En France, parler de think tanks s’apparenterait à de « l’import/export intellectuel », dans la mesure où la circulation internationale des idées serait le lieu de diverses formes de nationalisme et d’impérialisme. Importé des États-Unis, le terme ne fait aujourd’hui l’objet d’aucune définition consensuelle. En dépit d’un effet de mode, les think tanks restent méconnus dans notre pays. À Washington, ils sont des acteurs à part entière de la vie publique et plongent leurs racines dans cette vitalité associative qui faisait dire à Alexis de Tocqueville : « Partout où, à la tête d’une entreprise nouvelle, vous voyez en France le gouvernement et en Angleterre un grand seigneur, comptez que vous apercevrez aux États-Unis une association. » Dans le domaine si particulier de la politique étrangère, les think tanks ont acquis une forte légitimité dans un double mouvement : représentants de la société civile acceptés comme tels par le pouvoir fédéral, ils contribuent directement à la présence au monde des États-Unis. Rien de tel en France,
où l’on se demanderait encore : « Vous croyez vraiment que l’on peut parler de think tanks français ? »
Le jeu de miroirs franco-américain s’avère nécessaire pour répondre à cette question. Nécessaire mais plus suffisant car l’essor des think tanks constitue désormais un phénomène international. Trois chiffres pour le mesurer : on compterait aujourd’hui plus de 6 500 think tanks à travers le monde, 1 815 aux États-Unis et 176 en France. C’est en fonction de ce triple arrière-pla…