« Ni déflation ni dévaluation ! » Déjà le « nini », déjà cette double négation, déjà cette formule si commode en politique pour désigner le point d’équilibre. Le Front populaire en fera même un redoutable slogan de campagne au printemps 1936. Socialistes, radicaux et communistes font ainsi coup double : ils promettent de mettre fin à la politique d’austérité mise en place par leur devancier Pierre Laval, mais ils jurent dans le même temps – et dans la même phrase – de garantir la parité or d’un franc « Poincaré » stabilisé depuis 1928. Néanmoins, le 26 septembre 1936, Léon Blum, à la tête du Front populaire, se résout de jure à dévaluer le franc de 29 % et de facto à démolir le Bloc-or déjà bien fissuré. Les nombreuses commémorations à l’occasion des quatre-vingts ans du Front populaire honorent à bon droit toutes les lois sociales du gouvernement Blum, mais ignorent injustement cet épisode monétaire. Évidemment, un ajustement de parité ne pourra jamais frapper l’imaginaire collectif comme les congés payés ou la semaine de quarante heures, avec leur lointain écho de fraternité sociale, mais l’automne 1936 présente des ressemblances saisissantes avec l’automne 2016, et en décrire les traits peut éclairer sous un jour original les enjeux de l’époque actuelle. Pour résumer, Léon Blum doit résoudre une équation économique, financière et monétaire assez proches, dans ses termes, à celle de François Hollande, huit décennies plus tard. Ce dernier a été élu avec la promesse de maintenir la France dans la zone euro, mais les contre-performances économiques (pas de véritable inversion de la courbe du chômage, croissance proche de zéro …) et les secousses internes à l’Europe (crise de la dette grecque, Brexit, divergence des niveaux de vie …) font que l’ancien premier secrétaire du Parti socialiste aurait pu sans doute s’inspirer de l’exemple du leader de l…