Il y a cinquante ans, en novembre 1959, les sociaux-démocrates allemands adoptaient le programme de Bad Godesberg. Par ce programme, le spd se mettait en harmonie avec les réalités et la sensibilité de la société allemande d’après guerre, et parvenait à développer une vision d’une société moderne, démocratique et socialement apaisée. Bad Godesberg jetait les bases de la conquête du pouvoir à Bonn, dix ans plus tard, mais constituait également un point de repère important pour le renouvellement programmatique d’autres « partis ouvriers » d’Europe occidentale.
Un demi-siècle après, le moment semble venu de renouveler l’expérience. Partout en Europe, le centre gauche est sur la défensive. Tiraillé entre traditions sociales-démocrates et réformes d’inspiration néo-libérale, son projet est devenu illisible. Les efforts déployés par les partis pour s’ouvrir à de nouvelles catégories d’électeurs n’ont guère donné de résultats durables. En même temps, ils leur ont fait perdre des pans importants de leur électorat traditionnel. Parallèlement, les mutations sociales et culturelles, ainsi que les conséquences de la mondialisation et de l’intégration européenne ont durablement modifié, voire miné, les fondements mêmes d’une politique de gauche.
Les réflexions suivantes vont donc se focaliser sur cinq domaines, autour desquels devrait, de l’avis de l’auteur, s’articuler le renouvellement programmatique de la gauche européenne : la répartition des richesses au sein de la société et les objectifs de l’intervention de l’État, les fondements sociétaux de la solidarité, le rôle futur de l’État, la vision de l’homme et de la société que la social-démocratie véhicule, et l’avenir de la participation démocratique…