d’une misogynie dénonçant à toutes les pages le « féminisme envahisseur », s’accommode sans mal d’une relecture simplifiée à l’extrême du Surhomme de Nietzsche ou du « fils de roi » de Gobineau, pour élaborer une théorie qui répète : la femme ne voit que son ventre, le Juif ne voit que son sexe circoncis, seul l’homme ne voit que son cerveau, siège de l’Intelligence et du souverain bien.
35En 1938, ce « philosophe » respecté [33] laisse libre cours à ses opinions, dans une langue que suggère le titre de son ouvrage, très caractéristique de l’obscénité propre à la rhétorique extrémiste : Mon autopsie, Éjaculations autobiographiques. On peut y lire par exemple : « Le CRIME ce n’est pas la guerre mais l’exploitation de la Jeunesse ou sa mauvaise éducation qui est la trahison juive (à toi, HITLER !) ou le suicide moral de ceux qui la tuent [34] ! » Ou encore : « L’antisémitisme avec HITLER, est devenu une réalité bienfaisante que je ne puis qu’admirer parce qu’il sait, de même que les racistes, qu’Israël détruit la race, dégrade l’individu et corrompt l’humanité […] [35] ». La haine de toutes questions sexuelles, au sens scientifique, apanage d’une psychanalyse « enjuivée » incarnée par Sigmund Freud, a trouvé le terreau politique où s’enraciner.
36Comment, d’une philosophie du neutre et de l’androgyne, un tel glissement vers une apologie de la guerre a-t-il pu s’opérer ? Ce que l’on est en droit de considérer comme un simple égarement personnel – Spiess était devenu, à la fin de sa vie, particulièrement paranoïaque – peut-il néanmoins faire écho à certains aspects d’un problème infiniment complexe : le ralliement de certain-e-s homosexuel-le-s (Marcel Jouhandeau, Maurice Sachs, Romaine Brooks, Gertrude Stein…) au fascisme ? Notons d’emblée qu’un tel parallèle se heurte d’abord, dans son principe général, au simple fait que personne ne songerait à étudier a contrario le ralliement de certains individus au fascisme en fonction de leur hétéro-sexualité. Établir une collusion entre homosexualité et fascisme présuppose donc, et c’est bien le danger, qu’à sexualité « déviante » correspondrait idéologie « déviante », point de départ non seulement irrecevable mais aussi contre-sens historique. Par ailleurs, trop de contre-exemples, Gide le communiste en tête, mais aussi Adrienne Monnier ou Claude Cahun, interdisent toutes schématisations. La fascination exercée par la figure de l’androgyne, d’un « troisième type » rédempteur, doit sans doute se lire comme un moment de l’histoire et une réponse aux prévarications contre l’involution du dimorphisme et la prophétisation d’une « extinction de la race ». Les homosexuels, accablés par un discours psychiatrique qui les désignait comme des monstres et des périls pour la nation – Gide n’a-t-il pas été tenu pour responsable de la défaite de 1940 ? – se seront sans doute appuyés un temps sur cette philosophie du neutre et cette méfiance de la sexualité pour se débarrasser des accusations qui les diabolisaient. La conversion politique d’une telle option ne sera par la suite, et comme toujours, qu’une question d’interprétations.
Notes
-
[1]
Docteur Julien Chevalier, Une maladie de la personnalité : l’inversion sexuelle, Lyon, A. Storck, Paris, Masson 1893, p. 219.
-
[2]
Ibid., p. 227.
-
[3]
Ibid. p. 220 et 224.
-
[4]
Havelock Ellis, Études de Psychologie sexuelle, Tome I, « L’inversion sexuelle », édition critique établie sous la direction du professeur Hesnard, traduction par A. Van Gennep, Paris, Tchou, « Bibliothèque des introuvables » 2003, p. 456-457. (Première édition : Sexual inversion, 1897). En 1908, on peut même lire: « Le féminisme, qui était au début la monomanie de l’égalité, est devenu l’apologie de l’instinct bestial. Il exhale une odeur équivoque de luxure. L’une de nos plus éhontées féministes, une certaine Renée Vivien, ne s’est-elle pas faite, dans un livre de mauvais vers, que les femmes riment dans leurs moments éperdus, la prêtresse moderne des ‘amours lesbiennes’ ? Cette Sapho mêle sans cesse à son “lyrisme” des déclarations féministes ». Théodore Joran, Au cœur du féminisme, Paris, Savaète 1908, p. 27.
-
[5]
Maria Deraismes, « Les femmes en culottes », L’Écho de Paris, 13 octobre 1891. Cité par Christine Bard, Les Filles de Marianne, Histoire des féminismes, 1914-1940, Fayard 1995, p. 204.
-
[6]
Barbey d’Aurevilly, Les Bas-bleus, Paris, Victor Palmé 1878, p. XIX, Genève, Slatkine reprints 1968. Cette citation sera reprise, légèrement modifiée et tronquée, sans nom d’auteur mais avec la mention « sous la plume d’un de nos confrères », dans l’introduction de Louis Estève au livre de Willy, Le Troisième sexe, Paris-Édition 1927, p. 7.
-
[7]
Dans ce drame bourgeois, l’un des protagonistes conseille notamment à un ami de s’éloigner d’une femme dont il s’est épris, en lui révélant qu’elle est en réalité l’amante de son épouse : « Fuis-la, tu entends. Ou sinon, tu es perdu ! Tu passeras ta vie à courir après un fantôme que tu ne rejoindras jamais ! Car on ne les rejoint jamais. Ce sont des ombres. Il faut les laisser se promener entre elles dans leur royaume d’ombres ! Ne pas s’en approcher. Elles sont dangereuses. » Édouard Bourdet, La Prisonnière, pièce en trois actes, représentée pour la première fois le 6 mars 1926 sur la scène du théâtre Femina, Paris, Librairie théâtrale 1926, p. 101.
-
[8]
Le Petit Robert, dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, texte remanié et amplifié sous la direction de Josette Rey-Debove et Alain Rey, Paris, Le Robert 1993. C’est moi qui souligne.
-
[9]
Ernst Ludwig von Wolzogen, Le Troisième sexe, traduit de l’allemand par le prince B. Karageorgevitch, Paris, Calmann-Lévy 1904, 3e édition, [première édition : 1902], p. 180-182. C’est moi qui souligne.
-
[10]
Id., p. 184.
-
[11]
Id., p. 184-185.
-
[12]
Guillaume Apollinaire, Œuvres poétiques, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade » 1994, p. 896. C’est moi qui souligne.
-
[13]
Roland Barthes, Le Neutre, Cours au Collège de France (1977-1978), texte établi, annoté et présenté par Thomas Clerc, Paris, Seuil/IMEC 2002, p. 261-262.
-
[14]
Id., p. 31.
-
[15]
Id., p. 83.
-
[16]
Claude Cahun, Aveux non avenus, Paris, Éditions Carrefour 1930, p. 176.
-
[17]
Bryher, Beowulf, préface d’Adrienne Monnier, traduit par Hélène Malvan, Paris, Mercure de France 1948, p. 14-15. C’est moi qui souligne. Dans « Notre amie Bryher », Adrienne fait encore cette remarque : « Son vêtement, impossible d’en parler ; il ne se distingue absolument par rien ; tout y est neutre à l’extrême. J’ai simplement envie, quand je la vois, de brosser son béret, comme pour Sylvia. » (Les Gazettes, Paris, Gallimard, « L’Imaginaire » 1996, p. 266).
-
[18]
Rue de l’Odéon, Paris, Albin Michel 1989, p. 53. La phrase exacte est : « Il y a rue de l’Odéon une Librairie qui vous aime bien. Peut-être passerez-vous un jour devant elle. » Lettre d’Adrienne Monnier à Jules Romains, fin 1915 ou début 1916, Correspondance Adrienne Monnier-Jules Romains, I- 1915-1919, dans Bulletin des amis de Jules Romains, n° 75-76, automne 1995, p. 19.
-
[19]
Alice Stronach, A Newnham Friendship, London, Blackie 1901, p. 385. « Don’t be one of them, dear friend. Don’t be a neutral. »
-
[20]
Ernst von Wolzogen, op. cit., p. 303-305.
-
[21]
Id., p. 306-307.
-
[22]
Ruth Margarete Roellig, Les Lesbiennes de Berlin, préface de Magnus Hirschfeld, Lille, Cahiers GayKitschCamp 2001, p. 17. (Première édition : 1928).
-
[23]
Id., p. 18.
-
[24]
Joséphin Péladan, De l’androgyne, théorie plastique, Paris, E. Sansot 1910.
-
[25]
Adrienne Monnier, Rue de l’Odéon, Paris, Albin Michel 1989, p. 186. (Première édition : 1960).
-
[26]
Joséphin Péladan, De l’Androgyne…, op. cit., p. 55.
-
[27]
Id., p. 31.
-
[28]
Id. p. 37-38.
-
[29]
Id., p. 76.
-
[30]
d., p. 89.
-
[31]
Louis Estève, L’Énigme de l’androgyne, Paris, éditions du monde moderne 1927, p. 59.
-
[32]
Id., p. 87.
-
[33]
En 1929, la revue Hermétisme ouvrait une enquête sur le spiessisme, où Georges Normandy écrivait notamment : « La doctrine puissamment originale de cet écrivain très attachant et très audacieux a crée d’impressionnants remous dans les milieux littéraires et philosophiques. » Cité dans Camille Spiess, Mon autopsie, Éjaculations autobiographiques, Nice, éditions Athanor 1938, p. 163-164.
-
[34]
Camille Spiess, Mon autopsie, Éjaculations autobiographiques, op. cit., p. 106.
-
[35]
Id., p. 159.