Médias et intellectuels français avancent régulièrement que le bouddhisme n’est pas une religion mais une spiritualité. Qu’il n’implique l’adhésion à aucune croyance irrationnelle ou déraisonnable, ne tolère aucune forme d’autorité extérieure et se fonde entièrement sur une expérience individuelle et transformatrice appelée « méditation ». Cette dernière, affirme notamment le philosophe et maître bouddhiste français Fabrice Midal, n’aurait « aucun but » ni « aucune finalité », mais serait « un espace de pure gratuité » permettant aux Occidentaux stressés de prendre le temps d’« être ». Ce type de représentation se heurte toutefois aux doctrines et aux pratiques bouddhiques asiatiques, qui mettent l’accent sur le rituel et la dévotion, de même qu’aux réalités observables dans les centres français. En effet, les nouveaux adeptes du bouddhisme, souvent des critiques amers du catholicisme, se soumettent rapidement aux nouvelles exigences des maîtres bouddhistes, notamment tibétains, présents sur notre territoire. Or, ces exigences n’ont rien de moderne : elles s’inscrivent plutôt dans une conception du monde éminemment religieuse. Ainsi trouve-t-on dans ces centres des individus qui, tout en professant une foi absolue en la rationalité du bouddhisme, pratiquent des rituels de propitiation de divinités, se prosternent devant leurs lamas, récitent des prières, confessent leurs fautes, absorbent des pilules contenant des reliques humaines, font dons d’offrandes aux maîtres décédés, tournent autour de reliquaires, utilisent des chapelets, se font asperger d’eau bénite, reçoivent des impositions d’objets sacrés, etc…