Couverture de CRIS_1911

Article de revue

L'adoption par les couples de même sexe

Pages 5 à 72

Notes

  • [1]
    La nouvelle loi sur l’adoption, réformée en 2003, mentionne en effet que l’adoption n’est autorisée que pour les couples de sexe différent.
  • [2]
    J. COMMAILLE, C. MARTIN, Les enjeux politiques de la famille, Bayard Centurion, 1998.
  • [3]
    D’après les sondages, c’était surtout le Sud du pays qui était opposé à l’adoption (sondage réalisé par le quotidien De Morgen, 11 mai 2005).
  • [4]
    L’auteure est en train de réaliser une thèse de doctorat en sociologie, en tant qu’aspirante du FNRS.
  • [5]
    Ainsi que les notes prises lors de la quasi-totalité des séances à la Chambre.
  • [6]
    La proposition de loi venant d’être votée au Sénat au moment de la rédaction, il est trop tôt pour envisager d’analyser les débats qui y ont pris place.
  • [7]
    Dans le cas des couples de même sexe élevant ensemble un enfant, la création d’un statut de « parenté sociale » permettrait de reconnaître et de protéger le lien de parentalité existant entre l’enfant et le ou la partenaire de son parent légal (biologique ou adoptif).
  • [8]
    En Communauté flamande, le service d’adoption Gewenst Kind accepte et soutient les demandes d’adoption émanant de personnes homosexuelles (cf. les propos tenus par Jo Labens au cours des auditions en commission de la Justice).
  • [9]
    L’origine de l’adoption monoparentale remonte à plus de deux cent ans où, dans le Code Napoléon, elle permettait à une personne plus âgée sans enfant de transmettre ses biens à une personne de son choix. Pour plus d’informations, cf. F.-R. OUELLETTE, « Les usages contemporains de l’adoption », in A. FINE (dir.), Adoptions. Ethnologie des parentés choisies, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1998.
  • [10]
    C’était également le cas pour la Belgique jusqu’en avril 2004, avant la promulgation de la nouvelle loi sur l’adoption.
  • [11]
    De plus en plus d’enfants sont élevés par un couple de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination artificielle, pratiquée depuis le début des années 1980 au centre de fertilité de l’AZ-VUB.
  • [12]
    Étant donné le vide juridique entourant la maternité de substitution, le recours à une mère porteuse n’est pas légalement interdit en Belgique.
  • [13]
    Devenue par la suite la Holebifederatie.
  • [14]
    Conférence-débat organisée par Zoé Genot (Écolo) le 29 juin 2000, avec notamment les sociologues François Delor (FUSL) et Jacques Marquet (UCL).
  • [15]
    Motion déposée par Écolo en septembre 2000 (Namur).
  • [16]
    Chambre, Doc. parl. 50 1692/001,14 mars 2002, p. 4.
  • [17]
    J.-F. DORTIER (coord.), Familles. Permanence et métamorphoses, Paris, Éd. Sciences Humaines, 2002.
  • [18]
    Par homoparentalité, on désigne « toutes les situations familiales dans lesquelles au moins un adulte qui s’autodésigne comme homosexuel est le parent d’au moins un enfant » (tiré de M. GROSS, L’homoparentalité, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2003, p. 9).
  • [19]
    B. BAWIN-LEGROS, Le nouvel ordre sentimental. A quoi sert la famille aujourd’hui ?, Paris, Payot, 2003.
  • [20]
    A. GIDDENS, Transformation of Intimacy. Sexuality, Love et Erotism in Modern Societies, Cambridge, Polity Press, 1993.
  • [21]
    Projet de loi réformant l’adoption, Chambre, Doc. parl. 50 1366/001 et 50 1367/1,17 juillet 2001. Les réunions en commission se déroulent du 6 novembre 2001 à décembre 2002.
  • [22]
    Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, signée à La Haye le 29 mai 1993, ratifiée et entrée en vigueur en 1998.
  • [23]
    Elle est ratifiée par la Belgique le 29 mai 2005 et entre en vigueur le 1er septembre 2005.
  • [24]
    La nouvelle loi détermine ainsi strictement la répartition des compétences respectives des différentes instances et entités responsables en matière d’adoption. Elle instaure en outre une procédure rigoureuse d’adoption (prévoyant notamment une préparation pour les candidats adoptants) et le recours obligatoire à des centres d’adoption agréés par une communauté, ainsi que l’évaluation auprès du juge de paix pour obtenir un « certificat d’aptitude à l’adoption ».
  • [25]
    Chambre, Doc. parl. 50 1366/002,16 novembre 2001.
  • [26]
    Moniteur belge, 16 mai 2003.
  • [27]
    Pour une analyse comparative plus détaillée des situations nationales, cf. K. WAALDIJK (ed.), More or Less Together. Levels of legals consequences of marriage, cohabitation and registred partnerships for different-sex and same-sex partners, Paris, Ined, 2005.
  • [28]
    Un projet de loi élargissant le texte actuel à l’adoption internationale a été adopté le 24 juin 2005 et doit encore passer devant le Parlement.
  • [29]
    La Suède est pionnière en matière d’adoption internationale pour les couples de même sexe.
  • [30]
    La possibilité d’adopter est à l’étude en Afrique du Sud.
  • [31]
    Elle était par exemple permise au Québec depuis le 10 juin 2002, date de l’ouverture de « l’union civile des couples homosexuels ».
  • [32]
    Il est intéressant de noter la proximité temporelle des événements.
  • [33]
    La lutte contre les discriminations fondée sur l’orientation sexuelle est déjà présente dans les accords gouvernementaux de 1999.
  • [34]
    Une Belgique créative et solidaire – Du souffle pour le pays, Accord du gouvernement, juillet 2003.
  • [35]
    Ibidem, p. 100.
  • [36]
    Ouverte au public, la sous-commission rassemble huit députés effectifs. Il s’agit de Valérie Déom (PS), Zoé Genot (Écolo), Marie-Christine Marghem (MR), Bert Schoofs (VB), Guy Swennen (SP.A-Spirit), Martine Taelman (VLD), Liesbeth Van der Auwera (CD&V) et Melchior Wathelet (CDH). Les autres députés peuvent également y assister.
  • [37]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n° 134/2003,8 octobre 2003, pp. 4-6.
  • [38]
    Liste des ateliers : « articulation entre vie familiale et vie professionnelle », « familles et sécurité sociale », « familles et droit civil et judiciaire », « service aux familles et soutien à la parentalité », « familles et fiscalité ».
  • [39]
    Ces conclusions datent de la mi-2004 mais les recommandations des différents ateliers sont officiellement déposées en janvier 2005.
  • [40]
    Synthèse des États généraux des familles (cycle 1) et propositions à exploiter, Secrétariat d’État aux Familles et aux Personnes handicapées, pp. 20-21.
  • [41]
    Elle succède à Isabelle Simonis (PS), en tant que secrétaire d’État aux Familles et aux Personnes handicapées.
  • [42]
    Dans ce premier texte, figurent les termes « couples homosexuels », qui deviendront « couples de même sexe » dans les autres propositions, afin de mettre l’accent sur le sexe des partenaires (ce qui concerne le législateur), et non sur l’orientation sexuelle des individus.
  • [43]
    Guy Swennen, Proposition de loi modifiant le Code civil afin d’autoriser l’adoption par des couples homosexuels, Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3. Cf. annexe 1.
  • [44]
    Martine Taelman, Maggie De Block, Geert Versnick, Hilde Vautmans, Rik Daems, Karel De Gucht, Annemie Turtelboom (VLD), Proposition de loi modifiant le Code civil en vue d’autoriser l’adoption par des couples du même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 4.
  • [45]
    Els Van Weert, Annelies Storms et Stijn Bex (Spirit), Proposition de loi modifiant le Code civil en vue d’autoriser l’adoption par des couples de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0667,8 janvier 2004.
  • [46]
    Zoé Genot (Écolo), Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0980/001,30 mars 2004, p. 5.
  • [47]
    Zoé Genot, Proposition de loi modifiant le Code civil en ce qui concerne la reconnaissance de la filiation, Chambre, Doc. parl. 51 0520,1er décembre 2003.
  • [48]
    Valérie Déom, Karine Lalieux, Marie-Claire Lambert, Yvan Mayeur (PS), Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 5.
  • [49]
    En règle générale, le terme de « parenté » se réfère au lien légal de filiation attribué par le droit. La « parentalité » désigne plutôt l’exercice des fonctions parentales au quotidien à l’égard de l’enfant. Toutefois, les intervenants ne font pas toujours clairement la différence entre ces deux notions lors des discussions.
  • [50]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale par le père ou la mère et une tierce personne, et modifiant la loi sur la protection de la jeunesse, Chambre, Doc. parl. 50 1066/001,25 janvier 2001.
  • [51]
    Proposition de loi autorisant l’exercice d’une autorité parentale désirée par le partenaire ou le cohabitant du parent (Agalev-Écolo), Chambre, Doc. parl. 50 2004/001,7 août 2002.
  • [52]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale, Chambre, Doc. parl. 50 1604,23 février 2002.
  • [53]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale, Chambre, Doc. parl. 51 0393/001,6 novembre 2003.
  • [54]
    Geert Bourgeois, Proposition de loi introduisant la parenté sociale dans le Code civil, Chambre, Doc. parl. 51 0815/001,16 février 2004.
  • [55]
    Zoé Genot, Proposition de loi modifiant le Code civil en ce qui concerne la reconnaissance de la filiation, Chambre, Doc. parl. 51 0520,1er décembre 2003.
  • [56]
    Ces remarques sont valables tant pour les couples homosexuels qu’hétérosexuels qui ont eu recours à l’adoption ou à l’insémination avec donneur. Le secret, une fois dévoilé, peut avoir des conséquences très préjudiciables pour l’enfant.
  • [57]
    A. PERPÈTE, Rapport fait au nom de la commission de la Justice, Chambre, Doc. parl. 51 0664/008, 23 novembre 2005, p. 100.
  • [58]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 101.
  • [59]
    La maternité de substitution désigne le recours aux « mères porteuses ».
  • [60]
    Le 23 mars 2005.
  • [61]
    Ibidem, p. 113.
  • [62]
    Ibidem, p. 132.
  • [63]
    J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », Journal des tribunaux, 19 février 2005.
  • [64]
    Ibidem, p. 122.
  • [65]
    Ria Convents a été très liée aux mouvements homosexuel et féministe au début des années 1990. Cf. D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1860-1861,2004, p. 23.
  • [66]
    Ibidem, p. 140.
  • [67]
    Ibidem, p. 158.
  • [68]
    Ibidem, p. 9.
  • [69]
    Ibidem, p. 160.
  • [70]
    Ibidem, p. 10.
  • [71]
    Ibidem, p. 11.
  • [72]
    Ibidem, p. 11.
  • [73]
    Ibidem, p. 11.
  • [74]
    Le Vlaams Belang (parti d’extrême droite flamand) semble opposé à la fois à l’ouverture de l’adoption et à la création d’un statut de parenté sociale pour les couples de même sexe.
  • [75]
    Le VLD ne défend toutefois pas cet aspect.
  • [76]
    Suite au recours à l’insémination artificielle dans le cas de mères lesbiennes ou au recours à une mère porteuse dans le cas de pères gays. De plus, il peut s’agir également d’enfants issus d’une union hétérosexuelle antérieure, dans le cas où l’autre parent légal a disparu.
  • [77]
    Suite à une adoption monoparentale.
  • [78]
    Estimation reprise par plusieurs parlementaires au cours des débats.
  • [79]
    Déclaration des évêques de Belgique, Cathobel, Bruxelles, le 31 mai 2005.
  • [80]
    Décision prise le 31 mai 2005 (Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 26).
  • [81]
    La Libre Belgique, 7 juin 2005, p. 2.
  • [82]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35.
  • [83]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 57.
  • [84]
    Ibidem, p. 39.
  • [85]
    Plusieurs sondages ont par exemple montré que la population flamande était majoritairement favorable à l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe.
  • [86]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 36 (Malmendier).
  • [87]
    Ibidem, p. 38 (Perpète).
  • [88]
    Ibidem, p. 38 (Genot).
  • [89]
    Ibidem.
  • [90]
    Ibidem, p. 39 (Lalieux).
  • [91]
    Ibidem, p. 40 (Taelman).
  • [92]
    Auditions de Jean-Yves Hayez, chef de service de l’unité de pédopsychiatrie des Cliniques universitaires de Saint-Luc à Bruxelles, Jo Labens, coordinateur du service d’adoption Gewenst Kind, Véronique Wauters, directrice de l’asbl À la croisée des chemins, Roger Pauly, administrateur général du Gezinsbond, Didier Dehou, responsable du service d’adoption de la Direction générale de l’Aide à la jeunesse du Ministère de la Communauté française, Claude Lelièvre, délégué général de la Communauté française aux Droits de l’enfant et Pierre Rans, substitut du procureur général près de la cour d’appel de Bruxelles.
  • [93]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [94]
    Ibidem, p. 41 (Monfils).
  • [95]
    Ibidem, p. 38 (Perpète).
  • [96]
    Ibidem, p. 30 (Wathelet).
  • [97]
    La demande est rejetée par 13 voix contre 4. (Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 69.
  • [98]
    Propos tenus par les sénateurs MR Jihane Annane et Jean-Marie Cheffert dans une Carte blanche du quotidien Le Soir intitulée « Adoption par les couples homosexuels : organisons une consultation populaire » (Le Soir, 7 juillet 2005).
  • [99]
    Olivier Maingain, Daniel Bacquelaine, Amendement n° 24, Doc. parl. 51 0664/007,9 novembre 2005.
  • [100]
    Ce groupe est mis en place par Pierre-Alexandre de Maere d’Aertrycke (CDF – Chrétiens démocrates francophones) et Kris Vleugels (CD&V).
  • [101]
    Il semble probable que cette idée s’inspire en partie de la manifestation organisée à Madrid le 18 juin 2005 pour refuser le projet du gouvernement espagnol de Zapatero d’ouvrir l’adoption à des couples de même sexe.
  • [102]
    Dans les propositions déposées par Guy Swennen, par le VLD et par le PS.
  • [103]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 5.
  • [104]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 4.
  • [105]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 41 (Monfils).
  • [106]
    Ibidem, p. 31 (Marghem).
  • [107]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 16 (Wathelet).
  • [108]
    Ibidem, p. 51 (Genot).
  • [109]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 39 (Lalieux).
  • [110]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 16 (Wathelet).
  • [111]
    Ibidem, pp. 64-65 (Monfils).
  • [112]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 33 (Marghem).
  • [113]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 64 (Monfils).
  • [114]
    B. PERREAU, « La différence des sexes en débat », Conférence donnée à l’Institut de sociologie, Université libre de Bruxelles, le 17 novembre 2005.
  • [115]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3.
  • [116]
    Le CD&V adhère et sollicite les résultats des études pour montrer la nécessité de combler le vide juridique entourant ces enfants.
  • [117]
    Ce dernier argument, approuvé pourtant par la communauté scientifique, fera l’objet d’une dernière critique en séance plénière par Marie-Christine Marghem (MR) qui mettra en avant une étude espagnole, venant contredire les autres études. Cependant, il s’avère que ce document, provenant de groupes militants radicaux, est hautement contestable, de par ses auteurs et les incohérences fondamentales qu’il contient. Il s’agit du « Rapport sur le développement des enfants élevés par un couple de même sexe », de mai 2005, transmis aux députés le 27 novembre 2005 par Michel Ghins et rédigé par les professeurs Monica Fontana, Patricia Martinez et Pablo Romeu, à l’initiative de l’organisation Hazteoir (Espagne).
  • [118]
    Marie-Christine Marghem (MR), Charles Michel (MR), Melchior Wathelet (CDH) et d’autres, reprennent ces termes de façon explicite en commission de la Justice.
  • [119]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [120]
    Ibidem, p. 76 (Monfils).
  • [121]
    Ibidem, p. 55.
  • [122]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, pp. 9-10, (Wathelet).
  • [123]
    Cf. J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit.
  • [124]
    Jean-Louis Renchon le précise d’ailleurs dans son article : J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit. ; cf. également la contribution de la juriste Marcela Iacub : D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, Paris, PUF, coll. Politique d’aujourd’hui, 2001.
  • [125]
    J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit. Ce document a été distribué aux parlementaires lors des débats.
  • [126]
    Notamment Marie-Christine Marghem et Jean-Pierre Malmendier.
  • [127]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 33.
  • [128]
    Ibidem, pp. 35-36 (Malmendier).
  • [129]
    À l’heure actuelle, on peut même parler en termes de « gamètes différenciées », étant donné que le développement des techniques de procréation médicalement assistée permette de pouvoir se passer d’un acte physique entre un homme et une femme dans la reproduction.
  • [130]
    D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit. En outre, de plus en plus de psychanalystes, à l’instar de Michel Tort, remettent en question cette interprétation du complexe d’Œdipe.
  • [131]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 34.
  • [132]
    Ibidem, pp. 34-35.
  • [133]
    Ibidem, pp. 63-64 (Monfils).
  • [134]
    Il s’agit des structures biparentales composées de deux parents de même sexe, tels qu’un couple de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination avec donneur, d’un couple de gays ayant eu recours à une mère porteuse ou d’un couple de personnes homosexuelles dont un des partenaires a adopté un enfant en tant que personne seule. Dans tous ces cas, le partenaire du parent légal ne dispose d’aucun statut juridique à l’égard de l’enfant.
  • [135]
    Les différentes propositions de loi relatives à la « parenté sociale » n’envisagent que les cas où, soit il n’y a qu’un seul parent légal, soit le deuxième parent légal est absent ou mort.
  • [136]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005.
  • [137]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n°134/2003,8 octobre 2003.
  • [138]
    Ibidem, pp. 4-6.
  • [139]
    En particulier, il servira de point de référence au député Olivier Maingain (FDF-MR) pour justifier son refus de la proposition Swennen.
  • [140]
    Le Soir, 5 juillet 2005, p. 5.
  • [141]
    Ibidem.
  • [142]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/004,4 juillet 2005.
  • [143]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 47.
  • [144]
    Ibidem, p. 55 (Wathelet).
  • [145]
    Servais Verherstraeten (CD&V), Amendements n° 19,20 et 21, Chambre, Doc. parl. 51 0664/005, 6 juillet 2005.
  • [146]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale (CD&V), Chambre, Doc. parl. 51 0393/001,6 novembre 2003.
  • [147]
    Chambre, Doc. parl. 0664/005,6 juillet 2005. Ces amendements donneront lieu plus tard à une proposition de loi déposée à la Chambre par Melchior Wathelet et au Sénat par Clothilde Nyssens.
  • [148]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 53.
  • [149]
    Par exemple après une adoption monoparentale.
  • [150]
    Chambre, Doc. parl. 0664/005,6 juillet 2005, p. 11.
  • [151]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 55 (Wathelet).
  • [152]
    Amendement n° 2 de Lalieux et consorts, Chambre, Doc. parl. 51 0664/002,1er juin 2005, p. 2.
  • [153]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 49.
  • [154]
    Ibidem, p. 136.
  • [155]
    Ibidem, p. 45.
  • [156]
    D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit., p. 190.
  • [157]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 17 (Wathelet).
  • [158]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 49 (Lalieux).
  • [159]
    L’enfant à adopter est né en Belgique mais peut être d’origine étrangère.
  • [160]
    Vu le nombre peu élevé d’enfants en bonne santé confiés en adoption dans les pays d’Europe de l’Ouest, ces États privilégient d’abord les demandes d’adoption émanant de leurs propres ressortissants, souvent déjà supérieure à l’offre interne. Il est donc très difficile pour un Belge d’adopter un enfant dans un pays voisin.
  • [161]
    Il s’agit du principe de subsidiarité maximale.
  • [162]
    Les candidats adoptants préfèrent généralement adopter un enfant provenant de leur propre pays. Cela permet entre autres d’éviter un décalage culturel et physique trop important entre les parents et l’enfant, ainsi que d’éventuellement maintenir des liens avec la famille d’origine.
  • [163]
    Soit le candidat peut tenter de la dissimuler, soit l’organisme d’adoption belge peut ne pas l’indiquer dans les documents envoyés par exemple à l’étranger.
  • [164]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 6.
  • [165]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/003,7 juin 2005.
  • [166]
    La plupart des centres refusent déjà les demandes d’adoption interne par des couples de même sexe, voire par des personnes célibataires faisant part de leur homosexualité, soit parce que les responsables montrent de la réticence à l’égard de l’homosexualité, soit parce que la famille d’origine refuse de voir son enfant adopté par une personne ou un couple homosexuel, soit pour respecter un certain quota parmi les demandes.
  • [167]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 28.
  • [168]
    Ibidem, p. 41.
  • [169]
    Ibidem, p. 44.
  • [170]
    Ibidem, p. 39.
  • [171]
    Ibidem, p. 23.
  • [172]
    Dans les pays occidentaux.
  • [173]
    Suède, Islande, Danemark, Pays de Galles, Angleterre, Pays-Bas, Allemagne, Espagne, Israël, Afrique du Sud, certains États du Canada et des États-Unis.
  • [174]
    L’Espagne et la Grande-Bretagne.
  • [175]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 37.
  • [176]
    La Suède a ouvert l’adoption interne et internationale aux couples de même sexe le 1er février 2003.
  • [177]
    Les Pays-Bas ont toutefois introduit un projet pour ouvrir l’adoption aux couples de même sexe au niveau international.
  • [178]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005.
  • [179]
    Ibidem.
  • [180]
    Ibidem, p. 203.
  • [181]
    Il s’agit de données communiquées par le bureau international suédois de l’adoption.
  • [182]
    Bien que les Pays-Bas soient en train d’étendre la portée de la loi au niveau international.
  • [183]
    40 % des adoptions.
  • [184]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 52.
  • [185]
    Ibidem, pp. 56-57.
  • [186]
    Ibidem, p. 58.
  • [187]
    Ce fut également le cas dans le cadre des débats parlementaires sur le PACS en France. Cf. D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit.
  • [188]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 57.
  • [189]
    Ibidem, p. 51.
  • [190]
    Loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (Moniteur belge, 17 mars 2003). Cf. C. SÄGESSER, « La loi anti-discrimination », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1887-1888,2005.
  • [191]
    La loi évoque ici la doctrine juridique de l’égalité.
  • [192]
    Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 4.
  • [193]
    Guy Swennen (SP.A-Spirit), Proposition de loi modifiant le Code civil afin d’autoriser l’adoption par des couples homosexuels, Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3.
  • [194]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 26.
  • [195]
    Lors de la procédure d’adoption, le candidat doit en effet obtenir l’approbation, à la fois des intervenants belges (le juge de la jeunesse et les responsables des centres d’adoption), mais également des instances du pays d’origine de l’enfant, où l’homosexualité est souvent interdite.
  • [196]
    Concernant les réactions et les représentations des intervenants dans les centres d’adoption à l’égard de l’homosexualité, cf. la recherche menée par Bruno Perreau sur la situation française. B. Perreau, « Les Organismes autorisés pour l’adoption (OAA). Analyse d’une délégation de service public », in A. CADORET, M. GROSS, C. MECARY, B. PERREAU (dir.), Homoparentalités. Approches scientifiques et politiques, Paris, Presses Universitaires de France, à paraître.
  • [197]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 24.
  • [198]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 7 (Wathelet).
  • [199]
    Ibidem, p. 8 (Wathelet).
  • [200]
    Ibidem, p. 7 (Wathelet).
  • [201]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 31.
  • [202]
    Ibidem, p. 29 (Wathelet).
  • [203]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 9 (Wathelet).
  • [204]
    Ibidem, p. 9 (Wathelet) et p. 23 (Schoofs).
  • [205]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [206]
    B. PERREAU, « L’inégalité inavouable. Homosexualité et adoption en France : une politique publique jurisprudentielle », Nouvelles questions féministes, vol.22, n°3.
  • [207]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23novembre 2005, p. 40.
  • [208]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 63 (Monfils).
  • [209]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n° 134/2003,8 octobre 2003, pp. 4-6.
  • [210]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 31.
  • [211]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 28 (Lalieux).
  • [212]
    Toutes les propositions de loi font référence à l’ouverture du mariage, à l’exception de celle déposée le 8 janvier 2004 par les députés Spirit Els Van Weert, Annelies Storms et Stijn Bex. Chambre, Doc. parl. 51 0667,8 janvier 2004.
  • [213]
    La proposition de loi du VLD présente l’ouverture de l’adoption « dans la foulée » de celle du mariage.
  • [214]
    Valérie Déom, Karine Lalieux, Marie-Claire Lambert, Yvan Mayeur, Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 3.
  • [215]
    D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », op. cit., p. 38. Cf. également D. PATERNOTTE, « Beyond the laws : marriage right, citizenship and inclusion models in Belgium », in A. WEYEMBERGH, S. CARSTOCEA (eds), Gays' and Lesbians' Rights in an Enlarged European Union, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles, 2006.
  • [216]
    Chambre, Doc. parl. 50 1692/001,14 mars 2002, pp. 18-23.
  • [217]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [218]
    Ibidem, p. 78 (Maingain).
  • [219]
    Ibidem, p. 79.
  • [220]
    Ibidem.
  • [221]
    Bien qu’il ne se soit pas exprimé explicitement sur la question, on peut penser que le CDH partagerait plutôt ce type de perspective, étant donné qu’en 2003 il avait refusé l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et qu’il a constamment défendu, au cours des débats relatifs à l’adoption, le modèle traditionnel de la famille nucléaire fondée sur la différence des sexes.
  • [222]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 4.
  • [223]
    Dans les débats télévisés et les communiqués de presse, les intervenants font souvent des amalgames entre les différentes situations d’homoparentalité et ne comprennent souvent pas les enjeux juridiques de la proposition de loi. Certains semblent penser qu’elle donnerait la possibilité aux homosexuels d’avoir des enfants, ignorant que ces situations existent déjà dans les faits. En outre, on note certains propos homophobes parmi les participants aux manifestations contre l’adoption et, pour le moins, un grand manque de compréhension de l’homosexualité.
  • [224]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [225]
    À l’époque, le Conseil d’État s’était opposé à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe en considérant que le mariage était lié à la procréation.
  • [226]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [227]
    Le Conseil d’État considère ces situations comme différentes.
  • [228]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/007,9 novembre 2005.
  • [229]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 7.
  • [230]
    Par 10 voix contre 1 et 5 abstentions.
  • [231]
    Les commissaires VLD, PS et SP.A ont voté en faveur du texte. Les CD&V, MR, CDH et VB ont voté contre.
  • [232]
    La modification principale apportée à la proposition initiale est l’intégration de la possibilité pour une personne d’adopter l’enfant de son partenaire de même sexe. En outre, l’intitulé de la proposition a été modifié pour devenir : « Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe ».
  • [233]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/009,23 novembre 2005. Cf. en annexe 2.
  • [234]
    De nombreux députés arborent d’ailleurs le ruban rouge, symbole de la Journée mondiale de lutte contre le sida.
  • [235]
    Deux députés étaient absents : Karel Pinxten et Stef Goris.
  • [236]
    Pour l’essentiel, il s’agit de nombreux membres d’associations gayes et lesbiennes, d’étudiants et de quelques représentants du comité d’Action pour la famille, qui s’opposent fermement à l’ouverture de l’adoption.
  • [237]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 35 (Swennen).
  • [238]
    Ibidem, p. 27 (Lalieux) et p. 34 (Swennen).
  • [239]
    Ibidem, p. 28 (Lalieux).
  • [240]
    Ibidem, p. 51 (Genot).
  • [241]
    Ibidem, p. 36 (Swennen).
  • [242]
    Ibidem, p. 47 (Taelman).
  • [243]
    Ibidem, p. 27 (Lalieux).
  • [244]
    Ibidem.
  • [245]
    Ibidem, p. 27 (Monfils).
  • [246]
    Ibidem, p. 29 (Lalieux).
  • [247]
    De même que Guy Swennen.
  • [248]
    Guy Swennen entend aussi appliquer le principe de précaution à travers la mise en place de critères stricts dans la procédure d’adoption.
  • [249]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 62 (Monfils).
  • [250]
    Sénat, Ann. parl. 2-246,28 novembre 2002, p. 20.
  • [251]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, pp. 9-10 (Wathelet).
  • [252]
    Au début de la commission de la Justice, le CD&V appuiera son argumentation sur les résultats des études réalisées sur le sujet.
  • [253]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 70 (Michel).
  • [254]
    Ibidem, p. 80 (Laeremans).
  • [255]
    Par ailleurs, chef du groupe du CDH.
  • [256]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 10 (Wathelet).
  • [257]
    Ibidem, p. 11 (Wathelet).
  • [258]
    Ibidem, pp. 40-42 (Marghem).
  • [259]
    Ibidem, p. 11 (Wathelet).
  • [260]
    Ibidem, p. 15 (Wathelet).
  • [261]
    Ibidem, p. 92 (Maingain).
  • [262]
    Ibidem, p. 95 (Maingain).
  • [263]
    Ibidem, p. 20 (Bert Schoofs).
  • [264]
    Pour une analyse plus approfondie des ces logiques, voir D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », op. cit., pp. 61-64.
  • [265]
    Ibidem, p. 20 (Schoofs).
  • [266]
    Ibidem, p. 24 (Schoofs).
  • [267]
    Ibidem, p. 27.
  • [268]
    Ibidem, p. 27 (Van der Auwera).
  • [269]
    Ibidem, p. 28.
  • [270]
    Ibidem, p. 48.
  • [271]
    Sénat, Doc parl. 3 1460/4,23 février 2006.
  • [272]
    La Libre Belgique, 21 avril 2006.

INTRODUCTION

1Ouvrir l’adoption aux couples homosexuels. Il y a peu de temps encore, l’idée même en semblait irréaliste, voire inconcevable. Pourtant, le 1er décembre 2005, au terme d’un parcours législatif tumultueux, une proposition de loi l’autorisant est votée à la Chambre, marquant ainsi un pas symbolique vers l’acceptation et la reconnaissance de la diversité des formes familiales et des modes de vie actuels. Au-delà de la suppression des trois mots « de sexe différent  [1] » de la loi sur l’adoption, le projet soulève des enjeux bien plus fondamentaux par ses implications symboliques et les valeurs mises au centre des décisions. La question s’inscrit en effet à la rencontre du privé et du public  [2] et touche à des domaines aussi délicats que la famille, l’enfant ou la sexualité. De ce fait, bien que la loi ne vise qu’une minorité de la population, elle interroge chacun dans ses convictions personnelles.

2Annoncé au départ comme une étape supplémentaire dans la lutte globale contre les discriminations, le dossier de l’adoption ne posait pas a priori de difficultés majeures sur le plan juridique. Le sujet réveille pourtant bien des résistances au niveau politique et devient l’objet d’un débat controversé qui s’est déployé sur plus de huit mois. Au sein de la société civile, la question suscite aussi soudainement des remous, qui aboutissent entre autres à l’organisation de deux manifestations contre l’adoption et à la mobilisation de nombreuses associations dans un sens comme dans l’autre. Comment en est-on arrivé à de telles réactions ? Quels ont été les termes du débat, et surtout, quels sont les éléments qui ont mené à l’élaboration d’une loi qui rencontrait pourtant la désapprobation d’une partie des parlementaires et, plus tacitement, de l’opinion publique  [3] ? Trois ans après l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe, quels en sont les effets et quels sont les liens avec celui-ci ? Quels sont enfin les grands axes problématiques du débat et les questions laissées en suspens ? Ce sont les interrogations auxquelles le présent Courrier hebdomadaire tente de répondre en dressant un panorama des positions et des argumentations défendues, à travers l’analyse du parcours délicat d’un projet controversé.

3Après le vote en séance plénière à la Chambre, le Sénat a exercé son droit d’évocation. Malgré les auditions supplémentaires, la prolongation des discussions et la vive résistance des partis opposés à l’ouverture de l’adoption, la loi est finalement adoptée le 20 avril 2006. Se situant à un moment-clé où l’on ne mesure pas encore pleinement la portée, tant pratique que symbolique, de ce changement législatif, cette étude, dont le point d’ancrage se veut davantage sociologique  [4], tente de faire le bilan des débats parlementaires et de resituer ceux-ci dans un contexte politique et social plus large. Après avoir retracé les étapes et les événements majeurs du dossier, l’analyse tentera de mettre en perspective les différents éléments qui ont conduit à la volonté d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe et à sa concrétisation sous forme de proposition de loi. Celle-ci émerge en effet à un moment charnière, où il importe de bien comprendre l’imbrication des différentes revendications et la manière dont les actions politiques et les revendications des associations se sont enchaînées, parallèlement à l’avènement de décisions semblables à l’étranger. Au niveau parlementaire, l’analyse s’attachera essentiellement à situer les intervenants principaux et leur position dans le débat, ainsi qu’à mettre en évidence, à la fois les grands axes d’argumentation et la façon dont ceux-ci ont été développés par les acteurs politiques. Elle tentera de cerner leurs fondements mais aussi leur cohérence et leurs limites.

4L’analyse des débats se fonde, d’une part, sur l’examen de l’ensemble des documents parlementaires de la Chambre  [5]. D’autre part, le matériau de travail comprend également les informations collectées auprès de témoins privilégiés, les nombreux communiqués de presse et les débats télévisés sur le sujet qui se sont succédé au cours de l’année 2005, ainsi que divers documents provenant à la fois d’associations militantes (telles que Homoparentalité, Holebifederatie, Action pour la famille, etc.) et de groupes ou instances ayant pris position sur la question (à l’instar des États généraux des familles, de la Ligue des droits de l’homme, du Gezinsbond, etc.). Ces informations et références ne font toutefois pas l’objet d’une analyse approfondie et systématique. L’analyse des débats parlementaires se concentre essentiellement sur l’année 2005 et se limite aux débats de la Chambre  [6]. Toutefois, il paraissait nécessaire de démarrer la chronologie à la fin des années 1990, au moment où s’annoncent les premières déclarations en faveur de l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels.

5Avant d’entamer l’analyse des débats parlementaires, une première partie s’attache à décrire le contexte social et politique dans lequel a émergé la revendication concernant l’adoption par les couples de même sexe. La deuxième partie est consacrée au destin de la revendication sous l’actuelle législature. Plusieurs propositions de loi sur l’adoption par des personnes de même sexe, mais également sur un thème qui interfère constamment avec celui de l’adoption, à savoir la parenté sociale, sont déposés à la Chambre. Leur examen en sous-commission du Droit de la famille et ensuite en commission de la Justice débouche sur l’adoption d’un texte amendé. La troisième partie analyse en profondeur les enjeux tels qu’ils sont exprimés en commission de la Justice. La fin du parcours parlementaire, objet de la quatrième partie, est marquée par une longue mobilisation de l’opinion publique et par une radicalisation des positions au Parlement.

1. RAPPEL HISTORIQUE

6À la fin des années 1990, l’idée d’ouvrir l’adoption aux couples homosexuels semble particulièrement innovante, voire audacieuse. Aucun pays n’a jusqu’alors légiféré sur cette question et le débat portant sur la parenté homosexuelle demeure sinon tabou, pour le moins inexistant ou subordonné à celui relatif au mariage ou à la parenté dite « sociale  [7] ». Dans les faits, des personnes homosexuelles parviennent néanmoins à adopter dans de nombreux pays avec, parfois, l’accord et le soutien tacites des différents intervenants impliqués dans le processus d’adoption  [8]. De telles situations s’expliquent par la possibilité légale d’adopter en tant que personne seule  [9] et par l’absence de critères explicites concernant le sexe et l’orientation sexuelle des adoptants dans le droit de la famille d’États tels que la France, le Canada ou les Pays-Bas  [10]. Dès lors, pour devenir parents, certaines personnes recourent au subterfuge de l’adoption monoparentale, sous le couvert du célibat, même si pour cela, elles doivent dissimuler leur vie conjugale, sexuelle et affective tout au long des démarches.

7En Belgique, la volonté de légiférer sur cette question émerge progressivement en raison de son inscription au croisement de deux mouvements conjoints, découlant d’évolutions plus globales de la société : d’une part, le combat militant et politique contre les discriminations à l’encontre des personnes homo- et bisexuelles et, d’autre part, la révision des lois et des normes qui régissent la famille contemporaine, suite aux transformations profondes que connaît celle-ci.

8Ces deux pans de la problématique, évoluant de manière parallèle et se confondant à certains moments, ont constamment encadré et influencé les débats autour de l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. L’analyse suivante s’attachera à développer plus en détails les évolutions parallèles de ces deux domaines, liés partiellement. En effet, dans un cadre où se juxtaposent des influences multiples, il importe de cerner les enjeux des décisions et le rôle joué par les intervenant politiques et les associations, afin de comprendre correctement l’enchaînement des événements et la répercussion de ceux-ci dans la suite des débats parlementaires. On s’attardera ensuite sur la réforme de la loi sur l’adoption, avant de dresser un panorama des événements législatifs similaires survenant à l’étranger.

1.1. LA LUTTE CONTRE LES DISCRIMINATIONS

9Initialement, le souhait de permettre aux personnes homosexuelles d’accéder à l’adoption, en tant que conjoints ou en tant que co-parents, est né dans la foulée des revendications pour l’égalité des droits, entamées dans les années 1990 par des associations militantes et des partis de gauche. Deux logiques vont contribuer à défendre l’accès des homosexuels à l’adoption.

10D’une part, il s’agit de poursuivre une logique universaliste, basée sur les principes d’égalité et de non-discrimination. L’épidémie du sida avait en effet contribué au réveil d’une militance gaye, en dévoilant nombre d’exclusions et de difficultés juridiques et sociales auxquelles étaient confrontés les couples de même sexe et qui confinaient et entraînaient ceux-ci dans une certaine précarité. Les groupes militants, visibilisés et renforcés par l’expérience de la maladie, présentent alors des revendications en faveur de la reconnaissance juridique des couples de même sexe. Celle-ci doit également leur donner accès à plusieurs droits, dont seuls les couples hétérosexuels pouvaient bénéficier jusque-là. Ces demandes sont concomitantes d’une réflexion politique plus large, dont la logique, après s’être davantage axée sur la défense du droit de vivre son orientation sexuelle librement, a mis l’accent sur l’accès à un certain nombre de droits et d’institutions. Ce passage s’accompagne d’une demande d’un rôle plus actif de l’État, qui ne se limiterait plus à une position passive de « tolérance » envers les homosexuels, mais interviendrait de façon active, en prenant des mesures concrètes pour favoriser l’égalité.

11D’autre part, la revendication de l’adoption s’inscrit dans une perspective pragmatique, qui part du constat que le nombre de foyers au sein desquels un enfant est élevé par des adultes de même sexe se multiplie. Dans la plupart des cas, il s’agit de foyers où l’enfant est né d’une relation hétérosexuelle précédente ou de couples de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination avec donneur  [11]. Malgré les difficultés légales et pratiques, des personnes homosexuelles parviennent parfois à accéder à l’adoption en tant que personne seule ou, plus rarement, des personnes gayes ont recours à une mère porteuse  [12]. Ces nouvelles configurations familiales, dites « homoparentales », attirent progressivement l’attention des associations militantes, en raison à la fois des demandes croissantes de couples de même sexe avec enfants d’être reconnus en tant que « familles » et de la nécessité de remédier aux problèmes juridiques auxquels ils sont confrontés. En effet, dans le cas des couples ayant eu recours à l’adoption ou à l’insémination, seul le parent biologique ou adoptif de l’enfant est reconnu aux yeux de la loi. Le partenaire du parent légal ne possède aucun droit ni aucune obligation vis-à-vis de l’enfant. Par conséquent, en cas de séparation du couple ou du décès du parent légal, l’enfant peut se voir brusquement écarté de son « deuxième parent ». De là découle la nécessité d’apporter une protection légale à ces enfants et de procurer éventuellement un statut au deuxième parent.

12Pour mieux comprendre cet état de fait, la Federatie Werkgroepen Homoseksualiteit (FWH)  [13] organise, le 6 décembre 1997, une première journée d’étude consacrée à l’homoparentalité. Du côté francophone, l’atelier « Homosexuels, citoyens à part… citoyens à part entière », organisé le 31 janvier 1998 dans le cadre des États généraux de l’écologie politique en janvier 1998, donne lieu aux premiers témoignages publics de mères lesbiennes. Celles-ci mettent notamment en avant les difficultés juridiques et sociales auxquelles elles sont confrontées quotidiennement. Par ailleurs, c’est à l’issue de cette journée où se rencontrent de nombreux acteurs associatifs, qu’est créée l’association Homoparentalités par un couple de mères lesbiennes voulant partager leurs expériences et leurs problèmes avec d’autres personnes vivant des situations similaires.

13Toutefois, bien que la question des enfants et de l’adoption ait été posée en même temps que celle de la reconnaissance du couple de même sexe, une de ses premières formalisations comme revendication apparaît à cette même époque dans un inventaire établi par le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme. Celui-ci répertoriait les discriminations légales, fiscales et juridiques à l’égard des personnes homosexuelles et l’accès à l’adoption y figurait au même titre qu’une quarantaine d’autres droits ou institutions dont les homosexuels étaient écartés dans plusieurs domaines. Cette liste de discriminations a ensuite été reprise par plusieurs partis de gauche lors des négociations gouvernementales de 1999. La lutte contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle est inscrite dans l’accord de gouvernement. Les discriminations touchant à la reconnaissance du couple et de la parenté sociale font ensuite l’objet de plusieurs réunions d’un groupe intercabinet durant le premier semestre 2000. Vu le nombre de droits et de mesures méritant de faire l’objet d’une modification légale, la solution la plus simple et la plus judicieuse apparaît rapidement être l’ouverture du mariage aux personnes de même sexe, institution qui englobe déjà un ensemble important de droits. Ainsi, après quelques remous au sein des associations, les efforts se concentrent désormais sur la défense du mariage, afin de porter la revendication dans l’enceinte parlementaire. Écolo, après avoir organisé une conférence-débat sur le thème « Homosexuel-les, parents à part, à part entière ?  [14] », où la question de l’adoption est largement traitée, est le premier parti francophone à officiellement prendre position en faveur de l’adoption en septembre 2000. Il déclare ainsi « qu’il convient de garantir à l’enfant la situation juridique et familiale la plus sécurisante possible  [15] ». Au mois de mars 2002, le dossier relatif au mariage arrive à la Chambre et son traitement se déroule sans trop de difficultés, étant donné qu’il bénéficie de l’appui de la majorité gouvernementale. Toutefois, pour tenir compte des réticences de Louis Michel, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères (MR), et des sociaux-chrétiens flamands (CD&V), les droits relatifs à la parenté pour les couples de même sexe sont retirés du texte en préparation.

14La loi est votée en janvier 2003 et la Belgique devient ainsi le deuxième pays, après les Pays-Bas (2001), à ouvrir le mariage aux personnes de même sexe. Celui-ci est toutefois privé de ses effets concernant la filiation et l’adoption.

15Au-delà des visées pratiques, cette loi signifie surtout la consécration de la relation de couple en tant que telle. Comme l’indique le gouvernement, à l’époque, dans son projet de loi, « le mariage est vécu et ressenti comme une relation (formelle) entre deux personnes ayant comme but principal la création d’une communauté de vie durable  [16] ». Dès lors, la relation d’union choisie par deux partenaires suffit à justifier le mariage, qui n’est dès lors plus fondé sur la procréation. L’idée d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe, déjà abordée au cours des débats sur la reconnaissance du couple, apparaît ainsi dans le prolongement de celui-ci, comme l’étape suivante et quasi ultime de la lutte contre les discriminations juridiques. En outre, elle traduit la demande de mères lesbiennes, toujours plus nombreuses, qui revendiquent un statut légal pour le « co-parent » de l’enfant, à savoir la partenaire de la mère biologique.

1.2. LES TRANSFORMATIONS DE LA FAMILLE CONTEMPORAINE

16Les réflexions sur l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels s’insèrent aussi dans le cadre plus large des transformations importantes que connaît la famille contemporaine depuis les années 1970 et qui conduisent à une remise en question profonde du mariage et de la famille, tant dans leurs structures, que dans leurs fonctions  [17]. En effet, la famille traditionnelle, composée d’un père, d’une mère et des enfants, reposant sur l’union maritale hétérosexuelle des parents, a subi une suite de changements menant à l’affaiblissement de sa légitimité et à la déstabilisation de son mode de fonctionnement patriarcal. Face à ce modèle de référence unique, institutionnalisé notamment par le système juridique, apparaît progressivement une pluralité de nouvelles formes familiales. Qu’il s’agisse des familles monoparentales, recomposées ou homoparentales  [18], celles-ci dissocient et interrogent les notions de procréation, d’alliance, de parenté, de cohabitation et de filiation qui semblaient pourtant si intimement liées par l’institution du mariage. Ainsi, on dénombre de plus en plus de couples de lesbiennes qui élèvent des enfants après avoir eu recours à l’insémination avec donneur, cette technique de procréation médicalement assistée étant autorisée et pratiquée en Belgique depuis le début des années 1980.

17De plus, le couple moderne, où doit primer l’amour et le libre choix du conjoint  [19], engendre de nouvelles formes de relations sentimentales et sexuelles  [20], pouvant se réaliser par d’autres voies que le mariage. Dans cette optique, la loi instaurant la cohabitation légale a visé à répondre à la demande des couples de concubins, dont le nombre ne cesse d’augmenter, qui désirent bénéficier d’une certaine reconnaissance et protection légale, mais sans passer par le mariage.

18Devant la diversité et la complexité de ces nouvelles situations familiales et conjugales, le système législatif apparaît de plus en plus inadapté aux besoins et problèmes spécifiques rencontrés par un nombre grandissant de citoyens et pour lesquels les réponses juridiques et sociales en place se révèlent souvent désuètes ou insuffisantes. La question de la parenté des gays et lesbiennes s’inscrit ainsi dans cette évolution. En outre, se pose la question de la « parenté sociale », qui vise à renforcer le rôle d’une tierce personne à l’égard de l’enfant, voire à créer un statut particulier pour le « deuxième parent », dans le cadre d’une famille recomposée ou d’un couple de même sexe.

1.3. LA RÉFORME DE L’ADOPTION

19La possibilité d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe est apparue également fin 2001 à l’occasion de la réforme de la loi générale sur l’adoption  [21]. Celle-ci fait partie des premières révisions du droit de la famille. La Belgique accusait sur cette matière un retard important quant à la transposition en droit interne de la Convention de La Haye  [22]. Établie en 1993 et signée par une soixantaine d’États, cette convention vise à réglementer les relations de coopération dans le domaine de l’adoption internationale, à la fois en augmentant les contrôles et en harmonisant les pratiques et normes juridiques entre les différents pays. Son objectif est de garantir le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, ainsi que d’empêcher la traite ou l’enlèvement d’enfants  [23]. Par ailleurs, le législateur profite de cette révision majeure de l’institution de l’adoption pour, d’une part, l’actualiser en simplifiant certaines procédures et, d’autre part, l’adapter davantage à la réalité sociale, en tenant compte des nouvelles formes de vie familiales et conjugales  [24]. Il s’agit ainsi d’élargir l’adoption aux couples cohabitants non mariés, dont le nombre ne cesse de croître et qui aspirent à profiter des mêmes droits que les couples mariés.

20Le 16 novembre 2001, les députées Kristien Grauwels (Agalev), Zoé Genot (Écolo) et Magda de Meyer (SP.A) déposent un amendement qui prévoit à la fois de permettre aux couples homosexuels d’adopter ensemble mais aussi de donner la possibilité à une personne d’adopter l’enfant de son partenaire de même sexe  [25]. Ce texte est écarté afin de ne pas retarder le traitement du dossier en cours et d’être réexaminé ultérieurement dans le cadre de l’élaboration d’une loi distincte.

21La loi réformant l’adoption est promulguée le 24 avril 2003  [26] et entre en vigueur le 1er septembre 2005. Elle ouvre, dès lors, l’accès à l’adoption aux personnes célibataires et aux couples, mariés ou cohabitants, de sexe différent. Le législateur introduit de ce fait une limitation explicite par rapport à l’orientation sexuelle des adoptants, qui n’existait pas auparavant. C’est en réaction à ce nouveau texte législatif que seront élaborées les propositions de loi visant à ouvrir l’adoption aux personnes homosexuelles.

1.4. AU NIVEAU INTERNATIONAL

22Au cours des années 1990, plusieurs lois en faveur de la parentalité gaye et lesbienne sont votées dans un nombre important de pays  [27]. Ainsi, les Pays-Bas ouvrent le mariage et l’adoption nationale aux couples homosexuels le 1er avril 2001  [28], suivis de la Grande-Bretagne qui approuve, en novembre 2002, la loi permettant à un couple de même sexe d’adopter conjointement un enfant. Son entrée en vigueur n’a toutefois lieu que trois ans plus tard, le 30 décembre 2005. En outre, le 1er février 2003, l’adoption à la fois interne et internationale  [29] devient légale en Suède pour les couples de même sexe en partenariat officiel. Certains pays, comme le Danemark, l’Islande ou la Norvège, autorisent par ailleurs une personne à adopter l’enfant du partenaire de même sexe, à la condition que l’autre parent de l’enfant accepte d’abandonner ses droits parentaux. On note également quelques avancées législatives dans certains pays, tels que l’Allemagne, l’Afrique du Sud  [30] ou les États-Unis, mais ces mesures restent toutefois assez restreintes.

23Durant l’année 2005, deux changements législatifs importants concernant les homosexuels ont lieu à l’étranger.. Ainsi, en Espagne, la majorité socialiste du gouvernement Zapatero propose d’ouvrir à la fois le mariage et l’adoption aux personnes de même sexe. Ce projet déclenche de fortes résistances au sein de l’opposition. Il provoque également la désapprobation de l’Église catholique, qui soutient, avec le Parti populaire, une grande manifestation organisée par les milieux conservateurs le 18 juin à Madrid, rassemblant des dizaines de milliers personnes. Néanmoins, la loi sera adoptée le 30 juin.

24Deux jours auparavant, le 28 juin 2005, la Chambre des communes du Canada approuvait un projet de la loi autorisant le mariage des couples homosexuels. Quant à l’adoption, matière relevant des pouvoirs provinciaux, elle était déjà permise au sein de plusieurs provinces canadiennes  [31]. Ces deux événements surviennent quelques jours à peine avant le vote sur les amendements de la proposition de loi belge  [32].

2. VERS UNE LOI AUTORISANT L’ADOPTION PAR DES COUPLES DE MÊME SEXE ?

25La coalition VLD–PS–MR-SP.A-Spirit, constituée après les élections législatives de juin 2003, inscrit la « lutte contre les discriminations fondées sur l’orientation sexuelles » dans son accord de gouvernement  [33]. L’accord prévoit aussi la création d’une sous-commission du Droit de la famille au sein de la commission de la Justice de la Chambre et la tenue d’État généraux de la famille  [34].

2.1. LA CRÉATION DE LA SOUS - COMMISSION DU DROIT DE LA FAMILLE

26La sous-commission du Droit de la famille, créée à la Chambre en vertu de l’accord de gouvernement, doit aborder les questions relatives aux nouvelles formes de relation de couples et présenter, entre autres, « des solutions pour le droit de co-parenté, l’adoption par les couples de même sexe  [35] », ainsi qu’une meilleure répartition de l’autorité parentale et une possibilité de reconnaissance pour les beaux-parents. L’objectif assigné à la sous-commission, présidée par Guy Swennen (SP.A), est d’accélérer le traitement des nombreux dossiers de la commission de la Justice touchant aux matières de droit familial, en les examinant au préalable avec un nombre restreint de parlementaires  [36]. À son agenda figurent également le statut des mères porteuses, l’introduction d’un divorce sans faute, une révision du droit de la filiation et du nom patronymique, la fertilisation in vitro, une meilleure définition des droits et des devoirs dans le cadre des contrats de vie commune et du mariage, etc. Ce vaste programme, aux questions délicates et complexes, reflète les mutations profondes que connaissent les familles contemporaines et les nouveaux problèmes qui y sont liés.

27C’est dans le cadre de cette sous-commission que seront examinées plusieurs propositions de loi visant à créer un statut de « parenté sociale » ou, pour le moins, à accorder certains droits et devoirs d’une personne à l’égard de l’enfant de son partenaire avec qui elle partage la vie quotidienne. La volonté de légiférer sur cette question était déjà présente depuis le début de l’année 2000, mais le traitement parlementaire du dossier est accéléré suite, notamment, à un arrêt rendu par la Cour d’arbitrage sur le cas d’un enfant élevé par un couple de lesbiennes et qui, après séparation du couple, ne possède plus de lien légal avec sa deuxième mère  [37]. Dans cet arrêt, la Cour estime que l’enfant fait l’objet d’un traitement injuste et elle demande au législateur de définir un cadre légal pour ce type de relation.

28Au cours de l’année 2004, cinq propositions de loi concernant l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe sont déposées à la Chambre, par les partis suivants : le S.PA (7 janvier 2004), le VLD (8 janvier 2004), Spirit (8 janvier 2004), Écolo (30 mars 2004) et finalement le PS (le 19 mai 2004). Elles seront également renvoyées à cette sous-commission (cf. infra).

2.2. LES ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA FAMILLE

29L’accord de gouvernement prévoit également la tenue d’États généraux des familles destinés à « évaluer les politiques menées vis-à-vis des familles de manière transversale et participative [et à définir], en concertation avec les acteurs de terrain, les objectifs prioritaires à rencontrer dans le cadre des compétences [du gouvernement] pour mieux soutenir les familles, notamment à travers de nouvelles interventions sociales et des incitants fiscaux ». Ceux-ci sont organisés dès novembre 2003 par Isabelle Simonis (PS), secrétaire d’État aux Familles et aux Personnes handicapées, et se déroulent en parallèle avec les réunions de la sous-commission Droit de la famille à la Chambre. Les États généraux anticipent et accompagnent les dossiers soumis au Parlement grâce aux recommandations émises par les participants, ces derniers étant pour la plupart des acteurs associatifs ou des personnalités scientifiques, spécialisés ou concernés par l’un ou l’autre domaine discutés au sein des cinq ateliers  [38].

30Ainsi, le groupe Droit civil et judiciaire, chargé entre autres des questions relatives à la parenté sociale et à l’autorité parentale, se prononce en faveur de l’ouverture de l’adoption aux personnes de même sexe  [39]. Il estime en effet que, d’une part, l’adoption « ne crée aucune situation sociale nouvelle par rapport aux autres possibilités d’accueil d’un enfant au sein de la famille » et, d’autre part, qu’elle « permet de s’attaquer à la discrimination existante à l’égard des homosexuels  [40] ». En outre, aucun obstacle juridique ne s’oppose à l’introduction de cette possibilité. Une réserve est toutefois émise par rapport à l’adoption internationale, celle-ci dépendant des accords bilatéraux établis avec les pays d’origine.

31Les seconds États généraux des familles, dirigés par Gisèle Mandaila (MR)  [41], secrétaire d’État aux Famille et aux Personnes handicapées, à partir de mars 2005, ne reviendront cependant plus sur la question de l’adoption car celle-ci semble avoir été suffisamment traitée. En outre, le dossier est en cours au Parlement. L’atelier « Droit civil et judiciaire » développera davantage, par contre, les questions liées à la parentalité sociale et à la pluriparentalité, notamment dans le cadre des familles homoparentales.

2.3. LES PROPOSITIONS DE LOI

2.3.1. Concernant l’adoption

32Le 7 janvier 2004, le député Guy Swennen (SP.A) dépose une proposition de loi visant à ouvrir l’adoption aux couples « homosexuels  [42] ». Il se réfère à la multiplicité des formes familiales qui composent la réalité sociale, multiplicité qui « se reflète de plus en plus dans notre législation, comme en témoigne l’ouverture prévue de l’institution du mariage aux partenaires de même sexe ». Sa proposition, très élémentaire, consiste à supprimer la restriction prévue concernant les couples de même sexe dans la nouvelle loi sur l’adoption d’avril 2003, en supprimant les mots « de sexe différent » de l’article 343, § 1er du Code civil. Il s’agit donc de mettre fin à la discrimination présente dans la loi, allant à l’encontre de l’article 11 de la Constitution. En effet, selon le député, « il n’appartient pas au législateur d’exclure de l’adoption une forme déterminée de cohabitation, à savoir celle de deux personnes du même sexe. En effet, aucune raison objective, qu’il s’agisse de l’intérêt de l’enfant ou de celui des candidats adoptants, ne justifie cette exclusion  [43]. »

33Les quatre propositions de loi suivantes prévoient des mesures supplémentaires qui insistent davantage sur l’« intérêt de l’enfant » et mentionnent les études réalisées auprès d’enfants élevés par deux personnes de même sexe. Ainsi, une proposition de loi émanant de députés appartenant au VLD met surtout en avant l’insécurité sociale et juridique dans laquelle vivent les enfants élevés par deux personnes de même sexe, mais dont une seule est reconnue comme parent légal de l’enfant. Le texte propose de protéger cette relation par la voie de l’adoption, celle-ci constituant « la solution la plus complète et la plus cohérente sur le plan juridique pour les couples homosexuels et leurs enfants  [44] ». En outre, elle propose aux adoptants de choisir le nom de l’un d’entre eux ou le nom composé des deux dans l’ordre désiré.

34Une troisième proposition de loi, déposée par des députés appartenant à la composante Spirit du groupe SP.A-Spirit  [45], vise davantage à préciser les conditions d’âge des adoptants, c’est-à-dire qu’ils soient majeurs et que l’un des partenaires, dans le cas d’un couple adoptant conjointement, ait au moins quinze ans de plus que l’adopté. Cette proposition, contrairement à celle du VLD, introduit également la possibilité de permettre l’adoption internationale aux couples de même sexe.

tableau im1
Proposition Adaptation Limitation à de loi Adaptation art. 343, § art. 344 du Conditions d'âge l'adoption Attribution du nom (Chambre) 1ed du Code civil Code civil interne Doc. parl. 51- Dans a), les mots « de 664 sexe différent » sont à G. Swennen chaque fois supprimés. (SP.A) Dans b) aussi. Doc. parl. 51- Dans a), les mots « de Ajout d'un - Introduction d'un 666 sexe différent » sont nouvel art. 356 nouvel art. 353-4 M. Taelman, chaque fois supprimés. et limitation à - Modification de M. De Blocke Dans b) aussi. l'adoption 353-5 ; (VLD) interne. - Modification de 3l'article.356-2. Doc. parl. Dans a), les mots « de Modification de 51-667 sexe différent » sont l'art. 345, alinéa 1er : E. Van Weert, chaque fois supprimés. -18 ans (au lieu de A. Storms et Dans b) aussi. 25) ; S. Bex (Spirit) - au moins un des adoptants doit avoir 15 ans de plus que l'adopté (au lieu des deux). Doc. parl. Dans a), les mots « de Ajout d'un - Modification de l’art. 51-980 sexe différent » sont art. 344-3.353-1. Z. Genot chaque fois supprimés. - Remplacement de (Écolo) Dans b) aussi. l’art. 356-2. Doc. parl. Dans a), les mots « de Ajout d'un - Remplacement de 51-1144 sexe différent » sont art. 344-3. l’art. 353-1 ; V. Déom, chaque fois supprimés. - Remplacement de K. Lalieux, e.a Dans b) aussi. l’art. 365-2. (PS).

35Écolo est le premier groupe francophone à déposer une proposition de loi en faveur de l’ouverture de l’adoption. Celle-ci précise en outre qu’« elle permet aussi à la personne qui est mariée ou qui cohabite (…) avec une autre personne d’adopter l’enfant de son conjoint ou de son partenaire, que son partenaire soit ou non du même sexe  [46] ». Rappelons qu’en 2003 Écolo avait déposé un premier texte par lequel il proposait d’élaborer un nouveau mode de reconnaissance de filiation pour le partenaire du parent légal de l’enfant et d’assortir ce statut de certains droits et obligations  [47]. Cette alternative à l’adoption sera toutefois retirée au cours des travaux de la commission de la Justice, n’ayant en effet plus lieu d’être après le dépôt de la proposition de loi concernant l’adoption.

36La dernière proposition, déposée par des parlementaires PS, rappelle les éléments déjà évoqués mais inscrit explicitement l’adoption dans la continuité de l’ouverture du mariage. Elle insiste également sur la nécessité « de répondre à un réel besoin social et d’écarter l’hypocrisie de la loi actuelle qui autorise une femme seule à adopter, qui peut donc très bien être lesbienne, mais n’autorise pas l’adoption par cette même femme avec sa partenaire  [48] ».

2.3.2. Concernant la parenté sociale

37L’idée de créer un statut de parenté sociale  [49] n’est pas neuve en Belgique et elle apparaît déjà dans les discussions entre cabinets ministériels au début de l’année 2000. Elle fait ainsi l’objet d’une première proposition de loi dès janvier 2001, introduite par Els Van Weert et Karel Van Hoorebeke (VU&ID)  [50], suivie d’une autre venant de Kristien Grauwels (Agalev)  [51]. Elles visent toutes les deux à étendre l’exercice de l’autorité parentale à une tierce personne, lorsque l’un des parents légaux est seul à s’occuper de l’enfant. Entre-temps, le groupe CD&V dépose une proposition de loi portant pour la première fois le titre de « parenté sociale  [52] ». Celle-ci a pour spécificité d’élargir l’autorité parentale et d’accorder certains droits parentaux à la personne qui s’occupe de l’enfant comme le fait un parent ou à la place de celui-ci. Il peut s’agir du nouveau partenaire du parent ou d’un proche parent, comme par exemple le grand-parent de l’enfant. Sous le gouvernement violet, cette proposition est réintroduite par le CD&V  [53] et s’accompagne du dépôt d’une nouvelle proposition par la N-VA  [54]. Zoé Genot présente, quant à elle, une proposition de loi concernant « la reconnaissance de la filiation  [55] » envers un « deuxième parent » n’ayant pas de lien biologique avec l’enfant. Contrairement aux autres propositions de loi, cette dernière, en instaurant un lien de filiation, met les deux partenaires sur pied d’égalité.

2.4. LES TRAVAUX DE LA SOUS - COMMISSION DU DROIT DE LA FAMILLE

38Vu l’agenda très chargé, le traitement législatif du dossier relatif à l’adoption ne débute qu’en mars 2005. Il est lié à celui relatif à la « parenté sociale ». Les deux approches tentent de régler le statut juridique de certains adultes à l’égard des enfants qu’ils élèvent et auprès desquels ils s’investissent, mais qui n’existent pas aux yeux de la loi. Plusieurs propositions de loi visent ainsi à attribuer certains droits à ces personnes, voire à créer un nouveau statut juridique pour encadrer la relation entre cet adulte et l’enfant (cf. supra). La sous-commission étant divisée sur la question de savoir quel dossier doit être traité en priorité ou si les deux doivent être examinés conjointement, une série d’auditions sont organisées afin d’éclairer la situation sur ces sujets particulièrement délicats. La première réunion, le 9 mars 2005 (à huis clos), est suivie de trois autres réunions d’auditions les 16 et 23 mars, et le 13 avril, ainsi que d’une séance de bilan, le 20 avril 2005.

2.4.1. Les auditions

39La première session (16 mars 2005) est d’abord consacrée à l’audition de Patricia Baetens, psychologue attachée au Centre de médecine reproductive de l’AZ-VUB, et du professeur Paul Devroey, directeur du même établissement. Tous deux vont s’exprimer principalement par rapport aux couples de lesbiennes ayant recours à l’insémination avec donneur et au développement des enfants élevés dans ces familles. Ils s’appuient notamment sur des recherches menées au sein de leur institution mais se référent également aux résultats mis en évidence par d’autres études. Ainsi, la première intervenante a d’abord rappelé l’importance « pour le bien-être de l’enfant, qu’il soit convenablement informé de sa propre histoire  [56] », ce qui apparaît quasiment inévitable dans le cas de parents de même sexe. Elle a également démenti une série d’objections allant à l’encontre de la parentalité homosexuelle. Selon les études menées, les mères lesbiennes sont tout aussi aptes et compétentes à éduquer leur enfant que les mères hétérosexuelles. Les résultats montrent, entre autres, que les enfants élevés par un couple de femmes homosexuelles ne présentent aucune différence significative par rapport à ceux issus de familles hétérosexuelles, que ce soit aux niveaux psychologique, émotionnel ou comportemental. Ces enfants ne présentent pas non plus de troubles quant à leur identité de genre ou à leur orientation sexuelle et n’ont donc pas une plus grande propension à devenir homosexuels. Il demeure cependant que ceux-ci risquent de subir davantage les brimades de leurs camarades en raison de leur situation non « conventionnelle ». L’intervenante se dit donc favorable à l’adoption par des personnes de même sexe, estimant notamment qu’« un parent homosexuel a le potentiel pour être un bon parent, une qualité qui dépend d’autres facteurs que la préférence sexuelle  [57] ». Le professeur Devroey, quant à lui, explique d’abord pourquoi son centre, depuis le début des années 1980, a accepté de répondre aux demandes d’insémination artificielle venant de couples de lesbiennes, en allant au-delà des préjugés et ne considérant pas l’homosexualité comme un critère d’exclusion. Le Centre de l’AZ-VUB, rien qu’à lui seul, pratique cinq cents inséminations avec donneur chaque année pour des lesbiennes et en a réalisé plus de vingt mille au cours des vingt dernières années. Après avoir confirmé les propos de Patricia Baetens, il souligne l’importance du suivi psychologique et le rôle particulier joué par la mère sociale dans la vie de l’enfant. Il estime que « les demandes des couples de lesbiennes sont peu problématiques, contrairement aux demandes émanant de femmes célibataires  [58] ». L’orateur ne voit aucune objection à l’adoption par des personnes homosexuelles mais émet toutefois une réserve quant à la maternité de substitution  [59], liée indirectement à ces questions.

40Lors de la deuxième séance  [60], les représentants de plusieurs associations gayes et lesbiennes sont entendus afin de présenter leurs arguments respectifs en faveur de l’ouverture de l’adoption. Il s’agit de Paul Borghs pour la Holebifederatie, de Benoît Vanparijs pour la Fédération des associations gayes et lesbiennes (FAGL), des représentants de la Homoliga et de l’association Homoparentalité. Les intervenants exposent les différents arguments justifiant l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. Se recoupant sur de nombreux points, ils insistent avant tout sur la nécessité de partir de « situations humaines existantes » et de permettre à tout enfant de bénéficier de la protection légale la plus complète possible. En effet, « un véritable régime de parentalité “holebi” – qui passe, en premier lieu, par l’accès à l’adoption – donnera à l’enfant la certitude d’être entouré de deux parents à part entière, ayant des droits et des devoirs, et l’intégrera dans deux structures familiales. Cela servira sans nul doute l’intérêt de l’enfant  [61] ».

41Enfin, il est apparu indispensable de disposer d’une expertise juridique en la matière, à la fois pour évaluer les modifications techniques à apporter au Code civil, si l’une ou l’autre proposition de loi était éventuellement adoptée, ainsi que pour examiner plus globalement les deux dossiers à l’aune du droit de la famille. Pour ce faire, cinq juristes spécialisés dans ce domaine ont été invités à analyser les propositions de loi relatives à la parentalité sociale et à l’adoption. Ils rendront un avis sur celles-ci le 13 avril 2005.

42Le professeur Frederik Swennen, de l’Université d’Anvers (UA), a successivement examiné les avantages, les incohérences et les lacunes de chacune des propositions de loi à l’étude au vu des trois voies juridiques permettant d’établir la filiation d’un enfant, à savoir les filiations biologique, adoptive et dérivée. Pour l’orateur, la solution de la parentalité sociale pose des problèmes à différents égards, notamment du fait que ses effets prennent fin à la majorité de l’enfant et qu’elle risque de s’avérer plus discriminante que l’adoption pour l’enfant dont l’un des parents aura ce statut particulier. En outre, il estime que s’il s’agit de régler la situation d’un « beau-parent » ou « parent social » qui s’ajoute ultérieurement au parent légal, l’adoption simple constitue une voie juridique existante et satisfaisante à privilégier à la création d’une institution. Les limites de la parentalité sociale sont également contestables, étant donné que certaines propositions de loi étendent son application à d’autres membres de la famille, voire à des amis, ce que l’intervenant réprouve. En ce qui concerne l’adoption, il considère que « l’exclusion de [celle-ci] par ou au sein de couples homosexuels est discriminatoire et qu’il convient d’y mettre un terme  [62] ». Avant de terminer, il revient également sur l’analyse juridique de la parenté sociale et l’adoption, faite par Jean-Louis Renchon dans un article publié en février 2005  [63], et dont il réfute plusieurs éléments. Il conclut, au terme de son analyse, que la voie juridique la plus adaptée réside dans l’adoption plénière, en supprimant la limite de son accès aux couples de sexe différent  [64]. Par ailleurs, l’adoption et la parentalité sociale constituent, selon lui, des voies juridiques à traiter de façon distincte en donnant la priorité à la première, étant donné qu’elle ne nécessite que très peu de modifications techniques, au contraire de la seconde qui mériterait de plus amples réflexions.

43Après cet exposé, l’avocate Ria Convents  [65] prend la parole pour insister sur l’importance pour un enfant de voir ses deux parents reconnus légalement, en accordant une place spécifique au partenaire du parent officiel de l’enfant. En outre, elle considère que la parentalité réside surtout dans l’apprentissage de certaines valeurs au cours de l’éducation de l’enfant et qu’il n’y a aucune raison que les couples homosexuels n’en soient pas capables. Enfin, « défendant le principe d’égalité des droits pour tout citoyen », elle estime que « rien ne justifie le fait de ne pas accorder les mêmes droits aux couples homosexuels qu’aux hétérosexuels  [66] ».

44Vient ensuite l’audition de Christoph Castelein, assistant et chercheur en droit à la KULeuven. Après avoir montré que la plupart des institutions juridiques existantes relatives à la coparentalité des enfants (tutelle, cohabitation légale, droit aux relations personnelles, etc.) sont actuellement inaptes à répondre aux situations concernant un enfant élevé par un couple de même sexe, l’intervenant explique qu’il importe avant tout de déterminer ce que le législateur veut atteindre concernant les droits à attribuer au partenaire du parent vis-à-vis de l’enfant de celui-ci  [67]. S’il s’agit de partager l’autorité parentale entre les deux conjoints afin que le partenaire puisse intervenir dans les tâches quotidiennes, alors la parentalité sociale suffirait car elle n’est pas liée à la filiation. Celle-ci n’aurait toutefois qu’une durée limitée. La parentalité sociale serait par ailleurs également ouverte aux couples hétérosexuels et bénéficierait aux familles recomposées. Si, par contre, la volonté est d’étendre les droits au-delà de l’autorité parentale et d’intégrer les matières liées à la filiation, telles que les droits de succession, l’orateur préconise alors la voie de l’adoption permettant de répondre correctement à la demande, en établissant un lien de filiation avec l’enfant et en lui attribuant l’entièreté des effets associés à celui-ci. Il estime par ailleurs que « l’argument selon lequel l’adoption par des partenaires de même sexe s’écarterait de manière excessive de la réalité biologique présumée s’oppose à l’adoption en tant que telle. En effet, toute adoption déroge fondamentalement à la réalité biologique  [68]. » Il attire également l’attention sur la terminologie utilisée et la nécessité de préserver une certaine cohérence juridique dans les décisions. De son point de vue, « il serait préférable de retenir [les] deux options : la parenté sociale et l’adoption. Il serait, à cet égard, souhaitable de créer, comme aux Pays-Bas, un “arsenal législatif complet”, qui règlerait à la fois le mariage homosexuel, l’adoption homosexuelle et la parenté sociale  [69]. »

45Le professeur Jean-Louis Renchon (UCL) est ensuite entendu. Il rappelle tout d’abord que le débat au Parlement doit se cantonner à l’examen du choix d’une solution juridique – entre la parenté sociale et l’adoption – pour protéger correctement les enfants élevés par deux personnes de même sexe et non de se prononcer en faveur ou pas de ces situations. « La question qui se pose est celle du statut, par rapport à l’enfant, qui peut être attribué au partenaire homosexuel de son parent biologique  [70]. » À cet effet, l’orateur refuse la solution de l’adoption, qui entraînerait l’établissement d’un lien de filiation de l’enfant à l’égard de deux personnes de même sexe. La filiation déterminant l’identité de l’enfant, cela pourrait avoir, selon lui, des effets néfastes sur celui-ci. Il estime, en outre, que l’adoption « impose à l’enfant un statut juridique qui est en contradiction avec la perception que l’enfant a de la réalité et inclinerait celui-ci à penser qu’il est le fruit de l’union de deux êtres du même sexe  [71] ». Pour ces raisons, il préconise plutôt la création d’un statut de parentalité sociale. Celle-ci, « sans que l’on touche à la filiation proprement dite de l’enfant, permettrait d’accorder, en tout ou en partie, les implications du lien de filiation juridique à une personne qui agit comme parent ou qui assume la parentalité sociale  [72] ».

46Enfin, le professeur Olivier De Schutter (UCL) clôture les auditions. Il rejoint la position du professeur Frederik Swennen en tant que fervent partisan de la proposition de loi relative à l’adoption. Il estime que des solutions alternatives à l’adoption, présentant les mêmes droits mais sous un autre nom, ne sont pas souhaitables. Après avoir parcouru les différents arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme sous l’angle de la discrimination, il constate « une augmentation progressive des exigences de non-discrimination sur la base de l’orientation sexuelle  [73] ».

2.4.2. Bilan provisoire

47À l’issue de ces auditions, les avis rendus par les différents spécialistes, à l’exception de Jean-Louis Renchon, apparaissent globalement en faveur de l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. Celle-ci semble constituer la solution la plus adéquate pour reconnaître et réglementer le lien existant entre un enfant et le ou la partenaire de même sexe de son parent légal. Toutefois, les membres de la sous-commission ne parviennent pas à trouver un consensus sur le fait de traiter de manière conjointe ou séparément les propositions relatives à l’adoption et la parentalité sociale. Pour le CDH et le CD&V  [74], la parentalité sociale apparaît en effet plus urgente à traiter car elle concerne un nombre plus important de situations. Cependant, les partis en faveur de l’adoption veulent donner la priorité à celle-ci, étant donné qu’elle est très simple à régler d’un point de vue juridique et présente les meilleures garanties de protection de l’enfant. Les deux dossiers sont finalement renvoyés ensemble en commission de la Justice de la Chambre, laissant à celle-ci le soin de délibérer en la matière.

48En bref, à ce stade du dossier, les partisans de l’ouverture de l’adoption sont le PS, le VLD, le SP.A, Écolo et le député Philippe Monfils pour le MR. L’argumentation déployée par les défenseurs de la proposition de loi repose donc principalement sur deux axes. D’une part, il s’agit, dans la continuité de l’ouverture au mariage, de supprimer une discrimination de la loi sur l’adoption  [75]. Ainsi, la loi du 24 avril 2003 apparaît « hypocrite » aux yeux des partisans de l’adoption, étant donné qu’elle permet à des personnes seules, homosexuelles ou non, d’être candidates à l’adoption, mais refuse à des couples de même sexe d’adopter conjointement. Cet argument peut être considéré comme le volet plus « symbolique » des différentes propositions de loi, étant donné qu’il concerne les enfants à adopter dans l’avenir et que ces demandes auraient très peu de chances de se concrétiser si la loi était acceptée. En effet, dans ce cas, les couples homosexuels pourraient difficilement adopter un enfant à l’étranger, vu les critères émis par les pays d’origine, mais aussi en Belgique, en raison du peu d’enfants mis en adoption.

49D’autre part, l’accent est mis sur l’intérêt de l’enfant. Il devient de plus en plus nécessaire d’assurer la protection légale des enfants élevés dans des familles composées de deux personnes de même sexe, dont une seule est reconnue légalement en tant que parent, à savoir celle qui possède un lien biologique  [76] ou un lien adoptif avec l’enfant  [77]. Il s’agit donc de reconnaître un statut juridique à ce « deuxième parent », afin de le doter de certains droits et obligations à l’égard de l’enfant, mais aussi et surtout, pour préserver la relation qu’il entretient avec ce dernier en cas de séparation des partenaires ou du décès du parent légal. Cet aspect des propositions de loi, davantage « pratique », vise à réglementer des situations de fait et concernerait environ 90 % des cas considérés  [78]. Ces situations pourraient être réglées soit par l’adoption, soit par une forme de parenté sociale à créer.

2.4.3. Du côté de la société civile

50Durant cette période, le projet d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe suscite peu de réactions, tant auprès du grand public que de la part des groupes associatifs et religieux. Le débat politique semble se dérouler dans une certaine indifférence. Les prises de position publiques sont rares et modérées. Les médias ne donnent qu’un faible écho de l’avancée du dossier. La Belgian Lesbian and Gay Pride, organisée le 7 mai 2005, attire toutefois l’attention sur l’importance de la famille et de « faire famille » pour les personnes homosexuelles en inscrivant ce thème au centre de la plateforme des revendications de 2005. La parade est ainsi ouverte par plusieurs couples homosexuels et leur(s) enfant(s) sous le slogan It’s a family affair ! Il s’agit également d’une manière de contrecarrer l’image parfois caricaturale des homosexuels reflétée par les médias lors de ce type d’événement. Le 3 mai 2005, l’agence de presse Cathobel annonce la cérémonie religieuse organisée le jour de la Gay Pride par des associations homosexuelles chrétiennes. Peu après la direction de l’agence rectifie la dépêche parue le 3 mai 2005, s’excusant pour le « dérapage rédactionnel » qui aurait pu être interprété, à tort, comme un soutien aux revendications des associations. Le rectificatif précise que l’organisation d’une célébration religieuse le jour de la Gay Pride « n’implique en rien une approbation de revendications politiques mettant à mal les assises sociales de la famille que l’Église catholique promeut et défend ».

51Par la suite une déclaration des évêques de Belgique annonce l’opposition de l’Église à l’encontre de la proposition de loi ouvrant l’adoption aux homosexuels, « perspective qui [les] préoccupe profondément ». Les évêques estiment que « dans le contexte actuel, une telle mesure accrédite davantage l’idée que les couples homosexuels sont une simple variante par rapport au couple formé d’un homme et d’une femme », ce qui, à leurs yeux, « augmenterait encore la confusion par rapport à la différence sexuelle qui est le repère fondateur de la famille  [79] ». Cette déclaration reste toutefois isolée.

2.5. LES TRAVAUX EN COMMISSION DE LA JUSTICE

52Lorsque, le 30 mai 2005, la proposition de loi arrive en commission de la Justice, les discussions reprennent en présence des médias et face à un public plus nombreux. Le débat prend alors une tournure nouvelle et devient soudainement plus polémique. Les positions se radicalisent et les adversaires à l’ouverture de l’adoption freinent l’avancement du dossier. Lors de la première séance, les membres décident d’abord d’écarter les propositions relatives à la « parenté sociale » et de ne plus travailler qu’à partir du premier texte sur l’adoption déposé par le député Swennen  [80].

2.5.1. Manœuvres dilatoires

53Alors que jusque là une majorité de parlementaires semblent être favorables à l’ouverture de l’adoption de même sexe, le débat prend une tournure inattendue, suite aux propos controversés de Didier Reynders lors d’un entretien accordé à La Libre Belgique le 7 juin 2005. Le président du MR, aussi vice-Premier ministre, estime en effet, évoquant l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels, « que le débat n’est pas mûr », « qu’il serait opportun d’entendre un peu plus la société civile sur la question » et « surtout, qu’il faut éviter de se précipiter  [81] ». Cette déclaration, à la une du journal et relayée par de nombreux médias, fait mouche auprès des parlementaires et de l’opinion publique, d’autant plus qu’elle survient quelques heures à peine avant une réunion critique de la commission de la Justice, destinée à discuter, et éventuellement voter, la proposition de loi. Ainsi, bien que le chef de file du MR affirme ne pas faire prévaloir de logique de parti sur les questions éthiques, ses propos se reflètent rapidement dans les discours tenus en commission par plusieurs députés de son groupe politique. Ceux-ci n’hésitent pas à reprendre ses arguments pour, d’une part, s’indigner que le dossier soit traité avec trop d’empressement et, d’autre part, manifester un regain d’intérêt soudain à l’égard de l’opinion publique. Suscitant une certaine polémique, Charles Michel (MR) déclare ainsi que « contrairement à ce que certains tentent de faire croire, il n’y a pas, en la matière, d’urgence, et il n’est donc nullement nécessaire de précipiter les discussions et de prendre une décision hâtive, qui ne ferait qu’accroître le fossé entre la population et le Parlement  [82] ». Ces réactions sont d’autant plus étonnantes qu’elles émanent d’un groupe de la majorité gouvernementale.

54L’intervention soudaine de Didier Reynders est donc mal accueillie du côté des partisans de l’adoption qui, outre le fait de contester cette présentation des choses, y soupçonnent une stratégie politique visant à retarder l’avancée du dossier, voire à le faire péricliter. Ceux-ci craignent en effet les conséquences fâcheuses qu’entraîne ce type de propos émanant d’un personnage politique influent. Cela risque notamment de semer le doute auprès des citoyens sur les intentions des défenseurs de l’adoption, comme lorsqu’on entend Alain Courtois (MR) dire, qu’au départ, il n’était pas opposé à l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels « mais la célérité déployée par d’aucuns pour traiter cette proposition de loi au Parlement sans se soucier de ses éventuelles conséquences néfastes, l’a fait changer d’avis  [83] ». Il est vrai que, lors des auditions en sous-commission Famille, plusieurs juristes  [84] avaient conseillé qu’en cas d’acceptation de la proposition de loi, il serait opportun que celle-ci entre en vigueur en même temps que la nouvelle loi sur l’adoption prévue pour le 1er septembre mais cette suggestion apparaît rapidement irréalisable vu la tournure que prend le débat.

55Invoquant, parfois abusivement  [85], l’avis d’une « société civile » souvent peu et mal informée sur la portée et les enjeux de la proposition de loi, certains opposants, à l’instar de Jean-Pierre Malmendier (MR), refusent l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels ou tentent d’en reporter la décision. Le député demande ainsi à la commission, puisque « les us et coutumes changent dans le temps », « d’attendre que la société et les esprits soient suffisamment mûrs pour traiter cette problématique  [86] ». Selon lui, ce n’est pas encore le cas. À l’inverse, des députés comme Karine Lalieux (PS) estiment que « l’opinion publique ne semble certes pas mûre. Mais l’un des rôles des hommes politiques est précisément de dépasser ces a priori et d’expliquer les raisons de leurs choix, surtout si ceux-ci se basent sur de nombreuses études scientifiques. » André Perpète (PS) souligne également l’importance du « travail pédagogique » à effectuer auprès des citoyens qui connaissent peu le dossier en cours et qui, plus largement, ont souvent une vision faussée des homosexuels et de leurs problèmes  [87]. Zoé Genot (Écolo) rappelle enfin que, par rapport « au décalage entre la population et les parlementaires, il ne faut pas sous-estimer les capacités d’évolution de notre société. La loi sur le mariage des personnes homosexuelles est à cet égard tout à fait éclairante : alors que les sondages montraient une forte opposition à ce projet, à peine un an après l’entrée en vigueur de la loi, il semble que la majorité de la population soit désormais favorable à ces unions  [88]. » En outre, « permettre à ces familles, qui existent, de sortir de l’ombre, ne pourra qu’encourager une évolution analogue et faire tomber certains préjugés qui ne sont que le fruit de la méconnaissance de l’autre  [89] ».

56Quant à l’état du débat parlementaire, les partisans de l’adoption insistent sur le fait que le dossier, loin d’avoir été traité « dans l’urgence », est issu d’une longue préparation, la problématique étant déjà en cours depuis 2001. Pour Karine Lalieux (PS), « le travail parlementaire a donc été effectué en prenant le temps nécessaire et il faut désormais prendre une décision claire  [90] ». Par ailleurs, ces tergiversations de dernière minute autour de l’avancée du dossier surprennent Martine Taelman (VLD), qui rappelle que l’année précédente, lors de la réunion dédiée à l’organisation et la planification des travaux de la sous-commission Famille, personne, parmi les représentants des différents partis politiques, n’avait soulevé d’objection concernant le traitement de l’adoption par les couples homosexuels  [91].

57Néanmoins, la déclaration de Didier Reynders a une incidence certaine sur la poursuite des travaux parlementaires. Ainsi, sous prétexte que la discussion serait « précipitée », les députés libéraux Alain Courtois et Charles Michel réclament d’entendre des intervenants supplémentaires sur la question. À leur demande, la journée du 22 juin est consacrée à l’audition de sept experts travaillant dans le domaine de l’adoption, ou sur des questions liées à celle-ci  [92] .

58Ensuite, cette situation, qualifiée « de réelle incertitude » par Charles Michel, donne l’occasion à ce dernier d’invoquer le « principe de précaution  [93] », qui deviendra son mot d’ordre et celui de plusieurs parlementaires libéraux francophones tout au long du débat pour refuser l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. Critiquant cet argument, Philippe Monfils, l’un des rares députés MR favorables à la proposition de loi, déclare que « cette expression est la plus formidable trouvaille linguistique pour dire “non” à un projet. Être soucieux de l’intérêt des enfants, c’est prendre un ensemble de précautions pour que leur adoption (que ce soit par des couples hétérosexuels ou homosexuels) se passe dans les meilleures conditions, et non de ne rien faire et d’attendre. Ce “principe de précaution” avait aussi été invoqué pour refuser l’euthanasie, la recherche sur l’embryon ou sur le mariage des homosexuels. Il est difficile d’accepter que, chaque fois que la société rencontre un problème nouveau, ceux qui tentent de le régler soient accusés de laxisme, et que toute solution soit écartée au nom du principe de précaution  [94]. » Dans la foulée, André Perpète (PS) rappelle aussi que, « si la loi est votée, les procédures actuelles de vérification rigoureuse des conditions d’adoption resteront en vigueur. Le principe de précaution sera donc appliqué au cours de la procédure : s’il est constaté que les adoptants ne répondent pas aux conditions requises, l’adoption n’aura tout simplement pas lieu  [95]. » Le principe de précaution continue néanmoins à être régulièrement mobilisé par les opposants, tout particulièrement à l’encontre des résultats d’études réalisées sur le développement d’enfants issus de familles homoparentales.

59D’autres parlementaires tentent également de freiner régulièrement le débat. Ainsi, Melchior Wathelet (CDH) déclare que « la question de l’adoption par les couples homosexuels ne fait pas aujourd’hui l’objet d’un consensus au sein de la société  [96] » et les députés du Vlaams Belang se plaignent d’une « hâte excessive ». En sous-commission Droit de la famille, le Vlaams Belang avait déjà tenté de prolonger les travaux, en demandant d’entendre l’avis des représentants des différents cultes reconnus. Cette requête avait été jugée irrecevable. En commission de la Justice, le parti réitère sa demande et intervient, en outre, quasiment lors de chaque réunion, pour réclamer l’avis du Conseil d’État sur la question. La demande est refusée à ce stade du dossier  [97].

60Des sénateurs sollicitent également ces motifs pour appeler à une consultation populaire avant de poursuivre le débat, sous prétexte que « l’évolution vers d’autres structures familiales nécessite réflexion. Le sujet central étant l’enfant, c’est-à-dire l’avenir même de notre société, [ils] ne [peuvent] décider de modifier ses racines sans prendre connaissance de l’opinion de la société elle-même  [98]. »

61Lors de la discussion portant sur les modalités d’attribution du patronyme, dernier point à l’examen avant le vote sur les amendements, les députés (MR) tentent à nouveau de repousser le vote, en persévérant à refuser la solution élaborée par les défenseurs de l’adoption, qui est de proposer que les candidats adoptants puissent, par consentement mutuel devant le juge, choisir lequel des deux noms de famille possibles l’enfant portera.

62Les opposants tentent ainsi de prolonger le débat afin de reporter le moment du vote au-delà des vacances parlementaires et de gagner un maximum de temps pour tenter de rallier l’opinion publique et les parlementaires indécis. Ils déposent des amendements qui visent à apporter des solutions alternatives en créant différents statuts de « parenté sociale ». Ces amendements donnent lieu à nouveau à de longues polémiques.

63Même après la rentrée parlementaire, le député MR Olivier Maingain tentera à nouveau, juste avant le vote global sur les amendements, de réamorcer le débat sur l’adoption internationale, maintes fois discutée pourtant, en déposant un dernier amendement visant à restreindre la portée de la proposition de loi à l’adoption interne  [99]. Celui-ci sera toutefois rejeté.

2.5.2. Le premier vote en commission de la Justice

64Le vote sur les articles et sur les amendements a lieu le 12 juillet, à la veille des vacances parlementaires, et débouche sur un résultat serré : 9 votes pour et 8 contre. La proposition de loi, telle qu’amendée par Karine Lalieux et consorts, est adoptée par la commission de la Justice. Le dossier reste temporairement suspendu pour quatre mois en raison du congé parlementaire. Toutefois, à l’extérieur du Parlement, les débats viennent de démarrer et des réactions se font entendre de part et d’autre.

2.5.3. La mobilisation des associations et de l’opinion publique

65La fin du mois de juin 2005 voit le soulèvement soudain, au sein de la société civile, d’une opposition à l’égard de l’adoption par les couples homosexuels. Celle-ci se forme progressivement autour d’un comité conservateur, nommé Action pour la famille  [100], qui se positionne ouvertement contre la proposition, afin de préserver la famille traditionnelle et de permettre à un enfant d’avoir « un papa et une maman ». Grâce à une campagne intensive, notamment via internet, ce groupe encourage les citoyens à voter une pétition pour refuser l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels. Il annonce en outre l’organisation d’une manifestation nationale prévue avant la rentrée parlementaire  [101].

66Face à ces actions, les associations militantes gayes et et lesbiennes se mobilisent durant les mois de juillet et août et, à la suite de plusieurs rencontres, lancent leur propre pétition, accompagnée d’une plateforme explicitant les raisons de soutenir la proposition de loi. Le débat sur l’adoption donne par ailleurs l’occasion à des associations comme Tels Quels et la FAGL de retravailler ensemble à un projet commun malgré certaines tensions entre ces groupes. Notons également que la Holebifederatie, en Flandre, avait déjà mené des actions depuis plusieurs mois (pétitions, etc.).

3. ANALYSE DES ENJEUX

67Avant de poursuivre l’examen du processus parlementaire, on analysera les enjeux de la question de l’adoption tels qu’ils sont perçus et exprimés par les parlementaires lors de la discussion en commission de la Justice de la Chambre. L’analyse portera essentiellement sur la mise en évidence des axes centraux du débat, autour desquels les argumentations des uns et des autres se sont construites et confrontées. Après le développement des principales logiques présentes dans ces discours, les points de rencontre et de divergence entre les protagonistes seront examinés, en tentant de mettre en lumière les incohérences et les limites des argumentations en présence. À cet effet, le rapport de la commission de la Justice servira de référence principale, ainsi que les articles de presse diffusés durant cette période. Toutefois, certains éléments des argumentations développées en séance plénière seront parfois mentionnés, les idées y étant souvent exprimées de manière plus claire et plus globale. En outre, l’accent étant mis délibérément sur les enjeux marquants des discussions, l’analyse ne privilégie pas une approche strictement chronologique, par ailleurs déjà développée ailleurs. Enfin, les différents points de vue et positions seront examinés par thématique plutôt que par parlementaire ou famille politique. Un bilan des positions sera toutefois présenté dans la section traitant du vote en séance plénière de la Chambre.

68Les thèmes suivants seront développés dans cette section : la question de l’intérêt de l’enfant, le développement de l’enfant, l’adoption internationale, la parenté sociale, l’existence d’une discrimination, les liens avec l’ouverture du mariage en 2003.

3.1. L’INTÉRÊT DE L’ENFANT : UNE CATÉGORIE MALLÉABLE

69Si l’on peut qualifier un argument de particulièrement récurrent dans le dossier de l’adoption, c’est incontestablement celui de « l’intérêt de l’enfant ». Traversant les débats, tant au Parlement qu’en dehors de celui-ci, ce concept est sollicité à la fois par les partisans et les adversaires de la proposition de loi, afin de justifier leur point de vue, dans un sens comme dans l’autre, mais sans que la notion ne soit jamais définie. L’« intérêt de l’enfant » apparaît ainsi comme un concept relativement passe-partout, au contenu flou et pour le moins équivoque. Il convient donc d’en restituer les interprétations concurrentes et la manière dont elles se sont succédées dans la discussion.

70À la fin des années 1990, surgissent de nombreuses références à la notion de l’« intérêt de l’enfant ». Celle-ci apparaît notamment dans les revendications de plusieurs associations gayes et lesbiennes, qui mettent en avant la nécessité de protéger les enfants élevés par deux personnes de même sexe mais dont un seul des parents est reconnu par la loi. L’argument s’inscrit également au sein des débats sur la réforme de l’adoption en 2002. En effet, l’élément structurant de la ligne directrice de la Convention de La Haye, sur laquelle la législation belge devait s’aligner, est « l’intérêt supérieur de l’enfant » et celui-ci doit primer tout au long des procédures d’adoption. Dans plusieurs des propositions de loi relatives à l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe  [102] déposées en 2004, cette préoccupation figure d’ailleurs de façon explicite. Ainsi, la proposition du VLD indique qu’« en ce qui concerne l’adoption, il convient toujours de privilégier l’intérêt de l’enfant. À l’heure actuelle, les couples homosexuels ont de plus en plus de possibilités de partager leur vie avec des enfants. Il convient, dès lors, dans l’intérêt de ces enfants, que le législateur crée un climat juridique sûr en leur faveur  [103]. » Ces propositions font également état de résultats d’études scientifiques menées auprès d’enfants élevés par deux personnes homosexuelles, qui montrent qu’un foyer « homoparental » ne semble porter aucunement préjudice au bien-être et au développement de l’enfant. Par conséquent, il n’y a aucune raison objective, selon Guy Swennen, de refuser l’adoption aux couples de même sexe  [104]. Pour les partisans de l’adoption, « le plus important, c’est que l’enfant soit bien considéré par ses parents, qu’ils soient homosexuels ou hétérosexuels. Son intérêt n’est donc pas de ne pouvoir être élevé que dans des couples hétérosexuels  [105] ».

71Toutefois, sous l’impulsion d’actions menées à l’extérieur de l’enceinte parlementaire, le même argument est repris et utilisé ensuite par plusieurs députés pour refuser l’ouverture de l’adoption, afin, selon ces acteurs, de défendre le « droit de l’enfant » et non le « droit à l’enfant ». En d’autres termes, certains intervenants voient l’adoption comme une manière d’assouvir un désir « égoïste » d’adultes voulant devenir parents, plutôt que comme « un moyen de donner une famille à un enfant et non un enfant à une famille  [106] », fonction essentielle de l’adoption. De la même manière, le CDH évoque régulièrement cet argument à l’encontre de la proposition Swennen, qui servirait d’une part à « l’accomplissement personnel de l’adulte dans son désir de parentalité » et d’autre part à « la reconnaissance sociale d’une égalité de valeur et de statut supposée annuler la réalité des différences entre couples homosexuels et hétérosexuels  [107] ».

72Estimant qu’il s’agit d’une « caricature » de leur argumentation, les partisans de l’adoption, à l’instar de Zoé Genot (Écolo), insistent sur le fait qu’il « n’a jamais été question de droit à l’enfant, de discriminations inacceptables entre couples. Il est question du droit de l’enfant à avoir une famille, du droit des enfants à ne pas être discriminés  [108]. » En réponse à ces craintes, les députés en faveur de l’adoption mettent alors l’accent de manière plus importante sur les situations déjà existantes, qui touchent directement à la protection légale de l’enfant vis-à-vis de ses deux parents. Karine Lalieux (PS) rappelle ainsi que « l’un des buts de la proposition de loi est de répondre à une réalité sociale. De nombreux enfants ont en effet été conçus par des femmes lesbiennes, vivant pour la plupart avec une autre femme. Il est important de procurer à ces familles la sécurité juridique requise, et ce, précisément dans l’intérêt des enfants concernés  [109]. »

73Cependant, bien que le CDH comprenne la nécessité de régler ces situations « de fait », il refuse toutefois aux couples de même sexe d’adopter un enfant dont l’un des deux n’est pas le parent biologique. Selon Melchior Wathelet (CDH), « le statut d’adopté et la réalité d’avoir, auparavant, été abandonné sont souvent associés à un sentiment douloureux et difficile. En effet, il n’est pas facile d’admettre que l’on est différent, que l’on n’a pas des parents comme tout le monde. Pourquoi faut-il que la société complique encore la vie de cet enfant déjà éprouvé en le mettant dans une situation où il devra, en outre, assumer une différence supplémentaire, celle de ses parents d’adoption [de même sexe] ?  [110] » Les partisans de l’adoption répondent, quant à eux, que ces difficultés sont du même ordre que celles rencontrées par n’importe quel enfant présentant une différence, telles que la couleur de peau, la pauvreté, un handicap, etc. En outre, ils considèrent que les enfants s’adaptent en général assez rapidement à des situations qui devraient devenir de plus en plus banales, comme dans le cas des enfants de parents divorcés. Ainsi, Philippe Monfils (MR) pose la question de savoir si « le fait de vivre dans un couple homosexuel est encore aujourd’hui et sera bien plus encore demain un problème insurmontable ? La réponse se trouve dans les sondages qui montrent que de plus en plus, dans la population jeune, notamment, l’homosexualité n’est pas considérée comme une tare, ni même une curiosité ; c’est devenu un phénomène banal relevant de la seule conscience des personnes  [111]. »

74Si « l’intérêt de l’enfant » apparaît bien, au cours des débats, comme la préoccupation majeure et constante de tous les partis, le problème est donc le suivant : « Comment les pouvoirs publics peuvent (…) garantir au mieux l’intérêt des enfants à adopter, intérêt dont ils sont les seuls garants  [112]. » À cette question, une grande partie des adversaires à l’adoption, tel que Melchior Wathelet (CDH), répondent que l’essentiel est d’avoir des parents de sexe différent. L’argument de l’intérêt de l’enfant est donc ce qui lui permet de justifier un traitement différencié selon les couples et, par conséquent, de refuser l’adoption aux couples de même sexe. Cependant, on peut se demander, à l’instar de Philippe Monfils, si l’enjeu véritable du problème n’est pas « de savoir comment faire abstraction totale d’un jugement collectif historiquement négatif porté sur ce type de préférence sexuelle ». Derrière la catégorie insaisissable de l’« intérêt de l’enfant », sur laquelle même les juges des hautes cours juridictionnelles ne parviennent pas à s’accorder, « c’est en réalité l’intérêt de la famille traditionnelle qui est au premier plan des préoccupations. (…) Quand on affirme qu’un enfant ne peut être heureux ou a plus de chances de l’être dans un couple hétéro que dans un couple homo, il s’agit d’une affirmation générale écornée par de nombreux cas particuliers (…). Aucune institution n’est exempte de critique lorsqu’il s’agit de l’intérêt de l’enfant. Mais on voit en tout cas ce qui n’est pas de son intérêt. En ce qui concerne les enfants vivant dans des couples homosexuels, leur intérêt n’est certainement pas de ne posséder que des liens juridiques, patrimoniaux avec un seul membre du couple  [113]. » On peut constater dès lors, comme l’indique Bruno Perreau pour la France, que « la notion d’intérêt de l’enfant, aux contours très flous, signifie [chez les opposants de l’ouverture de l’adoption] l’intérêt de l’enfant à être élevé dans un cadre familial socialement conforme aux normes dominantes  [114] ».

3.2. LE DÉVELOPPEMENT DE L’ENFANT À L’ÉPREUVE DE LA DIFFÉRENCE DES SEXES

75Particulièrement délicate, la question du développement de l’enfant élevé par un couple de même sexe est certainement celle qui a entraîné les polémiques les plus vives parmi les parlementaires. Tout au long des débats à la Chambre, elle apparaît au sein des discussions et fait l’objet de nombreuses expertises. Pourtant, comme l’avait fait remarquer le juriste Jean-Louis Renchon (UCL) en sous-commission Droit de la famille, il n’incombe pas au législateur de juger du bien-être des enfants élevés par un couple homosexuel, ni de déterminer les conséquences éventuelles qu’entraîne ce type de situation pour l’enfant. La question n’est pas non plus de décider si l’on peut ou non permettre à des couples homosexuels d’avoir et d’élever des enfants, puisque ceux-ci en ont déjà et que le nombre de familles « homoparentales » ne cesse d’augmenter. Toutefois, le devenir de l’enfant au sein de ce type de famille demeure un enjeu majeur du débat car il semble que la question sous-jacente au dossier reste, pour beaucoup de parlementaires, de savoir si le fait d’être élevé par des parents de même sexe ne porte pas préjudice à l’enfant. En effet, si tel était le cas, cela pourrait constituer une raison, pour certains, de refuser l’ouverture de l’adoption. Selon les défenseurs de la proposition Swennen, la question ne doit pas pourtant être posée en ces termes, étant donné que l’objectif de celle-ci est avant tout de protéger juridiquement les enfants élevés par deux parents de même sexe en les mettant sur pied d’égalité avec les autres enfants, indépendamment des situations familiales respectives.

76Du côté des partisans de l’adoption, on remarque d’emblée que la proposition de loi déposée par le député Guy Swennen en janvier 2004 stipule que « les enfants qui grandissent au sein d’une relation homosexuelle sont au moins aussi heureux que ceux qui grandissent au sein d’un autre type de relation  [115] », laissant sous-entendre l’existence de sources ou de témoignages en la matière, mais sans préciser davantage cette affirmation. Les propositions de loi qui suivront maintiennent et appuient cet argument mais, cette fois, en se référant explicitement aux résultats d’études scientifiques menées sur le sujet. Ces recherches menées auprès d’enfants élevés par des couples de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination avec donneur, montrent que ceux-ci ne présentent aucune différence significative aux niveaux psychologique et social par rapport à ceux issus de familles hétérosexuelles ou monoparentales. Lors des auditions en sous-commission Droit de la famille, ces résultats sont par ailleurs rappelés et confirmés par Patricia Baetens et le professeur Devreoy, spécialistes travaillant tous les deux sur ces questions. Malgré le nombre élevé de ces études se chiffrant aux alentours de deux cents, les détracteurs de l’adoption tentent constamment de mettre à mal les résultats présentés en évoquant différents biais méthodologiques et épistémologiques possibles. Ainsi, ils formulent de nombreuses critiques sur la taille des échantillons, la durée des études, le jeune âge des enfants, l’engagement militant de certains des parents interrogés, etc. Ils mettent également en question l’objectivité des auteurs. Pourtant, comme le souligne notamment Liesbeth Van der Auwera (CD&V) au début de la commission de la Justice  [116], aucune étude réalisée jusque là ne vient contredire ces résultats, ni montrer des effets dommageables chez l’enfant  [117].

77En ce qui concerne le développement de l’enfant, les adversaires de l’adoption vont émettre trois arguments principaux pour refuser la possibilité qu’un enfant ait légalement deux parents de même sexe, voire qu’il soit éduqué par ceux-ci. Le premier élément s’appuie sur le principe de précaution. Les deux autres arguments ont trait à la différence de sexe des parents et concernent, d’une part, la filiation juridique de l’enfant, et d’autre part, les référents masculins et féminins au sein du couple parental. Ces deux types de raisonnement, posant la « différence des sexes » au cœur du débat, sans toutefois que cette notion ne soit par ailleurs véritablement définie, sont ainsi mis en jeu par différentes explications, d’ordre psychanalytique, psychologique, voire juridique, visant à démontrer que l’enfant nécessite des parents de sexe différent pour s’épanouir.

78Ainsi, premièrement, les députés opposés à l’adoption estiment que l’on ne dispose pas suffisamment de recul, à la fois par rapport au développement des enfants sur le plus long terme et par rapport à la validité des études réalisées. Les adversaires de l’adoption invoquent alors le « principe de précaution » et préconisent de s’abstenir face à ce qui représente, à leurs yeux, une situation de « réelle incertitude  [118] ». Charles Michel (MR) va particulièrement insister sur cet argument tout au long des débats  [119]. En outre, bien que le CD&V, au début de la commission de la Justice, semblait convaincu par les résultats des études menées, il manifeste par la suite plus de réticences à l’égard de celles-ci. Finalement, les membres du CD&V mobiliseront également le principe de précaution, notamment lors de la séance plénière pour éviter, selon eux, les conséquences néfastes qu’un enfant adopté par deux personnes homosexuelles pourrait encourir en faisant l’objet de critiques extérieures. Les partisans de l’adoption objectent, quant à eux, que le principe de précaution doit plutôt s’appliquer à travers la mise en place d’une loi stricte et d’une procédure d’adoption rigoureuse évaluant scrupuleusement les candidats à l’adoption sur leurs capacités parentales. Ainsi, pour Philippe Monfils (MR), le principe de précaution « ne doit pas être mal compris : [celui-ci] ne consiste en effet pas à ne rien faire, et à interdire purement et simplement l’adoption par des couples homosexuels. Bien au contraire, ce principe consiste à entourer cette adoption de garanties pour éviter tout risque d’atteinte aux intérêts de l’enfant  [120]. » Selon lui, c’est précisément l’objectif de la proposition de loi à l’examen.

79Ensuite, le deuxième élément évoqué, tout particulièrement par le CDH, est le maintien d’un système de filiation bisexuée. Sur ce point, le député Melchior Wathelet estime qu’« il n’est pas concevable d’instaurer, dans le cas d’adoption par un couple homosexuel, un lien de filiation qui gomme toute référence à la différence des sexes, à la complémentarité d’un père et d’une mère  [121] ». D’après lui, « l’adoption va beaucoup plus loin que le fait de sécuriser des liens familiaux établis puisqu’elle organise, pour l’avenir de l’enfant, une filiation homosexuelle. (…) Elle définit l’identité même de la personne et de cet enfant qui va être amené à grandir  [122]. » Cette argumentation se fonde sur les propos développés par le juriste Jean-Louis Renchon (UCL), lors des auditions en sous-commission Famille. Selon ce dernier, permettre à un enfant d’être adopté par un couple homosexuel signifierait que l’on « instituerait alors pour ces enfants une filiation et, dès lors, une identité qui seraient remplies de confusion, puisqu’on en aurait délibérément gommé toute référence fondatrice à la différence des sexes, comme à la double racine – féminine ou maternelle et masculine ou paternelle – constitutive de chaque être humain  [123] ». Cette situation porterait ainsi préjudice à la structuration identitaire de l’enfant. Sur la base de ce raisonnement, Melchior Wathelet recommande plutôt l’élaboration d’un statut de « parentalité sociale » qui ne nécessite pas l’établissement d’un lien de filiation à l’égard de deux personnes de même sexe (cf. infra). Cette perspective naturaliste essentialise la différence biologique des sexes comme une donnée immuable qui devrait se retrouver dans le système de filiation alors que, rappelons-le, ce système de filiation juridique occidental, comme toute autre institution juridique est une construction sociale humaine, relative et évolutive au regard des sociétés et du temps  [124]. Cependant, la question, pour Jean-Louis Renchon, reprise par les adversaires de l’adoption, est de savoir : « Est-il adéquat de modifier radicalement notre conception de la double filiation maternelle et paternelle d’un enfant, pour en faire une double filiation indistinctement bisexuée ou monosexuée et admettre désormais qu’un enfant puisse être indifféremment l’enfant de sa mère et de son père ou l’enfant de ses deux mères ou l’enfant de ses deux pères ?  [125] » Enfin, le dernier argument va encore plus loin dans l’interprétation de la différence des sexes. Le CDH, ainsi que plusieurs membres du MR  [126], mobilisent également des motifs plus psychanalytiques, afin de justifier le besoin pour un enfant d’avoir un référent masculin et un référent féminin, incarnés respectivement par un père et une mère. Sur ce point, Marie-Christine Marghem (MR) fait régulièrement référence à des théories d’ordre psychanalytique pour justifier son point de vue. Selon elle, « il s’agit ici de prendre en considération qu’avoir des parents de même sexe pour un enfant, ce n’est pas la même chose que d’avoir des parents de sexe différent. Si deux partenaires suffisent dans un couple hétérosexuel, il faut au minimum trois intervenants dans un couple homosexuel. La question de l’identité, placée sur le modèle oedipien triangulaire est souvent évoquée. Ce modèle s’appuie tant sur l’asymétrie des places que sur la différence des sexes. Au sein d’un couple homosexuel, l’enfant aura dès lors besoin d’un modèle identificatoire féminin ou masculin selon le sexe du couple  [127]. » Jean-Pierre Malmendier (MR) soutient également qu’« un principe fondamental [est] le fait que les enfants ont besoin d’un modèle masculin et d’un modèle féminin dans un ménage, c’est-à-dire d’un père et d’une mère à qui ils peuvent s’identifier.(…) L’enfant qui grandit dans un ménage holebi rencontrera beaucoup de difficultés (…). Il existe entre père, mère et enfant un lien intime, affectif qui ne peut être mis de côté à la légère  [128]. » Ainsi, l’enfant élevé au sein d’un foyer homoparental encourrait des surcharges psychologiques importantes.

80L’argument de la différence des sexes et de la complémentarité de fonctions parentales différenciées, développé notamment par Marie-Christine Marghem (MR) et Melchior Wathelet (CDH), pose toutefois question quant au lien de causalité qui est posé comme allant de soi entre l’existence de différences physiologiques entre un homme et un femme et l’assignation à des rôles parentaux maternel et paternel pour l’enfant. En effet, partant de la nécessité, généralement admise, d’une complémentarité biologique entre un homme et une femme pour la procréation  [129], certains intervenants en déduisent que l’enfant a besoin d’être élevé par des parents de sexe différent, afin de pouvoir posséder un référent masculin et un référent féminin. Pourtant, sans nier l’existence de ces différences biologiques, cette vision participe d’un naturalisme biologisant, prônant qu’il existe un ordre naturel, préexistant et immuable, qui doit se refléter dans l’organisation de la société. Cette perspective, véhiculant le modèle de la famille traditionnelle patriarcale, est critiquable à maints égards  [130].

81Ainsi, à l’inverse, pour les partisans de l’adoption, cette différence de sexe n’est pas fondamentale pour l’enfant. Comme l’indique Guy Swennen, « des études psychologiques fouillées montrent que l’absence de modèle paternel ou maternel est sans conséquences négatives. Ce qui compte, c’est l’amour dont est entouré l’enfant  [131]. » En outre, d’après lui, « il serait inconvenant d’affirmer que, par définition, le couple hétérosexuel constitue à cet égard une garantie et que tel ne serait pas le cas du couple homosexuel  [132] ». De plus, les défenseurs de l’adoption mettent en avant le fait que l’entourage de l’enfant élevé par un couple de même sexe ne se limite pas à ses deux parents et que celui-ci pourra trouver de nombreux référents masculins et féminins parmi les membres de sa famille plus large ou dans les lieux de socialisation qu’il va fréquenter.

82Face aux arguments sur la « différence des sexes », certains députés, à l’instar de Philippe Monfils (MR), estiment que cette préoccupation accrue à l’égard du maintien d’une différence de sexe, dissimule plutôt une crainte de l’homosexualité et une tendance à vouloir préserver le modèle de la famille traditionnelle. Ainsi, il demande : « Combien de fois n’avons-nous pas entendu prononcer la phrase : “Il est déjà assez difficile d’élever un enfant dans un couple hétérosexuel, alors dans un couple homo !” Voilà le fond du problème ! L’image ne renvoie pas seulement à l’existence d’un père et d’une mère mais aussi à la connotation négative de l’homosexualité même. (…) On voit donc que l’intérêt de l’enfant n’est pas au centre du refus de l’adoption, mais c’est l’intérêt de la famille traditionnelle qui l’est  [133]. »

83Enfin, ces explications posent quelque peu problème d’un point de vue logique, étant donné que tant Melchior Wathelet (CDH) que Marie-Christine Marghem (MR) ont déposé des amendements visant à créer des formes de « parenté sociale », attribuant un statut de parentalité à l’adulte élevant l’enfant de son partenaire de même sexe. Ce faisant, ils reconnaissent et acceptent implicitement les familles dont les deux parents sont de même sexe, alors que leur raisonnement précédent par rapport aux fonctions parentales différenciées ne le permettrait pas en principe.

3.3. PARENTÉ SOCIALE OU ADOPTION : UNE QUESTION DE FILIATION ?

84À la fin du mois de juin, les adversaires de la proposition de loi manifestent un vif regain d’intérêt pour la question de la « parenté sociale », qu’ils réintroduisent au sein du débat parlementaire sous différentes formes. En effet, constatant que, malgré les arguments déployés, une majorité de députés reste en faveur de l’adoption au sein de la commission de la Justice et que le moment du vote approche, plusieurs partis préfèrent adopter une stratégie alternative à l’adoption. Ils déposent ainsi de nombreux amendements sous les intitulés de « coparentalité » pour le CD&V, de « parentalité sociale » pour le CDH, voire de « tutelle par le conjoint ou le cohabitant » chez les libéraux francophones. La création d’un statut de « parenté sociale », quel que soit le nom qu’on lui prête, permettrait en effet de contourner la solution d’une adoption complète et plus « traditionnelle » tout en reconnaissant légalement la relation entre un enfant et le partenaire du parent officiel de celui-ci (ayant un lien de filiation biologique ou adoptif avec l’enfant).

85Le statut de « parent social » est destiné à protéger et valoriser un lien affectif et éducationnel qui existe. Il concerne, selon les cas, le « deuxième parent » dans le cadre d’un foyer homoparental  [134] ou le « beau-parent » d’une famille recomposée dans laquelle les partenaires seraient de même sexe ou de sexe différent. Sous certaines conditions  [135], le « parent social » se verrait attribuer une série de droits et d’obligations à l’égard de l’enfant, ce qui permettrait d’éviter, entre autres, qu’en cas de séparation des partenaires ou du décès du parent légal, l’enfant ne soit coupé soudainement de la personne qui l’a parfois élevé pendant des années et qui s’est investie affectivement et matériellement auprès de lui.

86Cependant, la mise en place de cette nouvelle institution n’est pas sans poser un certain nombre de problèmes. En effet, la « parenté sociale », n’existant d’ailleurs dans aucune législation à l’étranger, représente un statut tout à fait novateur qui nécessite donc d’être entièrement défini, tant au niveau de son contenu, de ses modalités que de sa portée et de ses limites. Comme le souligne Frederik Swennen, professeur de droit de la famille à l’Universiteit Antwerpen (UA) : « En instaurant la parenté sociale, le législateur ouvrirait la boîte de Pandore, parce qu’il faudrait examiner, pour tous les effets juridiques de la filiation, s’ils doivent être étendus à la parentalité sociale  [136]. »

87Les propositions de loi relatives à la parenté sociale sont inscrites à l’agenda de la sous-commission Famille en mars 2005. Elles sont associées au dossier relatif à l’adoption, étant donné que les textes soumis visent tous, au moins en partie, à régler la position juridique de la personne vivant avec l’enfant de son partenaire, de même sexe ou de sexe différent, et participant pleinement à l’éducation et à l’entretien de celui-ci. Cette superposition des dossiers fait suite notamment à un arrêt rendu par la Cour d’arbitrage le 8 octobre 2003  [137], portant sur le cas d’un enfant élevé depuis sa naissance par un couple de lesbiennes, ayant eu recours à l’insémination artificielle, et dont la « deuxième mère » non biologique, après séparation, n’a plus aucun droit ni d’obligation à l’égard de l’enfant. Face à cette situation, la Cour d’arbitrage a jugé « que cette catégorie d’enfants fait l’objet d’un traitement différent sans justification admissible ». Elle estime ainsi qu’il appartient au législateur de « préciser sous quelle forme, à quelles conditions et selon quelle procédure l’autorité parentale pourrait, dans l’intérêt de l’enfant, être étendue à d’autres personnes qui n’ont pas de lien de filiation avec lui  [138] ». Cette dernière phrase, laissant la possibilité au pouvoir législatif de déterminer la solution la plus adéquate à adopter, porte à équivoque, en raison des différentes interprétations auxquelles elle va donner lieu par la suite. Pour les uns, elle doit déboucher sur un élargissement de l’adoption mais, pour d’autres, elle doit se régler par la création d’une nouvelle institution juridique de « parenté sociale ». Cet arrêt de la Cour d’arbitrage sera régulièrement invoqué dans les argumentations des intervenants  [139].

88Après les travaux de la sous-commission du Droit de la famille et après les auditions consacrées aux enjeux et au traitement de la parenté sociale et de l’adoption, les membres de la commission de la Justice décident de travailler sur les deux dossiers séparément et de se concentrer d’abord et exclusivement sur l’adoption, vu la complexité et l’état prématuré du dossier relatif à la parenté sociale. Malgré cette décision, à la veille d’entamer le vote de la proposition de loi au début du mois de juillet, on voit resurgir de nouveaux types de « parenté sociale » sous la forme d’amendements déposés par les adversaires de l’adoption. Les auteurs justifient ce revirement par la nécessité de régler la situation des enfants évoquée par l’arrêt de la Cour d’arbitrage. Certains députés MR voudraient ainsi régler la situation de la parenté sociale en l’espace de quelques jours, après avoir déclaré à plusieurs reprises, à l’instar de leur chef de file, que le débat était prématuré et nécessitait davantage de temps et de réflexion.

89En effet, le 4 juillet 2005, deux jours avant l’une des dernières réunions de la commission de la Justice, les députés MR opposés à l’adoption se lancent subitement dans l’élaboration d’une « nouvelle catégorie de tutelle ouverte au conjoint ou au cohabitant ». Elle réglerait, selon Olivier Maingain, « 90% des cas soumis au flou juridique actuel  [140] », étant donné qu’elle vise principalement les situations de fait déjà existantes, où l’enfant vit et est élevé par deux parents de même sexe. Il s’agirait d’attribuer un statut de « tuteur » au partenaire, soit d’une mère lesbienne ayant eu recours à l’insémination artificielle, soit d’un parent adoptif ayant adopté à titre individuel, ou bien au nouveau partenaire d’un parent ayant eu un enfant dans le cadre d’une relation hétérosexuelle antécédente. Cela ne serait toutefois possible qu’à la condition que l’autre parent légal éventuel ait disparu ou soit absent. L’objectif poursuivi par les signataires du texte est de « conférer des droits et des obligations comparables à tous les enfants, quelle que soit la structure familiale au sein de laquelle ils évoluent  [141] ». Réparties en quatre amendements déposés par Daniel Bacquelaine et cinq autres parlementaires MR  [142], cette tutelle permettrait aux deux époux ou cohabitants d’exercer l’autorité parentale de manière conjointe à l’égard de l’enfant, ainsi que d’assurer, outre l’entretien alimentaire, les droits successoraux entre celui-ci et son tuteur. Selon Marie-Christine Marghem, cette formule offrirait l’avantage d’une procédure d’ouverture souple requérant seulement l’accord des protagonistes impliqués devant un juge de paix, à l'inverse de l’adoption qui nécessite de multiples étapes préalables, dont des tests d’aptitude. La tutelle présente en outre un caractère réversible, étant donné qu’il est possible d’y mettre fin sur simple requête de l’enfant, du parent ou du tuteur. Cet argument ne convainc toutefois pas les partisans de l’adoption, qui y voient un risque pour la sécurité juridique de l’enfant (cf. infra).

90Sur le fond, cette nouvelle forme de tutelle est fort critiquée par les membres du VLD qui, à l’instar de Martine Taelman, estiment que cette institution juridique « serait ainsi complètement remaniée et vidée de son sens  [143] ». En effet, comme l’indique Melchior Wathelet (CDH), « communément, on parle de tutelle lorsque les deux parents d’un enfant sont décédés et qu’un tuteur est désigné  [144] ». Une certaine incohérence émerge donc sur la signification donnée à cette institution, qui ressemble à la parenté sociale mais sans passer par la création d’une nouvelle institution juridique.

91L’initiative du MR ayant réintroduit la parenté sociale dans le débat, le CD&V et le CDH suivent la même démarche et déposent conjointement, deux jours plus tard, des amendements visant à créer un statut, pour les premiers, de mee-ouderschap, autrement dit de « coparentalité », et pour les seconds, de « parentalité sociale ». Poursuivant les mêmes objectifs que la solution proposée par le MR, ces deux variantes supplémentaires de la « parenté sociale » sont très semblables à la tutelle proposée par les libéraux francophones, si ce n’est qu’elles créent toutes deux un nouveau statut juridique. La tutelle ne serait, par contre, d’après ses auteurs MR, « qu’une nouvelle catégorie » d’une institution existante.

92En outre, les amendement déposés par Servais Verherstraeten pour le CD&V  [145] ne tiennent compte que des situations où un lien biologique préexiste avec l’un des parents et ne règlent donc pas les cas où, par exemple, une personne voudrait adopter l’enfant que son partenaire a adopté en tant qu’individu seul. Notons également que ces amendements se distinguent de la proposition de loi sur la « parenté sociale  [146] » déposée par le même parti le 6 novembre 2003, dans la mesure où cette dernière s’attachait à régler davantage les situations de parentalité large. Les amendements déposés ici visent essentiellement les situations homoparentales, en particulier le cas des couples de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination artificielle. La portée de cette « co-parentalité » est également élargie aux droits successoraux, alors que la première proposition se limitait au partage de l’autorité parentale et à l’obligation alimentaire.

93Quant aux amendements présentés par Melchior Wathelet (CDH)  [147], ils peuvent concerner à la fois les couples hétérosexuels et homosexuels, mais s’adressent ici principalement à ces derniers  [148], « lorsque l’autorité parentale à l’égard d’un enfant est exercée par un seul de ses parents, soit que la filiation de l’enfant ne soit établie qu’à l’égard de ce seul parent  [149], soit que l’autre parent soit décédé ou absent  [150] ». La « parentalité sociale » se distingue donc essentiellement de la tutelle par sa forme mais les contenus sont très similaires. En outre, « il y a également une différence au niveau de l’autorité parentale. Dans le cadre de la tutelle, lorsque les attributs de l’autorité parentale sont octroyés par un tribunal, ils le sont définitivement  [151] », alors qu’ils prennent fin à la majorité de l’enfant pour la « parentalité sociale ».

94Ces trois types de « parenté sociale » posent toutefois plusieurs problèmes significatifs quant à leur portée et à leur contenu, que les libéraux flamands soulignent rapidement. En effet, le lien créé par le nouveau statut, comme l’indique Martine Taelman (VLD), ne se limiterait qu’à l’enfant et à son « parent social » sans être étendu au reste de la famille de celui-ci. Cela aurait pour conséquence de notamment limiter les droits successoraux au premier degré, c’est-à-dire que l’enfant ne pourrait pas, par exemple, hériter de ses grands-parents « sociaux ». De plus, l’enfant n’aurait pas la possibilité de porter le nom de son deuxième parent.

95En outre, bien que les procédures de la « parenté sociale » présentent une certaine souplesse pouvant être perçue comme un avantage, celle-ci engendre, de ce fait même, un risque conséquent d’instabilité juridique pour l’enfant ou son « parent social ». En cas de problème, ils peuvent voir leurs droits et obligations se dissoudre brusquement si l’un des intervenants décide d’y mettre fin. L’adoption plénière est, par contre, irrévocable. Les partisans de l’adoption proposent un amendemant concernant les adoptions intrafamiliales, y compris lorsque le « deuxième parent » désire adopter l’enfant de son partenaire. Cet amendemant prévoit dans ce cas une procédure simplifiée  [152]. Ce type de demande ne requiert en effet pas d’enquête sociale auprès du tribunal de la jeunesse, ni généralement de préparation préalable.

96Enfin, sur le fond, les différentes possibilités de parenté sociale s’apparentent fortement, voire s’identifient, à l’institution juridique de l’adoption simple. Ce type d’adoption permet d’instaurer un lien de parenté, éventuellement révocable, sans néanmoins couper les liens avec la famille d’origine de l’enfant, comme c’est le cas généralement lors d’une adoption plénière. Servais Verherstraeten admet que « si le système de la co-parenté ne va pas aussi loin que l’adoption plénière, les mêmes résultats que l’adoption simple sont obtenus  [153] ». Pourtant, en sous-commission du Droit de la famille, le juriste Frederik Swennen (UA) avait déjà prévenu les parlementaires que « si le législateur donne à la parentalité sociale son contenu logique de lien de filiation limité au premier degré (en ligne directe), il aura réinventé l’eau chaude. En effet, notre droit connaît déjà cette parentalité sociale, sous le nom d’adoption simple. L’adoption simple par un beau-père ou une belle-mère est même privilégiée. Je ne vois pas pourquoi il faudrait faire compliqué quand on peut faire simple ; en d’autres termes, pourquoi ne pourrait-on pas adapter l’adoption (simple), moyennant des interventions limitées, à l’évolution de la société au lieu d’instaurer une nouvelle réglementation légale ?  [154] » Mais les opposants à l’adoption veulent éviter deux choses. D’une part, l’utilisation du titre d’adoption, et ceci, pour des raisons essentiellement symboliques à l’égard de l’opinion publique. Les députés MR opposés à l’adoption estiment en effet que celle-ci « ne recueille (…) pas une acceptation sociale. Il ne serait dès lors pas prudent de s’engager dans cette voie  [155]. » D’autre part, il s’agit plus fondamentalement d’éviter de créer un lien de filiation à travers l’instauration de l’adoption.

97Tous ces amendements aux intitulés différents ont pour conséquence de submerger le débat par une multitude de concepts juridiques et de semer une certaine confusion dans l’opinion, et parfois même au Parlement. Il devient difficile de cerner quels sont les tenants et aboutissants des différentes propositions surgissant en l’espace de quelques jours, et ceci, d’autant plus qu’elles paraissent s’éloigner de plus en plus de ce qui se présentait comme étant « l’ouverture de l’adoption par les couples de même sexe ».

98Outre le fait de compliquer les débats, ces stratégies alternatives allongent considérablement les travaux parlementaires et font souvent oublier l’enjeu fondamental sous-jacent aux discussions autour de la parenté sociale et l’adoption, à savoir la filiation. En effet, l’objectif des partis opposés est avant tout d’éviter de modifier l’institution de la filiation en permettant de créer un lien de filiation entre un enfant et deux personnes de même sexe. Ainsi, dans le cas où l’adoption par les couples de même sexe serait votée, cela signifierait qu’un enfant pourrait avoir deux pères ou deux mères inscrits à titre égal sur son acte de naissance. Le partenaire de même sexe du parent bénéficierait ainsi de tous les droits et obligations à l’égard de l’enfant et serait donc reconnu comme parent légal à part entière de l’enfant par un lien indissoluble. Les opposants refusent cette possibilité pour plusieurs raisons.

99Premièrement, certains partis, et tout particulièrement le CDH, refusent l’adoption afin d’éviter une filiation où les référents masculins et féminins ne seraient pas tous deux présents, ce qui pourrait s’avérer déstructurant pour l’enfant. Cet argument d’ordre psychologisant, fondé sur la différence des sexes, a déjà été examiné auparavant et ne sera donc plus développé ici.

100Deuxièmement, plusieurs parlementaires estiment que, bien qu’il soit nécessaire d’assurer la protection juridique de l’enfant élevé par deux personnes de même sexe, la solution de l’adoption irait trop loin et qu’elle ne correspondrait pas à la réalité, à savoir que l’on ne peut attribuer un lien juridique de « parenté », c’est-à-dire la filiation, à une personne qui exerce une fonction de « parentalité » (éducation, entretien, etc.) à l’égard de l’enfant. Pour comprendre cette position des parlementaires, il faut avoir à l’esprit que cette objection dépend toutefois des situations en question. Ainsi, dans le cas de familles recomposées, le partenaire du parent, de même sexe ou de sexe différent, s’introduit dans la vie familiale et participe à celle-ci après la naissance de l’enfant, ce dernier étant issu de la relation antérieure de ses parents légaux. Le nouveau partenaire du parent joue donc le rôle de « beau-parent ». C’est pourquoi un lien d’adoption à l’égard de celui-ci ne serait pas adéquat pour refléter la « réalité », étant donné que l’enfant a parfois encore ses deux parents légaux et que le beau-parent n’a pas participé au projet initial de parenté. Cependant, la proposition de loi relative à l’adoption vise principalement des situations où l’enfant est le fruit d’une relation d’un couple homosexuel ayant initié et mené conjointement un projet parental depuis le départ et souvent pendant de longues années. Il s’agit, dans la majorité des cas, de couples de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination artificielle. Dans ces situations, le lien de parenté attribué par l’adoption correspondrait davantage à la réalité vécue par l’enfant, puisque celui-ci n’a toujours connu que ses deux mères par lesquelles il a été élevé. La filiation adoptive paraîtrait donc plus cohérente qu’un lien de « parenté sociale » qui instaure une hiérarchie juridique entre les deux parents à l’égard de l’enfant.

101Troisièmement, au-delà de l’argumentation psychologisante du CDH, les opposants refusent généralement l’ouverture de l’adoption par les couples de même sexe parce qu’elle signifierait, au niveau du droit et dans une perspective plus large, une modification importante de l’institution juridique de la filiation dans le droit belge. En effet, en permettant qu’un enfant puisse avoir légalement deux parents de même sexe, la filiation ne reposerait désormais plus sur le critère de la différence des sexes, laquelle est constitutive de notre système de filiation, comme l’est également la différence de génération. À cet égard, il est nécessaire de rappeler que toute société possède et organise un système de filiation propre, qui détermine et reconnaît la position occupée par un enfant au sein de sa famille, en désignant notamment le lien de parenté unissant un enfant à ses deux parents, voire à un seul parent dans certains cas. En d’autres termes, il s’agit d’un ensemble de règles qui définit les personnes pouvant être considérées comme un père ou une mère et sous quelles conditions  [156]. Actuellement en Belgique, le système de filiation se caractérise par le fait que l’enfant possède une filiation double, établie à l’égard de son père et de sa mère, ou seulement à égard d’un des deux (si le père est absent ou n’a pas reconnu l’enfant par exemple). Ainsi, pour M. Wathelet (CDH), « il n’est pas adéquat de modifier notre conception de la double filiation paternelle et maternelle d’un enfant pour créer une filiation bi ou monosexuée et admettre que l’enfant puisse être indifféremment de son père ou de sa mère ou l’enfant de ces deux mères ou l’enfant de ces deux pères  [157] ». Pourtant, tant la filiation que l’adoption sont des institutions juridiques et ont donc évolué et été modifiées au fil du temps et des sociétés, comme le rappelle d’ailleurs Marie-Chritine Marghem en commission de la Justice pour ce qui est de l’adoption. Elles ne reposent donc pas sur un « ordre » naturel ou sacré qui serait immuable.

102On voit bien que les questions soulevées par ce débat vont au-delà des enjeux de discrimination et de la protection de l’enfant. L’issue législative de l’adoption aurait ainsi des conséquences fondamentales sur le système juridique belge de la filiation. Notons, toutefois, que depuis 2001, un nombre grandissant de pays, tels que les Pays-Bas, la Suède, et l’Espagne, ont modifié leur système de filiation en permettant l’adoption par les couples de même sexe et ont donc déjà modifié ce modèle.

103C’est pour ces différentes raisons touchant principalement à la filiation que plusieurs députés s’opposent à l’ouverture de l’adoption. Plusieurs partis présentent donc différents types de « parenté sociale », attribuant droits et devoirs au « deuxième parent », mais sans établir un lien de filiation. Ainsi, ils en arrivent à créer des statuts comportant les mêmes droits que l’adoption mais portant un nom différent. Ce qui n’est pas admissible et cohérent, à la fois pour certains parlementaires mais aussi pour les juristes. Ainsi, Karine Lalieux rappelle que « différents juristes ont bien souligné qu’il n’était pas recommandable de créer une nouvelle institution, ce genre de bricolage n’étant pas idéal en droit de la famille  [158] ». En outre, cela créerait une discrimination entre le parent légal et le parent « social » sur la base de lien biologique, mais aussi entre les enfants qui n’auraient pas leurs deux parents reconnus de la même manière que les autres.

3.4. L’ADOPTION INTERNATIONALE

104Au cours de l’examen de la proposition de loi Swennen, les députés sont confrontés à la question délicate de la portée internationale à donner éventuellement à celle-ci. Ils doivent ainsi apprécier l’opportunité d’inclure dans le Code civil la possibilité, pour les couples homosexuels, d’adopter un enfant à l’étranger. En Belgique, comme dans la plupart des pays, on distingue en effet deux types d’adoption. Celle-ci peut être interne, si l’enfant est né en Belgique  [159], ou bien internationale, lorsque l’enfant provient d’un autre pays, généralement hors d’Europe occidentale  [160]. Bien que la Convention de La Haye privilégie le maintien de l’enfant adoptable dans son milieu d’origine  [161] et que les demandes d’adoptions internes soient très nombreuses  [162], celles-ci restent toutefois limitées, vu le nombre restreint d’enfants abandonnés en Belgique et confiés en adoption. Cette situation s’explique entre autres par la maîtrise et l’usage important de méthodes contraceptives, conjointement à la dépénalisation de l’avortement. La plupart des candidats adoptants doivent donc recourir à l’adoption internationale et se tourner vers les pays qui collaborent avec la Belgique dans ce domaine. Ainsi, outre les longues et fastidieuses démarches habituelles pour tenter d’obtenir un certificat d’aptitude auprès du tribunal de la jeunesse et une évaluation positive par les organismes agréés, les candidats doivent se plier aux critères de sélection imposés par les pays d’où proviennent les enfants. Chaque adoption requiert au préalable le consentement du pays d’origine qui peut, de ce fait, émettre certaines exigences quant au choix des parents adoptants (par exemple privilégier les couples mariés ou assigner un quota maximum de candidats célibataires). L’homosexualité figure ainsi souvent en tête de liste des facteurs d’exclusion, étant toujours considérée dans de nombreux pays comme une maladie ou un crime punissable. Or, s’il est possible d’éventuellement dissimuler l’orientation sexuelle d’une personne seule dans le cas d’une adoption monoparentale  [163], cela semble par contre difficile lorsque la demande provient d’un couple de même sexe. On sait, en outre, que deux tiers des enfants adoptés en Belgique sont originaires de pays qui refusent que leurs enfants soient adoptés par des personnes homosexuelles. Par conséquent, cela signifie très concrètement que, même si la loi est acceptée, il y a très peu de chances pour que des couples homosexuels puissent adopter conjointement un enfant à l’étranger dans les prochaines années. L’inclusion de l’adoption internationale a donc, avant tout, une portée davantage symbolique que pratique et tend surtout à éviter de marquer une différence explicite dans la loi à l’égard des couples homosexuels. Dans cette logique, il s’agit de défendre les principes d’égalité et de non-discrimination en accordant à tous le même accès aux institutions. Pour cette raison, les partisans de l’adoption tiennent particulièrement à donner une portée internationale à la proposition de loi. Cette possibilité est d’ailleurs inscrite d’emblée dans les propositions initiales déposées par les parlementaires Écolo, PS, SP.A et Spirit. Le VLD, par contre, avait limité sa proposition de loi à l’adoption interne, estimant que « l’adoption par ces couples [homosexuels] reste un sujet tabou dans la plupart des pays [d’origine]  [164] ». Néanmoins, le groupe politique changera ensuite d’attitude en cosignant l’amendement déposé par Karine Lalieux et les autres partisans de l’adoption le 7 juin 2005  [165]. Par ailleurs, en ce qui concerne les demandes d’adoption interne, il faut préciser qu’il s’agirait également d’une mesure essentiellement symbolique pour les demandes émanant de couples homosexuels. En effet, le nombre d’enfants adoptables étant largement inférieur au nombre des demandes, il est très probable que les services d’adoption privilégieraient, comme c’est déjà le cas actuellement, les demandes provenant de couples hétérosexuels  [166].

105Compte tenu de ces éléments, la possibilité d’adopter à l’étranger, si elle était acceptée, n’aboutirait qu’à très peu de résultats concrets pour les couples homosexuels. Elle est d’ailleurs qualifiée de « leurre » par les opposants de la proposition Swennen car, dans les faits, elle risquerait d’induire en erreur les couples homosexuels en leur permettant d’entamer des procédures fastidieuses qui aboutiraient certainement in fine à un refus. La question déclenche pourtant bien des polémiques en commission de la Justice et donne lieu à de longues et vives discussions, au cours desquelles les parlementaires sollicitent nombre d’expertises et de données statistiques, interprétées de manières assez diverses. Liesbeth Van der Auwera (CD&V) soulève les premières interrogations en interpellant la commission de la Justice sur les « conséquences de l’adoption par des couples holebis pour l’adoption internationale. Une adoption effectuée en Belgique par un couple holebi sera-t-elle reconnue à l’étranger ? Les pays étrangers seront-ils prêts à faire adopter leurs enfants en Belgique s’ils savent qu’il existe un risque que les enfants soient adoptés par deux personnes du même sexe ?  [167] » Concernant la première question, le député Philippe Monfils rappelle que la même objection avait été soulevée lors du débat sur l’ouverture du mariage aux couples de même sexe : « Certains avaient en effet prétendu à l’époque que certains pays ne reconnaîtraient pas ces unions. Or, on constate que les choses évoluent, et de plus en plus de pays acceptent désormais ces mariages  [168]. » Il se réfère ainsi implicitement à la fonction « éclairante » d’un droit qui anticiperait les changements dans la société, les individus s’adaptant aux institutions sociales mises en place par le législateur.

106La seconde question pose davantage problème et suscite de nombreux désaccords entre les parlementaires. En effet, plusieurs députés, à l’instar de Charles Michel (MR), Melchior Wathelet (CDH) ou Servais Verherstraeten (CD&V), craignent que certains pays refusent d’envoyer leurs enfants dans un État autorisant l’adoption par des couples de même sexe en raison de la réprobation, et parfois de l’illégalité, dont l’homosexualité fait l’objet sur leur territoire. La proposition de loi en discussion pourrait ainsi nuire aux candidats hétérosexuels à l’adoption, lesquels verraient éventuellement leur demande refusée ou suspendue. Ainsi, pour Marie-Christine Marghem (MR), « il y a un réel danger que les couples qui sont déjà engagés dans un tel processus soient obligés de le recommencer. On ne voit pas en effet comment la Belgique pourrait empêcher un État de refuser purement et simplement les adoptions par des ressortissants d’un pays admettant que des couples homosexuels adoptent  [169]. » Pourtant, d’après Karine Lalieux, à l’heure actuelle, « aucun pays n’a interdit l’adoption par les ressortissants des pays acceptant l’adoption par des couples homosexuels. La seule chose que certains de ces États ont exigée, c’est l’engagement que leurs enfants adoptés le soient par des personnes hétérosexuelles. La loi n’aura donc aucun effet négatif sur les couples hétérosexuels désirant adopter à l’étranger  [170]. » Sur cette question, on constate que le point de vue défendu par les adversaires de la proposition de loi semble à nouveau se rallier au principe de précaution, en préconisant une attitude attentiste et de non-intervention face à des situations contenant une part d’incertitude.

107Par ailleurs, Martine Taelman (VLD) indique qu’« en ce qui concerne la situation internationale et l’éventualité de difficultés à ce niveau, il convient de constater un mouvement de nombreux États en faveur de l’adoption par des couples de même sexe  [171] ». Ce qui signifie, d’une part, que davantage de pays et de groupes politiques changent progressivement de position par rapport à la question, en adoptant généralement une attitude plus « tolérante  [172] » et, d’autre part, que plusieurs États ont modifié leur législation dans ce sens ou sont en train de le faire. Ainsi, au moment du débat, douze États ou composantes d’État  [173] permettaient déjà à des personnes homosexuelles d’adopter et deux s’apprêtaient à légiférer dans ce sens  [174]. En outre, d’après Zoé Genot (Écolo), « les conventions bilatérales relatives à l’adoption internationale signées par d’autres pays qui permettent l’adoption par des couples homosexuels, comme la Suède ou les Pays-Bas, n’ont pas été dénoncées par les autres États parties. Les conventions bilatérales sont d’ailleurs différentes selon les pays. La question de l’adoption par des couples homosexuels pourra donc, si elle pose vraiment problème à certains pays, être incluse dans les négociations de ces conventions  [175]. »

108Malgré ces indications, des doutes subsistent sur la question, en particulier chez les opposants. Les auditions du 22 juin 2005 vont permettre d’apporter un certain nombre d’informations complémentaires, notamment grâce au témoignage de deux professionnels travaillant dans le domaine de l’adoption. Il s’agit d’une part de Jo Labens, coordinateur du service d’adoption Gewenst Kind et, d’autre part, de Didier Dehou, représentant de l’Autorité communautaire pour l’adoption internationale (ACAI), responsable du secteur de l’adoption interne et internationale au sein du Ministère de la Communauté française. Les intervenants présentent des avis assez divergents sur le sujet, leur audition contribuant à renforcer les argumentations défendues par les deux camps sur le dossier, mais les assoit sur des données concrètes tirées de leur expérience professionnelle quotidienne dans ce domaine. Les propos de D. Dehou seront par exemple régulièrement cités par Charles Michel (MR) et Melchior Wathelet (CDH) lors des discussions ultérieures. L’intervenant explique notamment que, parmi les pays ayant autorisé des personnes homosexuelles à adopter, seule la Suède a véritablement ouvert l’adoption interne et internationale aux couples de même sexe  [176]. Les autres pays ont en effet limité la portée de la loi à l’adoption interne (exemple : les Pays-Bas  [177] ). Certains permettent uniquement l’adoption intrafamiliale, c’est-à-dire autorisent, sous certaines conditions, à une personne d’adopter l’enfant de son partenaire de même sexe, comme c’est le cas au Danemark ou en Allemagne. Concernant la Suède, celle-ci avait d’ailleurs procédé, avant de modifier la loi, à une enquête auprès des vingt-cinq pays principaux d’où sont originaires les enfants adoptés par les Suédois. « Sur les dix-sept pays d’origine ayant répondu, aucun ne pouvait envisager d’accepter un couple homosexuel comme parents adoptifs. C’est donc sans surprise que l’on constate aujourd’hui qu’aucune adoption internationale n’a encore été enregistrée à ce jour par l’autorité centrale suédoise  [178]. » L’intervenant conclut donc qu’« en matière d’adoption internationale, le seul effet prévisible d’une telle ouverture risque d’être une méfiance accrue des pays d’origine à l’égard de la Belgique et de l’ensemble de ses candidats adoptants. Ce risque ne relève pas du fantasme mais de l’expérience des contacts avec les autorités des pays d’origine des enfants  [179]. » Ces propos seront ultérieurement cités à plusieurs reprises par Charles Michel. À l’inverse de D. Dehou qui estime que la Belgique doit tenir compte de la « réalité des pays d’origine », J. Labens souligne, quant à lui, qu’« il ne revient pas au législateur belge d’inscrire dans sa propre législation une politique discriminatoire qui serait éventuellement menée à l’étranger à l’égard des homosexuels, des lesbiennes et des bisexuels. Les pays d’origine peuvent d’ailleurs toujours décider au cas par cas si un enfant entre en ligne de compte pour une adoption par des homosexuels, des lesbiennes ou des bisexuels  [180]. »

109Après ces auditions, la question continue à faire des remous en commission de la Justice lors de la discussion sur les amendements, ce qui pousse les parlementaires à recourir abondamment aux données chiffrées et aux expertises diverses. Ainsi, face au problème soulevé par l’opposition, Karine Lalieux (PS) se procure les données officielles concernant l’évolution du nombre d’enfants adoptés en Suède en fonction de leur pays d’origine  [181]. Comme indiqué précédemment, la Suède est en effet le seul État, au moment du débat parlementaire  [182], à avoir ouvert l’adoption internationale aux couples homosexuels. La députée veut donc comparer le nombre d’enfants envoyés en Suède pour être adoptés avant et après la modification législative. La Chine, principal pays d’origine des enfants adoptés en Suède  [183], avait en effet « (…) largement exprimé ses craintes lorsque la Suède a permis l’adoption par des couples homosexuels. L’on pouvait donc craindre une baisse des adoptions par des couples hétérosexuels en provenance de la Chine en réaction. Toutefois, il ressort clairement des statistiques retenues par la Suède, que cette ouverture n’a eu aucune conséquence  [184]. » Le tableau présenté par Karine Lalieux montre en effet que le nombre d’enfants en provenance de la Chine n’a fait qu’augmenter depuis 2002. Il semble donc que l’ouverture de l’adoption par les couples de même sexe en Suède n’ait pas eu d’incidence sur l’attitude de la Chine.

110Cependant, les données retenues ne satisfont pas les opposants. Ainsi, Charles Michel fait observer que d’autres pays, tels que les Philippines, le Vietnam, la Biélorussie et la Russie, ont envoyé moins d’enfants vers la Suède. Pour lui, « il est donc clair qu’en Suède, les chances des couples hétérosexuels de mener à bien une procédure d’adoption internationale ont diminué considérablement depuis l’introduction de l’adoption pour les couples holebis (…). De nombreux pays d’origine sont en effet particulièrement sceptiques vis-à-vis des pays permettant l’adoption par des couples holebis. (…) Il ne s’agit certainement pas d’un détail  [185]. » L’intervenant redoute donc que la même situation ne se reproduise en Belgique si la loi est acceptée. Devant les données mobilisées par Karine Lalieux, Melchior Wathelet (CDH) pense également qu’on ne peut tirer de conclusion à partir du seul cas de la Suède. Il indique, en outre, que ces chiffres datent seulement de 2003 et ne permettent donc pas assez de recul pour évaluer la situation. Servais Verherstraeten (CD&V) regrette, quant à lui, que l’on ne dispose pas davantage de données chiffrées sur la question et préconise d’attendre avant de légiférer  [186].

111Ces exemples illustrent la manière dont les expertises et les données sollicitées sont utilisées comme ressources dans le débat au service des argumentations. Comme on le voit, le choix des intervenants et des documents est souvent le résultat d’une stratégie politique précise servant à étayer le point de vue défendu. Ainsi, ils peuvent servir des intérêts opposés et donner parfois lieu à des interprétations assez diverses  [187]. Ce sera également le cas pour l’analyse de l’avis rendu par le Conseil d’État (cf. infra). Les multiples tergiversations autour des chiffres donnent d’ailleurs l’occasion à Philippe Monfils de souligner la relativité de ces données et la prudence qui s’impose quant aux conclusions à en tirer : « On peut interpréter les statistiques dans un sens comme dans l’autre. Personne ne nie que l’adoption holebi aura, dans un premier temps, un certain impact sur l’adoption internationale. Mais la société évolue. (…) Chaque pays définit lui-même dans quelle mesure sa législation entend répondre à ces évolutions sociétales  [188]. » Dans cet ordre d’idées, Marie Nagy (Écolo) estime qu’il « n’est pas souhaitable de se comparer avec les États étrangers. Si chacun a sa propre perception des choses, ce n’est pas pour autant que la Belgique devrait se calquer sur les autres  [189]. » Ce qui n’empêche pas les partisans de l’adoption d’invoquer très souvent les modifications législatives qui ont lieu dans d’autres pays en la matière.

112Finalement, l’accès à l’adoption internationale, en n’omettant aucune restriction à cet égard dans la proposition de loi, est accepté lors du vote le 12 juillet 2005.

3.5. LA DISCRIMINATION EN QUESTION

113Les efforts déployés pour la défense des principes d’égalité et de non-discrimination ont, entre autres, abouti à l’élaboration d’une « loi anti-discrimination  [190] ». Promulguée début 2003, elle interdit l’application, dans des situations comparables, d’une « différence de traitement qui manque de justification objective et raisonnable  [191] », et ceci, dans n’importe quel secteur de la vie sociale. En outre, le Centre pour l’égalité des chances et de lutte contre le racisme, dont les missions sont élargies, est chargé de contrôler la mise en œuvre de la loi et de « combattre toute forme de distinction, d’exclusion, de restriction ou de préférence fondée [notamment] sur l’orientation sexuelle ».

114Dans ce contexte, l’existence d’une discrimination vis-à-vis des personnes homosexuelles en matière d’adoption représente un argument supplémentaire pour les défenseurs de l’adoption, sur lequel reposent, au moins en partie, les premières propositions de loi. Cette préoccupation est surtout présente dans les textes du député Guy Swennen et du PS. Ce dernier précise que « le point de départ de [sa] proposition est l’égalité de traitement sur le plan de l’adoption entre couples homosexuels et hétérosexuels. En effet, il n’existe aucune justification objective de l’exclusion ou la discrimination à l’égard des couples homosexuels  [192]. » Les propositions déposées en 2004 visent surtout à supprimer une restriction inscrite de manière explicite dans le droit belge de la famille à l’encontre des couples homosexuels. La proposition de loi Swennen indique ainsi que « la disposition selon laquelle seuls les époux ou cohabitants de sexe différent sont considérés comme adoptants engendre une discrimination inacceptable et est contraire à l’article 11 de la Constitution  [193] ». Comme l’illustrent les propos d’Annelies Storms (SP.A-Spirit), pour les tenants de l’adoption, « il est temps que cela change », étant donné que « l’homosexualité est [désormais] admise dans notre société  [194] ».

115On a vu que l’objectif premier des associations gayes et lesbiennes et de plusieurs secteurs de la société civile est la dénonciation et la suppression de cette discrimination qui, à leurs yeux, entraîne une différence de traitement injuste à l’encontre des demandes d’adoption formulées par des couples de même sexe, mais également, plus implicitement, à l’encontre de toute personne homosexuelle voulant adopter un enfant. Pourtant, en autorisant l’adoption monoparentale, la législation belge permet en principe à toute personne seule de faire une demande d’adoption. Il semble, néanmoins, qu’un candidat qui se déclarerait ouvertement homosexuel, aurait très peu de chances de voir sa demande prise en considération et encore moins d’aboutir, en raison notamment des nombreux préjugés et des mises à l’écart dont il ferait probablement l’objet au cours des procédures d’adoption  [195]. Bien que les demandes d’adoption conjointes soient traitées officiellement par rapport au « sexe » des individus, plus précisément en fonction de l’obligation que le couple soit de « sexe différent », la sélection opérerait davantage par rapport à l’orientation sexuelle des individus. Ainsi, dans les faits, la discrimination ne se limiterait pas aux couples homosexuels mais bien à l’égard de tout candidat qui ferait part de son homosexualité  [196]. Ce problème, porté par les associations, semblait toutefois relever du non-dit lors des débats parlementaires, au cours desquels, par ailleurs, les questions relatives à la sexualité et à l’homophobie ont rarement été abordées en tant que telles.

116Au-delà de cette dénonciation et de ce combat de fond, les propositions de loi émises par les groupes politiques favorables à l’adoption s’attachent surtout à la partie légale et visible du problème, à savoir la référence explicite au sexe des candidats adoptants qui figure dans le Code civil. Afin de justifier la nécessité de supprimer celle-ci, les principes d’égalité et de non-discrimination sont donc régulièrement sollicités et mis en avant par les partisans de l’ouverture de l’adoption, s’appuyant sur la doctrine juridique selon laquelle on doit appliquer l’égalité à des situations identiques. Les tenants de la proposition vont donc tenter de prouver, tout particulièrement au début des débats parlementaires, qu’il n’y a pas, en matière de parentalité, de différence fondamentale entre un couple hétérosexuel et un couple homosexuel, l’important étant l’amour, l’éducation et les soins apportés à l’enfant. On ne peut donc empêcher un couple d’accéder à une institution sur la base du sexe des partenaires, ni même aucun individu en raison de son orientation sexuelle.

117Cependant, l’existence d’une discrimination à l’égard des couples de même sexe est de plus en plus contestée par les adversaires, qui émettent d’abord des réserves, puis nombre de critiques, par rapport à des situations qu’ils n’estiment pas comparables. L’impact de l’argument s’amenuise donc progressivement au fil des réunions et ne permet plus de justifier nécessairement l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe, en particulier, comme on le verra ci-après, après l’avis rendu par le Conseil d’État. Celui-ci considère en effet que la restriction de l’adoption aux couples de même sexe stipulée dans la loi n’apparaît pas discriminatoire. Au fil des séances de la commission Justice, les partisans de l’adoption vont dès lors donner davantage de poids à l’argument de l’intérêt de l’enfant en insistant sur la nécessité de protéger celui-ci juridiquement par la voie institutionnelle la plus complète – l’adoption –, afin notamment qu’il ne soit pas discriminé par rapport aux autres enfants. Ainsi, Karine Lalieux (PS) précise que « si les propositions déposées visent à supprimer une discrimination, elles se situent également dans l’intérêt de l’enfant  [197] ». Ce dernier élément sera de plus en plus mis en avant par la suite.

118Concernant le déroulement du débat parlementaire lui-même, les discussions portant sur la discrimination vont tourner autour de deux questions principales. Dans un premier temps, il s’agit tout d’abord de déterminer sur qui porte la discrimination relative à l’adoption. En effet, celle-ci s’applique-t-elle à l’encontre des couples homosexuels ou bien, et peut-être aussi, à l’égard des enfants élevés par deux personnes de même sexe ? Ensuite, si une différence de traitement est avérée dans l’un ou l’autre cas, voire les deux, l’enjeu devient alors, dans un second temps, d’estimer si celle-ci est justifiée par une raison valable.

119Pour revenir au premier cas de figure, à savoir l’existence d’une discrimination à l’égard des couples homosexuels, les avis divergent énormément sur ce point. En effet, les adversaires estiment qu’il n’y a pas lieu de désigner la situation de la sorte, étant donné que les situations ne sont pas comparables et donc qu’un traitement différencié, dans ce cas, peut être justifié. Pour tenter de le démontrer, le représentant du CDH, Melchior Wathelet, développe un argumentaire qui s’appuie sur plusieurs arrêts juridiques, ainsi que sur l’avis émis par le juriste Jean-Louis Renchon (UCL), entendu en sous-commission Famille. À l’instar de Marie-Christine Marghem (MR), il rappelle d’abord qu’il n’existe pas de « droit à l’adoption ». Ainsi, « l’adoption n’est pas un droit de l’homme au sens de la Convention des droits de l’homme, ni dans le chef de l’adoptant, ni de l’adopté  [198] ». Par conséquent, on ne peut parler de discrimination par rapport à un droit précis qui pourrait être réclamé. De plus, à nouveau en référence à la Convention des droits de l’homme, le « droit à la vie familiale n’implique pas de droit de procéder à une adoption, qui consiste à donner une famille à un enfant et non un enfant à une famille  [199] ». L’intervenant en déduit que « le droit d’être parent n’existe pas  [200] » et l’on ne peut donc exiger d’obtenir un enfant en adoption.

120Ensuite, la question est de déterminer si l’accès à l’adoption peut être considéré comme un droit. En effet, Marie-Christine Marghem (MR) rappelle que « d’autres professeurs [que Renchon] avancent que la discrimination ne concerne pas le droit à l’adoption mais le droit d’accès à l’adoption, à l’institution elle-même. Selon eux, il appartient aux services d’adoption, et non au législateur, d’apprécier de la capacité à adopter des candidats, hétérosexuels ou homosexuels  [201]. » Dans cette logique, le législateur devrait permettre à tout couple, au moins en principe, d’accéder à l’institution au nom du principe d’égalité, l’essentiel étant les qualités éducatives propres à chaque couple. Cependant, Melchior Wathelet, ainsi que d’autres députés, refusent cette vision des choses car « il ne s’agit pas de situations égales : un couple homosexuel est objectivement différent d’un couple hétérosexuel  [202] ». Ils affirment ainsi qu’« ouvrir l’adoption aux couples homosexuels, c’est placer sous une figure juridique identique – l’adoption – des situations de fait comportant des différences essentielles, celles dans lesquelles les adoptants sont de sexes différents et celles dans lesquelles ils sont de même sexe  [203] ». Par la suite, lors de la séance plénière, Melchior Wathelet, ainsi que les députés du Vlaams Belang, ajouteront le fait que, selon eux, l’avis du Conseil d’État, rendu le 7 octobre 2005, renforce ce point de vue et vient contrecarrer l’argument de la discrimination  [204]. L’instance juridictionnelle estime en effet que « le droit positif actuellement en vigueur, en ce qu’il réserve l’adoption aux couples hétérosexuels, ne contredit pas les principes d’égalité et de non-discrimination. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière, c’est en raison de la large marge d’appréciation reconnue aux États en la matière que la différenciation est jugée admissible  [205]. »

121De l’avis de Melchior Wathelet, il ne fait aucun doute que la complémentarité sexuelle du couple parental constitue une condition fondamentale et indispensable à préserver (cf. supra : « Le développement de l’enfant à l’épreuve de la différence des sexes »). Cette vision différentialiste, et par ailleurs essentialiste en ce qu’elle cristallise une différence comme absolue, s’oppose à une logique d’universalité qui pose l’équivalence entre un couple de même sexe et un couple de sexe différent, tous les hommes devant d’abord être considérés de manière égale en égard à leur condition première d’être humain et de citoyen  [206]. Dans cette optique, le critère du sexe ne constitue qu’une différence parmi d’autres et ne motive pas un traitement différencié. Pour Philippe Monfils (MR), « la discrimination envers les couples homosexuels ne se justifie en effet pas par des arguments objectifs : jusqu’à présent, aucune étude n’a démontré que la différence de sexe des parents est une condition objective du développement harmonieux de l’enfant. Il ne semble donc pas qu’il faille parler en la matière de droit [d’avoir des parents de sexe différent], puisque l’homosexualité des parents ne semble pas nuire à l’enfant  [207]. » Vu les vives réactions qu’elle suscite, il y a peut-être lieu de se demander si l’importance prépondérante accordée à la différence des sexes par les opposants ne dissimule toutefois pas un doute plus profond quant à la capacité procréatrice d’un couple de même sexe qui s’opposerait symboliquement à une reproduction sexuelle, représentée comme « naturelle ». Dans cette optique, un couple qui ne saurait pas avoir d’enfant, n’y aurait pas droit. De plus, le fond du problème est peut-être aussi, comme le suggère Philippe Monfils en séance plénière, que la situation, bien que certains se gardent d’en faire part d’après lui, « ne renvoie pas seulement à l’existence d’un père et d’une mère mais aussi à la connotation négative de l’homosexualité elle-même  [208] ». Il s’agirait d’une peur plus profonde, face à l’« homosexuel » considéré comme fondamentalement « différent ».

122Dans le deuxième cas de discrimination envisagé, il s’agit de se pencher sur la situation vécue par les enfants élevés par deux personnes de même sexe et de déterminer si ceux-ci font l’objet d’un traitement différent et injuste au niveau légal par rapport aux enfants élevés au sein d’autres types de familles. Sur ce point, les parlementaires admettent unanimement qu’il est nécessaire de combler le vide juridique, préjudiciable à l’enfant, entourant la relation de ce dernier à l’égard de son deuxième parent. Cette position a d’ailleurs émergé suite à l’avis rendu par la Cour d’arbitrage le 8 octobre 2003 dans le cas d’un enfant élevé par des mères lesbiennes ayant eu recours à l’insémination avec donneur. La cour a jugé que « cet enfant fait l’objet d’un traitement différent sans justification admissible. L’autorité parentale est une institution qui vise en premier lieu à accorder une protection à l’enfant mineur qui, en raison de sa vulnérabilité et de son immaturité physique et mentale, doit recevoir des soins spécifiques et bénéficier d’une protection particulière  [209]. » C’est pourquoi elle recommande de trouver une solution juridique pour pallier l’absence de reconnaissance et de protection relative à la position du deuxième parent. Or, la controverse porte sur ce point précis, les parlementaires ne parvenant pas à s’accorder sur la voie légale à adopter : filiation, parenté sociale ou adoption. Ainsi, Marie-Christine Marghem (MR), bien qu’opposée à l’adoption, précise que « si [la parenté sociale] ressemble à une filiation “édulcorée”, n’incluant que certains droits et devoirs liés à l’autorité parentale, on en revient à la question de la discrimination entre l’enfant ayant accès à l’adoption et un enfant n’y ayant pas accès en raison du sexe des personnes qui l’éduquent  [210]. » Les députés concluront tous que c’est « l’intérêt de l’enfant qui doit primer » mais en maintenant leur position respective quant à la solution à adopter.

123De manière plus générale, en ce qui concerne l’argument de la discrimination, on constate, au fil des réunions, un glissement dans son utilisation par les partisans. En effet, alors qu’au départ, ceux-ci se référaient essentiellement à la situation des couples de même sexe quand il s’agissait de discrimination, ils évoquent, par la suite, principalement la situation des enfants. Ainsi, en séance plénière, Karine Lalieux (PS) déclare que « fondamentalement, le débat s’inscrit évidemment dans la lutte contre les discriminations, mais surtout dans la volonté de soutenir l’intérêt de l’enfant, de reconnaître aux enfants de ces couples une série de droits, évitant par là qu’ils soient eux aussi victimes de discriminations comme ils le sont actuellement  [211] ». Ainsi, l’accent sera constamment mis sur l’intérêt d’enfant dans les argumentations des partisans de l’adoption.

3.6. DANS LA CONTINUITÉ DU MARIAGE ?

124Parmi les propositions de loi en faveur de l’adoption, l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, votée en janvier 2003, est mentionnée expressément dans quatre des textes déposés à la Chambre  [212]. Également évoquée lors des débats parlementaires, elle sert souvent de motif à l’ouverture de l’adoption. Celle-ci est en effet fréquemment associée au mariage et présentée souvent comme une étape logique, allant de pair et faisant suite  [213], à celui-ci. En effet, « dans la mesure où le mariage de personnes de même sexe est désormais permis en Belgique, il n’y a plus de raisons [selon les députés PS] pour ne pas ouvrir l’adoption aux personnes de même sexe  [214] ». Néanmoins, l’argument se révèle problématique, et semble parfois même paradoxal, dans la mesure où les députés le sollicitent selon des logiques différentes ou en lui attribuant des contenus et des significations divergentes. Il importe donc de tenir compte des diverses représentations véhiculées par l’institution et de cerner la perspective dans laquelle se placent les intervenants respectifs.

125Si l’on adopte ainsi la ligne de conduite ayant mené à l’ouverture du mariage, en mettant l’accent sur la défense des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination, il semble en effet logique de poursuivre dans cette voie en faisant de même pour l’adoption. Accorder les mêmes droits à tous les citoyens nécessite en effet de supprimer la restriction inscrite à l’égard des couples de même sexe, comme ce fut le cas pour le mariage. Cette préoccupation est présente dans la proposition du PS et plus implicitement dans celle du député Guy Swennen.

126Cependant, une autre attitude, adoptée surtout par certains députés MR et du CD&V, consiste à envisager le mariage en tenant compte, avant tout, des modifications légales et symboliques dont il a fait l’objet en 2003. L’ouverture du mariage aux couples de même sexe a marqué un tournant important dans l’évolution de l’institution, étant donné que son contenu et sa signification ont été modifiés. En effet, le CD&V, ainsi que Louis Michel (MR), n’avaient accepté, à l’époque, de voter la loi sur le mariage qu’à la condition que celui-ci soit privé de ses effets en matière de filiation et d’adoption pour les couples de même sexe. Ce changement de position n’a néanmoins été possible que grâce, au préalable, à un changement de représentation profond de l’institution. La nouvelle loi, en consacrant une union maritale détachée de la parenté, dissocie alliance et procréation. « Aussi, le mariage constitue-t-il [désormais] la reconnaissance et l’officialisation du lien privilégié existant entre deux personnes  [215] », alors que le Conseil d’État avait conclu, en novembre 2001, qu’il était « le lien et le lieu privilégié [pour une femme] sinon exclusif de la procréation et de l’éducation des enfants  [216] ». Le mariage ne va donc désormais plus de pair avec la fonction procréatrice, au moins sur le plan légal. Cela signifie, entre autres, que le législateur n’est plus tenu de traiter de manière conjointe les institutions du mariage et celles de la parenté. Par conséquent, le fait d’avoir accordé le mariage aux couples homosexuels n’entraîne pas automatiquement la nécessité de leur ouvrir l’adoption.

127Conjointement à cette perspective, certains députés estiment que la question du mariage doit être clairement dissociée de celle de l’adoption au vu des acteurs impliqués, et qu’on ne peut traiter, pour cette raison, de la même manière les situations relevant de la sphère privée entre adultes consentants et celles concernant des enfants, dont l’État est chargé d’assurer la protection. Pour Charles Michel (MR), « sur le fond, il faut rappeler que c’est l’intérêt de l’enfant qui doit primer. Il y a ici une différence fondamentale entre le mariage entre personnes de même sexe, qui sont majeures, et l’adoption d’un enfant, qui met en cause un mineur  [217]. » Cette perspective peut probablement expliquer l’attitude, parfois équivoque, de certains députés qui, à l’instar d’Olivier Maingain (MR), avaient défendu l’ouverture du mariage aux homosexuels mais se montrent toutefois réticents concernant l’accès à l’adoption. Celui-ci précise d’ailleurs que, sur un plan juridique, il ne s’agit pas, selon lui, « de considérer que l’adoption est une conséquence logique de l’admission du mariage pour les couples homosexuels. [En effet,] il serait (…) paradoxal d’avoir plaidé en faveur de l’institution du mariage au bénéfice des couples homosexuels, comme l’on fait la plupart des partisans, en disant que cette question n’était en rien liée à l’établissement de la filiation, et défendre la position inverse aujourd’hui  [218]. » Par conséquent, mettant l’intérêt de l’enfant au centre de son raisonnement, il estime que l’adoption ne constitue pas une solution adéquate pour assurer la protection des enfants élevés par un « beau-parent » ou « deuxième parent » car elle repose sur une démarche volontaire. D’après lui, « il n’y aura dès lors des droits et obligations qui naîtront entre l’enfant et le partenaire de son père ou de sa mère que si cette démarche a été effectuée. Dans le cas contraire, aucun droit, aucune obligation n’est créée, et le problème soulevé par l’arrêt de la Cour d’arbitrage reste entier  [219]. » Pour cette raison, il préconise plutôt une solution permettant d’étendre l’autorité parentale.

128Cette attitude s’oppose par contre aux conceptions du Vlaams Belang qui défend une vision plus conservatrice de la famille, liant intrinsèquement mariage, procréation et parenté. Ainsi, selon Bert Schoofs (VB), « ceux qui sont partisans du mariage homosexuel tout en étant opposés à l’adoption holebi ne font pas preuve d’une attitude logique. Le mariage est, en effet, l’institution dans laquelle sont élevés les enfants  [220]. » Leur priorité est donc de préserver l’institution traditionnelle du mariage et de la famille, en refusant à la fois le mariage et l’adoption aux couples de même sexe  [221].

129Enfin, une autre position consiste à mettre l’accent sur les lacunes de la nouvelle loi sur le mariage et des conséquences préjudiciables qu’elle entraîne pour l’enfant. Ainsi, d’une part, bien que les couples de même sexe puissent se marier, les enfants nés dans ce cadre et élevés par les deux conjoints n’ont qu’un seul de leurs parents reconnu légalement. Ils ne bénéficient donc d’aucune protection légale à l’égard de leur deuxième parent. D’autre part, la nouvelle loi sur le mariage, en privant les couples homosexuels de filiation, a créé deux types de mariage, ce qui n’est pas cohérent d’un point de vue juridique. Pour combler une partie de ces manques, la proposition de loi des députés appartenant au VLD vise à ouvrir l’adoption aux couples de même sexe notamment parce que la loi sur le mariage « règle uniquement les relations entre les époux et non la relation avec les enfants. Toutefois, dans la société d’aujourd’hui, des couples homosexuels élèvent également des enfants, une situation qui, en l’absence de cadre juridique, engendre de nombreux problèmes .(…) Il est donc manifestement temps de légiférer afin de conférer une protection juridique à ces familles  [222]. »

4. LA FIN DU PARCOURS PARLEMENTAIRE

130Durant les mois précédant la rentrée parlementaire, les associations militantes, de part et d’autre, utilisent les dernières semaines avant la séance plénière pour persuader les parlementaires de voter dans leur sens. Plusieurs secteurs de la société civile se sont également positionnés officiellement par rapport à la proposition. Ainsi, la Ligue des familles, le Centre pour l’égalité des chances, les Femmes prévoyantes socialistes, la Ligue des droits de l’homme, la Coordination des ONG pour les droits de l’enfant (dont font partie l’UNICEF et Amnesty international) et le Centre d’action laïque sont favorables à l’ouverture de l’adoption. Par contre, le Gezinsbond, le Conseil consultatif des femmes, le Centre autonome parents École et société (CAPES), etc. marquent leur opposition à celle-ci.

4.1. MANIFESTATIONS

131Au mois de septembre, deux manifestations ont lieu contre l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. La première, appelée « Marche pour la famille » réunit notamment les évêques de Belgique, des élus MR, CDH et CD&V, des enseignants de l’UCL et de la KUL, des personnes connues pour leur appartenance au parti dissident du CDH, les Chrétiens démocrates francophones (CDF), etc. La seconde est davantage liée à des groupes plus proches de l’extrême droite. Elle se tient le 17 septembre 2005 et est organisée par le collectif « Papa, maman et moi », dont le responsable est un activiste d’extrême droite. Durant les semaines qui suivent, se succèdent plusieurs sondages et débats télévisés sur la question, ainsi que de nombreux communiqués de presse, de la part de militants des deux camps mais aussi de membres de la société civile ou d’intervenants politiques qui laissent entendre leur point de vue sur le sujet. Toutefois, ces débats publics confondent souvent les enjeux de la proposition de loi sur l’adoption avec la problématique plus large de l’« homoparentalité ». Par conséquent, les discussions ont souvent tendance à dévier vers le débat concernant le fait même que les homosexuels élèvent des enfants  [223]. Les associations de toutes obédiences entament parallèlement une campagne intense pour convaincre les représentants de la Chambre encore indécis et récolter le soutien de différentes associations. La rentrée parlementaire survient donc dans un climat particulièrement tendu.

4.2. L’AVIS DU CONSEIL D’ÉTAT

132Après le vote sur les amendements du 12 juillet, le président de la Chambre des représentants, Herman De Croo, avait soumis la proposition de loi Swennen et les amendements y afférents pour avis à la section de législation du Conseil d’État. Le 7 octobre 2005, celui-ci rend son avis sur les questions de l’adoption et des formes de « parenté sociale  [224] ». Contrairement à l’avis qu’il avait remis sur le mariage  [225], il ne se prononce dans ce dossier que sur l’aspect juridique de la question, et non sur son fond éthique. Outre les divers commentaires et réserves qu’il émet à l’encontre de la maternité pour autrui et de certains aspects relatifs aux formes de « parenté sociale » proposées, le Conseil d’État estime que « le droit positif actuellement en vigueur, en ce qu’il réserve l’adoption aux couples hétérosexuels, ne contredit pas les principes d’égalité et de non-discrimination. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en la matière, c’est en raison de la large marge d’appréciation reconnue aux États en la matière que la différenciation est jugée admissible  [226]. » Il considère ainsi que la loi de l’adoption du 24 avril 2003 n’est pas discriminatoire. Toutefois, il indique également qu’il n’y a pas d’obstacle juridique à l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe et que c’est un choix politique qui doit désormais être fait. Cependant, étant donné que « la différence de situation porte sur une donnée importante de la nature même de la conception de la vie et de l’histoire de la société humaine, à savoir l’origine bisexuée de l’enfant et de son appartenance de principe à un ménage de même nature », le Conseil d’État estime que la solution qui sera choisie devra faire l’objet d’une justification particulièrement exigeante. En d’autres termes, si le législateur décide d’ouvrir l’adoption aux couples de même sexe en mettant ces derniers sur pied d’égalité avec les couples de sexe différent  [227], il doit justifier expressément ses raisons d’agir de la sorte.

4.3. LE VOTE GLOBAL EN COMMISSION DE LA JUSTICE

133La commission de la Justice reprend ses travaux en novembre 2005. Suite à l’avis rendu par le Conseil d’État, elle décide de consacrer une partie de la séance du 9 novembre, destinée au vote global sur les amendements, à une discussion préalable sur l’avis du Conseil d’État ainsi que sur un amendement déposé par Olivier Maingain et Daniel Bacquelaine qui vise à limiter la portée de la proposition de loi aux adoptions nationales  [228]. L’examen de l’avis du Conseil d’État donne lieu à une suite d’échanges où chaque intervenant interprète l’avis dans le sens qui convient à sa cause. Finalement, comme Servais Verherstraeten le soulignera, « les questions posées par le Conseil d’État au sujet de la proposition de loi à l’examen débouchent sur davantage de questions que de réponses  [229] ».

134L’amendemant d’Olivier Maingain et Daniel Bacquelaine est rejeté  [230] et le vote sur l'ensemble des amendements confirme le résultat obtenu en juin. La proposition de loi Swennen amendée est adoptée par 9 voix contre 7  [231]. Très élémentaire, le texte initial élaboré par Guy Swennen, a été complété à la suite de plusieurs amendements déposés par les partisans de l’adoption  [232]. Le nouveau texte ne comporte que des modifications techniques. Outre le fait de supprimer les mots « de sexe différent » à l’article 343 inséré dans le Code civil par la loi programme du 27 décembre 2004 et dans la loi du 24 avril 2003, il a été également nécessaire de modifier les articles 353-1, 2,3,4bis, 5 et 356-2 du Code civil, pour régler l’attribution du nom de l’enfant adopté. Ainsi, lors d’une adoption plénière – conjointe par un couple de même sexe ou par le ou la partenaire de même sexe du parent légal –, l’adopté prendra le nom de l’une des deux personnes, après que celles-ci auront consigné ce choix de commun accord devant un juge.

135En résumé, le texte final  [233], qui résulte du vote global sur le texte tel qu’amendé, permet d’une part, à des couples de même sexe de faire une demande conjointe d’adoption, en Belgique ou à l’étranger, et d’autre part, à une personne d’adopter l’enfant de son partenaire de même sexe.

4.4. LE VOTE EN SÉANCE PLÉNIÈRE DE LA CHAMBRE

136Plusieurs fois reportée, la proposition de loi visant à ouvrir l’adoption aux couples de même sexe arrive finalement en séance plénière à la Chambre le 1er décembre 2005, par ailleurs Journée mondiale de lutte contre le sida  [234]. Les députés, assaillis depuis deux mois de sollicitations de la part des militants des deux camps, sont amenés à se prononcer sur l’issue de la proposition. Dans une atmosphère fébrile, pas moins de 21 députés parmi les 146 présents  [235], vont prendre la parole. Outre les chefs de groupes, il s’agit principalement de députés libéraux francophones, qui occupent une grande partie d’une discussion, où alternent déclarations de principe, arguments juridiques et envolées lyriques. À l’issue de ce marathon de plaidoyers s’étalant sur plus de six heures, le vote intervient enfin à minuit quart, sous l’oeil attentif et inquiet des quelques dizaines de personnes des deux camps venues suivre les débats  [236]. La proposition de loi est finalement adoptée par 77 voix contre 66. Il y eut 7 abstentions. La majorité est plus importante que celle qui était espérée par les partisans de l’adoption.

tableau im2
Partis Pour Contre Abstention PS 24 1 MR 5 18 2 CDH 7 Écolo 4 FN 1 VLD 20 2 CD&V 19 2 Vlaams Belang 17 SP.A-Spirit 23 N-VA 1 Total 77 62 7

137Tous les membres du PS ont voté en faveur de la proposition (24 voix), à l’exception de Mohammed Boukourna qui s’est abstenu. Les quatre députés écologistes francophones ont voté pour. Le MR a émis un vote partagé, majoritairement contre (18 voix). Cinq députés libéraux francophones ont tout de même voté en faveur de l’adoption : Philippe Monfils, Olivier Chastel, Valérie De Bue, Richard Fournaux et Alain Courtois. Daniel Bacquelaine et Hervé Hasquin se sont quant à eux abstenus. Du côté francophone, on note encore les 7 voix contre du groupe CDH et la voix contre du député FN.

138Du côté néerlandophone, l’ensemble du groupe SP.A-Spirit a voté pour, de même que le député N-VA. Dans les rangs du VLD, 20 députés ont approuvé la proposition de loi, tandis que Herman De Croo et Luk Van Biesen s’abstenaient. Le groupe CD&V a voté contre (19 voix) à l’exception de Jef Van den Bergh et Liesbeth Van der Auwera, qui se sont abstenus. Tous les membres Vlaams Belang présents ont voté contre (19 voix).

139Les argumentations développées par les différents intervenants en séance plénière permettent de faire le bilan des positions respectives et de revenir sur les éléments essentiels avancés lors des débats. Il ne s’agira pas ici de présenter les opinions individuelles, mais plutôt les lignes de force de l’un et l’autre camp, en tentant de relever les disparités entre certains députés ou groupes politiques. Les positions plus particulières de certains intervenants seront aussi mises en évidence.

4.4.1. Les partisans de l’adoption

140Globalement, les partisans défendent les mêmes types d’éléments, même si on peut distinguer quelques variantes selon les individus. Ainsi, on constate d’emblée que l’« intérêt » de l’enfant figure au centre de tous les discours, comme l’illustrent ces propos du député Guy Swennen (SP.A-Spirit), « l’intérêt de l’enfant commande qu’il ait deux parents à part entière, avec des droits et des devoirs. Le législateur doit offrir à tous les enfants une protection et une sécurité juridiques maximales. Seule l’adoption peut générer un véritable lien juridique entre les parents homosexuels et leur enfant. De prétendues solutions comme la parenté sociale ou la coparenté ne le permettent pas car elles n’induisent pas de droits en matière de succession et, en outre, le lien juridique disparaît lorsque l’enfant devient majeur  [237]. »

141En outre, même si la famille nucléaire demeure souvent le modèle de référence, les groupes socialistes flamand et francophone mettent l’accent sur la diversité des formes familiales actuelles et la nécessité que toutes soient reconnues et protégées au même titre, afin de ne pas créer de discrimination entre les enfants  [238]. Il importe donc de reconnaître la réalité des enfants élevés au quotidien par deux personnes de même sexe, d’autant plus qu’aucune étude scientifique, parmi les dizaines réalisées, ne montre que ces enfants sont moins heureux ou se développent différemment de ceux élevés dans d’autres types de familles. Dans les plaidoyers, on constate ainsi un déplacement de l’argument de la discrimination qui avait principalement trait, au début des débats, aux couples homosexuels. Désormais, les principes d’égalité et de non-discrimination sont plutôt employés pour désigner les situations préjudiciables dans lesquelles risquent de se trouver les enfants dont seul un des deux parents est reconnu légalement  [239]. Ainsi, bien qu’Écolo ait toujours lutté contre les discriminations à l’égard des gays et lesbiennes, Zoé Genot précise que, dans ce dossier, « il n’a jamais été question de droit à l’enfant, de discriminations inacceptables entre couples. Il est question du droit à l’enfant à avoir une famille, du droit des enfants à ne pas être discriminés  [240]. » La défense des droits des homosexuels n’est par conséquent plus évoquée qu’implicitement, comme une conséquence complémentaire de la loi qui « contribuera à ce que notre société soit plus tolérante envers les minorités [et que les homosexuels] soient traités sur pied d’égalité avec les autres  [241] ». Le VLD avait d’ailleurs toujours distingué ce combat de la proposition relative à l’adoption, « l’essence de ce débat et l’idée de départ du [parti] ne portant pas sur la suppression d’une discrimination mais sur la prise en compte de l’intérêt de l’enfant  [242] ».

142Par ailleurs, les partisans de cette mesure estiment que le législateur, en démocratie, doit reconnaître, pour « accompagner, par la loi, l’évolution de notre société, lorsque celle-ci risque d’entraîner des inégalités de droit. Pour ce faire, il est de notre devoir et de notre responsabilité de gommer toutes les zones de non-droit qui vont à l’encontre de nos valeurs et des droits fondamentaux  [243]. » Karine Lalieux (PS) inscrit ainsi la défense de l’ouverture de l’adoption dans la « modernité philosophique », où priment les valeurs de raison, d’objectivité, de liberté, de responsabilité et d’autonomie  [244]. Pour certains députés, tels que Philippe Monfils (MR), le rôle du législateur est d’« aller de l’avant  [245] » et d’être précurseur par rapport aux pratiques sociales. C’est également l’avis de Stijn Bex (SP.A-Spirit).

143Certains députés dénoncent également l’hypocrisie du système législatif en vigueur, qui permet à une personne seule d’avoir un enfant mais ne veut pas reconnaître deux parents qui élèvent ensemble un enfant, en raison formellement de leur sexe, mais plus implicitement de leur orientation sexuelle. Sur ce point, Karine Lalieux (PS) reproche d’ailleurs au CDH de défendre avec force le fait d’avoir deux parents de sexe différent, alors que ce parti avait accepté l’adoption monoparentale sous la législature précédente  [246].

144Les partisans de l’ouverture de l’adoption s’attachent enfin à réfuter plusieurs contre-arguments avancés par les adversaires de cette mesure. Selon eux, il n’y a en effet pas lieu de parler d’un quelconque empressement dans le débat, vu le nombre et l’importance des discussions et des auditions menées depuis 2001. En ce qui concerne le développement de l’enfant, ils insistent également sur le fait que ce n’est pas le sexe des parents qui importe mais bien l’amour et les soins dont ils entourent l’enfant. Enfin, sur la question de l’adoption internationale, le VLD, bien qu’il s’y soit opposé au départ, rejoint finalement les autres partis en faveur de la proposition de loi pour permettre aux couples de même sexe d’adopter à l’étranger, afin de ne pas inscrire de traitement différencié dans la loi à l’égard des couples homosexuels, et ceci, d’autant plus qu’un nombre croissant de pays vont dans ce sens.

145Pour terminer ce tour d’horizon des positions, il convient de souligner la position du député libéral Philippe Monfils, qui tranche avec ses positions lors du débat sur le mariage et paraît à ce titre surprenante. En effet, alors qu’il s’était opposé à l’ouverture du mariage aux couples homosexuels, il apparaît désormais en tant que fervent défenseur de l’adoption, malgré l’opposition de la majorité de son parti. Faisant prévaloir la liberté de vote du MR en matière éthique, il n’hésite d’ailleurs pas à s’opposer ouvertement à certains députés de son groupe. Il critique tout particulièrement  [247] l’usage inapproprié, selon lui, du principe de précaution auquel recourent fréquemment les adversaires et accuse ceux-ci de préconiser une solution « attentiste » plutôt qu’une prise de décision favorisant une attitude prudente à travers une procédure d’adoption stricte et une législation très contraignante  [248]. Ainsi, pour cet élu, « aujourd’hui, comme hier, le principe de précaution ne peut être brandi pour ne rien faire, sinon il n’y aurait jamais eu d’avancées dans le domaine éthique  [249] ». Inscrivant son combat dans la lignée des progrès éthiques conquis et à venir, il illustre en outre ses propos en évoquant le cas de la loi sur l’euthanasie. Toutefois, il est surprenant de constater que Philippe Monfils avait sollicité le même exemple lors des débats sur le mariage, afin de demander des discussions supplémentaires et justifier son abstention  [250].

4.4.2. Les adversaires

146Bien que les adversaires de la loi reconnaissent la nécessité de réglementer la relation existante entre un enfant et les deux personnes de même sexe qui l’élèvent, ils refusent de recourir à l’adoption pour y parvenir. En effet, cette solution, en ouvrant la voie à des adoptions futures, modifierait le système de filiation existant en introduisant la possibilité de deux parents légaux du même sexe. Comme l’explique ainsi Melchior Wathelet, « l’adoption va beaucoup plus loin que le fait de sécuriser des liens familiaux établis puisqu’elle organise, pour l’avenir de l’enfant, une filiation homosexuelle. (…) Elle définit l’identité même de la personne et de cet enfant qui va être amené à grandir  [251]. » Ils acceptent donc de régler uniquement les situations « de fait » déjà existantes, mais par des solutions alternatives de « parenté sociale ». Celles-ci laissent en effet le système de filiation intact et concerneraient, selon eux, un nombre plus important d’enfants. À cette fin, le CDH et le CD&V préconisent la création d’une nouvelle institution juridique de « parenté sociale » et, le MR, l’élargissement de la tutelle.

147Ensuite, les opposants entendent défendre « le droit de l’enfant » plutôt que « le droit à l’enfant », estimant que l’ouverture de l’adoption accomplirait davantage un « désir d’enfant » de la part d’adultes « égoïstes » plutôt que la poursuite de l’« intérêt de l’enfant ». Dans cette perspective, ils refusent que l’ouverture de l’adoption soit une manière de lever une discrimination, étant donné qu’ils ne jugent pas discriminatoire de limiter l’accès à l’adoption aux couples de même sexe.

148En outre, la plupart des opposants  [252] critiquent les études réalisées auprès d’enfants élevés par deux parents de même sexe, en tentant de mettre à mal la validité des résultats et les méthodologies utilisées. Ils estiment qu’on ne dispose pas encore de recul suffisant en la matière pour évaluer les conséquences sur les enfants élevés dans ce cadre. Face à cette incertitude, les adversaires mettent constamment en avant le principe de précaution pour justifier le fait de s’abstenir.

149De façon unanime, les opposants rejettent également l’ouverture de l’institution à un niveau international, étant donné que les pays d’origine, généralement opposés à l’homosexualité, pourraient sanctionner les candidats hétérosexuels en refusant de donner en adoption des enfants aux pays qui autoriseraient l’adoption par des couples de même sexe. Ainsi, si Charles Michel (MR) admet « qu’il ne s’agit pas de se laisser dicter par d’autres pays les valeurs fondamentales, les repères centraux sur lesquels nous apportons, dans notre cadre démocratique, les réponses aux questions éthiques qui nous sont posées  [253] », il estime néanmoins que le législateur doit tenir compte des effets préjudiciables que pourrait engendrer le passage de la loi. Il faut éviter, comme avance aussi le Vlaams Belang, que les couples hétérosexuels ne soient éventuellement discriminés  [254]. Vu qu’un couple de même sexe aura peu de possibilités concrètes d’adopter un enfant à l’étranger, les opposants ne voient pas non plus la nécessité de donner cette portée à la loi.

Le CDH

150Dès le passage en sous-commission du Droit de la famille, les sociaux-chrétiens francophones ont manifesté leur opposition à l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe, considérant, au départ, ce dossier comme « subsidiaire » par rapport à celui de la « parentalité sociale ». Melchior Wathelet, porte-parole du groupe  [255] tout au long des débats, ouvre ainsi la séance plénière de la Chambre par un long exposé des différents éléments justifiant leur refus. Outre les arguments déjà cités, le CDH estime surtout qu’il est essentiel de préserver un système de filiation fondé sur la différence des sexes, afin de refléter de manière vraisemblable la reproduction sexuelle et biologique. À défaut, les repères identitaires de l’enfant, dont les deux parents légaux seraient de même sexe, seraient profondément troublés. S’inspirant pour une large part des propos du juriste Jean-Louis Renchon (UCL), Melchior Wathelet déclare ainsi que « vouloir faire adopter un enfant par deux personnes de même sexe, (…) cela revient à nier la différence des sexes dans la définition de l’identité, dans l’état civil et dans la filiation. Or, cette différence, cette altérité, sont fondamentales. Cette différence doit être respectée jusqu’y compris dans son cadre juridique qui reconnaît et ose parler de cette différence  [256]. » Dès lors, considérant « qu’il n’est pas nécessaire – et que ce serait même contraire à l’intérêt de l’enfant – de recourir à l’adoption  [257] », le CDH propose plutôt la création d’une nouvelle institution juridique, la « parentalité sociale », pour éviter la création d’un lien de filiation à l’égard de deux personnes de même sexe.

151De plus, Melchior Wathelet, invoque la théorie psychanalytique œdipienne pour justifier le besoin de l’enfant pour son développement harmonieux, d’un référent masculin et d’un référent féminin, incarnés respectivement par un homme et une femme. Marie-Christine Maghem (MR) partage également cette perspective et fera plusieurs fois appel à la psychanalyse dans son argumentaire  [258]. Par conséquent, même si les deux intervenants conçoivent que cela n’est pas insurmontable et que « le psychisme humain est capable d’adaptation  [259] », un couple de même sexe, « ne pourra[it] pas toujours, en tout cas dans une moindre mesure, offrir à l’enfant ce que ce couple n’a pas, à savoir cette complémentarité des sexes. À ce niveau il y a toujours un manque  [260]. » Cet argument peut toutefois surprendre lorsque l’on sait que ce groupe politique propose des solutions de « parenté sociale », acceptant donc implicitement le fait qu’un enfant soit élevé par deux personnes du même sexe.

Les députés MR opposés à l’adoption

152La liberté de vote étant de mise dans le parti, on constate qu’il y a au moins autant d’avis MR que de personnes qui ont pris la parole. Seules les positions marquantes des députés refusant l’adoption seront toutefois abordées ici. Contrairement aux membres de la majorité gouvernementale, la plupart des élus MR se sont opposés à la proposition de loi. Toutefois, à l’inverse du CDH, l’argumentation que ceux-ci développent fait très peu allusion, à l’exception de Marie-Christine Marghem, à la différence des sexes comme élément fondateur du couple parental. Contrairement à ce qu’affirme Marie-Christine Marghem, Olivier Maingain estime même qu’il ne devrait pas s’agir d’un argument convaincant dans le chef du législateur, étant donné que l’important réside dans la reconnaissance de « la diversité des réalités familiales et des vécus des enfants  [261] ».

153D’aucuns, à l’instar de Charles Michel, persévèrent à dire que le débat a été mené avec trop d’empressement et qu’il ne remporte pas suffisamment le consentement social de la société civile. Celui-ci estime par ailleurs qu’il faut faire preuve de la plus grande prudence sur une matière qui touche les enfants et, qu’en l’absence de certitude, il vaut mieux s’abstenir. Il mobilise à cet égard très souvent le principe de précaution.

154Quant à Olivier Maingain (FDF), bien que ce dernier ait défendu l’ouverture du mariage avec ferveur, il refuse la solution de l’adoption pour pallier le vide juridique entourant certains enfants, dont font cas la Cour d’arbitrage et l’article 3 de la Convention relative aux droits de l’enfant. Cette solution ne répond pas, d’après lui, de manière suffisante et adéquate au problème assigné par ces instances judiciaires car l’adoption requiert au préalable une démarche volontaire. Par conséquent, elle ne garantit pas systématiquement que les enfants puissent bénéficier d’une protection légale à l’égard de leurs deux parents. S’appuyant sur cet argument d’ordre juridique, il refuse donc le texte proposé qu’il considère comme « une proposition de loi de passion et non de raison, une proposition de loi de revendication et non de protection  [262] ».

Le Vlaams Belang

155Contrairement aux autres partis flamands, le Vlaams Belang s’oppose avec véhémence, dès le départ, à l’ouverture de l’adoption, dans la mesure où celle-ci toucherait et remettrait en question les représentations et les fondements de la famille traditionnelle, mise à mal, d’après Bert Schoofs, à travers ces changements législatifs. Bien qu’il déclare n’être opposé à aucune forme de famille, le Vlaams Belang avance des « objections de principe, éthiques et idéologiques » et persiste « à dire que le ménage traditionnel offre les meilleures garanties pour l’éducation des enfants. [Ainsi,] le droit doit protéger ce modèle familial et la société doit le défendre. C’est par conséquent le seul modèle qui doive faire l’objet de normes. (…) Et point n’est besoin d’une étude pour constater que la famille traditionnelle, qui découle biologiquement de l’ordre naturel, est pour les enfants le meilleur des modèles  [263] ». Le parti défend ainsi une vision essentialiste et naturaliste, à la fois de la famille, de la sexualité et des rapports de genre, en associant intrinsèquement procréation, conjugalité et différence des sexes. Cette perspective d’un modèle familial unique, scellé par le mariage et calqué sur la reproduction biologique, découlerait ainsi, selon ces députés, d’un ordre immuable de la complémentarité des sexes que le droit traduirait. Cette argumentation s’inscrit dans la continuité des objections déjà émises lors du débat relatif au mariage  [264].

156Bien qu’il ne se prononce pas sur la « parenté sociale », le Vlaams Belang reprend néanmoins les différents arguments développés par les partis opposés à l’ouverture de l’adoption et tentent à de nombreuses reprises de retarder l’avancée du débat. Il se réfère en outre fréquemment à l’avis émis par le Conseil d’Etat pour insister sur la « différence objective » existant entre couples de même sexe et couples de sexe différent. Les députés s’abstiennent toutefois de s’opposer ouvertement à l’homosexualité des individus, considérant que celle-ci doit demeurer une question d’ordre privé.

157Enfin, lors de la séance plénière, le Vlaams Belang profite une nouvelle fois des débats pour, d’une part, attaquer le gouvernement Verhofstadt II, qui devrait « traiter de problèmes de société plus urgents, plutôt que cette énième folie de la coalition violette  [265] » et, d’autre part, condamner le progressisme et les « intentions totalement équivoques » du CD&V, qui aurait « gommé de [son] programme les normes et les valeurs traditionnelles, ne conservant plus guère aujourd’hui que de vagues dénominateurs, tels que “le respect” et “la réalité de la société”  [266] ».

Les tergiversations du CD&V

158Au cours des débats parlementaires, les chrétiens-démocrates flamands hésitent à plusieurs reprises quant à la position à défendre sur le dossier. Leurs changements d’attitude successifs s’expliquent sans doute par ce qui a constitué la préoccupation initiale et constante du parti, à savoir la nécessité de trouver une solution juridique adaptée pour protéger l’enfant, dont seule une des personnes qui l’élèvent est reconnue par la loi. C’est d’ailleurs dans cette perspective qu’une première proposition de « parenté sociale » avait été déposée en novembre 2003, et réintroduite sous la législature suivante. Toutefois, lorsque la possibilité d’envisager la parenté sociale fut écartée au début de la commission Justice, les députés CD&V se positionnent, à la surprise de tous, en faveur de l’adoption, seul moyen restant pour répondre à leurs objectifs de départ  [267]. Le 6 juin 2005, Liesbeth Van der Auwera déclare ainsi que « l’instauration de l’adoption par des couples homosexuels confirme la réalité sociale et comble un vide juridique. (…) Un enfant peut donc être mieux protégé lorsque, juridiquement, il a deux parents que lorsque, aux yeux de la loi, il n’a qu’un seul parent, alors qu’en réalité, il est élevé par deux personnes. Grâce à l’adoption par des couples homosexuels, l’enfant se sait assuré d’avoir deux parents ayant des droits et obligations à part entière et est intégré dans deux structures familiales  [268]. » La députée précise cependant que « le groupe CD&V reste convaincu qu’il convient en premier lieu d’inscrire la parentalité sociale dans un cadre juridique ; cependant, il contribuera de manière constructive à rendre possible l’adoption par des personnes du même sexe  [269] ». Trois semaines plus tard, sous l’influence de ses rangs conservateurs, le parti fait volte-face en proposant un amendement de « co-parenté » comme alternative à l’adoption. Les raisons évoquées sont semblables à celles qui avaient déjà poussé le parti à accepter le mariage en 2003, tout en refusant d’en reconnaître les droits en matière de parenté : d’une part, ne pas modifier le système de filiation, et d’autre part, être en accord avec l’assise sociale, qui ne semble pas être encore prête d’après le groupe politique. Comme le résume Servais Verherstraeten, « le droit de la famille doit être modifié en fonction des évolutions de la société et non l’inverse. On ne peut modifier ce droit et attendre, peut-être de nombreuses années, que les mentalités changent  [270]. » Dans cette perspective, la fonction sociale du droit doit donc se limiter à encadrer la réalité sociale sans tenter de la précéder. En outre, si le CD&V ne considère plus le mariage comme indissociable de la procréation, il estime néanmoins implicitement que la filiation doit se référer au modèle de la reproduction biologique fondé sur la différence sexuelle, que ne peut refléter la parenté à l’égard de deux personnes de même sexe.

4.5. L’ÉVOCATION AU SÉNAT

159Le Sénat ayant exercé son droit d’évocation, le projet de loi lui est transmis le 2 décembre 2005. Le 1er février, il est inscrit à l’ordre du jour de la commission de la Justice. Luc Willems (VLD, ex CD&V) est désigné comme rapporteur.

160La commission décide de procéder à de nouvelles auditions. Sont ainsi successivement entendus : Jean-Paul Mathot (pédopsychiatre), Jean-François Taymans (notaire), Philippe Kinoo (cliniques universitaires Saint-Luc), Alfons Heyvaert (ancien professeur aux Universitaire Instellingen Antwerpen), Françoise Pastor (coordinatrice d’un organisme d’adoption internationale), Diane Drory (psychologue), Katrien Vanfraussen (chercheuse à la Vrije Universiteit Brussel) et Nicolas Journet (sociologue).

161Des amendements sont déposés par des sénateurs CDH, MR et CD&V qui souhaitent reprendre les propositions de leurs collègues députés et remplacer l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe par des dispositions concernant la parenté sociale.

162Signalons l’amendement déposé le 23 février 2006 par quatre sénateurs MR (Christine Defraigne, Berni Collas, Jacques Brotchi et Alain Destexhe) et trois sénateurs VLD (Patrik Vankrunkelsven, Jacques Germeaux et Annemie Van de Casteele) visant à étendre le concept d'adoption prévu par le Code civil aux époux et cohabitants de sexe identique, mais en le limitant aux seuls cas où l'adopté est un descendant d'un des époux ou des cohabitants. Dans les commentaires le terme descendant se réfère uniquement à la filiation biologique  [271].

163La commission adopte le texte sans amendement le 7 mars 2006.

164Après une prolongation du délai d’évocation, le texte est examiné en séance plénière du Sénat le 20 avril 2006. L’amendement Defraigne et consorts est rejeté de justesse : 34 sénateurs ont voté pour et 34 contre. Annemie Van de Casteele s'est abstenue voulant éviter la « lourde responsabilité » d'un retour du texte à la Chambre  [272].

165Finalement, le projet de loi non amendé est adopté sur un vote très serré de 34 voix pour, 33 contre et 2 abstentions. L'ensemble des sénateurs des groupes PS, SP.A-Spirit et Écolo ainsi que huit sénateurs VLD ont voté pour, deux sénateurs VLD (Annemie Van de Casteele et Patrik Vankrunkelsven) se sont abstenus, et l'ensemble des groupes MR, CDH, CD&V, VB, FN ainsi que Hugo Coveliers (indépendant) ont voté contre. Les sénateurs Marc Wilmots (MR) et Pierre Chevalier (VLD) étaient absents.

CONCLUSION

166Le 20 avril 2006, cinq mois après le vote à la Chambre, la proposition de loi Swennen est adoptée au Sénat. Dès lors, l’accès à l’adoption, en tant que couple ou co-parent, devient possible pour les personnes homosexuelles. Cela signifie que, d’une part, un couple de même sexe peut dorénavant, au terme d’une procédure exigeante, identique pour tous, adopter conjointement un enfant, né en Belgique ou venant de l’étranger. Cette dernière possibilité s’avère toutefois peu probable avant un certain temps, vu la réticence de nombreux pays d’origine à l’égard de l’homosexualité et de leurs restrictions émises dans ce sens. D’autre part, la loi permet également à une personne d’adopter l’enfant de son conjoint de même sexe et de devenir ainsi légalement le deuxième parent de l’enfant. Désormais, l’adoption en Belgique est donc ouverte à la fois aux personnes célibataires et à tout couple marié ou cohabitant, indépendamment du sexe ou de l’orientation sexuelle des partenaires.

167En posant un regard rétrospectif sur l’ensemble des débats parlementaires, on s’aperçoit qu’un élément central est à l’origine de plusieurs tensions et désaccords. Il s’agit de l’association des dossiers relatifs à l’adoption et à la parenté sociale. En effet, l’amalgame des enjeux, en sous-commission du Droit de la famille de la Chambre et lors de la discussion sur les amendements en commission de la Justice, a créé nombre de confusions et d’hésitations chez les parlementaires quant à la position et à la solution à adopter. Le débat a ainsi constamment oscillé entre la nécessité de reconnaître légalement les situations existantes de « parentalité » d’une personne à l’égard de l’enfant de son partenaire et la possibilité d’ouvrir plus largement l’adoption aux couples de même sexe, et donc d’étendre la mesure à des adoptions futures d’enfants abandonnés. Ce point d’équivoque majeur a souvent jeté le trouble et suscité la polémique parmi les députés, divisés ou hésitants à propos de la « parenté sociale ». Celle-ci a été présentée, successivement ou simultanément, comme une mesure intégrée, complémentaire ou alternative à celle de l’adoption. La signification et la portée des arguments variant selon les situations visées par les intervenants, cette superposition des travaux a parfois semé une certaine confusion au sein des discussions. Les députés passent ainsi fréquemment d’un objectif à l’autre, d’un registre à l’autre, selon qu’il s’agisse de défendre la reconnaissance de réalités familiales existantes ou de lutter contre les discriminations. On ne peut donc comprendre et interpréter les argumentations qu’en cernant et distinguant clairement les deux enjeux.

168Par ailleurs, la convergence de ces demandes, se confondant ou s’évinçant par moments, introduit une certaine tension par rapport à la fonction sociale attribuée au droit. En effet, au gré des débats et des interventions, les parlementaires semblent hésiter, voire diverger, sur le rôle présumé du législateur au sein de la société. Ainsi, si la plupart s’accordent sur le fait que le législateur doit rencontrer la demande sociale en reconnaissant les situations existantes, telles que la « beau-parentalité » ou la « coparentalité », d’aucuns estiment que l’ouverture de l’adoption va trop loin et que le droit doit se limiter à encadrer les pratiques sociales et à poser des repères stables à la société. Pour les plus conservateurs, ces normes législatives doivent par ailleurs se calquer sur des modèles connus, tirés de la nature ou de certains principes moraux. D’autres se retranchent sur le principe de précaution pour refuser d’aller de l’avant sur des sujets présentant une certaine incertitude. Dans les discours tenus par les partisans de l’adoption, cette tension se ressent également de manière importante. Si la plupart des parlementaires restent assez réservés sur la question en se tenant principalement à défendre la nécessité de régler les situations « de fait », quelques-uns insistent davantage sur le rôle éclairant du législateur. Ils estiment ainsi que le législateur doit parfois aller au-delà de l’avis de la population, sur des situations qu’il juge amenées à survenir à l’avenir, quitte à précéder les pratiques des acteurs et à devoir se confronter aux a priori présents au sein de l’opinion publique. Cette logique serait particulièrement de mise dans les matières éthiques, où priment souvent la méfiance et les doutes sur des situations peu ou mal connues au sein de la société civile.

169Au-delà du fait de permettre aux couples de même sexe d’accéder à l’adoption, la nouvelle loi représente surtout un pas emblématique en faveur de la reconnaissance de la diversité des formes familiales contemporaines. Plutôt que de laisser celles-ci dans l’ombre et de ne considérer que certains types de familles, le législateur a décidé d’accepter et de s’adapter aux situations existantes, en les protégeant de manière égale et neutre. Il a mis de ce fait les valeurs de multiplicité, de liberté de choix et d’égalité de traitement au centre de ses décisions en élaborant une législation davantage en adéquation avec la réalité des acteurs. En agissant de la sorte, le législateur contribue à l’acceptation sociale des pratiques et des situations vécues, comme celles entourant l’homoparentalité, en leur permettant d’acquérir une légitimité juridique et symbolique par le biais du droit. Il permet en outre aux individus de choisir dans une gamme de possibilités plus étendue, en autorisant de nouvelles situations (par exemple, l’adoption par un couple d’hommes gays). Ce faisant, il devient facteur de changement au sein de la société en participant à la modification des représentations sociales relatives notamment au genre, à l’orientation sexuelle et à la famille.

170Si la volonté du législateur est toutefois de poursuivre dans cette lignée en matière familiale, il lui reste alors encore à remédier à des questions telles que la parenté sociale, la filiation, les familles recomposées, les divorces, ainsi que bien d’autres sujets tout aussi délicats et complexes, qui promettent de futurs débats passionnés.

171Par conséquent, la portée des questions abordées à travers le débat sur l’ouverture de l’adoption par des couples de même sexe dépasse largement la défense des intérêts d’une minorité. Par les enjeux abordés, le thème interpelle tout citoyen et l’interroge dans son rapport et ses attentes à l’égard de cette institution fondamentale qu’est la famille. À la jonction du privé et du public, la famille se dévoile ainsi comme un vaste chantier en évolution permanente, que les acteurs, munis des outils disponibles, sont amenés à perpétuellement repenser, redéfinir et reconstruire.

17225 avril 2006


ANNEXE

1. PROPOSITION DE LOI MODIFIANT LE CODE CIVIL AFIN D’AUTORISER L’ADOPTION PAR DES COUPLES HOMOSEXUELS DÉPOSÉE PAR GUY SWENNEN (SP.A-SPIRIT )

173Chambre, Doc. Parl. 51 0664/001,7 janvier 2004.

174Article 1er La présente loi règle une matière visée à l’article 78 de la Constitution.

175Art. 2

176À l’article 343, § 1er, du Code civil, remplacé par la loi du 24 avril 2003, sont apportées les modifications suivantes :
1/ au a), les mots « de sexe différent » sont chaque fois supprimés ;

1772/ au b), les mots « de sexe différent » sont supprimés.

2. PROPOSITION DE LOI MODIFIANT LE CODE CIVIL AFIN D’AUTORISER L’ADOPTION PAR DES COUPLES HOMOSEXUELS DÉPOSÉE PAR GUY SWENNEN (SP.A-SPIRIT )

178Chambre, Doc. Parl. 51 0664/009,23 novembre 2005 Texte adopté par la commission de la Justice Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe (nouvel intitulé)

179Article 1er La présente loi règle une matière visée à l’article 78 de la Constitution.

180Art. 2

181À l’article 343, § 1er, du Code civil, remplacé par la loi du 24 avril 2003 et modifié par la loi du 27 décembre 2004, sont apportées les modifications suivantes :
1/ au a), les mots « de sexe différent » sont chaque fois supprimés;

1822/ au b), les mots « de sexe différent » sont chaque fois supprimés.

183Art. 3 (nouveau)

184À l’article 353-1 du même Code, inséré par la loi du 24 avril 2003, dont le texte actuel formera le § 1er, il est ajouté un § 2, rédigé comme suit :
« § 2. En cas d’adoption simultanée par deux personnes de même sexe, celles-ci déclarent devant le tribunal, de commun accord, laquelle des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. Les parties peuvent toutefois solliciter du tribunal que l’adopté conserve son nom en le faisant précéder ou suivre du nom choisi conformément à l’alinéa 1er. Si l’adopté et celui des adoptants dont le nom a été choisi conformément à l’alinéa 1er ont le même nom, aucune modification n’est apportée au nom de l’adopté. »

185Art. 4 (nouveau)

186À l’article 353-2, du même Code, inséré par la loi du 24 avril 2003, dont le texte actuel formera le § 1er, il est ajouté un § 2, rédigé comme suit :
« § 2. Si une personne adopte l’enfant ou l’enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, ce dernier et l’adoptant déclarent devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. Lorsque, lors d’une précédente adoption, le nom de l’adoptant a été ajouté à celui de l’adopté, les parties peuvent solliciter du tribunal que le nom de ce dernier soit désormais composé du nom d’origine de l’adopté ou du nom de l’adoptant antérieur, précédé ou suivi du nom choisi conformément à l’article 353-1, § 2, alinéa 1er. L’adopté qui, avant une précédente adoption, portait le même nom que le nom choisi conformément à l’article 353-1, § 2, alinéa 1er, reprend ce nom sans modification. »

187Art. 5 (nouveau)

188L’article 353-3, du même Code, inséré par la loi du 24 avril 2003, est remplacé par la disposition suivante :
« Art. 353-3. — Si l’adopté est âgé de plus de dix-huit ans, les parties peuvent solliciter du tribunal qu’aucune modification ne soit apportée au nom de l’adopté ou, si l’adopté a conservé son nom lors d’une adoption antérieure, qu’il puisse le faire précéder ou suivre de celui du nouvel adoptant ou homme adoptant ou du nom choisi par les adoptants conformément à l’article 353-1, § 2, alinéa 1er. »

189Art. 6 (nouveau)

190Un article 353-4 bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 353-4 bis. — Le nom choisi par les adoptants conformément aux articles 353-1, § 2, et 353-2, § 2, s’impose aux enfants adoptés ultérieurement par eux. »

191Art. 7 (nouveau)

192Dans l’article 353-5 du même Code, les mots « 353-1, alinéa 2,353-2, alinéas 2 et 3, et 353-3 » sont remplacés par les mots « 353-1, § 1er, alinéa 2,353-1, § 2, alinéa 2,353-2, § 1er, alinéas 2 et 3, 353-2, § 2, alinéa 2, et 353-3 » » Art. 8 (nouveau)

193À l’article 356-2, du même Code, inséré par la loi du 24 avril 2003, dont le texte actuel formera le § 1er, il est ajouté un § 2, rédigé comme suit :
« § 2. En cas d’adoption plénière simultanée par deux personnes de même sexe, celles-ci déclarent devant le tribunal, de commun accord, laquelle des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. En cas d’adoption plénière par une personne de l’enfant ou de l’enfant adoptif de son conjoint de même sexe ou cohabitant de même sexe, l’adoptant et ce dernier déclarent devant le tribunal, de commun accord, lequel des deux donnera son nom à l’adopté. Le jugement mentionne cette déclaration. Le nom choisi par les adoptants conformément aux alinéas 1 et 2 s’impose aux enfants adoptés ultérieurement par eux. »

Notes

  • [1]
    La nouvelle loi sur l’adoption, réformée en 2003, mentionne en effet que l’adoption n’est autorisée que pour les couples de sexe différent.
  • [2]
    J. COMMAILLE, C. MARTIN, Les enjeux politiques de la famille, Bayard Centurion, 1998.
  • [3]
    D’après les sondages, c’était surtout le Sud du pays qui était opposé à l’adoption (sondage réalisé par le quotidien De Morgen, 11 mai 2005).
  • [4]
    L’auteure est en train de réaliser une thèse de doctorat en sociologie, en tant qu’aspirante du FNRS.
  • [5]
    Ainsi que les notes prises lors de la quasi-totalité des séances à la Chambre.
  • [6]
    La proposition de loi venant d’être votée au Sénat au moment de la rédaction, il est trop tôt pour envisager d’analyser les débats qui y ont pris place.
  • [7]
    Dans le cas des couples de même sexe élevant ensemble un enfant, la création d’un statut de « parenté sociale » permettrait de reconnaître et de protéger le lien de parentalité existant entre l’enfant et le ou la partenaire de son parent légal (biologique ou adoptif).
  • [8]
    En Communauté flamande, le service d’adoption Gewenst Kind accepte et soutient les demandes d’adoption émanant de personnes homosexuelles (cf. les propos tenus par Jo Labens au cours des auditions en commission de la Justice).
  • [9]
    L’origine de l’adoption monoparentale remonte à plus de deux cent ans où, dans le Code Napoléon, elle permettait à une personne plus âgée sans enfant de transmettre ses biens à une personne de son choix. Pour plus d’informations, cf. F.-R. OUELLETTE, « Les usages contemporains de l’adoption », in A. FINE (dir.), Adoptions. Ethnologie des parentés choisies, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1998.
  • [10]
    C’était également le cas pour la Belgique jusqu’en avril 2004, avant la promulgation de la nouvelle loi sur l’adoption.
  • [11]
    De plus en plus d’enfants sont élevés par un couple de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination artificielle, pratiquée depuis le début des années 1980 au centre de fertilité de l’AZ-VUB.
  • [12]
    Étant donné le vide juridique entourant la maternité de substitution, le recours à une mère porteuse n’est pas légalement interdit en Belgique.
  • [13]
    Devenue par la suite la Holebifederatie.
  • [14]
    Conférence-débat organisée par Zoé Genot (Écolo) le 29 juin 2000, avec notamment les sociologues François Delor (FUSL) et Jacques Marquet (UCL).
  • [15]
    Motion déposée par Écolo en septembre 2000 (Namur).
  • [16]
    Chambre, Doc. parl. 50 1692/001,14 mars 2002, p. 4.
  • [17]
    J.-F. DORTIER (coord.), Familles. Permanence et métamorphoses, Paris, Éd. Sciences Humaines, 2002.
  • [18]
    Par homoparentalité, on désigne « toutes les situations familiales dans lesquelles au moins un adulte qui s’autodésigne comme homosexuel est le parent d’au moins un enfant » (tiré de M. GROSS, L’homoparentalité, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2003, p. 9).
  • [19]
    B. BAWIN-LEGROS, Le nouvel ordre sentimental. A quoi sert la famille aujourd’hui ?, Paris, Payot, 2003.
  • [20]
    A. GIDDENS, Transformation of Intimacy. Sexuality, Love et Erotism in Modern Societies, Cambridge, Polity Press, 1993.
  • [21]
    Projet de loi réformant l’adoption, Chambre, Doc. parl. 50 1366/001 et 50 1367/1,17 juillet 2001. Les réunions en commission se déroulent du 6 novembre 2001 à décembre 2002.
  • [22]
    Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, signée à La Haye le 29 mai 1993, ratifiée et entrée en vigueur en 1998.
  • [23]
    Elle est ratifiée par la Belgique le 29 mai 2005 et entre en vigueur le 1er septembre 2005.
  • [24]
    La nouvelle loi détermine ainsi strictement la répartition des compétences respectives des différentes instances et entités responsables en matière d’adoption. Elle instaure en outre une procédure rigoureuse d’adoption (prévoyant notamment une préparation pour les candidats adoptants) et le recours obligatoire à des centres d’adoption agréés par une communauté, ainsi que l’évaluation auprès du juge de paix pour obtenir un « certificat d’aptitude à l’adoption ».
  • [25]
    Chambre, Doc. parl. 50 1366/002,16 novembre 2001.
  • [26]
    Moniteur belge, 16 mai 2003.
  • [27]
    Pour une analyse comparative plus détaillée des situations nationales, cf. K. WAALDIJK (ed.), More or Less Together. Levels of legals consequences of marriage, cohabitation and registred partnerships for different-sex and same-sex partners, Paris, Ined, 2005.
  • [28]
    Un projet de loi élargissant le texte actuel à l’adoption internationale a été adopté le 24 juin 2005 et doit encore passer devant le Parlement.
  • [29]
    La Suède est pionnière en matière d’adoption internationale pour les couples de même sexe.
  • [30]
    La possibilité d’adopter est à l’étude en Afrique du Sud.
  • [31]
    Elle était par exemple permise au Québec depuis le 10 juin 2002, date de l’ouverture de « l’union civile des couples homosexuels ».
  • [32]
    Il est intéressant de noter la proximité temporelle des événements.
  • [33]
    La lutte contre les discriminations fondée sur l’orientation sexuelle est déjà présente dans les accords gouvernementaux de 1999.
  • [34]
    Une Belgique créative et solidaire – Du souffle pour le pays, Accord du gouvernement, juillet 2003.
  • [35]
    Ibidem, p. 100.
  • [36]
    Ouverte au public, la sous-commission rassemble huit députés effectifs. Il s’agit de Valérie Déom (PS), Zoé Genot (Écolo), Marie-Christine Marghem (MR), Bert Schoofs (VB), Guy Swennen (SP.A-Spirit), Martine Taelman (VLD), Liesbeth Van der Auwera (CD&V) et Melchior Wathelet (CDH). Les autres députés peuvent également y assister.
  • [37]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n° 134/2003,8 octobre 2003, pp. 4-6.
  • [38]
    Liste des ateliers : « articulation entre vie familiale et vie professionnelle », « familles et sécurité sociale », « familles et droit civil et judiciaire », « service aux familles et soutien à la parentalité », « familles et fiscalité ».
  • [39]
    Ces conclusions datent de la mi-2004 mais les recommandations des différents ateliers sont officiellement déposées en janvier 2005.
  • [40]
    Synthèse des États généraux des familles (cycle 1) et propositions à exploiter, Secrétariat d’État aux Familles et aux Personnes handicapées, pp. 20-21.
  • [41]
    Elle succède à Isabelle Simonis (PS), en tant que secrétaire d’État aux Familles et aux Personnes handicapées.
  • [42]
    Dans ce premier texte, figurent les termes « couples homosexuels », qui deviendront « couples de même sexe » dans les autres propositions, afin de mettre l’accent sur le sexe des partenaires (ce qui concerne le législateur), et non sur l’orientation sexuelle des individus.
  • [43]
    Guy Swennen, Proposition de loi modifiant le Code civil afin d’autoriser l’adoption par des couples homosexuels, Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3. Cf. annexe 1.
  • [44]
    Martine Taelman, Maggie De Block, Geert Versnick, Hilde Vautmans, Rik Daems, Karel De Gucht, Annemie Turtelboom (VLD), Proposition de loi modifiant le Code civil en vue d’autoriser l’adoption par des couples du même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 4.
  • [45]
    Els Van Weert, Annelies Storms et Stijn Bex (Spirit), Proposition de loi modifiant le Code civil en vue d’autoriser l’adoption par des couples de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0667,8 janvier 2004.
  • [46]
    Zoé Genot (Écolo), Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 0980/001,30 mars 2004, p. 5.
  • [47]
    Zoé Genot, Proposition de loi modifiant le Code civil en ce qui concerne la reconnaissance de la filiation, Chambre, Doc. parl. 51 0520,1er décembre 2003.
  • [48]
    Valérie Déom, Karine Lalieux, Marie-Claire Lambert, Yvan Mayeur (PS), Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 5.
  • [49]
    En règle générale, le terme de « parenté » se réfère au lien légal de filiation attribué par le droit. La « parentalité » désigne plutôt l’exercice des fonctions parentales au quotidien à l’égard de l’enfant. Toutefois, les intervenants ne font pas toujours clairement la différence entre ces deux notions lors des discussions.
  • [50]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à l’exercice conjoint de l’autorité parentale par le père ou la mère et une tierce personne, et modifiant la loi sur la protection de la jeunesse, Chambre, Doc. parl. 50 1066/001,25 janvier 2001.
  • [51]
    Proposition de loi autorisant l’exercice d’une autorité parentale désirée par le partenaire ou le cohabitant du parent (Agalev-Écolo), Chambre, Doc. parl. 50 2004/001,7 août 2002.
  • [52]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale, Chambre, Doc. parl. 50 1604,23 février 2002.
  • [53]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale, Chambre, Doc. parl. 51 0393/001,6 novembre 2003.
  • [54]
    Geert Bourgeois, Proposition de loi introduisant la parenté sociale dans le Code civil, Chambre, Doc. parl. 51 0815/001,16 février 2004.
  • [55]
    Zoé Genot, Proposition de loi modifiant le Code civil en ce qui concerne la reconnaissance de la filiation, Chambre, Doc. parl. 51 0520,1er décembre 2003.
  • [56]
    Ces remarques sont valables tant pour les couples homosexuels qu’hétérosexuels qui ont eu recours à l’adoption ou à l’insémination avec donneur. Le secret, une fois dévoilé, peut avoir des conséquences très préjudiciables pour l’enfant.
  • [57]
    A. PERPÈTE, Rapport fait au nom de la commission de la Justice, Chambre, Doc. parl. 51 0664/008, 23 novembre 2005, p. 100.
  • [58]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 101.
  • [59]
    La maternité de substitution désigne le recours aux « mères porteuses ».
  • [60]
    Le 23 mars 2005.
  • [61]
    Ibidem, p. 113.
  • [62]
    Ibidem, p. 132.
  • [63]
    J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », Journal des tribunaux, 19 février 2005.
  • [64]
    Ibidem, p. 122.
  • [65]
    Ria Convents a été très liée aux mouvements homosexuel et féministe au début des années 1990. Cf. D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1860-1861,2004, p. 23.
  • [66]
    Ibidem, p. 140.
  • [67]
    Ibidem, p. 158.
  • [68]
    Ibidem, p. 9.
  • [69]
    Ibidem, p. 160.
  • [70]
    Ibidem, p. 10.
  • [71]
    Ibidem, p. 11.
  • [72]
    Ibidem, p. 11.
  • [73]
    Ibidem, p. 11.
  • [74]
    Le Vlaams Belang (parti d’extrême droite flamand) semble opposé à la fois à l’ouverture de l’adoption et à la création d’un statut de parenté sociale pour les couples de même sexe.
  • [75]
    Le VLD ne défend toutefois pas cet aspect.
  • [76]
    Suite au recours à l’insémination artificielle dans le cas de mères lesbiennes ou au recours à une mère porteuse dans le cas de pères gays. De plus, il peut s’agir également d’enfants issus d’une union hétérosexuelle antérieure, dans le cas où l’autre parent légal a disparu.
  • [77]
    Suite à une adoption monoparentale.
  • [78]
    Estimation reprise par plusieurs parlementaires au cours des débats.
  • [79]
    Déclaration des évêques de Belgique, Cathobel, Bruxelles, le 31 mai 2005.
  • [80]
    Décision prise le 31 mai 2005 (Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 26).
  • [81]
    La Libre Belgique, 7 juin 2005, p. 2.
  • [82]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35.
  • [83]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 57.
  • [84]
    Ibidem, p. 39.
  • [85]
    Plusieurs sondages ont par exemple montré que la population flamande était majoritairement favorable à l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe.
  • [86]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 36 (Malmendier).
  • [87]
    Ibidem, p. 38 (Perpète).
  • [88]
    Ibidem, p. 38 (Genot).
  • [89]
    Ibidem.
  • [90]
    Ibidem, p. 39 (Lalieux).
  • [91]
    Ibidem, p. 40 (Taelman).
  • [92]
    Auditions de Jean-Yves Hayez, chef de service de l’unité de pédopsychiatrie des Cliniques universitaires de Saint-Luc à Bruxelles, Jo Labens, coordinateur du service d’adoption Gewenst Kind, Véronique Wauters, directrice de l’asbl À la croisée des chemins, Roger Pauly, administrateur général du Gezinsbond, Didier Dehou, responsable du service d’adoption de la Direction générale de l’Aide à la jeunesse du Ministère de la Communauté française, Claude Lelièvre, délégué général de la Communauté française aux Droits de l’enfant et Pierre Rans, substitut du procureur général près de la cour d’appel de Bruxelles.
  • [93]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [94]
    Ibidem, p. 41 (Monfils).
  • [95]
    Ibidem, p. 38 (Perpète).
  • [96]
    Ibidem, p. 30 (Wathelet).
  • [97]
    La demande est rejetée par 13 voix contre 4. (Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 69.
  • [98]
    Propos tenus par les sénateurs MR Jihane Annane et Jean-Marie Cheffert dans une Carte blanche du quotidien Le Soir intitulée « Adoption par les couples homosexuels : organisons une consultation populaire » (Le Soir, 7 juillet 2005).
  • [99]
    Olivier Maingain, Daniel Bacquelaine, Amendement n° 24, Doc. parl. 51 0664/007,9 novembre 2005.
  • [100]
    Ce groupe est mis en place par Pierre-Alexandre de Maere d’Aertrycke (CDF – Chrétiens démocrates francophones) et Kris Vleugels (CD&V).
  • [101]
    Il semble probable que cette idée s’inspire en partie de la manifestation organisée à Madrid le 18 juin 2005 pour refuser le projet du gouvernement espagnol de Zapatero d’ouvrir l’adoption à des couples de même sexe.
  • [102]
    Dans les propositions déposées par Guy Swennen, par le VLD et par le PS.
  • [103]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 5.
  • [104]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 4.
  • [105]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 41 (Monfils).
  • [106]
    Ibidem, p. 31 (Marghem).
  • [107]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 16 (Wathelet).
  • [108]
    Ibidem, p. 51 (Genot).
  • [109]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 39 (Lalieux).
  • [110]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 16 (Wathelet).
  • [111]
    Ibidem, pp. 64-65 (Monfils).
  • [112]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 33 (Marghem).
  • [113]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 64 (Monfils).
  • [114]
    B. PERREAU, « La différence des sexes en débat », Conférence donnée à l’Institut de sociologie, Université libre de Bruxelles, le 17 novembre 2005.
  • [115]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3.
  • [116]
    Le CD&V adhère et sollicite les résultats des études pour montrer la nécessité de combler le vide juridique entourant ces enfants.
  • [117]
    Ce dernier argument, approuvé pourtant par la communauté scientifique, fera l’objet d’une dernière critique en séance plénière par Marie-Christine Marghem (MR) qui mettra en avant une étude espagnole, venant contredire les autres études. Cependant, il s’avère que ce document, provenant de groupes militants radicaux, est hautement contestable, de par ses auteurs et les incohérences fondamentales qu’il contient. Il s’agit du « Rapport sur le développement des enfants élevés par un couple de même sexe », de mai 2005, transmis aux députés le 27 novembre 2005 par Michel Ghins et rédigé par les professeurs Monica Fontana, Patricia Martinez et Pablo Romeu, à l’initiative de l’organisation Hazteoir (Espagne).
  • [118]
    Marie-Christine Marghem (MR), Charles Michel (MR), Melchior Wathelet (CDH) et d’autres, reprennent ces termes de façon explicite en commission de la Justice.
  • [119]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [120]
    Ibidem, p. 76 (Monfils).
  • [121]
    Ibidem, p. 55.
  • [122]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, pp. 9-10, (Wathelet).
  • [123]
    Cf. J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit.
  • [124]
    Jean-Louis Renchon le précise d’ailleurs dans son article : J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit. ; cf. également la contribution de la juriste Marcela Iacub : D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, Paris, PUF, coll. Politique d’aujourd’hui, 2001.
  • [125]
    J.-L. RENCHON, « Parenté sociale et adoption homosexuelle. Quel choix politique ? », op. cit. Ce document a été distribué aux parlementaires lors des débats.
  • [126]
    Notamment Marie-Christine Marghem et Jean-Pierre Malmendier.
  • [127]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 33.
  • [128]
    Ibidem, pp. 35-36 (Malmendier).
  • [129]
    À l’heure actuelle, on peut même parler en termes de « gamètes différenciées », étant donné que le développement des techniques de procréation médicalement assistée permette de pouvoir se passer d’un acte physique entre un homme et une femme dans la reproduction.
  • [130]
    D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit. En outre, de plus en plus de psychanalystes, à l’instar de Michel Tort, remettent en question cette interprétation du complexe d’Œdipe.
  • [131]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 34.
  • [132]
    Ibidem, pp. 34-35.
  • [133]
    Ibidem, pp. 63-64 (Monfils).
  • [134]
    Il s’agit des structures biparentales composées de deux parents de même sexe, tels qu’un couple de lesbiennes ayant eu recours à l’insémination avec donneur, d’un couple de gays ayant eu recours à une mère porteuse ou d’un couple de personnes homosexuelles dont un des partenaires a adopté un enfant en tant que personne seule. Dans tous ces cas, le partenaire du parent légal ne dispose d’aucun statut juridique à l’égard de l’enfant.
  • [135]
    Les différentes propositions de loi relatives à la « parenté sociale » n’envisagent que les cas où, soit il n’y a qu’un seul parent légal, soit le deuxième parent légal est absent ou mort.
  • [136]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005.
  • [137]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n°134/2003,8 octobre 2003.
  • [138]
    Ibidem, pp. 4-6.
  • [139]
    En particulier, il servira de point de référence au député Olivier Maingain (FDF-MR) pour justifier son refus de la proposition Swennen.
  • [140]
    Le Soir, 5 juillet 2005, p. 5.
  • [141]
    Ibidem.
  • [142]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/004,4 juillet 2005.
  • [143]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 47.
  • [144]
    Ibidem, p. 55 (Wathelet).
  • [145]
    Servais Verherstraeten (CD&V), Amendements n° 19,20 et 21, Chambre, Doc. parl. 51 0664/005, 6 juillet 2005.
  • [146]
    Proposition de loi complétant le Code civil par des dispositions relatives à la parenté sociale (CD&V), Chambre, Doc. parl. 51 0393/001,6 novembre 2003.
  • [147]
    Chambre, Doc. parl. 0664/005,6 juillet 2005. Ces amendements donneront lieu plus tard à une proposition de loi déposée à la Chambre par Melchior Wathelet et au Sénat par Clothilde Nyssens.
  • [148]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 53.
  • [149]
    Par exemple après une adoption monoparentale.
  • [150]
    Chambre, Doc. parl. 0664/005,6 juillet 2005, p. 11.
  • [151]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 55 (Wathelet).
  • [152]
    Amendement n° 2 de Lalieux et consorts, Chambre, Doc. parl. 51 0664/002,1er juin 2005, p. 2.
  • [153]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 49.
  • [154]
    Ibidem, p. 136.
  • [155]
    Ibidem, p. 45.
  • [156]
    D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit., p. 190.
  • [157]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 17 (Wathelet).
  • [158]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 49 (Lalieux).
  • [159]
    L’enfant à adopter est né en Belgique mais peut être d’origine étrangère.
  • [160]
    Vu le nombre peu élevé d’enfants en bonne santé confiés en adoption dans les pays d’Europe de l’Ouest, ces États privilégient d’abord les demandes d’adoption émanant de leurs propres ressortissants, souvent déjà supérieure à l’offre interne. Il est donc très difficile pour un Belge d’adopter un enfant dans un pays voisin.
  • [161]
    Il s’agit du principe de subsidiarité maximale.
  • [162]
    Les candidats adoptants préfèrent généralement adopter un enfant provenant de leur propre pays. Cela permet entre autres d’éviter un décalage culturel et physique trop important entre les parents et l’enfant, ainsi que d’éventuellement maintenir des liens avec la famille d’origine.
  • [163]
    Soit le candidat peut tenter de la dissimuler, soit l’organisme d’adoption belge peut ne pas l’indiquer dans les documents envoyés par exemple à l’étranger.
  • [164]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 6.
  • [165]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/003,7 juin 2005.
  • [166]
    La plupart des centres refusent déjà les demandes d’adoption interne par des couples de même sexe, voire par des personnes célibataires faisant part de leur homosexualité, soit parce que les responsables montrent de la réticence à l’égard de l’homosexualité, soit parce que la famille d’origine refuse de voir son enfant adopté par une personne ou un couple homosexuel, soit pour respecter un certain quota parmi les demandes.
  • [167]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 28.
  • [168]
    Ibidem, p. 41.
  • [169]
    Ibidem, p. 44.
  • [170]
    Ibidem, p. 39.
  • [171]
    Ibidem, p. 23.
  • [172]
    Dans les pays occidentaux.
  • [173]
    Suède, Islande, Danemark, Pays de Galles, Angleterre, Pays-Bas, Allemagne, Espagne, Israël, Afrique du Sud, certains États du Canada et des États-Unis.
  • [174]
    L’Espagne et la Grande-Bretagne.
  • [175]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 37.
  • [176]
    La Suède a ouvert l’adoption interne et internationale aux couples de même sexe le 1er février 2003.
  • [177]
    Les Pays-Bas ont toutefois introduit un projet pour ouvrir l’adoption aux couples de même sexe au niveau international.
  • [178]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005.
  • [179]
    Ibidem.
  • [180]
    Ibidem, p. 203.
  • [181]
    Il s’agit de données communiquées par le bureau international suédois de l’adoption.
  • [182]
    Bien que les Pays-Bas soient en train d’étendre la portée de la loi au niveau international.
  • [183]
    40 % des adoptions.
  • [184]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 52.
  • [185]
    Ibidem, pp. 56-57.
  • [186]
    Ibidem, p. 58.
  • [187]
    Ce fut également le cas dans le cadre des débats parlementaires sur le PACS en France. Cf. D. BORILLO, E. FASSIN, M. IACUB, Au delà du PACS : L'expertise familiale à l'épreuve de l'homosexualité, op. cit.
  • [188]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 57.
  • [189]
    Ibidem, p. 51.
  • [190]
    Loi tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (Moniteur belge, 17 mars 2003). Cf. C. SÄGESSER, « La loi anti-discrimination », Courrier hebdomadaire, CRISP, n° 1887-1888,2005.
  • [191]
    La loi évoque ici la doctrine juridique de l’égalité.
  • [192]
    Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 4.
  • [193]
    Guy Swennen (SP.A-Spirit), Proposition de loi modifiant le Code civil afin d’autoriser l’adoption par des couples homosexuels, Chambre, Doc. parl. 51 0664/001,7 janvier 2004, p. 3.
  • [194]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 26.
  • [195]
    Lors de la procédure d’adoption, le candidat doit en effet obtenir l’approbation, à la fois des intervenants belges (le juge de la jeunesse et les responsables des centres d’adoption), mais également des instances du pays d’origine de l’enfant, où l’homosexualité est souvent interdite.
  • [196]
    Concernant les réactions et les représentations des intervenants dans les centres d’adoption à l’égard de l’homosexualité, cf. la recherche menée par Bruno Perreau sur la situation française. B. Perreau, « Les Organismes autorisés pour l’adoption (OAA). Analyse d’une délégation de service public », in A. CADORET, M. GROSS, C. MECARY, B. PERREAU (dir.), Homoparentalités. Approches scientifiques et politiques, Paris, Presses Universitaires de France, à paraître.
  • [197]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 24.
  • [198]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 7 (Wathelet).
  • [199]
    Ibidem, p. 8 (Wathelet).
  • [200]
    Ibidem, p. 7 (Wathelet).
  • [201]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 31.
  • [202]
    Ibidem, p. 29 (Wathelet).
  • [203]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 9 (Wathelet).
  • [204]
    Ibidem, p. 9 (Wathelet) et p. 23 (Schoofs).
  • [205]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [206]
    B. PERREAU, « L’inégalité inavouable. Homosexualité et adoption en France : une politique publique jurisprudentielle », Nouvelles questions féministes, vol.22, n°3.
  • [207]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23novembre 2005, p. 40.
  • [208]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 63 (Monfils).
  • [209]
    Cour d’arbitrage, Arrêt n° 134/2003,8 octobre 2003, pp. 4-6.
  • [210]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 31.
  • [211]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 28 (Lalieux).
  • [212]
    Toutes les propositions de loi font référence à l’ouverture du mariage, à l’exception de celle déposée le 8 janvier 2004 par les députés Spirit Els Van Weert, Annelies Storms et Stijn Bex. Chambre, Doc. parl. 51 0667,8 janvier 2004.
  • [213]
    La proposition de loi du VLD présente l’ouverture de l’adoption « dans la foulée » de celle du mariage.
  • [214]
    Valérie Déom, Karine Lalieux, Marie-Claire Lambert, Yvan Mayeur, Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe, Chambre, Doc. parl. 51 1144/001,19 mai 2004, p. 3.
  • [215]
    D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », op. cit., p. 38. Cf. également D. PATERNOTTE, « Beyond the laws : marriage right, citizenship and inclusion models in Belgium », in A. WEYEMBERGH, S. CARSTOCEA (eds), Gays' and Lesbians' Rights in an Enlarged European Union, Bruxelles, Éditions de l'Université de Bruxelles, 2006.
  • [216]
    Chambre, Doc. parl. 50 1692/001,14 mars 2002, pp. 18-23.
  • [217]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 35 (Michel).
  • [218]
    Ibidem, p. 78 (Maingain).
  • [219]
    Ibidem, p. 79.
  • [220]
    Ibidem.
  • [221]
    Bien qu’il ne se soit pas exprimé explicitement sur la question, on peut penser que le CDH partagerait plutôt ce type de perspective, étant donné qu’en 2003 il avait refusé l’ouverture du mariage aux couples de même sexe et qu’il a constamment défendu, au cours des débats relatifs à l’adoption, le modèle traditionnel de la famille nucléaire fondée sur la différence des sexes.
  • [222]
    Chambre, Doc. parl. 51 0666/001,8 janvier 2004, p. 4.
  • [223]
    Dans les débats télévisés et les communiqués de presse, les intervenants font souvent des amalgames entre les différentes situations d’homoparentalité et ne comprennent souvent pas les enjeux juridiques de la proposition de loi. Certains semblent penser qu’elle donnerait la possibilité aux homosexuels d’avoir des enfants, ignorant que ces situations existent déjà dans les faits. En outre, on note certains propos homophobes parmi les participants aux manifestations contre l’adoption et, pour le moins, un grand manque de compréhension de l’homosexualité.
  • [224]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [225]
    À l’époque, le Conseil d’État s’était opposé à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe en considérant que le mariage était lié à la procréation.
  • [226]
    Avis du Conseil d’État, Chambre, Doc. parl. 51 0393/002,7 octobre 2005.
  • [227]
    Le Conseil d’État considère ces situations comme différentes.
  • [228]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/007,9 novembre 2005.
  • [229]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/008,23 novembre 2005, p. 7.
  • [230]
    Par 10 voix contre 1 et 5 abstentions.
  • [231]
    Les commissaires VLD, PS et SP.A ont voté en faveur du texte. Les CD&V, MR, CDH et VB ont voté contre.
  • [232]
    La modification principale apportée à la proposition initiale est l’intégration de la possibilité pour une personne d’adopter l’enfant de son partenaire de même sexe. En outre, l’intitulé de la proposition a été modifié pour devenir : « Proposition de loi modifiant certaines dispositions du Code civil en vue de permettre l’adoption par des personnes de même sexe ».
  • [233]
    Chambre, Doc. parl. 51 0664/009,23 novembre 2005. Cf. en annexe 2.
  • [234]
    De nombreux députés arborent d’ailleurs le ruban rouge, symbole de la Journée mondiale de lutte contre le sida.
  • [235]
    Deux députés étaient absents : Karel Pinxten et Stef Goris.
  • [236]
    Pour l’essentiel, il s’agit de nombreux membres d’associations gayes et lesbiennes, d’étudiants et de quelques représentants du comité d’Action pour la famille, qui s’opposent fermement à l’ouverture de l’adoption.
  • [237]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 35 (Swennen).
  • [238]
    Ibidem, p. 27 (Lalieux) et p. 34 (Swennen).
  • [239]
    Ibidem, p. 28 (Lalieux).
  • [240]
    Ibidem, p. 51 (Genot).
  • [241]
    Ibidem, p. 36 (Swennen).
  • [242]
    Ibidem, p. 47 (Taelman).
  • [243]
    Ibidem, p. 27 (Lalieux).
  • [244]
    Ibidem.
  • [245]
    Ibidem, p. 27 (Monfils).
  • [246]
    Ibidem, p. 29 (Lalieux).
  • [247]
    De même que Guy Swennen.
  • [248]
    Guy Swennen entend aussi appliquer le principe de précaution à travers la mise en place de critères stricts dans la procédure d’adoption.
  • [249]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 62 (Monfils).
  • [250]
    Sénat, Ann. parl. 2-246,28 novembre 2002, p. 20.
  • [251]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, pp. 9-10 (Wathelet).
  • [252]
    Au début de la commission de la Justice, le CD&V appuiera son argumentation sur les résultats des études réalisées sur le sujet.
  • [253]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 70 (Michel).
  • [254]
    Ibidem, p. 80 (Laeremans).
  • [255]
    Par ailleurs, chef du groupe du CDH.
  • [256]
    Chambre, Compte rendu intégral, PLEN 173,1er décembre 2005, p. 10 (Wathelet).
  • [257]
    Ibidem, p. 11 (Wathelet).
  • [258]
    Ibidem, pp. 40-42 (Marghem).
  • [259]
    Ibidem, p. 11 (Wathelet).
  • [260]
    Ibidem, p. 15 (Wathelet).
  • [261]
    Ibidem, p. 92 (Maingain).
  • [262]
    Ibidem, p. 95 (Maingain).
  • [263]
    Ibidem, p. 20 (Bert Schoofs).
  • [264]
    Pour une analyse plus approfondie des ces logiques, voir D. PATERNOTTE, « Quinze ans de débats sur la reconnaissance légale des couples de même sexe », op. cit., pp. 61-64.
  • [265]
    Ibidem, p. 20 (Schoofs).
  • [266]
    Ibidem, p. 24 (Schoofs).
  • [267]
    Ibidem, p. 27.
  • [268]
    Ibidem, p. 27 (Van der Auwera).
  • [269]
    Ibidem, p. 28.
  • [270]
    Ibidem, p. 48.
  • [271]
    Sénat, Doc parl. 3 1460/4,23 février 2006.
  • [272]
    La Libre Belgique, 21 avril 2006.
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.14.83

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions