Couverture de CRIS_1282

Article de revue

La fédéralisation de la sécurité sociale

Pages 1 à 60

Notes

  • [1]
    Le concept de la fédéralisation est utilisé dans ce Courrier hebdomadaire comme terme générique pour désigner un processus de communautarisation ou de régionalisation.
  • [2]
    Internationaal Symposium van het Instituut voor Sociaal Zekerheidrecht van de KULeuven over Centralisme, Decentralisatie, Federalisme en Sociale Zekerheid, 26 avril 1990, De Standaard, 27 avril 1990.
  • [3]
    La description du système de protection sociale en République fédérale d’Allemagne s’inspire des sources principales suivantes : Crosnier, Protection sociale dans le monde : l’Allemagne fédérale, Les dossiers de l’IRES, No 2, Paris, pp. 31-66 ; G. Igl, Le système allemand de protection sociale : forces et faiblesses, Futuribles, No 92 et 93, pp. 141-152 ; B. Von Maydell, L’évolution du droit social en RFA, de 1980 à 1985, Revue belge de sécurité sociale, No 3, pp. 197-211 ; H.F. Zächer, Introduction au droit social allemand, Revue française des affaires sociales, 1983 ; Ph. Defeyt, S. Loumaye et P. Reman, Régionalisation de la sécurité sociale, Rapport intermédiaire de recherche pour l’exécutif régional wallon, IRES, octobre 1987 ; J.P. Dumont, Les systèmes étrangers de sécurité sociale, Economica, 1988, pp. 15-40 ; M. Voirin, L’organisation de la sécurité sociale dans les Etats fédéraux, Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme Genootschap voor Sociale Zekerheid, 1990.
  • [4]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 31.
  • [5]
    La description du système des assurances sociales en Suisse provient des sources principales suivantes : Ph. Bois, Spécificités de la politique sociale en Suisse, Revue française des affaires sociales, 1988, No 189 à 209 ; J.F. Charles, La sécurité sociale en Suisse : traits essentiels et problèmes actuels, Revue Internationale de sécurité sociale, 1984, pp. 199-215 ; et les études déjà citées de Ph. Defeyt, S. Loumaye et P. Reman ; de J.P. Dumont et de M. Voirin.
  • [6]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 324.
  • [7]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 327.
  • [8]
    M. Voirin, op. cit., p. 12.
  • [9]
    M. Voirin, op. cit., p. 8.
  • [10]
    M. Voirin, op. cit., p. 17.
  • [11]
    M. Voirin, op. cit., p. 24.
  • [12]
    OCDE, Progress in structural reform, juin 1990.
  • [13]
    Ph. Defeyt et P. Reman, Les partis politiques face à la réforme de la sécurité sociale, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1041-1042, 25 mai 1984 ; Ph. Defeyt et P. Reman, Les interlocuteurs sociaux face à la réforme de la sécurité sociale, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1103-1104, 20 décembre 1985.
  • [14]
    E. Rohaert, Le souci de la santé, Bureau du Plan, 1990.
  • [15]
    Volksunie over Rapport Plan Bureau, Federalisering biedt de oplossing, Gazet van Antwerpen, 23 janvier 1990.
  • [16]
    De Standaard, 2 mai 1990.
  • [17]
    VEV, Snelverichten, 12 juin 1985, No 22.
  • [18]
    VEV, De Hervorming van de Sociale Zekerheid, Congrès 1980, pp. 4-5.
  • [19]
    De Standaard, 2 mai 1990.
  • [20]
    Memorandum van Caritas Catholica Vlaanderen aan de Regeringsformateur en aan de nieuwe Executieven, Critas-Telex No 76, janvier 1988, p. 8.
  • [21]
    Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen en Vlaams Geneesherenverbond, Vlaamse Autonomie in de Ziekteverzekering en de Gezondheidszorg, 14 septembre 1989.
  • [22]
    Vlaamse Ziekenfondsen : Sociale Zekerheid federaliseren, De Standaard, 11 janvier 1988, Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen tegen Busquin, De Standaard, 7 mars 1989, Scinder la sécurité sociale, Le Soir, 26 décembre 1989.
  • [23]
    Sociaal Economische Raad van Vlaanderen, Standpunten aanzien van de concrete Uitwerking van de Staatshervorming, Antwerpen, 13 avril 1988.
  • [24]
    LBC toont militant gelaat kristelijk vakbond, De Standaard, 23 octobre 1989.
  • [25]
    Vlaams ACV verwerpt federalisering SZ, De Standaard, 26 février 1990.
  • [26]
    Weckx pleit voor dotaties, De Standaard, 23 janvier 1990.
  • [27]
    Sociale Zekerheid nationaal houder, maar Wallonië moet koneet blijven, De Standaard, 21 novembre 1989.
  • [28]
    Verslag Rondetafels Gezondheidszorg, Vlaamse Gezondheidswerkers eisen korrecte verdeking middelen, De Standaard, 26 mai 1989. Des tables rondes nationales et provinciales ont été organisées par le gouvernement de 1988-1989 en vue de préparer une réforme de l’assurance maladie.
  • [29]
    W. Beirnaert, directeur général de la FEB, Le Soir, 30 octobre 1989.
  • [30]
    Le Journal et Indépendance-Le Peuple, 2 mai 1990.
  • [31]
    Actuellement Sociaal Economische Raad van Vlaanderen-SERV.
  • [32]
    Gerv, Regionalisering van de Uitgaven en de Uitvangsten inzake Sociale Zekerheid, periode 1975-1981, GERV-Berichten No 40, septembre 1983.
  • [33]
    M. Dethée, Een regionale Analyse van de Sociale Zekerheid in België, GERV-Berichten No 45, décembre 1984.
  • [34]
    M. Dethée, Regionale Analyse van de Sociale Zekerheid 1985-1989, Genootschap voor Sociale Zekerheid. Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme, Antwerpen 5 avril 1990.
  • [35]
    P. Defeyt, S. Loumaye, P. Reman, De la régionalisation de la sécurité sociale à la communautarisation des soins de santé, IRES, Rapport final, 9 mai 1988.
  • [36]
    X. Leroy, L’accès aux soins médicaux, tome IV, Données régionales d’offre et de consommation en 1982, 1987, UCL.
  • [37]
    P. Van Rompuy, A. Verheirstraten, Regionale Herverdelings – en financieringstromen, Leuvense Economische Standpunten, No 14, KULeuven, CES, 1979 ; P. Van Rompuy, A. Verheirstraten et F. Uyttenbrouk, De Regionalisering van de Onverheidsontvangsten en – uitgaven en de interregionale financiële stromen 1975-1978, KULeuven, CES, 1980 ; P. Van Rompuy, 10 jaar financiële stromen tussen de Gewesten in België, Leuvense Economische Standpunten, No 45, KULeuven, CES, juillet 1988.
  • [38]
    H. Deleeck, L. De Lathouwer et Karel Van Den Bosch, Verschillen in Sociale Zekerheid tussen Wallonie en Vlaanderen, Feiten en Oorzaken, Economisch en Sociaal Tijdschrift, 1989, No 1 ; L. De Lathouwer, Verschillen in Sociale Zekerheid tussen Vlaanderen en Wallonie : 1985-1988, Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme, Genootschap Sociale Zekerheid, Antwerpen, 5 avril 1990.

Introduction

1Au cours de la troisième étape de la réforme de l’Etat, la question de la fédéralisation de la sécurité sociale gagne en importance [1]. Certes, ce point ne figure ni dans la déclaration gouvernementale de mai 1988, ni dans les matières à traiter dans la troisième étape, mais il n’en constitue pas moins un des thèmes importants du débat politique actuel.

2Ce Courrier hebdomadaire n’a pas pour objet de prendre position, ni de venir en appui à l’une ou l’autre thèse en présence, il vise, après avoir décrit le fonctionnement de la sécurité sociale dans deux Etats fédéraux, à rendre compte des acteurs qui se sont prononcés sur cette question, des positions qu’ils ont prises à ce propos et des études réalisées. Ce Courrier hebdomadaire se terminera sur une analyse des répercussions de ce débat sur l’évolution de la réforme de la sécurité sociale en cours dans différents secteurs.

1 – La sécurité sociale dans deux Etats fédéraux

3Dans tous les pays, même les plus centralisateurs, les communes, les provinces, les régions ou d’autres niveaux de pouvoir exercent un rôle, plus ou moins important, dans les domaines de la prévoyance sociale et de l’aide sociale [2]. Mais comment est organisé le système de protection sociale dans les Etats fédéraux ?

4Pour tenter de répondre à cette question, il convient d’emblée de distinguer ce qui ressort de la sécurité sociale au sens strict de ce qui ressort de la politique sociale au sens large. Notre propos concerne la sécurité sociale au sens strict, c’est-à-dire les secteurs assurant des revenus de remplacement en cas de retraite, de chômage, de maladie et d’accident et des revenus de complément (allocations familiales et remboursement des soins médicaux). Ces secteurs de la sécurité sociale se distinguent des autres dimensions de la politique sociale car ils octroient des prestations contributives.

5De plus, il convient de préciser la nature des compétences – législatives, administratives ou financières – des différents niveaux de pouvoir.

6Une première approche a consisté à observer l’organisation des systèmes de protection sociale dans deux Etats fédéraux proches de la Belgique, en l’occurrence en République fédérale d’Allemagne et en Suisse, et de voir en quoi ils diffèrent de celui qui prévaut en Belgique. Un rappel succint de la répartition des compétences en matière de protection sociale en Belgique précède cette description.

La répartition des compétences en Belgique

7En Belgique, beaucoup de compétences – la plupart se situant à la périphérie de la sécurité sociale au sens strict – ont été attribuées aux communautés et aux régions. C’est le cas de matières relevant des politiques de santé, d’aide aux personnes et de l’emploi.

8Dans le domaine des soins de santé, la législation de base reste de compétence nationale. C’est le cas de la loi sur l’assurance maladie et de la loi sur les hôpitaux. Cependant, dans le cadre de ces lois, les communautés détiennent une certaine marge de manœuvre. Par exemple, la programmation dans le domaine de la construction d’hôpitaux et de l’acquisition d’appareillages médicaux lourds est définie par le gouvernement national ; mais, dans le cadre des critères nationaux, les communautés ont la possibilité de mener une politique de répartition en fonction de leurs propres besoins et priorités.

9Les règles de base qui concernent le financement de l’infrastructure (appareils médicaux lourds et bâtiments) sont nationales mais elles laissent aux communautés la compétence en matière d’autorisation de construction et de reconversion pour autant que les choix restent conformes aux règles nationales.

10En ce qui concerne les soins extra-hospitaliers (soins à domicile, maisons de repos et de soins et services de santé mentale), la même philosophie est de vigueur. La législation organique reste nationale (planification, conditions de financement de l’infrastructure, fixation du prix de journée d’entretien) mais, à l’intérieur des contraintes qu’elle fixe, les communautés peuvent déployer leurs propres politiques.

11Dans le domaine de la politique préventive, il y a aussi partage de responsabilités : les vaccinations et la protection contre les radios ionisantes constituent des matières nationales, le reste (prévention par exemple contre le cancer et la tuberculose, médecine scolaire, médecine sportive, ONE, etc.) est du ressort des communautés.

12En ce qui concerne l’aide aux personnes, les compétences sont aussi réparties entre les différents niveaux de pouvoir. Les allocations familiales et les mesures familiales des politiques fiscales et de sécurité sociale restent nationales tandis que l’aide et l’assistance aux familles (services d’aide familiale, crèche, etc.) ressortent de la politique des communautés. La tutelle sur les centres publics d’aide sociale revient aux communautés mais les règles organiques des CPAS ainsi que la législation relative au minimex restent nationales. La politique du troisième âge est de compétence communautaire à l’exception des matières qui concernent les pensions et le revenu garanti aux personnes âgées.

13En ce qui concerne la politique de l’emploi, les compétences sont réparties entre l’Etat central, les régions et les communautés. L’Etat central a dans ses attributions la politique d’assurance chômage et la compétence d’exonération des cotisations de sécurité sociale accordées dans le cadre d’un programme pour l’emploi. La politique de l’emploi dévolue aux régions concerne deux grandes matières : le placement des travailleurs et les programmes de remise au travail à l’exclusion des programmes de remise au travail dans les administrations et services de l’autorité nationale ou placés sous sa tutelle. Notons à ce propos que pour chaque chômeur complet indemnisé ou chaque personne assimilée placée dans un programme de remise au travail, l’autorité nationale octroie une intervention financière qui correspond à une indemnité de chômage. Les compétences en matière de formation professionnelle sont du ressort des communautés.

14En Belgique, la sécurité sociale au sens strict est une matière relevant de la compétence de l’Etat central. Cependant, la plupart des secteurs de cette sécurité sociale font partie intégrante de politiques plus globales dont certaines compétences ont été octroyées aux régions et aux communautés.

La République Fédérale d’Allemagne

15Le système fédéral allemand est organisé selon un "modèle associatif" [3]. Trois niveaux de gouvernement participent à la direction et à la gestion du pays : le Bund, les Länder et les autorités locales. Cependant, la législation fédérale est prépondérante sur celle des Länder. En matière fiscale, le Bund et les Länder ont des recettes exclusives qui atteignent pour chacun d’eux 15 % de l’ensemble des recettes, le reste (70 %) étant des impôts communs partagés a posteriori.

16La Constitution de la République fédérale d’Allemagne détermine comme objectif une harmonisation des standards de vie entre les Länder, ce qui implique une répartition des recettes sur base d’un système de péréquation budgétaire. La solidarité interrégionale entre les Länder a pour but d’assurer en toutes circonstances aux Länder défavorisés 95 % des recettes fiscales moyennes par tête de l’ensemble des Länder.

17Le système de sécurité sociale ouest-allemand est très proche dans sa conception du système de sécurité sociale belge, tous deux sont attachés aux principes de l’assurance et connaissent une forte décentralisation des caisses de sécurité sociale. Cependant, son organisation présente des différences. Il serait trop long d’en rendre compte de façon exhaustive, nous nous limiterons donc à décrire dans les grandes lignes le système de sécurité sociale ouest-allemand.

18La sécurité sociale en République fédérale d’Allemagne couvre quatre grandes branches :

  • l’assurance vieillesse et invalidité ;
  • l’assurance maladie qui couvre aussi les frais de maternité et de décès ;
  • l’assurance accident qui assure la prévention, la réparation des accidents de travail et des maladies professionnelles ;
  • la protection contre le chômage.

L’assurance vieillesse et invalidité

19En République fédérale d’Allemagne, l’assurance invalidité forme avec l’assurance vieillesse un seul secteur. En Belgique, par contre, l’assurance indemnités d’incapacité de travail et d’invalidité est rattachée au secteur des soins de santé.

20Comme en Belgique, il existe différents piliers dans les assurances pensions :

  • les régimes légaux et obligatoires basés sur le système de la répartition dont les deux plus importants sont les régimes des employés et cadres et celui des ouvriers ;
  • les régimes complémentaires et facultatifs organisés par entreprise et basés sur le système de la capitalisation ;
  • les régimes privés d’assurances individuelles.

21Comme en Belgique, le montant de la pension est calculé sur base des salaires obtenus durant la carrière du travailleur. Il existe cependant des coefficients d’adaptation en fonction de l’évolution des revenus réels. Pour vingt-cinq ans de cotisation, une pension minimale est prévue, ce qui permet d’assurer une certaine solidarité en faveur des travailleurs dont les rémunérations sont basses.

22L’assurance pension est gérée par des organismes dépendant de l’Etat fédéral. Un seul office gère le régime des employés et cadres tandis que dix-huit offices répartis régionalement sont chargés de la gestion du régime de pension pour les ouvriers. L’Etat fédéral subsidie le secteur en plus des cotisations sociales perçues auprès des employeurs et des travailleurs qui atteignent près de 20 % des salaires bruts plafonnés des travailleurs et qui sont les mêmes sur tout le territoire. Les montants des subventions aux assurances légales représentent environ 20 % des dépenses. Les régimes légaux de pension gèrent aussi le risque invalidité en finançant la réadaptation professionnelle et les indemnités de remplacement.

23Les assurances complémentaires peuvent être organisées selon cinq modalités :

  • les caisses de sécurité sociale qui, outre leur compétence en matière d’assurance obligatoire, peuvent gérer les cotisations complémentaires en vue de constituer un supplément de pension qui s’ajoutera à la pension légale obligatoire ;
  • les caisses de retraite privées et les caisses de retraite complémentaires qui ont un statut de droit public et prennent souvent la forme de sociétés d’assurance mutuelle ;
  • les caisses de pension d’entreprises qui gèrent des fonds de pension au profit du personnel ;
  • les caisses de secours de l’assistance qui attribuent des prestations sous certaines conditions ;
  • les sociétés d’assurances qui gèrent des contrats individuels et collectifs de retraite complémentaire.

24Ces caisses de retraite complémentaires relèvent du système de capitalisation. Elles recourent cependant en partie à la répartition, notamment pour revaloriser les pensions. Une loi fédérale a prévu un ensemble de dispositions visant à protéger les droits à la retraite complémentaire (création d’un fonds de garantie, protection en cas de faillite,…).

L’assurance maladie

25Comme en Belgique, l’assurance maladie ouest-allemande rembourse les soins médicaux. En République fédérale d’Allemagne, l’assurance maladie verse également des prestations de maternité et des indemnités de décès. Les médecins généralistes et spécialistes sont généralement rémunérés à l’acte dans le cadre de la médecine ambulatoire et au traitement dans le cadre de la médecine hospitalière et ce sur base conventionnelle. Les malades bénéficient du tiers payant et les soins médicaux sont quasiment gratuits. La gestion de l’assurance maladie est de la compétence d’une multitude de caisses – plus de mille – qui peuvent être classées de la façon suivante :

  • les caisses locales (Allgemeine Ärtskrankendkassen) qui sont organisées territorialement ;
  • les caisses d’entreprises (Betriebkrankenkassen) qui peuvent être créées lorsque l’entreprise occupe plus de 450 travailleurs ;
  • les caisses corporatives (Innungskrankenkassen) qui sont organisées par secteur d’activités au sein d’une circonscription territoriale pour autant que cela concerne au moins 450 travailleurs ;
  • les caisses de substitution qui sont organisées par catégories socio-professionnelles.

26S’ajoutent à ces quatre catégories des régimes spéciaux pour les agriculteurs, les mineurs, les marins, les fonctionnaires et les artistes.

27Les caisses jouissent d’une autonomie financière et administrative et sont en concurrence les unes avec les autres. La fixation des prestations complémentaires et des taux de cotisation de 9 % à 16 % varie donc de caisse à caisse [4].

28Les caisses d’assurance maladie en République fédérale d’Allemagne sont des organismes de droit public gérés paritairement par les employeurs et les travailleurs. L’assurance maladie est financée pour moitié par les employeurs et pour moitié par les travailleurs, les subventions de l’Etat étant quasiment inexistantes.

L’assurance accident

29Sous ce vocable sont regroupées les assurances accident de travail et maladies professionnelles. Les caisses mutuelles qui gèrent les assurances bénéficient d’une autonomie financière et de gestion. Elles sont financées uniquement par des cotisations patronales et sont en concurrence les unes avec les autres.

La protection contre le chômage

30L’assurance chômage en République fédérale d’Allemagne est gérée par l’Office fédéral du travail. Elle est financée par des cotisations payées pour moitié par les salariés et pour moitié par les employeurs. Les taux de cotisation sont uniques sur l’ensemble du territoire et calculés sur le salaire brut plafonné. Les prestations de l’assurance chômage sont limitées dans le temps. La durée de l’indemnisation ne peut être inférieure à 156 jours ouvrables ni supérieure à 312 jours si le dernier emploi a été exercé pendant au moins trois ans. L’allocation est calculée sur base du salaire net plafonné.

31A côté de l’assurance chômage, l’Office fédéral du travail organise également une assistance chômage pour venir en aide aux chômeurs de fin de droit qui se trouvent en état de besoin. Il développe aussi des activités de placement et de formation à destination des chômeurs.

32L’assistance chômage est financée totalement par l’Etat fédéral.

Les allocations familiales

33En République fédérale d’Allemagne, les allocations familiales font partie d’une politique de promotion de la famille dont les compétences sont partagées entre l’Etat fédéral et les Länder.

34L’Etat fédéral garantit le droit à tout enfant à bénéficier d’allocations familiales jusqu’à 16 ans (pour les étudiants jusqu’à 21 ans) indépendamment du statut professionnel de ses parents. Les allocations familiales sont financées intégralement par l’Etat central.

35Les autres mesures de promotion de la famille sont organisées dans le cadre des Länder sur leurs moyens propres (prêts aux jeunes ménages, aides aux vacances,…).

La confédération helvétique

36Le modèle fédéral suisse [5] est marqué par une grande autonomie des cantons et des pouvoirs locaux. Les compétences entre les trois niveaux de pouvoir sont réparties de façon égale.

37La confédération, les cantons et les communes possèdent une fiscalité exclusive et concurrente, ce qui veut dire qu’ils sont maîtres de fixer les taux et les assiettes de prélèvement. Les cantons ne contribuent pas au financement de la confédération, mais versent des contributions à certaines branches des assurances sociales. La confédération octroie des subventions aux cantons dans certains domaines spécifiques comme l’enseignement ou la politique sociale. Elle organise par cette politique de subvention une certaine cohésion entre tous les cantons. L’écart entre les montants transférés aux cantons peut en effet atteindre 40 %.

38La Suisse possède un système de protection sociale fortement marqué par le libéralisme qui privilégie davantage une approche décentralisée et privée qu’une approche collective et obligatoire. La sécurité sociale en Suisse se présente comme une mosaïque d’assurances indépendantes mais subventionnées par l’Etat. Il n’y a quasiment que pour les personnes âgées et pour les chômeurs qu’un système de protection sociale national est prévu.

L’assurance vieillesse et invalidité

39Le système suisse comporte trois piliers :

  • l’assurance vieillesse-invalidité qui est une assurance universelle et obligatoire destinée à octroyer une protection de base à tous les citoyens helvétiques et aux personnes légalement domiciliées dans le pays. Le droit à bénéficier de cette assurance est conditionné au paiement des cotisations sociales prélevées sur la totalité des salaires et des revenus sans qu’il y ait de plafond. Les prestations sont calculées sur base des salaires gagnés pendant la carrière professionnelle du bénéficiaire mais se situent entre un minimum et un maximum. Cette assurance fonctionne sous le modèle de la répartition. Comme l’indique J.P. Dumont, l’assurance vieillesse nationale réalise une solidarité totale : solidarité des générations, solidarité civile (la rente de couple est supérieure de 50 % à la rente simple), solidarité des régions et des villes avec la campagne [6]. Le régime de base est financé en partie par les cotisations sociales des travailleurs et des employeurs et en partie par les subventions de la confédération (15 % des dépenses) et des cantons (5 % des dépenses). Cette assurance est gérée au niveau confédéral mais l’organisation administrative est décentralisée au niveau des cantons ou des professions qui comptent ensemble plus de cent caisses de compensation ;
  • la prévoyance professionnelle complémentaire qui est obligatoire pour les salariés et doit permettre aux bénéficiaires pensionnés et invalides de maintenir leur niveau de vie antérieur. Ce système est financé exclusivement par des cotisations des assurés et des employeurs, cotisations qui varient selon l’âge et le sexe. 7 % à 18 % des cotisations sont déductibles de l’impôt sur le revenu. Le mode de financement est basé selon les principes de la capitalisation. L’organisation de ce pilier est très décentralisée mais située dans le cadre d’une loi fédérale qui prévoit, outre l’obligation d’assurance, un minimum de cotisations et de prestations. Il existe aussi un fonds de solidarité entre les caisses pour assurer une retraite égale à 60-70 % du dernier salaire ;
  • le troisième pilier est celui de l’épargne individuelle privée destinée, entre autres, à ceux qui ne sont pas couverts par le deuxième pilier. Les primes sont déductibles fiscalement des revenus.

40Le principe de la pension obligatoire s’applique aussi à l’invalidité. Cette assurance est financée pour moitié par des cotisations et pour moitié par des subventions des pouvoirs publics (3/4 par l’Etat fédéral et 1/4 par les cantons). Le montant de la rente varie en fonction de l’incapacité de gain provoquée par le handicap.

41A côté de ces trois piliers existe un système de prestations complémentaires qui vise à octroyer un complément de revenus aux invalides et pensionnés dont les ressources ne dépassent pas un certain plafond. Il faut répondre à certaines conditions pour bénéficier de cette aide ; entre autres, des conditions de nationalité ou de résidence dans le pays. Ces prestations sont versées par les cantons qui reçoivent pour cela des subventions de la confédération qui peuvent atteindre de 30 à 70 % du montant total octroyé en fonction de la capacité financière des cantons (péréquation).

L’assurance maladie

42Sauf pour les jeunes, il n’y a pas en Suisse d’assurance maladie obligatoire sur le plan de la Confédération. Les cantons sont cependant habilités à déclarer l’assurance obligatoire pour certaines catégories de personnes ou pour l’ensemble de la population du canton. Cinq cantons ont institué une assurance maladie obligatoire ; les autres ont limité cette obligation aux plus de 60 ans. Au total, le mixage du facultatif et de l’obligatoire aboutit au fait que 97 % des Suisses sont assurés [7].

43Plus de 500 caisses gèrent l’assurance maladie. Elles peuvent bénéficier de subsides si elles se conforment à certaines normes fédérales ou cantonales (minimum de protection, tickets modérateurs obligatoires, etc.). Les caisses sont financées par des cotisations des assurés et par des subventions de la Confédération (15 % des dépenses) et des cantons (9 % des dépenses).

44Dans ce système la hauteur des cotisations peut dépendre d’une multitude de variables – étendue de la couverture, la situation géographique, l’âge, le sexe, la grandeur de la famille, etc.

L’assurance chômage

45Depuis 1982, les salariés suisses sont couverts par une assurance chômage obligatoire, financée par des cotisations sociales des employeurs et des salariés. Les caisses d’assurance chômage sont aussi bien des caisses publiques (instituées par des communes ou des cantons) que des caisses privées (syndicats, commission paritaire patrons-syndicats).

46Les allocations de chômage sont proportionnelles au salaire dans les limites toutefois de l’existence d’un plafond et d’une durée.

Les allocations familiales

47Le versement des allocations familiales est principalement de la compétence des cantons. Ces allocations sont financées par des cotisations sociales des employeurs qui peuvent varier de canton à canton.

48Notons cependant que pour les agriculteurs, salariés et indépendants, il existe un système confédéral financé par les cotisations des employeurs dans le secteur agricole et par des subventions de l’Etat.

La nature des compétences

49Même dans les Etats où la fédéralisation a été poussée, la sécurité sociale, dans son ensemble, reste une matière dont la compétence législative nationale reste prépondérante même si elle n’est pas exclusive. Ainsi, en République fédérale d’Allemagne comme en Suisse, l’ensemble des branches est couvert par une seule législation fédérale, à deux exceptions près : les pensions des travailleurs indépendants non-agricoles en République fédérale d’Allemagne (régies par la législation sociale des Länder) et les prestations familiales en Suisse (régies par les cantons sauf pour les agriculteurs salariés et indépendants qui connaissent un système fédéral d’allocations familiales).

50Une tendance générale est observée dans la plupart des pays fédéraux à l’extension des compétences fédérales au détriment des compétences des régions [8]. Le thème de la fédéralisation de la sécurité sociale en Belgique constituerait dans ce sens une problématique relativement atypique par rapport aux évolutions en cours dans les pays fédéraux.

51Cependant, les régions peuvent avoir des compétences complémentaires dans le domaine législatif. En Suisse, par exemple, la législation fédérale a laissé aux cantons la possibilité de déclarer, obligatoire ou non, l’assurance maladie pour l’ensemble ou pour certaines catégories de la population. En République fédérale d’Allemagne, rien de tel en matière de sécurité sociale, seule l’assistance sociale a une législation partagée entre les différents niveaux de pouvoir. Mais comme l’indique M. Voirin "les pouvoirs donnés aux Etats constitutifs pour compléter la protection résultant de la législation fédérale apparaissent donc au total assez limités" [9].

52En ce qui concerne les compétences administratives, il convient de souligner que, même dans les pays les plus unitaires, l’Etat central ne gère pas seul la sécurité sociale, mais il confère son administration à des niveaux de pouvoir décentralisés. Cette décentralisation peut être géographique, professionnelle,… Un dernier élément concernant l’administration de la sécurité sociale concerne les pouvoirs de tutelle. Dans ce domaine, les situations peuvent varier. En Suisse, par exemple, la tutelle est exercée par un service fédéral, même s’il s’agit de contrôler les institutions décentralisées et les caisses cantonales. En République fédérale d’Allemagne, par contre, les institutions de sécurité sociale dont la compétence ne dépasse pas les limites d’un land sont soumises directement à la tutelle du ministère compétent de ce land [10].

53La responsabilité financière implique une maîtrise des ressources fiscales et parafiscales et un pouvoir de disposition des ressources. Même s’il existe un lien entre les responsabilités financière et administrative, les deux compétences ne se confondent pas, l’administration peut se développer dans un cadre décentralisé mais dans un système de responsabilité financière restant dévolu à l’Etat central. En Suisse, par exemple, l’administration de l’assurance vieillesse, invalidité et chômage est très décentralisée mais la responsabilité financière appartient à la Confédération. C’est le cas en République fédérale d’Allemagne également pour l’assurance chômage et les allocations familiales. Le secteur où la responsabilité financière est la plus décentralisée est sans conteste le secteur des soins de santé. Une certaine responsabilité financière attribuée à des niveaux intermédiaires de pouvoir incite "à tenir compte de la qualité de la gestion administrative et de celle des services médicaux et sociaux qu’ils offrent à la population protégée, ainsi qu’à titre d’encouragement à la maîtrise de la croissance des dépenses de santé et à la prévention des différentes éventualités couverte par la sécurité sociale [11].

54Précisons cependant qu’une certaine autonomie financière des régions en matière de sécurité sociale s’accompagne bien souvent d’un système de péréquation. En réalité, la sécurité sociale constitue un élément de cohésion économique et sociale et lorsque pour certains secteurs elle ne remplit pas cette fonction, c’est un système de péréquation qui y supplée. C’est particulièrement le cas en République fédérale d’Allemagne, où elle permet d’assurer en toutes circonstances aux Länder défavorisés 95 % des recettes fiscales moyennes par habitant de l’ensemble des Länder.

55En Suisse, l’Etat fédéral finance les cantons en tenant compte de leur capacité financière propre.

56En faisant une analyse secteur par secteur, on constate que la distinction opérée entre les revenus de remplacement liés au travail et les revenus de compléments pour le risque maladie et les charges de famille rend bien compte de la conception de ces Etats fédéraux par rapport à la sécurité sociale. Les revenus de remplacement restent de la compétence de l’Etat central tandis que l’assurance maladie est du ressort des régions. Pour les prestations familiales, cela varie d’Etat à Etat.

57En République fédérale d’Allemagne comme en Suisse, le système de pensions légales est national, financé par des cotisations sociales et des subventions de l’Etat central. Un système unique de pensions est en Suisse financé cependant en partie par les cantons, mais cela ne change pas la nature centralisée de ce secteur. Les deux pays développent des systèmes de pensions complémentaires pour permettre aux travailleurs de maintenir leur standard de vie. Même si l’organisation de ce deuxième pilier est décentralisée, ce sont des lois fédérales qui en déterminent le cadre. Il existe dans ces deux pays un troisième pilier qui est celui des pensions privées, mais aussi des systèmes d’aide ou d’assistance qui, en République fédérale d’Allemagne, sont financés conjointement par l’Etat central, les Länder et les communes. En Suisse, tout ce qui concerne les pensionnés est financé par la Confédération. Très similaire à cet égard est la situation belge, qui connaît un système de pension légale et obligatoire, financé par des cotisations sociales et des subsides de l’Etat, qui connaît également le pilier des assurances groupes et fonds de pensions et celui des assurances privées et de l’épargne pension.

58En République fédérale d’Allemagne et en Suisse, l’assurance invalidité est rattachée au régime des pensions et est donc de compétence nationale, ce qui présente une différence organisationnelle avec la situation qui prévaut en Belgique où est organisé un système d’assurance maladie-invalidité.

59En Suisse et en République fédérale d’Allemagne, l’assurance chômage est, comme en Belgique, du ressort de l’Etat central. En République fédérale d’Allemagne celui-ci finance l’assistance chômage, l’assurance étant financée exclusivement par cotisations comme en Suisse. Notons qu’en République fédérale d’Allemagne les compétences de l’Etat central en matière de promotion de l’emploi sont plus étendues qu’en Belgique.

60En Suisse les prestations familiales sont de la compétence des cantons qui peuvent déterminer souverainement le montant des prestations et des prélèvements (cotisations et subsides) à cet effet. Il existe néanmoins un système unique pour les travailleurs de l’agriculture. En République fédérale d’Allemagne, il existe un droit de l’enfant à bénéficier de prestations familiales, ce droit étant financé par l’Etat central. Pour le reste, la politique familiale est du ressort des Länder. La Belgique connaît un tout autre système. Les prestations familiales ne constituent pas un droit de l’enfant financé par l’Etat mais un droit lié au travail et aux cotisations sociales des parents. Pour le reste, le système belge se rapproche du système ouest-allemand puisque la politique familiale, hormis les prestations familiales, est du ressort des communautés.

61En ce qui concerne l’assurance maladie, les différences entre la République fédérale d’Allemagne, la Suisse et la Belgique sont fortes. En République fédérale d’Allemagne et en Suisse, les caisses d’assurance maladie locale et professionnelle jouissent d’une autonomie administrative et financière dans le cadre de l’assurance obligatoire, le montant des cotisations étant fixé par les caisses et pouvant donc varier de l’une à l’autre. En Belgique, les sociétés mutuellistes ne sont pas dans la même situation de responsabilité financière puisqu’elles n’ont pas la maîtrise du financement qui reste unique et centralisé pour la plupart des risques des salariés et pour les gros risques des indépendants.

62Si l’on s’en tient à une comparaison avec les systèmes ouest-allemand et suisse, une reformulation en Belgique des compétences entre les niveaux de pouvoir concernerait principalement les soins de santé et, dans une moindre mesure, les allocations familiales. Ces secteurs sont moins liés à la situation de travail et ont pour vocation de s’adresser le plus souvent à l’ensemble de la population. De plus, s’ils font partie de l’ensemble que constitue la sécurité sociale, ils font partie aussi d’autres ensembles que sont la politique familiale et la politique de santé, matières dévolues aux communautés. Notons que la politique de l’emploi comporte trois volets : un volet assurance, un volet placement et un volet formation ; le premier est en Belgique de compétence nationale, le deuxième de compétence régionale et le troisième de compétence communautaire. Une réorientation de la politique de l’emploi en faveur de la formation et du placement comme le suggère, par exemple l’OCDE, aurait des conséquences sur le partage des compétences entre les différents niveaux de pouvoir [12].

63Le système belge de sécurité sociale se caractérise fortement par sa nature concertative. Le processus de décision et la gestion de la sécurité sociale sont de la compétence des interlocuteurs sociaux (patronat, syndicats, mutualités). Ceux-ci sont encore organisés sur une base nationale, les arbitrages entre les communautés qui les composent étant réalisés en leur sein. L’avenir du caractère national de la sécurité sociale dépendra aussi de la façon dont ils vont se structurer.

64Le système belge de sécurité sociale se caractérise aussi par une compétence législative attribuée exclusivement à l’Etat central, les communautés et les régions ne pouvant mener une politique spécifique que dans des domaines qui ne concernent pas la sécurité sociale au sens strict et ce dans le cadre des contraintes fixées par le législateur national.

65L’administration de la sécurité sociale est fortement décentralisée surtout dans le domaine de l’assurance maladie, l’assurance chômage et des prestations familiales. Cette décentralisation a largement précédé la régionalisation du pays et ne s’est pas développée en fonction de critères régionaux ou communautaires, mais en fonction de critères socio-institutionnels. Les caisses de chômage, d’assurance maladie, par exemple, sont organisées par des institutions nationales qui se différencient les unes des autres en fonction de leur appartenance à des mondes philosophiques distincts : chrétien, socialiste, libéral essentiellement.

66Cette décentralisation administrative ne s’accompagne pas d’une responsabilité financière des caisses, l’Etat central restant maître des règles de financement et de la distribution des prestations. Cependant, la loi organisant l’assurance maladie obligatoire en 1963 avait prévu une certaine responsabilité financière des mutualités mais cette loi n’a jusqu’à présent jamais été appliquée dans les faits.

2 – Le point de vue des acteurs

67En décembre 1985, un Courrier hebdomadaire détaillant le point de vue des partis politiques et des interlocuteurs sociaux face à la réforme de la sécurité sociale permettait de comparer les propositions des divers acteurs en matière de financement, de sélectivité, de privatisation, etc. [13].

68Le thème de la fédéralisation était peu présent. Seule la Volksunie parmi les partis politiques et le Vlaams Economisch Verbond-VEV parmi les interlocuteurs sociaux avaient inscrit dans leurs propositions la fédéralisation de la sécurité sociale. Depuis lors, les propositions faites par le VEV et la VU ont rassemblé autour d’elles un nombre de plus en plus important de groupes d’opinion et de personnalités politiques au Nord du pays. Par ailleurs, des interrogations se sont faites jour à l’intérieur d’autres partis et groupes qui, jusqu’à présent, n’ont pas contesté le caractère unitaire de la sécurité sociale.

69Le propos de ce chapitre est de faire l’inventaire des acteurs qui se sont prononcés en faveur d’une fédéralisation totale ou partielle de la sécurité sociale ou qui ont mis des conditions au maintien du caractère national de la sécurité sociale.

Volksunie

70Pour la Volksunie, les compétences nationales en matière de sécurité sociale doivent se limiter à fixer le niveau des minima des allocations sociales et à déterminer quelques règles de fonctionnement communes comme, par exemple, le recours au principe de l’enquête sur les ressources. Pour le reste, le financement et la gestion deviendraient de la compétence des communautés. A ce propos, la Volksunie se déclare favorable à la création d’un seul institut de sécurité sociale par communauté qui remplacerait toutes les caisses et institutions existantes. La Volksunie estime, par ailleurs, que la solidarité doit s’exercer prioritairement à l’égard des personnes les plus défavorisées, les compléments d’assurances devant être laissés dans le domaine de la responsabilité individuelle.

71Le revenu minimum destiné à satisfaire les besoins vitaux doit être un droit pour chacun et financé par l’Etat central, le reste devant être organisé au niveau des communautés.

72A plusieurs reprises, la Volksunie a réitéré ses propositions en la matière. Lors de la publication d’un rapport du Bureau du Plan sur la santé [14], la Volksunie a tenu les propos suivants : "Les insuffisances et les manques dans la politique de santé pourront être supprimés par la fédéralisation de ce secteur. Ainsi, on mettrait fin pour une grande part à l’inefficace éparpillement des compétences en la matière et cela augmenterait de cette façon l’efficience de la politique de santé. De plus, les coûts de celle-ci diminueraient sensiblement suite à la fédéralisation. La fédéralisation permettra aussi une approche différente des problèmes de santé entre les régions. Ainsi, la Flandre attache plus d’importance à la médecine de première ligne" [15].

73Cette prise de position de la Volksunie n’est qu’une des dernières en date de ce parti qui est resté constamment fidèle à ses options en la matière malgré son entrée dans le gouvernement le 9 mai 1988. Lors des manifestations du 1er mai 1990, Jaak Gabriëls, est intervenu sur ce thème en déclarant qu’"une recherche récente démontre que les wallons retirent environ 100 milliards de la sécurité sociale de plus que ce qu’ils n’apportent. Pour la VU, il convient de fédéraliser la sécurité sociale qui concerne des matières personnalisables par excellence. Dans tous les pays fédéraux c’est le cas. La Flandre et la Wallonie pourront ainsi mettre dans la sécurité sociale les accents qu’elles désirent. Après la fédéralisation de la sécurité sociale, les travailleurs flamands pourront récolter justement les fruits de leur travail" [16].

Vlaams Ekonomisch Verbond-VEV

74Le Vlaams Ekonomisch Verbond, au terme du congrès du 11 mars 1980, se posait aussi la question de la communautarisation de la sécurité sociale au vu des "différences de mentalités entre la Flandre et la Wallonie" [17].

75Cinq ans plus tard, la fédération patronale flamande a répondu positivement à cette question [18]. Notons toutefois que cette volonté de fédéraliser la sécurité sociale s’inscrit dans un programme de réforme fondamentale de la sécurité sociale de nature néo-libérale.

76Pour le VEV, les charges sociales constituent un handicap pour les entreprises qui subissent des pertes de rentabilité et risquent la faillite ; dans ces cas, la sécurité sociale perd des ressources, le chômage et les dépenses sociales augmentent en entraînant une hausse des charges. Le VEV met en question le rôle anti-conjoncturel de la sécurité sociale : dans une politique économique ouverte, la croissance des revenus de remplacement s’accompagne d’une augmentation des importations non compensée par une hausse des exportations, ce qui provoque une détérioration de la balance commerciale.

77Pour le VEV, la sécurité sociale doit représenter une part du revenu national moindre qu’actuellement. Pour ce faire, le patronat flamand propose l’articulation suivante entre trois niveaux :

  • les assurances sociales : celles-ci seraient organisées dans chaque groupe professionnel. Elles seraient financées uniquement par des cotisations et opéreraient une redistribution horizontale des revenus. Les salariés cotiseraient pour les assurances pension, chômage et indemnités tandis que les entreprises cotiseraient pour l’assurance accidents de travail. L’Etat se limiterait à rendre l’assurance obligatoire pour un minimum de protection, chaque groupe ayant la possibilité de définir la couverture optimale pour lui ;
  • les programmes sociaux : dans ce deuxième niveau, on trouve une série de programmes en matière de santé, d’emploi, d’éducation et de logement. Pour le VEV, ces programmes – pour autant qu’ils démontrent leur efficacité – doivent être organisés au niveau des communautés. Cela n’empêche pas le patronat flamand de suggérer une privatisation de la politique de santé ;
  • les minima sociaux : le VEV estime que tout individu a droit à un minimum de revenu non-imposable et que, pour réaliser ce droit, il convient d’instaurer un système d’impôt négatif dont une partie pourrait être préfinancée par les allocations familiales. Chaque famille aurait donc droit à un crédit d’impôt égal à la somme des minima d’existence de chacun de ses membres moins les allocations familiales déjà versées. Si les revenus réellement gagnés sont inférieurs à cette somme, l’Etat verserait à cette famille une allocation de sécurité d’existence appelée impôt négatif.

Vlaams Blok

78Le parti nationaliste flamand revendique lui aussi une fédéralisation de la sécurité sociale et trouve "incroyables" les propos du président de la VU sur ce thème. Pour le Vlaams Blok, la VU aurait dû exiger la fédéralisation de la sécurité sociale lors de son entrée dans le gouvernement [19].

Caritas Catholica Vlaanderen

79En janvier 1988, dans son mémorandum au formateur et au nouvel exécutif flamand, Caritas Catholica Vlaanderen plaide pour un approfondissement de la réforme de l’Etat et pour une communautarisation des soins de santé [20]. Caritas Catholica Vlaanderen regroupe entre autres les institutions médico-sociales chrétiennes : hôpitaux, maisons de repos, etc. Pour cette association, les soins de santé constituent des matières personnalisables et doivent être traités comme telles.

80Caritas Catholica Vlaanderen s’était déjà prononcé en 1980 en faveur d’une communautarisation des soins de santé. A cette époque, cette association préconisait un système de dotation basé sur le seul critère de la population. L’ensemble des compétences en matière de santé serait donc confié aux communautés, l’Etat central ne gardant que des prérogatives dans les domaines de l’observation des traités internationaux et des conventions internationales.

Vlaams Geneesherenverbond

81Le Vlaams Geneesherenverbond, fédération des médecins flamands, est une organisation socio-culturelle vieille de 68 ans. Elle se donne comme objectif de défendre les intérêts flamands dans le domaine médical. Elle dit compter 1.500 membres, c’est-à-dire de 8 à 10 % du corps médical. Cette association plaide pour une fédéralisation de la sécurité sociale en général et pour une communautarisation des soins de santé en particulier. Pour elle, cela s’impose pour donner plus de cohérence à la politique de santé dont les compétences sont partagées actuellement entre différents niveaux de pouvoir. De plus, la fédéralisation permettra à chaque communauté d’être responsable de ses choix. Les wallons ont, selon cette association, le droit de choisir une médecine plus coûteuse mais ils ne doivent pas la faire payer à la Flandre. Un système national suppose que les règles pour chacun soient appliquées de la même façon dans les deux communautés, ce qui n’est pas le cas.

82Notons qu’une des dernières prises de position du Vlaams Geneesherenverbond a été prise conjointement avec le Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen [21].

Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen

83Cette association regroupe vingt et une sociétés mutuellistes et compte selon ses dires 120.000 membres. La plupart de ces sociétés primaires font partie des mutualités neutres et professionnelles. Cette association s’est opposée à la fusion des deux unions.

84Pour la Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen, seule une "scission totale et radicale de la sécurité sociale en général et l’assurance maladie en particulier est de nature à mettre un terme à l’abus unitaire flagrant de la solidarité flamande" [22].

85Pour cette association, l’Etat devrait partager ses compétences et ses moyens en la matière ; la répartition entre les régions devrait se faire selon le nombre d’habitants.

Sociaal Economische Raad van Vlaanderen-SERV

86Le SERV, conseil économique et social de Flandre, regroupe les interlocuteurs sociaux de cette région. Malgré les prises de position d’une de ses composantes, le VEV, le SERV ne revendique pas une fédéralisation radicale de la sécurité sociale pour des raisons de maintien de l’union économique et monétaire. Cependant, le SERV a également plaidé pour un transfert aux communautés et aux régions de blocs homogènes de compétences [23].

CSC-ACV

87La Landelijk Bediende Centrale-LBC (centrale des employés flamands affiliés à la CSC), lors de son congrès d’Elewijt d’octobre 1989, s’est prononcée pour la mise à l’étude de façon urgente de la fédéralisation de la sécurité sociale [24]. Saisi de cette question le Vlaams regionaal komitee de la CSC a cependant estimé que la sécurité sociale ne doit pas être communautarisée mais rester nationale. Cependant le VRC exige que, dans tous les secteurs, les mêmes normes soient utilisées, interprétées et appliquées de la même manière [25].

88Lors de son congrès tenu du 25 au 28 avril 1990, l’ensemble de la CSC s’est prononcé à l’unanimité sur le compromis suivant : "Nous tenons à ce que la sécurité sociale demeure une matière nationale parce qu’elle constitue un système de solidarité entre personnes. Préserver cette solidarité implique que la sécurité sociale soit appliquée à tous et par tous de la même manière". Un amendement préconisant des évaluations sur base d’enquête sur l’application de la sécurité sociale n’a pas été retenu.

D’autres prises de position

89Au-delà des partis et des groupes d’intérêt, certaines personnalités ont pris récemment position sur cette question. Ainsi du côté flamand, la fédéralisation de la sécurité sociale est une matière négociable (bespreekbaar) pour le chef de file du PVV au Parlement, A. Denys, les CVP Jongeren et le parlementaire CVP Erik Van Rompuy qui estime qu’une demande wallonne de régionalisation de l’agriculture s’accompagnera d’une demande flamande de fédéralisation de la sécurité sociale.

90Notons aussi la prise de position du ministre social-chrétien flamand de la Santé, Hugo Weckx : "On pourrait concevoir un système qui garderait un caractère unique au financement mais qui serait basé sur une répartition des moyens entre les communautés en fonction d’enveloppes calculées en fonction des contributions versées de part et d’autre" [26].

Les positions opposées à la fédéralisation

91Du côté flamand, seuls les acteurs appartenant au monde socialiste (parti, mutualités, syndicats) sont inconditionnellement hostiles à toute idée de fédéralisation de la sécurité sociale, même si l’on enregistre de la part de personnalités politiques des considérations que l’on peut considérer comme des formes d’avertissement. Ainsi s’exprime, par exemple, Norbert De Batselier, ministre socialiste flamand de l’Economie, des Classes moyennes et de l’Energie : "Je veux pour des raisons idéologiques maintenir la sécurité sociale comme matière nationale. Mais pour rendre cela possible, on doit bien se rendre compte que la loi doit être appliquée de la même manière des deux côtés de la frontière linguistique. Je donne à ce propos un avertissement à ceux qui sont aveugles sur le fait que d’autres normes sont quelquefois appliquées dans certaines provinces wallonnes" [27].

92Versons aussi à ce dossier le rapport des tables rondes provinciales flamandes sur la réforme de la politique de santé. Dans ce rapport, la fédéralisation des soins de santé a été rejetée mais, dans toutes les provinces, un consensus s’est établi pour exiger une répartition correcte des moyens entre régions [28].

93Du côté francophone, il existe une quasi unanimité pour repousser toute idée de fédéralisation de la sécurité sociale.

94Seul José Happart dans une interview aux journaux De Standaard et Le Journal & Indépendance-Le Peuple du 15 janvier 1990 a estimé que cette question ne devait pas rester un sujet tabou mais qu’il fallait la lier à une régionalisation d’autres matières, comme les charges d’intérêt de la dette publique.

95Notons enfin l’opposition de la Fédération des entreprises de Belgique-FEB et de la Fédération générale du travail de Belgique-FGTB à toute idée de fédéralisation de la sécurité sociale.

96Pour la FEB : "Si on limite la solidarité à la frontière linguistique, elle ne survivra même pas en Flandre. L’inflation des dépenses n’est pas une question régionale mais sous-régionale, et même sous-sous-régionale avec des poches de coûts élevés. Il ne suffit pas de constater, par exemple que le travailleur limbourgeois a en moyenne, comme le travailleur liégeois, dix jours par an d’absence pour maladie contre six à Anvers et en Flandre occidentale. Une démarche de régionalisation produirait immédiatement de violentes tensions entre les différents types de consommation médicale. Plus basse en Flandre ? Moins qu’au Luxembourg. (…) La fédéralisation de la sécurité sociale n’a ni base légale, ni consensus politique. Et c’est une approche extrêmement dangereuse" [29].

97Lors d’une manifestation du 1er mai 1990, François Janssen a résumé la position de la FGTB sur la question : "D’aucuns se livrent à des comptes d’apothicaires à propos de la répartition entre régions des prestations de sécurité sociale. Je les laisse à leurs calculs mesquins et à leurs pensées médiocres. Peu nous importe que les 40 francs que nous abandonnons chaque fois que nous en gagnons 100 aillent à un Flamand, à un Bruxellois ou à un Wallon s’ils vont à un chômeur, à un malade, à quelqu’un qui a besoin de solidarité" [30].

3 – Les données chiffrées

98On dispose de peu de données concernant les différences interrégionales entre les dépenses de sécurité sociale. En outre, les données administratives n’étant pas pour la plupart ventilées selon les régions, les quelques études publiées se basent sur des hypothèses qui leur sont propres, ce qui ne rend pas pertinentes les approches comparatives. Les objectifs de ces études peuvent aussi diverger. Ainsi certaines tentent de calculer les différences entre les régions du point de vue des recettes et des dépenses, d’autres plus rares encore visent à révéler les raisons qui expliquent les différences.

99Ce chapitre vise à rendre compte des lignes de force des principaux travaux réalisés en cette matière.

L’analyse du Gewestelijke Economische Raad voor Vlaanderen et les actualisations de M. Dethee

100En 1982, le Gewestelijke Economische Raad voor Vlaanderen [31] a décidé de mener une étude sur les transferts de ressources entre les régions opérés par des mécanismes propres aux finances publiques et à la sécurité sociale. Une première étude a été publiée sous le titre : "Régionalisation des dépenses et des recettes concernant la sécurité sociale, période 1975-1981" [32]. Un an après, cette étude fut affinée par M. Dethée, conseiller au SERV [33].

101La première étude s’est basée sur des données de la comptabilité nationale tandis que la seconde s’est fondée sur les dépenses et les recettes enregistrées dans les comptes généraux de la sécurité sociale, ce qui permet une analyse plus détaillée. La deuxième étude fournit aussi une ventilation régionale des subventions de l’Etat.

102En 1990, M. Dethée actualisa son étude et compléta les séries statistiques de dépenses et de recettes [34].

103Ces études comportent trois parties : la première donne les clés de répartition des recettes et des dépenses de sécurité sociale par secteurs et par régimes (salariés et indépendants), la deuxième partie établit des comptes régionaux et la troisième tire des conclusions.

104Nous présentons succintement le résultat de ces études, en insistant surtout sur les clés de répartition et les conclusions finales. Notons que les clés de répartition ont été calculées sur base du principe de la localisation, c’est-à-dire du lieu de domicile des personnes qui bénéficient de la sécurité sociale et contribuent par leurs cotisations et impôts au financement de celle-ci.

Les clés de répartition

Les dépenses

105Pour le régime des salariés, les statistiques fournies en matière de soins de santé se basent sur deux types de données : le nombre de bénéficiaires par région et par catégorie (titulaires indemnisables, veuves, invalides, pensionnés et orphelins) ainsi que le coût moyen par catégorie. Implicitement, l’étude part du principe qu’un titulaire indemnisable ou un pensionné ont le même niveau de consommation quel que soit le lieu d’habitation.

106En d’autres termes les différences régionales ne s’expliqueraient ici qu’en fonction de l’importance des populations respectives et des différences de structures de la population.

Tableau 1

Clés de répartition des dépenses en soins de santé 1976-1989

Tableau 1
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 53,70 53,87 53,53 55,39 55,74 Wallonie 34,73 34,97 35,98 34,06 33,97 Bruxelles 11,57 11,16 11,19 10,55 10,29

Clés de répartition des dépenses en soins de santé 1976-1989

Régime des salariés

107A titre de comparaison, signalons que la part relative de chaque région dans la population est de 57,6 % pour la région flamande, 32,6 % pour la région wallonne et 9,7 % pour la région bruxelloise.

108L’assurance indemnités protège les travailleurs en incapacité de travail pour des raisons de maladie. L’incapacité de travail primaire concerne les travailleurs dont l’incapacité est inférieure à un an, l’invalidité concerne ceux dont l’incapacité est supérieure à un an. Le tableau 2 présente une ventilation par région sur base de la répartition du nombre d’invalides.

Tableau 2

Clés de répartition des dépenses en invalidité 1976-1989

Tableau 2
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 42,00 41,79 42,49 43,83 44,41 Wallonie 48,46 47,09 46,01 44,52 44,32 Bruxelles 9,54 10,89 11,50 11,65 11,27

Clés de répartition des dépenses en invalidité 1976-1989

Régime des salariés

109Pour l’assurance chômage, les calculs du GERV et de M. Dethée sont basés sur la répartition des chômeurs complets indemnisés en fonction des régions (moyenne annuelle).

Tableau 3

Clés de répartition des dépenses en assurance chômage, Rég. des salariés

Tableau 3
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 52,90 54,65 56,56 52,90 46,27 Wallonie 36,08 35,11 32,91 35,82 42,27 Bruxelles 11,02 10,24 10,53 11,29 11,47

Clés de répartition des dépenses en assurance chômage, Rég. des salariés

110On dispose des montants des dépenses effectives par région pouf les pensions de retraite et de survie (tableau 4), de même que pour les allocations familiales (tableau 5).

Tableau 4

Clés de répartition des dépenses de pensions 1976-1989

Tableau 4
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 49,60 50,68 51,82 52,66 54,02 Wallonie 37,61 37,00 36,08 35,31 34,42 Bruxelles  12,79 12,32 12,10 12,03 11,55

Clés de répartition des dépenses de pensions 1976-1989

Régime des salariés
Tableau 5

Clés de répartition des dépenses d’allocations familiales 1976-1989

Tableau 5
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 56,58 55,65 56,41 55,28 55,35 Wallonie 33,63 34,01 33,58 33,29 33,65 Bruxelles 9,79 10,34 10,01 11,42 11,01

Clés de répartition des dépenses d’allocations familiales 1976-1989

Régime des salariés

111Pour calculer les clés de répartition du secteur des accidents de travail, M. Dethée a utilisé une combinaison entre, d’une part, les charges financières concernant les accidents de travail et, d’autre part, l’emploi régional par secteur. Notons que les données les plus récentes concernant les charges financières par secteur datent de 1984. Ces clés ont été corrigées en fonction des "navettes" interrégionales.

Tableau 6

Clés de répartition des dépenses pour les accidents de travail

Tableau 6
1976 1979 1985 1989 Flandre 60,24 61,01 65,89 67,02 Wallonie 30,01 29,18 27,46 26,50 Bruxelles 9,75 9,81 6,65 6,48

Clés de répartition des dépenses pour les accidents de travail

Régime des salariés

112Les dépenses sociales couvrant les maladies professionnelles sont disponibles par province. Les dépenses pour la province du Brabant ont été réparties entre les trois régions du pays en fonction de la population dans les arrondissements. Depuis 1986, le Fonds des maladies professionnelles publie des données régionalisées.

Tableau 7

Clés de répartition des dépenses de maladies professionnelles 1976-1989

Tableau 7
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 26,95 28,73 30,58 31,73 33,78 Wallonie 69,98 68,20 66,30 65,13 63,78 Bruxelles 3,07 3,07 3,12 3,14 2,44

Clés de répartition des dépenses de maladies professionnelles 1976-1989

Régime des salariés

113Les dépenses concernant les prépensions ont été réparties en fonction du nombre de prépensionnés dans le régime légal et dans le régime conventionnel.

Tableau 8

Clés de répartition des dépenses de prépensions

Tableau 8
1985 1989 Flandre 54,97 58,33 Wallonie 34,14 34,73 Bruxelles 7,90 6,94

Clés de répartition des dépenses de prépensions

Régime des salariés

114M. Dethée utilisa la même démarche pour les travailleurs indépendants que pour les travailleurs salariés. Les clés de répartition des dépenses soins de santé ont été calculées en tenant compte de la structure de la population des bénéficiaires et du coût moyen de la consommation de chaque bénéficiaire.

Tableau 9

Clés de répartition des dépenses soins de santé 1976-1989

Tableau 9
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 63,08 62,72 63,81 64,24 64,58 Wallonie 28,92 29,18 28,93 28,65 28,62 Bruxelles 8,00 8,10 7,26 7,11 6,80

Clés de répartition des dépenses soins de santé 1976-1989

Régime des indépendants

115Tant pour les indemnités d’incapacité primaire que pour les indemnités d’invalidité, M. Dethée calcula les clés de répartition en fonction du nombre d’invalides établis dans chaque région.

Tableau 10

Clés de répartition des indemnités d’incapacité primaire et d’invalidité

Tableau 10
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 58,61 54,95 55,29 56,24 56,58 Wallonie 33,95 33,02 34,47 35,36 35,51 Bruxelles 7,44 12.03 10,24 8,40 7,90

Clés de répartition des indemnités d’incapacité primaire et d’invalidité

Régime des indépendants 1976-1989

116Pour les pensions et allocations familiales, les clés de répartition se basent sur les dépenses effectives dans chaque région.

Tableau 11

Clés de répartition des dépenses de pensions

Tableau 11
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 61,80 61,48 62,00 62,23 62,76 Wallonie 30,34 30,41 29,93 29,81 29,73 Bruxelles 7,86 8,11 8,05 7,96 7,51

Clés de répartition des dépenses de pensions

Régime des indépendants 1976-1989
Tableau 12

Clés de répartition des dépenses en allocations familiales

Tableau 12
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 66,02 66,43 66,91 65,10 64,50 Wallonie 27,48 27,51 26,79 28,36 29,73 Bruxelles 6,50 6,06 6,30 6,54 7,51

Clés de répartition des dépenses en allocations familiales

Régime des indépendants 1976-1989

Les recettes

117Le financement de la sécurité sociale est mixte : cotisations sociales d’une part et subventions de l’Etat d’autre part.

118De 1976 à 1981 la répartition des cotisations sociales a été calculée en tenant compte des gains moyens bruts régionaux des travailleurs manuels, du volume de l’emploi situé dans chaque région ainsi que de la répartition régionale du compte des particuliers. Pour 1982 la clé de répartition a été construite à partir des rémunérations brutes moyennes dans chaque région combinées avec la répartition de l’emploi en Wallonie, en Flandre et à Bruxelles. Pour 1985 (et les années suivantes) la clé de répartition fut calculée sur base de la masse salariale brute soumise à l’ONSS dans chaque région en appliquant le principe de résidence. Les recettes du fonds d’équilibre financier ont été réparties sur la même base. Les séries ne sont donc pas complètement homogènes.

Tableau 13

Clés de répartition des cotisations de sécurité sociale des travailleurs salariés 1976-1989

Tableau 13
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 57,65 57,80 56,38 63,83 63,83 Wallonie 32,06 32,00 31,20 24,49 24,49 Bruxelles 10,29 10,20 12,42 11,68 11,68

Clés de répartition des cotisations de sécurité sociale des travailleurs salariés 1976-1989

119Par manque de données détaillées, les clés de répartition pour les cotisations sociales des travailleurs indépendants ont été calculées sur base de la répartition régionale des travailleurs indépendants pour les années 1982 à 1985. Pour les années 1976 à 1981 une méthode plus sophistiquée fut choisie, ce qui ne rend pas les séries totalement homogènes.

Tableau 14

Clés de répartition des cotisations de sécurité sociale des travailleurs indépendants 1976-1989

Tableau 14
1976 1979 1982 1985 1989 Flandre 56,62 57,20 59,29 58,70 57,89 Wallonie 30,92 31,21 31,08 30,64 31,46 Bruxelles 12,46 11,59 9,63 10,66 10,65

Clés de répartition des cotisations de sécurité sociale des travailleurs indépendants 1976-1989

120La répartition régionale des subventions de l’Etat à la sécurité sociale est calculée en fonction des recettes courantes de l’Etat dans chaque région.

Tableau 15

Clés de répartition des subventions de l’Etat à la sécurité sociale 1976-1989

Tableau 15
1976 – 1979 1982 1985 1989 Flandre 55,58 55,46 56,19 56,69 Wallonie 30,40 31,51 30,83 30,53 Bruxelles 13,03 13,03 12,89 12,78

Clés de répartition des subventions de l’Etat à la sécurité sociale 1976-1989

Régime des salariés – régime des indépendants

Dépenses et recettes de la sécurité sociale par région

121Sur base de ces clés de répartition, M. Dethée a établi des comptes régionalisés de la sécurité sociale et a calculé la répartition du déficit entre la Wallonie, la Flandre et Bruxelles et le montant implicite des transferts entre les régions.

122Des changements opérés dans les méthodes de calcul ne permettent pas d’établir des séries homogènes pour la période 1976-1989. Il convient d’y être attentif dans la lecture et les interprétations des tableaux synthétiques suivants.

Tableau 16

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs salariés 1976-1989

Tableau 16
Flandre Wallonie Bruxelles 1976 Recettes 250.682,8 138.706,5 50.400,6 Dépenses 226.963,6 163.633,4 49.192,6 Solde +23.719,2 -24.920,9 +1.207,7 1979 Recettes 331.944,1 183.004,3 67.330,3 Dépenses 304.387,1 213.822,1 64.069,5 Solde +27.557,0 -30.817,8 +3.260,8 1982 Recettes 444.899,8 248.736,0 100.522,1 Dépenses 414.545,6 290.676,7 88.935,1 Solde +30.354,2 -41.940,7 +11.586,5 1985 Recettes 527.568,1 225.350,5 109.210,3 Dépenses 446.901,1 309.100,2 93.999,7 Solde +80.667,3 -83.749,6 +9.210,6 Solde pour le pays + 6.128 1989 Recettes 602.542,9 250.577,7 115.582,4 Dépenses 558.558,5 353.089,3 103.572,2 Solde +93.984,5 -102.511,6 +12.010,2 Solde pour le pays + 3.483

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs salariés 1976-1989

Tableau 17

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs indépendants 1976-1989

Tableau 17
Flandre Wallonie Bruxelles 1976 Recettes 28.648,5 15.656,1 6.715,9 Dépenses 32.027,8 15.122,0 3.870,7 Solde -3.379,3 +534,1 +2.845,2 1979 Recettes 32.202,2 17.859,7 7.240,5 Dépenses 35.624,0 16.930,2 4.478,2 Solde -3.421,8 +659,5 +2.762,3 1982 Recettes 42.828,2 23.223,2 8.231,3 Dépenses 46.768,2 21.813,3 5.701,3 Solde -3.940,0 +1.410,0 +2.530,0 1985 Recettes 49.979,9 26.553,1 9.931,8 Dépenses 54.373,1 25.561,5 6.530,1 Solde -4.393,9 +991,6 +3.401,6 1989 Recettes 50.829,8 27.534,1 10.070,9 Dépenses 55.900,8 26.143,7 6.390,9 Solde -5.070,9 +1.391,0

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs indépendants 1976-1989

Tableau 18

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs salariés + travailleurs indépendants (y compris régime d’assistance 1976-1989)

Tableau 18
Flandre Wallonie Bruxelles 1976 Recettes 284.917,5 157.418,1 58.525,3 Dépenses 264.562,1 182.289,8 54.009,0 Solde +20.355,4 -24.871,7 +4.516,3 1979 Recettes 371.163,8 204.432,3 76.340,9 Dépenses 347.156,2 235.114,7 69.666,1 Solde +24.007,6 -30.682,4 +6.674,8 1982 Recettes 497.004,8 277.230,0 110.932,9 Dépenses 470.544,1 318.441,7 96.181,9 Solde +26.460,7 -41.211,7 +14.751,0 1985 Recettes 573.771,8 250.290,7 112.403,3 Dépenses 501.274,2 334.661,7 100.524,8 Solde +72.497,5 -84.371,0 +11.873,5 1989 Recettes 651.206,3 277.211,4 125.237,7 Dépenses 564.469,2 379.233,0 109.963,2 Solde +86.747,1 -102.021,6 +12.274,5

Recettes et dépenses de sécurité sociale des travailleurs salariés + travailleurs indépendants (y compris régime d’assistance 1976-1989)

Les conclusions

123Les études du GERV et de M. Dethée ont, selon eux, comme principal objectif de rendre transparents les mécanismes de solidarité mis en œuvre par la sécurité sociale. Il s’agit pour eux de rendre compte des transferts financiers opérés par la sécurité sociale de région à région. Les auteurs de ces études affirment n’avoir pas l’intention d’apporter des explications sur les résultats de leurs études ni de participer aux débats concernant les fondements de la sécurité sociale ou concernant le caractère national de celle-ci.

124La comptabilisation des recettes et des dépenses s’est basée sur des hypothèses qui peuvent sous-estimer ou surestimer les écarts entre les régions. Certaines séries n’étant pas totalement homogènes, surtout celles qui concernent l’évolution des recettes, il serait hasardeux de tirer des conclusions sur l’évolution des écarts interrégionaux entre 1976 et 1989.

125Cependant, il ressort de ces calculs que la Flandre et Bruxelles accusent en permanence un surplus financier global. En 1985, la Flandre enregistrait un surplus de BEF 72 milliards et Bruxelles un surplus de près de BEF 12 milliards, en 1989 le surplus a atteint en Flandre BEF 86 milliards et à Bruxelles BEF 15 milliards. Par contre le déficit wallon aurait atteint BEF 84 milliards en 1985 et BEF 102 milliards en 1989.

126M. Dethée en tire comme conclusion qu’un quart des dépenses en Wallonie sont couvertes par les autres régions. Selon ses calculs, les ressources par habitant ont atteint, en 1989, BEF 129.044 à Bruxelles, BEF 113.800 en Flandre et BEF 85.697 en Wallonie. Les recettes par tête en Flandre dépassent selon ses calculs d’un tiers les recettes en Wallonie. Par contre, les dépenses par habitant se situent au niveau de BEF 117.237 en Wallonie, de BEF 113.306 à Bruxelles et BEF 98.641 en Flandre. Les dépenses par habitant en Wallonie sont selon lui de 19 % supérieures aux dépenses par habitant en Flandre. Le déséquilibre entre la Wallonie et la Flandre s’explique donc plus par des différences dans les recettes que dans les dépenses.

127Le secteur où les dépenses wallonnes par habitant sont les plus importantes par rapport à la moyenne nationale est incontestablement le secteur des maladies professionnelles. Cela s’explique en grande partie par la présence en Wallonie d’anciens ouvriers mineurs atteints de silicose et de leur famille. Vient en second lieu le secteur de l’invalidité. Avec un tiers des habitants, la région wallonne compte autant d’invalides que la région flamande qui représente 57,6 % de la population. Le troisième secteur est celui du chômage et des prépensions. Les dépenses par habitant en Wallonie dépassent la moyenne nationale de plus de 23 %.

128Les trois secteurs ont un lien commun : ce sont en quelque sorte des structures d’accueil ou de protection de travailleurs écartés pour la plupart prématurément des circuits de production en déclin ou en voie de restructuration. Par rapport à la moyenne nationale, les dépenses wallonnes des autres secteurs sont nettement moins importantes puisqu’elles n’atteignent pas 4 %.

Tableau 19

Dépenses de sécurité sociale par habitant de chaque région

Tableau 19
Wallonie Flandre Bruxelles Pays Maladies professionnelles 195,74 58,61 24,95 100,00 Indemnités de maladie et invalidité 134,84 77,98 113,74 100,00 Chômage + prépensions 123,92 85,82 105,66 100,00 Pensions 103,76 95,71 112,78 100,00 Soins de santé 109,00 97,87 102,54 100,00 Allocations familiales 101,38 98,03 107,00 100,00 Accidents de travail 81,32 116,27 66,29 100,00

Dépenses de sécurité sociale par habitant de chaque région

Comparaison avec la moyenne nationale (1989)

L’analyse de l’IRES

129A la demande de l’exécutif régional wallon, l’IRES [35] entreprit de calculer la répartition régionale des recettes et des dépenses en matière de sécurité sociale. Contrairement aux études du GERV et de M. Dethée, l’IRES s’aventure plus dans le commentaire des chiffres sans toutefois analyser systématiquement les déterminants des différences entre les régions en matière de sécurité sociale.

Les dépenses

130Pour le secteur des soins de santé, la méthodologie choisie par l’IRES diffère de celle de M. Dethée. Contrairement à ce dernier qui a établi des clés de répartition en se basant essentiellement sur le nombre de bénéficiaires par région et la structure des bénéficiaires, l’IRES a préféré adapter les résultats d’une étude sur les comportements régionaux en matière de soins de santé [36]. Le tableau 20 donne un aperçu des différences dans les comportements régionaux en matière de soins de santé.

Tableau 20

Dépenses médicales par bénéficiaire du régime général (1982)

Tableau 20
Dépenses par bénéf. Indice Taux standardisés Indice Flandre 15.643 91,84 16.360 95,86 Wallonie 18.688 109,72 17.906 105,26 Bruxelles 19.222 112,86 18.823 110,29 Pays 17.032 100,00 17.067 100,00

Dépenses médicales par bénéficiaire du régime général (1982)

Source : X. Leroy, op. cit.

131Les dépenses par tête en Wallonie sont de 10 % supérieures à la moyenne nationale, et de 19,5 % supérieures aux dépenses en région flamande. Ces différences s’expliquent en partie par le fait que la population wallonne compte plus d’invalides, de pensionnés et de veuves qu’en Flandre (27,6 % contre 21,8 %). A structure de population identique, la dépense par habitant en Wallonie n’est que de 5 % supérieure à la dépense moyenne pour l’ensemble du pays et 9,8 % à la dépense moyenne en région flamande.

132L’inventaire des dépenses par grandes catégories donne les résultats présentés au tableau 21.

Tableau 21

Dépenses médicales par bénéficiaire du régime général (1982)

Tableau 21
Taux normaux Taux standardisés Fl. W. Br. Fl. W. Br. Séances de généralistes + spécialistes 94,82 106,10 108,23 98,08 102,6 106,2 Soins dentaires 97,85 99,82 11,45 97,85 100,36 11,83 Soins infirmiers (à domicile) 95,37 112,90 83,82 104,59 102,10 79,31 Soins paramédicaux 97,52 101,07 110,32 103,32 94,53 106,22 Médicaments 92,36 112,90 99,48 96,87 107,48 96,87 Prestations tech. 79,15 125,10 131,87 81,13 122,77 130,28 Chirurgie 98,38 99,79 110,21 102,42 96,46 108,17 Obstétrique 95,45 107,57 101,51 93,18 109,09 103,78 Hôpital et dialyse 96,83 101,35 172,93 102,42 95,22 109,12

Dépenses médicales par bénéficiaire du régime général (1982)

Ventilation par grandes rubriques Belgique = 100

133Ces précisions étant données, les clés de répartition de l’assurance soins de santé du régime des salariés et du régime des indépendants présentés par l’IRES après corrections pour rendre compatibles les données de X. Leroy et celles, budgétaires, du Ministère de la Prévoyance sociale, font l’objet du tableau 22.

Tableau 22

Clés de répartition de l’assurance soins de santé

Tableau 22
Flandre Wallonie Bruxelles Régime des salariés 54,2 34,8 10,8 Régime des salariés +  régime des indépendants 52,9 35,8 11,4

Clés de répartition de l’assurance soins de santé

Régime des salariés + régime des indépendants (1986)

134Sur base de données fournies par l’INAMI qui donnent les montants engagés par fédérations mutuellistes, l’IRES a établi les clés de répartition des dépenses en incapacité primaire (assurance indemnités).

Tableau 23

Clés de répartition des dépenses en incapacité primaire

Tableau 23
Flandre Wallonie Bruxelles 53,57 36,24 10,19

Clés de répartition des dépenses en incapacité primaire

Régime général (1986)

135L’IRES note que les principaux déterminants du recours à ce type de prestations sont :

  • l’âge : pour les hommes le recours augmente avec l’âge. Par exemple, le nombre de jours d’incapacité primaire pour une année est trois fois plus important de 50 à 55 ans que de 20 à 25 ans ;
  • le sexe : notamment à cause du congé de maternité des travailleuses ;
  • le statut social : le nombre moyen de jours indemnisés est supérieur pour les ouvriers qui ne bénéficient pas du salaire mensuel garanti et des chômeurs qui, dès le premier jour de maladie, dépendent de l’INAMI pour recevoir une indemnité de maladie.

136En ce qui concerne l’invalidité, l’IRES a choisi la même méthodologie que M. Dethée en se basant sur la répartition des invalides.

Tableau 24

Clés de répartition des dépenses en invalidité

Tableau 24
Flandre Wallonie Bruxelles Régime des salariés 43,83 44,52 11,65 Régime des indépendants 56,24 35,36 8,40

Clés de répartition des dépenses en invalidité

Régime des salariés et régime des indépendants (1986)

137Les données de l’IRES concernant les pensions sont basées sur les dépenses effectives telles que les calcule l’Office national des pensions, après déduction des pensions versées à l’étranger.

Tableau 25

Clés de répartition des dépenses de pension (1er janvier 1987)

Tableau 25
Flandre Wallonie Bruxelles Régime des salariés 53,4 34,7 11,9 Régime des indépendants 62,4 29,8 7,8

Clés de répartition des dépenses de pension (1er janvier 1987)

Régime général + régime des indépendants

138Partant d’une analyse de la structure du chômage entre les régions fournie par l’ONEm pour l’année 1985, l’IRES a calculé les clés de répartition pour l’année 1987.

Tableau 26

Clés de répartition des dépenses de chômage

Tableau 26
Flandre Wallonie Bruxelles 55,7 34,0 11,4

Clés de répartition des dépenses de chômage

Régime des salariés (1987)

139Ces chiffres ne reflètent qu’une partie de la réalité de l’assurance chômage : l’aspect indemnisation. Il convient d’adjoindre les données concernant la distribution régionale des programmes de résorption du chômage (prépensions, CST, TCT, et travail à temps réduit pour échapper au chômage).

Tableau 27

Clés de répartition des dépenses de résorption du chômage

Tableau 27
Flandre Wallonie Bruxelles 55,0 37,1 8,0

Clés de répartition des dépenses de résorption du chômage

Régime des salariés (1986)

140Pour les allocations familiales, les données administratives étant fournies par l’Office national des allocations familiales des travailleurs salariés, on ne sera pas surpris de trouver les mêmes chiffres que dans l’étude de M. Dethée.

Tableau 28

Clés de répartition des allocations familiales des travailleurs salariés et des indépendants hors versements à l’étranger (1985)

Tableau 28
Flandre Wallonie Bruxelles Régime salariés 55,28 33,29 11,42 Régime indépendants 65,10 28,36 6,54

Clés de répartition des allocations familiales des travailleurs salariés et des indépendants hors versements à l’étranger (1985)

141Le secteur des accidents du travail étant confié au secteur privé qui calcule le montant des primes en fonction des risques propres à chaque entreprise ou à chaque secteur, le calcul de la répartition régionale des dépenses et des recettes n’a pas, selon l’IRES, de pertinence pour le calcul des transferts implicites de ressources entre les régions.

142L’essentiel des bénéficiaires d’allocations de maladies professionnelles (71 %) sont encore des ouvriers mineurs. Il n’est donc pas étonnant de constater que près de 8,5 % des bénéficiaires d’indemnités de maladies professionnelles sont domiciliés dans les provinces du Hainaut, de Liège et du Limbourg.

143Notons aussi que pour les autres maladies professionnelles, la part de la Wallonie est relativement supérieure à celle de la Flandre. Cela s’explique principalement par des différences de types d’activités industrielles (carrière, cimenterie, etc.).

Tableau 29

Clés de répartition des dépenses de maladies professionnelles des travailleurs salariés (1986)

Tableau 29
Flandre Wallonie Bruxelles 30,31 67,33 2,36

Clés de répartition des dépenses de maladies professionnelles des travailleurs salariés (1986)

Les recettes

144Pour la ventilation régionale des cotisations de la sécurité sociale, l’IRES s’est basé sur la répartition des masses salariales entre la Wallonie, Bruxelles et la Flandre (effectifs multipliés par le salaire national moyen) pour les salariés ; sur la répartition des effectifs pour les indépendants.

145Pour la répartition des subventions de l’Etat, l’IRES a choisi la clé qui découle des recettes à l’IPP.

Tableau 30

Clés de répartition des recettes de sécurité sociale (1986)

Tableau 30
Flandre Wallonie Bruxelles Cotisations des salariés 56,59 27,53 12,78 Cotisations des indépendants 62,40 29,11 8,49 Subventions de l’Etat 58,02 30,38 11,60

Clés de répartition des recettes de sécurité sociale (1986)

146Globalement l’IRES estime qu’à déficit global constant en 1986, le déficit de la sécurité sociale en Wallonie atteindrait BEF 69,9 milliards. Ce déficit serait comblé par des surplus en Flandre de BEF 57,8 milliards et à Bruxelles de BEF 12,13 milliards.

Tableau 31

Bilan d’une sécurité sociale qui serait entièrement régionalisée (1986) en milliards de BEF

Tableau 31
Wallonie Flandre Bruxelles Royaume Dépenses Sécurité sociale sensu stricto 309,71 460,18 97,29 867,18 Progr. de résorption du chômage 33,50 49,70 7,20 90,40 Total 343,21 509,88 104,49 957,58 (35,84) (53,25) (10,91) (100,0) Recettes Cotisation des salariés 165,13 357,94 76,63 599,70 (27,53) (56,59) (12,78) (100,0) Cotisation des indépend. 14,27 30,58 4,16 49,01 (29,11) (62,40) (8,49) (100,0) Impôts et taxes 1,97 3,78 0,76 6,51 (30,38) (58,02) (11,60) (100,0) Intervention des pouvoirs publics 91,86 175,43 35,07 302,36 (30,38) (58,02) (11,60) (100,0) Total 273,23 576,73 116,62 957,58 (28,53) (59,29) (12,18) (100,0) Solde -68,98 57,85 12,13 0,0

Bilan d’une sécurité sociale qui serait entièrement régionalisée (1986) en milliards de BEF

L’analyse de Paul Van Rompuy

147Depuis 1979, Paul Van Rompuy, professeur à la KULeuven, a tenté de calculer la répartition des recettes et des dépenses des pouvoirs publics en fonction des régions. Dans ce Courrier hebdomadaire, nous présentons sa dernière étude [37]. En ce qui concerne la sécurité sociale, P. Van Rompuy a utilisé, dans les grandes lignes, les mêmes critères que ceux utilisés par le GERV en 1983 en les adaptant. Les corrections portent sur les masses salariales régionales tenant compte des navettes.

148Les cotisations ainsi que les allocations de sécurité sociale sont réparties entre les régions en fonction de la localisation du payeur, c’est-à-dire du lieu d’habitation pour le travailleur et du lieu d’implantation pour l’entreprise.

149Le tableau 32 donne la répartition régionale des cotisations et des allocations sociales de 1975 à 1985.

Tableau 32

Répartition régionale des cotisations et allocations de la sécurité sociale (en milliards de BEF)

Tableau 32
Année Flandre Wallonie Bruxelles Cot. Alloc. Solde Cot. Alloc. Solde Cot. Alloc. Solde 1975 166,9 201,7 -34,9 93,5 141,2 -47,7 30,5 41,4 -10,9 1976 189,5 239,0 -49,5 104,8 165,6 -60,8 34,2 49,1 -14,9 1977 208,9 268,2 -59,3 114,6 184,3 -69,7 37,8 54,3 -16,6 1978 218,0 293,4 -75,3 120,0 200,6 -80,7 39,5 59,7 -20,2 1979 234,4 320,1 -85,7 129,3 218,9 -89,6 41,6 65,1 -23,4 1980 253,8 349,4 -95,6 139,0 236,7 -97,8 44,8 69,6 -24,8 1981 271,0 393,8 -122,9 145,6 263,1 -111,6 48,3 77,8 -29,6 1982 298,1 430,3 -132,1 155,9 282,4 -126,5 51,2 85,0 -33,8 1983 344,5 468,5 -124,0 163,9 304,0 -140,1 49,1 94,1 -45,0 1984 393,0 490,6 -97,6 184,4 318,9 -134,5 55,4 97,3 -41,8 1985 438,0 507,5 -69,5 205,7 334,1 -128,4 62,1 103,1 -41,1

Répartition régionale des cotisations et allocations de la sécurité sociale (en milliards de BEF)

150Ce tableau indique une augmentation du solde négatif de la sécurité sociale de 1975 à 1982 suite à un rythme d’augmentation des dépenses supérieur à celui des recettes. A partir de 1982, suite à la suppression des plafonds de cotisation, ce déficit diminue grâce à l’apport des ressources qu’il provoque et à partir de 1984 grâce à la diminution de la croissance des dépenses. Mais cette évolution se présente surtout en Flandre où à partir de 1982, un rythme d’augmentation plus important que les autres régions est observé.

151La part de la Flandre dans le déficit a augmenté de 1975 à 1982 (de 37 à 45 %) mais a ensuite diminué pour atteindre 29 % en 1985. La Wallonie, par contre, a atteint un minimum en 1982 avec 43,3 %, ce pourcentage est monté à 53,7 % en 1985. Bruxelles a maintenu, jusqu’en 1982, un pourcentage de 11 % environ. En 1985, ce pourcentage a atteint plus de 17 %.

Tableau 33

Répartition entre les régions du déficit de la sécurité sociale (cotisations-prestations) (en %)

Tableau 33
Années Flandre Wallonie Bruxelles 1975 37,3 51,0 11,6 1976 39,5 48,6 11,9 1977 40,8 47,9 11,4 1978 42,8 45,8 11,5 1979 43,1 45,1 11,8 1980 43,8 44,8 11,3 1981 45,5 43,5 11,0 1982 45,2 43,3 11,6 1983 40,1 45,3 14,5 1984 35,6 49,1 15,3 1985 29,1 53,7 17,2

Répartition entre les régions du déficit de la sécurité sociale (cotisations-prestations) (en %)

152Les tableaux précédents ne tiennent pas compte des subventions de l’Etat. Celles-ci ont été introduites dans l’analyse en calculant la part de chaque région dans les revenus fiscaux et non-fiscaux, non compris les cotisations de sécurité sociale.

153Il en ressort un surplus pour la Flandre qui ne cesse de croître depuis 1980, des mali pour la Wallonie et pour Bruxelles, mali qui ne cessent de s’accroître.

Tableau 34

Surplus et déficit courant de la sécurité sociale par région (y compris les subventions de l’Etat) (en milliards de BEF)

Tableau 34
Années Pays Flandre Wallonie Bruxelles 1975 19,7 27,8 -14,5 6,4 1976 12,1 27,1 -20,1 5,1 1977 16,2 31,9 -22,1 6,3 1978 4,8 26,6 -26,5 4,7 1979 -7,9 22,1 -32,4 2,3 1980 -11,9 21,9 -36,0 2,2 1981 2,2 31,0 -34,8 6,1 1982 18,7 44,2 -31,3 5,9 1983 15,0 61,2 -41,3 -4,9 1984 40,5 84,2 -39,9 -3,8 1985 31,6 88,0 -48,3 -8,1

Surplus et déficit courant de la sécurité sociale par région (y compris les subventions de l’Etat) (en milliards de BEF)

154Enfin, Paul Van Rompuy donne des indications sur le niveau et l’évolution des dépenses par individu dans les trois régions. Il souligne l’effet du vieillissement de la population en Flandre et à Bruxelles sur l’évolution des dépenses de pensions et de soins de santé, les écarts entre les niveaux de dépenses en assurance maladie restant importants entre les trois régions.

155Les dépenses pour le chômage ont un lien évident avec la situation économique des régions, en particulier la forte croissance des dépenses à Bruxelles trouverait son origine dans l’augmentation relative des travailleurs manuels dans la capitale et en particulier des travailleurs migrants. Ce phénomène expliquerait la forte augmentation des dépenses en allocations familiales et en vacances annuelles. La structure industrielle wallonne expliquerait le niveau le plus important des dépenses pour les accidents de travail et les maladies professionnelles.

156Notons les différences de résultats entre les estimations de Paul Van Rompuy (tableau 35) et celles de Michel Dethée (tableau 19).

Tableau 35

Dépenses de sécurité sociale par habitant

Tableau 35
Flandre Wallonie Bruxelles Pensions 1975 91,4 111,3 110,4 1980 92,5 108,9 112,7 1985 94,0 106,1 114,9 Assurance maladie-invalidité 1975 91,4 114,5 100,6 1980 91,7 113,4 103,2 1985 93,2 110,4 105,2 Chômage 1975 94,2 112,6 92,4 1980 96,8 106,0 98,4 1985 91,9 110,0 113,3 Allocations familiales – pécule de vacances 1975 102,7 100,2 85,3 1980 100,8 100,8 92,6 1985 98,1 100,5 109,1 Accidents de travail – maladies professionnelles 1975 84,8 134,0 76,2 1980 87,3 128,2 80,5 1985 87,9 124,9 88,1

Dépenses de sécurité sociale par habitant

Belgique = 100

L’analyse du Centrum voor Sociaal Beleid

157En 1989 et 1990, le Centrum voor Sociaal Beleid de l’Universitaire Faculteiten Sint-Ignatius Antwerpen-UFSIA, a cherché à calculer, non pas comme les études dont nous venons de faire mention, le montant des transferts entre les régions opérés par la sécurité sociale, mais les transferts entre la Flandre et la Wallonie, la région bruxelloise n’étant pas comprise dans l’étude [38].

158Le Centrum voor Sociaal Beleid a, pour ce faire, non pas utilisé les données administratives disponibles, mais les résultats d’enquêtes faites en 1985 et 1988 auprès de 3.779 ménages (2.352 en Flandre et 1.255 en Wallonie). L’étude concerne exclusivement les allocations monétaires et ignore donc l’assurance maladie.

Montants des indemnités de sécurité sociale : différences entre la Flandre et la Wallonie

159Selon les estimations du Centrum voor Sociaal Beleid, les allocations de sécurité sociale par habitant sont supérieures en Wallonie qu’en Flandre : le total des revenus de remplacement divisé par le nombre d’habitants est de BEF 7.510 en Wallonie et de BEF 5.640 en Flandre, la différence étant donc de près de 30 %, ce qui est beaucoup plus que les 19 % avancés par M. Dethée et les pourcentages de P. Van Rompuy. Pour les allocations sociales l’écart est minime, BEF 1.090 par habitant en Wallonie et BEF 1.080 en Flandre.

160Le tableau 36 donne une synthèse des principaux résultats.

161En 1988 l’ensemble des revenus disponibles par habitant est inférieur en Wallonie de 4,5 % par rapport à la Flandre. En 1985, l’écart n’atteignait pas 1 %. Ce sont surtout l’évolution des revenus du travail dans chaque région qui expliquent cette différence. Par habitant les revenus du travail étaient de 15 % supérieurs en Flandre en 1985. Trois ans après, l’écart est passé à 20 %.

Tableau 36

Revenus disponibles moyens par habitant (en BEF par mois), Flandre-Wallonie 1985-1988(1), (2), (3), (4)

Tableau 36
1985 (1) 1988 Fl. W. Diff. (2) Fl. W. Diff. (2) Total des revenus disponibles 19.720 19.540 -0,9 21.250 20.300 -4,5 Revenus du travail 13.600 11.680 -14,8 14.200 11.570 -19,7 Revenus de la sécurité sociale 5.050 6.790 +30,7 5.640 7.510 +29,8 Revenus de remplac. 3.960 4.050 +38,3 4.450 6.350 +37,2 Pensions 2.180 2.900 +30,0 2.530 3.250 +25,9 Chômage 600 870 +38,3 680 1.000 +40,3 Pensions des actifs (3) 830 1.230 +41,3 840 1.200 +37,1 Autres (4) 380 690 +64,7 370 820 +85,7 Allocations familiales 1.060 1.100 +3,8 1.080 1.090 +0,9

Revenus disponibles moyens par habitant (en BEF par mois), Flandre-Wallonie 1985-1988(1), (2), (3), (4)

(1) Les chiffres de 1985 sont calculés aux prix de 1988 ;
(2) Montant wallon moins montant flamand en pourcentage de la moyenne entre Wallonie et Flandre ;
(3) Cette rubrique contient les prépensionnés (la plus grande part) et les pensions de survie des personnes en âge de travailler ;
(4) Cette rubrique contient les indemnités de maladie et invalidité, les accidents de travail, les maladies professionnelles et les allocations aux handicapés.
Source : CSB-enquête

162La différence des revenus de la sécurité sociale par habitant entre les deux régions est de 30 % en 1988 comme en 1985. Cependant l’évolution par branche n’est pas homogène. Dans les pensions et les allocations familiales les écarts se rétrécissent tandis qu’ils s’agrandissent pour le chômage et les indemnités de maladie, d’invalidité et d’accidents de travail.

Les raisons des différences

163Les chercheurs anversois ont ensuite tenté d’analyser les raisons des déséquilibres, tant pour les revenus du travail que pour les indemnités de sécurité sociale. Leur objectif a été de calculer la part des raisons qui incombaient aux facteurs économiques (nombre de travailleurs par rapport au nombre d’allocataires sociaux), aux facteurs démographiques (niveau de vieillissement de la population, situation familiale des bénéficiaires, etc.) et aux facteurs liés au niveau des indemnités.

164En ce qui concerne les revenus de remplacement, les facteurs économiques sont déterminants selon le Centrum voor Sociaal Beleid : la Wallonie compte plus de chômeurs, plus d’invalides et plus de prépensionnés. En 1988, plus de 53 % des écarts entre les deux régions s’expliqueraient par cette raison. La deuxième explication est de nature démographique : la population wallonne est plus’ vieille que la population flamande (non seulement les plus de 65 ans sont plus nombreux en Wallonie (13,8 % contre 12,6 %) mais c’est le cas aussi dans la population en âge de travailler de ceux qui ont entre 55 et 64 ans).

165Le troisième facteur trouve une explication dans le niveau des revenus de remplacement (16,3 %). La hauteur des indemnités par habitant est supérieure en Wallonie qu’en Flandre. Cela s’explique pour deux raisons principales, la première renvoie au mode de calcul des allocations sociales : celles-ci sont calculées en fonction des cotisations prélevées sur les salaires antérieurs qui étaient supérieurs en Wallonie. La deuxième renvoie aux différences dans la structure des bénéficiaires d’indemnités de chômage plus particulièrement : il y a en Wallonie relativement plus de chefs de famille et d’isolés parmi les chômeurs, la Flandre comptant relativement plus de cohabitants.

166Le tableau 37 précise ces données et indique une importance accrue de 1985 à 1988 des facteurs économiques et une diminution de l’influence concernant le niveau des indemnités. Cela s’expliquerait par la persistance d’un développement économique moins favorable en Wallonie et par un "rattrapage" du niveau moyen des pensions attribuées en Flandre.

Tableau 37

Principales raisons du déséquilibre entre la Flandre et la Wallonie – allocations sociales et revenus du travailleur (en %)

Tableau 37
Branches Facteurs démograhiques Facteurs économiques Niveau allocation Total Allocation sociales 1985 1988 1985 1988 1985 1988 1985 1988 Chômage -10,3 -13,6 90,9 93,1 19,4 20,5 100 100 Pensions pour "actifs" 2,1 12,0 71,4 61,5 26,5 26,5 100 100 Autres indemnités -6,1 -3,0 67,4 96,4 39,3 6,6 100 100 Pensions 68,3 80,4 -2,5 4,9 34,2 14,7 100 100 Total : alloc. soc. 26,5 30,5 42,9 53,2 30,6 16,3 100 100 Revenus du travail 37,6 26,4 71,3 75,9 -8,9 -2,3 100 100

Principales raisons du déséquilibre entre la Flandre et la Wallonie – allocations sociales et revenus du travailleur (en %)

167En ce qui concerne les revenus du travail, l’écart entre les régions s’expliquerait surtout (à concurrence de 75 %) par le fait que le taux d’activité (non compris les chômeurs) est moins important en Wallonie, le sous-emploi des jeunes et des âgés étant plus prononcé dans le sud du pays. L’autre explication (26,4 %) est de nature démographique : la population en âge de travailler est inférieure en Wallonie qu’en Flandre.

168Le tableau 37 indique que de 1985 à 1988, le facteur démographique a perdu de son influence (26,4 % au lieu de 37,6 %) au contraire du facteur économique.

Revenus des ménages, sécurité d’existence et efficacité de la sécurité sociale

169D’après l’enquête du Centrum voor Sociaal Beleid, le revenu disponible des ménages en Flandre a atteint en 1988 BEF 60.000, soit BEF 5.600 de plus qu’en Wallonie. De 1985 à 1988, l’écart s’est accentué : le revenu disponible en Wallonie était de BEF 54.500 et en Flandre de BEF 56.900.

170Il y a en Wallonie moins de ménages avec un revenu du travail qu’en Flandre, par contre une situation inverse est observée pour les familles avec un revenu de sécurité sociale. Le tableau 38 indique qu’entre 1985 et 1988 le nombre de familles avec un revenu de travail diminue en Wallonie et en Flandre mais avec une tendance moins nette dans cette dernière région. Le nombre de ménages avec un revenu de sécurité sociale reste stable pendant cette période en Flandre, il augmente en Wallonie.

171L’enquête du Centrum voor Sociaal Beleid a cherché à déterminer aussi des différences dans la répartition des revenus entre les générations dans les deux régions du pays. Les jeunes ont des revenus disponibles par famille plus bas en Wallonie qu’en Flandre et la tendance ne fait que s’accentuer. Pour les âgés par contre l’écart qui existait encore en faveur de la Wallonie en 1985 s’est résorbé depuis lors.

172Les chercheurs du Centrum voor Sociaal Beleid ont ensuite tenté de calculer l’ampleur de l’insécurité d’existence dans les deux régions et d’apprécier l’"efficacité" de la sécurité sociale. La sécurité d’existence est une notion qui dans l’esprit de ces chercheurs a un contenu normatif, il s’agit du niveau de revenus disponibles du ménage nécessaire pour atteindre le minimum socio-vital calculé sur base d’une enquête subjective auprès d’un échantillon de la population. L’efficacité de la sécurité sociale est calculée sur base du nombre de familles dont les revenus atteignent le minimum socio-vital grâce à la sécurité sociale.

Tableau 38

Pourcentage des ménages classés par type d’indemnités et hauteur des indemnités moyennes par famille – Flandre-Wallonie, 1985-1988(1), (2), (3), (4)

Tableau 38
Type de revenus % de tous les ménages Revenu moyen Flandre Wallonie Fl. W. Flandre Wallonie FI. W. 1985 1988 1985 1988 (1) (2) 1985 1988 1985 1988 (1) (2) Revenus du travail 70,4 69,3 60,4 55,8 -1,1 -4,4 55.800 58.400 54.100 56.100 +4,7 +3,7 Revenus de le sécurité soc. 81,3 81,2 85,3 86,8 -0,1 +1,5 17.900 19.800 22.180 23.400 +10,6 +5,5 Allocations de chômage 10,8 13,2 13,6 16,4 +2,4 +2,8 16.200 14.800 17.800 16.600 -8,6 -6,7 Prépensions (3) 7,1 6,7 9,1 8,6 -0,4 -0,5 Allocations familiales 47,3 44,8 45,2 42,9 -2,5 -2,3 6.500 6.900 6.800 6.900 +6,2 +1,5 Pensions 24,0 25,4 28,9 31,1 +1,4 +1,2 26.100 28.300 28.000 28.400 +8,4 +1,6 Autres (4) 6,7 6,2 9,0 11,2 -0,5 -3,2 16.300 17.100 21.400 19.800 +4,9 -7,5 Total Revenus des familles 100,0 100,0 100,0 100,0 56.900 60.600 54.500 55.000 +6,5 +0,9

Pourcentage des ménages classés par type d’indemnités et hauteur des indemnités moyennes par famille – Flandre-Wallonie, 1985-1988(1), (2), (3), (4)

(1) Différence par rapport à 1985 ;
(2) Différence par rapport à 1988 ;
(3) Les ménages avec une prépension sont ceux dans lequel un membre touche une pension pendant vie active, excepté les veuves, chefs de famille avec pensions de survie ;
(4) Indemnités de maladie et d’invalidité, accidents du travail et maladies professionnelles.
Tableau 39

Revenus disponibles moyens et standardisés par mois, par ménage en fonction de la catégorie d’âge du chef de famille, Flandre-Wallonie 1985-1988(1)

Tableau 39
Flandre Wallonie 1985 1988 1985 1988 Revenus dispon. totaux Revenus standard. Revenus dispon. totaux Revenus standard. Revenus dispon. totaux Revenus standard. Revenus dispon. totaux Revenus standard. 17-24 49.200 48.900 46.700 49.600 36.000 39.650 32.000 32.150 25-34 61.900 50.600 63.200 53.600 56.150 45.400 54.700 46.500 35-44 67.900 49.600 72.700 53.400 65.800 48.800 67.800 49.800 45-54 67.900 52.300 73.700 55.800 67.800 52.400 71.400 57. 200 55-64 53.000 48.400 59.600 53.400 54.700 50.000 55.950 50.500 65-75 39.100 41.100 46.100 46.400 40.000 42.900 43.700 45.200 + 75 30.100 35.600 31.000 37.300 32.600 39.700 32.300 38.800 Revenus disponibles Totaux 55.700 47.900 60.550 51.300 54.500 47.100 55.150 48.050

Revenus disponibles moyens et standardisés par mois, par ménage en fonction de la catégorie d’âge du chef de famille, Flandre-Wallonie 1985-1988(1)

(1) La standardisation a été calculée sur base des facteurs d’équivalence de l’OCDE : 1 personne 0,666 ; 2 personnes 1,00 ; 3 personnes 1,25 ; 4 personnes 1,45 ; 5 personnes 1,6 ; personne supplémentaire +0,15.
Tableau 40

Insécurité d’existence par famille en fonction des catégories sociales

Tableau 40
Catégories socilaes Selon les normes de CSB Part dans l’échantillon 1988 Changement par rapport 1985 1988 Changement par rapport 1985 Fl. W. Fl. W. Fl. W. Fl. W. Types de famille – isolé âgé 59,3 51,8 +18,4 +20,1 9,7 13,3 +0,5 +1,3 – couple âgé 39,9 19,9 +5,4 +1,8 10,4 10,2 +1,4 +1,0 – isolé actif 26,0 47,9 +1,6 +12,4 5,6 6,7 -0,1 0,0 – couple actif 13,9 16,1 -8,9 -4,0 15,9 13,2 +0,3 -0,8 – couple actif + 1 enfant 14,4 19,5 -0,8 -1,1 13,0 12,7 -1,6 +0,1 – couple actif + 2 enfants 13,7 21,9 +0,4 + 1,5 15,9 13,2 +0,2 -0,5 – couple actif + 3 enfants 7,2 25,2 -0,3 +6,9 5,4 4,9 -1,0 -0,8 Activité chef de famllie – travailleur 8,6 11,8 -2,0 -2,0 61,6 49,3 -2,1 -3,2 – chômeur 61,4 70,7 -0,1 +10,4 3,6 7,8 -0,5 +1,1 – pensionné 39,1 32,5 +4,6 +8,8 30,6 36,3 +2,2 +2,6 – malade/invalide 36,7 42,3 -4,9 +4,1 2,3 5,1 -0,1 +0,2 Age chef de famille – 16-24 22,9 58,3 +4,3 +16,5 1,7 2,4 -0,6 -1,4 – 25-49 10,7 21,5 -2,8 +0,3 47,9 42,9 -2,4 -2,0 – 50-64 20,4 20,2 -3,8 +0,1 25,9 26,6 -0,8 -1,5 – 65-74 37,2 29,4 +7,5 +2,6 13,4 15,7 +1,0 +1,0 – + 75 54,8 51,9 +11,2 +21,7 9,6 11,0 +1,3 +2,8

Insécurité d’existence par famille en fonction des catégories sociales

Flandre-Wallonie 1985-1988

173En Wallonie, le nombre de personnes en insécurité d’existence en 1988 est plus important qu’en Flandre : plus d’un ménage sur quatre est dans cette situation dans le sud du pays contre un sur cinq en Flandre. Ces chiffres comparés à ceux de 1985 indiquent une dégradation de la situation en Wallonie et une stabilité en Flandre, les pourcentages étant de 21,0 % en Flandre et 22,3 % en Wallonie.

174Par rapport à la Flandre, la Wallonie se caractérise par une plus forte population de familles en insécurité d’existence dans la population jeune et parmi les chômeurs. Ce n’est pas le cas dans la population plus âgée et dans celle des pensionnés parmi lesquels l’insécurité d’existence est plus prononcée en Flandre.

175Globalement, la sécurité sociale permet à plus de personnes en Wallonie d’accéder à un niveau de sécurité sociale qu’en Flandre. Elle serait donc plus "efficace" en Wallonie selon la définition du Centrum voor Sociaal Beleid. Ce sont surtout les pensions qui permettent aux familles en Wallonie d’accéder à un niveau de sécurité d’existence : 58,3 % des familles de pensionnés ont des revenus qui atteignent le minimum socio-vital en Wallonie contre 46,4 % en Flandre.

176Par contre, malgré les allocations de chômage, près de 41 % des familles de chômeurs en Wallonie restent en insécurité d’existence contre 28,1 % en Flandre. Les différences s’expliquent par la structure des bénéficiaires : plus de chefs de famille et d’isolés en Wallonie qui ont des allocations de chômage pour seuls revenus tandis qu’en Flandre le nombre de cohabitants est relativement plus élevé.

Conclusions

177La sécurité sociale a été pensée à l’origine comme un système de solidarité entre personnes, travailleurs et/ou citoyens d’un même Etat. Cette solidarité est qualifiée de verticale lorsqu’elle redistribue les revenus en fonction des capacités contributives, et d’horizontale lorsqu’elle redistribue les revenus en fonction des risques professionnels et des charges liées à l’éducation des enfants, à la maladie et à l’âge.

178S’il existe des différences entre les capacités contributives ou des différences de risques et de charges auxquels sont confrontées les populations de différentes régions, le système de la solidarité développé au travers d’une sécurité sociale unitaire présente des aspects interrégionaux.

179Etant donné sa structure industrielle et les effets de la crise sur celle-ci, la région wallonne se trouve dans une situation économique et sociale moins favorable que celle de Bruxelles et de la Flandre. Les différences se marquent à la fois dans les capacités contributives relatives des trois régions et dans le nombre de personnes à risques et à charge résidant dans chaque région.

180Le débat actuel sur la fédéralisation de la sécurité sociale se déroule donc dans un contexte d’inégal développement entre les régions. Il exprime la volonté de considérer d’éventuels transferts de revenus d’une région à l’autre non plus comme un effet dérivé d’un compromis dont la nature est sociale et dont les acteurs sont principalement les interlocuteurs sociaux, mais comme le point de départ d’une recherche d’un nouveau compromis constitutionnel qui se négociera d’abord entre les partis politiques des différentes régions.

181Ce sont avant tout des acteurs politiques et sociaux flamands qui ont fait des transferts de revenus par la sécurité sociale une question communautaire. Malgré la diversité de ces acteurs, on peut constater une cohérence dans la démarche adoptée en Flandre. Cette cohérence prend la forme d’un triptyque :

  • essai de ventilation des recettes et des dépenses de sécurité sociale par région ;
  • essai de détermination des raisons des différences de dépenses sociales dans les régions ;
  • essai de formulation d’un discours commun à la communauté flamande.

182Les exercices de quantification sont principalement réalisés en Flandre par P. Van Rompuy (KULeuven) et par M. Dethée (SERV). La recherche des causes des différences constatées dans les dépenses fait l’objet des travaux menés par H. Deleeck et le Centrum voor Sociaal Beleid de l’UFSIA. La cohérence du discours se forge à travers les multiples prises de position exprimées dans la presse flamande essentiellement. On peut synthétiser les considérations présentes dans ces prises de position en trois points :

  • le partage des compétences entre l’Etat central, les communautés et les régions en matière de politique sociale pose problème car les communautés et les régions sont dans l’impossibilité d’avoir la pleine maîtrise de certaines politiques. Cela concerne surtout la politique de santé et la politique familiale dont les objectifs ne visent pas seulement les travailleurs et leurs familles mais l’ensemble de la population d’une communauté ;
  • les différences entre les régions s’expliquent par des raisons objectives, économiques et démographiques par exemple, mais aussi par des raisons comportementales ou culturelles ;
  • il convient de faire en sorte que les normes soient définies et appliquées de la même manière dans toutes les régions.

183Ces considérations laissent ouvertes toutes les possibilités de transactions entre les régions sur un éventuel changement dans le fonctionnement de la sécurité sociale.

184Entre le maintien de la situation actuelle et la fédéralisation de la sécurité sociale une série de scénarios sont possibles.

185Un premier scénario laisse intact le cadre national de la sécurité sociale dans ses compétences et dans son financement, mais s’appuie sur les deux dernières considérations qui viennent d’être énoncées. Il s’agirait, dans ce scénario, de distinguer les raisons objectives et les raisons comportementales qui expliquent les différences entre les régions et de quantifier leurs importances relatives. Ceci pourrait conduire à une limitation des différences qui ne s’expliquent pas par des raisons objectives en contrôlant, par exemple, l’application régionale ou sous-régionale de sa réglementation. Implicitement, ce scénario se fonde sur la conviction qu’il y a un lien entre le niveau des dépenses et l’administration quotidienne de la sécurité sociale. Sans doute, vise-t-on dans ce cas les différentes formes de contrôle : contrôle de l’assurabilité, contrôle de la situation familiale, du degré d’incapacité de travail, de la volonté de travail, des revenus pour bénéficier du statut VIPO. Or, l’application de la réglementation et la plupart des contrôles sont confiés à des structures décentralisées : bureaux régionaux de l’ONEm, fédérations mutuellistes, etc. La volonté de diminuer les transferts financiers entre les régions, opérés par la sécurité sociale, passerait donc par une mise en question de fait de la décentralisation administrative,… L’application de la réglementation concerne essentiellement la distribution des prestations, mais elle peut aussi concerner le financement, et, en particulier, les dispositions fiscales et parafiscales concernant les diverses formes de rémunérations : parts bénéficiaires distribuées au personnel, chèques repas, chèques cadeaux, etc. Une incertitude juridique règne actuellement dans le concept de rémunération, ce qui augmente les contentieux entre l’ONSS et certaines firmes ayant distribué à leur personnel des rémunérations participatives exonérées de cotisation. C’est le cas entre autres d’Agfa Gevaert et de Cockerill Sambre dont les dossiers sont déposés au tribunal de travail. Mais ce type de contentieux a des conséquences communautaires. Ainsi la promesse de distribution aux fonctionnaires communaux wallons de chèques cadeaux immunisés de cotisations de sécurité sociale a exacerbé les tensions entre les communautés, à tel point que le ministre des Affaires sociales s’est engagé à faire des propositions en vue de revoir profondément les modalités de calcul des cotisations sociales et les multiples possibilités de déduction.

186Un deuxième scénario prévoit la fédéralisation totale ou partielle de secteurs entiers de la sécurité sociale. Les secteurs soins de santé et allocations familiales sont les premiers visés. Ce scénario implique souvent dans le chef de ceux qui souhaitent un changement dans ce sens une fiscalisation totale de ces deux secteurs et une répartition des recettes fiscales en fonction du nombre d’habitants ou du volume des impôts localisés dans chaque entité.

187Un troisième scénario emprunte la voie de la "responsabilisation" financière individuelle des mutualités qui sont réparties sur tout le territoire. Si les règles de répartition des moyens entre celles-ci ne tiennent pas suffisamment compte des différences de risques couverts par chaque mutualité, une "responsabilisation" amènera une limitation des transferts de ressources des entités où sont localisées les mutualités à faible niveau de dépenses vers celles où sont localisées les mutualités à haut niveau de dépenses.

188Un quatrième scénario concerne l’ensemble des mesures qui ne visent pas directement une plus grande responsabilité financière des régions ou des communautés mais dont les effets peuvent conduire à une limitation des transferts actuels. Par exemple, les dispositions qui visent à financer certaines catégories de soins médicaux non plus selon les prestations, mais sur base de normes calculées en fonction de pathologie ou de moyenne nationale pour tel ou tel type de traitement et qui peuvent influencer le volume relatif des dépenses dans les différentes régions.

189Une privatisation partielle de la sécurité sociale a également des conséquences sur les transferts de revenus entre les régions car les assurances privées sont responsables financièrement et ne connaissent pas en principe de système de péréquation entre elles.

190Enfin, relevons quelques-unes des lacunes de ce dossier qui n’est instruit actuellement que par une partie de l’opinion, en l’occurrence celle qui met en question le caractère national de la sécurité sociale :

  • la comptabilisation des recettes et des dépenses est un exercice synchronique qui ignore les dimensions historiques et intergénérationnelles essentielles lorsqu’on aborde les questions de sécurité sociale ;
  • la revendication pour que les modalités d’application de la sécurité sociale soient les mêmes au nord qu’au sud du pays est très floue et mérite des précisions. En effet, il y a des modalités d’application dont les différences sont prévues par la loi. Par exemple, l’article 143 en matière de chômage prévoit explicitement que la suspension des indemnités pour les chômeurs de longue durée puisse varier de sous-régions à sous-régions en fonction de la durée du chômage enregistrée dans chaque endroit. Il y a aussi des modalités d’application de normes fixées dans un autre contexte que celui de l’administration de la sécurité sociale. En assurance maladie, par exemple, les normes qui fixent les quantités sont essentiellement du ressort de la médecine libérale et celle-ci s’exerce sans tenir compte d’éventuelles disparités régionales. Il y a enfin des modalités de contrôle de la validité des dépenses. Ce contrôle est actuellement décentralisé mais il s’exerce sur base de dispositions nationales. La revendication de similitude dans les modalités d’application implique-t-elle une centralisation des contrôles ?

191Beaucoup de zones d’ombre existent dans les propositions des tenants d’une fédéralisation de la sécurité sociale. Les compétences seront-elles partagées entre les régions ou les communautés ? Quel sort sera réservé aux charges de la dette du passé ? Qu’en sera-t-il des situations de mobilité entre régions ou communautés ? Qu’en sera-t-il des navetteurs : les cotisations sociales seront-elles liées exclusivement au domicile du travailleur et pas du tout à la localisation de l’entreprise ?

192Ce débat sur la fédéralisation de la sécurité sociale a aussi mis en exergue l’absence d’indicateurs sociaux dans notre pays. C’est particulièrement vrai dans le domaine des soins de santé où font défaut des informations sur les liens entre la consommation médicale, le chômage, les revenus, l’offre médicale, l’aménagement du territoire et les conditions de travail,…

Notes

  • [1]
    Le concept de la fédéralisation est utilisé dans ce Courrier hebdomadaire comme terme générique pour désigner un processus de communautarisation ou de régionalisation.
  • [2]
    Internationaal Symposium van het Instituut voor Sociaal Zekerheidrecht van de KULeuven over Centralisme, Decentralisatie, Federalisme en Sociale Zekerheid, 26 avril 1990, De Standaard, 27 avril 1990.
  • [3]
    La description du système de protection sociale en République fédérale d’Allemagne s’inspire des sources principales suivantes : Crosnier, Protection sociale dans le monde : l’Allemagne fédérale, Les dossiers de l’IRES, No 2, Paris, pp. 31-66 ; G. Igl, Le système allemand de protection sociale : forces et faiblesses, Futuribles, No 92 et 93, pp. 141-152 ; B. Von Maydell, L’évolution du droit social en RFA, de 1980 à 1985, Revue belge de sécurité sociale, No 3, pp. 197-211 ; H.F. Zächer, Introduction au droit social allemand, Revue française des affaires sociales, 1983 ; Ph. Defeyt, S. Loumaye et P. Reman, Régionalisation de la sécurité sociale, Rapport intermédiaire de recherche pour l’exécutif régional wallon, IRES, octobre 1987 ; J.P. Dumont, Les systèmes étrangers de sécurité sociale, Economica, 1988, pp. 15-40 ; M. Voirin, L’organisation de la sécurité sociale dans les Etats fédéraux, Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme Genootschap voor Sociale Zekerheid, 1990.
  • [4]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 31.
  • [5]
    La description du système des assurances sociales en Suisse provient des sources principales suivantes : Ph. Bois, Spécificités de la politique sociale en Suisse, Revue française des affaires sociales, 1988, No 189 à 209 ; J.F. Charles, La sécurité sociale en Suisse : traits essentiels et problèmes actuels, Revue Internationale de sécurité sociale, 1984, pp. 199-215 ; et les études déjà citées de Ph. Defeyt, S. Loumaye et P. Reman ; de J.P. Dumont et de M. Voirin.
  • [6]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 324.
  • [7]
    J.P. Dumont, op. cit., p. 327.
  • [8]
    M. Voirin, op. cit., p. 12.
  • [9]
    M. Voirin, op. cit., p. 8.
  • [10]
    M. Voirin, op. cit., p. 17.
  • [11]
    M. Voirin, op. cit., p. 24.
  • [12]
    OCDE, Progress in structural reform, juin 1990.
  • [13]
    Ph. Defeyt et P. Reman, Les partis politiques face à la réforme de la sécurité sociale, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1041-1042, 25 mai 1984 ; Ph. Defeyt et P. Reman, Les interlocuteurs sociaux face à la réforme de la sécurité sociale, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1103-1104, 20 décembre 1985.
  • [14]
    E. Rohaert, Le souci de la santé, Bureau du Plan, 1990.
  • [15]
    Volksunie over Rapport Plan Bureau, Federalisering biedt de oplossing, Gazet van Antwerpen, 23 janvier 1990.
  • [16]
    De Standaard, 2 mai 1990.
  • [17]
    VEV, Snelverichten, 12 juin 1985, No 22.
  • [18]
    VEV, De Hervorming van de Sociale Zekerheid, Congrès 1980, pp. 4-5.
  • [19]
    De Standaard, 2 mai 1990.
  • [20]
    Memorandum van Caritas Catholica Vlaanderen aan de Regeringsformateur en aan de nieuwe Executieven, Critas-Telex No 76, janvier 1988, p. 8.
  • [21]
    Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen en Vlaams Geneesherenverbond, Vlaamse Autonomie in de Ziekteverzekering en de Gezondheidszorg, 14 septembre 1989.
  • [22]
    Vlaamse Ziekenfondsen : Sociale Zekerheid federaliseren, De Standaard, 11 janvier 1988, Vereniging Vlaamse Ziekenfondsen tegen Busquin, De Standaard, 7 mars 1989, Scinder la sécurité sociale, Le Soir, 26 décembre 1989.
  • [23]
    Sociaal Economische Raad van Vlaanderen, Standpunten aanzien van de concrete Uitwerking van de Staatshervorming, Antwerpen, 13 avril 1988.
  • [24]
    LBC toont militant gelaat kristelijk vakbond, De Standaard, 23 octobre 1989.
  • [25]
    Vlaams ACV verwerpt federalisering SZ, De Standaard, 26 février 1990.
  • [26]
    Weckx pleit voor dotaties, De Standaard, 23 janvier 1990.
  • [27]
    Sociale Zekerheid nationaal houder, maar Wallonië moet koneet blijven, De Standaard, 21 novembre 1989.
  • [28]
    Verslag Rondetafels Gezondheidszorg, Vlaamse Gezondheidswerkers eisen korrecte verdeking middelen, De Standaard, 26 mai 1989. Des tables rondes nationales et provinciales ont été organisées par le gouvernement de 1988-1989 en vue de préparer une réforme de l’assurance maladie.
  • [29]
    W. Beirnaert, directeur général de la FEB, Le Soir, 30 octobre 1989.
  • [30]
    Le Journal et Indépendance-Le Peuple, 2 mai 1990.
  • [31]
    Actuellement Sociaal Economische Raad van Vlaanderen-SERV.
  • [32]
    Gerv, Regionalisering van de Uitgaven en de Uitvangsten inzake Sociale Zekerheid, periode 1975-1981, GERV-Berichten No 40, septembre 1983.
  • [33]
    M. Dethée, Een regionale Analyse van de Sociale Zekerheid in België, GERV-Berichten No 45, décembre 1984.
  • [34]
    M. Dethée, Regionale Analyse van de Sociale Zekerheid 1985-1989, Genootschap voor Sociale Zekerheid. Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme, Antwerpen 5 avril 1990.
  • [35]
    P. Defeyt, S. Loumaye, P. Reman, De la régionalisation de la sécurité sociale à la communautarisation des soins de santé, IRES, Rapport final, 9 mai 1988.
  • [36]
    X. Leroy, L’accès aux soins médicaux, tome IV, Données régionales d’offre et de consommation en 1982, 1987, UCL.
  • [37]
    P. Van Rompuy, A. Verheirstraten, Regionale Herverdelings – en financieringstromen, Leuvense Economische Standpunten, No 14, KULeuven, CES, 1979 ; P. Van Rompuy, A. Verheirstraten et F. Uyttenbrouk, De Regionalisering van de Onverheidsontvangsten en – uitgaven en de interregionale financiële stromen 1975-1978, KULeuven, CES, 1980 ; P. Van Rompuy, 10 jaar financiële stromen tussen de Gewesten in België, Leuvense Economische Standpunten, No 45, KULeuven, CES, juillet 1988.
  • [38]
    H. Deleeck, L. De Lathouwer et Karel Van Den Bosch, Verschillen in Sociale Zekerheid tussen Wallonie en Vlaanderen, Feiten en Oorzaken, Economisch en Sociaal Tijdschrift, 1989, No 1 ; L. De Lathouwer, Verschillen in Sociale Zekerheid tussen Vlaanderen en Wallonie : 1985-1988, Studiedag Sociale Zekerheid en Federalisme, Genootschap Sociale Zekerheid, Antwerpen, 5 avril 1990.
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