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Article de revue

La régulation des ondes GSM

Pages 5 à 49

Notes

  • [1]
    Le terme de radiations non ionisantes (RNI) désigne tout type d’onde électro-magnétique : champs électriques et magnétiques statiques, champs à fréquence extrêmement basse (émis par tous les appareils fonctionnant à l’électricité et par les lignes de transport électrique), radiofréquences (utilisées dans la téléphonie mobile et les fours micro-ondes), rayonnement infra-rouge, lumière visible et rayonnement ultra-violet. Contrairement aux radiations ionisantes (rayons X, gamma et radioactivité), les RNI sont des ondes qui ne sont pas suffisamment énergétiques pour casser les molécules de la matière vivante.
  • [2]
    Aux États-Unis, des questionnements relatifs à l’impact sanitaire de la téléphonie mobile apparaissent dès 1993. À cette époque, les médias américains sont très critiques à l’encontre de l’industrie du téléphone portable, significativement CNN, le Los Angeles Time et le Wall Street Journal. L’événement qui met le feu aux poudres est un procès intenté par un particulier, David Reynard, contre l’équipementier NEC, qu’il accuse d’être responsable de la tumeur au cerveau dont souffre son épouse, tumeur localisée à l’endroit où cette personne appuyait son téléphone sans fil. Aux États-Unis, la sensibilisation aux problèmes potentiels causés par les ondes électro-magnétiques est donc précoce. Elle se démarque des questionnements qui naîtront quelques années plus tard en Europe en ce qu’elle se focalise, non sur les antennes-relais, mais sur les terminaux de téléphonie mobile.
  • [3]
    Selon un rapport de l’Union internationale des télécommunications, la téléphonie mobile est la technologie qui a été le plus rapidement adoptée par les consommateurs au cours de l’histoire (Union internationale des télécommunications, The world in 2009: ICT facts and figures, Genève, octobre 2009).
  • [4]
    Le Soir, 11 octobre 2011.
  • [5]
    Angoisse d’être privé de son GSM. Le terme vient de la contraction de l’expression anglaise « no mo[bile-phone] phobia ».
  • [6]
    Principalement diffusé en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, le premier quotidien atteignait un taux de lecture de 28 % en 2010. Quant au second, principalement diffusé en Région flamande et en Région de Bruxelles-Capitale, il atteignait un taux de lecture de 31 % en 2010.
  • [7]
    « Toute politique publique correspond à une opération de découpage du réel à travers laquelle va être identifiée et “formatée” la substance des problèmes à traiter » (P. MULLER, « Esquisse d’une théorie du changement dans l’action publique. Structures, acteurs et cadres cognitifs », Revue française de science politique, volume 55, n 1, 2005, p. 180).
  • [8]
    Y. MÉNY, J.-C. THOENIG, Politiques publiques, Paris, Presses universitaires de France, 1989.
  • [9]
    P. MULLER, Les politiques publiques, Paris, Presses universitaires de France, 1990, p. 22-23.
  • [10]
    A. SCHNEIDER, H. INGRAM, Policy Design for Democracy, Lawrence (Kansas), University of Kansas, 1997, p. 2-5.
  • [11]
    Le cas échéant, il peut s’agir d’une rationalité limitée (manque d’information, connaissances scientifiques controversées) ou subjective (poids des valeurs dans une société).
  • [12]
    Cf. C. DEBLANDER, La régulation publique des risques liés aux ondes électro-magnétiques en Belgique : le cas de la téléphonie mobile, Thèse de doctorat, Université catholique de Louvain, 2012.
  • [13]
    P. MULLER, Les politiques publiques, op. cit., p. 58-59.
  • [14]
    H. INGRAM, A. SCHNEIDER, P. DELEON, « Social Construction and Policy Design », in P. A. SABATIER, dir., Theories of the Policy Process, Boulder (Colorado), Westview Press, 2007, p. 95.
  • [15]
    P. LASCOUMES, P. LE GALÈS, dir., Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Science Po, 2004, p. 13.
  • [16]
    A. SCHNEIDER, H. INGRAM, Policy Design for Democracy, op. cit., p. 82.
  • [17]
    B. MANIN, Principes du gouvernement représentatif, Paris, Calmann-Lévy, 1995.
  • [18]
    Arrêté royal du 7 mars 1995 relatif à l’établissement et à l’exploitation des réseaux de mobilophonie GSM, Moniteur belge, 8 avril 1995 (modifié par l’arrêté royal du 24 octobre 1997 relatif à l’établissement et à l’exploitation de réseaux de mobilophonie DCS-1800, Moniteur belge, 5 décembre 1997).
  • [19]
    T. WYNGAARD, « La législation et la jurisprudence relatives aux antennes GSM », Courrier hebdomadaire, n° 2035-2036, CRISP, 2009, p. 8.
  • [20]
    Arrêté royal du 7 mars 1995 relatif à l’établissement et à l’exploitation des réseaux de mobilophonie GSM, Moniteur belge, 8 avril 1995.
  • [21]
    Par exemple : Directive 90/387/CEE du Conseil du 28 juin 1990 relative à l’établissement du marché intérieur des services de télécommunication par la mise en œuvre de fourniture d’un réseau ouvert de télécommunication, Journal officiel, L 192, 24 juillet 1990 ; Directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications, Journal officiel, L 074, 22 mars 1996 ; Directive 97/13CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunication, Journal officiel, L 117, 7 mai 1997.
  • [22]
    Loi du 19 décembre 1997 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, modifiant la loi du 21 mars 1991, Moniteur belge, 30 décembre 1997 ; Loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 1er juillet 1999, Moniteur belge, 1er septembre 1999 ; Loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 15 septembre 2006, Moniteur belge, 29 septembre 2006.
  • [23]
    Loi du 12 juillet 1985 relative à la protection de l’homme et de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, les infrasons et les ultrasons, Moniteur belge, 26 novembre 1985.
  • [24]
    Résolution A3-0238/94 du Parlement européen du 5 mai 1994 sur la lutte contre les nuisances provoquées par les rayonnements non ionisants, Journal officiel, C 205, 25 juillet 1994.
  • [25]
    Commission des Communautés européennes, Proposition de recommandation du Conseil relative à la limitation de l’exposition du public aux champs électro-magnétiques 0 Hz-300 GHz, COM(1998) 268 final, 98/0166(CNS), 11 juin 1998.
  • [26]
    Recommandation du Conseil du 12 juillet 1999 relative à l’exposition du public aux champs électro-magnétiques (de 0 Hz à 300 GHz), Journal officiel, L 199, 30 juillet 1999.
  • [27]
    Cf. les rapports annuels 1998, 1999 et 2000 du Comité consultatif pour les télécommunications.
  • [28]
    Le Soir, 13 juillet 1996.
  • [29]
    Le Soir, 4 mai 2000.
  • [30]
    A. BURGESS, Cellular Phones, Public Fears, and a Culture of Precaution, Cambridge, Cambridge University Press, 2004, p. 170.
  • [31]
    J. KINGDON, Agendas, Alternatives and Public Policy, 2e éd., New York, Longman, 2003.
  • [32]
    Loi du 12 juillet 1985 relative à la protection de l’homme et de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, les infrasons et les ultrasons, Moniteur belge, 26 novembre 1985.
  • [33]
    Chambre des Représentants, Commission de l’Infrastructure, des Communications et des Entreprises publiques, Compte rendu analytique, CRA 50 - COM 019, 20 octobre 1999, p. 6.
  • [34]
    Organisme public chargé de la régulation dans les marchés libéralisés des télécommunications.
  • [35]
    Loi du 2 janvier 2001 portant des dispositions sociales, budgétaires et diverses modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, Moniteur belge, 3 janvier 2001.
  • [36]
    À partir de 2002, cette banque de données sera gérée par l’asbl Radio Infrastructure Site Sharing (RISS), supervisée par l’IBPT, visant à une collaboration constructive entre les opérateurs, notamment par un meilleur partage des sites d’antennes.
  • [37]
    Gouvernement wallon, Recueil des bonnes pratiques en matière d’implantation d’installations de télécommunications mobiles, 20 juillet 2000.
  • [38]
    Créée en 1995, cette commission réunit des représentants des organisations professionnelles ou interprofessionnelles (notamment, les fabricants), des représentants des organisations de consommateurs, des représentants des organisations de travailleurs, des experts et des représentants des pouvoirs publics compétents. Parmi ses missions, figure le fait d’émettre des avis lors de l'élaboration des réglementations en rapport avec la protection de la sécurité et de la santé des consommateurs.
  • [39]
    Aujourd’hui, Conseil supérieur de la santé. Créé au XIXe siècle, ce conseil est l’organe d’avis scientifique de l’actuel SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement. Composé d’experts, il formule des avis scientifiques visant à guider les décideurs politiques et les professionnels de la santé, dans le but de garantir et d’améliorer la santé publique.
  • [40]
    Il est à noter qu’un avis discordant est toutefois émis : celui de l’expert de Test-achats, qui déclare vouloir se référer aux recommandations de l’ICNIRP (Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004).
  • [41]
    Conseil supérieur de l’hygiène, Avis sur la proposition d’arrêté modifiant l’arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, 2000, p. 21.
  • [42]
    Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004.
  • [43]
    Pour citer l’exemple de l’opérateur Mobistar, celui-ci met en évidence dans son rapport annuel de 2001 les éléments suivants : « En mars 2001, au terme d’une procédure de mise aux enchères, Mobistar a obtenu une licence UMTS (Universal Mobile Telecommunications System) pour un montant de 150 millions d’euros. Cette licence D, sur laquelle Mobistar avait porté son choix, permettra le développement de services mobiles de troisième génération » (Mobistar, Rapport annuel 2001, 2002).
  • [44]
    C. DEBLANDER, N. SCHIFFINO, « La capture de la régulation des ondes électro-magnétiques ou comment les régions s’affirment par rapport à l’État », in D. AUBIN, F. LELOUP, N. SCHIFFINO, dir., La reconfiguration de l’action publique en Belgique, Louvain-La-Neuve, L’Harmattan/Academia, 2012, p. 53-71.
  • [45]
    Arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 22 mai 2001. Il sera modifié par l’arrêté royal du 21 décembre 2001, Moniteur belge, 29 décembre 2001.
  • [46]
    Arrêté royal du 21 décembre 2001 modifiant l’arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 29 décembre 2001.
  • [47]
    Selon les résultats de l’approche réputationnelle, l’association Teslabel est le seizième acteur le plus influent de notre réseau d’acteurs.
  • [48]
    C. DEBLANDER, N. SCHIFFINO, « Fédéralisme belge et venue shopping : le cas de la téléphonie mobile », Politique et sociétés, volume 31, n° 1, 2012, p. 149-175.
  • [49]
    Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004.
  • [50]
    Arrêté royal du 10 août 2005 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 22 septembre 2005.
  • [51]
    Arrêt n° 193.456 du Conseil d’État du 20 mai 2009.
  • [52]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [53]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance modifiant l’ordonnance du 29 août 1991 organique de la planification et de l’urbanisme, A-178/1, 18 avril 2001.
  • [54]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [55]
    Ibidem.
  • [56]
    Une norme d’immission signifie que, à n’importe quel endroit accessible au public, la puissance enregistrée ne pourra dépasser le seuil fixé.
  • [57]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [58]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-258/1, 27 mars 2006.
  • [59]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/1, 20 juin 2006.
  • [60]
    Ordonnance bruxelloise du 1er mars 2007 relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, Moniteur belge, 14 mars 2007.
  • [61]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Compte rendu intégral, CRI 18, 16 février 2007, p. 37.
  • [62]
    Scientific Committee on Emerging and Newly Identified Health Risks, Opinion on the possible effects of electromagnetic fields (EMF) on human health, Bruxelles, Commission européenne, 2007, p. 41.
  • [63]
    « Research must continue to define what levels of RF related to new wireless technologies are acceptable; but more research should not prevent or delay substantive changes today that might save money, lives and societal disruption tomorrow (…). A precautionary limit of 0.1 µW/cm2 (which is also 0.614 Volts per meter) should be adopted for outdoor, cumulative RF exposure. This reflects the current RF science and prudent public health response that would reasonably be set for pulsed RF (ambient) exposures where people live, work and go to school » (C. BLACKMAN et al., Bioinitiative Report: a Rational for a Biologically-based Public Exposure Standard for Electromagnetic Fields (ELF and RF), 2007, p. 588-589).
  • [64]
    « There are many examples of the failure to use the precautionary principle in the past, which have resulted in serious and often irreversible damage to health and environments. Appropriate, precautionary and proportionate actions taken now to avoid plausible and potentially serious threats to health from EMF are likely to be seen as prudent and wise from future perspectives (…). Although the EEA does not have specific expertise in EMF, the case studies of public hazards analysed (…) show that harmful exposures can be widespread before there is both “convincing” evidence of harm from long-term exposures, and biological understanding of how that harm is caused » (Agence européenne de l’Environnement, Radiation risk for everyday devices assessed, 17 septembre 2007).
  • [65]
    Conseil supérieur de la santé, Avis n° 8519 sur les normes relatives aux antennes émettrices, 4 février 2009.
  • [66]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007, p. 55.
  • [67]
    B. STOCKBROECKX, A. VANDER VORST, Évaluation de l’impact potentiel de la délivrance de licences de téléphonie mobile supplémentaires sur le champ électro-magnétique, février 2001.
  • [68]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007.
  • [69]
    Il est intéressant de préciser que le gouvernement Verhofstadt II (VLD/PS/MR/SP.A–Spirit) attaque l’ordonnance bruxelloise par la voix de son ministre de la Santé publique, Rudy Demotte (PS). Or, celui-ci appartient à un parti qui est dans la majorité au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et qui a voté en faveur de l’ordonnance du 1er mars 2007.
  • [70]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Projet d’ordonnance modifiant diverses dispositions relatives à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions en matière d’environnement, A-176/2, 22 mai 2001.
  • [71]
    Arrêt n° 2/2009 de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009.
  • [72]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007.
  • [73]
    Arrêt n° 2/2009 de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009.
  • [74]
    Ibidem.
  • [75]
    Ibidem.
  • [76]
    Requête en annulation de l’arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques introduite par la SA KPN Group Belgium à l’encontre de la Région de Bruxelles-Capitale, 18 janvier 2010 ; Requête en annulation de l’arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques introduite par la SA Mobistar à l’encontre de la Région de Bruxelles-Capitale, 18 janvier 2010.
  • [77]
    Récemment, par la voix de sa ministre de la Santé, Laurette Onkelinx (PS), et de son ministre de l’Économie, Johan Vande Lanotte (SP.A), l’Autorité fédérale a exprimé sa volonté d’actualiser la réglementation relative aux téléphones portables, en prenant des mesures visant à restreindre l’usage du téléphone portable chez les jeunes et notamment en interdisant la publicité en faveur de l’utilisation de la téléphonie mobile par les enfants de moins de 14 ans sur tous les supports destinés à cette catégorie d’âge (Le Soir, 25 et 26 février 2013).
  • [78]
    Le risque subi des riverains d’antennes est diminué étant donné que ces derniers sont soumis à une « pollution électro-magnétique » plus faible émanant des antennes-relais de 3 volts/mètre. Le risque choisi du consommateur, qui opte pour une utilisation plus ou moins intensive de son téléphone portable, est quant à lui augmenté lorsque l’utilisateur se trouve éloigné d’une antenne-relais. En effet, dans ce cas de figure, le téléphone émet davantage pour fournir une communication (Electrosmog info, Téléphones mobiles et champs électro-magnétiques, 2010).
  • [79]
    Mémorandum of Understanding, 13 mars 2009.
  • [80]
    Cf. par exemple l’intervention de Luc Martens (RUG) dans le cadre des auditions en Commission de l’environnement (Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007).
  • [81]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 8 octobre 2009 fixant la méthode et les conditions de mesure du champ électro-magnétique émis par certaines antennes, Moniteur belge, 20 octobre 2009.
  • [82]
    D. GOSUIN. « La mise en pratique de l’ordonnance GSM en matière de contrôle et de verbalisation des infractions suite aux auditions de l’IBGE et l’IBPT », http://fdf.be, 10 mai 2011.
  • [83]
    « Les problèmes avec la méthode de mesure de l’IBGE », http://demobilisation.wordpress.com, 26 mars 2012.
  • [84]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 18 novembre 2009.
  • [85]
    Arrêté ministériel du 30 juin 2010 relatif à la validation d’un outil de simulation de calcul du champ électrique émis par une antenne émettrice d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 1er septembre 2010.
  • [86]
    La notion de site d’antenne désigne un pylône ou un mât comprenant plusieurs antennes appartenant à un même opérateur ou, compte tenu de l’obligation de partage de site, à plusieurs opérateurs.
  • [87]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 18 novembre 2009.
  • [88]
    A. El Ktibi [député PS au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale], « L’impact économique de la mauvaise couverture GSM en Région de Bruxelles-Capitale », www.ahmedelktibi.be, 17 avril 2012.
  • [89]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition de résolution relative à l’instauration d’un moratoire à la délivrance des permis d’urbanisme d’implantation de dispositifs d’émission de radiations non ionisantes, A-409/1, 27 septembre 2007.
  • [90]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Compte rendu intégral, CRI 2, 25 octobre 2011.
  • [91]
    L’Écho, 23 juillet 2012.
  • [92]
    Cf. par exemple Le Soir, 30 mars 2012.
  • [93]
    Le Soir, 30 et 31 janvier 2013 ; La Libre Belgique, 30 et 31 janvier 2013.
  • [94]
    « La norme bruxelloise est tellement sévère qu’elle cause de sérieux problèmes aux opérateurs pour déployer leurs réseaux. Les conséquences de cette norme bruxelloise sont nombreuses : l’installation de centaines de stations de base supplémentaires, une moins bonne couverture, une perte de qualité des connexions et de gros problèmes de déploiement des nouvelles technologies (…). Les consommateurs sont également victimes de cette situation (tarifs plus élevés, connexions plus lentes, moins bonne couverture et donc une moins bonne accessibilité en général, par conséquent aussi des services d'urgence, de secours et de sécurité). (…) La réglementation bruxelloise actuelle et la politique menée en matière de normes de rayonnement forment une entrave sérieuse aux possibilités techniques de déploiement des nouvelles technologies mobiles, entraînant des conséquences non souhaitées sur le développement économique, la création d'emplois et les consommateurs au sein de la Région de Bruxelles-Capitale » (Institut belge des services postaux et des télécommunications, « Communication du conseil de l’IBPT (…) concernant les normes de rayonnement dans la Région de Bruxelles-Capitale », www.ibpt.be, 15 février 2013).
  • [95]
    Inter-Environnement Bruxelles, « 4G et normes sanitaires bruxelloises : f... the standstill ? », www.ieb.be, 15 février 2013.
  • [96]
    Le communiqué ajoute encore : « Il en va du principe de précaution : près de 1 800 études scientifiques dûment répertoriées mettent en cause l’exposition aux ondes et pointent du doigt des dangers sanitaires pour l’homme, en particulier pour les catégories de la population les plus sensibles. Il s’agit d’une question de santé publique qui est balayée d’un revers de la main par les opérateurs qui entendent maintenir leurs plantureuses marges bénéficiaires. »
  • [97]
    Le Soir, 19 février 2013 ; La Libre Belgique, 19 février 2013.
  • [98]
    L’Écho, 19 février 2013.
  • [99]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Commission de l’Environnement, de la Conservation de la nature, de la Politique de l’eau et de l’Énergie, Compte rendu intégral, CRI 48, 19 février 2013.
  • [100]
    La liste des personnes auditionnée est arrêtée le 26 février 2013. Elle comprend des experts scientifiques, les représentants des opérateurs, et des représentants de Bruxelles Environnement, d’AATL, de l’IBPT, de l’IBGE, du Conseil supérieur de la Santé et de l’ISSEP wallon. Les auditions doivent avoir lieu les 15, 19 et 26 mars.
  • [101]
    La Libre Belgique, 22 février 2013.
  • [102]
    L’Écho, 26 février 2013 ; La Libre Belgique, 26 février 2013 ; Le Soir, 26 février 2013.
  • [103]
    Le Soir, 4 mars 2013.
  • [104]
    L’Écho, 23 avril 2013 ; La Libre Belgique, 24 avril 2013 ; Le Soir, 24 avril 2013.
  • [105]
    Inter-Environnement Wallonie, Synthèse des contributions (Consultation du ministre du Développement territorial sur l’implantation des antennes de téléphonie mobile en Région wallonne), octobre 2008.
  • [106]
    Circulaire ministérielle du 9 janvier 2009 relative à l’installation ou la modification des stations-relais de téléphonie mobile, Moniteur belge, 28 janvier 2009.
  • [107]
    Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/1, 4 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/2, 17 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/3, 17 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/4, 1er avril 2009.
  • [108]
    R. ANDERSEN, F. DELPERÉE, M. VERDUSSEN, Droit administratif, tome 2, Louvain-la-Neuve, Presses Universitaires de Louvain, 1996, p. 20.
  • [109]
    Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/3, 17 mars 2009, p. 5.
  • [110]
    Parlement wallon, Commission de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de la Mobilité, Compte rendu avancé, CRAC 65, 12 janvier 2012.
  • [111]
    En analyse des politiques publiques, la théorie de la dépendance au sentier considère que les changements de politiques publiques interviennent à la marge et de manière progressive étant donné les contraintes qui pèsent sur les acteurs politiques notamment (P. PIERSON, « Increasing Returns, Path Dependence, and the Study of Politics », The American Political Science Review, volume 94, n° 2, 2000, p. 251-267).
  • [112]
    Décret-programme wallon du 22 juillet 2010 portant des mesures diverses en matière de bonne gouvernance, de simplification administrative, d’énergie, de logement, de fiscalité, d’emploi, de politique aéroportuaire, d’économie, d’environnement, d’aménagement du territoire, de pouvoirs locaux, d’agriculture et de travaux publics, Moniteur belge, 20 août 2010.
  • [113]
    IBPT, www.sites.ibpt.be.
  • [114]
    Le Soir, 18 juin 2011.
  • [115]
    La Dernière Heure, 30 août 2011.
  • [116]
    Parlement wallon, Rapport présenté au nom de la Commission de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de la Mobilité, n° 658, 17 juillet 2012.
  • [117]
    Arrêté du gouvernement flamand du 19 novembre 2010 modifiant l’arrêté du gouvernement flamand du 1er juin 1995 fixant les dispositions générales et sectorielles en matière d’hygiène de l’environnement pour ce qui concerne les normes d’antennes émettrices fixes et temporaires pour des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 13 janvier 2011.
  • [118]
    Het Nieuwsblad, 9 mai 2012, 10 juillet 2012 et 10 octobre 2012.
  • [119]
    De Standaard, 20 juillet 2012.
  • [120]
    S’il est malaisé de comparer les trois politiques publiques régionales tant elles diffèrent, ce tableau est présenté à titre indicatif, en guise de synthèse.

Introduction

1Produites naturellement ou induites par les développements technologiques, les radiations non ionisantes et ondes électro-magnétiques  [1] font partie de notre vie quotidienne. Les radars, les systèmes d’alarme, les micro-ondes, les babyphones, les téléphones mobiles, les appareils fonctionnant avec la technologie WiFi, etc. constituent autant de sources d’ondes électro-magnétiques.

2L’impact sanitaire de ces ondes pose question. La presse, tant écrite que radiotélévisée, fait régulièrement état de la pollution électro-magnétique ambiante (electrosmog), cet effet secondaire indésirable qui survient avec tout appareil et câble électrique et électronique. Les médias attirent l’attention du public sur les effets potentiels de la technologie sur la santé humaine, par exemple à l’occasion d’un reportage sur le microwave concern[2] américain ou sur le démontage d’une antenne-relais française. Régulièrement, il est fait usage de titres chocs, tant en Belgique qu’à l’étranger : « Les antennes GSM nuisent à la santé » (Le Soir, 3 octobre 2006), « GSM et antennes-relais, sommes-nous tous des cobayes ? » (RTBF, janvier 2007), « Sous le feu des ondes » (Arte, juillet 2009), « Mauvaises ondes » (France 3, mai 2011), « Dangereux, le GSM ? Une expérience à ciel ouvert » (Le Soir, 2 juin 2011), « Cancer : la menace cellulaire » (Libération, 2 juin 2011), etc.

3Depuis quelques années, les questions relatives à l’innocuité ou à la dangerosité des ondes électro-magnétiques se posent avec une acuité toute particulière, en raison de la téléphonie mobile qui, objet d’un engouement sans précédent  [3], a connu une pénétration exponentielle dans notre environnement quotidien.

4Les effets thermiques des ondes électro-magnétiques sont connus depuis le début des années 1990. Toutefois, aujourd’hui encore, des doutes subsistent quant aux effets athermiques potentiels de la technologie. Outre cette incertitude scientifique, les principales technologies incriminées, à savoir les antennes-relais et les téléphones portables, font l’objet de perceptions différentes de la part de la population. Ayant un impact paysager et étant ressenties comme une technologie exogène par la population, les antennes-relais sont essentiellement perçues négativement. En revanche, étant d’une utilité incontestée et ayant l’aspect familier d’une prothèse communicante – au point d’être qualifiés de « doudou pour adultes »  [4] par certains et de déclencher parfois une « nomophobie »  [5] –, les téléphones portables sont davantage perçus positivement.

5Pour adopter une régulation qui paraisse légitime et acceptable à tout un chacun, les mandataires politiques se doivent de tenir compte notamment des débats qui ont lieu au sein des cénacles scientifiques et au sein de la société civile. Actuellement, le terminal de téléphonie mobile et les antennes-relais font l’objet d’une régulation spécifique à différents niveaux de pouvoir. D’une part, la régulation du téléphone mobile est essentiellement déterminée aux niveaux européen et international, par des instances de normalisation garantissant que les téléphones mis sur le marché respectent des normes de sécurité et de compatibilité électro-magnétique. D’autre part, la régulation des antennes-relais est principalement établie au niveau national : elle vise à garantir l’intégration paysagère de ces dispositifs dans l’environnement et à établir des normes sanitaires ou environnementales destinées à protéger la population contre l’exposition aux champs électro-magnétiques.

6L’objectif de cette étude est d’analyser les développements récents des politiques publiques belges en la matière, en s’attachant tout particulièrement à saisir les interactions qui existent entre les divers acteurs en présence : adoption de normes restrictives (en comparaison de la situation qui prévaut dans d’autres États européens), fréquentes réformes, transfert de compétences aux régions, etc.

7Ce Courrier hebdomadaire se subdivise en quatre parties. La première partie présente brièvement le cadre théorique d’analyse. La deuxième est centrée sur la politique publique fédérale menée dans le domaine de la télécommunication mobile entre 1998-2001 (objectifs, instruments et conséquences). Sont notamment mises en lumière les raisons qui ont mené à l’adoption de normes restrictives en matière d’exposition aux ondes électro-magnétiques. La troisième partie montre le processus par lequel la compétence de la régulation de la téléphonie mobile, à l’origine exclusivement fédérale, est devenue partiellement régionale. Enfin, la quatrième partie expose les politiques publiques menées dans les trois régions depuis 2009.

8L’étude s’appuie sur quatre éléments. Premièrement, des sources primaires (documents parlementaires, arrêts du Conseil d’État, programmes de partis politiques, etc.). Deuxièmement, 38 entretiens menés avec des acteurs ayant participé directement ou indirectement à l’élaboration des décisions publiques (acteurs administratifs, associations et groupes de pression, partis politiques, opérateurs de télécommunication mobile et sources d’ondes électro-magnétiques, chercheurs universitaires et experts). Troisièmement, une étude quantitative longitudinale de la presse, réalisée à partir de l’analyse du traitement des ondes électro-magnétiques dans deux quotidiens généralistes belges sélectionnés en fonction de leur diffusion au sein de la population belge : Le Soir et Het Nieuwsblad[6]. Quatrièmement, une analyse réputationnelle du pouvoir réalisée à partir de questionnaires recensant une liste exhaustive des acteurs influençant la politique publique et soumis à une série d’experts du secteur de la téléphonie mobile.

1. Cadre méthodologique : concepts et grille d’analyse

9Ce premier chapitre a pour but de définir brièvement les concepts utilisés et d’exposer la grille d’analyse employée.

1.1. Les politiques publiques

10Toute politique publique délimite un domaine spécifique d’intervention publique  [7]. En 1989, Y. Mény et T. Thoenig ont identifié cinq éléments constitutifs  [8]. Primo, une politique publique est constituée d’un ensemble de mesures concrètes qui forment sa substance. Secundo, elle comprend des décisions de nature plus ou moins autoritaire. Tertio, elle s’inscrit dans un cadre général d’action, ce qui permet de la distinguer d’une mesure isolée et ponctuelle. Quarto, elle est dotée d’un public : une population affectée positivement ou négativement par les décisions collectives. Quinto, elle définit des objectifs et des buts à atteindre qui peuvent être plus ou moins explicites  [9]. Plus récemment, ces éléments, développés au sein de la science politique française, ont été systématisés dans une grille d’analyse du policy design.

11Pour sa part, la présente étude s’intéressera à la politique publique menée en matière de télécommunication mobile qui, après avoir concerné uniquement l’aspect technique de la problématique dans un premier temps, a évolué ensuite pour inclure également ses aspects sanitaire et environnemental.

1.2. La grille d’analyse du policy design

12Le design d’une politique publique fait référence à son contenu et à sa substance ; il inclut les acteurs qui mettent en œuvre cette politique publique, les groupes qu’elle cible comme source du problème à traiter, les bénéficiaires finaux de la résolution du problème, les moyens pour résoudre le problème, les objectifs poursuivis in fine par les décideurs publics, et les décisions pour les atteindre. Ce design est le produit à la fois d’un contexte sociétal, d’un état des connaissances, des relations de pouvoir au sein de la population, et des institutions  [10].

13La grille d’analyse du policy design repose sur l’idée selon laquelle une politique publique constitue la réponse apportée collectivement à un problème conçu comme collectif. Les justifications qui sont fournies quant au fait de détecter ce problème, de le considérer comme une priorité publique et de le mettre à l’agenda politique sont appelées « justifications rationnelles »  [11]. Les deux indicateurs principaux de cette grille d’analyse sont les objectifs de la politique publique et ses instruments (Schéma 1)  [12].

14

Schéma 1.

Grille d’analyse du policy design en arborescence

Grille d’analyse du policy design en arborescence

1.2.1. Objectifs de la politique publique

15Toute politique publique constitue une tentative d’agir sur un domaine de la société pour freiner l’évolution de celle-ci, la transformer ou l’adapter. Une telle action sur la société suppose dès lors de définir des objectifs « qui vont eux-mêmes être définis à partir d’une représentation du problème, de ses conséquences et des solutions envisageables pour le résoudre »  [13]. Ces objectifs peuvent être plus ou moins explicites ou implicites, plus ou moins précis. Toute politique publique vise à orienter le comportement de groupes-cibles, soit directement, soit en agissant sur leur environnement. Ces choix peuvent découler de différentes valeurs (égalité, équité, etc.), qui sont celles de la société et de ses dirigeants. In fine, une politique publique a pour objectif de promouvoir des valeurs permettant le « (mieux) vivre ensemble ».

16On entend par « hypothèses d’intervention » les explications, les justifications et la légitimation du policy design [14]. Ces hypothèses d’intervention sont influencées par l’histoire de la politique publique et la connaissance dont disposent les décideurs publics. Elles peuvent être utilisées pour perpétuer les valeurs et les constructions sociales existantes, ou pour remodeler celles-ci. Les justifications rationnelles désignent la logique implicite qui lie les éléments du design d’une politique publique entre eux.

1.2.2. Instruments d’action publique

17Un instrument d’action publique est un dispositif à la fois technique et social qui organise des rapports sociaux spécifiques entre la puissance publique et les destinataires de cette dernière en fonction des représentations et des significations dont cet instrument est porteur  [15]. Par le biais de sanctions, de la persuasion ou de l’éducation, les instruments ont pour effet d’altérer le comportement de la population (et plus particulièrement celui des groupes-cibles) afin d’atteindre les objectifs de la politique publique  [16].

18Deux principales catégories d’instruments peuvent être différenciées. D’une part, les instruments traditionnels de type command and control, qui sont les interventions coercitives directes de l’État sur la société. Ils sont de deux types. L’instrument législatif et réglementaire (lois, arrêtés, contrôle administratif, sanctions, etc.) constitue le mode d’intervention le plus classique des pouvoirs publics. L’instrument économique et fiscal remplit une fonction redistributive, selon un raisonnement économique. D’autre part, les nouveaux instruments d’action publique, qui sont de nature moins dirigiste. Ils sont de trois types. Les instruments conventionnels et incitatifs (contrats de gestion ou de partenariat, actions coordonnées, etc.) confèrent un rôle de mobilisation, d’animation ou encore de coordination à l’action publique. Les instruments communicationnels, informatifs et participatifs (forums hybrides, rapports d’activité, publications, études, enquêtes, statistiques, tableaux de bord, campagnes de communication, débats publics, etc.) sont caractéristiques des rapports politiques qui se tissent dans les régimes démocratiques  [17]. Les instruments de normalisation portent sur les normes (ISO, AFNOR, EN, etc.) et standards (Microsoft Word, Adobe PDF, etc.), et définissent des bonnes pratiques en matière de procédures et de production de produits et services.

2. La politique fédérale de 1998 à 2001

19 Le 1er janvier 1994 marque le lancement du réseau numérique de téléphonie mobile, ce qu’on appelle la 2G sous le standard GSM (Global System for Mobile Communications)  [18]. Le premier opérateur de téléphonie mobile qui exploite le réseau GSM est Belgacom Mobile, connu aujourd’hui sous la dénomination commerciale de Proximus  [19]. Suite à la libéralisation des télécommunications impulsée par l’Union européenne, la société Mobistar devient, le 27 août 1996, le deuxième opérateur de téléphonie mobile en Belgique  [20]. En 1999, Proximus et Mobistar sont rejoints par l’opérateur KPN Orange (qui deviendra Base en 2002).

20Dans un premier temps, les instruments de régulation dont se dote l’État fédéral se limitent à des mesures réglementaires visant à encadrer le développement de la technologie. Consistant en une transposition de directives et de recommandations européennes  [21], ces mesures s’incarnent dans diverses lois relatives à la protection de la vie privée, à la qualité du service offert, à la libre concurrence et au partage du spectre électro-magnétique  [22].

21Cette régulation est toujours d’actualité. Mais au fil du temps, elle a été complétée pour prendre progressivement en compte des aspects sanitaires et urbanistiques. Cette évolution s’est faite sous l’impulsion d’une double controverse : les effets potentiels des ondes électro-magnétiques sur la santé, d’une part, et l’impact paysager des antennes-relais sur l’environnement, d’autre part.

2.1. Facteurs explicatifs de l’intervention de l’Autorité fédérale

22En dépit d’une loi adoptée en 1985  [23], les véritables prémices des politiques publiques belges en matière de régulation de la téléphonie mobile se situent en 1998, lorsque l’Autorité fédérale met la problématique sanitaire des ondes électro-magnétiques à son agenda. Cet intérêt s’explique par quatre facteurs principaux : un effet de diffusion des travaux européens en matière de radiations non ionisantes, la naissance d’une controverse au sein de la société civile au sujet des impacts potentiels de la technologie de la téléphonie mobile sur la santé, l’effet des crises sanitaires sur la décision publique et la présence du parti écologiste au sein de la coalition gouvernementale fédérale.

2.1.1. La recommandation européenne du 12 juillet 1999

23Très tôt, le Parlement européen montre sa volonté d’intervenir dans les matières liées aux ondes électro-magnétiques. En 1994, il adopte une résolution relative à la lutte contre les nuisances provoquées par les rayonnements non ionisants  [24], qui vise à encourager l’adoption d’une directive encadrant l’exposition des travailleurs à ces rayonnements – seul secteur dans lequel la Commission européenne puisse intervenir par voie de directive en matière sanitaire.

24Souhaitant cibler l’ensemble de la population, et non les seuls travailleurs, et intervenir sur une base sanitaire, la Commission européenne décide d’agir par l’adoption d’une disposition non contraignante (et non d’une directive). En juin 1998, elle dépose donc une proposition de recommandation relative à la limitation de l’exposition du public aux champs électro-magnétiques (0 Hz-300 GHz), justifiant son intervention de la sorte : « Compte tenu de l’engagement sans cesse accru de la Communauté en faveur d’activités dans divers secteurs industriels susceptibles d’accroître l’exposition de la population aux champs électro-magnétiques ainsi que des préoccupations des décideurs, professionnels de la santé, groupes de défense d’intérêts et de la population en général, des effets de ces champs, la Commission a décidé de fixer des principes communs dans ce domaine à l’échelon communautaire. Ce cadre commun est mis en place au moyen de recommandations du Conseil (…) et porte sur les principes généraux de limitation des expositions aux fins de prévenir les effets nocifs sur la santé. »  [25]

25Un an plus tard, au terme de travaux auxquels ont notamment participé des députés européens belges – dont Magda Aelvoet (Agalev) et Paul Lannoye (Écolo) –, la recommandation est adoptée par le Conseil européen le 12 juillet 1999  [26]. Elle préconise une norme de 41,2 volts/mètre pour une fréquence de 900 MHz, en référence aux valeurs guides proposées par l’International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection (ICNIRP). Il va de soi que l’Union européenne n’empêche en aucun cas ses États membres d’adopter des dispositions plus restrictives.

2.1.2. La naissance d’une controverse au sein du grand public

26L’étude longitudinale de la presse quotidienne montre que, en 2000, le nombre d’articles consacrés à la problématique des ondes électro-magnétiques a sensiblement augmenté dans Le Soir et Het Nieuwsblad (Graphique 1). Cet intérêt accru manifesté par la presse pour la problématique en 2000 peut être considéré comme révélateur de la conscientisation qui s’opère alors dans le grand public.

27

Graphique 1.

Graphique 1.

Nombre d’articles consacrés à la problématique des ondes électro-magnétiques dans Le Soir et Het Nieuwsblad (1988-2012)

28Cette sensibilisation de la société civile belge est à mettre en rapport direct avec l’importante évolution alors en cours sur le terrain, à savoir une densification sensible du réseau de télécommunication mobile, suite à deux facteurs concomitants. D’une part, la libéralisation des télécommunications imposée par l’Union européenne entraîne l’apparition de trois opérateurs sur le marché belge. Or, chaque opérateur est tenu de déployer son propre réseau, ce qui entraîne automatiquement une multiplication du nombre d’antennes-relais. D’autre part, l’année 2000 marque le passage d’une technologie confidentielle à une technologie grand public  [27].

29L’implantation des réseaux de Proximus et Mobistar s’était réalisée dans un calme relatif. L’érection du réseau Proximus avait été discrète, notamment parce que les antennes étaient la plupart du temps installées sur les bâtiments appartenant à l’ancienne RTT  [28]. Après 1999 par contre, lors de l’implantation du réseau du troisième opérateur, la controverse a débuté. Comme le note Le Soir : « Les deux premiers opérateurs sont passés entre les mailles du filet et KPN Orange a hérité de tout le mécontentement. »  [29]

30La controverse qui naît au sein du grand public porte sur deux éléments. D’une part, l’apparition de nombreuses antennes-relais sur le territoire belge. D’autre part, les risques potentiels présentés par les ondes électro-magnétiques. Le premier élément est nouveau. En revanche, les racines du second sont un peu plus anciennes : l’émergence de questionnements au sein de la société civile belge à l’égard de la technologie de téléphonie mobile a été originellement liée aux échos de procès menés à l’étranger à l’encontre de l’industrie du téléphone portable  [30], ainsi qu’à ceux de mobilisations dans d’autres pays (en Australie en 1994, en Irlande en 1996, en Grande-Bretagne en 1998, etc.).

2.1.3. Le souvenir des récentes crises sanitaires et environnementales

31Suite aux différentes crises sanitaires et environnementales, les mandataires politiques se montrent attentifs aux impacts potentiels des mesures prises. Des événements comme les accidents industriels de Bhopal (1984) et de Tchernobyl (1986), le naufrage du Free Herald Entreprise (1987), la crise de la vache folle (au milieu des années 1990) et la crise de la dioxine (1999) sont autant de catalyseurs d’évolution institutionnelle : la cellule nationale de crise ou l’Agence fédérale de sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) sont ainsi des émanations directes de ces événements.

32Cet élément constitue à la fois un élément explicatif de la mise à l’agenda de la régulation des ondes électro-magnétiques, mais également de l’orientation restrictive de la décision publique (cf. infra).

2.1.4. L’arrivée des partis écologistes au sein du gouvernement fédéral

33En 1999, les partis écologistes participent pour la première fois de leur histoire au gouvernement fédéral. Sur les matières environnementales, ils saisissent cette fenêtre d’opportunité et jouent un véritable rôle d’entrepreneur politique  [31]. Le portefeuille de la Santé publique et de l’Environnement est confié à l’ancienne députée européenne Magda Aelvoet (Agalev) qui, en application de la loi du 12 juillet 1985  [32], œuvre à une intervention de l’autorité fédérale en matière sanitaire.

2.2. Les mesures du gouvernement Verhofstadt I

34 Sous le gouvernement Guy Verhofstadt I (VLD/PS/Fédération PRL FDF MCC/SP/Écolo/ Agalev), deux instruments législatifs importants sont adoptés : la loi du 2 janvier 2001 et l’arrêté royal du 29 avril 2001.

2.2.1. La loi du 2 janvier 2001

35Suite aux levées de boucliers contre les antennes-relais, émanant tant de la population que des autorités publiques communales, l’octroi des permis d’urbanisme nécessaires aux installations de télécommunication mobile est fortement ralenti à partir de 2000. Ces retards nuisant au déploiement de la technologie et aux obligations de couverture du territoire, et nonobstant la compétence régionale dans l’octroi de ces permis d’urbanisme, le législateur fédéral tente de désamorcer l’aspect urbanistique du problème en encourageant le partage de sites. Le ministre des Télécommunications s’était en effet tourné vers le secteur privé pour favoriser le partage d’infrastructures : « J’ai (…) convoqué les différents opérateurs afin de trouver une solution. Le partage de site est une option à envisager. La présence massive d’antennes de ce type influe négativement sur le sentiment de bien-être ; une limitation du nombre d’antennes peut donc constituer un remède »  [33]. Parallèlement, le ministre avait chargé l’Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT)  [34] de trouver des solutions à même de débloquer la situation. L’IBPT avait conseillé au gouvernement fédéral de recourir au site-sharing, c’est-à-dire au regroupement des antennes des trois opérateurs. Cette suggestion ayant reçu l’assentiment du Conseil des ministres, l’obligation de partage de sites est consacrée dans l’article 6 de la loi du 2 janvier 2001  [35]. Ce site-sharing est destiné à résorber les problèmes esthétiques et urbanistiques liés aux antennes-relais par une meilleure intégration paysagère des antennes.

36 En marge de ces instruments de type autoritaire, de nouveaux instruments d’action publique sont également utilisés. L’IBPT et les opérateurs collaboreront pour la réalisation d’une banque de données recensant les divers sites d’antennes-relais existants  [36]. Par le biais de cet outil, disponible sous la forme d’un site Internet, l’État met donc en place un type d’instrument informatif. Parallèlement, un autre site en ligne, www.infogsm.be, présente la réglementation en vigueur, expose des détails techniques sur la technologie et prodigue certains conseils aux utilisateurs (par exemple, l’utilisation d’un kit oreillette). Pour mener cette politique publique, une partie des rentrées financières provient des opérateurs de télécommunication mobile qui paient des redevances annuelles pour l’utilisation du spectre électro-magnétique, ce qui assure une rentrée financière de 387 000 euros par opérateur à l’État.

37 De plus, au niveau régional, dans le cadre des procédures de permis d’urbanisme octroyées, une plus grande transparence au sujet des projets d’implantation des antennes-relais est décidée, notamment par le ministre wallon de l’Aménagement du territoire, Michel Foret  [37]. Au niveau régional, l’implantation des antennes-relais est soumise à un permis d’urbanisme délivré par le fonctionnaire délégué. Au niveau communal, des instruments participatifs sont également utilisés, par le recours quasi systématique aux enquêtes publiques. Celles-ci sont destinées à informer et à recueillir le point de vue des riverains lors de projets d’implantation d’antennes-relais.

2.2.2. L’arrêté royal du 29 avril 2001 : un compromis entre enjeux commerciaux et sanitaires

38 La ministre de la Santé publique et de l’Environnement consulte deux instances quant à la norme d’exposition à adopter : la Commission pour la sécurité des consommateurs  [38] et le Conseil supérieur de l’hygiène (CSH)  [39]. Toutes deux plaident en faveur d’une norme stricte.

39 Le 10 juillet 2000, la Commission pour la sécurité des consommateurs estime que « le principe de précaution impose d’adopter des limites de rayonnement électro-magnétique les plus restrictives possible en vue de la protection de la population (…). Il convient d’adopter les valeurs maximales suivantes pour le rayonnement électro-magnétique : 4 volts/mètre à 900 MHz »  [40]. La Commission considère en outre que cette stratégie de précaution doit être élargie à d’autres dispositifs émettant des ondes électro-magnétiques, notamment les radios et les télévisions. De même, le 11 octobre 2000, le Conseil supérieur de l’hygiène remet un avis  [41] justifié par l’application des principes de précaution – dont le principe ALARA (As low as reasonably achievable : « Aussi bas que raisonnablement possible »). Il recommande « d’appliquer au moins un facteur 100 en densité de puissance » par rapport à la norme de la Commission internationale pour la protection contre les rayonnements non ionisants (ICNIRP), qui est de 4,7 W/m² soit 42 volts/mètre. Bien plus, le Conseil propose lui-même un facteur 200 « compte tenu de l’état actuel des connaissances scientifiques et de la technologie », soit, pour 900 MHz, 0,024 W/m² ou 3 volts/mètre. Il ajoute que cette dernière norme ne poserait « aucun problème économique, du moins en ce qui concerne les antennes actuelles de téléphonie mobile »  [42].

40La ministre fédérale de la Santé ne peut toutefois se prévaloir d’un monopole dans cette matière. Intervient aussi le ministre des Télécommunications, Rik Daems (VLD). Or, celui-ci travaille également à l’élaboration d’une norme d’exposition de la population aux ondes électro-magnétiques, veillant notamment à garantir le déploiement de la technologie. Sa préoccupation est double. D’une part, éviter d’entraver le secteur des télécommunications mobiles afin d’éviter des retombées fâcheuses sur le taux de couverture du territoire et sur la facture payée par l’utilisateur. D’autre part, en décembre 2000 s’ouvriront les enchères par lesquelles les opérateurs acquerront les licences UMTS (Universal Mobile Telecommunications System : la technologie de téléphonie mobile de troisième génération, ou 3G), source de revenus non négligeables pour l’État  [43]. Le ministre est en outre influencé par le point de vue de l’IBPT. Il demande donc d’appliquer la norme de 41,2 volts/mètre préconisée par les instances internationales comme l’Union européenne, l’ICNIRP ou l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

41Après de longues discussions, obérées par un litige sur la répartition des compétences entre entités fédérées et autorité fédérale  [44], le gouvernement fédéral opte pour une norme de 20,6 volts/mètre. Cette décision résulte d’un compromis entre les différents enjeux en présence : d’une part, garantir une offre de services de qualité en matière de téléphonie mobile et obliger les opérateurs à atteindre un taux de couverture élevé du territoire belge et, d’autre part, garantir la protection de la santé de la population en application du principe de précaution.

42 Il semble toutefois que la décision ait été fortement influencée par l’avis du CSH, si l’on en croit les entretiens que nous avons effectués et l’approche réputationnelle que nous avons menée. Cette dernière montre que le CSH est considéré comme l’acteur le plus influent au sein du réseau de politique publique (Tableau 1).

Tableau 1.

Dix acteurs influents dans le secteur de la téléphonie mobile

1 Conseil supérieur de la santé (CSS) (anciennement Conseil supérieur de l’hygiène)
2 Organisation mondiale de la santé (OMS)
3 Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale
4 Ministre fédéral de la Santé
5 Ministre régional de l’Environnement
6 Parlement wallon
7 Institut scientifique de service public (ISSEP)
8 Proximus
9 André Vander Vorst (expert en hyperfréquences de l’UCL et ancien membre du Conseil supérieur de la santé)
10 International Commission on Non-Ionizing Radiation Protection (ICNIRP)

Dix acteurs influents dans le secteur de la téléphonie mobile

Source : Enquête réputationnelle réalisée auprès de 21 experts du secteur de la téléphonie mobile en novembre 2011.

43 Le 22 décembre 2000, un projet d’arrêté royal préconisant la norme de 20,6 volts/mètre est approuvé en première lecture par le Conseil des ministres. L’arrêté royal qui en est issu date du 29 avril 2001 : « Les opérateurs sont tenus de limiter au maximum la puissance d’émission en tenant néanmoins compte des exigences techniques liées à un service de qualité. En tout cas, l’exposition totale de la population aux champs électro-magnétiques doit être inférieure à 0,02 W/kg (la valeur moyenne sur tout le corps). La valeur de 0,02 W/kg [20,6 volts/mètre] est une valeur fixe pour le facteur de précaution de 200. »  [45] Un large spectre est couvert, incorporant la bande de fréquence comprise entre 10 MHz et 10 GHz (dont les radios et les télévisions, le réseau STIB, le réseau ASTRID, la SNCB ou Belgocontrol). Les opérateurs de télécommunication mobile constituent le principal groupe-cible de l’arrêté royal, comme le montre l’analyse lexicométrique (les termes « opérateurs », « stations de base », « antennes » et « GSM » sont utilisés à 39 reprises dans l’arrêté royal).

2.2.3. Mise en perspective

44 La loi du 2 janvier 2001 et l’arrêté royal du 29 avril 2001 fixent le cadre de la politique menée par l’Autorité fédérale. Cette politique vise à résorber les problèmes engendrés par la multiplication des antennes-relais. La réponse élaborée est à la fois urbanistique et esthétique (promotion du site-sharing), ainsi que sanitaire. Néanmoins, ces deux réponses sont partiellement contradictoires, le partage de site entrant en opposition avec les objectifs de santé publique.

45 En termes de gestion de l’espace, le site-sharing représente une bonne solution puisqu’il permet de concentrer les antennes en un nombre de lieux limité, et donc de réduire le sentiment d’agression visuelle qu’éprouve la population. Pour les opérateurs, ce système permet en outre de limiter le nombre de dossiers à introduire, et de réduire le nombre de recours potentiels au Conseil d’État. Par contre, en termes de santé publique, le site-sharing présente l’inconvénient d’accroître l’exposition aux ondes électro-magnétiques des personnes qui vivent à proximité d’une antenne. De ce point de vue, certains experts scientifiques estiment qu’il est préférable, pour la protection des êtres humains et de l’environnement en général, d’éviter les conglomérats d’antennes et de leur préférer une dissémination sur le territoire.

46L’aspect urbanistique et l’encouragement au site-sharing sont congruents avec les intérêts du secteur des télécommunications. Cette dimension inscrit la politique du ministre des Télécommunications et de son administration dans une certaine dépendance par rapport aux retombées des technologies mobiles : celles-ci présentent en effet de sensibles avantages lucratifs pour l’État, en termes de rentrées fiscales et de croissance de l’économie. De plus, l’État se montre protecteur à l’égard du secteur étant donné le lancement commercial de la troisième génération (3G) en mars 2001 et la nécessité de déployer la technologie. Dans ce contexte, les autorités publiques essaient donc d’adopter une solution qui soit la moins limitative pour le secteur. Ajoutons en outre que le secteur des télécommunications est peu enclin à se voir imposer une régulation, d’autant plus qu’il a précédemment pu bénéficier d’une relative liberté.

47Quant à lui, l’aspect sanitaire est porté par la ministre de la Santé publique, par des instances scientifiques comme le CSH, par les associations de riverains et les groupements qui s’interrogent sur l’impact sanitaire de la technologie. Ces préoccupations sont partiellement prises en compte dans la législation, même si celle-ci semble prendre pour principale ligne de conduite de ne pas entraver le développement du secteur.

48Au confluent de ces deux aspects, un organisme public de régulation joue un rôle dans le dénouement des conflits urbanistiques et dans la mise en œuvre du versant sanitaire de la politique publique. En effet, avec l’arrêté royal du 21 décembre 2001  [46], l’IBPT reçoit la mission de contrôler les ondes électro-magnétiques sur le terrain, ce qui lui confère quatre compétences : fixer – partiellement du moins – des normes, surveiller l’application de ces normes, sanctionner les violations, et être le principal conseiller technique et administratif du gouvernement fédéral. La désignation de cet acteur de mise en œuvre atteste de la prédominance du poids du secteur des télécommunications dans cette matière au niveau fédéral. Il est en effet inattendu que ce soit l’IBPT, et non le SPF Santé publique, qui soit chargé de l’application des mesures de santé publique. L’intervention de l’IBPT a été justifiée par le déficit de moyens humains et le manque d’expertise des pouvoirs publics belges.

3. Vers une compétence régionale (2001-2009)

49 En 2001, l’Autorité fédérale dispose d’un monopole en matière de régulation des ondes électro-magnétiques. Mais cette exclusivité lui est bientôt contestée par les régions, à commencer par la Région de Bruxelles-Capitale.

50 S’engage alors un bras de fer, qui se conclut par l’arrêt de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009, par lequel sont reconnues les compétences régionales en la matière.

3.1. Les arrêtés du Conseil d’État des 15 décembre 2004 et 20 mai 2009

51Jugeant laxiste la norme de 20,6 volts/mètre adoptée par l’Autorité fédérale, une personne physique, Paul Lannoye (président du groupe des Verts au Parlement européen de 1999 à 2001), et une association environnementale mobilisée contre les dangers potentiels des ondes électro-magnétiques, Teslabel, contestent le choix de cette norme devant le Conseil d’État.

3.1.1. L’influence des groupes de pression

52 Les groupes de pression consistent en diverses associations mobilisées contre le risque électro-magnétique. Leur action s’accroît au cours de la première décennie du XXIe siècle.

Croissance du nombre d’opposants aux ondes électro-magnétiques

53
À partir de 2001, un élargissement de la participation au mouvement d’opposition aux ondes électro-magnétiques procure un poids plus important aux acteurs contestant les mesures fédérales.

54 Jusqu’alors, Teslabel était le seul acteur influent mobilisé dans les matières relatives aux radiations non ionisantes  [47]. En dehors des comités de quartier qu’elle fédère, cette association était en effet à l’époque seule à se mobiliser de manière permanente à l’encontre des effets négatifs potentiels des ondes électro-magnétiques. Mais à partir de 2001, de nouvelles associations embrassent cette cause, dont les plus importantes sont l’asbl Groupe de réflexion et d’action pour une politique écologique (GRAPPE), Inter-Environnement Wallonie (IEW), le Collectif de lutte antennes GSM (Clag), Espace Environnement, Inter-Environnement Bruxelles (IEB), Beperk de straling et Dé-mobilisation.

55 La mobilisation de ces associations fait apparaître des situations contrastées en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles. C’est en Wallonie que la représentation est la plus importante. À Bruxelles, ce sont principalement deux acteurs organisationnels qui sont mobilisés. En Flandre, en dehors de l’association Beperk de straling, le tissu associatif reste marginal.

Stratégies de communication

56
Les diverses associations veillent à faire entendre leur point de vue, que ce soit dans les médias ou dans les divers cénacles dans lesquels le problème des ondes électro-magnétiques est discuté. Pour cela, elles présentent un cadrage, c’est-à-dire une définition du problème que constituent d’après elles les ondes électro-magnétiques, auprès de la presse et des mandataires politiques.

57 Les associations dénoncent l’implantation anarchique des antennes-relais à proximité des lieux de vie, critiquent l’adoption de normes trop laxistes en matière d’ondes électro-magnétiques, demandent une protection accrue des citoyens, exigent la préservation de zones à basse exposition aux ondes électro-magnétiques dans des endroits sensibles (écoles, hôpitaux, habitations) et vantent l’application des principes de précaution (dont le principe ALARA). À cet égard, elles font référence aux erreurs commises dans le passé concernant le manque d’application du principe de précaution : dioxine, encéphalopathie spongiforme bovine, amiante et tabac (ce dernier exemple servant à attirer l’attention sur les accointances entre l’OMS et les industriels). Sur le plan des arguments scientifiques, ces groupes de pression contestent les avis des instances scientifiques telles que l’ICNIRP et l’OMS, considérant que celles-ci ne prennent en considération que les effets thermiques. Ils font par ailleurs référence à une expertise scientifique qu’ils qualifient d’indépendante.

3.1.2. L’annulation des arrêtés royaux du 29 avril 2001 et du 10 août 2005

58 Le recours introduit en juillet 2001 par Teslabel comporte plusieurs motifs, dont la violation de certains articles de la loi spéciale de réformes institutionnelles du 8 août 1980 (premier moyen) et le besoin d’une protection accrue de la population (deuxième moyen).

59Le premier moyen invoqué s’appuie sur les compétences régionales en matière d’environnement : Teslabel argue que ce sont les régions, et non l’Autorité fédérale, qui sont habilitées à édicter des normes en matière d’exposition de la population aux radiations non ionisantes  [48]. Le 15 décembre 2004, ce premier moyen est considéré comme non fondé par le Conseil d’État  [49]. En revanche, le Conseil d’État considère le deuxième moyen comme fondé, l’avis du CSH n’ayant pas été pris en compte par l’arrêté royal du 29 avril 2001. Ce dernier est alors annulé pour vice de forme.

60Prenant acte de cette annulation, le ministre fédéral de la Santé publique, Rudy Demotte (PS), conçoit un nouvel arrêté royal prenant cette fois formellement en considération l’avis du CSH. Cet arrêté royal est adopté le 10 août 2005  [50]. Estimant les changements apportés insuffisants, Teslabel introduit le 21 novembre 2005 un second recours auprès du Conseil d’État afin de faire annuler l’arrêté royal de 2005, se fondant sur les deux mêmes moyens qu’en 2001. L’association obtient à nouveau gain de cause, le 20 mai 2009  [51].

61Ce second arrêt d’annulation du Conseil d’État n’a toutefois qu’une importance relative, eu égard à la décision antérieure de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009 (cf. infra).

3.2. L’arrêt de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009

62Divers députés du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale relaient les points de vue des groupes de pression. Pour intervenir dans la régulation des ondes électro-magnétiques, ils utilisent deux leviers : les compétences régionales en matière d’Aménagement du territoire et celles en matière d’Environnement. D’une part, il s’agit de soumettre les stations de base à un instrument réglementaire plus restrictif que le permis d’urbanisme : le permis d’environnement. D’autre part, il s’agit de déterminer et définir des normes d’exposition de la population aux ondes électro-magnétiques, compte tenu de l’impact de ces dernières sur l’environnement, la faune et la flore.

3.2.1. L’ordonnance bruxelloise du 1er mars 2007

63En mai 2002, trois parlementaires de la Région de Bruxelles-Capitale, Dominique Braeckman (Écolo), Alain Adriaens (Écolo) et Béatrice Fraiteur (FDF) déposent une proposition d’ordonnance  [52] ayant un double objet : réglementer l’exposition de la population aux ondes électro-magnétiques et, en référence à une proposition d’ordonnance de 2001  [53], soumettre les antennes-relais à un permis d’environnement. Cette intervention est justifiée par l’augmentation de l’inquiétude de la population « face au développement considérable du réseau »  [54], ainsi que par des recherches scientifiques ayant « mis en évidence les effets nocifs d’une exposition des êtres vivants à ces ondes »  [55]. Est proposée une norme d’immission  [56] environnementale de 0,6 volts/mètre, en application du principe de précaution.

64La compétence des régions dans la définition de normes d’exposition en matière d’ondes électro-magnétiques ne va pas de soi. Elle dépend de la volonté des acteurs politiques régionaux d’intervenir dans ce domaine. C’est pourquoi la proposition d’ordonnance bruxelloise de mai 2002 indique : « L’arrêté royal du 29 avril 2001 fixe une norme d’exposition maximale pour les rayonnements électro-magnétiques : le SAR (débit d’absorption spécifique) moyen sur tout corps ne peut dépasser la norme de 0,02 W/kg. Il y a lieu de préciser que cette législation s’inscrit dans le cadre de la compétence fédérale en matière de santé publique, et a donc pour objectif la protection de la population contre les effets nocifs des ondes électro-magnétiques visées. À ce titre, le législateur fédéral peut arrêter des normes d’exposition humaine aux rayonnements visés. Le législateur régional quant à lui, eu égard à sa compétence en matière d’environnement, est habilité à fixer des normes d’immission relatives aux antennes, afin d’éviter que l’environnement ne soit pollué par ces radiations. »  [57] Les parlementaires régionaux estiment donc que l’Autorité fédérale et les régions ont respectivement la capacité de définir des normes d’émission et d’immission électro-magnétiques.

65Retirée par ses auteurs, semble-t-il en raison de la difficulté de mettre en œuvre une norme de 0,6 volts/mètre, la proposition d’ordonnance de 2002 est remplacée par une proposition d’ordonnance semblable de Dominique Braeckman, datée du 27 mars 2006 et proposant cette fois une norme d’immission de 3 volts/mètre  [58]. Cette proposition est à son tour retirée, par manque de prise en considération, pour être remplacée par une nouvelle proposition d’ordonnance datée de juin 2006  [59], et signée par sept parlementaires : Dominique Braeckman (Écolo), Jacques De Coster (PS), André du Bus de Warnaffe (CDH), Marie-Paule Quix (SP.A), Walter Vandenbossche (CD&V), Viviane Teitelbaum (MR) et Yaron Pesztat (Écolo).

66Deux facteurs expliquent la motivation des acteurs politiques régionaux à exercer une compétence en matière d’ondes électro-magnétiques. D’une part, Écolo, qui joue un rôle d’entrepreneur de politique publique dans les matières liées aux radiations non ionisantes, y voit une opportunité de définir une norme restrictive et d’agir dans une matière dont il est exclu au niveau fédéral (ne faisant pas partie du gouvernement Verhofstadt II). Deuxièmement, les Régions bruxelloise et flamande y voient une opportunité d’accroître le champ de leurs compétences. Telle est d’ailleurs la raison pour laquelle l’ordonnance est signée par divers partis politiques flamands, et pour laquelle la Région flamande soutient la Région de Bruxelles-Capitale auprès de la Cour constitutionnelle alors que les radiations non ionisantes ne sont pas véritablement à l’agenda politique flamand (cf. infra).

67Le 1er mars 2007, l’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, est sanctionnée par le gouvernement bruxellois  [60]. Il est prévu qu’elle entre en vigueur deux ans après sa publication au Moniteur belge, soit le 14 avril 2009.

68Outre son antériorité par rapport aux deux autres régions du pays, il convient de souligner ici deux particularités du processus législatif bruxellois.

69D’une part, la réglementation a pour origine une initiative parlementaire – alors qu’en Wallonie et en Flandre, il s’agira d’une initiative de l’exécutif, par le biais respectivement d’une circulaire ministérielle et d’un arrêté du gouvernement (cf. infra). Cela s’explique sans doute par le fait que nombre de parlementaires bruxellois sont également des acteurs de terrain au niveau communal ; à titre individuel, ils ont donc été sensibilisés à la problématique des ondes GSM, entre autres lors de leur contact avec les riverains d’antennes-relais. Ici réside également probablement le fait que la norme adoptée est à ce point protectrice des citoyens (au point d’être régulièrement qualifiée de norme la plus sévère du monde par ses détracteurs).

70D’autre part, lors du vote en séance plénière du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, le 16 février 2007, le MR, pourtant dans l’opposition, s’est prononcé en faveur du texte, alors que le VLD, pourtant dans la majorité, s’est abstenu. Le parti libéral flamand a justifié sa position par un possible conflit de compétences : « Le VLD doute de la nécessité et de l’applicabilité de la proposition d’ordonnance. De plus, nous souhaitons demander l’avis du Conseil d’État, afin de vérifier si la Région de Bruxelles-Capitale est compétente en cette matière. »  [61]

3.2.2. La consultation d’experts scientifiques et d’organismes publics

71Avant d’aller plus loin, il convient de souligner que, dans son processus de prise de décision, le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale s’est appuyé, pour les aspects techniques, sur les avis à la fois d’experts scientifiques et d’organismes publics.

72Cette double démarche confirme aux députés bruxellois qu’une norme plus restrictive que celle définie au niveau fédéral est applicable sur le terrain, et ce alors même que les opérateurs de téléphonie mobile en soutiennent l’impossibilité. Par ailleurs, la ministre bruxelloise de l’Environnement est confortée dans le rôle que pourra jouer l’IBGE dans la mise en application d’une norme régionale bruxelloise, cette administration disposant déjà d’une expertise en la matière.

Les experts scientifiques

73
Les experts scientifiques ne participent pas directement à l’élaboration des décisions et des choix politiques. Toutefois, dans des matières complexes, dotées d’une haute technicité comme les ondes électro-magnétiques, ils sont consultés par les mandataires politiques des différents niveaux de pouvoir (international, européen, national et régional). Ainsi, ces instances influencent le processus décisionnel de manière indirecte, en menant des recherches et en réalisant une mission de veille scientifique.

74Les experts scientifiques constituent théoriquement un appui pour légitimer les décisions publiques. Néanmoins, dans le cas des « nouveaux risques » (organismes génétiquement modifiés, pesticides, nano-technologies, radiations non ionisantes, etc.), ils ne se présentent pas toujours en front uni. Cette division découle de conceptions différentes.

75Dans le cas des ondes électro-magnétiques, certaines instances scientifiques (OMS, ICNIRP, Scientific Committee on Emerging and Newly Identified Health Risks) estiment que leurs conclusions doivent reposer sur des preuves avérées, reconnaissant uniquement les effets vérifiables et reproductibles des ondes électro-magnétiques, ce qui correspond à leurs effets thermiques. La majorité des normes de référence de 41,2 volts/mètre se base sur cet effet thermique. Ces instances scientifiques réagissent aux questionnements de l’opinion publique en mettant régulièrement à jour leurs recherches et en confirmant régulièrement l’assertion selon laquelle « aucune conséquence pour la santé lors d’exposition à un niveau plus bas que les limites de l’ICNIRP, fixées en 1998, ne peut être démontrée  [62] ». Selon ces experts, en l’absence de nouvelles preuves scientifiques de nocivité, ces normes restent donc valides.

76Prenant le contre-pied de cette vision positiviste de la science, plusieurs autres instances scientifiques, tels le groupe Bioinitiative, l’Agence européenne de l’environnement (AEE) et le Conseil supérieur de la santé (CSS), estiment quant à eux qu’il faut envisager les effets à long terme que peut produire l’exposition aux ondes électro-magnétiques. Il convient donc, selon ces experts, d’appliquer le principe de précaution.

77Le rapport Bioinitiative de 2007 en reprend les grandes lignes : « La recherche doit continuer, afin de définir des niveaux acceptables d’exposition aux radiofréquences émises par les nouvelles technologies sans fil. La nécessité de nouvelles recherches ne doit pas empêcher ou retarder l’introduction de changements substantiels qui pourraient permettre, aujourd’hui, d’épargner de l’argent, de sauver des vies et d’empêcher des perturbations sociales (…). Une limite de précaution de 0.1 µW/cm2 (c’est-à-dire 0,614 volts/mètre) devrait être adoptée pour une exposition extérieure et cumulée aux radiofréquences. Cela reflète une réponse prudente pour la santé publique, compte tenu de la connaissance actuelle en matière de radiofréquence. Cette réponse devrait être mise en place pour l’exposition aux radiofréquences pulsées dans les endroits où les personnes vivent et travaillent, ainsi que dans les écoles. »  [63] Ce rapport est par ailleurs soutenu la même année par l’AEE, qui ne détient aucune compétence en matière de radiations non ionisantes mais encourage le recours au principe de précaution : « Il existe de nombreux exemples qui illustrent l’échec de la mise en œuvre du principe de précaution par le passé, ce qui s’est traduit par des dommages sérieux et parfois irréversibles sur la santé et l’environnement. Pour éviter des menaces sanitaires sérieuses, plausibles et potentielles émanant des ondes électro-magnétiques, des actions appropriées, précautionneuses et proportionnée doivent être prises maintenant. Cette démarche serait considérée comme prudente et sage au regard des perspectives futures (…). Bien que l’AEE ne dispose d’aucune expertise spécifique en matière d’ondes électro-magnétiques, les études de cas analysées (…) montrent qu’une exposition peut être nuisible avant que n’existent, d’une part, des preuves convaincantes du danger d’une exposition à long terme et, d’autre part, la compréhension des mécanismes biologiques qui rendent cette exposition nuisible. »  [64] En revanche, le rapport Bioinitiative a été fortement décrié. La principale remarque porte sur l’absence de révision du rapport par d’autres experts, ce qui constitue un gage de scientificité. Dès lors, la qualité et le fondement scientifique des conclusions ne peuvent être garantis. De plus, le rapport n’a obtenu aucun soutien de la part des instances de santé nationales ou internationales, en dehors de l’AEE.

78En Belgique, le CSS s’est positionné en faveur de l’application de normes restrictives au nom du principe de précaution et du principe ALARA, en 2009 notamment  [65].

Les organismes publics

79
Différents organismes publics sont consultés au cours du processus législatif bruxellois.

80Tout d’abord, l’Institut belge des postes et télécommunications (IBPT), qui a entretenu jusqu’alors des relations privilégiées avec les opérateurs de télécommunication mobile et avec le ministre des Télécommunications, précise lors d’auditions que la norme de 3 volts/mètre est déjà respectée dans les faits, et que l’abaissement prévu par la Région de Bruxelles-Capitale ne constituerait donc pas un changement copernicien : « L’IBPT a jusqu’à présent réalisé des mesures sur environ 300 sites avec 650 points de mesures. Ces mesures ont eu pour résultat que deux tiers des mesures se situent à moins d’un volt par mètre et que dans 92 % des cas, la norme de 3 volts/mètre conseillée par le CSH n’est pas dépassée. »  [66]

81Ensuite, l’Institut bruxellois pour la gestion de l’environnement (IBGE) est également entendu par les parlementaires. Son représentant rappelle, sous l’impulsion du précédent ministre bruxellois de l’Environnement, Didier Gosuin (FDF), qu’une étude, à savoir une « évaluation de l’impact potentiel de licences de téléphonie mobile supplémentaires sur le champ électro-magnétique »  [67], avait été réalisée en 2001 en Région bruxelloise avec la collaboration du Laboratoire d’hyperfréquences de l’UCL  [68].

3.2.3. La position de la Cour constitutionnelle (15 janvier 2009)

82Étant donné le modus operandi dont ont usé les parlementaires de la Région de Bruxelles-Capitale pour se saisir d’une nouvelle compétence, les opérateurs de télécommunication mobile attaquent, le 23 août 2007, l’ordonnance bruxelloise du 1er mars 2007 devant la juridiction chargée de régler les conflits de compétences : la Cour constitutionnelle. Cette action est suivie, le lendemain, par le recours introduit par le Conseil des ministres, également à l’encontre de l’ordonnance bruxelloise  [69].

83Dans sa défense, la Région de Bruxelles-Capitale indique que son intervention a été mue par des motivations dictées à la fois par l’intérêt des citoyens et des entités fédérées. La Région estime que, afin de protéger les citoyens, il est nécessaire d’intervenir face au danger potentiel représenté par les radiations non ionisantes. En la matière, elle promeut une vision environnementale du problème : elle estime que celui-ci doit être réglé par des politiques d’Environnement (matière régionale) et non par des politiques de Santé publique (matière fédérale). Dans ce cadre, il ne s’agit donc pas tant d’accroître les compétences régionales que de garantir celles-ci : comme l’a expliqué le ministre bruxellois de l’Environnement, Didier Gosuin, à l’entame des discussions relatives aux radiations non ionisantes, l’enjeu est que ne soient pas vidées « de leur substance les compétences environnementales des régions au nom de la santé publique »  [70]. En effet, on touche ici à la frontière, très perméable, qui sépare les notions de santé et d’environnement. Il va de soi que toute régulation environnementale touche immanquablement à la santé publique, puisque, au-delà de l’environnement, c’est au bien-être de la population qu’elle entend œuvrer. Pour la Région de Bruxelles-Capitale, il s’agit donc de faire reconnaître le droit des régions à intervenir dans le domaine de la santé via l’environnement. Si ce droit venait à être contesté (en l’occurrence : si la Cour constitutionnelle venait à considérer que les implications sanitaires de la régulation des ondes électro-magnétiques sont l’apanage du seul niveau fédéral), les compétences régionales en matière d’environnement se verraient considérablement ébranlées.

84Outrepassant ses dissensions politiques internes, la Région flamande soutient la démarche initiée par la Région de Bruxelles-Capitale. En appuyant ainsi l’ordonnance bruxelloise, l’objectif de la Région flamande n’est pas de voir reconnaître la pertinence d’une application du principe de précaution dans les matières liées aux radiations non ionisantes, mais de saisir l’opportunité de capter une compétence supplémentaire.

85Pour leur part, le Conseil des ministres et les opérateurs de télécommunication mobile promeuvent le statu quo, c’est-à-dire une régulation sanitaire à l’échelon fédéral, arguant de sept moyens pour faire annuler l’ordonnance bruxelloise.

86Le premier moyen invoqué par le Conseil des ministres est relatif au respect de la compétence fédérale en matière de santé publique : « À titre principal, il est soutenu que la Région de Bruxelles-Capitale ne serait pas compétente pour adopter l’ordonnance attaquée, dès lors que l’objectif principal de l’ordonnance concerne la protection de la santé de l’homme et que la santé publique relève, à l’exception des compétences attribuées aux communautés, de la compétence fédérale (…). Sous couvert de protéger l’environnement, l’ordonnance attaquée légiférerait en réalité sur l’exposition humaine aux radiations visées et sur la protection de la population contre celles-ci : à aucun endroit des travaux préparatoires concernés – exposé des motifs, commentaire des articles, rapport de la commission ou auditions devant cette commission –, il n’a été question d’une dégradation de l’environnement, de la faune ou de la flore ; seule a été examinée la question de santé publique relative aux conséquences de l’exposition humaine aux radiations non ionisantes. Or, la protection de l’homme n’est pas comprise dans les compétences des régions en matière de protection de l’environnement ; l’ordonnance attaquée empiète sur la compétence de l’État fédéral et interfère avec le champ d’application de l’arrêté royal du 10 août 2005. »  [71]

87Ce premier moyen constitue la pièce maîtresse de l’argumentaire de l’Autorité fédérale : le parlement bruxellois légitime son intervention en matière d’ondes électro-magnétiques sous couvert de sa compétence en matière d’environnement, alors que la vision de la problématique est clairement sanitaire, tant au sein de la population que dans le discours des députés bruxellois. Une analyse lexicométrique des auditions préalables à l’adoption de l’ordonnance du 1er mars 2007  [72] montre d’ailleurs que le terme de santé est mentionné à 114 reprises, alors que la notion d’environnement ne figure qu’à 56 reprises.

88La Région de Bruxelles-Capitale contre ce premier moyen de la sorte : « Pour déterminer l’objet d’un texte, son intitulé et son libellé devraient prévaloir sur les déclarations formulées au cours des travaux préparatoires, a fortiori lorsqu’une norme, comme c’est le cas en l’espèce, est le résultat d’une initiative parlementaire et que la proposition émane de plusieurs députés, de telle manière que la proposition s’appuie sur des déclarations individuelles et non sur un exposé des motifs global. »  [73]

89Le cadrage environnemental proposé par la Région bruxelloise incorpore donc les éléments sanitaires, tout en les transcendant : par le biais d’une régulation relative à l’environnement, elle entend réguler plus largement la « pollution électro-magnétique », en ce que celle-ci a des impacts non seulement sur les êtres humains, mais également sur la faune et la flore. Cette logique s’appuie indirectement sur les arguments hétéroclites présentés par les associations environnementales et par les citoyens qui arguent de revendications relevant à la fois de problèmes sanitaires, environnementaux et d’aménagement du territoire.

90Au niveau fédéral en effet, la nécessité d’aboutir à un compromis entre francophones et néerlandophones a conduit à l’adoption d’une norme consensuelle. Alors que la plupart des partis politiques francophones, mis à part le MR, étaient sensibles à la protection de la population contre les dangers potentiels liés aux ondes électro-magnétiques, la majorité des partis flamands accordaient davantage de prévalence aux aspects économiques de cette problématique (ce qui correspond aux sensibilités des électeurs, différentes en la matière de part et d’autre de la frontière linguistique). Par ailleurs, l’Autorité fédérale a moins marge de manœuvre que les régions dans la définition des normes, eu égard à ses liens avec les opérateurs : étant chargée des télécommunications, elle se doit de tenir compte de cet aspect de la problématique. Les régions, par contre, n’ont pas à se soucier de cet élément.

91La nécessité de tenir compte de l’aspect télécommunications est d’ailleurs mise en avant par l’Autorité fédérale dans son deuxième moyen : « La mise en œuvre de l’ordonnance attaquée, avec les limites qui y sont actuellement prévues, impliquera notamment une perte de couverture, à l’intérieur des bâtiments, de 30 % de la population, pour l’un des opérateurs requérants ; pour compenser cette perte de couverture, 132 sites supplémentaires devraient être installés. La réduction sensible de couverture à l’intérieur des bâtiments induirait, d’une part, une réduction sensible de la population couverte et, d’autre part, une diminution importante de la réponse aux attentes de la clientèle, le tout non seulement en violation des obligations faites aux opérateurs par leurs licences fédérales, mais aussi avec les conséquences que l’on imagine en termes de plaintes de clients et de manque à gagner. »  [74]

92Quant à eux, les opérateurs arguent plus spécifiquement de la question de la liberté de commerce et d’industrie, considérant que la sévérité de la norme bruxelloise induit des conséquences techniques importantes et a une incidence sur l’obligation de couverture du réseau imposée par l’Autorité fédérale. Les opérateurs affirment être confrontés à un dilemme. S’ils respectent la norme d’immission bruxelloise, ils se mettent en défaut par rapport au législateur fédéral, d’une part, en ne répondant pas aux exigences fédérales de partage des sites et, d’autre part, en s’exposant à des sanctions pénales et commerciales prévues si le réseau n’atteint pas un indice général de qualité suffisant (en cas de blocage et de coupure réseau, par exemple). S’ils ne respectent pas la norme d’immission bruxelloise pour se conformer à ces exigences fédérales, les opérateurs s’exposent alors aux sanctions pénales prévues dans l’ordonnance bruxelloise.

93Les cinq autres moyens que fait valoir l’Autorité fédérale sont plus périphériques : respect de la compétence territoriale régionale, atteinte au principe d’égalité et de non-discrimination, etc. Par ailleurs, un élément supplémentaire est mis en évidence quant à la désignation des groupes-cibles de la politique publique : les opérateurs considèrent qu’il est incohérent de réguler les antennes de télécommunication mobile mais de ne pas prendre en compte les radios et les télévisions.

94Au terme du processus, le 15 janvier 2009, la Cour constitutionnelle ne valide aucun des motifs présentés par les requérants. Elle donne donc raison à la Région bruxelloise, qui défendait son ordonnance du 1er mars 2007 contre l’Autorité fédérale et les opérateurs.

95L’importance de cette décision est à souligner. La Cour constitutionnelle se prononce en faveur d’une attribution de la compétence aux régions. Une des pistes qui peut être soulevée pour expliquer l’orientation de cette décision est que la cour a pris en considération le fait que les régions s’occupaient déjà de la problématique des antennes GSM, via leurs compétences en matière de permis d’urbanisme.

96Par ailleurs, fait rare, la Cour constitutionnelle se prononce en faveur de l’application du principe de précaution, en invoquant le fait que, dans le cas des ondes électro-magnétiques, une telle démarche permet de répondre au souci d’assurer le respect du droit à un environnement sain, prévu dans l’article 23 de la Constitution. Le juge constitutionnel estime qu’en la matière, étant donné l’inexistence de normes européennes et internationales contraignantes, le principe de précaution peut être appliqué  [75]. Le contreseing qui est donné par le juge constitutionnel est d’autant plus remarquable que c’est une des premières fois qu’une ordonnance s’appuie sur le principe de précaution. Jusqu’alors, quelle que soit la matière abordée, la Région n’avait adopté d’ordonnance que lorsqu’un danger était avéré. Ici, il s’agit d’une mesure d’avant-garde : comme il y a un risque, la Région applique le principe de précaution. Peu après, par son décret du 3 avril 2009, la Région wallonne rejoindra la Région bruxelloise dans cette démarche.

97Enfin, il est à noter que, après que l’ordonnance du 1er mars 2007 est avalisée par la Cour constitutionnelle, un dialogue se crée entre la Région bruxelloise et les opérateurs. Dès 2009, le ministre de l’Urbanisme, le ministre de l’Environnement, Bruxelles Environnement, l’Administration de l’Aménagement du territoire et du Logement (AATL) et les quatre opérateurs tiennent des réunions mensuelles dans une instance informelle, appelée « plate-forme GSM ». Cette concertation permettra de traiter de la mise en œuvre du dispositif, jusque dans les détails les plus techniques et même les plus concrets du dossier. Lors des premières réunions, les quatre opérateurs viendront essentiellement pour se plaindre de la norme imposée par l’ordonnance. Mais bien vite, la plateforme s’avérera être une instance de discussion constructive. Il ne s’agit toutefois là que d’un lieu de concertation, et non de discussion : les mandataires politiques restent entièrement libres. En l’occurrence, ils ne suivront pas toujours ce qui a émergé des discussions (ce qui explique que deux arrêtés d’exécution feront l’objet de recours devant le Conseil d’État de la part d’opérateurs)  [76].

4. Les politiques régionales de 2009 à nos jours

98Désormais donc, les normes relatives à la téléphonie mobile sont déterminées à divers niveaux de pouvoir. Les normes de produits et les matières liées aux télécommunications restent de la compétence de l’Autorité fédérale  [77]. En revanche, les normes pour l’émission des antennes-relais sont dorénavant définies par les régions (et non plus par l’Autorité fédérale).

99Depuis 2009, les trois régions ont mené des politiques propres dans leur nouveau domaine de compétence. En Région de Bruxelles-Capitale, l’adoption d’une politique publique régionale a été prompte, puisqu’elle a été initiée par l’ordonnance du 1er mars 2007. Récemment attaquée par les opérateurs au motif qu’elle empêcherait le déploiement de la technologie 4G à Bruxelles, cette ordonnance fait actuellement l’objet d’un processus de révision. En Région wallonne, un décret a été adopté le 3 avril 2009 par la coalition PS/CDH. L’actuelle coalition régionale wallonne (PS/Écolo/CDH), en place depuis les élections de juin 2009, souhaite un changement, en vue de se rapprocher du modèle bruxellois. Quant à elle, après avoir connu un long vide juridique, la Région flamande a pris un arrêté du gouvernement le 19 novembre 2010. La réglementation flamande est celle qui a introduit les plus faibles changements par rapport à l’ancienne norme fédérale.

100 Plusieurs dénominateurs communs relient les trois politiques régionales, dont le positionnement en faveur d’une norme de 3 volts/mètre (norme plus restrictive que celle anciennement définie par l’Autorité fédérale, qui était de 20,6 volts/mètre). Cependant, plusieurs différences apparaissent également. La principale d’entre elles concerne la distinction entre norme d’émission et norme d’immission. Une norme d’émission est une norme qui s’applique à chaque opérateur sur chaque site. En revanche, une norme d’immission est une norme qui s’applique globalement à l’ensemble des opérateurs d’un même site ; c’est donc une norme cumulative. Par exemple, une norme d’émission de x volts/mètre signifie que chaque opérateur d’un site peut atteindre au maximum x volts/mètre, tandis qu’une norme d’immission de y volts/mètre signifie que tous les opérateurs d’un même site doivent se partager ces y volts/mètre. En l’occurrence, chaque région a opté pour une solution différente. La Région de Bruxelles-Capitale impose une norme d’immission de 3 volts/mètre par site. La Région wallonne impose une norme d’émission de 3 volts/mètres par opérateur et par antenne. La Région flamande impose une norme d’émission de 3 volts/mètres par opérateur et par antenne et une norme d’immission globale de 20,6 volts/mètre.

101Notre étude s’intéresse aussi aux difficultés de mise en œuvre que rencontrent ces politiques publiques, difficultés qui sont particulièrement sensibles en Région de Bruxelles-Capitale et, dans une moindre mesure, en Région wallonne.

102Il est à noter que l’étude se concentre essentiellement sur la Région bruxelloise, étant donné que cette région offre le cas d’analyse politique le plus intéressant.

4.1. L’ordonnance du 1er mars 2007 de la Région de Bruxelles-Capitale

103La Région de Bruxelles-Capitale a été la première à vouloir se doter d’instruments de mise en œuvre d’une politique publique en matière d’ondes électro-magnétiques. Les jalons du processus ont été posés par une proposition d’ordonnance datant de juin 2006, qui a abouti à l’ordonnance du 1er mars 2007, exécutive à partir du 14 avril 2009 (cf. supra).

4.1.1. Objectifs

104L’objectif visé par la Région bruxelloise est de protéger l’environnement, en ce compris la population. La Région applique le principe de précaution en définissant une norme d’immission de 3 volts/mètre comme la résultante de la contribution électro-magnétique de toutes les antennes de téléphonie mobile. Cette norme est applicable dans toutes les zones accessibles au public.

105 Les justifications rationnelles qui sous-tendent l’adoption de cette norme contraignante sont la controverse persistante à l’encontre des antennes-relais (présence d’associations, couverture médiatique importante (cf. Graphique 1) et peur exprimée par la population), la division des experts scientifiques sur la question et l’application de normes contraignantes dans d’autres pays (Luxembourg) ou dans d’autres régions (Paris, Salzbourg).

106L’idée sous-jacente est qu’il est préférable que toute la population bruxelloise soit exposée à un faible taux d’émission d’ondes électro-magnétiques des antennes-relais, plutôt que de voir une certaine frange de cette population exposée à de forts taux. Cela implique que de nouvelles antennes soient construites un peu partout sur le territoire bruxellois, afin de réduire le risque subi par les riverains d’antennes. Toutefois, cette décision a également pour impact d’augmenter le risque encouru par les utilisateurs du téléphone portable puisque, lors de leurs communications, ceux-ci seront potentiellement soumis à des radiations plus importantes  [78].

107Les groupes-cibles désignés par la Région sont principalement les opérateurs de télécommunication mobile. En effet, une série de dispositifs sont exemptés de l’application de la norme, dont les appareillages utilisés par des particuliers (tels que les GSM, les réseaux WiFi locaux des particuliers, les systèmes de téléphonie de type DECT, les radios et les télévisions). La désignation de ces principaux groupes-cibles témoigne d’un principe de réalité. En effet, étant donné la charge de travail considérable qu’impliquait cette nouvelle réglementation pour Bruxelles Environnement notamment, il n’était pas possible d’appliquer d’emblée la réglementation à l’ensemble des dispositifs producteurs d’ondes électro-magnétiques. Il a donc été décidé de procéder en deux temps. Dans une première étape, l’ordonnance a visé les quatre principaux opérateurs (responsables de 95 % des ondes électro-magnétiques à Bruxelles). Dans une seconde étape, soit à partir de 2011, la législation a également été appliquée aux plus petits (SNCB, STIB, ASTRID, etc.).

108Le bénéficiaire final de la politique publique est la population. L’Institut bruxellois pour la gestion de l’environnement (IBGE) est désigné comme l’acteur de mise en œuvre chargé d’évaluer les dossiers ex ante dans le cadre des permis d’environnement, et ex post en réalisant des contrôles sur le terrain.

4.1.2. Instruments

109En ce qui concerne les instruments autoritaires de type réglementaire, l’ordonnance bruxelloise se voit complétée de trois arrêtés d’exécution (cf. infra). En outre, des instruments économiques et fiscaux sont également adoptés : ceux-ci prévoient que le non-respect des normes définies dans l’ordonnance est assorti de sanctions pénales (amende de 100 euros à 15 000 euros et emprisonnement de huit jours à deux ans).

110Par ailleurs, des instruments informatifs sont mis en place. Les exploitants des installations susceptibles de produire des radiations non ionisantes sont tenus de communiquer à l’administration régionale et aux communes les caractéristiques d’exploitation de leurs installations, notamment l’intensité des radiations produites, le type d’installation, la fréquence d’émission, l’angle d’inclinaison, la hauteur et la dimension de l’installation, et la puissance rayonnée de celle-ci.

111Outre ces éléments, un cadastre des antennes-relais présentes sur le territoire bruxellois est réalisé et des mesures sont effectuées gratuitement dans les habitations sur la base des plaintes déposées par des particuliers. En l’occurrence, depuis 2009, 288 mesures de champs ont été réalisées par Bruxelles Environnement, concernant 199 sites. À partir de 2013, la division Inspection a prévu d’en effectuer 120 par an. Enfin, des enquêtes publiques sont réalisées à la fois dans le cadre des procédures conjointes d’octroi de permis d’urbanisme et de permis d’environnement (pour les nouvelles antennes-relais) et dans le cadre de la délivrance des permis d’environnement (pour les antennes-relais déjà existantes).

4.1.3. Mise en œuvre

112 Bien vite, la ministre bruxelloise de l’Environnement, Évelyne Huytebroeck (Écolo) se rend compte des difficultés techniques liées à l’application de cette innovation que constitue la norme d’immission de 3 volts/mètre. Des discussions sont alors entamées entre le cabinet de la ministre et les opérateurs de télécommunication mobile pour garantir une bonne application de la norme.

113Le 13 mars 2009, est signé entre la ministre et le GSM Operators’ Forum (GOF) un Memorandum of Understanding, par lequel est ouvert un dialogue entre ces acteurs relativement aux problèmes que soulève l’application de l’ordonnance du 1er mars 2007. La date du 13 mars, veille de l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 1er mars 2007, n’est pas due au hasard. Les opérateurs avaient longtemps espéré que cette ordonnance soit invalidée par la Cour constitutionnelle ; quand, le 15 janvier 2009, celle-ci a été confirmée par la Cour constitutionnelle, ils ont alors demandé à la Région à ce que soit mise au point une solution concertée.

114 Les opérateurs relèvent « avec satisfaction que le gouvernement bruxellois témoigne d’une réelle ouverture tant à l’égard d’une véritable concertation avec les opérateurs sur les mesures d’exécution de l’ordonnance précitée, qu’à la prise en compte d’une nécessaire souplesse dans l’exercice des missions d’inspection et de traitement des plaintes jusqu’à la date de l’adoption définitive des arrêtés d’exécution »  [79]. À cette date, la Région de Bruxelles-Capitale dispose donc d’un instrument réglementaire définissant globalement la suite de sa politique publique et a engrangé un accord de principe avec les acteurs économiques afin de pouvoir mettre l’ordonnance en application.

115Quelques semaines après la mise en œuvre de l’ordonnance, les élections régionales qui ont lieu ne modifient pas sensiblement la composition de l’exécutif bruxellois (la majorité PS/VLD/CDH/Écolo/SP.A/CD&V fait place à une coalition PS/Open VLD/Écolo/CD&V/CDH/Groen). Les choix politiques posés durant la législature précédente peuvent donc se poursuivre même s’ils amènent parfois à réduire l’ampleur des changements initialement discutés par les parlementaires bruxellois.

116Plusieurs arrêtés d’exécution sont adoptés à l’issue de nombreuses discussions entre Évelyne Huytebroeck, qui est restée au poste de ministre de l’Environnement, Bruxelles Environnement et les opérateurs. Une première singularité réside dans le fait que seules les antennes de télécommunication mobile sont soumises au partage de la norme – à l’exclusion donc des émissions d’ondes électro-magnétiques issues de dispositifs tels les radios ou les télévisions. Le caractère singulier de ce choix de ne réguler que les antennes GSM est souligné à la fois par Bruxelles Environnement et par des experts scientifiques belges  [80]. Ces derniers relèvent notamment que les gammes de fréquence utilisées par les radios et télévisions sont les mêmes que celles des GSM, et sont donc susceptibles d’engendrer les mêmes effets. Certes, ces exemptions sont décrites comme temporaires par la Région bruxelloise. Néanmoins, certains acteurs de terrain estiment qu’une norme aussi restrictive est inapplicable pour les autres dispositifs.

117 Une deuxième singularité réside dans le fait du partage de la norme de 3 volts/mètre, qui est répartie entre les trois principaux opérateurs (Proximus, Mobistar et Base), Clearwire (devenu B-lite) et une dizaine de petits opérateurs. Chacun de ces opérateurs dispose d’une strate de 1,5 volts/mètre. Cette répartition découle en réalité de nombreuses discussions réalisées en partenariat avec les opérateurs. Deux autres propositions ont été mises sur le métier avant que l’on en arrive à ce consensus. Une première proposition était une convention environnementale, impliquant que les opérateurs se concertent en cas de dépassement de la norme constaté par l’administration sur un site (si les opérateurs trouvaient un accord, celui-ci était avalisé par la Région ; s’ils n’en trouvaient pas, ils étaient tous obligés de diminuer leurs émissions). Les opérateurs ont refusé cette option, considérant que cette proposition était irréaliste et qu’elle impliquait qu’ils doivent communiquer sur des matières relevant du secret de leurs entreprises respectives. La deuxième proposition était relative à un permis d’environnement modulable au cas par cas : en cas de dépassement de la norme, le permis aurait été adapté pour pouvoir respecter la norme. Néanmoins, les opérateurs ont également rejeté cette option, arguant de l’instabilité qu’elle créerait.

118 Concrètement, la norme adoptée par la Région bruxelloise signifie que chaque opérateur est tenu de respecter la norme d’émission de 1,5 volts/mètre, facilement contrôlable et pouvant faire l’objet de sanctions. Cette répartition permet donc de résoudre un des problèmes initiaux de l’ordonnance, qui était que lorsqu’un dépassement était constaté, il était impossible avec la norme d’immission de savoir qui, parmi les opérateurs, était responsable de la pollution et, dès lors, la mise en œuvre des sanctions était compromise.

119 Il est à noter que le choix qui a été fait par la Région en octroyant ces 25 % de la norme (alors qu’il y a plus de quatre opérateurs sur le marché) repose sur la considération selon laquelle il est improbable, sur la base d’observations et d’études statistiques, que tous les opérateurs émettent au maximum, au même moment et dans une même direction. Néanmoins, dans le cas peu probable où un dépassement de la norme serait malgré tout constaté, le permis d’environnement sera alors modifié pour imposer aux opérateurs d’émettre à moins de 1,5 volts/mètre.

120 Les arrêtés d’exécution attestent également d’une volonté de solutionner les difficultés liées à la norme d’immission environnementale. Ainsi, le premier arrêté d’exécution fixant la méthode et les conditions de mesure des champs électro-magnétiques, adopté le 8 octobre 2009  [81], prévoit le mode de calcul et les appareils de mesurage qui devront être utilisés dans le cadre des mesures effectuées sur le terrain. Le gouvernement bruxellois a décidé que l’exposition aux ondes serait mesurée sur une durée de six minutes et en prenant en considération la valeur en crête. Cette période de six minutes a été privilégiée en raison du fait qu’elle est mentionnée dans différentes études et qu’elle est fréquemment utilisée dans le secteur.

121 Cette méthodologie est largement critiquée à la fois par certains mandataires politiques et par les groupes de pression. Didier Gosuin (FDF) affirme par exemple : « Dans la pratique, on constate qu’en durcissant la norme, on a adouci en quelque sorte la méthode de contrôle, de sorte qu’on ne constate presque plus de dépassements et qu’on ne se donne pas les moyens de contrôler correctement les antennes. »  [82] Le même discours est tenu par le collectif Dé-mobilisation, qui intervient le 19 octobre 2010 dans les débats techniques liés à la mesure de la norme en soulignant que l’administration bruxelloise vide la norme de son sens en réalisant un calcul qui « écrase les pics d’émission »  [83]. Le collectif insiste pour que l’IBGE informe clairement l’opinion publique des méthodes de calcul utilisées pour mesurer les rayonnements des antennes de téléphonie mobile.

122 Les deux autres arrêtés sont celui du 30 octobre 2009, relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques  [84], et celui du 30 juin 2010, relatif à la validation d’un outil de simulation de calcul du champ électrique émis par une antenne émettrice d’ondes électro-magnétiques  [85].

123 Par ailleurs, la décision de soumettre les antennes-relais à l’octroi d’un permis d’environnement, en plus du permis d’urbanisme, a suscité des problèmes majeurs de mise en œuvre, notamment pour l’administration régionale compétente pour la délivrance des permis relatifs aux installations d’utilité publique. D’une part, les antennes-relais existantes sur le territoire bruxellois doivent suivre une procédure de régularisation pour l’obtention du permis d’environnement. D’autre part, les nouvelles antennes-relais ne peuvent être installées qu’à la suite de l’octroi de deux types de permis de classe 2, l’un d’urbanisme et l’autre d’environnement.

124 Concrètement, l’instauration de ce nouvel instrument réglementaire, couplé à l’adoption de la norme de 3 volts/mètre, implique la gestion d’environ 2 150 dossiers : 1 703 sites d’antennes recensés sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale avant l’adoption de la norme de 3 volts/mètre  [86], et 500 sites supplémentaires nouvellement implantés (visant, d’une part, à combler les trous de couverture liés à l’adoption d’une norme contraignante et, d’autre part, à faire face aux développements technologiques liés à la 3G notamment).

125 Anticipant le goulot d’étranglement lié à l’octroi de ces permis, le principe de réalité a, à nouveau, primé pour permettre la mise en œuvre de la politique régionale. Un plan de régularisation des antennes existantes a été élaboré, introduisant une progressivité dans la délivrance des permis d’environnement. Un planning a été élaboré pour permettre de ne pas saturer l’administration  [87]. Premièrement, pendant une première période de 6 mois à dater du 1er mars 2011, les demandes de permis ont été introduites pour les antennes extérieures de plus de 120 watts. S’en est suivie une période de 6 mois pour permettre à l’administration de gérer l’ensemble de ces dossiers. Deuxièmement, pendant une nouvelle période de 6 mois à dater du 1er mars 2012, les demandes de permis ont été introduites pour les antennes extérieures de moins de 120 watts. S’en est à nouveau suivie une période de 6 mois pour permettre à l’administration de gérer l’ensemble de ces dossiers. Finalement, depuis le 1er mars 2013, les demandes de permis sont introduites pour les antennes intérieures (indoor).

126 À l’heure actuelle donc, toutes les demandes pour les antennes extérieures ont déjà été introduites par les opérateurs et l’administration s’apprête à entamer la régularisation des antennes indoor (soit environ 500 sites).

127 Par ailleurs, pour l’octroi des permis relatifs aux nouvelles installations de télécommunication mobile, une exception a été introduite pour les permis de classe 2 en créant un permis mixte. Grâce à l’articulation des procédures de permis d’urbanisme et de permis d’environnement et grâce à un protocole signé entre Bruxelles Environnement, l’Administration de l’aménagement du territoire et du logement (AATL) et les communes, les enquêtes publiques liées aux permis d’environnement et d’urbanisme peuvent être réalisées simultanément, ce qui permet d’éviter une surcharge administrative inutile pour les communes.

128 D’un point de vue administratif, malgré l’anticipation et les choix pragmatiques posés, l’AATL est confrontée à une surcharge administrative qu’elle peine à surmonter. C’est pourquoi le gouvernement bruxellois décide l’engagement de quatre agents contractuels supplémentaires pour l’instruction des demandes de permis d’urbanisme relatives aux antennes  [88]. En effet, suite à un moratoire sur la délivrance des permis d’urbanisme instauré par la secrétaire d’État en charge du Logement et de l’Urbanisme, Françoise Dupuis (PS), et relayé dans une proposition de résolution  [89], l’administration s’attend à un raz-de-marée dans la délivrance de permis pour les nouvelles antennes-relais étant donné que le déploiement a été bloqué pendant plusieurs années.

129 Pour sa part, Bruxelles Environnement reçoit de nouvelles compétences pour l’octroi des permis d’environnement. À cette fin, l’administration crée une division « Autorisation », dans laquelle huit agents sont engagés pour l’instruction des demandes de permis d’environnement relatives aux antennes émettrices. Confrontée à une surcharge administrative, la division « Inspectorat » procède également à l’engagement de deux nouveaux agents afin de réaliser le contrôle des champs électro-magnétiques (sur la base des plaintes reçues et de l’identification de lieux où des dépassements pourraient être observés). Par ailleurs, Bruxelles Environnement doit réaliser des achats importants de matériel, notamment deux appareils de contrôle des champs électro-magnétiques acquis par la division « Inspectorat ». De surcroît, Bruxelles Environnement doit créer et développer un logiciel de simulation permettant de vérifier que le dossier soumis par les opérateurs correspond bien à la réalité de terrain. Ce logiciel permet en effet de vérifier théoriquement que la norme n’est pas dépassée avant de délivrer le permis. Les missions de l’administration sont donc multiples : contrôles préalables sur le terrain (avant que les nouvelles antennes ne soient installées), contrôles ex post (avec des appareils de mesure en cas de plaintes) et réalisation de mesures à la demande de particuliers.

130 La surcharge administrative n’est pas le seul problème relevé par les acteurs. Est également mis en cause le déploiement des technologies mobiles : « L’incertitude de la légalité des antennes existantes par rapport à la législation environnementale et la lenteur des procédures de demande de permis empêchent les opérateurs d’implanter de nouvelles antennes en suffisance pour assurer une bonne couverture réseau, tant pour les technologies GSM que pour les [technologies 3G]. Si nous voulons, à Bruxelles, préserver la santé de notre population, tout en bénéficiant des nouvelles technologies dont le développement nous paraît fondamental, il y a urgence ! Par ailleurs, une couverture réseau défaillante augmenterait la nocivité des GSM étant donné que la densité de leur fonctionnement augmenterait afin de se raccrocher à un réseau à proximité »  [90], déclare le député bruxellois André du Bus (CDH) lors d’une interpellation de la ministre de l’Environnement. En effet, alors que la quatrième génération de téléphonie mobile se situe dans une première phase de mise en œuvre en Région wallonne et en Région flamande, les opérateurs dénoncent l’impossibilité de déployer la technologie en Région bruxelloise, étant donné la rigueur de la norme qui y est appliquée  [91]. Une solution proposée par l’IBGE et par les opérateurs est d’implanter les antennes de télécommunication mobile sur des mâts plus hauts, afin que le signal puisse porter plus loin. Néanmoins, la Région ne privilégie pas cette solution, eu égard à l’impact urbanistique défavorable qu’engendrerait ce choix, et aux nombreuses mobilisations auxquelles les 19 communes bruxelloises doivent déjà faire face suite à l’incompréhension des riverains devant la multiplication des antennes-relais  [92].

4.1.4. Actuel projet de modification

131 Le 29 janvier 2013, l’administrateur délégué de Belgacom, Didier Bellens, critique sévèrement les normes édictées par la Région de Bruxelles-Capitale sur les émissions d’ondes GSM  [93]. Selon lui, ces normes seraient trop restrictives pour permettre le déploiement de la 4G à Bruxelles, qui est pourtant la région du pays dans laquelle la technologie est la plus susceptible d’être utilisée à grande échelle (notamment en raison de la présence de l’Union européenne, de l’OTAN et de nombreuses ambassades). Didier Bellens est rejoint dans ses propos par les responsables de plusieurs autres opérateurs, dont l’administrateur délégué de BECI, Olivier Willock. Une critique similaire a par ailleurs été récemment émise par le patron de Mobistar, Jean-Marc Harion. En réaction, la ministre bruxelloise de l’Environnement, Évelyne Huytebroeck (Écolo), rappelle son intention de soumettre prochainement « des propositions techniquement et économiquement viables pour permettre l’implantation de la 4G à Bruxelles. Elle est indispensable et le gouvernement [bruxellois] la veut. Nous cherchons un équilibre entre la 4G et la santé. Un calendrier et des pistes de solutions seront bientôt présentées aux opérateurs ». Certains observateurs voient dans les propos de Didier Bellens une stratégie visant à accélérer un processus de négociations jugé trop lent par les opérateurs.

132 Peu après, le 15 février, l’Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT) fait part de son analyse concernant la 4G. À l’instar des opérateurs, l’organisme officiel régulateur critique les normes de téléphonie mobile bruxelloises  [94]. Par communiqué, Inter-Environnement Bruxelles tient à faire part de son désaccord avec cette analyse : « Il n’est fait aucune preuve de l’impossibilité technique d’installer la 4G à Bruxelles en respectant les normes sanitaires actuelles (…). La solution technique existe, elle consiste à densifier le réseau d’antennes à faible puissance. »  [95] L’association appelle dès lors le gouvernement et les députés bruxellois à ne pas céder à « une campagne de communication visant à légitimer la 4G comme un service de première nécessité » et à « un chantage économique qui consiste à mettre en balance la santé de la population avec les taux de profits indécents des opérateurs telecom », et à ne pas « mettre à mal un principe de précaution bien légitime »  [96].

133 Le 18 février, la ministre bruxelloise de l’Environnement réaffirme sa volonté de permettre l’arrivée de la 4G dans la capitale  [97]. Elle annonce qu’elle présentera prochainement au gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale une proposition visant à « adapter » l’ordonnance du 1er mars 2007. Il n’est, prévient-elle, « pas question de renoncer aux principes de base de la législation actuelle. Nous maintenons le principe de précaution (…), ainsi que celui d’une mesure cumulative du rayonnement ». Concrètement, deux « paquets » d’ondes seraient créés : l’un constitué des ondes des réseaux 2G et 3G, soumises à la norme de 3 volts/mètre, et l’autre constitué des ondes du futur réseau 4G, également soumises à la norme de 3 volts/mètre. Le dispositif permet un certain assouplissement, puisque l’exposition totale pourrait potentiellement, en certains endroits et à certains moments, atteindre un maximum de 4,2 volts/mètre. Plus largement, la ministre estime que le débat deviendra rapidement obsolète, la 2G étant appelée à disparaître d’ici peu de temps. Toutefois, l’idée est loin de faire l’unanimité. Ainsi, le chef de l’opposition libérale au Parlement bruxellois, Vincent De Wolf, réagit en la qualifiant d’« irréaliste ». Quant aux opérateurs, ils estiment que cette proposition n’est pas tenable techniquement, et brandissent le spectre d’une panne à grande échelle du réseau GSM à Bruxelles à court terme  [98].

134 Dès le lendemain, Paul De Ridder (N-VA) interpelle Évelyne Huytebroeck en Commission de l’Environnement du Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale  [99]. À l’exception des écologistes, toutes les familles politiques estiment que l’idée de la ministre est insuffisante pour résoudre les problèmes de dégradation que risquent de connaître les réseaux actuels en automne, époque fixée pour leur mise en conformité. Toutefois, les partis de la majorité (à l’exception de l’Open VLD) – PS, Écolo, CD&V, CDH et Groen – tiennent à exprimer leur volonté de maintenir la norme actuelle. Ils appellent par ailleurs à « objective[r] les demandes des opérateurs (…) pour analyser leur bien-fondé et pour trouver des adaptations techniques et technologiques qui garantissent la santé des citoyens ». Quant à l’opposition – MR, SP.A et FDF –, elle met essentiellement l’accent sur le fait que le respect de la norme actuelle implique une multiplication substantielle du nombre de sites d’antennes, non seulement pour le futur réseau 4G mais également pour les réseaux 2G et 3G actuels, alors même que le rythme de délivrance des permis d’urbanisme pose déjà problème aux opérateurs. In fine, la Commission décide d’auditionner des experts scientifiques et des professionnels de la téléphonie mobile  [100]. En revanche, le débat n’apporte guère d’éclaircissement sur le projet de la ministre, qui précise que le processus de modification de l’ordonnance du 1er mars 2007 devrait selon elle aboutir à l’automne 2013.

135 Le dossier est discuté en réunion du gouvernement bruxellois le 21 février 2013  [101]. Deux points de friction supplémentaires apparaissent. D’une part, le secrétaire d’État chargé de l’Urbanisme, Rachid Madrane (PS) reproche à Évelyne Huytebroeck d’avoir jusqu’à présent fait cavalier seul ; il craint d’être la cible du mécontentement de nombreux comités de quartier lorsque les permis seront délivrés pour l’implantation de nouvelles antennes-relais. D’autre part, la méthode proposée par la ministre de l’Environnement pour procéder à la modification de l’ordonnance du 1er mars 2007 est contestée par l’Open VLD (qui, rappelons-le, s’était abstenu lors du vote de la norme de 3 volts/mètre) : Guy Vanhengel estime que le dossier doit être traité par le Parlement. Au terme des échanges, le gouvernement charge la ministre de lui préparer une note techniquement étayée sur son projet. Celle-ci décidera peu après d’attendre les résultats des auditions menées en Commission de l’Environnement pour présenter son projet d’ordonnance.

136 Dès le 19 février, le MR avait fait part de son intention de déposer sa propre proposition d’ordonnance. Le 25, il présente son programme à l’occasion d’une conférence de presse donnée par le chef de file du MR au Parlement bruxellois, Vincent De Wolf, accompagné de son président de parti, Charles Michel  [102]. Il s’agit, non pas d’aligner la norme bruxelloise sur les normes wallonne et flamande, mais de l’en rapprocher tout en la maintenant son caractère plus strict. Concrètement, l’idée est que les quatre opérateurs ne doivent plus se partager 3 volts/mètre, mais disposent chacun de 2,12 volts/mètre par antenne dans les zones accessibles au public. Quant à la puissance cumulée des réseaux de 2G, 3G et 4G, elle ne pourrait être que de 7 volts/mètre au maximum dans les habitations fermées ; l’effectivité de cette norme serait garantie par la possibilité pour les citoyens d’exiger que des mesures soient effectuées. Cette proposition, explique le MR, doit permettre de développer la 4G sans que l’installation d’antennes supplémentaires soit nécessaire. Le FDF, par la voix de son député régional Didier Gosuin, ancien ministre bruxellois de l’Environnement, critique tant le projet d’É. Huytebroeck que celui de V. De Wolf. Selon lui, le gouvernement bruxellois « doit définir un cadre et des objectifs, et ensuite s’appuyer sur l’expertise d’un collège d’experts neutres, dont l’IBGE, pour obtenir une proposition de norme qui corresponde à l’objectif »  [103].

137 Le 29 mars 2013, la majorité régionale bruxelloise adopte un projet d’arrêté dans lequel elle propose de postposer de deux ans la fin du régime transitoire sur la mise en œuvre de la norme des 3 volts/mètre  [104]. Les opérateurs télécoms auraient donc jusqu’au mois d’octobre 2015 pour mettre leurs réseaux et leurs antennes aux normes d’émission bruxelloises (cela afin d’éviter d’éventuels problèmes de la couverture GSM à l’automne 2013, délai initial de mise en conformité). Sitôt connu, ce projet est fustigé tant par les opérateurs que par l’opposition, en tant qu’il n’apporte pas de solution à la question de l’arrivée de la 4G à Bruxelles. Pour sa part, la ministre bruxelloise de l’Environnement tient à préciser que la mesure, si elle est appliquée (elle doit encore être avalisée par le Conseil d’État, auquel elle a été soumise), ne signifiera en rien que la majorité reporte de deux ans la recherche d’une solution structurelle. Elle sera juste « une bouffée d’oxygène », destinée à permettre au Parlement bruxellois de disposer du temps nécessaire pour mener le large débat dont il a ressenti le besoin.

4.2. Le décret du 3 avril 2009 de la Région wallonne

138 En octobre 2008, le ministre wallon du Développement territorial, André Antoine (CDH), organise une consultation sur le thème des ondes électro-magnétiques  [105]. S’inscrivant dans la lignée des travaux bruxellois, A. Antoine décide d’adopter une norme de 3 volts/mètre. Néanmoins, cette norme se démarque de la norme bruxelloise en ce qu’elle définit une norme d’émission pour chaque antenne, et non une norme d’immission.

4.2.1. Objectifs

139 L’objectif de la Région wallonne est de protéger l’environnement, en ce compris la population. La norme adoptée est applicable dans tous les lieux de séjour. Elle est définie dans un premier temps dans une circulaire  [106], avant de faire l’objet d’une proposition de décret  [107]. L’Institut scientifique de service public (ISSEP), qui deviendra ensuite l’acteur de mise en œuvre de la politique publique régionale, participe à sa rédaction.

140 Le choix en faveur d’une norme d’émission (et non une norme d’immission) s’explique par la volonté d’éviter les difficultés qu’a rencontrées la Région bruxelloise. Il s’explique également par des aspects structurels liés à la Région wallonne, qui a un territoire plus étendu et moins densément urbanisé que celui de la Région bruxelloise.

141 Les groupes-cibles désignés sont les opérateurs de télécommunication mobile et d’autres dispositifs qui émettent des ondes, dont les radios et les télévisions. Sont exemptés du champ d’application du décret les téléphones DECT, les émissions d’origine naturelle et le WiFi. Le bénéficiaire final de la politique publique est la population. L’ISSEP est désigné comme l’acteur de mise en œuvre chargé d’évaluer les dossiers ex ante et ex post en réalisant des contrôles sur le terrain et chez les particuliers.

4.2.2. Instruments

142 Dans un premier temps, une circulaire définit les prescriptions que le ministre « adresse aux agents placés sous son autorité pour préciser l’interprétation ou déterminer les conditions d’application d’un texte législatif ou réglementaire »  [108]. Cette circulaire est ensuite remplacée par un outil juridique plus classique : un décret voté par le Parlement wallon. Les antennes-relais sont bien entendu aussi soumises à la législation en matière de permis d’urbanisme.

143 Au niveau des instruments informatifs, des enquêtes publiques sont organisées dans le cadre des procédures d’octroi des permis d’urbanisme. De plus, des mesures gratuites des champs électro-magnétiques peuvent être réalisées dans les habitations sur demande des particuliers (à titre d’exemple, 150 contrôles pour les particuliers ont été réalisés par l’ISSEP entre novembre 2010 et novembre 2011).

4.2.3. Mise en œuvre

144 La Région wallonne semble avoir tiré les leçons des difficultés de mise en œuvre de l’ordonnance bruxelloise. Ainsi, en n’adoptant pas une norme d’immission, elle opte pour une solution moins coûteuse. Au cours des débats parlementaires, il est en effet souligné que réaliser des mesures conformément à l’ordonnance bruxelloise « est long, compliqué et coûteux dans la mesure où il convient, d’une part, de prendre en compte les immissions de nombreuses sources tout en éliminant celles qui sont exclues du champ d’application et, d’autre part, de déterminer le champ maximum puisque la limite ne peut être dépassée à aucun moment. Or, une antenne de téléphonie mobile émet une puissance qui varie de façon continue, en fonction du nombre de communications en cours. Lorsque la mesure est effectuée à un moment précis, il est certain que la valeur obtenue n’est pas maximale. Il convient donc de réaliser tout un travail complexe d’extrapolations »  [109].

145 Bien que la norme de 3 volts/mètre par antenne soit définie comme une application du principe de précaution, elle ne constitue pas un changement copernicien par rapport à celle prévue par l’Autorité fédérale. De nouvelles antennes-relais doivent être construites par les opérateurs, mais dans une moindre mesure qu’en Région bruxelloise. D’ailleurs, comme le met en évidence l’ISSEP, les délais de mise en conformité du réseau sont sensiblement plus courts qu’en Région bruxelloise : pour les 4 500 installations des trois opérateurs présentes en Wallonie, la régularisation est terminée au début de l’année 2011  [110].

146 Le décret wallon permet d’appliquer la norme à une large gamme de dispositifs émetteurs d’ondes électro-magnétiques et de ne pas devoir recourir à une concertation avec les opérateurs de téléphonie mobile. De manière générale, la Région s’inscrit donc dans une « dépendance au sentier »  [111] par rapport aux choix posés précédemment. Le processus de mise en œuvre du décret entraîne néanmoins une certaine surcharge administrative pour l’ISSEP, qui est le seul organisme agréé pour réaliser les contrôles. L’ISSEP engage dès lors du personnel afin de faire face à ce travail supplémentaire.

147 En ce qui concerne les contrôles, la Région wallonne se démarque de nouveau de la Région de Bruxelles-Capitale. En effet, l’ISSEP a une expertise de longue date dans la mesure des champs électro-magnétiques. L’institut est doté d’un certain matériel et n’entend pas faire de nouveaux investissements. Les contrôles sont réalisés ex ante par l’examen du dossier technique soumis par les opérateurs, et ex post par des mesures effectuées dans les lieux de séjour.

148 Suite aux élections régionales de 2009, la majorité wallonne PS/CDH fait place à une coalition PS/Écolo/CDH. Dans un premier temps, le décret connaît quelques modifications réglementaires marginales  [112]. Ensuite, en juin 2011, il est complété par la mise en ligne d’un cadastre des antennes-relais  [113], et ce sous la menace de certaines associations. En effet, le 26 août 2010, l’asbl Groupe de réflexion et d’action pour une politique écologique (GRAPPE) a menacé le ministre de l’Environnement et de l’Aménagement du territoire, Philippe Henry (Écolo), d’intenter une action en justice suite à l’absence d’arrêtés d’exécution du décret. Ce retard atteste des difficultés de mise en œuvre de la politique publique  [114].

149 Depuis, des auditions ont été réalisées en commission de l’Environnement du Parlement wallon afin de déterminer l’opportunité de la mise en œuvre de la norme d’immission de 3 volts/mètre en Wallonie, par ailleurs inscrite dans la déclaration de politique régionale. Lors de ces auditions, les opérateurs ont suggéré à la Wallonie de s’inspirer davantage de l’exemple flamand que de l’exemple bruxellois. Ils ont par ailleurs profité de cette occasion pour faire part de leur incompréhension quant à l’adoption de normes contraignantes pour le secteur, alors que lors de la catastrophe du Pukkelpop en 2011 par exemple, les télécommunications mobiles ont été d’une aide précieuse  [115]. Selon eux, contraindre le secteur reviendrait donc à priver la population de son bien-être et de sa sécurité  [116].

4.3. L’arrêté du 19 novembre 2010 du gouvernement flamand

150 La Région flamande a été la dernière région à intervenir dans la régulation des ondes électro-magnétiques, par l’adoption d’un arrêté de gouvernement du 19 novembre 2010  [117]. Cette régulation tardive s’explique par trois facteurs.

151 Tout d’abord, la volonté de la Région flamande a été d’entendre toutes les parties prenantes du dossier avant d’adopter une norme (et de ne pas intervenir en période électorale). Elle a constitué un dossier administratif et fait appel au Milieu en Natuurraad van Vlaanderen ainsi qu’au Sociaal-Economische Raad van Vlaanderen. Différents éléments ont été pris en considération dans l’élaboration de la politique publique, dont l’impact urbanistique, le coût des nouvelles installations et l’impact administratif de l’adoption d’une nouvelle norme. Ensuite, est intervenue l’absence d’un organe flamand capable de réaliser les contrôles de respect d’une norme. Désirant recourir à l’administration fédérale précédemment chargée de ces contrôles, la Région flamande a entamé des discussions avec l’Autorité fédérale pour recourir aux services de l’IBPT, et ce dans un contexte budgétaire difficile. Enfin, la Flandre a voulu tirer pleinement les leçons des expériences des deux autres régions. Les documents parlementaires indiquent explicitement que la Région flamande a attendu que la Région de Bruxelles-Capitale mette sa norme en application pour déterminer dans quelle mesure il convenait qu’elle s’inspire de cette mesure.

4.3.1. Objectifs

152 L’objectif de la Région flamande est de protéger l’environnement, en ce compris la population. Elle applique une limite d’émission par antenne de 3 volts/mètre dans les zones accessibles au public, avec une pondération en fonction de la fréquence. Cette norme est assortie d’une norme cumulative de 20,6 volts/mètre. Si la norme de 3 volts/mètre par antenne appliquée en Région wallonne est modérément contraignante pour le secteur, la norme flamande s’inscrit dans la même logique. En Flandre, le secteur ne doit en rien modifier l’architecture de son réseau pour se mettre en conformité à la nouvelle norme.

153 La rationalité qui prévaut dans le chef de la Région flamande est d’optimiser la régulation en tenant compte des expériences et des difficultés auxquelles sont confrontées les deux autres régions, tout en procurant un niveau de protection élevé de la population.

154 Les groupes-cibles désignés par les décideurs publics sont les opérateurs de télécommunication mobile. En effet, sont exclus du champ de l’arrêté de gouvernement les applications suivantes : les télécommunications dans la navigation aérienne, les télécommunications dans le trafic ferroviaire, les télécommunications dans la navigation, les systèmes radars, le réseau ASTRID pour les services de secours et de sécurité, les applications militaires, les émissions radio et télévision et le radio-amateurisme. Le bénéficiaire final de la politique publique est la population. Les acteurs de mise en œuvre de cette norme flamande sont, d’une part, le département Leefmilieu, Natuur en Energie (LNE) et le Vlaamse Milieu-inspectie et, d’autre part, l’IBPT. Par un accord de coopération en préparation entre l’Autorité fédérale et la Région flamande, l’administration est reconnue comme acteur de terrain réalisant les contrôles.

4.3.2. Instruments

155 Les instruments réglementaires consistent en un arrêté de gouvernement. Celui-ci est complété par une soumission des antennes-relais aux procédures d’octroi de permis d’urbanisme. À cet égard, la Région flamande est davantage semblable à la Région wallonne qu’à la Région bruxelloise.

156 En ce qui concerne les instruments informatifs, des enquêtes publiques sont réalisées dans le cadre des autorisations urbanistiques. De plus, un cadastre des antennes-relais est mis en ligne avec la collaboration de l’IBPT.

157 De manière très singulière, la Région flamande fait appel à l’administration fédérale, l’IBPT, pour réaliser les contrôles sur son territoire. La Région semble vouloir utiliser l’expérience et la compétence de l’IBPT qui, depuis la régionalisation de la compétence, est dépourvu de tout rôle en la matière.

4.3.3. Mise en œuvre

158 Alors que les deux autres régions sont confrontées à des problèmes concernant la mise en œuvre de la réglementation et au déploiement de la technologie, la mise en œuvre de la nouvelle norme a peu d’impact en Région flamande. En effet, étant donné l’application de la norme de 3 volts/mètre à la seule fréquence de 900 MHz, le déploiement de la technologie 3G peut avoir lieu sans difficulté.

159 Par ailleurs, les contrôles, dont l’application a fait couler beaucoup d’encre en Wallonie et à Bruxelles, se déroulent sans soulever de critiques en Flandre. Réalisés par l’IBPT, ils sont effectués a priori sur la base d’un dossier technique débouchant sur la délivrance d’une attestation de conformité préalable à l’installation.

160 La Région flamande s’inscrit dans une véritable dépendance au sentier, illustrée par le recours aux services de l’IBPT. Cela s’explique par la prévalence des intérêts économiques et par le poids moins déterminant du parti écologiste Groen, qui ne fait pas partie de la coalition gouvernementale flamande formée en 2009 (CD&V/SP.A/N-VA). De plus, la mobilisation ténue du tissu associatif en Flandre, tout au moins jusqu’en 2010, a fait que seul un changement marginal ait été opéré, ressemblant fort à un statu quo. Cependant, les développements récents de la controverse (cf. Graphique 1) s’expliquent, d’une part, par la création d’associations flamandes mobilisées sur la thématique des ondes électro-magnétiques, dont Beperk de straling, et, d’autre part, par une mobilisation de riverains à l’encontre des installations de télécommunication mobile  [118]. De surcroît, les associations se mobilisent par la voie du recours aux tribunaux civils. À cet égard, une décision importante a été prise par le tribunal de Gand, interdisant en juillet 2012 l’édification d’une antenne-relais à Eeklo pour des raisons sanitaires  [119].

Conclusion

161 La fin des années 1990 et le début des années 2000 amorcent un important changement dans la régulation publique de la téléphonie mobile. Cette période correspond à une mobilisation d’acteurs de la société civile (riverains d’antennes, comités de quartier, associations) trouvant un relais auprès des partis écologistes francophone et néerlandophone. Quant aux régions, s’appuyant sur les compétences qu’elles détiennent déjà en matière environnementale, elles revendiquent d’obtenir la compétence de régulation de la téléphonie mobile.

162 Le glissement de compétence est opérationnalisé en 2009 par un arrêt de la Cour constitutionnelle qui tranche le conflit entre les niveaux de pouvoir en faveur des régions. Désormais dépositaires de la compétence, les régions l’organisent de façon différente, tant en termes de contenu que dans le temps, la Région flamande adoptant des décisions plus tard que les Régions bruxelloise et wallonne.

163 Le tableau 2 dresse un état des lieux actuel de la régulation publique en matière de téléphonie mobile, en procédant notamment à une comparaison du contenu des différentes législations régionales. Ce tableau synthétise les éléments qui ont fait l’objet de développements plus circonstanciés, en ce compris le déroulement des événements et le jeu des acteurs, dans la présente étude. On constate de nombreuses similarités entre les trois régions. Notamment, en exerçant cette compétence antérieurement fédérale, elles attribuent aux mesures qu’elles prennent un contenu propre liant environnement et santé publique. Les trois régions sont soumises au même dilemme de protéger au mieux leur population, bénéficiaire finale de la politique publique, tout en garantissant le meilleur développement opérationnel de la technologie. Des différences existent toutefois entre les trois régions quant à l’opérationnalisation de la compétence. Tel est par exemple le cas de la prise en charge administrative et du degré de « dépendance au sentier ». Au-delà des ressemblances et des divergences, ce tableau montre, de façon diachronique, comment une région peut tirer les leçons des pratiques d’autres institutions. Ce processus d’apprentissage de politiques publiques, sur le moyen ou le long terme, est important dans le cadre d’un pays en voie de fédéralisation croissante.

164 Aujourd’hui, la question de la régulation se pose avec une acuité nouvelle, en raison de l’apparition de la 4G, c’est-à-dire la quatrième génération de téléphone mobile. Celle-ci permet aux smartphones, tablettes et ordinateurs portables de bénéficier de la même vitesse d’accès à Internet qu’une ligne fixe à très haut débit. Plusieurs spécialistes pensent que la 4G deviendra bientôt la norme universelle. L’offre est d’ailleurs déjà développée dans plusieurs pays, dont la France, l’Allemagne et la Suède. En Belgique, elle n’est encore disponible que dans quelques villes de Wallonie et de Flandre.

Tableau 2.

Politiques publiques régionales en matière de téléphonie mobile (2012)  [120]

Région de Bruxelles-Capitale Région wallonne Région flamande
Norme d’immission 3 volts/mètre / 20,6 volts/mètre
Norme d’émission / 3 volts/mètre par antenne 3 volts/mètre par antenne
Décisions autoritaires de référence Ordonnance du 1er mars 2007 (et arrêtés d’exécution) Décret du 3 avril 2009 Arrêté de gouvernement du 19 novembre 2010
Instruments complémentaires Permis d’environnement
Cadastre et mesures
Enquêtes publiques
Contraintes financières (amendes)
Permis d’urbanisme
Cadastre et mesures
Enquêtes publiques
Déclaration environnementale
Autorisation urbanistique
Cadastre et mesures
Enquêtes publiques
Déclaration environnementale
Groupes-cibles et degré de contrainte Opérateurs de téléphonie mobile, service de secours, de défense, de sécurité, Belgocontrol, SNCB et STIB, etc.
Degré de contrainte élevé (la mesure cumulée des ondes électro-magnétiques émises par les antennes-relais ne doit pas dépasser les 3 volts/mètre)
Sont exemptes de la mesure les ondes émises par les antennes celles émises par les GSM, radios, TV, WiFi, DECT
Opérateurs de téléphonie mobile
Degré de contrainte moindre qu’en Région bruxelloise (chaque antenne-relais ne peut dépasser la norme de 3 volts/mètre ; l’aspect cumulatif des émissions n’est pas pris en compte)
Opérateurs de téléphonie mobile
Degré de contrainte moindre qu’en Régions bruxelloise et wallonne (chaque antenne-relais ne peut dépasser la norme de 3 volts/mètre ; les émissions cumulées des sources électro-magnétiques ne peuvent dépasser 20,6 volts/mètre, soit l’ancienne norme fédérale)
Objectifs Protéger l’environnement, en ce compris la population Protéger l’environnement, en ce compris la population Protéger l’environnement, en ce compris la population
Bénéficiaires finaux Population de la Région (soumise à une « pollution électro-magnétique » émise par les antennes-relais très faible mais devant faire face, d’une part, à une densification importante du nombre d’antennes-relais et, d’autre part, à une difficulté de déploiement de la 3G) Population de la Région (soumise à une « pollution électro-magnétique » moindre qu’avant la régionalisation, mais devant faire face à une densification du nombre d’antennes-relais dans les grandes villes comme Liège et Namur) Population de la Région (soumise à une « pollution électro-magnétique » plus ou moins égale à ce qui avait cours avant la régionalisation. La 3G peut se développer sans problème dans la Région, ce qui témoigne d’un niveau de restriction moindre)
Mise en œuvre opérationnelle Nouvelles missions confiées à Bruxelles Environnement. L’AATL doit aussi se voir dotée de nouveaux moyens
Coût important en termes de personnel et d’investissements logistiques
Administration (régionale) possédant déjà les compétences et les moyens
Coût moindre qu’en Région bruxelloise (dans la lignée des dispositifs adoptés antérieurement au niveau fédéral)
Administration (fédérale) possédant déjà les compétences et les moyens
Coût moindre qu’en Région bruxelloise (dans la lignée des dispositifs adoptés antérieurement au niveau fédéral)
État actuel de mise en œuvre Lien entre protection de l’environnement et protection de la santé publique Lien entre protection de l’environnement et protection de la santé publique Lien entre protection de l’environnement et protection de la santé publique
Tension, sur le plan technique et administratif, entre les objectifs de la politique publique et son opérationnalisation Tentative de dépasser les tensions techniques et administratives, en lien avec un territoire plus étendu et moins urbanisé Évitement des tensions par le maintien des dispositifs techniques et administratifs préexistants

Politiques publiques régionales en matière de téléphonie mobile (2012)  [120]


Date de mise en ligne : 16/05/2013.

https://doi.org/10.3917/cris.2176.0005

Notes

  • [1]
    Le terme de radiations non ionisantes (RNI) désigne tout type d’onde électro-magnétique : champs électriques et magnétiques statiques, champs à fréquence extrêmement basse (émis par tous les appareils fonctionnant à l’électricité et par les lignes de transport électrique), radiofréquences (utilisées dans la téléphonie mobile et les fours micro-ondes), rayonnement infra-rouge, lumière visible et rayonnement ultra-violet. Contrairement aux radiations ionisantes (rayons X, gamma et radioactivité), les RNI sont des ondes qui ne sont pas suffisamment énergétiques pour casser les molécules de la matière vivante.
  • [2]
    Aux États-Unis, des questionnements relatifs à l’impact sanitaire de la téléphonie mobile apparaissent dès 1993. À cette époque, les médias américains sont très critiques à l’encontre de l’industrie du téléphone portable, significativement CNN, le Los Angeles Time et le Wall Street Journal. L’événement qui met le feu aux poudres est un procès intenté par un particulier, David Reynard, contre l’équipementier NEC, qu’il accuse d’être responsable de la tumeur au cerveau dont souffre son épouse, tumeur localisée à l’endroit où cette personne appuyait son téléphone sans fil. Aux États-Unis, la sensibilisation aux problèmes potentiels causés par les ondes électro-magnétiques est donc précoce. Elle se démarque des questionnements qui naîtront quelques années plus tard en Europe en ce qu’elle se focalise, non sur les antennes-relais, mais sur les terminaux de téléphonie mobile.
  • [3]
    Selon un rapport de l’Union internationale des télécommunications, la téléphonie mobile est la technologie qui a été le plus rapidement adoptée par les consommateurs au cours de l’histoire (Union internationale des télécommunications, The world in 2009: ICT facts and figures, Genève, octobre 2009).
  • [4]
    Le Soir, 11 octobre 2011.
  • [5]
    Angoisse d’être privé de son GSM. Le terme vient de la contraction de l’expression anglaise « no mo[bile-phone] phobia ».
  • [6]
    Principalement diffusé en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale, le premier quotidien atteignait un taux de lecture de 28 % en 2010. Quant au second, principalement diffusé en Région flamande et en Région de Bruxelles-Capitale, il atteignait un taux de lecture de 31 % en 2010.
  • [7]
    « Toute politique publique correspond à une opération de découpage du réel à travers laquelle va être identifiée et “formatée” la substance des problèmes à traiter » (P. MULLER, « Esquisse d’une théorie du changement dans l’action publique. Structures, acteurs et cadres cognitifs », Revue française de science politique, volume 55, n 1, 2005, p. 180).
  • [8]
    Y. MÉNY, J.-C. THOENIG, Politiques publiques, Paris, Presses universitaires de France, 1989.
  • [9]
    P. MULLER, Les politiques publiques, Paris, Presses universitaires de France, 1990, p. 22-23.
  • [10]
    A. SCHNEIDER, H. INGRAM, Policy Design for Democracy, Lawrence (Kansas), University of Kansas, 1997, p. 2-5.
  • [11]
    Le cas échéant, il peut s’agir d’une rationalité limitée (manque d’information, connaissances scientifiques controversées) ou subjective (poids des valeurs dans une société).
  • [12]
    Cf. C. DEBLANDER, La régulation publique des risques liés aux ondes électro-magnétiques en Belgique : le cas de la téléphonie mobile, Thèse de doctorat, Université catholique de Louvain, 2012.
  • [13]
    P. MULLER, Les politiques publiques, op. cit., p. 58-59.
  • [14]
    H. INGRAM, A. SCHNEIDER, P. DELEON, « Social Construction and Policy Design », in P. A. SABATIER, dir., Theories of the Policy Process, Boulder (Colorado), Westview Press, 2007, p. 95.
  • [15]
    P. LASCOUMES, P. LE GALÈS, dir., Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Science Po, 2004, p. 13.
  • [16]
    A. SCHNEIDER, H. INGRAM, Policy Design for Democracy, op. cit., p. 82.
  • [17]
    B. MANIN, Principes du gouvernement représentatif, Paris, Calmann-Lévy, 1995.
  • [18]
    Arrêté royal du 7 mars 1995 relatif à l’établissement et à l’exploitation des réseaux de mobilophonie GSM, Moniteur belge, 8 avril 1995 (modifié par l’arrêté royal du 24 octobre 1997 relatif à l’établissement et à l’exploitation de réseaux de mobilophonie DCS-1800, Moniteur belge, 5 décembre 1997).
  • [19]
    T. WYNGAARD, « La législation et la jurisprudence relatives aux antennes GSM », Courrier hebdomadaire, n° 2035-2036, CRISP, 2009, p. 8.
  • [20]
    Arrêté royal du 7 mars 1995 relatif à l’établissement et à l’exploitation des réseaux de mobilophonie GSM, Moniteur belge, 8 avril 1995.
  • [21]
    Par exemple : Directive 90/387/CEE du Conseil du 28 juin 1990 relative à l’établissement du marché intérieur des services de télécommunication par la mise en œuvre de fourniture d’un réseau ouvert de télécommunication, Journal officiel, L 192, 24 juillet 1990 ; Directive 96/19/CE de la Commission du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation de la pleine concurrence sur le marché des télécommunications, Journal officiel, L 074, 22 mars 1996 ; Directive 97/13CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997 relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunication, Journal officiel, L 117, 7 mai 1997.
  • [22]
    Loi du 19 décembre 1997 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, modifiant la loi du 21 mars 1991, Moniteur belge, 30 décembre 1997 ; Loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 1er juillet 1999, Moniteur belge, 1er septembre 1999 ; Loi sur la protection de la concurrence économique coordonnée le 15 septembre 2006, Moniteur belge, 29 septembre 2006.
  • [23]
    Loi du 12 juillet 1985 relative à la protection de l’homme et de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, les infrasons et les ultrasons, Moniteur belge, 26 novembre 1985.
  • [24]
    Résolution A3-0238/94 du Parlement européen du 5 mai 1994 sur la lutte contre les nuisances provoquées par les rayonnements non ionisants, Journal officiel, C 205, 25 juillet 1994.
  • [25]
    Commission des Communautés européennes, Proposition de recommandation du Conseil relative à la limitation de l’exposition du public aux champs électro-magnétiques 0 Hz-300 GHz, COM(1998) 268 final, 98/0166(CNS), 11 juin 1998.
  • [26]
    Recommandation du Conseil du 12 juillet 1999 relative à l’exposition du public aux champs électro-magnétiques (de 0 Hz à 300 GHz), Journal officiel, L 199, 30 juillet 1999.
  • [27]
    Cf. les rapports annuels 1998, 1999 et 2000 du Comité consultatif pour les télécommunications.
  • [28]
    Le Soir, 13 juillet 1996.
  • [29]
    Le Soir, 4 mai 2000.
  • [30]
    A. BURGESS, Cellular Phones, Public Fears, and a Culture of Precaution, Cambridge, Cambridge University Press, 2004, p. 170.
  • [31]
    J. KINGDON, Agendas, Alternatives and Public Policy, 2e éd., New York, Longman, 2003.
  • [32]
    Loi du 12 juillet 1985 relative à la protection de l’homme et de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, les infrasons et les ultrasons, Moniteur belge, 26 novembre 1985.
  • [33]
    Chambre des Représentants, Commission de l’Infrastructure, des Communications et des Entreprises publiques, Compte rendu analytique, CRA 50 - COM 019, 20 octobre 1999, p. 6.
  • [34]
    Organisme public chargé de la régulation dans les marchés libéralisés des télécommunications.
  • [35]
    Loi du 2 janvier 2001 portant des dispositions sociales, budgétaires et diverses modifiant la loi du 21 mars 1991 portant réforme de certaines entreprises publiques économiques, Moniteur belge, 3 janvier 2001.
  • [36]
    À partir de 2002, cette banque de données sera gérée par l’asbl Radio Infrastructure Site Sharing (RISS), supervisée par l’IBPT, visant à une collaboration constructive entre les opérateurs, notamment par un meilleur partage des sites d’antennes.
  • [37]
    Gouvernement wallon, Recueil des bonnes pratiques en matière d’implantation d’installations de télécommunications mobiles, 20 juillet 2000.
  • [38]
    Créée en 1995, cette commission réunit des représentants des organisations professionnelles ou interprofessionnelles (notamment, les fabricants), des représentants des organisations de consommateurs, des représentants des organisations de travailleurs, des experts et des représentants des pouvoirs publics compétents. Parmi ses missions, figure le fait d’émettre des avis lors de l'élaboration des réglementations en rapport avec la protection de la sécurité et de la santé des consommateurs.
  • [39]
    Aujourd’hui, Conseil supérieur de la santé. Créé au XIXe siècle, ce conseil est l’organe d’avis scientifique de l’actuel SPF Santé publique, Sécurité de la chaîne alimentaire et Environnement. Composé d’experts, il formule des avis scientifiques visant à guider les décideurs politiques et les professionnels de la santé, dans le but de garantir et d’améliorer la santé publique.
  • [40]
    Il est à noter qu’un avis discordant est toutefois émis : celui de l’expert de Test-achats, qui déclare vouloir se référer aux recommandations de l’ICNIRP (Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004).
  • [41]
    Conseil supérieur de l’hygiène, Avis sur la proposition d’arrêté modifiant l’arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, 2000, p. 21.
  • [42]
    Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004.
  • [43]
    Pour citer l’exemple de l’opérateur Mobistar, celui-ci met en évidence dans son rapport annuel de 2001 les éléments suivants : « En mars 2001, au terme d’une procédure de mise aux enchères, Mobistar a obtenu une licence UMTS (Universal Mobile Telecommunications System) pour un montant de 150 millions d’euros. Cette licence D, sur laquelle Mobistar avait porté son choix, permettra le développement de services mobiles de troisième génération » (Mobistar, Rapport annuel 2001, 2002).
  • [44]
    C. DEBLANDER, N. SCHIFFINO, « La capture de la régulation des ondes électro-magnétiques ou comment les régions s’affirment par rapport à l’État », in D. AUBIN, F. LELOUP, N. SCHIFFINO, dir., La reconfiguration de l’action publique en Belgique, Louvain-La-Neuve, L’Harmattan/Academia, 2012, p. 53-71.
  • [45]
    Arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 22 mai 2001. Il sera modifié par l’arrêté royal du 21 décembre 2001, Moniteur belge, 29 décembre 2001.
  • [46]
    Arrêté royal du 21 décembre 2001 modifiant l’arrêté royal du 29 avril 2001 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 29 décembre 2001.
  • [47]
    Selon les résultats de l’approche réputationnelle, l’association Teslabel est le seizième acteur le plus influent de notre réseau d’acteurs.
  • [48]
    C. DEBLANDER, N. SCHIFFINO, « Fédéralisme belge et venue shopping : le cas de la téléphonie mobile », Politique et sociétés, volume 31, n° 1, 2012, p. 149-175.
  • [49]
    Arrêt n° 138.471 du Conseil d’État du 15 décembre 2004.
  • [50]
    Arrêté royal du 10 août 2005 fixant la norme pour les antennes émettant des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 22 septembre 2005.
  • [51]
    Arrêt n° 193.456 du Conseil d’État du 20 mai 2009.
  • [52]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [53]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance modifiant l’ordonnance du 29 août 1991 organique de la planification et de l’urbanisme, A-178/1, 18 avril 2001.
  • [54]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [55]
    Ibidem.
  • [56]
    Une norme d’immission signifie que, à n’importe quel endroit accessible au public, la puissance enregistrée ne pourra dépasser le seuil fixé.
  • [57]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-305/1, 4 mai 2002.
  • [58]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les effets nocifs et les nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-258/1, 27 mars 2006.
  • [59]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/1, 20 juin 2006.
  • [60]
    Ordonnance bruxelloise du 1er mars 2007 relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, Moniteur belge, 14 mars 2007.
  • [61]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Compte rendu intégral, CRI 18, 16 février 2007, p. 37.
  • [62]
    Scientific Committee on Emerging and Newly Identified Health Risks, Opinion on the possible effects of electromagnetic fields (EMF) on human health, Bruxelles, Commission européenne, 2007, p. 41.
  • [63]
    « Research must continue to define what levels of RF related to new wireless technologies are acceptable; but more research should not prevent or delay substantive changes today that might save money, lives and societal disruption tomorrow (…). A precautionary limit of 0.1 µW/cm2 (which is also 0.614 Volts per meter) should be adopted for outdoor, cumulative RF exposure. This reflects the current RF science and prudent public health response that would reasonably be set for pulsed RF (ambient) exposures where people live, work and go to school » (C. BLACKMAN et al., Bioinitiative Report: a Rational for a Biologically-based Public Exposure Standard for Electromagnetic Fields (ELF and RF), 2007, p. 588-589).
  • [64]
    « There are many examples of the failure to use the precautionary principle in the past, which have resulted in serious and often irreversible damage to health and environments. Appropriate, precautionary and proportionate actions taken now to avoid plausible and potentially serious threats to health from EMF are likely to be seen as prudent and wise from future perspectives (…). Although the EEA does not have specific expertise in EMF, the case studies of public hazards analysed (…) show that harmful exposures can be widespread before there is both “convincing” evidence of harm from long-term exposures, and biological understanding of how that harm is caused » (Agence européenne de l’Environnement, Radiation risk for everyday devices assessed, 17 septembre 2007).
  • [65]
    Conseil supérieur de la santé, Avis n° 8519 sur les normes relatives aux antennes émettrices, 4 février 2009.
  • [66]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007, p. 55.
  • [67]
    B. STOCKBROECKX, A. VANDER VORST, Évaluation de l’impact potentiel de la délivrance de licences de téléphonie mobile supplémentaires sur le champ électro-magnétique, février 2001.
  • [68]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007.
  • [69]
    Il est intéressant de préciser que le gouvernement Verhofstadt II (VLD/PS/MR/SP.A–Spirit) attaque l’ordonnance bruxelloise par la voix de son ministre de la Santé publique, Rudy Demotte (PS). Or, celui-ci appartient à un parti qui est dans la majorité au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale et qui a voté en faveur de l’ordonnance du 1er mars 2007.
  • [70]
    Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale, Projet d’ordonnance modifiant diverses dispositions relatives à la recherche, la constatation, la poursuite et la répression des infractions en matière d’environnement, A-176/2, 22 mai 2001.
  • [71]
    Arrêt n° 2/2009 de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009.
  • [72]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007.
  • [73]
    Arrêt n° 2/2009 de la Cour constitutionnelle du 15 janvier 2009.
  • [74]
    Ibidem.
  • [75]
    Ibidem.
  • [76]
    Requête en annulation de l’arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques introduite par la SA KPN Group Belgium à l’encontre de la Région de Bruxelles-Capitale, 18 janvier 2010 ; Requête en annulation de l’arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques introduite par la SA Mobistar à l’encontre de la Région de Bruxelles-Capitale, 18 janvier 2010.
  • [77]
    Récemment, par la voix de sa ministre de la Santé, Laurette Onkelinx (PS), et de son ministre de l’Économie, Johan Vande Lanotte (SP.A), l’Autorité fédérale a exprimé sa volonté d’actualiser la réglementation relative aux téléphones portables, en prenant des mesures visant à restreindre l’usage du téléphone portable chez les jeunes et notamment en interdisant la publicité en faveur de l’utilisation de la téléphonie mobile par les enfants de moins de 14 ans sur tous les supports destinés à cette catégorie d’âge (Le Soir, 25 et 26 février 2013).
  • [78]
    Le risque subi des riverains d’antennes est diminué étant donné que ces derniers sont soumis à une « pollution électro-magnétique » plus faible émanant des antennes-relais de 3 volts/mètre. Le risque choisi du consommateur, qui opte pour une utilisation plus ou moins intensive de son téléphone portable, est quant à lui augmenté lorsque l’utilisateur se trouve éloigné d’une antenne-relais. En effet, dans ce cas de figure, le téléphone émet davantage pour fournir une communication (Electrosmog info, Téléphones mobiles et champs électro-magnétiques, 2010).
  • [79]
    Mémorandum of Understanding, 13 mars 2009.
  • [80]
    Cf. par exemple l’intervention de Luc Martens (RUG) dans le cadre des auditions en Commission de l’environnement (Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition d’ordonnance relative à la protection de l’environnement contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les radiations non ionisantes, A-289/2, 30 janvier 2007).
  • [81]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 8 octobre 2009 fixant la méthode et les conditions de mesure du champ électro-magnétique émis par certaines antennes, Moniteur belge, 20 octobre 2009.
  • [82]
    D. GOSUIN. « La mise en pratique de l’ordonnance GSM en matière de contrôle et de verbalisation des infractions suite aux auditions de l’IBGE et l’IBPT », http://fdf.be, 10 mai 2011.
  • [83]
    « Les problèmes avec la méthode de mesure de l’IBGE », http://demobilisation.wordpress.com, 26 mars 2012.
  • [84]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 18 novembre 2009.
  • [85]
    Arrêté ministériel du 30 juin 2010 relatif à la validation d’un outil de simulation de calcul du champ électrique émis par une antenne émettrice d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 1er septembre 2010.
  • [86]
    La notion de site d’antenne désigne un pylône ou un mât comprenant plusieurs antennes appartenant à un même opérateur ou, compte tenu de l’obligation de partage de site, à plusieurs opérateurs.
  • [87]
    Arrêté du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale du 30 octobre 2009 relatif à certaines antennes émettrices d’ondes électro-magnétiques, Moniteur belge, 18 novembre 2009.
  • [88]
    A. El Ktibi [député PS au Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale], « L’impact économique de la mauvaise couverture GSM en Région de Bruxelles-Capitale », www.ahmedelktibi.be, 17 avril 2012.
  • [89]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Proposition de résolution relative à l’instauration d’un moratoire à la délivrance des permis d’urbanisme d’implantation de dispositifs d’émission de radiations non ionisantes, A-409/1, 27 septembre 2007.
  • [90]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Compte rendu intégral, CRI 2, 25 octobre 2011.
  • [91]
    L’Écho, 23 juillet 2012.
  • [92]
    Cf. par exemple Le Soir, 30 mars 2012.
  • [93]
    Le Soir, 30 et 31 janvier 2013 ; La Libre Belgique, 30 et 31 janvier 2013.
  • [94]
    « La norme bruxelloise est tellement sévère qu’elle cause de sérieux problèmes aux opérateurs pour déployer leurs réseaux. Les conséquences de cette norme bruxelloise sont nombreuses : l’installation de centaines de stations de base supplémentaires, une moins bonne couverture, une perte de qualité des connexions et de gros problèmes de déploiement des nouvelles technologies (…). Les consommateurs sont également victimes de cette situation (tarifs plus élevés, connexions plus lentes, moins bonne couverture et donc une moins bonne accessibilité en général, par conséquent aussi des services d'urgence, de secours et de sécurité). (…) La réglementation bruxelloise actuelle et la politique menée en matière de normes de rayonnement forment une entrave sérieuse aux possibilités techniques de déploiement des nouvelles technologies mobiles, entraînant des conséquences non souhaitées sur le développement économique, la création d'emplois et les consommateurs au sein de la Région de Bruxelles-Capitale » (Institut belge des services postaux et des télécommunications, « Communication du conseil de l’IBPT (…) concernant les normes de rayonnement dans la Région de Bruxelles-Capitale », www.ibpt.be, 15 février 2013).
  • [95]
    Inter-Environnement Bruxelles, « 4G et normes sanitaires bruxelloises : f... the standstill ? », www.ieb.be, 15 février 2013.
  • [96]
    Le communiqué ajoute encore : « Il en va du principe de précaution : près de 1 800 études scientifiques dûment répertoriées mettent en cause l’exposition aux ondes et pointent du doigt des dangers sanitaires pour l’homme, en particulier pour les catégories de la population les plus sensibles. Il s’agit d’une question de santé publique qui est balayée d’un revers de la main par les opérateurs qui entendent maintenir leurs plantureuses marges bénéficiaires. »
  • [97]
    Le Soir, 19 février 2013 ; La Libre Belgique, 19 février 2013.
  • [98]
    L’Écho, 19 février 2013.
  • [99]
    Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale, Commission de l’Environnement, de la Conservation de la nature, de la Politique de l’eau et de l’Énergie, Compte rendu intégral, CRI 48, 19 février 2013.
  • [100]
    La liste des personnes auditionnée est arrêtée le 26 février 2013. Elle comprend des experts scientifiques, les représentants des opérateurs, et des représentants de Bruxelles Environnement, d’AATL, de l’IBPT, de l’IBGE, du Conseil supérieur de la Santé et de l’ISSEP wallon. Les auditions doivent avoir lieu les 15, 19 et 26 mars.
  • [101]
    La Libre Belgique, 22 février 2013.
  • [102]
    L’Écho, 26 février 2013 ; La Libre Belgique, 26 février 2013 ; Le Soir, 26 février 2013.
  • [103]
    Le Soir, 4 mars 2013.
  • [104]
    L’Écho, 23 avril 2013 ; La Libre Belgique, 24 avril 2013 ; Le Soir, 24 avril 2013.
  • [105]
    Inter-Environnement Wallonie, Synthèse des contributions (Consultation du ministre du Développement territorial sur l’implantation des antennes de téléphonie mobile en Région wallonne), octobre 2008.
  • [106]
    Circulaire ministérielle du 9 janvier 2009 relative à l’installation ou la modification des stations-relais de téléphonie mobile, Moniteur belge, 28 janvier 2009.
  • [107]
    Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/1, 4 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/2, 17 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/3, 17 mars 2009 ; Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/4, 1er avril 2009.
  • [108]
    R. ANDERSEN, F. DELPERÉE, M. VERDUSSEN, Droit administratif, tome 2, Louvain-la-Neuve, Presses Universitaires de Louvain, 1996, p. 20.
  • [109]
    Parlement wallon, Proposition de décret relatif à la protection contre les éventuels effets nocifs et nuisances provoqués par les rayonnements non ionisants générés par des antennes émettrices stationnaires, 941/3, 17 mars 2009, p. 5.
  • [110]
    Parlement wallon, Commission de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de la Mobilité, Compte rendu avancé, CRAC 65, 12 janvier 2012.
  • [111]
    En analyse des politiques publiques, la théorie de la dépendance au sentier considère que les changements de politiques publiques interviennent à la marge et de manière progressive étant donné les contraintes qui pèsent sur les acteurs politiques notamment (P. PIERSON, « Increasing Returns, Path Dependence, and the Study of Politics », The American Political Science Review, volume 94, n° 2, 2000, p. 251-267).
  • [112]
    Décret-programme wallon du 22 juillet 2010 portant des mesures diverses en matière de bonne gouvernance, de simplification administrative, d’énergie, de logement, de fiscalité, d’emploi, de politique aéroportuaire, d’économie, d’environnement, d’aménagement du territoire, de pouvoirs locaux, d’agriculture et de travaux publics, Moniteur belge, 20 août 2010.
  • [113]
    IBPT, www.sites.ibpt.be.
  • [114]
    Le Soir, 18 juin 2011.
  • [115]
    La Dernière Heure, 30 août 2011.
  • [116]
    Parlement wallon, Rapport présenté au nom de la Commission de l’Environnement, de l’Aménagement du territoire et de la Mobilité, n° 658, 17 juillet 2012.
  • [117]
    Arrêté du gouvernement flamand du 19 novembre 2010 modifiant l’arrêté du gouvernement flamand du 1er juin 1995 fixant les dispositions générales et sectorielles en matière d’hygiène de l’environnement pour ce qui concerne les normes d’antennes émettrices fixes et temporaires pour des ondes électro-magnétiques entre 10 MHz et 10 GHz, Moniteur belge, 13 janvier 2011.
  • [118]
    Het Nieuwsblad, 9 mai 2012, 10 juillet 2012 et 10 octobre 2012.
  • [119]
    De Standaard, 20 juillet 2012.
  • [120]
    S’il est malaisé de comparer les trois politiques publiques régionales tant elles diffèrent, ce tableau est présenté à titre indicatif, en guise de synthèse.
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