Couverture de CTF_042

Article de revue

Le lit de six personnes. La sexothérapie selon un modèle trigénérationnel

Pages 175 à 205

Notes

  • [1]
    Les auteurs remercient le professeur Roberta Giommi pour le matériel extrait de son chapitre écrit en collaboration avec le professeur Rodolfo de Bernart dans La coppia in crisi, ainsi que le docteur Daniela Giommi pour les exemples cliniques issus des co-thérapies conduites avec le professeur de Bernart.
  • [2]
    Psychiatre, Psychothérapeute de la famille, Directeur de l’Institut de Thérapie Familiale de Florence (ITFF), Président de l’EAP.
  • [3]
    Psychologue, psychothérapeute relationnelle et de la famille, formée à l’ITFF.

Définition de la thérapie de couple

1La différence entre la thérapie de couple et la thérapie familiale est liée à la forme de la demande des patients. Une thérapie familiale est souvent sollicitée en raison du symptôme d’un seul membre de la famille, le patient désigné ; une thérapie de couple est motivée au contraire pour un symptôme qui n’est pas situé au niveau individuel mais qui concerne le malaise actuel du couple. Toutefois, il existe une exception importante : le symptôme sexuel. Ce dernier peut être attribué à un seul membre du couple (impuissance, éjaculation précoce, etc. pour l’homme ; vaginisme, anorgasmie, etc. pour la femme) même si l’on sait bien que le problème concerne quasi toujours le couple. En effet, quand on traite le symptôme d’un seul partenaire, on assiste souvent à l’apparition du symptôme complémentaire chez l’autre.

La thérapie trigénérationnelle de couple

2Il n’y a pas si longtemps, quand nos grands-parents se mariaient, le prêtre leur rappelait souvent que dans leur chambre nuptiale, ils ne seraient pas seuls : Dieu serait toujours avec eux ! Ce n’est pas un hasard si, il y a quelques années encore, on trouvait juste au-dessus du lit conjugal, à la place d’honneur, le portrait de la Sainte Famille, de la Vierge ou du Christ. Nous croyons que cette tradition désormais disparue dans les familles catholiques cultivées, est encore très forte dans les familles du Midi ou de la Vénétie.

3L’avertissement du prêtre signifiait beaucoup de choses. Tout d’abord, il exprimait que la vie sexuelle des époux devait être en accord avec leur foi religieuse : le lit était déjà destiné à trois personnes. On sait à quel point ces règles religieuses ont influencé nombre de couples et le poids qu’elles conservent encore aujourd’hui. Toutefois, dans le passé, dans le lit il y avait déjà six autres personnes. On pourrait représenter cette configuration en imaginant, accrochées au mur non seulement la Sainte Famille, mais aussi les photos des deux couples des parents des nouveaux mariés.

4Après avoir suivi en consultation un grand nombre de couples, nous nous sommes aperçus que l’idée même de « couple » est une illusion, une image arbitraire qu’on utilise pour donner un sens à la réalité. Pendant des années, on a accepté la déclaration des couples en thérapie, selon laquelle le problème se situait entre eux. Plus tard, on a compris qu’ils étaient seulement les soldats d’une bataille dont le quartier général était ailleurs : dans les familles d’origine. Nous avons donc commencé à identifier quatre autres occupants du lit, et à comprendre que derrière un couple qui ne va pas bien, se cachent toujours des difficultés de séparation des familles d’origine respectives. En d’autres termes, le lit conjugal dysfonctionne parce que s’y trouvent six personnes.

5Évidemment, ce ne sont pas seulement les problèmes sexuels qui naissent dans les familles d’origine. Nombre de couples ont d’autres difficultés qui concernent par exemple la communication entre partenaires, l’éducation des enfants, la gestion du budget, etc. Ces situations montrent elles aussi l’importance de la croissance et de la distanciation de sa culture familiale. Cependant dans cet article, nous nous limiterons aux problèmes sexuels des couples considérés dans une perspective trigénérationnelle. Nous savons qu’il est toujours difficile de dissocier le problème sexuel d’autres difficultés présentées éventuellement par le couple. Notre point de vue est donc arbitraire. En outre, d’autres auteurs (Andolfi, 1992 ; Framo, 1992 ; Canevaro, 1987 ; Antonioli & Martini, 1993 ; de Bernart & Giommi, 1989) ont également abordé, selon une approche trigénérationnelle, des problématiques générales de couple.

6Si l’on considère la famille comme un organisme vivant, on peut imaginer l’instant où elle est conçue, une période où elle se développe dans un endroit protégé, le moment où elle naît, et encore d’autres stades au cours desquels elle grandit jusqu’à sa mort, naturelle et inévitable. Par convention, on peut fixer l’instant de la conception de la future famille au moment de la rencontre des partenaires qui formeront le couple ; la gestation a évidemment lieu durant la période où ils commencent à mieux se connaître et se fiancent alors que la naissance se passerait lorsque les deux partenaires décideront de vivre ensemble ou mieux, de se marier. De la naissance à la mort, la famille traversera un certain nombre de phases de son « cycle de vie », chacune étant caractérisée par des événements différents, mais surtout par l’arrivée de nouveaux membres (naissance, mariage, etc.) ou par la perte d’autres (éloignement, divorce, mort, etc.). Le choix de la rencontre comme moment de la conception de la famille est tout à fait arbitraire. Nous savons en effet que derrière les deux protagonistes principaux, il y a deux familles d’origine, chacune avec son histoire et sa culture, qui auront inévitablement une influence sur la nouvelle famille. Au moment de la rencontre, chaque partenaire prend tout le bagage culturel de sa famille. Il aime et il partage seulement une partie de cet héritage, mais il en est totalement influencé. Son parcours personnel de développement n’est certainement pas terminé. En général, les couples se forment durant l’adolescence ou, dans la meilleure des hypothèses, au cours de la phase dite de « jeune adulte », c’est-à-dire pendant la deuxième ou la troisième décade (entre quinze et vingt ans, ou entre vingt et trente ans). On considère souvent que la vraie séparation, et donc la véritable croissance de l’individu par rapport à sa famille d’origine, se réalise seulement entre trente et quarante ans, c’est-à-dire au cours de la quatrième décade. En effet, c’est seulement durant cette période qu’il a les instruments nécessaires pour regarder d’un œil critique sa famille d’origine et faire dès lors un choix plus précis et mieux défini de ce qu’il veut garder et de ce que, au contraire, il veut refuser et abandonner de sa culture familiale d’origine. Beaucoup de situations importantes se clarifient durant cette période pour chaque individu : ils se sont stabilisés de manière significative sur le plan professionnel, ils sont devenus économiquement indépendants de leur famille, ont officialisé leur situation affective par un mariage, sont devenus parents. Ils peuvent alors considérer différemment les positions adoptées par leurs parents et affirmer et défendre leurs propres choix.

7Toutefois, si le mariage et la naissance des enfants constituent des éléments nécessaires à la croissance, la naissance du couple et le mariage surviennent à une phase de la vie où la croissance individuelle n’est pas encore terminée. Nous pensons dès lors que le couple doit avoir une fonction qui dépasse la biologie, la reproduction, la sexualité et même l’affectif. Il nous paraît évident que cette relation offre un instrument pour grandir, c’est-à-dire qu’elle aide l’individu dans sa croissance, mais elle peut aussi la ralentir ou encore l’empêcher.

8De son côté, la famille d’origine peut permettre, encourager, ralentir ou rendre impossible la naissance et la croissance du couple. Le couple idéal implique donc que le développement de l’individu soit favorisé ou encouragé, mais de toute façon jamais contrarié. Afin que ce processus ait lieu, chacun des partenaires devrait tout d’abord désirer un tel parcours qui entraîne la séparation et la différentiation de la famille et de la culture d’origine. Il est dès lors essentiel que les deux membres du couple s’entraident pendant la croissance en apportant des critiques constructives et en se montant fiables et solidaires l’un envers l’autre. Pour illustrer ce processus, nous utilisons une métaphore qui nous est très chère : quand un individu quitte sa maison, il ouvre les armoires et il remplit ses valises de vêtements et d’objets utiles pour le voyage alors qu’il abandonne d’autres objets ou vêtements qui sont devenus inutiles ou encombrants. Les deux membres du couple ont à effectuer cette opération en quittant leurs familles, pour se retrouver ensuite et ouvrir ensemble leurs valises et ranger les vêtements et les objets choisis dans les armoires communes. Initialement, chacun a choisi pour lui-même, alors que lors de cette deuxième étape, on a affaire à une tâche de couple et certains effets trouveront tout de suite leur place, alors que pour d’autres, il faudra la chercher dans l’armoire et dans la maison. Quelquefois, des objets et des vêtements auxquels tient particulièrement un partenaire, rencontrent le veto absolu de l’autre, ce qui devrait entraîner une renonciation de la part du premier. Il est évident que seuls les objets qui rencontrent l’accord des conjoints auront accès à la maison et aux armoires. Ceux qui sont refusés par l’un d’eux devront nécessairement être expulsés du domicile commun, même si souvent, ils sortent par la porte et reviennent clandestinement par la fenêtre. Il y a aussi les objets acceptés à contrecœur mais toutefois supportés, qui auront une place provisoire et conditionnée jusqu’au moment où la situation sera modifiée. Ce dernier cas de figure est très fréquent.

9Lorsque nous voyons des couples en difficulté, nous posons la question : « Connaissiez-vous ce côté du caractère de votre mari ou de votre femme ? ». La réponse est toujours : « Oui, bien sûr ». Alors nous insistons : « Si vous ne l’aimiez pas, alors pourquoi l’avez-vous accepté ? », et nous entendons toujours : « J’espérais qu’avec le temps, je pourrais le/la changer ». Aucune autre illusion ne s’avère plus dangereuse que celle-là !

10Les mariages qui naissent et s’affermissent sur ce dangereux compromis (je le/la changerai) sont destinés tôt ou tard à présenter des problèmes qui souvent entraînent un échec de la relation. Il est impossible de changer l’autre, mais évidemment, chacun peut se changer lui-même.

11Un autre danger tout aussi fréquent est lié au fait d’obliger son partenaire à introduire dans la nouvelle organisation familiale des éléments qu’il n’aime pas et qu’il avait choisi d’abandonner. En continuant la métaphore des armoires, il s’agirait d’une femme qui demande à son mari : « Pourquoi as-tu laissé le smoking à la maison ? Il t’allait si bien ! » Et le mari répond : « Je n’aime plus les fêtes »…, mais devant l’insistance de sa femme, il se laisse persuader de le prendre quand même.

12Il y a quelques années, lors d’un entretien avec un couple d’un certain âge, nous cherchions à comprendre pourquoi la femme qui aimait beaucoup la vie mondaine (dîner, fêtes, concerts, etc.) avait épousé un homme extrêmement réservé qui de plus, venait d’une petite ville de province où la vie mondaine était presque absente. Nous avons découvert par la suite qu’elle n’avait pas été séduite par son mari, mais plutôt par sa famille d’origine, en particulier par la mère de celui-ci, qui était pleine de vitalité et adorait la vie mondaine. Le futur mari avait pris bien garde de ne pas informer sa fiancée que « dans ses valises », il n’y avait pas de place pour les sorties, ou mieux, que pour ce mode de vie, il éprouvait beaucoup de réserves, peut être aussi car cela avait toujours écarté sa mère de lui. Au contraire, il avait pensé que cet élément lui permettrait de séduire sa fiancée et de la convaincre de s’installer chez lui, en province : il avait donc utilisé cet appas plus ou moins sans s’en rendre compte. Naturellement, tout se passa bien pendant les premières années de mariage, du vivant de la belle-mère. Mais à la mort de celle-ci, le mari ne fut ni en mesure de continuer la vie que sa mère organisait si bien, ni désireux de permettre à sa femme de le faire.

13La famille d’origine peut intervenir dans la vie d’un couple de manières variées et à différents moments du cycle vital. Si cette interférence est trop pesante dès le début, ultérieurement, lors de la phase de la prise de connaissance et des fiançailles, il sera difficile voire impossible pour ce couple de s’affermir ou de poursuivre sa vie : un membre ou tous les deux pourrai(en)t avoir, dans sa/leurs familles, des fonctions tellement importantes qu’elles pourraient faire obstacle à l’initiation d’une vie de couple. Ce genre de boycottage familial n’est presque jamais imposé explicitement par des nécessités familiales réelles : il est rare que des parents ou des membres de la famille disent à leur fils/fille ou à leur frère/sœur : « Tu ne peux pas te marier » ou « Nous avons besoin de toi ». La critique semble plutôt passer au travers d’attaques sur un terrain neutre, comme les différences d’habitudes, de cultures entre les partenaires, ou leurs inégalités sociales. Quelquefois, le jeune couple réussit à surmonter les difficultés de cette première phase, mais échoue ensuite à s’opposer aux ingérences des familles d’origine après le mariage. En bâtissant sa petite maison à peu près comme « les trois petits cochons », il peut se sentir tout à coup sans défense, l’espace physique ou mental étant envahi jusque dans son intimité.

14Les difficultés se déclarent parfois seulement au cours de l’étape suivante du cycle vital, par exemple au moment de la naissance d’un enfant. Durant cette phase, les familles d’origine deviennent en effet particulièrement attentives à ce qu’il arrive dans la nouvelle famille nucléaire. Quel hasard ! En effet, à ce moment-là, on décide de l’appartenance à une culture plutôt qu’à l’autre. Les grands-parents tentent ainsi d’intervenir à propos de toutes les décisions qui concernent leur petit-enfant : au niveau du choix de son futur prénom, de son alimentation et du mode d’éducation, etc. Certaines tentatives d’influencer ou de faire intrusion apparaissent très clairement, ce sont les moins dangereuses. D’autres, au contraire, sont plus sournoises et sont souvent induites par un ou deux grands-parents envers leur enfant (maintenant parent lui-même). C’est à ce moment-là qu’on vérifie le niveau d’intimité et de complicité créé dans le couple plus jeune. S’il est suffisant, les ébauches d’intrusion seront repoussées et peut-être commentées avec humour par le couple ; dans le cas contraire, des situations vraiment gênantes apparaissent. Par exemple, si une mère téléphone à son fils pour lui donner des conseils sur les soins du bébé et en même temps critique à mots couverts les choix du couple (qu’elle attribue évidemment à sa belle-fille), le fils pourrait répondre de plusieurs façons différentes.

15Une première réaction pourrait être de s’approprier des critiques de sa mère sans en dénoncer l’origine, et de les discuter avec sa femme (situation évidente de fidélité à la famille d’origine). Une seconde possibilité est de partager ces critiques avec sa femme, en précisant leur origine et de se réserver de décider ensemble de la conduite à suivre. Pourtant, une fois qu’une décision commune est prise, il est important de voir ce que le fils communiquera ensuite à sa mère. En effet, même s’il a partagé avec sa femme une position différente de celle de sa mère en montrant une complicité de couple, il pourrait faire croire ensuite à sa mère qu’il est la victime de cette décision en préservant ainsi un autre niveau de fidélité envers sa famille d’origine. Vice-versa, il pourrait être d’accord avec son épouse et donc bien séparé de sa famille. Cependant, même les crises émergeant à la naissance du premier enfant sont encore réversibles. Remarquons que lorsque le couple surmonte une crise, cela ne signifie pas que la relation conjugale, ou ses membres, ont grandi. Il arrive que la solution émerge plus tard et qu’un équilibre soit restauré. Les engagements, le travail, les enfants, le « quotidien », peuvent occuper la vie durablement. Il s’agit pourtant d’une rémission temporaire : lors de la phase suivante du cycle vital, une nouvelle crise risque d’éclater au moment où les enfants grandissent et deviennent indépendants : ils ne posent plus de problèmes importants et abandonnent la maison, et le couple fait l’expérience du « nid vide ». Souvent, des problèmes assez lourds apparaissent durant cette période chez les couples qui n’ont jamais fait l’expérience de vivre seuls dans le passé, rien qu’à deux. Ils se sont mariés alors qu’un bébé s’annonçait ou sont allés habiter avec l’une des familles d’origine ; d’autres raisons peuvent aussi les avoir empêcher de faire l’expérience de la cohabitation. Le départ des enfants représente toujours un problème s’il y a incapacité de projeter des espaces de couple, soit parce qu’ils n’ont jamais été expérimentés, soit car ils sont « oubliés » depuis longtemps, en particulier lorsqu’à l’âge de la retraite, les conjoints ont à redécouvrir des moyens de passer toute la journée ensemble.

16Nous avons traité par le passé un collègue médecin qui avait vécu à l’extérieur de la famille à cause de son métier. Il avait obligé sa femme à s’organiser une vie propre, d’abord centrée sur les enfants puis sur un groupe d’amies. À sa retraite, le drame éclata : le mari rentré à la maison voulait organiser une vie de couple intense alors que sa femme n’était ni habituée, ni intéressée à vivre ainsi avec lui. Après quelque temps, l’époux commença à la soupçonner d’entretenir une relation extraconjugale, tout à fait inexistante, et il présenta les symptômes d’un délire de jalousie.

17On observe qu’un grand nombre de d’épouses présentent une dépression consécutive à la perte du sens de leur vie de mères et de femmes. Comme leur existence antérieure tournait autour des enfants et d’un mari vécu comme un enfant de plus à soigner, ou devenu étranger depuis longtemps, elles ont de réelles difficultés à s’adapter aux espaces vides et disponibles, ou difficiles à combler. Le temps leur paraît interminable et privé de sens, les ressources pour faire face au problème sont absentes ; leur dépression croît lentement, et contaminera rapidement d’une forte coloration négative les aspects du quotidien qui pourraient avoir encore de la valeur.

18Dans ces derniers cas, pouvoir s’appuyer sur son conjoint pour reconstruire ou plutôt construire pour la première fois un espace de couple où se consoler et donner un sens aux années à venir, constitue une ressource essentielle. Après cette période qui parfois n’est pas trop longue, les « aînés » acquièrent un nouveau sens dans la vie de leurs enfants, comme grands-parents. Il s’agit seulement de dépasser ce moment de crise.

19Nous pensons donc qu’il est vraiment important que dès le début, le couple défende ses espaces vitaux, même s’ils se délimitent avec peine car les enfants sont petits ou parce qu’on rentre fatigué du travail. Il est fondamental de garder vivante la curiosité d’essayer la table dont tout le monde parle, de voir le dernier film de son metteur en scène préféré, ou d’aller manger une pizza au restaurant fréquenté lorsqu’on était fiancé. Il suffit parfois de créer à la maison une aire de relaxation du couple qui soit défendue à outrance contre tout risque possible d’intrusion, y compris celle du sommeil ! Maintenir ces espaces vivants aide à préserver l’intimité de couple, même réduite au minimum de survie, afin dès lors d’y avoir accès plus tard, au moment où elle sera indispensable !

20Sans vouloir paraître trop radicaux, nous pensons pouvoir affirmer qu’un couple doit passer avant tout, familles d’origine et enfants compris ; en effet s’il est stable et évolue bien, tout le reste continuera à bien fonctionner.

Définition de la sexothérapie de couple

21La demande de thérapie pour des problèmes sexuels est formulée par le couple ou par un seul de ses membres. Dans ce dernier cas, les personnes peuvent être invitées à revenir avec leur partenaire, mais pour certains, il est préférable de choisir un parcours individuel.

22Dans cet article, nous analyserons seulement les situations concernant le traitement en couple.

23Selon Kaplan (1974), les difficultés sexuelles ne sont pas nécessairement liées à des troubles émotionnels analysables en profondeur et enracinés dans l’enfance du patient, ou à des pathologies psychiatriques. Souvent, ils révèlent des problèmes qui peuvent être examinés dans le hic et nunc : la prévision d’une performance insuffisante, la peur d’être rejeté ou humilié par le partenaire, les exigences – réelles ou imaginaires – d’une bonne performance. La thérapie sexuelle devient une intervention de psychothérapie brève qui répond à une demande sexologique.

L’anamnèse sexologique

24La méthodologie de travail se réfère à une approche psychosomatique et multicausale du symptôme sexuel, en le décrivant à différents niveaux. En ce qui concerne l’anamnèse et l’étude de l’étiologie et de la pathogenèse, nous avons adopté un modèle de recherche formé par une structure à cinq cercles (Pasini, 1975). Les cinq zones cibles qui leur correspondent sont biologique, intrapsychique, relationnelle de couple, relationnelle de clan et sociale. Elles sont complétées par deux secteurs auxquels on porte une très grande attention : le domaine du corps et celui de l’imaginaire érotique. En effet, le corps est une voie privilégiée pour l’expression de la sexualité, mais il révèle aussi le rapport du patient avec la zone de l’intimité et devient donc un révélateur privilégié. De la même manière, la zone concernant l’imaginaire érotique structure l’espace du secret et de l’imagination. Par conséquent, la sphère biologique constitue le premier cercle de notre exploration anamnestique : pour s’orienter vers une psychothérapie sexuelle, il faut en effet exclure et délimiter de façon très précise toute cause organique générale ou spécifique. La collaboration avec les spécialistes de médecine interne ou d’autres domaines (gynécologues, urologues, andrologues, endocrinologues, etc.) devient indispensable. Le deuxième cercle concerne la réalité intrapsychique et relève donc de la compétence du psychothérapeute. La recherche anamnestique examinera l’histoire affective du patient, son niveau d’acceptation de lui-même, l’anxiété éventuelle, la présence de conflits, de peurs, l’agressivité explicite ou latente.

25Le milieu relationnel du couple et celui du clan (de famille et de famille élargie) représentent le domaine le plus intéressant pour les thérapeutes familiaux. Sur ce terrain, nous organisons les vécus relationnels concernant les attentes, les projets, les regrets et les déceptions que le couple prend à sa charge. Ici, la recherche relative aux modèles générationnels transmis par les familles d’origine et ensuite filtrés par les deux partenaires, le partage et le choix des règles et la définition des complémentarités deviennent donc prioritaires. La famille élargie intéresse le thérapeute familial seulement si elle entre dans la dimension conflictuelle du couple. C’est alors que nous appliquons l’approche trigénérationnelle au malaise sexuel. Il arrive que la symptomatologie présentée par le couple concerne des problèmes en suspens avec leurs familles d’origine, qui prennent forme à travers des conflits aigus mais dont les soubassements sont souvent ignorés. La plus grande difficulté que nous rencontrons est liée à l’impossibilité de convoquer la famille élargie en séance, car le couple craint d’avoir à discuter de problèmes liés à la sexualité devant elle.

26L’anamnèse générale se termine enfin par l’approfondissement des thèmes relatifs au domaine social du couple, les relations amicales, le milieu professionnel, les appartenances idéologiques et culturelles, dans la mesure où ils peuvent influencer la sphère de la sexualité aussi.

27Après cette première observation, on ferra une anamnèse sexuelle détaillée et approfondie du dysfonctionnement du système conjugal ou individuel. À ce niveau d’analyse, on examine les défenses utilisées contre la sexualité et le plaisir, les attitudes réciproques vis-à-vis des performances sexuelles et des inhibitions éventuelles des partenaires.

28Il devient alors possible d’entrer dans le domaine spécifique du processus thérapeutique. Le couple peut accueillir, accepter et créer un parcours de révision cognitive des émotions, des sentiments et des vécus personnels qui concernent en particulier la relation corporelle. L’utilisation du langage verbal s’avère parfois inappropriée à ce stade. Les partenaires, enfermés dans des dialogues et des échanges figés, ne réussissent pas à structurer une communication réelle. Nous leur proposons alors de travailler sur les images, le mouvement, l’espace, le contact physique, l’emploi de gestes, etc.

29L’approche traditionnelle a tendance à attribuer la symptomatologie sexuelle à un seul membre du couple. Cela n’est plus possible quand on considère le problème selon l’approche systémique-relationnelle, d’ailleurs, on découvre souvent la coexistence de dysfonctionnements complémentaires chez les deux membres du couple. Pendant cette phase, il est nécessaire de redéfinir le contrat du couple, de renégocier les espaces individuels et de couple, d’expliciter la signification de la sexualité dans la vie individuelle et conjugale ainsi que les liens entre sexualité et sentiments et d’évaluer l’aptitude à la confiance et à la coopération entre les partenaires. L’analyse de ces aspects permet aux thérapeutes d’aborder un travail comportemental de prescription. Que se passe-t-il si un couple consulte un thérapeute familial ? On court le risque de traiter le symptôme sexuel avec les instruments habituels d’une thérapie familiale. Or, ce type de trouble a besoin d’un apport spécifiquement sexologique où l’on privilégiera une approche plus pédagogique et des prescriptions après une anamnèse approfondie selon le modèle déjà décrit.

30La cothérapie est sans doute le mode d’intervention le plus courant : il est structuré par la présence simultanée de deux thérapeutes de sexes différents, qui peuvent entrer en résonance avec les expériences et les sensations rapportées par le couple ; ils peuvent aussi jouer des rôles différents dans l’échange avec les patients, aussi bien au niveau des prescriptions que de l’attitude pédagogique. De plus, les thérapeutes peuvent alterner les périodes de travail sur le symptôme sexuel avec des moments d’élaboration des thèmes relationnels qui souvent soutiennent et consolident le symptôme lui-même (de Bernart & Gommi, 1987).

L’intervention thérapeutique

31Après cette introduction de l’approche, il est possible de comprendre l’utilité d’un modèle d’intervention trigénérationnelle pour les thérapies de couple.

32Au fil du temps, l’approche trigénérationnelle introduite par Bowen (1988), Boszormenyi-Nagy (1973) et Framo (1992) est devenue essentielle et indispensable en thérapie familiale. Ces premiers auteurs ont introduit le récit ou mieux, la présence de la famille d’origine en thérapie, afin d’évaluer les influences des matrices culturelles et émotionnelles venant des racines passées ainsi que leurs retentissements au cœur de la famille actuelle. Andolfi a été l’un des premiers thérapeutes italiens à amener concrètement les familles d’origine dans la salle de la thérapie en présence des deux conjoints. Toujours en Italie, Canevaro (1999) a demandé aux familles de se relayer en thérapie, en l’absence du conjoint de leur propre enfant qui lui, était bien là. Toutefois, on rencontre toujours de fortes résistances de la part des partenaires à amener matériellement leurs familles en séance, surtout quand les problèmes concernent le domaine de la sexualité, même si on les rassure sur le fait qu’on ne discutera jamais de ce sujet en leur présence. Pour cette raison, nous avons décidé d’utiliser les images et des montages audiovisuels ; nous avons cherché à utiliser tous les instruments et toutes les techniques qui puissent permettre la présence des familles d’origine à la séance sans qu’elles soient vraiment là.

33Le travail des thérapeutes familiaux a toujours été particulier en raison de l’emploi de médias audiovisuels. Dès ses débuts, la thérapie familiale accordait de l’importance à « voir ce qu’on était en train de faire ». L’attention à l’image est devenue donc prioritaire par rapport à d’autres modes de travail et elle s’est concentrée sur l’observation des significations et des vécus. Au cours de la rencontre thérapeutique en effet, la famille donne d’elle-même des images contradictoires qui, pour une raison ou l’autre, deviennent désormais officielles. On assiste au partage d’un scénario relationnel commun utilisé par la famille pour se présenter à l’extérieur. L’objectif du thérapeute de la famille consiste à réussir à convaincre chaque membre du système de montrer une représentation de lui-même liée aux données de réalité et d’authenticité, où se dissoudra tout ce qui est artificiel et stéréotypé. Peut-être n’arriverons-nous jamais à obtenir l’image réelle de certaines familles ; toutefois, il est important de ne pas s’arrêter à la photo officielle offerte durant la thérapie. L’instrument privilégié du thérapeute devient donc l’analyse du langage non verbal. Les contenus proposés par le couple, si importants qu’ils soient, peuvent distraire, en particulier dans le contexte d’une thérapie familiale où les rencontres sont plus espacées que dans d’autres types d’approche.

Les collages

34Nous utilisons fréquemment la technique du collage en thérapie de la famille. Elle est empruntée à la sexologie et est particulièrement adéquate lorsque les patients restent accrochés à des représentations cognitives structurées sur base d’une communication verbale distordue et inutilisable à des fins thérapeutiques. Il s’agit souvent de couples qui parlent énormément, qui se disputent, mais qui finalement ne disent rien ou presque rien. Il s’avère alors indispensable de toucher à des éléments non médiatisés et non verbalisables, mais qui peuvent être utilisés dans l’interaction. Le collage est employé de différentes manières en fonction des objectifs du thérapeute.

35Au début, nous avons eu recours à un modèle « géométrique » de collage, que nous avons abandonné aujourd’hui. Cependant, comme nous l’évoquons dans un exemple clinique, expliquons brièvement qu’il s’agit de représenter sa famille d’origine à travers des figures géométriques « à discrétion », de dimensions et de couleurs différentes. La taille, la couleur et la distance entre les figures peuvent donner des informations précieuses en ce qui concerne les relations entre les membres de la famille. Dans notre pratique actuelle, nous demandons au contraire, dès le début, aux patients de réaliser un collage sur leur idée du couple. Si les conjoints sont venus en thérapie pour des problèmes sexuels, on leur proposera de faire un deuxième collage qui renvoie à l’image de la sexualité dans le couple. Les thérapeutes donnent comme consigne d’aller à la maison, de choisir et découper dans des revues ou des journaux des images qui leur permettent de décrire leur idée du couple et/ou de leur sexualité. Une fois les images rassemblées, chacun décidera de la manière de les coller, selon l’organisation désirée, sur des cartons 50 cm × 70 cm. Il faut que l’opération soit effectuée séparément. Il ne faut pas qu’ils interagissent entre eux à ce niveau car l’objectif est d’obtenir l’idée du couple et de la sexualité que se fait chaque partenaire et non pas d’avoir leur vision commune.

36Ces deux collages sont ensuite apportés à la séance et parcourus de façon « croisée ». Chaque partenaire lit le collage de l’autre et ensuite explique le sien. Les cothérapeutes invitent le couple à donner une première interprétation globale du collage ; ensuite ses membres vont l’examiner image par image, et déboucher sur une nouvelle vision d’ensemble et enfin choisir leur image préférée ou la plus détestée. À la fin, les partenaires devront évaluer la ressemblance et la différence entre les deux collages et l’habilité montrée par chaque partenaire dans la lecture de celui de l’autre. Tout ce processus s’accompagne de discussion et de remarques sur les motivations qui ont conduit aux différents choix. Nous tentons ainsi de favoriser l’élaboration d’une image interne au couple, qui puisse émerger sans être soumise à la censure verbale (de Bernart, 1991).

37L’utilisation des images vise à une construction et une reconstruction du vécu afin de rendre explicite et ouvert à la dramatisation le monde intérieur du couple. Une rencontre des partenaires a lieu dans le cadre de la lecture et de l’interprétation mutuelle des images. Cette voie permet au couple d’accéder à un niveau de responsabilité différent face à son histoire, et contribue à la création d’une sorte distanciation par rapport aux contenus, qui favorise une attitude d’« écoute-régard » réciproque plus intense.

38Par l’image, le couple ne représente pas seulement un « agi », il explicite aussi un vécu puisque la signification accordée par chaque membre à l’image, même si elle n’est pas explicitée, est quand même intériorisée. Les thérapeutes observent le collage, mais ils ne l’interprètent pas : ils cherchent à reconstruire le lien entre les registres préverbal, verbal et non verbal. Cette technique permet de définir une forme d’interface entre la représentation du couple et le couple réel, en facilitant le travail sur le sens. Ainsi peut s’ouvrir un lieu d’élaboration subjective qui clarifie les modèles intériorisés de relation et les schémas d’interaction présents dans le couple. L’image a une signification principale qui a déterminé son choix, puis elle a des significations secondaires beaucoup moins claires, même pour celui qui l’a choisie, qui sont donc peu contrôlables. Elle comporte en son sein un ensemble de sens et de signaux qui relèvent non seulement d’instances cognitives mais surtout de la qualité des liens affectifs. La compréhension de ces sens émerge de l’étude des différences.

Le génogramme photographique

39La photographie est un instrument souvent utilisé en sexothérapie. Anderson a utilisé les family pictures à caractère diagnostique ainsi que formatif, pour la formation des élèves. En France, certains cliniciens ont eu recours à la technique de la généalogie photographique. La manière dont les patients apportent les photos en séance constitue effectivement un instrument diagnostique pertinent qui permet d’accéder à l’émotionnel par le biais d’un langage métaphorique et méta-verbal particulier.

40La photographie est un outil qui existe depuis le siècle passé et qui permet l’arrêt sur une image de jeunesse. La peinture a exercé la même fonction auparavant. La photographie offre à tout le monde l’occasion de fixer une série d’images de sa vie, de les garder et de substituer graduellement l’ancienne mémoire orale par une mémoire visuelle. Un cliché n’est pas la copie de la réalité, c’est une affirmation visuelle subjective. Les photos de la famille sont aussi les interprétations du photographe et elles présentent donc un point de vue très précis de l’auteur au lieu d’être objectives. Mais les photos sont encore autre chose : ce sont des tentatives de donner du sens à la vie ; on fait des choix et on leur donne un sens. Les photos familiales suscitent des interprétations et des souvenirs de sa famille et de son histoire. Celles qui ont été prises pour le public présentent au contraire un caractère informatif ou publicitaire, mais elles sont quand même destinées à véhiculer un message. On peut donc affirmer qu’il s’agit de la transformation du monde réel en un monde de symboles.

41Trente photos constituent 3/10 de seconde : une fraction infinitésimale de temps est donc utilisée pour comprendre une famille. Cela nous dit quelque chose à propos de la quantité, mais aussi de la qualité et de l’objectivité. Il est clair qu’on est en train d’évaluer la famille à partir de 3/10 de seconde du temps réel de la vie, qui recouvre environ 150 ans si l’analyse de la famille remonte jusqu’à la troisième génération. Peut-être cela donne-t-il du sens à ce qui arrive en thérapie également. La famille vient pour vingt séances, c’est-à-dire vingt heures, nous apportant beaucoup d’éléments. Mais combien de choses peut-elle réellement apporter par rapport à cent années d’histoire familiale dont elle se souvient et des vingt plus récentes ? Très peu. En thérapie, le fait d’apporter les photos n’est pas plus important que la tâche de les réunir, de les choisir ou de les éliminer. La subjectivité apparaît dans la reproduction d’une portion du présent par celui qui prend la photo : il interprète d’une façon subjective la réalité.

42Certains patients découpent les photos : des morceaux manquent aux portraits de famille où certains détails ou des parties honnies ont été ôtés. Il y a aussi le choix des clichés qu’on décide de présenter, pas seulement officiellement. En effet, beaucoup d’entre nous ont chez eux des photos d’eux-mêmes et de leur famille. Choisir celles qu’on expose et l’endroit où elles seront présentées (lesquelles dans le salon ? lesquelles dans la chambre ? lesquelles dans la salle de bains ? lesquelles dans la cuisine ? lesquelles dans le bureau ? etc.) est très important car il dénote le type de relation entretenue avec les personnes qui y figurent et en même temps, le niveau d’exposition sociale que la famille veut en donner à l’extérieur. Dans le salon, on trouve toujours les photos officielles, tandis que dans la chambre, on expose les clichés plus intimes. Bien sûr, il existe des familles transgressives qui mettent ce qui est intime dans le salon et n’exposent même pas les autres photos. Le choix de l’organisation des clichés compte également : beaucoup de personnes possèdent un grand nombre de photos chez elles dont certaines sont présentées de manière organisée dans des albums, souvent avec des commentaires, les dates et noms ainsi que des annotations très intéressantes.

43Évidemment, les photos de situations importantes revêtent un caractère plus officiel, même si les photos de groupe (prises lors de cérémonies traditionnelles comme les mariages, baptêmes, communions, ou d’événements scolaires) permettent d’observer la spécificité du groupe ainsi que le type de relation affective et sociale. En général, on prend des photos à plusieurs moments du cycle vital, tel le mariage. Il n’y a pas de quoi s’étonner si un génogramme comprend beaucoup de photos alors qu’un autre en est quasi dépourvu : on ne considère comme pathologique qu’un signal qui est physiologique.

44Il y a une baisse normale du nombre de photos durant les périodes de stress et de problèmes familiaux, qui est une indication du malaise, mais cette diminution est physiologique pendant l’adolescence : dans tous les génogrammes photographiques, l’adolescence est toujours sous-représentée. Ce n’est pas un pur hasard. L’adolescence est une phase de passage, les individus ne se reconnaissent pas dans leur image et donc ne veulent pas qu’on prenne de photos ; s’il y en a quand même, souvent ils les détruisent car ils n’en aiment pas le résultat.

45En soi, l’image ne signale pas grand-chose, mais une lecture critique par voie visuelle et avec révision au début, suivi d’une approche plus verbale ensuite aide à découvrir les détails les plus spécifiques du vécu relationnel d’une personne donnée.

46Les techniques de vision des photos suivent un processus ordonné de manière plutôt précise. Les premières étapes débutent par les prescriptions qui indiquent quoi faire et de quelle manière : « Vous devez apporter trente photos pour votre génogramme photographique. Allez chez vous, choisissez les plus significatives pour vous parmi le plus grand nombre possible de photos à votre disposition (chez les membres de la famille et chez les amis aussi). Cherchez à en ramasser le plus possible ». Le périple vers la maison a trait à la récupération des photos de famille pour les choisir, à la manière de Bowen (1988) qui faisait des petits groupes d’élèves qui préparaient le retour chez eux pour aller se séparer de leur famille d’origine ; ensuite, ils revenaient avec le résultat obtenu qui était alors examiné dans le groupe.

47À l’Institut de Florence, nous avons modifié la technique en utilisant un voyage dans les photos, au cours duquel le patient instaure un premier contact avec la réalité historique de sa famille. Une première lecture se fait sur les photos, suivie du choix de celles qui seront présentées. L’obtention de ces photos n’est pas si simple : souvent cela demande de rétablir un contact avec certaines branches de la famille laissées de côté ou même oubliées ; quelquefois, ce mouvement se réalise à regret car cette partie de la famille peut avoir rompu tout rapport avec la famille nucléaire ou d’origine du patient. Dans ce cas, le contact devient difficile. Quelquefois, on a des surprises agréables car l’on crée ainsi de nouveaux rapports ou l’on renoue les plus anciens. Il est en tout cas nécessaire d’entrer en contact avec ces personnes et de choisir ensuite le matériel assez considérable (qui comprend parfois 3000-4000 photos) qui concerne notre génération, celle de nos parents, celle de nos grands-parents et souvent de nos ancêtres.

48Il y a un niveau initial de prise de contact structuré, puis celui du choix qui implique déjà une lecture, enfin celui de la présentation.

PHOTOS : PHASES DANS LA CLINIQUE

  1. Prescriptions
  2. Voyage à la maison (choix)
  3. Présentation à stades
    1. Famille d’origine et enfance (10+10)
    2. Adolescence (10+10)
    3. Adultes – rencontre (10+5+5)
    4. Mariage et enfants (10+5+5)
  4. Lecture directe : réciproque, commune
  5. Révision (à la maison)
  6. Prescriptions supplémentaires

49L’usage de cette technique en clinique présente certaines spécificités pour ce qui concerne le mode de présentation qui se divise en stades car le travail a lieu en parallèle pour deux personnes. Ainsi, nous demandons à chaque conjoint d’apporter des photos liées à des circonstances successives, flexibles et modifiables, et qui peuvent être différentes pour chacun d’eux. La situation se complique quand ils sont devenus adultes et se sont rencontrés car les étapes peuvent être communes. Si c’est le cas, pour la période qui commence à la rencontre du couple, ils apporteront dix photos choisies ensemble (qui représentent donc le couple ou la manière dont ils le voient) et cinq photos chacun, c’est-à-dire celles qui ont été choisies par l’un et refusées par l’autre ou celles sur lesquelles ils ne sont pas d’accord ; cette clause est irrévocable. La même prescription est donnée pour la quatrième phase, celle du mariage et des enfants (il y a aussi des couples qui ne sont pas mariés, ou qui sont sans enfants, ou mariés depuis si peu de temps que la troisième phase comprend également le mariage). La lecture des photos est directe, toutefois il y a une possibilité d’échange avec commentaires et une révision peut aussi avoir lieu à la maison. Certains aspects sont partagés lors d’une lecture commune. Il n’est pas interdit de parler du commentaire.

50Nous favorisons deux types de lecture dans le cadre clinique. Le premier mode de lecture est contextuel : lorsque la photo est présentée, elle est accompagnée d’une lecture et d’un commentaire de la part de celui qui la présente suivie d’un éventuel contre-commentaire avancé par l’autre partenaire. Les photos peuvent aussi être présentées sans aucun commentaire et commentées par après. Un premier commentaire est parfois suivi d’un deuxième.

TECHNIQUES DE LECTURE

Critères
  1. interactif
  2. relationnel
  3. symbolique-métaphorique
Orientation
  1. longitudinale
  2. transversale
Photo de groupe
  1. proximité/distance
  2. absence
  3. redondances
Photo individuelle
  1. ressemblances
  2. répétitions
  3. changements
Disposition du génogramme
  1. noir et blanc - couleur
  2. proportions des âges
  3. proportions entre famille d’origine et famille adulte

51En parlant d’un membre de la famille auquel on est particulièrement lié et dont on montre la photo, il arrive qu’on pleure. Cela constitue une « information » systémique, car elle apporte des indices importants de l’émotivité de l’individu. Un « brevet » pour le génogramme photographique, c’est-à-dire une quantité déterminée de photos à apporter, n’existe pas. Le nombre que nous demandons est évidemment artificiel, défini de manière subjective comme un « bon » nombre. Une école différente pourrait décider d’en proposer un autre ; les conséquences pour l’observation et l’interprétation seront quand même valables.

52En ce qui concerne les techniques de lecture, nos critères sont : interactifs, relationnels, symboliques-métaphoriques. Le premier d’entre eux a trait aux interactions existant au cœur de la famille et du couple. Avec les photos, les interactions sont réduites au minimum puisque la situation est statique et donc, on ne peut voir celles qui se répètent dans le temps, par exemple les personnes figurant toujours dans la même position, ou absentes dans les situations les plus importantes, comme les mariages, etc.

53Le deuxième critère tient compte des résultats de l’interaction, ou mieux du type de rapports qui naissent après ces interactions-là. Le nombre et la qualité des photos révèlent les rapports privilégiés avec certains membres de la famille. Le dernier critère s’attache à la recherche du sens symbolique-métaphorique. Il requiert l’exploration de l’orientation longitudinale-transversale en tenant compte de l’observation de l’évolution de la famille, de la transmission de la culture, de l’importance de certaines personnes. Dans cette dimension transversale, on va analyser les phases du cycle de vie, ce qui change et ce qui reste inchangé, la proximité et la distance, l’absence et les redondances. Enfin, on relèvera les expressions qui demeurent telles quelles ou changent au cours du temps. Il nous paraît également intéressant d’observer la disposition des images. Les photos sont enregistrées sur la bande vidéo au cours de la séance par une « troisième caméra vidéo », qui permet ainsi de « mémoriser le trigénérationnel ».

Les tâches à la maison

54Après l’anamnèse, les diagnostics sexuels et trigénérationnels, on aborde une phase caractérisée en apparence par beaucoup de devoirs et de prescriptions.

55Quand on parle de tâches, on se réfère à des indications de conduite (non pas en matière sexuelle) données aux couples, le plus souvent dans un but stratégique et toujours avec une connotation métaphorique. Voici un exemple de tâche comprenant un dîner avec des choix mutuels : on envoie un couple dîner dans un restaurant choisi par monsieur, tous deux habillés comme pour un rendez-vous avec quelqu’un qui intéresse beaucoup. Ils doivent ensuite chacun choisir sur la carte un menu complet pour l’autre, conforme à ses goûts. Ils commencent par l’hors d’œuvre, puis continuent par une entrée, un plat principal (le plus important), et vont jusqu’au dessert, boissons comprises. Ceci étant fait, ils discuteront de ces choix avec le partenaire ainsi que de leur degré de connaissance de l’autre. Nous ne les obligeons pas à tout manger, mais ils doivent goûter à tout. Ils reviendront à la séance suivante, habillés tels qu’ils étaient lors de cette soirée, pour en faire une description détaillée. Il est inutile de remarquer que la prescription et l’interprétation reflètent rigoureusement la liaison intime entre nourriture et sexe et en utilisent le potentiel métaphorique. Ce devoir est la première de trois tâches : la deuxième prévoit la prescription d’un dîner à la maison où chacun doit cuisiner quelque chose pour l’autre en lui faisant une surprise, tandis que dans la troisième, les partenaires devront cuisiner ensemble.

Les prescriptions

56Les prescriptions sont celles à caractère sexuel données par Kaplan (1974) pour lesquelles on renvoie à son livre pour des informations plus détaillées. Nous avons apporté quelques modifications à chaque prescription (Focalisation sensorielle 1 et 2, Stop et Start, etc.). Toutefois il nous semble que les innovations importantes ne sont pas celles-ci. Nous aimerions plutôt faire remarquer que souvent, ces prescriptions ne sont pas exécutées ou qu’elles sont effectuées de façon incorrecte. Ces situations de « résistance » sont liées au matériel trigénérationnel recueilli auparavant. Évidemment, on ne passera pas à la suite de la prescription tant que le travail trigénérationnel n’aura pas débloqué la première application de tâche.

Le symptôme sexuel

57Les éléments fonctionnels présents au cœur d’un couple deviennent parfois tellement importants qu’ils coûtent aux individus une énorme quantité d’énergie jusqu’au point de susciter des liens de dépendance qui coupent tout autre choix de vie. Nous connaissons de nombreux exemples où, surtout dans les générations passées, des personnes ont renoncé à leur vie personnelle pour se consacrer aux membres de leur famille d’origine. On se souvient de la tante qui était « vieille fille » car elle s’est occupée en permanence de l’éducation et du mariage de ses frères et sœurs, ou encore de l’oncle qui a toujours vécu avec sa mère veuve. Le « fils unique de mère veuve » constitue un rôle particulièrement intéressant… pas seulement pour les obligations militaires ! Dans cette catégorie, on trouve beaucoup de jeunes adultes problématiques, présentant de graves difficultés au niveau existentiel, très difficiles à gérer et à comprendre. Il s’agit de personnes qui sont, souvent inconsciemment, sous l’emprise d’une mère exigeante et « collante », et qui ne savent pas sortir de ce contrat d’aide implicite et commencer une vie propre. Ces jeunes acceptent alors le mariage seulement à condition qu’il soit un torturant ménage à trois : Le Fils, sa Mère et sa Femme. Les futures épouses de ces individus finissent souvent par accepter ce marché, en se berçant de l’illusion de réussir à modifier les termes d’un pacte qui se révèle presque toujours tel qu’une mer à boire. Si la fonction sexuelle n’est pas compromise, le couple pourra avoir des enfants, lesquels ne tarderont pas à devenir l’objet des querelles entre les deux « femmes », l’institutionnelle et l’émotionnelle, avec un « père-mari » voué à se défiler pour assister au combat, restant souvent en silence, à « distance de secours ». Voilà donc que la famille peut se stabiliser, au moins pour quelque temps, selon un modèle que nous définirons comme un « harem » où, comme chacun sait, il y a plusieurs femmes. La première, c’est-à-dire la Mère du père-mari, déploiera une intense activité pour la famille : s’occuper du ménage, élever et diriger les enfants, décider des questions les plus importantes concernant le « père-mari ». Elle est respectée et reconnue comme la seule Autorité de la maison. La deuxième, c’est-à-dire la Femme du père-mari, aura des tâches ludiques, sexuelles et reproductives, mais son opinion en tant que partenaire ne sera pas considérée.

58Parfois, une telle situation aura des conséquences importantes au point d’élargir l’impasse émotionnelle à la sphère sexuelle. Lui, ou Elle, ou plus souvent tous les deux, ne peuvent se marier compte tenu des liens établis antérieurement avec des personnes de la génération précédente (le père, la mère, les grands-parents) ou de la même génération (frères ou sœurs). On a alors affaire à des « mariages blancs », souvent non consommés sans que cela soit considéré comme un problème insurmontable, du moins jusqu’à ce que le couple désire avoir un enfant.

Vignettes cliniques

Quand elle est mariée avec son père. Anorgasmie et vaginisme

59La situation clinique présentée ci-après concerne un couple de fiancés sensibles et conscients, qui ont décidé d’aborder leurs problèmes juste avant le mariage afin d’éviter des erreurs de décisions. Tous deux présentent le même type de rapport fonctionnel classique avec leurs parents : lui est déjà « marié » avec sa mère et elle l’est avec son père. Dans ce type de situation, dès que le symptôme d’un partenaire est guéri, l’autre montre immédiatement le même symptôme. Nous avons donc décidé depuis longtemps de traiter toujours en couple ce type de symptomatologie, du moins quand cela est possible.

60Par la fenêtre donnant sur le jardin, la thérapeute vit le nouveau couple de 13 heures : la jeune femme était petite, avec des cheveux châtains ; elle portait un jeans et un pull et faisait plus jeune que son âge annoncé au téléphone. Son compagnon la suivait, énervé comme si la situation ne le concernait pas. Ils montèrent l’escalier avec calme : la thérapeute les attendait devant la porte vitrée. Ils se présentèrent : elle semblait embarrassée ; lui au contraire, il était gentil et intéressé. La porte de la salle d’attente se ferma derrière eux. La thérapeute rentra dans son bureau et son collègue lui demanda : « Le nouveau couple, il est comment ? ». « Jeune », répondit-elle. Cela constituait un indice important pour la réussite de la thérapie. En effet, il n’y avait pas encore d’accumulation d’années de rancunes et d’échecs affectifs, ce qui donnait une chance de plus. Sa pensée, malheureusement, n’alla pas plus loin.

61La jeune femme, en effet, commença à raconter une longue série de tentatives échouées. Ils avaient déjà tout essayé : depuis le gynécologue jusqu’à l’hypnotiseur, ils avaient expérimenté aussi quelques exercices de Kaplan jusqu’à arriver à la désensibilisation systématique. Les psychothérapeutes représentaient la dernière tentative. La voix de la femme ne montrait aucun enthousiasme, seulement de la résignation. L’anamnèse révéla qu’Anna travaillait à l’épicerie de son père avec sa sœur aînée avec qui elle avait commencé depuis longtemps une compétition sans merci afin d’obtenir une place privilégiée dans le cœur de ses parents. Pendant que les sœurs s’acharnaient pour arriver à l’objectif convoité, les parents étaient parfaitement impartiaux : si l’une demandait quelque chose qui répondait à un besoin réel, les parents donnaient la même chose à l’autre qui n’en avait que faire.

62Paolo, au contraire, fut orphelin de père dès l’âge de quatre ans : il vivait avec sa mère, sa grand-mère et la sœur de sa grand-mère, dans une sorte de harem très asservissant.

63Il se disait désireux de se marier avec Anna, y compris pour s’éloigner de toutes ces femmes et avoir sa famille. Tous les deux étaient indépendants au niveau économique et ils avaient acheté une maison. Toutefois, avant leur mariage, ils devaient résoudre leur problème sexuel. Quel avenir pouvait avoir – se demandaient-ils – un couple qui ne réussissait jamais à avoir des rapports sexuels complets car elle n’acceptait pas la pénétration ? Ils n’auraient jamais d’enfants, ils ne s’aimeraient jamais « comme tout le monde » : pour cette raison ils attendaient et remettaient la date du mariage à plus tard dans l’attente de la disparition du symptôme d’Anna. Après cinq années d’essais et de nombreuses frustrations, chaque fois qu’il cherchait à introduire son pénis dans le vagin d’Anna, elle contractait les muscles et aucun effort de Paolo n’aboutissait à un résultat. Même s’ils n’avaient pas de rapports sexuels complets, elle prenait la pilule car elle était terrorisée à l’idée d’une grossesse. Anna avait eu d’autres histoires avant de connaître Paolo, mais les rapports se limitaient au petting. Paolo en était, au contraire, à sa première expérience, peut-être parce qu’il avait été trop engagé dans un rôle casanier pour se permettre de chercher une femme en dehors de la maison. Du point de vue professionnel, Paolo était capable d’assumer des responsabilités au travail alors qu’en thérapie, il montrait une attitude immature et superficielle. Il évitait soigneusement toute interaction avec le thérapeute mâle, tandis qu’il cherchait à gagner la solidarité et la sympathie de la thérapeute. À une occasion, il avait même cligné de l’œil à la thérapeute en signe de grande complicité, et plusieurs fois, il était arrivé jusqu’à la tutoyer. Lorsque la thérapeute remarqua tout cela, et releva qu’il ne s’agissait pas d’un hasard, Anna affirma que même chez leurs amis, il préférait rester avec les filles du groupe plutôt qu’avec les garçons. À ce moment-là, les cothérapeutes communiquèrent au couple leur hypothèse diagnostique : Anna avait choisi un homme qui n’était pas « dangereux », qui lui permettait de rester en famille et ainsi de ne pas laisser le terrain libre à sa sœur, qui sans cela resterait seule avec leurs parents. Cette éventualité était insupportable pour Anna à cause de la forte jalousie envers sa sœur. Paolo, au contraire, continuerait à jouer le rôle du « Don Juan en Sicile » et il ne devrait jamais se mesurer avec les autres hommes, avec le père d’Anna non plus, de même qu’en thérapie et avec les amis. L’expérience de la comparaison avec d’autres figures masculines significatives manquait à Paolo qui avait toujours vécu dans un harem protecteur. Anna, même si elle lui était reconnaissante pour l’aide qui lui était garantie, était aussi déçue parce qu’il ne réussissait pas à gagner l’estime de ses parents, de son père en particulier. Chez les personnes les plus fidèles au pacte conjugal secret avec les parents, on trouve presque toujours un espoir caché : celui de trouver quelqu’un qui puisse les forcer à couper le lien, à « divorcer », quelqu’un qui gagne pour eux au jeu « du tir la corde » avec la famille d’origine. À la fin de la séance, Anna sortit, visiblement énervée.

64Lors de la séance suivante, les thérapeutes assistèrent à une transformation inattendue. Paolo avait une nouvelle apparence : presque rasé, les bottes cloutées et un blouson de cuir noir. Anna pleura. Au contraire, elle n’était prête à aucun changement. Les thérapeutes proposèrent au couple de faire le collage de la famille : les patients devraient représenter par des figures géométriques réelles ou inventées, les membres de leur famille d’origine. Le but consistait à leur permettre d’avoir des marges de liberté plus vastes afin d’obtenir, par le biais des figures, des informations différentes de celles qu’Anna et Paolo leur fournissaient verbalement. L’élément le plus intéressant qui résulta du collage d’Anna fut la représentation qu’elle fit d’elle-même comme un cercle complètement attaché au père imaginé comme un long rectangle qui séparait Anna de sa mère et de sa sœur. Après avoir examiné le collage de la jeune femme, les thérapeutes décidèrent de proposer au couple l’exercice du « mètre mental » qui était basé sur l’idée que plus Anna se sentirait proche de son père, plus la distance entre elle et Paolo augmenterait. Le devoir proposé au jeune homme était de parler à Anna de son père chaque fois qu’il la sentait distante. Pendant les tentatives de pénétration, quand elle ne réussissait pas à le faire entrer en elle, il devrait parler du père. Paolo regardait, incrédule, les deux thérapeutes ; il n’aimait pas ce devoir qui lui semblait excessif et trop gênant. Anna se taisait, mais à la fin des séances, elle n’était jamais fort loquace. La séance suivante montra que la situation s’était nettement améliorée. Alors qu’on s’approchait du but, la sœur d’Anna déclara qu’elle était enceinte et qu’elle allait se marier. Toute la famille fut absorbée par les préparatifs des noces et son père, en pensant à la proche naissance de son petit-fils, lui offrit une maison plus grande que celle qu’il aurait donnée à Anna en prévision du mariage avec Paolo. Cet événement bouleversa particulièrement Anna qui commença à perdre d’intérêt pour la thérapie et pour le rapport avec Paolo en l’abandonnant au découragement. La jalousie entre sœurs fut le thème principal des deux séances suivantes jusqu’à ce que Anna finisse par admettre qu’elle voulait son père entièrement pour elle-même ; cependant, elle était consciente que cela avait beaucoup entravé sa propre évolution. Continuer la lutte pour le père signifierait la perte de toute possibilité de se dégager et de croître émotionnellement. Anna prenait conscience que cette fonction et ce rôle si importants depuis longtemps, ne l’aideraient jamais à devenir adulte et mûre.

65Sa mine changea en quelques mois : n’étant plus « la petite de papa », Anna abandonna l’air d’enfant éternel qui la caractérisait précédemment, pour celui d’une femme charmante : elle frisa ses cheveux et commença à s’habiller avec soin et de façon très féminine. Anna et Paolo, presque à leur grande surprise, eurent leur premier rapport sexuel complet. Un mois après, la séance confirma une entente sexuelle consolidée et rassura ainsi les deux thérapeutes. Le couple manqua le rendez-vous « de contrôle », toutefois Anna et Paolo téléphonèrent en disant que tout allait bien ; ils se sentaient mûrs et ils n’avaient plus besoin de figures adultes pour leur apprendre les choses importantes de la vie.

Quand il est marié avec sa mère. L’impuissance

66Piero était fils unique d’une mère veuve. Orphelin à 12 ans, il avait toujours vécu avec celle-ci qui d’ailleurs s’était sacrifiée ne se remariant plus. Il avait fait carrière et maintenant, il gagnait bien sa vie. Il était aussi très beau, mais il allait vieillir et sa mère désirait un petit-fils…

67Elisa venait d’une famille de commerçants, où les hommes ne comptaient pas ou étaient des ratés (l’un de ses frères était toxicomane, l’autre était marginal) alors que la mère et les filles géraient la famille et le travail. Elle désespérait de ne pouvoir se marier, elle voulait « un homme ». Tous deux semblaient destinés l’un à l’autre, et après de brèves fiançailles, ils se marièrent malgré les quelques soupçons qu’Elisa avait à propos de l’homme qu’elle allait épouser, surtout quand Piero envoya sa mère choisir les meubles de leur future chambre à coucher avec sa fiancée (il était trop pris…). Après quelques années et deux enfants, Elisa, encouragée par son clan féminin, demanda de déménager (ils étaient évidemment allés habiter avec la belle-mère). Piero était d’accord, malheureusement il ne trouvait jamais la maison appropriée. Alors Elisa, qui avait de l’argent, chercha un domicile, le trouva et s’y installa avec les enfants. Piero décida de la suivre en « abandonnant sa mère » pour la première fois de sa vie dans le but de ne pas rompre la famille et de rester auprès de ses enfants. Depuis lors, il développa une impuissance inexplicable et irréductible, à la grande honte d’Elisa, en la privant ainsi de la seule chose qui la distinguait de sa belle-mère par rapport à Piero.

La femme - mère : quand le sexe sert à frapper. L’éjaculation précoce

68Laura et Angelo sont jeunes, beaux et blonds aux yeux bleus. Angelo a un poste à responsabilités et a suivi précédemment une psychanalyse durant quatre ans, qui l’a rendu, selon lui, moins névrotique et plus conscient de ses limites. Laura est femme au foyer et s’occupe de sa fille Benedetta, qui a deux ans, en savourant toutes les joies et les frustrations des femmes qui jouent le rôle de mère à plein-temps. Ils ne sont pas mariés mais cohabitent depuis huit ans. Au moment où une amélioration apparaît au sein de la thérapie de couple, Angelo commence à demander du temps. Il craint d’être abandonné par les deux thérapeutes et, malgré toutes leurs paroles rassurantes, il recommence à avoir des éjaculations rapides et, selon sa femme, il échouerait de propos délibéré.

69L’histoire d’Angelo, en ce qui concerne sa famille d’origine, se structure autour d’un lien très fort avec la figure maternelle. Son père avait vingt ans de plus que sa femme, épousée suite à un arrangement entre les familles ; cette union fut toujours orageuse. Une année après le mariage, leur fils naquit : une sorte d’enfant prodige destiné à relever le mythe autour duquel cette famille était structurée. En effet, il marcha très tôt et à six ans, sa dentition était complète. Deux années plus tard, la nouvelle d’une seconde grossesse bouleversa la mère. Elle n’avait pas épargné à Angelo l’explication que si elle n’avait pas avorté de lui, c’était uniquement pour des raisons morales. Quand le patient eut dix ans, son père tomba malade. Sa mère, encore jeune et belle, trouva un amant de son âge. Son fils cadet, Angelo, devint ainsi l’alibi des sorties insoupçonnables où elle rencontrait ce jeune. Angelo devint prisonnier d’un conflit émotionnel très pesant : d’un côté il était jaloux de sa mère tombée amoureuse d’un autre, de l’autre, il y avait la fidélité au père malade. En même temps, il le critiquait avec férocité, l’accusant de ne pas avoir réussi à faire tomber amoureuse de lui cette femme qui toutefois avait pitié de lui à cause de sa maladie. Quand le père mourut, Angelo commença à cultiver une rancune envers sa mère. Il ne réussissait plus à l’embrasser, même lui serrer la main constituait un problème.

70Angelo eut son premier rapport sexuel avec une amie de son frère aîné ; notre patient se laissa séduire, mais l’expérience ne fut pas agréable. Il décida donc de ne plus s’intéresser aux femmes, jusqu’au moment où il rencontra Laura. Leurs rapports ne furent cependant jamais satisfaisants. Laura était une femme douce et indulgente, mais maintenant, elle demandait une vie sexuelle plus satisfaisante. Alors que leur situation progressait, Angelo eut peur d’être abandonné par les thérapeutes. Pour lui, changer signifiait mettre en péril quelque chose qui avait existé dans le passé : cela évoquait symboliquement le vécu émotionnel du lien avec sa mère, ou du lien avec une femme qui lui avait préféré un jeune amant tandis que Angelo encore trop petit avait vécu dans l’illusion de combler le vide provoqué par la maladie de son père. Angelo devait réussir maintenant à « divorcer » de sa mère, mais pour le moment, il n’arrivait qu’à rêver de fuir. Il aurait aimé changer de travail, de maison, de ville. Pourtant il ne s’agissait pas d’une séparation dans l’espace, mais plutôt d’une distanciation émotionnelle. Les cothérapeutes pensaient en effet qu’il était nécessaire de rompre cet équilibre figé afin de parvenir à une sexualité satisfaisante. La thérapeute décida donc de permettre à Laura d’entrer davantage en jeu. Malgré ses baskets, son jeans et ses pulls, Laura n’avait jamais réussi à cacher complètement sa belle silhouette de femme et son visage très doux. Elle cherchait inconsciemment à engloutir sa féminité et son charme potentiel, pour se protéger du désir de tromper son mari avec des hommes sans problèmes sexuels. À son avis, dans un vrai rapport, seules l’affection et l’estime mutuelles comptaient. Entre ses parents en effet, il n’y avait jamais eu de dialogue et son père avait probablement une relation extraconjugale, ce qui la rendait très triste. Alors que la thérapeute aidait Laura à exprimer ces sentiments difficiles et douloureux, Angelo plongea dans le désespoir. Il s’accusait d’avoir été un très mauvais fils et ensuite un piètre mari. Il était conscient d’avoir présenté sa mère sous un aspect démoniaque et d’avoir en même temps idéalisé le père qui, en fait, avait négligé sa jeune femme. Maintenant, voilà qu’il n’était pas capable de guérir et qu’il décevait également les thérapeutes.

71En réalité, Angelo mettait vingt minutes avant d’éjaculer, toutefois il restait accroché à l’étiquette d’éjaculateur précoce. Pendant ce temps, Laura avait commencé à changer ; elle s’était coupé les cheveux, était plus féminine et disait en avoir assez d’être la fiancée éternelle d’un mari seulement intéressé par les rapports avec sa mère. Angelo, au contraire, était jaloux du thérapeute même s’il était rassuré par la dyade thérapeutique. Les deux thérapeutes assumaient durant cette phase de la thérapie une fonction parentale : la relation émotionnelle de Laura avec le thérapeute n’aurait quand même pas nui au couple thérapeutique. Ces dynamiques par rapport aux figures parentales sont celles qui ont été expérimentées par l’enfant au cours de la phase œdipienne. Il pourra la dépasser sans trop de trauma s’il ressent que l’autre parent demeure toujours plus important que lui dans le rapport du couple. Parfois, la salle de la thérapie est une sorte de salle de gymnastique où l’on peut jouer avec les émotions et l’imagination, en restant protégé et rassuré par les murs qui séparent cette réalité reconstituée du monde extérieur. Laura avait appris qu’on peut changer, se transformer, jouer avec son charme, non seulement en thérapie, mais aussi à l’extérieur sans que cela constitue un danger pour le mariage. Angelo ressentait l’appartenance à sa mère et pouvait dès lors s’en séparer et concentrer ses attentions sur sa femme. Un mois plus tard, le couple revint content et porteur d’une nouvelle : la mère d’Angelo allait se remarier avec un gentil monsieur connu pendant l’été passé à la montagne. Peut-être que pour elle aussi, il était nécessaire de sentir son fils « remarié » avant de se permettre une nouvelle vie avec un partenaire enfin choisi sans avoir de remords. Le divorce était désormais réalisé, personne n’avait plus de rivaux. Ni la mère contre la femme, ni le futur mari de la mère contre notre patient.

Modèles familiaux absents : les attentes déçues. Les troubles du désir féminin

72Renato avait rencontré sa femme Antonella quand il était encore un jeune avocat : elle était la secrétaire d’un collègue. Un jour, il était allé chez ce dernier et l’avait connue ainsi ; à cette époque, Antonella était la maîtresse de son patron marié avec des enfants, et qui n’était pas intéressé à faire un choix entre deux femmes : cela la rendait assez déprimée. Quand Renato entra dans le bureau en cherchant Mario, Antonella fut vraiment impressionnée, au point de se couper en quatre pour montrer son caractère énergique et sa sympathie. À cette époque-là, Renato cohabitait avec une éternelle étudiante en philosophie et l’esprit soixante-huitard caractérisant leur mode de vie : il pouvait sortir avec qui il voulait sans entamer son rapport avec elle. Antonella, au contraire, rompit avec l’avocat en lui donnant son congé. Elle pensait rendre ainsi plus solide sa relation avec Renato : il représentait tout ce qu’elle n’avait jamais eu jusque-là, ce qu’elle appellera en thérapie « les valeurs bourgeoises » ; à cette époque-là, ces valeurs lui semblaient très importantes, peut-être parce qu’elles n’avaient jamais fait partie de son histoire familiale. Elle se trouva enceinte par hasard et ils décidèrent de se marier avec une simple cérémonie. La famille de Renato regardait cette belle-fille avec incrédulité, semblant se demander : « Quelle est notre faute ? » ; ils pensaient aux beaux-parents de Renato, à cette fille qui n’était plus vierge, et de plus, ils ne réussissaient pas à accepter leur petit-fils, accusé d’avoir des traits forts, très différents de ceux de son père. La grossesse avait donné à Antonella beaucoup de kilos et de difficultés ; elle commença à penser à ses amies et à son monde passé, abandonnés trop vite pour suivre les amis de son mari qui l’avaient accueillie avec indifférence. Renato, pour sa part, l’avait épousée parce qu’elle semblait solide et qu’elle n’avait pas trop « de lubies ». Il la préférait à ses copines d’université concentrées sur leur carrière, le féminisme et les slogans idéologiques. Malgré cela, il commença à regretter la vie d’avant le mariage, mais il décida de se concentrer sur le travail. Renato aurait voulu être un père présent, mais il se sentait obligé de soutenir financièrement sa famille tout seul puisque Antonella ne voulait plus travailler.

73Quand ils arrivèrent en thérapie, le mariage durait depuis six ans et leurs motivations à demander une consultation étaient différentes. Renato craignait la dissolution de la famille et cherchait à se faire pardonner le manque de considération et d’affection où Antonella avait vécu. De son côté, elle ne voulait pas abandonner son fils, mais désirait équilibrer les comptes. Elle semblait apparemment la plus forte : elle parlait d’une voix décidée, voyait très clairement la situation et était désagréable avec son mari. Lui, il semblait disposé à n’importe quoi pour garder sa femme : il avait réduit son temps de travail, organisait des voyages pour la famille, n’allait plus qu’une seule fois par mois chez ses parents. En réalité, Antonella regardait fort timidement vers l’extérieur car elle s’était habituée à dépendre désormais de son mari pour toute chose. Elle affirmait vouloir faire beaucoup de choses et se consacrer plus à elle-même, mais il s’agissait seulement de quelques déclarations. Lors d’une séance, la femme avait fait allusion à un nouvel amour, toutefois l’idée d’abandonner la maison et le fils l’avait forcée à un rapport platonique, vite arrêté. Renato savait tout, il assumait un rôle modeste et humble, mais en même temps, il se présentait en thérapie habillé comme un homme de quarante ans qui a des atouts en main. Il pensait faire tout son possible pour rattraper cette histoire, mais les thérapeutes avaient le sentiment qu’il était en train de rechercher en lui un amour qui n’avait jamais existé, comme son envie de partager sa vie avec une femme qu’il n’estimait point. Antonella sentait qu’il jouait avec l’apparence et qu’elle allait s’énerver. Le soir, dans leur chambre, leurs gestes communiquaient seulement la rage et la déception. Lorsque leur fils commença à envoyer des messages de malaise devant cette situation, Antonella alla très mal. Elle se sentait responsable de la rupture et elle était fâchée contre Renato. Chaque séance devenait le lieu où mettre sous les projecteurs de façon stéréotypée toutes les fautes du mari. Ce dernier se montrait très séducteur envers la thérapeute et, après quelque temps, une nouvelle relation amoureuse vainquit le sens des responsabilités et la morale catholique dans laquelle il avait grandi. À ce stade, les thérapeutes décidèrent de convoquer les familles d’origine. Celle d’Antonella fut la première à venir : sa mère était une femme négligée et triste ; peut-être avait-elle été jolie durant sa jeunesse, mais le mariage avait déçu toutes ses attentes. Il était donc inutile de se soigner pour un mari niais qui lui avait été assigné par le destin. Celui-ci, ex-employé des Postes, était un « brave homme » : il n’était pas beau et était mécontent lui aussi de son mariage. Il était toutefois lié à ses filles et assez satisfait de lui-même. La sœur d’Antonella apparaissait jolie et timide, fiancée avec un jeune homme qui avait la tête sur les épaules ; elle était très différente d’Antonella.

74La famille de Renato était très différente : le père était un magistrat à la retraite, une personne honnête faite tout d’une pièce. La mère au contraire était hautaine, venant d’une ancienne et riche famille ; elle avait les cheveux courts. La sœur cadette de Renato était une jeune mère, modeste et conciliante. En comparant les deux familles, on constatait une évidente différence de culture : celle d’Antonella était fondée sur les besoins pratiques et concrets, tandis que celle de Renato apparaissait sophistiquée, aérienne, peu concrète. Ces deux univers ne semblaient conciliables qu’au prix d’une grande tolérance de la part des deux membres du couple. Cependant, personne n’avait réussi à comprendre les règles familiales de l’autre. Chacun avait seulement cherché à faire prévaloir sa culture familiale sur l’autre. L’objectif des thérapeutes consistait donc à ce que les conjoints assument chacun leurs responsabilités dans la faillite du mariage. Antonella avait renoncé à son travail car elle avait préféré être l’épouse d’un jeune avocat de bonne famille, mais elle accusait maintenant Renato d’être responsable de l’existence vide d’intérêts qu’elle avait pourtant elle-même construite. Renato, au contraire, avait préféré devenir le médiateur du lien entre le monde extérieur et la famille, en laissant à sa femme la tâche de prendre soin du ménage et de leur fils. Lorsqu’il rentrait du travail à la maison, le soir, il ne trouvait personne pour l’écouter et il préférait consacrer ses énergies à l’extérieur. On devait donc reformuler le contrat de mariage. La différence entre les modèles familiaux, même si su début elle constituait un élément d’attraction, était devenue un obstacle insurmontable. Antonella rêvait pour son fils d’une famille avec certaines valeurs : des études, des voyages à l’étranger, une bonne allemande, des parents affectueux avec une vie brillante et indépendante. En rentrant le soir, Renato aurait voulu s’asseoir à table et parler de la journée, ou regarder un film à la télévision plutôt qu’aller dîner avec ses collègues. Les modèles familiaux de leur enfance leur manquaient de plus en plus. Chacun voyait l’autre trop différent de l’image idéale qu’il avait construite et l’accusait de son malheur.

75Pour ce type de couples, il existe au moins quatre alternatives : la première consiste à déclarer le mariage raté sans que les membres n’évaluent leurs responsabilités ; dans ce cas, ils courent le risque de répéter les mêmes erreurs d’appréciation avec d’autres partenaires. La deuxième possibilité consiste à ce qu’ils restent ensemble sans rien apporter pour améliorer la situation ; nous les voyons comme des personnes « séparées à la maison » qui vivent dans l’illusion de maintenir la famille unie tout en payant le prix d’une mort civile. Une troisième option comprend une séparation, aussi bien dans la vie quotidienne qu’au niveau de la thérapie de couple, car chacun choisit son propre espace de thérapie individuelle pour comprendre les erreurs commises et apprendre de nouvelles modalités de vie à deux. La dernière possibilité qui restait pour Renato et Antonella était de réintroduire de nouveaux investissements émotionnels en abandonnant les images idéales de la « famille parfaite » où l’harmonie régnerait en souveraine et où tout se passerait tranquillement.

76Dans la situation de ce couple, il semblait nécessaire de poursuivre la thérapie sous une forme individuelle. Ensemble, ils avaient construit un bloc monolithique qui ne leur a jamais permis de distinguer et différencier des côtés positifs de leur mariage à conserver par rapport aux aspects négatifs à abandonner car inappropriés.

77Si ce couple avait éprouvé des sentiments différents de la rage, de l’ennui et du désespoir, il aurait pu utiliser la crise à des fins évolutives. Nos patients optèrent donc pour cette dernière solution ; Antonella commença tout de suite une thérapie individuelle tandis que Renato attendit encore quelque temps. Tous deux ont peut-être appris à faire confiance en la possibilité de changement, ce qui constitue l’un des plus importants paris de la psychothérapie.

Conclusion

78Le modèle illustré dans cet article peut être également utilisé en thérapie de couple sans qu’il y ait de problématique sexuelle. Nous pensons que l’approche trigénérationnelle est vraiment indiquée dans toutes les thérapies de couple. Ce qui caractérise plus particulièrement notre approche des situations comportant des difficultés sexuelles, c’est l’importance que nous accordons à une anamnèse médicale soigneuse qui nous permet d’éviter le risque de commencer une psychothérapie avec des patients impuissants diabétiques par exemple.

79De plus, nous soulignons la richesse du travail avec les images, qui permet d’aborder le problème par une voie adéquate (non verbale) dans les situations où le symptôme est lui-même « peu verbal ». Ajoutons enfin que les traitements sexologiques intégrés ne se réduisent pas à une dimension prescriptive car les prescriptions et les tâches/devoirs proposés sont aussi des instruments qui permettent aux résistances de se révéler, et donc d’être surmontées par des modalités autres que stratégiques.

Références

  • ANDOLFI M., ANGELO C. & SACCU C. (éd.) (1987) : La Coppia in Crisi, ITF Roma.
  • ANDOLFI M. (1992) : Crisi di coppia e famiglia trigenerazionale. In ANDOLFI M., ANGELO C. & SACCU C. (éd.) : La Coppia in Crisi. (p. 216-232), ITF, Roma.
  • ANDOLFI M. (éd.) (1999) : La Crisi della Coppia. Cortina, Milano.
  • ANTONIOLI A. & MARTINI L. (1993) : La Relazione Sessuale di Coppia. Attraverso lo specchio n. 35/36, Anno 11 : 5-43.
  • BOSZORMENYI-NAGY I. & SPARK G. M. (1973) : Invisible loyalties: Reciprocity in intergenerational family therapy. Harper & Row, New York.
  • BOWEN M. (1988) : La différenciation de soi. ESF, Paris.
  • CAILLÉ P. (1993) : La Coppia, questa sconosciuta e la sua domanda. Psicobiettivo 13(1) : 6/11.
  • CANEVARO A. (1987) : Crisi matrimoniale e contesto trigenerazionale. Un modello sistemico di terapia breve. In ANDOLFI M., ANGELO C., SACCU C. (éds) : La Coppia in Crisi, (p. 198-215). ITF, Roma.
  • CIGOLI V. (1993) : L’ alleanza ed il suo svincolo : coniugalità e psicoterapia. Psicobiettivo 13(1):45-56.
  • DE BERNART R. & GIOMMI R. (1987) : Terapie Sessuali e terapie di Coppia. In ANDOLFI M., ANGELO C., SACCU C. (éds) : La Coppia in Crisi. ITF Roma.
  • DE BERNART R. & GIOMMI D. (1989) : “DOPPIA INTIMITA’ : LA COTERAPIA DI COPPIA”. In “L’Intimità”, Atti dell’ XI Congresso di Sessuologia Clinica e del X Congresso dell’American Association of sex educators, Counselors and therapists ; Perugia, Maggio 1989 ; Scuola tipografica Perugia.
  • DE BERNART R. (1991) : L’Uso Degli Audiovisivi Nella Terapia Familiare. Attraverso lo specchio 29(9): 44/56.
  • FRAMO J. L. (1992) : Family-of-Origin Therapy. An Intergenerational Approach. Brunner/Mazel, New York.
  • GERSON R., HOFFMANN S., SAULS M. & ULRICI D. : “Family of Origin Frames in couples Therapy”, JMFT Vol. 19, N.4, October 1993, p. 341-354.
  • KAPLAN H.S. (1974) : The New Sex Therapy. Brunner/Mazel, New York.
  • SCABINI E. (1995) : Psicologia sociale della famiglia, Boringhieri, Torino.
  • WALSH F. (1995) : Ciclo vitale e dinamiche familiari. Franco Angeli, Milano.
  • WILLI J., FREI R. & LIMAKER B. (1993) : Couples Therapy using the technique of Construct Differentiation. Family Process 32(3) : 311-323.
  • WILLI J. (1975) : La Collusione di Coppia. Franco Angeli Ed., Milano.
  • WIILAMSON D.S., (1983) : La conquista dell’autorità personale nel superamento del confine gerarchico intergenerazionale. Terapia Familiare 11 : 77-93.
  • WHITAKER C.A. (1987) : Le Funzioni del Matrimonio. In ANDOLFI M., ANGELO C., SACCU C. (éds) : La Coppia in Crisi. ITF, Roma.

Mots-clés éditeurs : trigénérationnel, non verbal, couple, problèmes sexuels, image

Date de mise en ligne : 03/07/2009

https://doi.org/10.3917/ctf.042.0175

Notes

  • [1]
    Les auteurs remercient le professeur Roberta Giommi pour le matériel extrait de son chapitre écrit en collaboration avec le professeur Rodolfo de Bernart dans La coppia in crisi, ainsi que le docteur Daniela Giommi pour les exemples cliniques issus des co-thérapies conduites avec le professeur de Bernart.
  • [2]
    Psychiatre, Psychothérapeute de la famille, Directeur de l’Institut de Thérapie Familiale de Florence (ITFF), Président de l’EAP.
  • [3]
    Psychologue, psychothérapeute relationnelle et de la famille, formée à l’ITFF.

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Retrouvez Cairn.info sur

Avec le soutien de

18.97.14.89

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions