« Aucune lecture qui veut rendre justice à Hegel n’est possible sans une critique de sa philosophie », écrit Adorno dans Trois Études sur Hegel. Pour caractériser sommairement L’Envers de la dialectique, il suffit de renverser les termes du programme formulé par Adorno : aucune critique qui veut être à la mesure de Hegel n’est possible sans une lecture de sa philosophie. Reste seulement à savoir ce qu’il faut entendre par « lecture » et par « critique ». Quinze ans après sa publication au Brésil et grâce à la détermination de ses éditeurs, L’Envers de la dialectique est désormais lisible dans sa version française originale, accompagnée d’un riche appareil philologique qui permet au lecteur de s’orienter dans le vaste corpus de textes hégéliens et nietzschéens mobilisés par l’auteur. Prolongeant les analyses du « Discours hégélien » qui étaient au centre de La Patience du concept, L’Envers de la dialectique leur imprime une orientation résolument polémique, Hegel étant lu « à la lumière de Nietzsche ».
Si la dialectique forme incontestablement le fil conducteur de cette nouvelle traversée de la philosophie hégélienne, elle n’en constitue pas l’objet proprement dit, et le lecteur aurait tort de s’attendre à un relevé de ses propriétés essentielles ou de ses traits caractéristiques. L’Envers de la dialectique reste fidèle au parti pris méthodologique adopté dans La Patience du concept : la dialectique doit être abordée comme la clef de voûte d’un certain « discours », donc d’abord comme un tour d’expression, une manière d’investir le langage, bref comme « un…