Couverture de CRIS_357

Article de revue

Le transfert du Shape et du conseil de l'OTAN en Belgique

Pages 1 à 24

Notes

  • [1]
    C’est ce qui fera dire au Premier ministre luxembourgeois, P.Werner, le 25 avril : "il est en effet incontestable que la situation géographique de nos trois pays est favorable à une telle implantation". Contre l’éventualité d’un transfert en R.F.A.,on invoque des arguments de nature politique et stratégique ("première ligne") tandis que pour la Grande-Bretagne, on redoutait de donner par là l’image d’une OTAN optant pour une position de repli au-delà de la Manche et d’une OTAN très formellement placée dans un cadre de prédominance anglo-saxonne.
  • [2]
    Le 26 avril, à la Chambre, P. Harmel avait aussi déclaré ; "jusqu’à présent, la Belgique n’a pas été sollicitée pour quoi que ce soit".
  • [3]
    Chambre des Représentants, 26 avril 1966.
  • [4]
    La Libre Belgique, 11 mai 1966.
  • [5]
    De son point de vue, le sénateur communiste, J. Terfve, estimait correctement les données quand il invitait P. Harmel, le 17 mai, à "dire non avant, pour ne pas être acculé à dire oui plus tard".
  • [6]
    spécialement des articles de J.H. dans La Libre Belgique (10, 11 et 12 mai) et celui du 25 mai dans Le Soir sous le titre : "L’OTAN en Belgique ? des charges mais aussi une occasion".
  • [7]
    Thèse belge, exposée par le Ministère des Affaires Etrangères, 3 mai 1966
  • [8]
    "Le gouvernement (grand-ducal) a informé ses partenaires que pour des raisons évidentes et en vue notamment de la vocation européenne que notre pays a déjà acceptée, l’implantation au Grand-Duché d’un organisme majeur comme, par exemple, le grand commandement intégré, se heurterait à des difficultés pratiques quasi-insurmontables" ; déclaration ce P. Werner à la Chambre ; 25 mai 1966.
  • [9]
    Dans les milieux traditionnellement préoccupés de l’unité belge, la question s’est aussi posée de savoir dans quelle mesure l’implantation atlantique, survenant en plus de celle des communautés européennes, contribuerait à une certaine "dilution" nationale belge ou au contraire permettrait aux Belges de dépasser la dualité Flandre-Wallonie en se sentant engagés très concrètement par les accords européens et atlantiques.
  • [10]
    La Libre Belgique ; 6 juin 1966.
  • [11]
    A ce moment, l’opposition publique au transfert du Shape s’exprime dans les milieux d’action pacifiste non-violente ; dans les cercles communistes (tendance Burnelle et tendance Grippa) ; l’Union de la Gauche Socialiste ; les Jeunes Gardes et les étudiants socialistes ; le M.O.C. et la F.G.T.B.-Liège ; les Vlaamse Demokraten ; la V.S.V., la C.G.S.P.-Enseignement ; le M.P.W. ; etc… Le Comité de la marche anti-atomique exprime de nettes réserves sur le transfert ainsi que la D.C.L. ; la Volksunie et des fédérations socialistes.
  • [12]
    Les décisions françaises concernaient en effet le Shape, Centre-Europe (AFCENT), le Collège de Défense, mais aussi tout un ensemble d’agences intégrées, d’états-majors et de bases nationales – américaines, canadiennes, allemandes – en France.
  • [13]
    Le Conseil Général du P.S.B. estima le 15 juin que les parlementaires socialistes n’avaient pas "à s’associer à la responsabilité politique de la décision d’implanter le Shape en Belgique".
  • [14]
    L’organe exécutif de de CISHIC est, depuis août, le CIRSH ou Comité Interministériel Restreint pour le Shape, que préside également le Comte de Kerchove et dont font partie les délégués du département-pilote, à savoir la Défense nationale et ceux des Travaux publics. Il est prévu que certains départements (spécialement les P.T.T.) seront invités par le Président à se faire représenter selon l’objet de la réunion. Le CIRSH dispose d’un secrétariat permanent au 1, rue Defacqz à Bruxelles. A noter que l’OTAN contribue aux dépenses administratives des comités à concurrence d’un pour cent du coût du transfert du Shape.
  • [15]
    Une suggestion avait été faite dès le départ et immédiatement écartée d’installer provisoirement le Shape à la Cité Administrative à Bruxelles.
  • [16]
    Document non-public mais pouvant être consulté au CISHIC par les membres de ce comité.
  • [17]
    Le bourgmestre fait état, comme argument, de la présence d’une "werkzame bevolking welke zeer rustig is en niet vatbaar voor willekeur of sociale woelingen".
  • [18]
    Solution provisoire mais immédiate : installation du Shape au nouveau Palais de Justice, au Centre Albert 1er et au Palais du Verre ; solution définitive dans la zone de Gosselies-Thiméon-Wayaux ou Mellet.
  • [19]
    Du point de vue de la langue, il faut noter l’irruption du "franglais" et de l’anglais dans les textes et rapports relatifs au transfert du Shape ; il y est question des requirements de l’OTAN ; des viabilités ; de shopping center ; du support center, de time-table, de streamlining, etc..
  • [20]
    Une visite de personnalités du Shape eut lieu en Belgique le 7 juillet sous la direction de Lord Coleridge et de l’Air Marshall Mac Bryan : elles se rendirent à Casteau, Chièvres, Charleroi et dans la région de Nivelles. Selon ces personnalités, tous ces sites étaient trop éloignés de Bruxelles.
  • [21]
    In fine, la R.T.T. trouva une solution d’attente mais pouvant être mise en œuvre dans les délais, tant pour Chièvres que pour Casteau (solution plus onéreuse, toutefois).
  • [22]
    Outre l’aspect "recrutement d’agents locaux" par le Shape et par les divers services installés dans le site, il est généralement affirmé que plus de la moitié des dépenses du personnel Shape se fait dans le pays-hôte. Or, le revenu moyen net annuel est de l’ordre de 600.000 f.b. par an pour les officiers et de 300.000 pour les autres agents. Les dépenses du Shape en Belgique ont été estimées à 130 m. f.b. par an.
  • [23]
    P. Harmel soulignait le fait qu’en compensation, une grande part du coût de la reconstruction d’un site pour le Shape (1250 millions f.b.) "sera dépensée chez nous et profitera donc à notre économie".
  • [24]
    Communiqué des Affaires étrangères, 15.9.1966.
  • [25]
    Ceci posait un problème de pré-financement et de trésorerie. C’est par un budget extraordinaire à la Défense nationale que doivent normalement être couvertes les dépenses imputables à la Belgique. A propos du coût que Shape trouvait excessif, il fut invoqué qu’il était croissant au prorata des délais à pratiquer.
  • [26]
    Cette dernière autorisation concernait les contrats passés avec les bureaux d’études et les assurances ; les contrats de construction et d’équipement et les contrats pour les "viabilités intérieures".
  • [27]
    Sept candidatures jugées dignes d’intérêt furent enregistrées et six sur les sept se soumirent à l’épreuve du projet de contrat à réaliser dans des délais très courts. Les groupes retenus ont constitué "le consortium des architectes et ingénieurs du Shape", 207, boulevard du Souverain, Bruxelles 16.
  • [28]
    Les firmes régionales et les représentants politiques de ces régions se plaignirent des procédures et délais en vigueur qui, selon eux, pénalisaient les firmes locales, de moyenne importance.
  • [29]
    Octroi sera fait aux entrepreneurs de baux emphytéotiques (30 ans ; le canon emphytéotique annuel par ha pour la location serait de 1.500 f.b.).
  • [30]
    Le 11 février 1967, notamment, la Centrale Générale des Services publics, secteur "enseignement", organisa une importante manifestation à Mons pour protester contre le fait que des fonds soient affectés à l’école du Shape alors que les établissements scolaires de la ville sont déficients.
  • [31]
    Les 4 terrains de football et la piscine ne seront pas accessibles à d’outres que les agents du Shape et leurs familles. La polyclinique sera construite intra-muros à Casteau.
  • [32]
    Ceci alimenta une campagne relative à des "accords secrets" qui auraient été signés par P. Harmel à Washington. Le 21 octobre, le ministre démentit des allégations du journal La Wallonie à ce sujet. A noter que, par ailleurs, des accords prévoient depuis 1960 le stockage d’armes atomiques tactiques en Belgique.
    Des accords bilatéraux entre la Belgique et les pays intéressés existent au sujet des installations suivantes :
  • [33]
    ) base britannique de Grobbendonk (dépôts de véhicules, matériels et approvisionnements) ; 2) dépôts allemands de munitions à Baron-ville, Arendonk et Sugny ; 3) dépôts allemands de matériel sanitaire à Nivelles et Saint-Nicolas ; 4) aérodromes canadiens de Bertrix et Saint-Hubert ; 5) installation américaine de communication à Flobecq.
  • [34]
    Ces effectifs sont fixés par le Shape et signalés à la Belgique ; ils ne peuvent être augmentés de plus de 10 % sans l’accord du pays-hôte.
  • [35]
    "En tout état de cause, nous croyons que, sauf maintien d’une coopération étroite entre les quinze dont nous conservons l’espoir, les organes de direction politique et militaire ne sauraient être situés que dans le même pays, afin d’assurer entre la politique et la stratégie, les relations étroites indispensables"
    (P. Harmel, Sénat, 25 mai 1966).
  • [36]
    "Au cas où le déplacement du siège civil de l’Alliance serait décidé, il a été dit, à Bruxelles, qu’il serait logique que l’autorité politique et l’autorité militaire suprême soient situées sur le même territoire".
  • [37]
    A noter que le 10 novembre, le Comité atlantique des plans de défense décida aussi de transférer à Bruxelles le Comité Militaire de Washington.
  • [38]
    Les Américains agrandiront leur école de Boitsfort et l’Ecole Européenne accueillera les Italiens, les Allemands, les Néerlandais.
  • [39]
    motion unanime du Conseil communal d’Ixelles ; 24 novembre 1966.
  • [40]
    Il s’agit là d’un terrain partiellement propriété de la ville de Bruxelles.
  • [41]
    Le CIROTAN, qui s’est réuni pour la première fois le 18 janvier, est présidé par le Comte de Kerchove de Denterghem et comprend le bureau du CISHIC ; un groupe de travail des Travaux publics, un représentant des Affaires étrangères et un de la Défense nationale ; un représentant permanent de la ville de Bruxelles (M. Fallas).

Chapitre 1. De la décision française à la demande officielle adressée par le Conseil Atlantique aux pays de Benelux

1La Belgique est en crise gouvernementale et le social-chrétien P.W. Segers a accepté la mission de formateur lorsque, le 21 février 1966, le Général de Gaulle fait part, au cours d’une conférence de presse, de l’intention de la France de quitter l’Organisation du Traité de l’Atlantique-Nord (OTAN) :

2

"Il s’agit, précise le chef de la Vème République, de rétablir une situation normale de souveraineté dans laquelle ce qui est français, en fait de sol, de ciel, de mer et de forces, et tout élément étranger qui se trouverait en France ne relèveront plus que des autorités françaises".

3Selon les propres termes du Général de Gaulle, l’alliance atlantique en soi n’a pas perdu sa justification mais bien l’organisation et l’intégration militaires ; "l’Occident ne se trouve plus actuellement menacé comme il l’était quand le protectorat américain fut installé en Europe, sous le couvert de l’OTAN".

4Ces intentions se trouvent précisées dans la lettre du 7 mars 1966, adressée par le Général de Gaulle au Président Johnson s la France n’envisage pas de quitter l’alliance en 1969 ("à moins d’événements qui, au cours des trois prochaines années, viendraient changer les données fondamentales des rapports entre l’Est et l’Ouest") mais, par contre, "la France se propose de recouvrer sur son territoire l’entier exercice de sa souveraineté, actuellement entamé par la présence permanente d’éléments militaires alliés ou par l’utilisation habituelle qui est faite de son ciel ; de cesser sa participation aux commandements intégrés et de ne plus mettre de forces à la disposition de l’OTAN".

5L’aide-mémoire français aux alliés (10 mars 1966) précise que ces décisions de retrait des forces françaises du dispositif intégré de l’OTAN en Europe impliquent aussi "le transfert hors du territoire français des sièges" du commandement supérieur des forces alliées en Europe (Shape), du commandement Centre-Europe et du Collège de l’OTAN.

6Le 29 mars 1966, les autorités françaises définissent le calendrier du désengagement : pour les Etats-Majors alliés et le Collège de l’OTAN, "il apparaît qu’un délai d’un an permettrait de prendre les mesures nécessaires… et qu’au 1er avril 1967 toute l’opération pourrait avoir été menée à terme".

7Avant que le gouvernement P.S.G.-P.L.P. dirigé par P. Van den Boeynants soit constitué (19.mars), les quatorze – c’est-à-dire tous les membres de l’OTAN, moins la France – se déclarent décidés à maintenir le principe de l’intégration des forces ; ils chargent le secrétaire général Brosio d’étudier les répercussions de la décision française mais en prenant comme base la continuation du système de défense intégré. Du côté belge, le nouveau gouvernement P.S.C.-P.L.P. se dira, dès sa mise en place, partisan du maintien de l’OTAN (23 mars).

8Une première allusion à un éventuel transfert du Shape en Belgique est faite par le président social-chrétien du Sénat, P. Struye, qui préconise, dans La Libre Belgique (14 mars), une grande prudence car, note-t-il, le Shape serait forcément "un des premiers objectifs de bombardements meurtriers".

9Du côté des quatorze, une étape importante est franchie le 4 avril (c’est-à-dire quelques jouis après la notification du calendrier français de désengagement) : sept groupes spéciaux sont constitués pour étudier les répercussions de la décision de Paris, dont un – le n° 4 ou Working group D – est spécialement chargé des problèmes de ré-implantation (relocation).

10En Belgique, la presse se fait déjà l’écho d’éventuelles propositions de transfert ; ainsi, le 4 avril 1966, La Cité, quotidien démocrate-chrétien, signale qu’on parle de Bruxelles ou d’un triangle Liège-Maastricht-Aix-la-Chapelle ; on cite par ailleurs Wavre, Beauvechain ; le Limbourg ; l’axe Bruxelles-Malines-Anvers ; la province du Luxembourg, etc…

11A ce moment, il s’agit de rumeurs, de déductions plus ou moins audacieuses. P. Struye, pour sa part, estime qu’il y a là "de nombreux ennuis" en perspective, tandis que La Libre Belgique (8 avril) voit mal comment on concilierait les affirmations de fidélité à l’intégration atlantique et un refus a priori d’accueillir sur son sol l’une ou l’autre installation militaire (ou même le siège politique) de l’OTAN. Le journal libéral bruxellois La Dernière Heure va plus loin (le 8 avril) et écrit : "un fait semble cependant certain : la Belgique désire accueillir certains organismes de l’OTAN et tout sera fait dans ce but selon les moyens dont le pays dispose".

12Ces rumeurs, ces premiers commentaires se nourrissent d’une première initiative prise par le nouveau gouvernement en accord avec les partenaires du Benelux : au cours d’une rencontre à Bruxelles des trois ministres des Affaires étrangères le 4 avril, il est admis que le Benelux sera quasi certainement concerné par les transferts auxquels doit se soumettre l’OTAN et un groupe d’études à 3 est constitué dans cette perspective.

13Dès le 13 avril, un groupe interministériel belge se réunit sans qu’aucune demande ou sollicitation extérieure ait été formulée : il y est question d’étudier l’implantation de certains organismes de l’OTAN, à condition qu’on puisse escompter des accords sur le financement et les règlements d’exécution et qu’on reste dans un cadre raisonnable qui tienne compte de la "capacité d’absorption" du pays.

14Il semble bien qu’à ce moment, les autorités gouvernementales belges furent déjà persuadées qu’il y aurait à accepter l’un ou l’autre organe atlantique s cornue le transfert du Conseil, organe politique de l’alliance, n’était pas immédiatement posé (sauf par le Général Leomitzer qui l’estimait nécessaire des transfert du Shape ; sauf aussi par Washington qui le jugeait inévitable à terme), le ministre Harmel semblait souhaiter que les trois pays de Benelux s’engagent ensemble au sujet des organes militaires et notamment que les Pays-Bas sortent de leur réserve. Aux yeux du ministre, le Shape apparaissait comme "le moins gênant" si le choix devait se faire entre le Shape, Centre-Europe, les bases et les centres logistiques.

15Rien n’est explicitement formulé du côté belge car le working-group D a entamé ses travaux et n’a encore fourni aucune donnée d’ensemble du problème des transferts, le comité Benelux ad hoc siège (25 avril),mais là aussi les conclusions restent vagues : on étudiera la question quand le rapport du groupe D sera rédigé (par son responsable, italien),mais nul ne semble douter que ce rapport mettra en cause les pays du Benelux car les inconvénients sont manifestes si on choisissait la R.P. d’Allemagne ou le Royaume-Uni tandis qu’avec la Belgique, par exemple, on est en situation géographique comparable à celle de la région parisienne [1] et que des facilités techniques y existent ("on peut y trouver 25.000 m2 de logement" !).

16Au cours de sa tournée des capitales occidentales en avril, P. Harmel prend conscience de cette désignation progressive de la Belgique pour certains transferts (notamment après sa visite à Bonn le 19 avril) mais, en avril, aucune demande officielle n’est formulée et les réticences en Belgique sont très sensibles.

17Ainsi, à la commission sénatoriale, "avec M. Struye, MM. Rolin, Gillon et Herbiet ont souligné l’inopportunité éventuelle de l’installation en Belgique de bases des états-majors déplacés de France. Il y a là, ont-ils fait valoir, un danger sérieux qui exposerait inutilement la Belgique à être une première cible en temps de guerre… (à quoi P. Harmel définit sa position) le gouvernement n’a pris aucun engagement et n’a pas été sollicité [2]. Il se borne à fixer une attitude commune avec nos deux partenaires au sein de Benelux" (citations de La Dernière Heure du 29 avril 1966).

18Dès ce moment pourtant – fin avril – le ministre Harmel a amorcé une approche plus politique de la question ; si le territoire belge doit accueillir des organes de l’OTAN, mieux vaut un Q.G. de paix que des bases, d’autant que ce Q.G. pourrait ne pas être trop longtemps séparé de l’organe politique, le Conseil. Mais comment ce transfert pourrait-il – s’il doit se faire – s’opérer selon un rythme et dans un contexte politique général tels que la décision devienne acceptable et soit acceptée par les groupes politiques nationaux et par l’opinion ? C’est là qu’on voit poindre l’idée que la décision de transfert ne devrait pas faire oublier la nécessité d’une "nouvelle édition de l’évangile de l’alliance" (idée de base du futur "Plan Harmel"), que "le concept politique est le problème de base" pour l’alliance [3] et qu’il n’est pas question de provoquer la France en exerçant des représailles pour les décisions du Général.

19Si les mots ont un sens, tout ceci signifie que P. Harmel – avant que demande formelle de transfert pour les Q.G. soit faite – estime nécessaires une préalable redéfinition du concept politique de l’alliance et une affirmation de la volonté commune de tenir compte de l’évolution des relations Est-Ouest pour promouvoir la détente. Si l’alliance dit cela clairement, le problème du transfert, estime-t-il, se posera probablement dans un contexte moins difficile pour le gouvernement belge, surtout si on peut raisonnablement escompter que la Belgique sera aussi, en son temps, le siège du Conseil de l’OTAN et donc directement mêlée à d’éventuelles initiatives politiques dans le sens de la détente. Mais comment éviter que le transfert du Shape ne donne l’impression que la Belgique s’engage plus loin dans une certaine dépendance vis-à-vis de l’allié dominant dans l’OTAN et se coupe par là même du courant qui porte vers la détente ?

20Le fait pour le gouvernement d’avoir adopté une attitude d’attente à ce moment – où les réserves étaient très nettes dans les milieux parlementaires et où on n’était encore saisi d’aucune demande – et de ne pas avoir déclaré a priori qu’il n’accepterait aucun organisme de l’OTAN, constitue un élément décisif dans le processus de décision : en effet, le problème réellement posé était celui de décider si on laisserait l’OTAN aller jusqu’à formuler une demande publique. Si on allait jusqu’à ce stade, comment, dans "la logique d’une fidélité" [4], refuser ce que l’organisation présenterait comme conséquence logique de cette fidélité et exigence vitale pour l’avenir de l’alliance.

21Ce moment décisif où on pressent que l’OTAN choisira le territoire belge comme lieu préférentiel pour le transfert du Shape et où la demande n’est pas encore dictée par le rapport du groupe D, ce moment se situe fin avril-début mai [5].

22Dès le début mai, l’escalade se développe dans le sens qui fera du territoire belge le lieu d’implantation nouvelle du Shape :

  • le 3 mai 1966, le Général Lemnitzer adresse une lettre au secrétaire général Brosio : à ses yeux, la seule zone convenable pour la ré-implantation du Shape, c’est la région de Bruxelles.
    M. De Staercke, représentant permanent de la Belgique, est mis en possession du texte de cette lettre.
  • Le 18 mai 1966, le représentant belge près l’OTAN est avisé des conclusions auxquelles va aboutir le working group D : une majorité marque sa préférence pour un transfert du Shape en Belgique.
  • Le 2 juin 1966, après demande de précisions de la part des représentants du Benelux, M. Brosio précise par écrit que le Shape devrait être réinstallé dans la région de Bruxelles (Brussels Area) si on veut que le haut commandement soit en état d’assumer ses responsabilités opérationnelles.
  • Le 3 juin 1966, par lettre à M. Brosio – dont le texte fut transmis à M. De Staercke –, le Général Lemnitzer développe ses arguments en faveur du choix de la région bruxelloise.

23Pendant ce mois de mai, des articles paraissent dans La Libre Belgique et Le Soir[6] ; ils ont en commun :

  1. de s’élever contre la thèse du risque militaire accru que présenterait un transfert éventuel du Shape s "c’est là une objection à rejeter" note J.H. ; "cette crainte est pour une bonne part irraisonnée", écrit Le Soir ;
  2. de présenter le transfert comme une conséquence logique de la fidélité atlantique : "Ce serait pure hypocrisie que de critiquer le désengagement français tout en répondant à nos alliés : de grâce, placez vos états-majors et vos bases où vous voulez mais pas chez nous", écrit J.H. ; "Soyons logiques : il faut renoncer, nous aussi à l’OTAN, ou bien consentir à l’accueillir, en partie du moins, chez nous", écrit Le Soir.

24Dans l’argumentation développée par les deux journaux dont les thèses sur ce terrain semblent très proches de celles de P. Harmel, l’approche plus proprement politique, déjà esquissée fin avril, est très pressente :

25

"Les responsabilités nouvelles assumées par la Belgique devraient lui donner les moyens – et le droit – d’influencer davantage l’orientation politique de l’Alliance… (notamment) pour promouvoir, au sein de l’OTAN, une politique de détente en Europe".
(Le Soir, 25 mai 1966 ; pp. 1 et 3)

26Dès le début mai, il est donc devenu clair que les militaires atlantiques vont insister sur le transfert dans la Brussels Area. C’est pourtant au même moment que le Times de Londres annonce en page 1 (3 mai) : "London to be new H.Q. for Nato" et que Le Monde du même jour croit pouvoir annoncer que Bruxelles aurait pratiquement renoncé à accepter ou solliciter le transfert du Shape en Belgique. Il y eut effectivement à ce moment des entretiens Harmel-Thomson à Bruxelles, mais il semble bien que ce qui pouvait tenter le ministre britannique des Affaires européennes et atlantiques, c’était le transfert à Londres du Conseil de l’Alliance. Il ne fut jamais sérieusement question au niveau des quatorze ni mène du gouvernement britannique de prendre publiquement l’initiative de demander le transfert du Shape et d’autres organes militaires en Grande-Bretagne. Par contre, l’intérêt pour le Conseil était vif à Londres… comme sans doute à La Haye et dans d’autres capitales européennes.

27En mai se dégagea un élément important au sujet du contexte politique du transfert : D. Rusk, qui reçut P. Harmel à la mi-mai, fut attentif à l’argumentation du ministre belge quand celui-ci souligna qu’il ne convenait pas de décider des sièges avant d’avoir "discuté par priorité des problèmes de principe" dans l’alliance [7], décidé du destin de l’alliance au-delà de 1969 et qu’il était normal, en cas de transfert du Conseil, que celui-ci suive le Shape dans le nouveau pays-hôte.

28Du côté Benelux, une mise au point de M. Werner à la Chambre grand-ducale établit que les transferts importants ne pouvaient concerner en fait que la Belgique et les Pays-Bas [8]. Ceux-ci se faisaient prier par Bruxelles car le Partij van de Arbeid était plus que réservé et, dans l’hypothèse où le Shape viendrait en Belgique, Bruxelles estimait souhaitable que Centre-Europe soit aux Pays-Bas, plutôt qu’en Allemagne. A propos de la difficile conciliation de la "vocation européenne" et de la "vocation atlantique" dans un seul et même petit pays dont fait état le Premier luxembourgeois, il faut noter que l’argument a été soulevé à Bruxelles également : c’est pour qu’on ne puisse arguer ultérieurement d’incompatibilités que la Belgique tenait tellement à la solidarité Benelux en la matière, à l’unanimité de la demande d’accueil du Shape par les quatorze (y compris donc 4 membres de la C.E.E.) et même à une attitude compréhensive de Paris envers l’hypothèse d’un transfert du Shape en Belgique [9].

29A moins de deux semaines du Conseil de l’OTAN à Bruxelles, alors qu’au niveau gouvernemental belge les conclusions du groupe D, les avis du Général Lemnitzer et du secrétaire général Brosio ainsi que les vues du Département d’Etat américain étaient connus et convergeaient en faveur du transfert du Shape en Belgique, près de Bruxelles, le niveau d’information des milieux politiques et de l’opinion belges était assez bas :

30

"Nous ne pouvons traiter plus avant aujourd’hui le problème de la localisation des Etats-Majors, déclarait P. Harmel le 25 mai au Sénat. Il serait prématuré de répondre à une question avant qu’elle soit posée puisque nous ne sommes pas demandeurs et que des sollicitations officielles ne nous sont pas parvenues. Il va de soi que la Belgique ne pourrait pas refuser d’examiner les raisons qui motiveraient une demande. S’il y avait demande, nous ne saurions y répondre affirmativement que si cet accueil apparaissait comme un devoir dicté par la stratégie et une politique élevée. Ce ne sont ni nos préférences, ni celles de nos partenaires qui commanderaient notre décision, mais seulement la preuve d’une absolue nécessité".

31Après coup, il est possible de décoder ce texte et d’en déduire que, si les experts atlantiques faisaient la prouve que le transfert en Belgique est nécessaire ("un devoir dicté par la stratégie") et qu’il constitue un élément essentiel en vue de maintenir l’OTAN dans l’efficacité militaire et politique ("un devoir dicté par une politique élevée"), dans ce cas, la Belgique ne se laisserait pas aller à suivre ses propres préférences (lesquelles – sous-entendu – pourraient être de refuser les Q.G. sur son territoire) : la réponse pourrait dès lors être affirmative.

32Le 1er juin, p. Harmel, qui en avait informé les commissions parlementaires, précisait au Sénat qu’il avait reçu "depuis la semaine dernière" un message de M. Brosio : les quatorze avaient une préférence pour la localisation du Shape et du comité militaire au Benelux, et que dès lors, "les pays de Benelux ne peuvent écarter l’hypothèse d’une demande ferme, compte tenu des exigences politiques et stratégiques de l’alliance… Nous n’avons pas opposé une réponse négative absolue à ce qui n’était pas encore une sollicitation".

33Le ministre promit alors au Parlement de "l’informer… avant de donner une réponse" si la Belgique était sollicitée d’accueillir certains organismes de l’OTAN, "afin que chacun puisse prendre ses responsabilités".

34C’est à la veille même de la session du Conseil atlantique à Bruxelles (6 juin) que la version finale du rapport du groupe D fut diffusée, avec sa conclusion en faveur de la région de Bruxelles pour le Shape. La réunion ministérielle à quatorze décida de transférer les Q.G. hors de France et d’inviter, unanimement, les pays de Benelux à "fournir un nouvel emplacement" pour le Shape. Cette invitation figure dans le communiqué final.

Chapitre 2. De l’acceptation du Shape en Belgique

35L’idée d’accueillir le Shape en Belgique avait, en mars-avril, suscité des réactions défavorables dans des milieux politiques et dans des organes d’opinion très divers : certains redoutaient un risque militaire accru pour le pays ; certains – hostiles à l’OTAN ou persuadés, comme de Gaulle, que l’organisation était nuisible.au périmée – estimaient injustifié ou inopportun de contribuer à sa relance ; d’aucuns – sensibilisés aux thèmes de la détente – craignaient de voir la Belgique se couper du "dialogue de la détente" en jouant une carte trop engagée au plan de l’alliance militaire et trop visiblement dans le sillage des Etats-Unis ; d’autres encore – dans les milieux francophones et wallons – jugeaient peu judicieux d’accueillir en Belgique ces organismes refoulés de France au risque d’indisposer Paris ; certains "européens" craignaient aussi que la présence des organismes atlantiques là où se trouvent les communautés européennes crée des confusions dommageables et facilement exploitables par ceux qui ne cherchent qu’à compromettre l’intégration à Six ou à priver Bruxelles de sa qualité de siège de l’Europe des Six.

36Par ailleurs, il apparut rapidement probable au niveau gouvernemental belge que les militaires du Shape, le groupe D et certains pays alliés importants souhaiteraient que la réimplantation se fasse en Belgique. Il eût sans doute été plus facile de laisser prévoir une réponse positive – plus tôt et publiquement – si le transfert eût également concerné le Conseil et si les Pays-Bas avaient simultanément pris un engagement parallèle relatif à Centre-Europe. La thèse américaine en faveur du transfert simultané du Shape et du Conseil n’était pas suivie et La Haye se faisait prier au sujet de Centre-Europe.

37Comment inscrire l’idée d’un éventuel transfert du Shape dans un contexte politique et dans un calendrier acceptables ?

38Il convenait de prouver d’abord que l’OTAN survivrait à la décision française et même au-delà de 1969. Pourquoi en effet se lancer dans une réimplantation si tout devait disparaître dans quelques années ? Il fallait aussi prouver la volonté de l’OTAN d’explorer les voies de la détente t de se doter de ce que P. Harmel appelait un "nouvel Evangile". Alors, et à ce moment seulement, si les experts avaient fait la preuve que la stratégie exigeait le choix de la Belgique pour le Shape, il serait politiquement possible de trancher favorablement.

39En attendant, le fait de ne pas rejeter a priori tout transfert en Belgique et, au contraire, de laisser entendre qu’on était disposé à étudier toute demande, constituait une pré-décision très importante dans le chef du gouvernement belge car il est clair que le problème se posait comme suit :

40Si une demande était formulée – de manière unanime et solennelle, avec des arguments techniques non-révélés (en raison des secrets militaires) mais invocables globalement devant l’opinion – il serait alors hautement probable qu’au nom même de sa fidélité atlantique, le gouvernement belge serait amené à. répondre positivement, surtout si la question du transfert était liée à des perspectives d’action pour la détente et pour la sauvegarde de l’alliance.

41Consulter le Parlement après, que la demande aurait été formulée, c’était sans doute formellement une consultation avant décision définitive, mais en fait, c’était un acte qui se situait après le moment du choix effectif ou de le décision réelle.

42C’est ce contexte qui fut créé après le 7 juin 1966.

43Le Conseil atlantique avait, dans une certaine mesure et notamment à la demande des Belges, évoqué l’avenir de l’alliance au-delà de 1969 et enregistré les éléments de la détente à explorer ou exploiter. Il avait fait appel aux pays de Benelux pour l’accueil du Shape (en fait, c’était la Belgique qui était visée, après que P. Harmel eût dit clairement que "le gouvernement belge ne peut imaginer qu’un pays de l’OTAN renonce à participer à sa part de responsabilité au sein de l’alliance" et qu’il "ne dirait pas non s’il apparaît réellement nécessaire que des états-majors de temps de paix… s’installent en Belgique" [10].

44Dès le 9 juin, le gouvernement belge décidait de répondre positivement à la demande du Conseil atlantique relative au Shape [11], sous certaines conditions que P. Harmel exposera aux Chambres le 14 juin :

  1. La Belgique ne sera pas invitée à accueillir d’autres installations militaires que le Shape [12] ;
  2. le Shape s’implantera dans un site non-urbain qui ne sera pas forcément dans la Brussels Area mais qui disposera de communications rapides avec la capitale ;
  3. en cas de déplacement ultérieur du Conseil, il serait installé dans le même pays que le Shape ;
  4. la contribution spécifique belge pour le transfert du Shape entrera en compte pour l’évaluation de la contribution belge à l’OTAN. Par ailleurs, des solutions acceptables devront être trouvées aux problèmes financiers, techniques et sociaux, liés au transfert.

45Ce sont ces conditions que le gouvernement expose et commente au Parlement le 14 juin. Le vote à la Chambre est acquis par 118 voix contre 61 et 16 abstentions et au Sénat par 96 voix contre 33 et 22 abstentions. Les socialistes se sont divisés : ?.H. Spaak et A. Spinoy ont voté en faveur du transfert, alors que les autres votaient contre ou s’abstenaient [13] ; la Volksunie s’abstint ou vota contre ; plusieurs sociaux-chrétiens formulèrent des réserves ; le Parti Wallon, le F.D.F., les élus communistes votèrent contre le transfert. Comme le notait P. Struye, "pour la première fois depuis de longues années, une fissure s’est produite dans l’unanimité qui avait toujours réuni les trois grands partis sur les grands problèmes de politique internationale. Cette fois, un tiers du Parlement a refusé son approbation à une importante décision prise par le gouvernement" (La Libre Belgique ; 27 juin 1966). Ceci était dû en partie au fait qu’implicitement se trouvait posée une question de confiance au gouvernement.

Chapitre 3. Du choix et de l’offre d’un site pour le Shape

46Au moment même où, le 9 juin, il acceptait l’offre de transfert du Shape formulée par le Conseil atlantique, le gouvernement belge décidait de la création d’un "Comité interministériel pour l’étude des problèmes liés à l’implantation du Shape en Belgique" dont la première réunion eut lieu le 23 juin, après que les deux Chambres eussent avalisé la décision gouvernementale.

47Le Comité, présidé par un diplomate – le Comte Ch. de Kerchove de Denterghem, assisté de S. Prey, jurisconsulte aux Affaires étrangères, suppléant, et de G. Buysse, attaché au même département, secrétaire – comptait des représentants des départements suivants ; les services du Premier ministre et du Vice-Premier ministre ; les Affaires étrangères ; la Défense nationale ; les Travaux publics ; les Communications ; les Affaires économiques ; l’Emploi et le Travail ; les Finances ; l’Intérieur ; les P.T.T. et l’Economie régionale. Chaque département intéressé devait aussi désigner un agent de liaison permanent avec la Présidence du Comité.

48Ce Comité – le CISHIC ou Comité Interministériel Shape Interministériel Comité [14] – avait formellement une mission d’étude :il devait "centraliser et coordonner l’étude de toutes les questions relatives au transfert du Shape en Belgique". Il devait en outre "canaliser les contacts avec l’extérieur", c’est-à-dire avec l’OTAN et – avec le privé. En fait, il s’agissait, dès le départ, d’un organe essentiel pour la préparation de la décision car c’est, selon les ternes de P. Harmel lors de son installation, "via le Comité que le gouvernement devra, être saisi des décisions à prendre" et il fut précisé par le représentent du ministre que le Comité ne pouvait être une simple boîte aux lettres : si le gouvernement s’était déchargé sur lui de l’étude des problèmes liés à l’implantation du Shape, il s’attendait certes à ce que le CISHIC lui propose des décisions (non pas "des options, mais bien des propositions de décisions auxquelles il se réserve de donner les suites qu’il jugera opportunes").

49Le problème premier pour le CISHIC était celui du ou des sites à prospecter et à proposer ensuite à l’OTAN.

50Sur ce point essentiel, le cadre dans lequel devait s’opérer la prospection était relativement pré-déterminé par la déclaration gouvernementale du 14 juin : le site serait "non-urbain" et pourrait être "situé en dehors de Bruxelles mais jouissant de communications rapides avec la capitale". En fait, les conditions de départ, telles qu’elles furent présentées au CISHIC, étaient plus précises encore :

  • le site choisi devrait être définitif et relever de préférence du domaine de l’Etat ;
  • le site serait non-urbain et situé dans un rayon de ± 50 kilomètres de Bruxelles, encore que ceci ne soit pas "un impératif absolu mais une indication inspirée tant par les commodités des autorités militaires que par les convenances nationales et destinées à désengorger la capitale".

51Il est difficile d’imaginer que la distance de 50 kilomètres corresponde avec le vœu des militaires du Shape et des rédacteurs du rapport pour le groupe D lorsqu’ils suggéraient la "Brussels Area", mais c’est l’hypothèse de travail qui fut proposée au CISHIC.

52Quoi qu’il en soit des motifs réels de l’instruction donnée au CISHIC concernant la distance par rapport à Bruxelles – désengorgeaient de la capitale ? contribution à l’économie d’une région ? ménagement à prendre vis-à-vis de l’opinion publique ? désir de laisser la porte ouverte à Bruxelles pour le transfert ultérieur du Conseil ? souci de bien délimiter hors site urbain la zone de sécurité et de présence militaire ? – la fourchette des solutions à retenir par le CISHIC était du même coup assez étroite i s’en trouvaient par exemple écartées les solutions de Bruxelles même [15] ou des environs immédiats (Tervueren ; Evere ou Meisse), ainsi que celles qui concernaient des régions aussi éloignées que Virton ou Bourg-Léopold,

53Mandat fut des lors donné à un groupe restreint – Défense nationale, Travaux publics et P.T.T. – de faire des propositions au CISHIC ou, au moins, de débroussailler le problème, étant entendu au départ que la formule à retenir pour des raisons stratégiques devrait se situer au Sud de Bruxelles dans un des trois axes Bruxelles-Namur ; Bruxelles-Charleroi et Bruxelles-Mons. Il fut également convenu que, dans la proposition à faire, on s’inspirerait certes des exigences formulées par le Shape, exprimées dans le rapport du groupe D [16], mais que l’on se laisserait guider, dans un premier temps, par les "convenances nationales" qui ne seraient pas formellement en opposition avec les exigences techniques essentielles de l’organisation atlantique.

54Des candidatures furent posées de communes ou de régions dont des porte-parole voulaient f- ire le siège nouveau du Shape ; ainsi, avant que le CISHIC et le gouvernement ne se soient fait leur propre religion : Jodoigne par lettre de son bourgmestre à P. Harmel le 1er juin ; Nederokkerzeel par son bourgmestre le 17 juin ; Seneffe par son conseil communal le 24 juin ; Gembloux par son collège échevinal le 28 juin ; Dendermonde par lettre du bourgmestre le 1er juillet [17] ; Familleureux le 4 juillet ; Presles par son conseil communal le 9 juillet ; Virton par son conseil le 13 juillet. Pour Casteau-Massières, le président du P.S.C. de Mons, ?. V. Delporte, avait lancé un appel au ministre, tandis qu’à Charleroi, une action assez spectaculaire était engagée par un comité local et l’argumentation en faveur de la région [18] était présentée par l’Association intercommunale pour l’Aménagement du territoire et le Développement économique et social des régions de l’Est et du Sud du Hainaut (ADEC). Il fut aussi question, dans ce cadre, d’Oostakker et même du camp de Beverlo. Il y eut par contre des prises de position hostiles à l’implantation, de la part de conseils communaux ou encore de groupes politiques (ainsi, la fédération du Parti Socialiste de Tongres contre le choix éventuel de Lommel pour le Shape, ou encore le mouvement Populaire Wallon de Charleroi ou la F.G.T.B. de Mons-Borinage).

55A noter que les autorités locales de Chièvres et de Casteau n’étaient point candidates.

56Le groupe restreint pour l’étude du site présenta un projet de rapport dès le 9 juillet.

57Il s’agissait de disposer, pour le site principal, de 30 à 40 ha pour le Q.G. du temps de paix ; de 40 à 50 ha pour ce qu’on appelle le "support complex" [19] comprenant des logements, des bâtiments administratifs, des garages, des mess, etc… et de 20 ha pour les clubs, magasins, écoles, champs de sports, etc…, soit au total de 110 à 130 ha pour le site principal.

58Trois régions offrant des avantages certains nais en opposition avec certains impératifs furent examinées par le groupe ad hoc :

  • la ville de Termonde (site urbain ; hors des trois axes stratégiques ; distance trop grande par rapport à Bruxelles) :
  • la zone au Nord de Charleroi (adossée à une région industrielle très peuplée mais par contre disposant d’un aérodrome à Gosselies et de bons réseaux publics de la R.T.T.) :
  • la région de Chièvres : celle-ci dispose d’un aérodrome militaire de 500 ha ; elle est dans un des trois axes, mais les problèmes pour la R.T.T. y sont très difficiles à résoudre dans les délais et en contre, le Shape aurait laissé entendre officieusement qu’il jugeait la région trop excentrique par rapport à Bruxelles et Saventhem [20]. Par contre, dans la même région se trouve aussi le terrain militaire de Casteau (200 ha) et le dépôt de Ghlin (45 ha).

59Le groupe retint deux autres solutions, spécialement après les observations officieuses relatives à Chièvres :

  • la région au Nord de Nivelles (dans un des axes ; proche de Bruxelles ; solution favorable pour la R.T.T. mais indisponibilité en terrains de l’Etat) ;
  • la région au Nord de Gembloux (idem, sauf pour la R.T.T. où la situation est défavorable s on pourrait y remédier en allant plus au Nord, en direction de Wavre).

60Du coté belge, divers facteurs jouèrent en faveur de la région de Mons (Chièvres et Casteau) : l’existence de terrains de l’Etat (gratuits) alors que l’acquisition de terrains privés pouvait représenter une dépense de 400 millions f.b. ; une action du ministre-secrétaire d’Etat à l’économie régionale, Y. Urbain, qui voyait dans l’implantation du Shape un moyen d’aider la région. Par contre, les arguments techniques de la R.T.T. en matière de raccordements aux réseaux publics jouaient contre la région de Chièvres [21].

61Le 20 juillet, après un premier débat en Conseil le 15 juillet, offre était faite à l’OTAN par le gouvernement belge de réinstaller le Shape soit dans le site de Chièvres, soit dans celui de Casteau, qui tous deux répondent, selon Bruxelles, aux impératifs techniques définis par le Shape sinon à toutes les considérations de convenances exprimées par les militaires. L’existence de terrains d’Etat permet dans les deux cas d’entamer très rapidement les travaux car on évite les longues procédures d’expropriation ou d’achat : en cas de refus de ces sites, la question des délais et du coût se poserait gravement.

62Dès le 23 juillet, le président du CISHIC recueillait officieusement à Paris des réserves sur le site de Chièvres, jugé trop distant de Bruxelles et situé dans une région sous-équipée : selon le Général Lemnitzer, il serait difficile sinon impossible d’y bénéficier de la présence et du passage régulier des meilleurs officiers des forces alliées rebutés par la distance et par l’absence de commodités multiples, notamment en matière d’équipement hôtelier.

63Le 1er août, le Général Lemnitzer visita la région de Chièvres et de Casteau par un temps détestable, puis il adressa une lettre au secrétaire général Brosio ; il invita la Belgique à proposer un autre site à un maximum de 25-30 km. de Bruxelles et suggéra même que près de la capitale soit aménagé un site provisoire pour le Shape (il s’agissait d’Evere). Le gouvernement belge, par décision d’un conseil ministériel restreint le 4 août, ne considéra pas que cette lettre fût de nature à lui faire modifier sa proposition et il était prêt à s’en expliquer au Conseil de l’OTAN si le Général Lemnitzer ou M. Brosio voulaient porter le problème à ce niveau.

64Plusieurs semaines passèrent alors, chaque partie estimant que le temps jouerait en sa faveur, le Général Lemnitzer voulait croire que si on s’engageait tardivement dans les travaux, la seule solution possible serait celle du site provisoire près de ou à Bruxelles, Du côté belge, on estimait au contraire qu’il fallait s’en tenir à l’offre formulée, quitte à préparer une réponse à certaines critiques comme celles relatives à l’insuffisance de logements dans la région, aux conditions de communication par route avec Bruxelles.

65Des contacts eurent lieu à Paris eu août entre le représentant de P. Harmel et le Président du CISHIC d’une part et les dirigeants de l’OTAN de l’autre (le 25 août), puis entre les experts belges et ceux des quatorze (30 août). Ces derniers furent invités à visiter à nouveau les lieux le 1er septembre, sous lu conduite du Lieutenant- Colonel Bonheure, chef du "staff" technique du CISHIC, et du chef de cabinet des Travaux publics, M. Boereboom. Ces experts atlantiques, sous la direction de Lord Coleridge, recommandèrent au Conseil de prendre une décision pour le 15 septembre, date-limite au-delà de laquelle la Belgique ne pouvait garantir le respect du calendrier, mais ils cherchèrent à obtenir des Belges des engagements concrets pour rencontrer les doléances des militaires du Shape.

66Les engagements belges peuvent se résumer comme suit :

  1. Le Gouvernement belge octroierait des privilèges et immunités aux Quartiers Généraux et au personnel national à leur service dans des conditions qui ne seraient pas moins favorables que celles qui sont présentement accordées par le Gouvernement français ;
  2. Le Gouvernement belge s’engagerait à fournir la garde nécessaire, destinée à protéger la zone de sécurité et le périmètre, dans les mêmes conditions que celles qui sont accordées au SHAPE par le Gouvernement français. L’OTAN n’aurait pas à pourvoir, à ses frais de logements pour ce personnel ;
  3. Bien que l’autoroute Bruxelles-Mons ne sera probablement pas terminée d’ici la fin de 1971, la partie reliant Bruxelles à la région immédiatement au sud de Hal pourrait être achevée avant la fin de 1968, ce qui permettrait d’éviter la partie la plus encombrée de la route entre Casteau et Bruxelles. La route existante pourra être améliorée d’ici la fin de 1967 ;
  4. Des dispositions seraient prises pour que les trains TEE qui ne s’arrêtent pas à Mons le fassent dès que les Quartiers Généraux seront installés ;
  5. Les autorisations nécessaires seraient accordées pour la mise en route éventuelle d’une liaison par hélicoptère entre Casteau et Bruxelles.

67En outre, un effort serait fait pour que les logements nécessaires et l’école internationale soient rapidement disponibles et à tout le moins pour le 1er septembre 1967, grâce à l’aide financière ou à l’adoption de procédures jugées efficaces par les autorités belges.

68Pendant cette phase des tractations, on assista à une croissance des exigences ("requirements") du Shape, fondée sur le fait de la "situation isolée" de Casteau. Ceci ne fut pas sans incidence sur la charge financière acceptée par la Belgique au titre de pays-hôte : celle-ci – selon les déclarations de P. Harmel à la Chambre en juin – devait se situer à un maximum de 550 millions f.b., y compris 400 millions f.b. pour le terrain. Or, alors que le terrain est gratuit et que certaines "viabilités" existaient déjà à Casteau, on admet que les 550 millions seront atteints.

69Dans ces conditions, le 14 septembre 1966, le Conseil de l’OTAN adopta la résolution suivantes

70

"Le CONSEIL DE L’ATLANTIQUE NORD, rappelant sa décision, prise en Session Ministérielle à Bruxelles le 7 juin 1966, d’inviter les pays du Benelux à fournir un nouvel emplacement pour le SHAPE ;
  1. "PREND ACTE, avec gratitude, de l’offre d’un emplacement pour le SHAPE fait par le Gouvernement belge et remercie les autorités belges de leur précieuse collaboration pour l’élaboration de propositions concernant la construction des installations nécessaires sur cet emplacement ; et PREND ?C?? de l’esprit de coopération avec lequel le Commandant Suprême Allié et son Etat-Major font face aux problèmes posés par le transfert du Grand Quartier Général Allié.
  2. "DECIDE d’accepter l’offre de la Belgique, ainsi que les obligations qui en résultent, et de transférer le SHAPE à l’emplacement de Casteau.
  3. "PRIE le Secrétaire Général et les quatorze Gouvernements qui apportent actuellement leur concours au transfert du SHAPE de donner effet aux mesures nécessaires pour que le SHAPE devienne opérationnel à Casteau le plus tôt possible."

Chapitre 4. De la préparation et de l’aménagement du site à Casteau

71Le personnel du Shape à accueillir à Casteau comprend quelque 600 officiers et 2.000 autres agents militaires dont près de 1.800 sont des chefs de famille : au total, il s’agit de 7.200 personnes, sans compter les éléments civils internationaux (environ 180 unités), sans les agents locaux (250 environ occupés par le Shape comme tel) et sans les gendarmes prévus pour le garde (plus de 100 unités). En outre, le Shape est un lieu de passage pour des militaires de haut rang et pour des experts, tandis que le personnel reçoit évidemment des visites privées qui peuvent être nombreuses.

72Ceci indique pourquoi, outre les installations du Q.G. proprement dit avec les services destinés aux hommes, s’est posé à Casteau un problème de création de logements, de cantines et mess, d’écolage pour les enfants du personnel, d’équipements socio-culturels, etc…

Le problème du coût et de la charge financière

73Dans la mesure où le site était éloigné de Bruxelles, les exigences atlantiques se développaient et la tendance dominante était d’en imputer la charge financière au pays-hôte et non au budget commun, puisque c’était, disait-on, l’offre du pays-hôte non-conforme à la demande du Shape au point de vue de la distance par rapport à Bruxelles, qui développait les besoins du Shape en services et équipements sociaux (scolarité ; soins de santé ; loisirs). Si la Belgique veut faire servir le Shape à des fins de reconversion régionale [22], elle doit – soulignait-on officieusement dans les milieux atlantiques de Paris – accepter certaines charges qui découlent précisément du choix du site.

74La première indication relative au coût de l’opération "transfert" fut fournie par P. Harmel au Parlement le 14 juin 1966 : le total serait de 20 milliards de f.b. et la quote-part belge en tant que pays-membre serait de 1.023 millions si la France acceptait de financer sa part et de 1.345 millions si la France se désistait. Au titre de pays-hôte, la Belgique fournirait le terrain (estimé à 400 millions f.b. maximum) et les "viabilités" (150 millions) soit un maximum de 550 millions f.b. [23]. A ce moment, le Ministre – parlant des familles à loger – déclarait : "les frais de construction sont à charge de l’Organisation et ces dépenses sont effectuées en faveur de l’économie belge".

75La situation réelle fut sensiblement différente :

  1. le terrain ne coûta rien car il appartenait à la Défense nationale ;
  2. une part des "viabilités" (raccordements et adductions) existait déjà, de telle sorte que le coût initialement prévu à cette fin pouvait être réduit de moitié [24].

76Par contre, des problèmes surgirent qui firent monter le coût pour la Belgique :

  • Le coût total du transfert s’élèvera à plus de 21,5 milliards f.b. (et non 20), avec un pourcentage belge (5,20 %) renforcé par l’abstention française ;
  • la promesse de fournir un contingent pour la garde armée – et de lui fournir un logement à charge de l’Etat belge n’a pas fait l’objet d’une estimation publique pas plus que les dépenses indirectes (services de pompiers ; sécurité politique ; etc…) ;
  • "d’autres dépenses (que celles prévues), précise le CISHIC dans une note confidentielle du 11 octobre, destinées à rendre le site apte à l’usage que Shape en fera seront prises en charge par la Belgique. Ces dépenses ne peuvent être arrêtées définitivement à l’heure actuelle mais le gouvernement est décidé à ne pas dépasser le chiffre initialement fixé de 550 millions". Ce que le CISHIC appelle les autres dépenses (non prévues) à charge de la Belgique se montent donc à 475 millions f.b.

Le programme

77Selon les documents officiels, le programme de construction se décomposait comme suit : [25]

tableau im1
Phase I (avant le 1er avril 1967) : Constructions militaires selon un procédé de pré-fabrication ; logements provisoires, blocs des officiers et des troupes ; centre de communication ; accès ; permettant de rendre le Q.G. opérationnel : 850 millions f.b. (y compris les 50 millions pour les télécommunications)25 Phase II (pour le 1er septembre 1967) : Logements à Shape Village ; bâtiments scolaires ; centre médical ; commodités et équipements collectifs divers : 880 millions f.b. Phase III : Constructions de caractère moins urgent : 420 millions f.b. Total : 2.150 millions f.b.

78Pour la phase I, une procédure favorable aux entrepreneurs belges fut adoptée en invoquant l’urgence : furent ainsi accordés, par l’OTAN la dispense des appels d’offre internationale et, par le gouvernement belge, le recours à la procédure du marché de gré-à-gré [26].

79Le choix des architectes-ingénieurs conseils se fit par le CIRSH, avec l’accord du Shape, et, des le 20 septembre, le choix se porta sur l’association momentanée Sobemap-Alnha et Electrobel-Gibbs et Hill [27].

80De grosses entreprises se virent confier les principaux travaux [28] : EGTA (commande de 138 millions) ; Delens et François (197 m.) ; Blaton et C.F.E. (81 m.) ; De Coene (17 m.) et Stockhem (14 m.).

81Les travaux furent entamés le 17 novembre et menés de manière telle que le calendrier soit respecté pour la phase I. Le bâtiment du Centre de communication fut inauguré en décembre 1966.

Shape-Village et l’Ecole internationale

82Deux problèmes délicats se sont posés pour la phase II : celui du logement à assurer aux 1.800 familles des militaires et de l’enseignement à assurer aux enfants des agents du Shape.

83Pour le logement, la question se compliquait du fait que le Shape souhaite que ses agents vivent à une distance raisonnable du Q.G. (10 à 15 minutes) pour l’hypothèse d’alerte. Un certain nombre d’agents pourraient s’installer à l’intérieur du site, dans un Shape-Village, mais qui le financerait et quelle serait son importance ? P. Harmel semble bien "voir cru, le 14 juin, que ce serait l’OTAN, sur fonds communs, mais ce ne fut pas admis par l’Organisation. On discuta longuement fin septembre-début octobre de modalités de financement : il fut même très sérieusement question d’un prêt de l’OTAN à la Belgique pour la construction de 300 logements, mais ce projet se heurta à une thèse britannique et américaine tendant à faire construire des cellules "nationales" par chaque pays-membre pour ses propres nationaux. Finalement, la Belgique accepta la responsabilité de faire construire 300 logements à Shape-Village par le privé, mais à condition que le Shape garantisse une durée d’occupation. Ultérieurement, le Shape fit pression en vue de faire porter ce nombre à 600 logements et obtint satisfaction [29], mais le budget Shape (B.M.B.C.) financerait l’infrastructure du village.

84Pour les autres logements – un millier environ – à construire "extra-muros" dans un rayon de 20 km (régions de Mons et de Soignies), une formule de garantie d’occupation de 10 ans par l’Etat belge devrait stimuler la construction rapide de logements répondant à des critères de confort et de foyers détermines ; une première expérience s’est révélée peu encourageante ; les offres faites ne purent guère être acceptées car les loyers en eussent atteints des taux prohibitifs.

85Le logement du Général Lemnitzer est en principe réglé : le château Gendebien, réaménagé, sera mis gracieusement à sa disposition.

86Pour l’écolage des 2.000 enfants, le besoin existe au niveau des tout-jeunes enfants en écoles gardiennes (4-20 enfants), primaires (1.060) et secondaires (640). Le gouvernement belge admit de prendre la construction de classes "communautaires" à sa charge, à concurrence de 100 millions de f.b. (Ces 100 millions seraient à avancer par le Fonds national des constructions scolaires : ce qui provoqua des remous dons les milieux de l’enseignement officiel). En fait, le devis pour les écoles s’éleva à 180 millions. Il semble qu’on s’oriente vers la formule suivante ; 4 écoles nationales au niveau primaire et une école internationale ; l’école internationale au niveau secondaire qui ne serait pas forcément réservée aux seuls enfants des agents du Shape.

Relations avec les autorités locales

87Parmi les difficultés et problèmes rencontrés, ceux des relations avec la population et les autorités régionales furent et sont les plus sérieux, Des doléances se sont exprimées au sujet des "privilèges" du Shape en matière de financement scolaire [30], d’équipements sportifs, culturels et de santé [31] ; au sujet des recours à des firmes extérieures à la région ; en raison des effets à la hausse des prix, etc… Le CISHIC tenta d’abord de rencontrer ces doléances en organisant sur place une délégation permanente, composée de représentants des départements ministériels et placée sous la présidence du commandant militaire de la province du Hainaut (1ère réunion le 24 novembre). Il semble que cette formule ne puisse plus suffire : une association pour la promotion régionale et l’accueil du Shape à Mons va assurer la relève, sous la présidence du gouverneur de la province, avec participation d’autorités locales.

La sécurité

88Les problèmes de la sécurité du site ont trouvé un règlement : les patrouilles extérieures seront assurées par des gendarmes belges et des éléments civils de la B.S.R. ; à l’intérieur, on retrouvera les services qui agissaient au Shape eu France et les services spéciaux des pays-membres seront actifs surtout quand, selon les termes des services officiels, les obligations de sécurité dépasseront les possibilités belges, notamment quand elles supposent des dispositifs techniques très spécialisés (matériel électronique, par exemple). Les entreprises participant à la construction prennent des engagements stricts en matière de sécurité ("contrat de sécurité") et le personnel est soumis aux enquêtes ad hoc.

L’accord Belgique-Shape

89Les conditions particulières d’installation et de fonctionnement du Shape en Belgique doivent être réglées par un accord dont le premier avant-projet fut rédigé au début août 1966 [32], mais dont les articles relatifs à certains privilèges (spécialement ceux d’achats de marchandises exonérées à la taxe dans des cantines spéciales) furent l’objet d’extrêmes réserves dans les milieux des classes moyennes commerçantes.

90Cet accord se réfère à la convention sur le statut.des forces des pays-membres de l’OTAN (signée à Londres le 19 juin 1951) et il se présente comme une mise en exécution de l’article 16, par. 2, du protocole sur le statut des Q.G. militaires internationaux créés en vertu du traité de l’Atlantique Nord (signé à Paris le 28 août 1952). Il concerne : les effectifs [33] ; la liaison entre le Shape et les autorités belges ? l’inviolabilité des installations ? les immunités et les privilèges personnels ; le régime fiscal et économique ; les communications du Shape, etc…

91Normalement – selon une déclaration de P. Harmel le 21 octobre – cet accord "sera soumis au Parlement pour ratification", même s’il "n’apporte aucune modification au traité de Washington de 1949" (La Libre Belgique ; 22-23 octobre 1966).

Chapitre 5. De la décision de transfert pour le Conseil et de l’offre des sites (provisoire et définitif)

92Dès le mois d’avril, la presse faisait état d’une prise de position du Général Lemnitzer en faveur du transfert simultané du Shape et du Conseil de l’OTAN : la raison qui avait joué autrefois en faveur d’un regroupement dans la région parisienne était également valable, disait-il, pour celle de Bruxelles. L’avis du Général était aussi celui de Wellington et de Londres, mais pas forcément de la majorité des membres de l’alliance qui souhaitaient qu’on ne donne pas l’impression de transférer le siège comme représailles contre la décision française en matière d’intégration militaire. Telle était spécialement la thèse du Canada et du Danemark.

93Du côté belge, l’intérêt pour le Conseil était bien dus grand que pour les organismes militaires et, dans une large mesure, l’acceptation du Shape ne se légitimait, aux yeux du ministre Harmel, que si la Belgique (Bruxelles) devenait le siège du Conseil, lequel était considéré comme un élément essentiel dans la perspective de la politique nouvelle en matière de relations avec l’Est. La présence de l’organe politique, estimait le ministre, rassurerait le public et mettrait la Belgique en état de jouer un rôle accru au sein de l’alliance.

94Dès la fin mai [34] et surtout le 14 juin dans sa déclaration aux Chambres [35], P. Harmel défendit la thèse selon laquelle toute décision éventuelle de transfert du Conseil atlantique devrait garantir le regroupement avec le Shape, sur un même territoire national. Il faut noter que sans cette affirmation de principe, dont étaient informés les partenaires de Benelux et les quatorze à Paris, les candidatures eussent pu être nombreuses pour accueillir le Conseil : Londres avait manifesté un intérêt réel début mai et les Pays-Bas eux-mêmes, par M. Luns, faisaient savoir, le 1er juillet, qu’ils ne feraient pas de demande en ce sens, mais qu’au cas où on les solliciterait pour accueillir le Conseil, la chose serait considérée "avec bienveillance".

95C’est en septembre-octobre que mûrit rapidement l’affaire du transfert pour le Conseil. P. Harmel en parla à Washington et à Ottawa (les 9 et 13 octobre) et le Canada, qui était partisan du maintien à Paris, finit par déclarer qu’il se rallierait à la thèse majoritaire (20 octobre). En fait, il devenait difficile pour le Conseil, précisent les milieux atlantiques, de fonctionner normalement à Paris et surtout, la France refusait de garantir les communications entre Casteau et Paris, dans l’hypothèse d’une crise où elle n’eut pas été directement impliquée.

96Il semble bien que Paris n’ait rien tenté pour retenir le Conseil : lors de la remise des lettres de créances de l’ambassadeur belge, M. Rothschild, le Président de Gaulle aurait précisé spontanément qu’un transfert du Conseil à Bruxelles ne provoquerait point d’amertume à Paris.

97Le principe du transfert à Bruxelles fut décidé à l’unanimité (France incluse) au niveau des représentants permanents de l’OTAN le 26 octobre [36].

98Où serait installé le Conseil à Bruxelles ?

99La question du logement et des écoles pour les enfants des 1500 chefs de famille appelés à suivre le Conseil se posait en termes radicalement différents pour Bruxelles que pour Casteau [37]. Dans le coût de l’opération (la France y prenant sa part), la quote-part belge serait de 2,86 $ du total, sans que le montant réel en ait été précisé.

100La première hypothèse pour les locaux fut celle de l’immeuble-tour de la Porte de Namur, avec un complément – pour des salles de réunions – en direction du Sablon. L’immeuble fut visité par M. Brosio le 9 novembre et option fut prise jusqu’au 20 décembre. La commune d’Ixelles – non consultée préalablement – souleva des objections fondées sur "les difficultés et les dangers qui résulteraient de l’implantation dans ce quartier commercial déjà trop encombré, d’un organisme international" comme le Conseil [38]. Par ailleurs, l’immeuble ne pouvait constituer qu’une solution provisoire, les propriétaires se refusant à vendre et fixant le loyer a 58 m. f.b. par an.

101Dans ces conditions, une formule en deux temps fut retenue : un site provisoire serait installé à Evere sur un terrain militaire de 25 ha en bordure de l’autoroute conduisant à l’aérodrome de Bruxelles-National et un immeuble définitif, propriété de l’OTAN, serait construit ultérieurement au Heysel [39] sur l’emplacement du pavillon français à l’Exposition universelle de 1958.

102L’étude et la mise en train de l’aménagement du site à Evere furent également confiées au CISHIC qui créa à cette fin un Comité interministériel restreint dont les Travaux publics sont le département pilote ; le CIROTAN qui est, pour l’installation du Conseil, le pendant du CIRSH pour le Shape [40].

103Le site provisoire à ?vere doit être aménagé pour le 1er octobre 1967. Une première estimation du coût des bâtiments portait sur 300 à 350 millions f.b. payables par l’OTAN [41]. C’est l’association momentanée "Groupe Structures – Groupe Fraction et Electricité (31, rue de la Science) qui a été choisie comme Bureau d’Etudes.

104Le problème suivant s’est alors posé : pouvait-on, pour s’en tenir, au coût minimum, construire ces bâtiments provisoires en bois et panneau démontables ? Si l’on s’en tenait à cette solution, on était amené à envisager une construction a un seul niveau, ce qui multipliait par trois la surface dont on devait disposer et posait par là un problème apparemment sans solution à Evere. En outre, étaient simultanément posés des problèmes techniques (solidité, acoustique des salles de réunion, chauffage,…) et des problèmes de sécurité OTAN.

105Cet ensemble de données a déterminé l’option en faveur d’une construction qui, remplissant les conditions de confort, de solidité et de sécurité OTAN exigées, serait réalisée le plus économiquement possible (les estimation se situent vers 500 millions, au moment où commence l’examen des soumissions). De tels bâtiments auront une durée de plus de 5 ans, aucune décision définitive n’étant prise à ce jour pour leur reprise au-delà de ce délai.

Notes

  • [1]
    C’est ce qui fera dire au Premier ministre luxembourgeois, P.Werner, le 25 avril : "il est en effet incontestable que la situation géographique de nos trois pays est favorable à une telle implantation". Contre l’éventualité d’un transfert en R.F.A.,on invoque des arguments de nature politique et stratégique ("première ligne") tandis que pour la Grande-Bretagne, on redoutait de donner par là l’image d’une OTAN optant pour une position de repli au-delà de la Manche et d’une OTAN très formellement placée dans un cadre de prédominance anglo-saxonne.
  • [2]
    Le 26 avril, à la Chambre, P. Harmel avait aussi déclaré ; "jusqu’à présent, la Belgique n’a pas été sollicitée pour quoi que ce soit".
  • [3]
    Chambre des Représentants, 26 avril 1966.
  • [4]
    La Libre Belgique, 11 mai 1966.
  • [5]
    De son point de vue, le sénateur communiste, J. Terfve, estimait correctement les données quand il invitait P. Harmel, le 17 mai, à "dire non avant, pour ne pas être acculé à dire oui plus tard".
  • [6]
    spécialement des articles de J.H. dans La Libre Belgique (10, 11 et 12 mai) et celui du 25 mai dans Le Soir sous le titre : "L’OTAN en Belgique ? des charges mais aussi une occasion".
  • [7]
    Thèse belge, exposée par le Ministère des Affaires Etrangères, 3 mai 1966
  • [8]
    "Le gouvernement (grand-ducal) a informé ses partenaires que pour des raisons évidentes et en vue notamment de la vocation européenne que notre pays a déjà acceptée, l’implantation au Grand-Duché d’un organisme majeur comme, par exemple, le grand commandement intégré, se heurterait à des difficultés pratiques quasi-insurmontables" ; déclaration ce P. Werner à la Chambre ; 25 mai 1966.
  • [9]
    Dans les milieux traditionnellement préoccupés de l’unité belge, la question s’est aussi posée de savoir dans quelle mesure l’implantation atlantique, survenant en plus de celle des communautés européennes, contribuerait à une certaine "dilution" nationale belge ou au contraire permettrait aux Belges de dépasser la dualité Flandre-Wallonie en se sentant engagés très concrètement par les accords européens et atlantiques.
  • [10]
    La Libre Belgique ; 6 juin 1966.
  • [11]
    A ce moment, l’opposition publique au transfert du Shape s’exprime dans les milieux d’action pacifiste non-violente ; dans les cercles communistes (tendance Burnelle et tendance Grippa) ; l’Union de la Gauche Socialiste ; les Jeunes Gardes et les étudiants socialistes ; le M.O.C. et la F.G.T.B.-Liège ; les Vlaamse Demokraten ; la V.S.V., la C.G.S.P.-Enseignement ; le M.P.W. ; etc… Le Comité de la marche anti-atomique exprime de nettes réserves sur le transfert ainsi que la D.C.L. ; la Volksunie et des fédérations socialistes.
  • [12]
    Les décisions françaises concernaient en effet le Shape, Centre-Europe (AFCENT), le Collège de Défense, mais aussi tout un ensemble d’agences intégrées, d’états-majors et de bases nationales – américaines, canadiennes, allemandes – en France.
  • [13]
    Le Conseil Général du P.S.B. estima le 15 juin que les parlementaires socialistes n’avaient pas "à s’associer à la responsabilité politique de la décision d’implanter le Shape en Belgique".
  • [14]
    L’organe exécutif de de CISHIC est, depuis août, le CIRSH ou Comité Interministériel Restreint pour le Shape, que préside également le Comte de Kerchove et dont font partie les délégués du département-pilote, à savoir la Défense nationale et ceux des Travaux publics. Il est prévu que certains départements (spécialement les P.T.T.) seront invités par le Président à se faire représenter selon l’objet de la réunion. Le CIRSH dispose d’un secrétariat permanent au 1, rue Defacqz à Bruxelles. A noter que l’OTAN contribue aux dépenses administratives des comités à concurrence d’un pour cent du coût du transfert du Shape.
  • [15]
    Une suggestion avait été faite dès le départ et immédiatement écartée d’installer provisoirement le Shape à la Cité Administrative à Bruxelles.
  • [16]
    Document non-public mais pouvant être consulté au CISHIC par les membres de ce comité.
  • [17]
    Le bourgmestre fait état, comme argument, de la présence d’une "werkzame bevolking welke zeer rustig is en niet vatbaar voor willekeur of sociale woelingen".
  • [18]
    Solution provisoire mais immédiate : installation du Shape au nouveau Palais de Justice, au Centre Albert 1er et au Palais du Verre ; solution définitive dans la zone de Gosselies-Thiméon-Wayaux ou Mellet.
  • [19]
    Du point de vue de la langue, il faut noter l’irruption du "franglais" et de l’anglais dans les textes et rapports relatifs au transfert du Shape ; il y est question des requirements de l’OTAN ; des viabilités ; de shopping center ; du support center, de time-table, de streamlining, etc..
  • [20]
    Une visite de personnalités du Shape eut lieu en Belgique le 7 juillet sous la direction de Lord Coleridge et de l’Air Marshall Mac Bryan : elles se rendirent à Casteau, Chièvres, Charleroi et dans la région de Nivelles. Selon ces personnalités, tous ces sites étaient trop éloignés de Bruxelles.
  • [21]
    In fine, la R.T.T. trouva une solution d’attente mais pouvant être mise en œuvre dans les délais, tant pour Chièvres que pour Casteau (solution plus onéreuse, toutefois).
  • [22]
    Outre l’aspect "recrutement d’agents locaux" par le Shape et par les divers services installés dans le site, il est généralement affirmé que plus de la moitié des dépenses du personnel Shape se fait dans le pays-hôte. Or, le revenu moyen net annuel est de l’ordre de 600.000 f.b. par an pour les officiers et de 300.000 pour les autres agents. Les dépenses du Shape en Belgique ont été estimées à 130 m. f.b. par an.
  • [23]
    P. Harmel soulignait le fait qu’en compensation, une grande part du coût de la reconstruction d’un site pour le Shape (1250 millions f.b.) "sera dépensée chez nous et profitera donc à notre économie".
  • [24]
    Communiqué des Affaires étrangères, 15.9.1966.
  • [25]
    Ceci posait un problème de pré-financement et de trésorerie. C’est par un budget extraordinaire à la Défense nationale que doivent normalement être couvertes les dépenses imputables à la Belgique. A propos du coût que Shape trouvait excessif, il fut invoqué qu’il était croissant au prorata des délais à pratiquer.
  • [26]
    Cette dernière autorisation concernait les contrats passés avec les bureaux d’études et les assurances ; les contrats de construction et d’équipement et les contrats pour les "viabilités intérieures".
  • [27]
    Sept candidatures jugées dignes d’intérêt furent enregistrées et six sur les sept se soumirent à l’épreuve du projet de contrat à réaliser dans des délais très courts. Les groupes retenus ont constitué "le consortium des architectes et ingénieurs du Shape", 207, boulevard du Souverain, Bruxelles 16.
  • [28]
    Les firmes régionales et les représentants politiques de ces régions se plaignirent des procédures et délais en vigueur qui, selon eux, pénalisaient les firmes locales, de moyenne importance.
  • [29]
    Octroi sera fait aux entrepreneurs de baux emphytéotiques (30 ans ; le canon emphytéotique annuel par ha pour la location serait de 1.500 f.b.).
  • [30]
    Le 11 février 1967, notamment, la Centrale Générale des Services publics, secteur "enseignement", organisa une importante manifestation à Mons pour protester contre le fait que des fonds soient affectés à l’école du Shape alors que les établissements scolaires de la ville sont déficients.
  • [31]
    Les 4 terrains de football et la piscine ne seront pas accessibles à d’outres que les agents du Shape et leurs familles. La polyclinique sera construite intra-muros à Casteau.
  • [32]
    Ceci alimenta une campagne relative à des "accords secrets" qui auraient été signés par P. Harmel à Washington. Le 21 octobre, le ministre démentit des allégations du journal La Wallonie à ce sujet. A noter que, par ailleurs, des accords prévoient depuis 1960 le stockage d’armes atomiques tactiques en Belgique.
    Des accords bilatéraux entre la Belgique et les pays intéressés existent au sujet des installations suivantes :
  • [33]
    ) base britannique de Grobbendonk (dépôts de véhicules, matériels et approvisionnements) ; 2) dépôts allemands de munitions à Baron-ville, Arendonk et Sugny ; 3) dépôts allemands de matériel sanitaire à Nivelles et Saint-Nicolas ; 4) aérodromes canadiens de Bertrix et Saint-Hubert ; 5) installation américaine de communication à Flobecq.
  • [34]
    Ces effectifs sont fixés par le Shape et signalés à la Belgique ; ils ne peuvent être augmentés de plus de 10 % sans l’accord du pays-hôte.
  • [35]
    "En tout état de cause, nous croyons que, sauf maintien d’une coopération étroite entre les quinze dont nous conservons l’espoir, les organes de direction politique et militaire ne sauraient être situés que dans le même pays, afin d’assurer entre la politique et la stratégie, les relations étroites indispensables"
    (P. Harmel, Sénat, 25 mai 1966).
  • [36]
    "Au cas où le déplacement du siège civil de l’Alliance serait décidé, il a été dit, à Bruxelles, qu’il serait logique que l’autorité politique et l’autorité militaire suprême soient situées sur le même territoire".
  • [37]
    A noter que le 10 novembre, le Comité atlantique des plans de défense décida aussi de transférer à Bruxelles le Comité Militaire de Washington.
  • [38]
    Les Américains agrandiront leur école de Boitsfort et l’Ecole Européenne accueillera les Italiens, les Allemands, les Néerlandais.
  • [39]
    motion unanime du Conseil communal d’Ixelles ; 24 novembre 1966.
  • [40]
    Il s’agit là d’un terrain partiellement propriété de la ville de Bruxelles.
  • [41]
    Le CIROTAN, qui s’est réuni pour la première fois le 18 janvier, est présidé par le Comte de Kerchove de Denterghem et comprend le bureau du CISHIC ; un groupe de travail des Travaux publics, un représentant des Affaires étrangères et un de la Défense nationale ; un représentant permanent de la ville de Bruxelles (M. Fallas).
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