Notes
-
[1]
C’est aussi l’époque du "distanciement" entre C.V.P. et P.S.C. Les deux autres grands partis nationaux traditionnels se scindent à leur tour ultérieurement (le P.L.P.-P.V.V. par étapes, le P.S.B.-B.S.P. brusquement en 1978). Voir X. Mabille, "Le système des partis dans la Belgique post-unitaire", C.H. du CRISP n°864 du 28 décembre 1979, 24 p.
-
[2]
Rappelons les principaux mandats d’administrateur détenus par les titulaires successifs du portefeuille des Finances : J. Van Houtte est administrateur de Cobepa et a été président du conseil d’administration jusqu’en mars 1975. A. Dequae est président des Assurances du Boerenbond belge depuis 1966. Il est en outre vice-président de la Maatschappij voor Roerend Bezit van de Belgische Boerenbond. G. Eyskens a été président de la Kredietbank de mars 1974 à mars 1980 (après avoir été ministre des Finances). R. Henrion est administrateur de la Société générale de banque depuis 1960. Il a été administrateur délégué et vice-président de 1963 à 1966, président en conseil d’administration de 1967 à 1974 et président du comité de direction de 1974 à 1976. Le baron Snoy et d’Oppuers a été administrateur de la Compagnie Bruxelles Lambert jusqu’en 1978. A. Vlerick a été vice-président de la Kredietbank de 1974 à 1980. Depuis mars 1980, il est président de la Kredietbank. A. Vlerick est également président de la N.V. Investco. W. De Clercq est administrateur d’ACEC et d’UCO depuis 1978.
-
[3]
P. Wigny, Propos constitutionnels, Bruylant, Bruxelles, 1963.
-
[4]
Il n’est besoin que de consulter les archives de l’Administration du Budget pour se rendre compte combien ce chiffre de 100 milliards a pu apparaître fatidique.
-
[5]
Rappelons que pour des raisons diverses, le gouvernement Harmel s’était trouvé devant un feuilleton de ± 20 milliards – montant démesuré pour l’époque. Evoquant cela, un parlementaire de l’opposition put parler de "train fou lancé dans le brouillard".
-
[6]
Il paraît nécessaire de préciser clairement qu’il s’agit des principes généraux et non de l’intention explicite de réaliser telle ou telle mesure.
-
[7]
Disons qu’il ne sera pas fait mention de la déclaration de juin 1974 de caractère essentiellement communautaire et qui ne fait que confirmer les positions économiques et sociales de celle du 30 avril.
-
[8]
Rapports du groupe de travail technique chargé de formuler des suggestions en vue de freiner, dans l’immédiat, le déficit de financement de l’Etat, 6 mai et 19 juillet 1976.
-
[9]
Du moins par rapport aux valeurs généralement admises en 1965 – Aujourd’hui, un feuilleton de 20 milliards serait considéré comme un exceptionnel succès.
-
[10]
L’affaire récente de la R.T.T. l’a montré.
-
[11]
H. Jegers, Notions de droit budgétaire, polycopie, Cour des comptes, 1958 et 1962.
I – INTRODUCTION
1Le budget de l’État n’est pas exclusivement un tableau de chiffres. Il est avant toute chose la traduction d’une vision politique nette autant que faire se peut.
2Comprendre l’exécution d’un budget et l’attitude d’un gouvernement à son égard, c’est donc avant tout rechercher quelles intentions sous-tendent une présentation déterminée.
3L’appréhension de la politique budgétaire se heurte ainsi à un écueil fondamental : comment l’appréhender ?
4Bien entendu, on dispose tous les ans de l’Exposé général du Budget et des débats parlementaires qui permettent de dégager les principes de la gestion budgétaire d’une période déterminée.
5Mais dominée par des facteurs circonstanciels, une telle approche n’est finalement que peu satisfaisante. Elle ne permet pas de dégager la conception de politique budgétaire qui guide l’action gouvernementale.
6C’est donc au niveau de la "charte fondamentale" d’un gouvernement, la déclaration gouvernementale, que l’on peut retrouver les intentions exprimées par un gouvernement de la manière à la fois la plus fine et la plus claire.
7L’objectif du présent Courrier est par conséquent de rechercher comment les coalitions successives ont pu ressentir et traduire les impératifs budgétaires du pays.
II – CONTEXTE PARLEMENTAIRE
8Le régime politique belge est bicaméral, la structure du gouvernement n’étant que le reflet des majorités qui peuvent se dégager au niveau des Chambres législatives.
9Le tableau que l’on trouvera ci-après donne la composition de la Chambre des représentants et du Sénat après chaque élection législative de 1958 à 1978.
Chambre des Représentants et Sénat : nombre de sièges par parti - 1958-1978(x),(1),(2)
Chambre des Représentants et Sénat : nombre de sièges par parti - 1958-1978(x),(1),(2)
(x) Sénateurs élus directement, provinciaux et cooptés.(1) Dont 3 P.L.D.P.
(2) Dont 2 P.L.D.P.
10Ce tableau appelle plusieurs commentaires :
- la forme du tableau résulte déjà de regroupements provenant de situations spécifiques :
- en 1958, dans les provinces de Limbourg et de Luxembourg, libéraux et socialistes se présentaient en un cartel qui recueillait respectivement 3 et 2 sièges à la Chambre et 1 siège dans chacune de ces provinces au Sénat (élection directe) ;
- en 1961, outre les partis traditionnels, deux formations recueillaient un siège à la Chambre : il s’agit du Rassemblement national à Bruxelles et du Parti social indépendant à Mons ;
- en 1965, apparaît à Bruxelles le F.D.F. qui recueille 3 sièges à la Chambre et 1 au Sénat. Deux petites listes préfigurant le R.W. recueillent chacune un siège à la Chambre, respectivement à Charleroi (Hainaut) et à Liège. Les libéraux se présentent sous l’étiquette P.L.P. (P.V.V. en néerlandais). Enfin, un député de l’Union de la Gauche socialiste est élu sur la liste P.C.B. à Bruxelles ;
- en 1968, à Bruxelles, les sociaux-chrétiens se présentent à la fois sous l’étiquette P.S.C. (tendance Persoons, 1 seul siège – à la Chambre –) et sous celle du cartel V.d.B.-C.V.P. (tendance Vanden Boeynants alliée au C.V.P.) [1], tandis que des listes séparées de socialistes flamands (Rode Leeuwen) apparaissent et recueillent 2 sièges à la Chambre et 1 au Sénat. D’autre part, apparaît dans la partie wallonne du pays une nouvelle formation alliée au F.D.F. à caractère communautaire, le R.W., élargissement du Parti wallon dont faisaient partie les 2 députés élus sur de petites listes wallonnes en 1965 ;
- en 1971, des listes communes au C.V.P. et au P.S.C. sont déposées à Bruxelles tandis que les "Rode Leeuwen" continuent à se présenter séparément, ne conservant qu’un député et un sénateur provincial. Egalement à Bruxelles, les listes "P.L.P.-P.V.V." sont concurrencées par celles du "P.L.P. de la région bruxelloise" (3 députés + 2 sénateurs élus directs) ;
- en 1974, à Bruxelles, un cartel s’est formé entre le F.D.F. et le P.L.D.P. (ex-P.L.P. de la région bruxelloise : 3 députés + 3 sénateurs) tandis que les trois partis nationaux se présentent sur des listes séparées plus ou moins selon le critère linguistique. En Wallonie, le P.C.B. participe en plusieurs endroits à des cartels d’Union démocratique et progressiste (U.D.P.), d’où un sénateur élu direct du Groupement politique des Travailleurs chrétiens à Mons-Soignies ;
- en 1977, le P.L. (ex-P.L.D.P.) ne fait plus de cartel avec le F.D.F. à Bruxelles mais rejoint la "famille libérale" dont l’élément wallon est devenu le P.R.L.W. (P.L.P. wallon + une partie du R.W.). Un cartel P.S.B.-R.W. apparaît dans le Luxembourg (1 député et 1 sénateur élu direct, tous deux P.S.B.) ;
- en 1978, deux nouvelles formations recueillent un siège à la Chambre : l’Union démocratique pour le Respect du Travail (U.D.R.T.) à Bruxelles et le cartel "Vlaams Blok" à Anvers (au profit de sa composante "Vlaams-Nationale Partij" qui a repris l’étiquette "Vlaams Blok" après la dissolution de ce cartel).
- les intervalles entre élections : on sait que l’intervalle maximum entre deux élections législatives est de 4 ans. Le morcellement des voix rendant difficile la formation de majorités stables et homogènes dans les deux Chambres est l’une des causes (mais non la seule) de ce que les électeurs sont, pendant la période 1961-1978, allés aux urnes deux fois de trop par rapport aux exigences légales ;
- l’éparpillement des voix implique également le recours obligé à deux des trois partis "nationaux" pour former un gouvernement, ce qui implique nécessairement la renonciation à des prises de position trop marquées sur le plan idéologique de la part de chacun des partenaires.
11Comme on le verra ci-après, ceci conduit à une appréhension apparemment toujours identique de la politique budgétaire quelle que soit la coalition au pouvoir.
III – STRUCTURE GOUVERNEMENTALE
12Le tableau ci-après fournit la structure des gouvernements en fonction pendant la période considérée (1961-1979).
Structure gouvernementale en rapport avec la politique budgétaire
Structure gouvernementale en rapport avec la politique budgétaire
13Disons immédiatement qu’afin d’alléger la lecture de ce tableau, les remaniements sans changement de coalition n’ont été mentionnés que lorsqu’ils concernaient la gestion des finances publiques. Il n’y a d’ailleurs eu que deux cas :
- M. Tielemans, socialiste flamand, ministre-Secrétaire d’État adjoint au ministre des Finances et chargé des problèmes budgétaires, est décédé et a été remplacé par M. Desruelles (P.S.B. wallon) le 18 janvier 1963.
- M. Denis (P.S.B. wallon) remplace M. Cools (idem) au poste de ministre du Budget, M. Cools restant vice-Premier ministre, le 22 février 1971.
14Cela étant, ce tableau appelle plusieurs commentaires.
15Constatons d’abord que la période envisagée couvre onze gouvernements, le poste de Premier ministre étant occupé par sept personnes différentes : 6 sociaux-chrétiens et 1 socialiste. En considérant chaque "famille" politique traditionnelle comme étant restée un seul parti, 7 gouvernements sur les 11 retenus apparaissent comme des "bipartites" (unissant les sociaux-chrétiens dans 4 cas aux socialistes et dans 3 cas aux libéraux), 3 des "tripartites" (l’une "traditionnelle", la 2e comprenant le P.S.C.-C.V.P., le P.L.P.-P.V.V. et le R.W. – qui sera tardivement exclu du gouvernement –, et la 3e comprenant le P.S.C.-C.V.P., les P.S. et B.S.P. et le F.D.F. – exclu le 16 janvier 1980 du gouvernement Martens), et enfin une "quadripartite" (P.S.C.-C.V.P., P.S.B.-B.S.P., V.U. et F.D.F.).
16Notons également que des "accidents de parcours de diverses natures ont donné à ces onze gouvernements au cours de la période étudiée, vingt-sept compositions différentes en termes de personnes.
17Les deux dernières colonnes du tableau fournissent une indication sur les responsables de la politique budgétaire à savoir les ministres ayant la responsabilité des finances et du budget.
18Les finances ont connu huit titulaires différents et le budget douze de 1961 à 1979.
19Le ministre des Finances est un personnage qui a rang de ministre à part entière, alors que le statut du titulaire du Budget a évolué sans cesse : dans les trois premiers gouvernements de la liste, il s’agit d’un ministre-secrétaire d’État adjoint au ministre des Finances. Dans le premier gouvernement Vanden Boeynants, le titulaire du Budget occupe également la charge de vice-Premier ministre. Dans le gouvernement Eyskens de 1968, M. Cools devient ministre-secrétaire d’État au Budget, mais dès le décès de M. Merlot, il devient également vice-Premier ministre. En 1971, pour des raisons de dosage, on lui adjoint un ministre du Budget, M. Denis. Sous le 2e gouvernement Eyskens, F. Van Acker, secrétaire d’État au Budget est adjoint à M. Cools, vice-Premier ministre. Lorsque M. Leburton occupait la charge de Premier ministre, le secrétaire d’État au Budget (M. Humblet) était adjoint à M. Tindemans qui cumulait cette tutelle avec la vice-présidence du Conseil, un poste essentiel en matière communautaire. Depuis 1974, M. Geens qui cumulait les fonctions de secrétaire d’État au Budget et à la Politique scientifique était rattaché au Chef du gouvernement, avant d’accéder le 8 décembre 1976, au rang de ministre des mêmes départements pour maintenir la parité linguistique au sein d’un Conseil des ministres élargi. Dans les deux gouvernements suivants, M. Eyskens (fils de l’ancien Premier ministre G. Eyskens), a cumulé les fonctions de secrétaire d’État au Budget (adjoint au Premier ministre) et à l’Économie régionale flamande (adjoint au ministre des Affaires flamandes). Enfin, dans l’actuel gouvernement Martens, le poste du Budget a été confié à l’un des trois vice-Premiers ministres, M. Guy Spitaels.
20Mais s’il faut considérer un aperçu comme celui-ci avec beaucoup de nuances, les constatations qui en découlent fournissent une indication précieuse sur les lignes de force des préoccupations gouvernementales en matière de politique budgétaire.
21Le Ministère des Finances reste à tous coups un portefeuille important occupé par un titulaire dont le passé politique ou scientifique fait de lui un personnage de premier plan. MM. Van Houtte, G. Eyskens, Dequae et De Clercq ont déjà été Premier ministre ou au moins ministre. MM. Henrion et Vlerick ont des responsabilités considérables dans le monde financier [2]. MM. Van Houtte, G. Eyskens, Henrion, Vlerick sont professeurs d’universités. M.G. Geens a été directeur du Centre d’études du C.V.P. et du P.S.C. (le CEPESS).
22Le budget, par contre, n’a été généralement confié qu’à des hommes en début de carrière ministérielle (dont deux fils d’anciens Premiers ministres, MM. Frank Van Acker et Mark Eyskens) : dans la plupart des cas de la liste ci-devant, la responsabilité en matière budgétaire correspond à la première fonction ministérielle.
23Trois correctifs notables méritent d’être signalés : dans le gouvernement Vanden Boeynants, M. De Clercq retrouve le portefeuille du budget déjà occupé en 1960, mais cette fois accompagné de la charge de vice-Premier ministre ; dans le gouvernement Eyskens, M. Cools, simple ministre-secrétaire d’État au Budget devient également vice-Premier ministre, après le décès de M. Merlot (A.R. du 27 janvier 1969) ; enfin, il y le cas de M. Spitaels, déjà ministre (de l’Emploi et du Travail) dans les deux précédents gouvernements.
24Ces indices, insistons bien sur cette qualification, montrent que les soucis gouvernementaux ont généralement porté plus sur l’instrument "recettes" que sur l’instrument "dépenses". Certes, la personnalité des titulaires et les caractères propres à l’équipe ont dans de nombreux cas pondéré cette observation qu’on ne peut cependant manquer de faire.
IV – LES DECLARATIONS GOUVERNEMENTALES
25Document sui generis, la déclaration gouvernementale n’a aucune valeur juridique probante [3]. Elle est cependant un pacte politique entre les partenaires au gouvernement et le premier exposé de leurs intentions.
26A ce titre, elle est sans doute la première source de l’appréhension de la vision des gouvernants sur l’emploi de la politique budgétaire. Certes, on ne peut, de par sa nature même, l’envisager sans réserves. En effet, il ne s’agit en aucune manière de faits, mais uniquement de principes présentés sous une forme telle qu’ils soient en tout état de cause politiquement acceptables.
27Outre la question de présentation, la déclaration gouvernementale se caractérise également par le "wishfull thinking" car elle devrait contenir les lignes forces de l’action idéale du gouvernement qui la présente indépendamment des circonstances extérieures.
28Sous ces réserves, elle reste quand même un guide irremplaçable de la politique gouvernementale sous tous ses aspects. Il est donc indispensable dans le présent travail d’en analyser les aspects qui relèvent de la politique budgétaire.
29* * *
30Pour ce qui est de la forme, jusqu’en 1965, le document publié est un discours du chef du gouvernement aux assemblées législatives.
31M. Harmel a institué une nouvelle habitude : celle d’annexer à la déclaration, le texte de l’accord politique entre partis membres de la coalition au pouvoir, ce qui implique qu’une série de renseignements plus précis peuvent être tirés de ce dernier document, plutôt que de débats parlementaires dont la caractéristique fondamentale est de rester cantonnés dans des généralités prudentes sauf lorsqu’il s’agit de problèmes particulièrement brûlants.
32Dans ce cadre, on peut d’ailleurs remarquer une évolution dans l’importance relative accordée aux divers aspects de la politique gouvernementale : on remarquera bien évidemment que ceux-ci épousent étroitement les aléas de la gestion publique.
33C’est ainsi que la déclaration de septembre 1960 est marquée par les événements douloureux qui se déclarent en Afrique. D’autre part, un seuil psychologique est franchi : le budget ordinaire de l’État franchit le cap de 100 milliards [4], ce qui justifie l’importance accordée au fonctionnement des services. Enfin la conjoncture chancelante conduit à mettre l’accent sur l’expansion économique et la réduction du nombre de chômeurs.
34Le gouvernement suivant (mai 1961) se trouve influencé par la situation des grèves de décembre 1960 et janvier 1961. Dès lors, la situation intérieure sur le plan social et économique retiendra son attention de manière privilégiée. La situation économique étant en voie de s’améliorer, l’idée force qui surgit est de guider l’expansion et non plus de la susciter.
35Sortant d’une période d’expansion, le gouvernement Harmel (1965) s’attachera en ordre principal à des mesures d’ordre structurel sur le plan économique et social. Les premières allusions précises à une Belgique régionale apparaissent. Cependant, pour la première fois, l’annexe contenant les dispositions techniques (l’accord politique) se réfère avec rigueur à la politique conjoncturelle.
36La déclaration du gouvernement Vanden Boeynants (1966) est toute entière dominée par "l’accident" budgétaire qui vient de se produire [5]. Aussi, la santé des finances publiques est-elle la préoccupation essentielle.
37Le 6 février 1968, le gouvernement Vanden Boeynants tombe sur le problème de Louvain, marquant ainsi non le début de nos problèmes communautaires, mais plutôt l’urgence de sa phase aiguë. Aussi, l’accord politique annexé fait-il la place la plus large aux relations communautaires et aux aspects de décentralisation qui en résultent.
38Le gouvernement Eyskens entré en fonction en janvier 1972 doit faire face à une véritable catastrophe sur le plan conjoncturel, d’autant plus violente qu’elle n’avait quasiment pas pu être prévue. Aussi, n’est-il pas étonnant que l’objectif majeur de ce gouvernement ait été la relance.
39Un an après, le gouvernement Leburton axera ses efforts sur la politique communautaire et sur les problèmes posés par l’article 107 quater de la Constitution.
40Enfin, en avril 1974, le gouvernement Tindemans devra faire face à une situation d’autant plus grave qu’elle défie l’analyse économique traditionnelle : la persistance de tensions inflationnistes graves accompagnées de récession sévère.
41Cas particulier dans le bref aperçu qui vient d’être fait, l’entrée du R.W. en juin 1974 dans le gouvernement, suite aux accords de Steenokkerzeel conduisait le Premier ministre à présenter une nouvelle déclaration de caractère essentiellement communautaire.
42Au-delà de ce moment, les gouvernements successifs (Tindemans II, Vanden Boeynants et Martens) ont du faire face à une situation de plus en plus dramatique sur le plan économique.
43En matière budgétaire, ils auront à résoudre un dilemme douloureux : comment assainir les finances publiques alors que la crise impose un effort supplémentaire ?
44* * *
45On peut dès lors constater que dans les diverses déclarations, les mêmes objectifs interviennent de manière semblable. Certes, il peut exister une pondération due aux circonstances économiques (la stabilité des prix n’est mentionnée explicitement qu’à partir de 1965 et ne devient un objectif primordial qu’à partir de 1972) ou au fragile équilibre des coalitions (la politique familiale se nuance différemment selon les équilibres intervenus entre les catholiques et les autres formations).
46Il n’en reste pas moins que de manière générale, tous les gouvernements ont attaché une semblable importance aux mêmes objectifs, ce qui explique la relative homogénéité du gouvernement en Belgique pendant toute la période de 1961 à 1974.
47Le problème change considérablement d’aspect lorsque l’on relit les mêmes documents sous l’angle de leurs positions vis-à-vis de la dépense publique [6].
1 – Déclaration de septembre 1960
48Cette déclaration se base sur deux considérations :
- le contrôle des dépenses avec comme corollaire l’assainissement structurel du budget. Pour ce faire, elle envisage d’imposer aux membres du gouvernement le respect strict des données budgétaires ainsi que l’assainissement des secteurs déficitaires. L’objectif est de contenir la croissance exagérée des dépenses afin de rétablir l’équilibre du budget ;
- sur le plan des investissements, on envisage de les insérer dans un programme de 15 ans, le financement devant être réalisé par un Fonds autonome qui pourra en envisager tant les aspects conjoncturels que structurels.
2 – Déclaration de mai 1961
49Pour ce qui est du maniement de la dépense publique, celle-ci est en retrait sur la précédente. Elle pose en effet pour principe que l’instrument essentiel en matière de conjoncture est la fiscalité, l’utilisation de la dépense publique devant avoir des objectifs structurels.
50D’autre part, elle vise à la compression des dépenses improductives et à la mise au point d’une situation budgétaire nette.
3 – Déclaration de juillet 1965
51Plus précise que les précédentes sur le plan de la croissance des dépenses publiques, elle fixe une norme : la croissance du P.N.B. et un objectif, l’équilibre du budget ordinaire. Elle vise par conséquent l’élimination du déficit budgétaire et la compression des dépenses improductives.
52En matière d’investissements, elle envisage l’élaboration d’un programme pluriannuel d’investissements publics, ainsi que la création d’un volant conjoncturel des travaux publics.
4 – Déclaration de mars 1966
53Profondément marquée par les incidents qui ont perturbé l’exécution du budget de 1965, la déclaration de 1966 sans rejeter le rôle structurel du budget de l’État, vise surtout des objectifs d’assainissement que l’on peut résumer par un freinage draconien assorti du contrôle des dépenses en vue de réaliser de manière progressive le retour à un équilibre structurel du budget.
5 – Déclaration de juin 1968
54Face à une situation financière relativement assainie, la politique budgétaire vient à l’arrière-plan des préoccupations du gouvernement qui entre en fonction à ce moment. Aussi, faut-il rechercher, non dans la déclaration, mais dans l’accord politique qui y est annexé, les considérations sommaires qui se réfèrent au budget de l’État et qui sont en fait guidées de manière pratiquement exclusive par des soucis à caractère structurel ; on note ainsi la mise au point d’une nouvelle norme de croissance : la moyenne de la croissance du budget des deux dernières années et la mise en place d’une programmation financière en fonction des objectifs économiques et sociaux.
6 – Déclaration de janvier 1972
55Face à une situation économique grave, la déclaration gouvernementale en janvier 1972 donne une place essentielle aux problèmes budgétaires dans ses soucis.
56Sur le plan conjoncturel, elle propose la mise en place d’un déficit budgétaire pour lutter contre la récession qui s’annonce : elle crée un fonds de soutien conjoncturel qui, doté de moyens de trésorerie, aura pour but de soutenir des actions de relance figurant au budget ordinaire. Quant aux investissements, ils sont accrus par un programme exceptionnel de relance de 10 milliards qui vient s’ajouter aux moyens normalement mis en œuvre.
57Sur le plan structurel, la déclaration est axée sur une programmation financière, le contrôle constant et rigoureux de l’exécution du budget et la mise en œuvre d’un budget unique destiné à pallier aux inconvénients qui pouvaient être ceux de la présentation en vigueur du budget.
7 – Déclaration de janvier 1973
58Les soucis conjoncturels de la déclaration gouvernementale de 1973 sont relativement réduits. Ils se limitent pratiquement à évoquer la nécessité d’une discipline budgétaire stricte pour l’année en cours et cela dans le but de réaliser l’équilibre budgétaire. Non qu’elle renie le rôle conjoncturel du budget : seulement, les circonstances ne justifient pas autre chose.
59Cette ambiguïté de la position du gouvernement est traduite dans l’accord politique annexé par une remarquable définition du budget :
"Le budget est la résultante des politiques que le gouvernement compte mettre en œuvre dans les divers secteurs et tout particulièrement dans le domaine économique et social. Si le budget doit ainsi répondre à des objectifs structurels, il doit aussi contribuer à une évolution conjoncturelle satisfaisante".
61Au point de vue structurel, plusieurs éléments nouveaux doivent être pris en considération ; on doit citer :
- l’insertion du budget dans les lignes de force du plan ;
- la recherche de l’harmonisation internationale dans le cadre de l’union économique et monétaire ;
- enfin, une nouvelle norme de croissance : une expansion structurelle de la dépense est une conséquence normale de la croissance économique rapide et de l’augmentation du bien-être général.
8 – Déclaration d’avril 1974 [7]
62Sur le plan budgétaire, cette déclaration est pratiquement axée de manière exclusive sur les problèmes conjoncturels, les aspects structurels n’étant représentés que par d’insignifiantes mesures de gestion comme l’étude des coûts de fonctionnement de l’administration, le contrôle des subsides, la création d’un budget de programme et le contrôle du respect de la législation sur les marchés publics. Au point de vue conjoncturel, les mesures sont nombreuses et diversifiées :
- fixation d’un plafond strict des dépenses publiques ;
- maintien de l’équilibre budgétaire ;
- élimination de toute impulsion complémentaire résultant des investissements publics ;
- fixation de priorités absolues dans les dépenses ;
- association des pouvoirs subordonnés à la modération conjoncturelle des dépenses.
9 – Déclaration de juin 1977
63La déclaration gouvernementale du gouvernement Tindemans II apparaît dans un contexte très particulier. D’une part, la crise économique devient de plus en plus profonde et inquiétante, exigeant de la part des pouvoirs publics un effort particulièrement lourd. D’autre part, le monde politique a été fortement commotionné par la publication récente du rapport Van Houtte [8]. Rappelons que celui-ci dénonçait avec énergie la détérioration de la situation de nos finances publiques.
64Aussi, la déclaration gouvernementale porte-t-elle les traces de cette double influence. D’une part, elle donne la priorité à la lutte contre l’inflation et à la création d’emplois au départ de l’investissement public. D’autre part, elle prône la remise en état des finances publiques.
65Ainsi, elle commence par un diagnostic en deux points :
- la détérioration budgétaire est le résultat de la crise ;
- le déficit des finances publiques résulte de ce que l’accroissement des dépenses du chômage n’est pas compensé par une augmentation correspondante de recettes.
66Le programme qui en résulte est alors le suivant :
- maîtriser le rythme de croissance des dépenses publiques par un plan quinquennal d’assainissement ;
- lutter contre la fraude fiscale ;
- mais la conjoncture restant hésitante, il n’y a pas lieu de tendre vers un équilibre budgétaire rigoureux.
67Ajoutons à cela que le gouvernement Vanden Boeynants (octobre-décembre 1978) a simplement repris l’action du gouvernement précédent, en annonçant qu’il poursuivait la politique de rigueur budgétaire.
10 – Déclaration d’avril 1979
68Après la très longue vacance de pouvoir que connut la Belgique après les élections de décembre 1978, la situation économique et financière du pays s’est encore détériorée. Dès lors, outre les aspects communautaires, la politique financière et budgétaire prend une dimension inusitée.
69La déclaration commence par centrer son analyse sur un diagnostic en 5 points :
- les déficits budgétaires s’accroissent ;
- la charge de la dette devient plus lourde ;
- le financement de celle-ci devient plus difficile ;
- le financement monétaire est à déconseiller car il risque de raviver l’inflation ;
- les limites de l’imposition fiscale et parafiscale sont atteintes, ce qui n’exclut pas une certaine redistribution.
70Ce dernier élément est capital et entièrement neuf : il indique pour la première fois une volonté explicite du gouvernement de renoncer à des accroissements inconsidérés de recettes.
71Dans la gestion gouvernementale, ces considérations se traduiront par une gestion en 3 axes :
- les contraintes budgétaires comportant :
- la maîtrise des finances publiques par l’exécution d’un plan pluriannuel ;
- le principe de la croissance zéro ;
- l’exécution stricte de la loi anticrise.
- la programmation financière comportant :
- la création d’un tableau de bord du financement de l’économie ;
- l’affectation des ressources par programme ;
- la lutte contre le gaspillage ;
- la réévaluation du programme d’investissements.
- les aménagements fiscaux compte tenu du fait que :
- la pression fiscale est maximale ;
- le régime fiscal doit tendre vers plus d’équité.
72* * *
73Dans une analyse de ce type, on ne saurait cependant passer sous silence une déclaration gouvernementale d’un type particulier. Il s’agit de la déclaration de M. Harmel, Premier ministre, devant la Chambre le 9 novembre 1965.
74A l’opposé des précédentes, il ne s’agit pas d’une déclaration d’investiture, mais plutôt d’une "communication" du gouvernement sur la situation du budget ou si l’on préfère une image, une sorte de "message sur l’état du budget", un peu à l’instar du message sur l’État de l’Union, que le président des États-Unis remet au Congrès chaque année, le 20 janvier, et qui comporte à la fois un diagnostic et une déclaration d’intention.
75Inhabituelle dans sa forme (une telle manière de procéder est rarissime en matière budgétaire), cette communication l’est également par le fond.
76Diagnostic lucide et douloureux d’une véritable catastrophe budgétaire) [9] elle est la meilleure analyse qui ait jamais été faite des relations entre le budget de l’État et la situation belge dans son ensemble. Sous cet aspect, elle mérite une place particulière dans notre analyse. Ne sera abordé ici que le diagnostic, les mesures qui en découlent ayant un caractère beaucoup plus circonstanciel ; celui-ci s’articule autour des excès suivants :
- une conséquence d’une surchauffe générale sur le plan européen ;
- une fâcheuse habitude de résoudre nos affrontements politiques aux dépens des finances publiques ;
- une conscience affaiblie de la responsabilité politique en cas de dépassement budgétaire sans autorisation préalable ;
- les évaluations insuffisantes de peur de présenter un budget en déséquilibre ;
- les engagements pris après le vote du budget sans information suffisante sur leur coût ;
- l’établissement tardif des feuilletons de crédits supplémentaires au moment où il est impossible de peser sur les décisions déjà engagées dans les faits.
77Cette analyse reste pleinement valable aujourd’hui : on peut en effet rattacher chacun des éléments de ce diagnostic à des problèmes propres à notre situation actuelle.
78Quant à la surchauffe : la référence à l’origine internationale des incidents conjoncturels est fréquente sinon systématique au cours des débats budgétaires en Belgique : voir entre autres la discussion du budget des Voies et Moyens de 1972, l’Exposé général de 1975.
79Quant à l’habitude de résoudre nos affrontements : rien de nouveau sur ce plan : de la guerre scolaire aux affrontements communautaires, toutes les décisions destinées à restaurer la "paix" en Belgique ont été prises sans considération de l’état de nos finances publiques.
80Quant à la conscience affaiblie de la responsabilité politique : il faut bien considérer [10] que si la loi du 6 juin 1921 organise la responsabilité des ordonnateurs, celle-ci n’a jamais pu être réellement mise en cause. A quatre reprises [11], suite à des actions de la Cour des comptes, un ministre a été amené à couvrir – a posteriori – les agissements d’un ordonnateur.
81Quant à la responsabilité ministérielle sur le plan juridique, à défaut d’un texte légal, elle ne peut dans la pratique, être mise en cause. Sur le plan politique, le désintérêt de l’opinion publique pour les problèmes budgétaires (une interview de M. Henrion à Spécial le confirmait), rend illusoire toute sanction politique d’une négligence budgétaire.
82Quant aux évaluations insuffisantes : on peut dire de manière générale que leur pratique s’est amplifiée et systématisée : directement par des sous-estimations délibérées de dépenses (évaluation du nombre de chômeurs ou hausse de l’index) ou des surestimations de recettes (lutte contre la fraude fiscale) ou indirectement par des artifices comptables (affectation de recettes, débudgétisation).
83Quant aux engagements pris après le vote du budget : sans doute sont-ils moins nombreux et sans vouloir faire une liste systématique, on pourrait relever certains faits qui indiquent que ce problème subsiste malheureusement :
- comme les discussions parlementaires l’ont montré, le problème des fusions de communes a été abordé sans aucune analyse des conséquences financières de celui-ci ;
- la loi de 1846, reprise par celle de 1963, prévoyait que toute proposition de dépense nouvelle devait être accompagnée des propositions de recettes correspondantes. Cette disposition est tombée en désuétude.
84Quant à la fluidité de la décision et du contrôle : il s’agit bien entendu d’un problème en relation directe avec la stabilité gouvernementale. Le tableau du gouvernement mentionné plus haut indique qu’à tout le moins, celle-ci ne s’est pas renforcée, ce qui concorde d’ailleurs avec le fait que la durée entre deux élections générales, se réduit, d’où augmentation des périodes d’insécurité sur le plan de la gestion.
85Quant à l’établissement tardif des feuilletons : sur ce plan – et sur ce plan seulement – un progrès net a été enregistré : depuis 1967, sauf circonstances politiques exceptionnelles (démission du gouvernement – proximité des élections communales), l’Exposé général du budget a toujours été déposé avec un battement inférieur à 7 jours par rapport à la date légale du 30 septembre.
V – CONCLUSIONS
86Comme les lignes qui précèdent permettent de le constater, si les mots restent les mêmes, la réalité politique qu’ils recouvrent diffère sensiblement à la fois en raison de divergences idéologiques parmi les membres de la coalition au pouvoir et des circonstances qui pèsent particulièrement sur la gestion publique.
87Remarquons d’abord un accord général : celui relatif au rôle structurel de l’instrument des dépenses publiques. Rien là que de bien évident.
88Mais au-delà de cet aspect, c’est à la fois dans la constitution du gouvernement et dans l’emploi des dépenses que l’on décèlera des oppositions.
89On pourra ainsi distinguer deux étapes jusqu’en 1968, les gouvernements qui se forment auront pour objectif primordial le maintien de la croissance du budget dans des limites qui seront d’ailleurs fixées de manière variable. Cet objectif devra être assuré en ordre principal par l’assainissement de secteurs structurellement déficitaires, le contrôle du coût et le fonctionnement des services.
90La politique conjoncturelle devra être assurée essentiellement par le maniement des investissements publics, le gouvernement Lefèvre-Spaak allant jusqu’à préciser qu’en matière conjoncturelle, préférence devrait être accordée à la fiscalité.
91A partir de 1972, le déficit des opérations courantes sera accepté et considéré comme un instrument valablement utilisable dans le cadre conjoncturel. Cette position sera réaffirmée avec des tonalités diverses dans les trois déclarations qui vont suivre.
92Mieux, la modération des dépenses cessera d’être considérée comme un objectif essentiellement structurel pour être acceptée dans ses aspects conjoncturels. Aussi, la déclaration de 1974 introduira-t-elle un élément nouveau : l’association des pouvoirs subordonnés à une telle modération.
93Au-delà de cette période, le gouvernement s’apprête à "vivre" avec un déficit d’autant plus mal perçu que la situation financière devient plus douloureuse.
94Il faudra attendre 1979 pour que la situation budgétaire apparaisse comme suffisamment tragique pour que l’on envisage d’agir à la fois sur les affectations et les ressources.
95* * *
96Cette évolution de l’appréciation des organes politiques, ira de pair avec une meilleure différenciation entre le rôle structurel et conjoncturel de la dépense publique.
97La norme de croissance révélera ceci : avant 1965, l’objectif est une norme simple qui se résume uniquement en un freinage draconien des dépenses. A partir de 1965, une première norme associera la croissance du budget à celle du P.N.B. En 1968, la norme de croissance associera le budget à la croissance moyenne des budgets des deux dernières années. Enfin, la conception de 1973 clarifiera d’une manière rigoureuse la distinction entre rôle conjoncturel et rôle structurel en introduisant explicitement les deux notions :
- la croissance structurelle de la dépense devra être liée à la croissance économique et à une augmentation du bien-être général ;
- dans ce cadre, le budget devra contribuer à une évolution conjoncturelle satisfaisante.
98Ensuite, la norme de croissance évoluera d’abord vers un laxisme keynesien puisque la déclaration de 1977 dira textuellement qu’"en cette période de conjoncture hésitante, une politique rigoureuse d’équilibre budgétaire ne pourra qu’accentuer les difficultés de la relance".
99Ce n’est qu’en 1979 que la situation deviendra drastique puisque définie de manière explicite comme étant la croissance zéro.
100* * *
101L’analyse des déclarations gouvernementales successives montre un certain nombre de caractéristiques communes :
- une certaine absence d’originalité : on retrouve à des degrés divers les mêmes propositions, les mêmes idées. Tout se passe comme si quelle que soit l’orientation du gouvernement, la politique budgétaire était vue de manière à peu près semblable, ce qui peut paraître paradoxal eu égard aux positions propres des partis ;
- l’absence d’analyse de la situation budgétaire : il est frappant de constater que les principes budgétaires mis en avant dans les diverses déclarations gouvernementales ne reposent pas sur un diagnostic explicite et significatif de la situation réelle du budget.
Les analyses se limitent en général à de grands traits non appuyés sur la réalité de la situation budgétaire ; sans doute s’agit-il ici d’un caractère commun à la plupart des aspects importants de la gestion publique belge : une majeure partie des décisions importantes de la période envisagée par le présent article a été prise sans examen préalable attentif des implications financières ; - les prises de position budgétaires contenues dans les déclarations gouvernementales paraissent le plus souvent dominées par leur caractère circonstanciel. En effet, les aspects structurels sont généralement abordés de manière floue alors que dans tous les cas, les problèmes immédiats sont évoqués avec une relative netteté.
102S’il faut porter un jugement d’ensemble sur les aspects budgétaires de ces déclarations, on peut regretter leur absence de technicité alors qu’en bien d’autres matières, ils sont d’une minutie extrême.
103Peut-être cela est-il dû aux conditions dans lesquelles se déroulent les négociations y relatives.
104En tout état de cause, et du fait même de l’acuité croissante des problèmes budgétaires belges, on peut s’attendre à une rigueur accrue dans ce domaine.
Notes
-
[1]
C’est aussi l’époque du "distanciement" entre C.V.P. et P.S.C. Les deux autres grands partis nationaux traditionnels se scindent à leur tour ultérieurement (le P.L.P.-P.V.V. par étapes, le P.S.B.-B.S.P. brusquement en 1978). Voir X. Mabille, "Le système des partis dans la Belgique post-unitaire", C.H. du CRISP n°864 du 28 décembre 1979, 24 p.
-
[2]
Rappelons les principaux mandats d’administrateur détenus par les titulaires successifs du portefeuille des Finances : J. Van Houtte est administrateur de Cobepa et a été président du conseil d’administration jusqu’en mars 1975. A. Dequae est président des Assurances du Boerenbond belge depuis 1966. Il est en outre vice-président de la Maatschappij voor Roerend Bezit van de Belgische Boerenbond. G. Eyskens a été président de la Kredietbank de mars 1974 à mars 1980 (après avoir été ministre des Finances). R. Henrion est administrateur de la Société générale de banque depuis 1960. Il a été administrateur délégué et vice-président de 1963 à 1966, président en conseil d’administration de 1967 à 1974 et président du comité de direction de 1974 à 1976. Le baron Snoy et d’Oppuers a été administrateur de la Compagnie Bruxelles Lambert jusqu’en 1978. A. Vlerick a été vice-président de la Kredietbank de 1974 à 1980. Depuis mars 1980, il est président de la Kredietbank. A. Vlerick est également président de la N.V. Investco. W. De Clercq est administrateur d’ACEC et d’UCO depuis 1978.
-
[3]
P. Wigny, Propos constitutionnels, Bruylant, Bruxelles, 1963.
-
[4]
Il n’est besoin que de consulter les archives de l’Administration du Budget pour se rendre compte combien ce chiffre de 100 milliards a pu apparaître fatidique.
-
[5]
Rappelons que pour des raisons diverses, le gouvernement Harmel s’était trouvé devant un feuilleton de ± 20 milliards – montant démesuré pour l’époque. Evoquant cela, un parlementaire de l’opposition put parler de "train fou lancé dans le brouillard".
-
[6]
Il paraît nécessaire de préciser clairement qu’il s’agit des principes généraux et non de l’intention explicite de réaliser telle ou telle mesure.
-
[7]
Disons qu’il ne sera pas fait mention de la déclaration de juin 1974 de caractère essentiellement communautaire et qui ne fait que confirmer les positions économiques et sociales de celle du 30 avril.
-
[8]
Rapports du groupe de travail technique chargé de formuler des suggestions en vue de freiner, dans l’immédiat, le déficit de financement de l’Etat, 6 mai et 19 juillet 1976.
-
[9]
Du moins par rapport aux valeurs généralement admises en 1965 – Aujourd’hui, un feuilleton de 20 milliards serait considéré comme un exceptionnel succès.
-
[10]
L’affaire récente de la R.T.T. l’a montré.
-
[11]
H. Jegers, Notions de droit budgétaire, polycopie, Cour des comptes, 1958 et 1962.