Comment ne pas être écologiste ? Seule force originale du siècle écoulé, l’écologie, c’est son immense mérite, remet en question les finalités du progrès et pose la question des limites. Elle a réveillé notre sensibilité à la nature, présente dans les arts et la littérature depuis la fin du xviiie siècle, elle a, comme un certain christianisme, repensé la condition animale, elle a enfin constaté l’épuisement des ressources fossiles, souligné les effets du dérèglement climatique. Elle nous engage dans une reconsidération complète de nos modes de vie, depuis l’alimentation jusqu’à notre manière de nous déplacer puisqu’elle condamne la voiture, l’avion, le bateau, tant qu’ils utilisent le pétrole, le kérosène ou l’essence. Elle touche à l’intégralité de la condition humaine, de la naissance à la mort, et s’inscrit dans ces doctrines totales qui ont marqué l’histoire de l’Occident depuis la modernité. Mais sur ce credo collectif s’est greffée toute une scénographie de l’apocalypse, déjà expérimentée avec le communisme et qui emprunte à la gnose autant qu’aux messianismes médiévaux. Dans le kit de base de la critique verte, le cataclysme est requis et les prophètes de la décomposition pullulent. Ils utilisent sans mesure le tambour bruyant de la panique, nous somment d’expier sans tarder.
Si bien qu’il faut renverser la question : comment ne pas être écologiste, sans doute, mais, surtout, comment l’être ? Car la peur du futur, de la science, de la technique traduit ce moment où l’humanité, principalement occidentale, se prend en grippe…