Lorsque l’on dresse, en cette fin de première décennie du xxie siècle, l’état des protections dont bénéficient les Français, on constate qu’elles sont fournies pour l’essentiel – à 90 % – par des dispositifs d’assurance. Le terme assurance est à prendre ici dans un sens large : les dispositifs d’assurance, au sens où nous l’entendons, comprennent aussi bien les institutions d’assurance sociale (la Sécurité sociale) que les mutuelles du Code de la mutualité, les institutions de prévoyance et les sociétés d’assurance dites de marché. 90 % : la part de l’assurance dans l’économie des protections est considérable, et justifie la qualification que j’avais donnée, il y a vingt ans, des sociétés contemporaines comme des « sociétés assurancielles ». Ces 90 % se répartissent eux-mêmes en 60 % pour la Sécurité sociale, les 30 % restants étant gérés par les sociétés d’assurance de marché.
Sur un budget de 950 milliards d’euros consacré, en France, aux protections, plus de 850 sont gérés par des institutions d’assurance, les 10 % restants se répartissant entre les budgets de la défense, de la police et de la justice (pour 5 %), la dernière part allant à l’environnement.
Ces chiffres témoignent que, dans une société avancée comme la France, les protections de type régalien – celles de l’État gendarme – sont devenues marginales au profit de dispositifs de type économique qui ont des fonctions de lissage temporel des accidents de la vie et qui organisent des transferts sociaux. Ils témoignent aussi du peu de réalisme de ceux qui plaident pour un retour aux fonctions régaliennes de l’État en matière de protection…