Notes
-
[1]
Anne Raulier, Guy Deregnaucourt, Les politiques sociales de la Communauté européenne, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1267-1268, 1990.
-
[2]
SEC (88) 1148, 14 septembre 1988.
-
[3]
La notion de droits fondamentaux n’est pas équivalente à celle de contenus ou normes minimaux. La reconnaissance du droit de grève, à la négociation collective, à la sécurité sociale ne sont pas des droits minimaux mais bien fondamentaux.
-
[4]
CCE, Une stratégie de coopération pour la croissance et l’emploi, Economie Européenne, No 26, novembre 1985, pp 5-85. Ce rapport a fait l’objet d’une très large convergence de vues entre les interlocuteurs sociaux (CES, UNICE, CEEP) au sein du dialogue social de Val-Duchesse.
-
[5]
Afin d’éviter toute confusion, nous parlons de charte sociale européenne pour la charte du Conseil de l’Europe et de charte communautaire pour les différents projets proposés.
-
[6]
Le Comité économique et social a établi un rapport sur "les aspects sociaux du marché intérieur (Espace social européen)" (Doc CES 5/87, 17 septembre 1987) dont le rapporteur était M. Beretta. Suite à ce rapport, le Comité économique et social décide de présenter un avis d’initiative dont la rédaction fut confiée au même rapporteur et qui fut adopté le 19 novembre 1987 par 97 voix ; il y eut 44 votes négatifs et 13 abstentions (Doc CES 1069/87).
-
[7]
CCE, Discours du Président Delors devant le Congrès de la CES, 12 mai 1988, SEC (88) 758, 17 mai 1988.
-
[8]
CES, Charte communautaire des droits sociaux adoptée par le comité exécutif des 1 et 2 décembre 1988, 16 décembre 1988.
-
[9]
Pour rappel, la CES avait adopté, au début de 1988, un texte précisant ses revendications concernant l’espace social européen. CES, Réalisation de l’espace social européen dans le marché intérieur, Programme social européen, adopté par le comité exécutif des 11 et 12 février 1988.
-
[10]
Dans l’ensemble des conventions de l’OIT, la CES pointe celles qui lui paraissent comme les plus importantes, à savoir les conventions 87 (liberté syndicale, 12), 98 (droit d’organisation et négociation collective, 11), 100 (égalité de rémunération, 12), 111 (discrimination emploi et professionnelle, 9), 122 (politique de l’emploi, 11), 154 (négociation collective, 2). Le nombre de pays de la Communauté européenne ayant ratifié chaque convention est indiqué en gras.
-
[11]
CES, Résolution sur la charte sociale adoptée le 18 avril 1988. Les améliorations proposées tiennent, d’une part, à une meilleure procédure de consultation des interlocuteurs sociaux et d’autre part, à la mise en place de procédures de plainte et réclamation permettant un recours de travailleurs et de leur organisation syndicale en cas de non-respect de la charte.
-
[12]
Sur cette notion d’interdépendance des traités sociaux, voir E. Vogel-Polsky, L’Europe sociale en l’an 2.000, in Observatoire social européen, Europe, Le défi social, Ed. Ciaco, 1989, pp. 107-133.
-
[13]
Bruno Trentin, secrétaire général de la CGIL italienne, résume ce problème en une phrase : "il faut que les syndicats deviennent d’abord un interlocuteur avant de trouver ses interlocuteurs, un interlocuteur homogène capable d’intervenir sur le grand jeu européen". Bruno Trentin, L’Europe syndicale en crise, Revue politique et parlementaire, No 91, Paris, janvier-février 1989, p. 44.
-
[14]
Pour rappel, l’UNICE est favorable à une harmonisation dans cinq domaines : la santé-sécurité, la mobilité, l’éducation et la formation, l’égalité des chances, la cohésion économique et sociale.
-
[15]
UNICE, La dimension sociale du marché intérieur, Bruxelles, 30 novembre 1988.
-
[16]
L’UNICE a trouvé des arguments dans le rapport Padoa-Schioppa, Efficacité, stabilité et équité, Une stratégie pour l’évolution du système économique de la Communauté européenne, Bruxelles, 1987, minéo. Pour une discussion critique de ce concept, voir Jean Vogel, L’ambiguïté du principe de subsidiarité, in M. Carrieri et al. (coord.), Vers l’Europe sociale, Rome, 1990, miméo. pp. 149-158 ; et Anne Raulier, Guy Deregnaucourt, op. cit.
-
[17]
CCE, 1992 : La nouvelle économie européenne, Economie européenne, No 33, mars 1988.
-
[18]
Cet avis avait été demandé par le ministre de l’Emploi et du Travail en date du 19 novembre 1989, CNT, Avis No 930 sur le Projet de charte communautaire des droits sociaux fondamentaux du 24 octobre 1989, Doc. 1.114/3-1.
-
[19]
Le fait que cet avis porte sur les projets de la Commission, ne change rien aux conclusions qu’on peut en tirer. C’est pourquoi nous n’avons pas respecté ici un ordre chronologique.
-
[20]
M. Jamoulle, V. Bertrand, L’incidence du droit communautaire sur le droit belge du travail, Cahier de droit européen, 1989/1-2.
-
[21]
Voir Anne Raulier et Guy Deregnaucourt, op. cit.
-
[22]
Eliane Vogel-Polsky, L’Europe sociale de l’an 2000, in Observatoire social européen, Europe, Le défi social, op. cit., p. 114.
-
[23]
Nous n’entrons pas ici dans la discussion des possibilités pour la Communauté européenne de signer de telles conventions. Pour les personnes intéressées par cet aspect, un chapitre entier y est consacré in E. Vogel-Polsky et alii, L’Europe sociale 1992, Illusion, alibi ou réalité, février 1989, minéo.
-
[24]
Idem, p. 68.
-
[25]
E. Vogel-Polsky, Intégration des droits sociaux fondamentaux dans l’ordre juridique communautaire par la ratification d’instruments du droit social international par la Communauté, in F. Guarriello et alii (dir.), Vers l’Europe sociale, La charte européenne des droits sociaux et le programme d’action, Rome, janvier 1990, minéo, p. 147. Pour les rapports entre une intégration communautaire de ces droits sociaux et les procédures de contrôle actuellement applicables, voir, Lammy Betten, Prospect for a Social Policy of the European Community and its Impact on the functioning of the European Social Charter, in Lammy Betten (ed.), The Future of the European Social Policy, Ed. Kluwer, Deventer, Boston, 1990, pp. 101-138.
-
[26]
Comité économique et social, Avis sur les droits sociaux fondamentaux communautaires, CES 270/89, 22 février 1989, Rapporteur F. Staedelin.
-
[27]
En gras l’amendement de Löw du groupe I.
-
[28]
Agence Europe, No 4964, 27-28 février 1989, pp. 14-15.
-
[29]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, COM (89) 248, 30 mai 1989.
-
[30]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux, COM (89) 471, 2 octobre 1989.
-
[31]
Europolitique, No 1527, pp. 7-8.
-
[32]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, Doc 9517/89, 30 octobre 1989.
-
[33]
L’exclusion de ces articles de la charte communautaire a été compensée par une clause mentionnant l’objectif de "respect de la compétitivité des entreprises", voir Europolitique, No 1533, 21 octobre 1989, p. 6.
-
[34]
Pour des raisons de lisibilité et afin de ne pas répéter inutilement les arguments, nous avons synthétisé les réactions à l’avant-projet et au projet proposé par la Commission. Les réactions des différents acteurs à la charte sociale et au programme d’action sont présentées dans CCE, Europe sociale, No 1, 1990.
-
[35]
Et ce malgré les menaces antérieures et particulièrement celles du Deutsche Gewerkschaftbund-DGB allemand. "Sans un socle minimum de règles sociales, le Marché intérieur n’est pas acceptable pour les travailleurs et le consensus des syndicats à la poursuite du processus d’intégration économique doit être remis en question". Voir Résolution du Comité directeur du Deutsche Gewerkschaftbund-DGB, CES, 10 mai 1989. Une lettre datée du 15 novembre 1989 adressée à Jacques Delors confirme le changement forcé de stratégie de la part de la CES, voir Information presse, CES, 15 novembre 1989.
-
[36]
UNICE, Avis de l’UNICE sur la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, 19 octobre 1989.
-
[37]
Le Parlement européen s’était déjà prononcé sur différents aspects de l’espace social européen lors de la séance plénière du 15 mars 1989. Voir Résolution sur l’espace social européen, JOC 96, 17 avril 1989.
-
[38]
M. Buron, parlementaire européen, résume particulièrement bien la situation du Parlement européen : "Le Parlement européen : un partenaire oublié…, mais obstiné", Europe sociale, op. cit, p. 14.
-
[39]
Parlement européen, Résolution sur la charte communautaire des droits fondamentaux, Doc A3-69/89, 22 novembre 1989.
-
[40]
Le Parlement européen, sans remettre en cause le choix du Comité économique et social, fait valoir qu’il détient une légitimité forte dont il eut été souhaitable de tenir compte : "Choix tout à fait justifié (celui du Comité économique et social) … mais le Parlement n’aurait-il pu, lui aussi - expression de l’ensemble des citoyens de l’Europe -, être consulté sur ce thème", M. Buron, Europe sociale, Ibidem.
-
[41]
Voir Europolitique, No 1545, 2 décembre 1989, p. 11.
-
[42]
Communication de la Commission sur son programme d’action relatif à la mise en œuvre de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, COM (89) 568, 29 novembre 1989. La liste et un résumé succinct de l’objet des quarante-sept initiatives que compte prendre la Commission figurent en annexe de ce Courrier hebdomadaire.
-
[43]
E. Vogel-Polsky, Quel futur pour l’Europe sociale après le Sommet de Strasbourg ?, Droit social, No 2, février 1990, pp. 219-227. Dans cet article, E. Vogel-Polsky établit une distinction entre les éléments constitutifs d’une politique sociale communautaire qui peuvent reposer soit sur des compétences sociales explicites, soit sur des compétences sociales implicites (liées aux domaines que la réalisation du marché intérieur va nécessairement affecter), soit sur l’ordre public social international (p. 225).
-
[44]
Affaire C-31/87.
-
[45]
Affaire C-113/89.
-
[46]
Rapport sur les initiatives législatives prioritaires en matière sociale à inscrire dans le programme de travail de la Commission pour 1990, PE 137.270.
-
[47]
Op. cit., partie B, Exposé des motifs, p. 5.
-
[48]
CES, Propositions de la CES pour le programme d’action, 14 novembre 1989.
-
[49]
Cité par Europe, No 1575, 19 janvier 1990, p. 15.
-
[50]
Cf. E. Vogel-Polsky, Quel futur pour l’Europe sociale après le Sommet de Strasbourg ?, op. cit.
-
[51]
Pour le texte intégral, voir Europe documents, Agence Europe, 29 mars 1990.
-
[52]
Europe, No 5129, 10 novembre 1989.
-
[53]
Les chefs d’Etat ou de gouvernement de onze Etats membres ont adopté ce texte.
-
[54]
Les commentaires des propositions de la Commission ont été synthétisés. Pour le texte intégral, voir COM (89) 568, 29 novembre 1989.
Introduction
1Ces deux dernières années, le débat communautaire en matière sociale s’est centré autour de l’idée d’une charte sociale des droits fondamentaux. Divers projets et propositions furent présentés. Le texte définitif adopté lors du Sommet de Strasbourg a pris la forme d’une déclaration solennelle. Dès lors, la charte sociale ne modifie pas les Traités et donc les compétences des Communautés européennes.
2La future politique sociale de la Communauté dérivant du programme d’action approuvé conjointement à la charte, s’inscrit ainsi dans le cadre juridique qui existait préalablement à l’adoption de la charte.
3Nous reprenons ci-dessous quelques éléments qui permettent de situer succinctement le contexte dans lequel se sont déroulés les débats autour de la charte sociale communautaire. Les lecteurs intéressés par une présentation approfondie de la politique sociale de la Communauté européenne jusqu’à ce jour se référeront à un Courrier hebdomadaire précédent [1].
4Depuis l’adoption, en 1985, du livre blanc sur le marché intérieur, un certain nombre d’acteurs de la scène communautaire ont fait savoir leur souhait d’une prise en compte de la dimension sociale du marché intérieur ; il en est ainsi de la Confédération européenne des syndicats-CES, mais aussi du Parlement européen.
5La réforme des Traités par l’adoption de l’Acte unique européen, entré en vigueur le 1er juillet 1987, a explicitement accru les compétences normatives des Communautés européennes en matière de santé et de sécurité sur les lieux de travail (art. 118A) et donne à la Commission la mission de favoriser le dialogue entre interlocuteurs sociaux (art. 118B). Sur cette base, la Commission a formulé de nouvelles propositions législatives en matière de santé et de sécurité, tout en poursuivant ses travaux dans les domaines qui sont de compétence communautaire depuis 1958, à savoir, pour l’essentiel, l’égalité de traitement, la libre- circulation des travailleurs et des personnes, la formation professionnelle, la coordination des systèmes de sécurité sociale. Les champs couverts par ces propositions furent jugés rapidement insuffisants par la CES et le Parlement européen pour prendre en compte l’impact du marché unique européen sur les relations de travail.
6Fin 1987, et en 1988, la discussion autour de l’idée d’un socle des droits sociaux fondamentaux se développe ; le débat sur l’information-consultation des travailleurs dans les entreprises multinationales est également relancé via la proposition de création d’un statut de société anonyme de droit européen.
7En septembre 1988, la Commission adopte un document de synthèse intitulé "La dimension sociale du marché intérieur" [2]. Ce document contient une liste exhaustive des sujets sur lesquels la Commission travaille en matière sociale, mais il n’annonce aucune initiative nouvelle par rapport aux débats en cours.
8Au fur et à mesure de l’état d’avancement des discussions autour de la charte sociale et lorsqu’il est devenu clair pour tous qu’elle n’aurait pas le statut d’un acte juridique contraignant, il y eut des pressions politiques, pour que la charte sociale soit assortie d’un "programme d’action relativement à la mise en œuvre de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux". Cette exigence fut satisfaite. C’est ainsi qu’en son article 28, la charte communautaire prescrit : "le Conseil européen invite la Commission à présenter, le plus vite possible, les initiatives qui relèvent de ses compétences prévues aux Traités en vue de l’adoption des instruments juridiques pour la mise en œuvre effective, au fur et à mesure de la réalisation du marché intérieur, de ceux des droits qui relèvent de la compétence de la Communauté".
1 – La charte sociale
9L’histoire de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux est extrêmement brève. A peine deux ans et demi séparent la première ébauche du gouvernement belge et la déclaration solennelle des chefs d’Etat et de gouvernement lors du Sommet de Strasbourg les 8 et 9 décembre 1989. Elle est également riche en propositions différentes, quant à leur contenu, à leur force obligatoire, à leur étendue, en un mot quant à la stratégie qu’elles proposaient et à la logique sous-jacente qui les structurait.
10Cette pluralité de projets est le signe de la difficulté d’atteindre un consensus en matière sociale. Cette difficulté s’était déjà marquée auparavant par une singulière confusion sémantique provenant de la multiplicité des expressions et concepts utilisés ("espace social", "dimension sociale", "modèle social", "politique sociale", "cohésion économique et sociale"). D’autant plus que, selon le moment ou l’interlocuteur, chaque terme se voyait attribuer des significations différentes.
11Ce fut, par exemple, le cas du terme l’"espace social" européen qui apparaît, pour la première fois, dans le mémorandum de 1981 du gouvernement français. Ce dernier se référait à trois domaines : l’emploi, la protection sociale et le dialogue social. Sept ans plus tard, le même terme, utilisé par Jacques Delors, signifiait la charte sociale, le droit à la formation et les aspects information-consultation-participation des travailleurs de la proposition de société anonyme européenne.
12Un même phénomène s’est produit pour la charte sociale communautaire, appelée également par certains, socle des droits sociaux fondamentaux. Contrairement à ce que l’on aurait pu croire, l’emploi de l’un ou l’autre terme n’induit pas des projets différents. Une analyse attentive des textes montre que le terme "socle" a été utilisé au départ pour se voir progressivement supplanté par celui de "charte". Nous les utilisons dès lors comme synonyme et respectons l’usage fait par chaque auteur.
13En présentant les principaux projets et en essayant de dégager la logique sous-jacente de ceux-ci et des acteurs qui les portent, nous adoptons quatre perspectives.
14La première s’attache à préciser l’étendue et la nature des domaines couverts. S’agit-il de droits fondamentaux ou liés à l’achèvement du marché intérieur [3] ?
15La deuxième met en évidence les destinataires des mesures envisagées : les travailleurs, les citoyens, certaines catégories spécifiques.
16La troisième tente de clarifier les méthodes proposées pour garantir ces droits sociaux. Quelle articulation est envisagée, si elle l’est, entre les principes généraux et les normes permettant leur mise en œuvre ?
17La quatrième éclaire la nature et le niveau de régulation envisagé : instruments législatifs ou conventionnels, contraignants ou non, centralisés ou non.
18Ces axes qui guident notre lecture des différents projets n’apparaissent pas nécessairement dans l’analyse de chacun d’entre eux en particulier. Nous avons en effet privilégié les éléments qui nous semblaient être les plus novateurs (en soi ou par rapport à d’autres propositions) ou significatifs.
19Les réactions des acteurs ou des institutions ne sont reprises que si celles-ci portent sur la charte sociale et dans la mesure où leur position peut éclairer l’un ou l’autre aspect d’un projet ou d’une dynamique.
Le mémorandum de la présidence belge sur la flexibilité-adaptabilité (11 mai 1987)
20Ce mémorandum peut être considéré comme le véritable point de départ du débat sur un socle de droits sociaux fondamentaux. La note du ministre belge de l’Emploi et du Travail procède d’une constatation générale : depuis le début des années 80, la politique sociale communautaire est au point mort. Ce texte tente de débloquer cette situation en proposant une nouvelle méthode.
21Son angle d’attaque est une réflexion sur la flexibilité dans le cadre de la stratégie de coopération pour la croissance et l’emploi telle que définie par la Commission [4]. Le mémorandum belge remarque que le principe général de la flexibilité, dont l’enjeu est l’adaptation des économies européennes à la concurrence internationale, est admis comme nécessaire par tous. Mais la flexibilité "ne peut s’identifier à une déréglementation sociale générale". Dès lors, il faut parvenir à concilier les besoins de flexibilité et des garanties sociales fondamentales et générales.
22Cette réflexion n’est pas à proprement parler originale. Ce qui par contre l’est bien plus, c’est la méthode proposée pour concilier flexibilité et garanties sociales fondamentales.
23Le gouvernement belge constate que les gouvernements ont hésité à prendre des mesures contraignantes pour réguler les marchés du travail, préférant laisser cette matière à la négociation entre interlocuteurs sociaux. Ces derniers ne sont pas parvenus à dégager de consensus dans ce domaine.
24Tirant les leçons de cet échec, le ministre belge propose que les gouvernements s’accordent sur un "socle de droits sociaux fondamentaux". Ce socle fournirait aux interlocuteurs sociaux "une base stable et commune à partir de laquelle ils pourraient négocier".
25L’objectif est de définir un ensemble de garanties sociales qui ne peuvent être remises en cause dans leur principe par la pression de la concurrence et par la recherche de la compétitivité. Dans la définition de ces principes qui constituent en quelque sorte les fondements du "modèle social européen", ce texte propose de tenir compte des conventions et recommandations internationales pertinentes en la matière, notamment celles de l’Organisation internationale du travail-OIT ainsi que de la charte sociale européenne du Conseil de l’Europe de 1961 [5].
26Le gouvernement belge propose à titre indicatif une liste non exhaustive de garanties sociales concernant les relations industrielles et les conditions d’emploi et de travail ; un accent particulier est mis sur la question du travail atypique.
27La proposition belge a le mérite d’ouvrir de nouvelles perspectives bien que certains points restent assez flous. Ainsi, aucune précision n’est apportée quant au caractère contraignant ou non des décisions prises au cours des différentes étapes de mise en œuvre de ce socle. De plus, le lien entre cette liste de principes généraux et les conventions de l’OIT ou la charte sociale du Conseil de l’Europe n’est pas clairement défini.
Le rapport et l’avis "Beretta" du Comité économique et social (septembre-novembre 1987)
28Peu de temps après, le Comité économique et social [6] reprend à son compte l’idée avancée par le ministre belge de l’Emploi et du Travail d’un socle de droits sociaux fondamentaux.
29L’importance de cet avis tient moins à l’originalité de son propos qu’au fait qu’un organe communautaire s’est saisi de et a repris la proposition belge. Par ce fait, l’idée d’un socle social va recevoir une plus large publicité et dépasser le cercle d’un petit groupe de spécialistes.
30Remarquons que le Comité économique et social propose comme instrument juridique une directive cadre.
La proposition de Jacques Delors lors du Congrès de Stockholm de la Confédération européenne des syndicats (12 mai 1988)
31Presque un an, jour pour jour, après la proposition belge, Jacques Delors relance cette idée de socle social. Il présente le "socle des droits fondamentaux comme l’un des trois axes majeurs" de l’espace social européen (les deux autres étant le droit à la formation et l’information-consultation des travailleurs).
32Concernant les étapes de mise en œuvre de celui-ci, il suggère à la fois la méthode à suivre et ses objectifs en matière de régulation : "Pourquoi (…) la Communauté n’adopterait-elle pas un’socle’ de droits sociaux garantis qui s’inspirerait de la charte sociale européenne. Ce’socle’ pourrait être négocié par les partenaires sociaux et traduit ensuite en législation communautaire. Il servirait de base au dialogue social et au renforcement de la cohésion sociale européenne. Il aurait un caractère obligatoire" [7].
33Par rapport à la proposition belge, le schéma présenté par Jacques Delors donne donc un caractère contraignant à ce socle. Il ne précise toutefois pas le type d’instrument juridique prévu pour en assurer le caractère obligatoire.
34Les syndicats adoptent au cours de leur Congrès une résolution sur ce thème.
La charte sociale communautaire selon la Confédération européenne des syndicats-CES
35Les syndicats ne pouvaient se contenter d’une revendication aussi générale par rapport à ce qui paraissait devenir un des débats clé de la dimension sociale de la Communauté européenne. C’est pourquoi, lors d’une réunion tenue à Madrid les 6 et 7 octobre 1988, le comité exécutif de la Confédération européenne des syndicats-CES décide de préciser ses exigences. Il charge le secrétariat de la CES, avec l’aide de l’Institut syndical et d’un groupe de travail, de présenter un document qui est adopté par le comité exécutif réuni les 1 et 2 décembre 1988 [8].
36En préambule, la CES précise que ce socle ne peut se confondre avec l’ensemble de l’espace social européen : il n’en constitue qu’une partie ; des mesures supplémentaires sont nécessaires pour compléter d’autres aspects de l’espace social [9].
37L’objectif attribué à ce socle est, d’une part, d’éviter le "dumping social" et, d’autre part, de permettre une convergence par le haut des différentes situations sociales dans la Communauté.
38Pour répondre à ces deux objectifs de nature différente, le premier de type défensif (crainte d’une dérégulation sociale) et le second de nature offensive (amélioration des situations existantes), la CES va définir deux "piliers" à sa proposition de socle social : les droits fondamentaux reconnus dans des Traités internationaux et des droits communautaires liés à la réalisation du marché intérieur.
Les droits fondamentaux
39Les droits fondamentaux visés par la CES sont ceux repris dans les conventions de l’OIT [10], la charte sociale du Conseil de l’Europe y compris son protocole additionnel, ainsi que ceux repris dans la charte des Droits de l’homme et des droits économiques et sociaux de l’ONU. La CES émet une série de critiques vis-à-vis de ces instruments internationaux. Tout d’abord, elle remarque qu’ils sont de valeur et d’obligation inégales. Ensuite, elle considère les procédures de contrôle et de sanction comme fort insuffisantes. Enfin, elle constate que les citoyens n’ont pas de possibilité de faire valoir directement les droits ainsi reconnus.
40Malgré ces critiques, la CES souhaite que les Etats membres ratifient ces conventions dans la mesure où elles ne portent pas atteinte à un droit acquis supérieur. Les procédures de contrôle resteraient celles prévues par ces instruments, à l’exception de celles contenues dans la charte sociale du Conseil de l’Europe qui devraient être renforcées [11].
41Pour les syndicats, la Cour de justice des Communautés européennes doit, en vertu de l’interdépendance des traités sociaux, pouvoir faire référence à ces droits fondamentaux dans l’élaboration de sa jurisprudence [12].
Les droits liés au marché intérieur
42La CES reprend dans ce second "pilier" une série de revendications traditionnelles. Les principaux points que la CES entend voir figurer dans une charte sociale communautaire sont les suivants :
- droit à la démocratie économique dans les entreprises européennes quel que soit leur statut juridique :
- information, consultation, négociation, participation ;
- mise en place de structures de représentation transfrontalière pour les entreprises multinationales européennes ;
- droit à l’action collective ;
- droit de tous les travailleurs européens quelles que soient la taille de leur entreprise et la forme de leur emploi (temps partiel, contrat à durée déterminée, intérim) :
- à la protection sociale (chômage, maladie, congés de maternité, accidents, invalidité, retraite) ;
- à être garantis par des législations et/ou des conventions collectives relatives aux conditions de leur emploi (milieu de travail, organisation du travail, durée du travail, salaire…) ;
- à être garantis contre les conséquences sociales (emploi, reconversion, formation) des changements structurels liés à la réalisation du marché intérieur afin que ces changements soient socialement acceptables ;
- cadre communautaire aux relations professionnelles européennes (interprofessionnelles, sectorielles, entreprises européennes) et aux accords pouvant en découler ;
- droit à la santé-sécurité sur le lieu de travail en liaison avec la libre circulation des produits et des machines ;
- droit à la formation continue :
- reconnaissance mutuelle des diplômes et des qualifications ;
- création d’un congé-éducation européen.
43La CES propose que cette liste de droits soit, dans un premier temps, adoptée par le Conseil. Dans un deuxième temps, ces principes seraient complétés par des directives et des règlements leur donnant un contenu concret "permettant une harmonisation dans le progrès".
44Pour la CES, ces droits doivent être garantis par des instruments législatifs, contraignants et centralisés. Cette demande qui pourrait paraître en contradiction avec la volonté affichée des syndicats du respect de l’autonomie de négociation des interlocuteurs sociaux, s’explique par leur appréciation très critique des résultats du dialogue social de Val-Duchesse.
45La CES insiste sur les modalités de recours pour veiller à une bonne application des droits sociaux. Elle demande un droit d’interpellation ou de recours auprès de la Commission, voire de la Cour de justice, ouvert à tout travailleur individuel, groupe de travailleurs ou syndicat quand il(s) estime(nt) qu’une règle communautaire n’est pas respectée, qu’un dumping social est exercé ou qu’une dérégulation sociale est préconisée sous prétexte des contraintes du marché intérieur.
46En divisant ce socle social en deux parties, les syndicats ont plus clairement délimité ce qui relève de droits sociaux fondamentaux et de droits liés au marché intérieur. Ils semblent considérer que la reconnaissance de droits fondamentaux va de soi et attachent donc plus d’importance à ceux liés au marché intérieur.
47Si la liste des droits devant être intégrés dans cette charte sociale est effectivement moins longue que celle des droits liés à l’espace social européen, les syndicats demandent des garanties de natures disparates. Certaines sont déjà prises en compte par la Communauté européenne (reconnaissance mutuelle des diplômes, santé-sécurité), tandis que d’autres constituent une ouverture vers de nouveaux domaines (information-participation). Enfin, ils demandent que soit garanti un cadre de négociation, ce qui constitue une revendication de nature différente.
48La principale difficulté pour les syndicats affiliés à la CES est de parvenir à dégager distinctement dans leur revendication ce qui relève du principal et de l’accessoire. En d’autres mots, d’aboutir à un compromis "dynamique" hiérarchisant leurs demandes et leurs objectifs en fonction d’une stratégie cohérente [13].
La position de l’union des Confédérations de l’industrie et des employeurs d’Europe-UNICE
49D’une manière générale et à l’exception des domaines couverts par les Traités [14], l’UNICE est opposée à l’extension des pouvoirs communautaires en matière sociale [15]. Elle considère que ce domaine doit être réglé au niveau national, régional, sectoriel, voire au niveau de l’entreprise. Le principe de base qui guide sa réflexion est celui de la subsidiarité [16].
50L’UNICE n’est pas défavorable à une charte sociale, si celle-ci se limite à une déclaration solennelle "affirmant la détermination de tous les Etats membres de la CEE à respecter et appliquer les droits sociaux fondamentaux".
51Pour toute initiative nouvelle ou contraignante en dehors des domaines couverts par le Traité, l’UNICE propose un "test de pertinence" en six points :
"- l’initiative répond à un besoin dûment démontré,
- l’action ne peut être entreprise efficacement à un niveau non-communautaire, en application du principe de "subsidiarité",
- une évaluation convenable des implications en termes de coût et de contrainte, du point de vue de l’efficacité des entreprises, ainsi que de l’impact sur les PME et sur la compétitivité internationale, doit être réalisée,
- les propositions ne compromettent pas les systèmes nationaux régissant les relations humaines dans l’industrie, ni l’équilibre établi en application des procédures et pratiques nationales,
-’initiative proposée contribue à la croissance, à la création de nouveaux emplois ou à l’achèvement du marché intérieur,
- la création de nouveaux droits doit avoir pour contrepartie les obligations et les responsabilités correspondantes".
53Avec un tel arsenal de conditions et de preuves préalables, il devient très difficile, sinon impossible, de mener une politique sociale communautaire. L’UNICE demande pour le social ce qui n’a jamais été réalisé pour aucun autre domaine de compétence communautaire. Pour mémoire, le rapport Cecchini [17] a été demandé après qu’un accord politique eut été obtenu sur l’"objectif 92". Et encore, de nombreux économistes s’interrogent sur la pertinence des présupposés économétriques et les liaisons établies entre les aspects micro et macro-économiques.
54Les patronats européens n’étant pas demandeurs d’une charte sociale, ils s’alignent sur les positions des opposants les plus intransigeants, en leur sein, à une dimension sociale communautaire.
Un constat d’échec et la relance de J. Delors
55Le blocage persistant entre interlocuteurs sociaux est illustré, dans le cas de la Belgique, par l’avis du Conseil national du travail-CNT [18] sur le "Projet de charte communautaire des droits sociaux fondamentaux" [19].
56Le Conseil national du travail n’a pu trouver une unanimité en son sein que sur une déclaration de principe, très générale et particulièrement peu développée (elle compte moins de 25 lignes), sur la dimension sociale du marché intérieur. Un accord a été obtenu sur deux points principaux : la dimension sociale doit se voir accorder le même intérêt que la dimension économique et il faut parvenir à un progrès social dans la mesure des possibilités économiques.
57Dès qu’il s’agit de préciser les contenus et les moyens à mettre en œuvre pour réaliser cette dimension sociale, les positions des représentants des employeurs et des travailleurs divergent complètement. Sans rentrer dans le détail de ces positions, on constate que les uns et les autres s’inspirent largement des propositions de l’UNICE et de la CES.
58Ce blocage est particulièrement symbolique et significatif pour deux raisons :
- la Belgique est l’un des pays de la Communauté européenne où le dialogue et le sens du compromis entre interlocuteurs sociaux sont particulièrement développés ;
- en tenant compte de l’expérience passée et du niveau élevé de protection du système social belge, les mesures proposées n’auraient eu que peu d’incidences sur la législation sociale en vigueur [20].
59Les positions des interlocuteurs sociaux sont totalement divergentes, voire contradictoires. Il ne semble pas possible d’aboutir à un compromis. Jacques Delors, président de la Commission et Manuel Marin, commissaire espagnol chargé des Affaires sociales, tentent de relancer l’idée en confiant, par une lettre datée du 11 novembre 1988, au Comité économique et social le soin de présenter un avant-projet de charte.
60Cette démarche est nouvelle. En effet, le Comité économique et social donne son avis sur l’ensemble de la législation communautaire et depuis 1972 peut présenter des avis d’initiative, mais c’est la première fois que la Commission le consulte de cette manière avant l’élaboration d’une proposition communautaire. Le délai fixé était extrêmement court. Cet avant-projet aurait dû être rédigé pour le début de la présidence espagnole (janvier 1989), alors que les thèmes soumis à la réflexion et à l’appréciation du Comité économique et social étaient fort étendus. On y trouve, entre autres, la protection sociale, le dialogue social, les conventions collectives, le contrat de travail, la santé-sécurité des travailleurs, l’information et la consultation des salariés, …
61Pour sa part, le Comité économique et social qui tente depuis sa création par le Traité de Rome de se faire reconnaître comme une institution à part entière va saisir cette occasion en espérant qu’en cas de succès, son poids institutionnel en sortirait renforcé.
62Avant d’analyser le texte du Comité économique et social, nous présentons la proposition d’Eliane Vogel-Polsky, professeur de droit à l’Université libre de Bruxelles. Ses thèses ont fortement marqué l’avis du Comité économique et social, dont elle fut nommée expert auprès du rapporteur F. Staedelin (groupe des travailleurs). Toutefois, comme nous le verrons, l’avis du Comité économique et social constitue un texte de compromis qui va tantôt plus loin, tantôt moins loin que la proposition d’Eliane Vogel-Polsky.
La proposition d’Eliane Vogel-Polsky
63Le point de départ de l’analyse d’E. Vogel-Polsky est une appréciation extrêmement sévère des résultats de la politique sociale communautaire existante. De plus, comme bien d’autres, elle constate les multiples blocages mis à son développement [21].
"L’impossibilité actuelle d’adopter des instruments juridiques européens de politique sociale - de faible portée comme la Recommandation - montre que dans l’actuel débat sur la protection de l’emploi, non seulement les résistances et les contradictions sont nombreuses et lourdes mais encore le diagnostic disparate. Disons-le sans hypocrisie, l’Europe sociale d’aujourd’hui existe à peine. Et l’avenir, du point de vue institutionnel communautaire n’est pas prometteur" [22].
65La voie originale suivie par E. Vogel-Polsky est de dissocier les problèmes liés au marché unique des droits sociaux fondamentaux pour se concentrer sur ces derniers. La stratégie proposée est que la Communauté européenne en tant que telle ratifie les principales conventions de l’OIT ainsi que la charte sociale du Conseil de l’Europe [23].
66Quel est le mérite de cette approche selon son auteur ? "Celui de réaliser l’intégration de droits sociaux fondamentaux sans discussion ni marchandage. Les textes des conventions qui seraient ratifiées par la CEE, sont connus de tous. Leur rédaction a fait l’objet de longues négociations et a rencontré le consensus au niveau international" [24].
67C’est sans nul doute un des points forts de ce raisonnement. Il est difficile pour le patronat européen de refuser l’adoption de tels textes en faisant prévaloir les risques de perte de compétitivité. D’autre part, il s’agirait d’un réel test prouvant l’existence ou non d’une volonté politique de la part des gouvernements de reconnaître à l’échelle de la Communauté européenne cet ensemble de droits fondamentaux.
68Juridiquement, cette ratification n’équivaut pas à l’adoption d’un règlement mais aurait, à terme, des effets globalement comparables.
"La ratification par la CEE ne donnerait pas à ces conventions la force juridique et les effets directs horizontaux du Règlement, mais elle fera pénétrer ces normes dans l’ordre juridique communautaire. Leur texte identique sera uniformément applicable dans les Etats membres, avec la spécificité et les garanties supranationales qui sont celles du droit communautaire et avec les possibilités de recours devant la Cour de justice des Communautés européennes en cas de violation ou de non-garantie de ces normes par l’un des Etats membres" [25].
70Cette proposition a une forte cohérence interne. L’étendue et la nature des domaines couverts de même que les bénéficiaires, ne comportent pas la moindre ambiguïté. La méthode est originale et novatrice. Le mode de régulation est contraignant et centralisé. De plus, la compétence de la Communauté européenne aurait été élargie tant dans sa capacité à signer des instruments sociaux internationaux que dans la définition de ses compétences internes en matière sociale.
L’avis du Comité économique et social (janvier-février 1989)
71Pour bien comprendre le sens de l’avis du Comité économique et social [26], il faut rappeler sa composition et son mode de fonctionnement. Le Comité économique et social est composé de trois groupes : le groupe I : les employeurs ; le groupe II : les travailleurs et le groupe III dit des activités diverses. Ce dernier groupe est peu homogène. Il comporte des représentants des agriculteurs, des transporteurs, des PME, des familles, d’organismes de protection de l’environnement ou encore de personnalités indépendantes,… Les conseillers sont nommés par le Conseil à titre individuel et leur avis ne lie pas leur organisation d’origine. Le Comité économique et social fonctionne comme un lieu de recherche de consensus et la plupart de ses avis sont adoptés à de très larges majorités, sinon à l’unanimité.
72Pour tenter de rallier à leur cause les conseillers du groupe III, employeurs et travailleurs vont leur faire de larges concessions quant aux domaines couverts par le terme social. C’est ainsi que l’avis comprendra des références aux droits :
- à l’éducation,
- à la protection de la vie privée,
- des consommateurs à la protection de leur santé,
- à la protection de l’environnement,
- à la préservation du patrimoine culturel, etc.
73L’avis du Comité économique et social se divise en deux parties :
- les principes fondamentaux comprenant des droits généraux (voir supra) et des normes en matière de travail, de marché du travail et de conditions de travail ;
- les mesures liées à la dimension sociale du marché intérieur concernant :
- le licenciement et l’utilisation abusive du travail atypique transfrontalier ;
- le droit à l’information et la consultation en cas de restructuration ou fusion d’entreprises ;
- l’application des lois sociales et des conventions collectives en vigueur lors de la passation des marchés publics.
74Le Comité économique et social rappelle également son attachement au dialogue social qui devrait aboutir à des accords-cadres et à des conventions collectives européennes. Par ailleurs, il souhaite que le dialogue social se développe au niveau sectoriel.
75Une ambiguïté subsiste quant à la manière dont cette charte sociale serait mise en œuvre. En effet, une partie du groupe des employeurs a manifesté son accord pour approuver cet avis moyennant une série d’amendements. Ceux-ci portaient sur la garantie des droits fondamentaux dans les ordres juridiques nationaux et non pas au niveau communautaire. Une rédaction trop rapide de ces amendements a produit un texte à double lecture.
"Selon le Comité, ce sont les instruments et les procédures prévus par le Traité qui doivent être utilisés pour garantir, dans le cadre des ordres juridiques des Etats membres, le respect des droits sociaux fondamentaux …" [27].
77Une lecture stricto sensu de cet article montre que ces obligations doivent être garanties au niveau communautaire par un instrument contraignant (directive ou règlement) afin de créer des obligations effectives dans les ordres juridiques nationaux. Une lecture basée sur la volonté exprimée par la partie des employeurs qui a voté le texte montre que ces derniers entendaient que ces droits soient garantis uniquement au niveau national.
78Cet avis est adopté le 23 février 1989 par une très large majorité, soit 135 voix, 22 conseillers exprimant un vote négatif et 8 se sont abstenus.
79L’UNICE réagit très rapidement en ne s’estimant pas tenue par cet avis, bien qu’il ait été approuvé par une partie du groupe des employeurs (qui siègent, rappelons-le, à titre individuel). La CES s’est félicitée de cet avis qu’elle considère comme équilibré et permettant d’élaborer rapidement une proposition concrète de charte communautaire [28].
L’avant-projet de la Commission (mars-juin 1989)
80La Commission accorde un accueil réservé aux propositions du Comité économique et social. Une seule idée est retenue : le social peut dépasser les droits des seuls travailleurs. La Commission propose sa propre définition des droits fondamentaux et sa méthode pour qu’ils soient respectés.
81Une des critiques qu’elle adresse indirectement au projet du Comité économique et social est que cette proposition ne tient pas assez compte des problèmes spécifiques liés au marché intérieur. Elle estime que les conventions internationales ne répondent pas à ces enjeux. Sur base de quoi, elle se refuse à envisager leur ratification.
82En écartant une telle démarche, la Commission élimine une voie intéressante ou qui aurait, à tout le moins, mérité un examen plus approfondi. Elle se trouve également face à des contraintes (désaccord des interlocuteurs sociaux, refus du gouvernement britannique à toute extension des compétences communautaires) qui perdurent depuis près de dix années.
83Dès lors, la Commission doit faire face à un dilemme :
- soit proposer une charte communautaire qui ait quelque contenu et une force obligatoire au risque de bloquer le processus communautaire notamment sur le dossier de l’union monétaire (auquel le Royaume-Uni est également opposé) ;
- soit tenter d’affadir la charte et d’en éliminer les aspects les plus rebutants pour le gouvernement de Mme Thatcher.
84Au cours des débats préliminaires et des Conseils des Affaires sociales, il est apparu rapidement qu’aucun geste n’était à espérer des britanniques. Les déclarations du secrétaire d’Etat, Norman Fowler, ne laissaient présager aucun assouplissement.
85La Commission s’engage alors sur la voie d’une charte avec un contenu minimum [29], faisant dans son avant-projet la part belle aux raisonnements de l’UNICE et postposant l’utilisation d’instruments contraignants à un programme d’action. La Commission propose que la charte prenne la forme d’une déclaration solennelle, c’est-à-dire sans force obligatoire. Le préambule précise que la mise en œuvre de ces droits fondamentaux "ne peut justifier (..) des régressions par rapport à la situation actuellement existante dans chaque Etat membre".
86Après l’adoption de cette charte, la Commission s’engage à présenter un programme d’action d’ici le 30 juin 1990.
87En vertu du principe de subsidiarité, une part importante de la mise en œuvre des droits sociaux est laissée aux Etats membres, de même que le choix des moyens, lois ou conventions collectives au niveau national, régional, sectoriel ou de l’entreprise.
88Sous les douze têtes de chapitres ci-dessous, trente et un droits sont énumérés :
- le droit à la libre circulation ;
- l’emploi et rémunération ;
- l’amélioration des conditions de vie et de travail ;
- le droit à la protection sociale ;
- le droit à la liberté d’association et à la négociation collective ;
- le droit à la formation professionnelle ;
- le droit à l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes ;
- le droit à l’information, à la consultation et à la participation des travailleurs ;
- le droit à la protection de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail ;
- la protection des enfants et des adolescents ;
- les personnes âgées ;
- les personnes handicapées.
89Par rapport aux projets antérieurs, deux basculements s’opèrent :
- le point central n’est plus la charte qui, devenue solennelle, n’a pas de force obligatoire, mais les mesures concrètes à prendre au départ de cette charte ;
- en vertu du principe de subsidiarité, le rôle de la Communauté européenne pour la mise en œuvre de cette charte est limité au profit de garanties devant être accordées par les Etats membres.
90Cette proposition est avalisée par le Conseil des Affaires sociales réuni le 12 juin 1989 à Luxembourg ; il adopte, avec l’appui de dix Etats sur douze, un projet de conclusion pour le Sommet de Madrid (26-27 juin 1989). Le principal enjeu de ce Sommet était d’accélérer le processus d’union monétaire et de parvenir à fixer une date pour la convocation d’une Conférence intergouvernementale sur le sujet. Par rapport à cette priorité, le débat sur la charte sociale n’a été qu’esquissé. D’autant que la présidence française qui succédait à la première présidence espagnole semblait disposer de plus d’atouts pour arracher un accord unanime. Se prononçant favorablement à onze contre un sur cet avant-projet, les Chefs d’Etat et de gouvernement demandent à la Commission de préciser ses propositions et surtout de présenter le programme d’action conjointement à la charte.
Le projet révisé de la Commission (juillet-septembre 1989)
91Le nouveau projet présenté par la Commission [30] n’est pas fondamentalement différent de son avant-projet. Mais un point extrêmement délicat a été profondément modifié : il s’agit du statut des travailleurs exerçant leur activité temporairement dans un autre Etat membre. L’avant-projet, dans ses articles 6 à 8, définissait des règles générales applicables à tous les travailleurs :
"Les conditions salariales pratiquées dans le pays d’accueil ainsi que les autres avantages sociaux liés au salaire doivent être garantis en particulier aux travailleurs d’un autre Etat membre de la Communauté effectuant dans le pays d’accueil concerné des travaux pour le compte d’une entreprise de sous-traitance".
93Cet article a été transformé dans le projet pour en exclure l’emploi temporaire :
"Les conditions de travail et la protection sociale sont garanties à tous les travailleurs communautaires amenés à exercer un emploi non temporaire dans un Etat membre autre que leur pays d’origine, notamment à l’occasion de la passation des marchés publics, dans des conditions identiques à celles reconnues aux travailleurs du pays d’accueil".
"Le recours à la sous-traitance dans le cadre de la libre prestation des services, lorsqu’il conduit un travailleur d’un Etat membre à effectuer des travaux non temporaires dans un autre Etat membre, ne peut faire obstacle au principe de l’égalité de traitement avec les salariés du pays d’accueil, notamment en ce qui concerne les conditions salariales et les autres avantages sociaux liés au salaire".
96Des déclarations d’un membre du cabinet de Vasso Papandreou, commissaire aux Affaires sociales, alimentent la controverse sur ce sujet délicat. A la question de préciser le sens des articles visant les emplois temporaires dans un autre Etat, celui-ci répond :
"Le mieux est de prendre un exemple. Une entreprise portugaise décroche un contrat de travaux publics dans un Etat membre, parce que son offre est moins chère. Moins chère parce que ses coûts salariaux sont moins élevés. Ou bien un contrat de sous-traitance. Une entreprise belge obtient un contrat public, et passe un contrat de sous-traitance avec une entreprise portugaise, qui vient travailler ici. S’il s’agit de travaux ponctuels ou temporaires, on ne peut pas demander à l’entreprise portugaise avec ses travailleurs portugais, ici dans le cadre d’un contrat de sous-traitance, de payer ses travailleurs aux mêmes conditions de salaires et d’avantages liés aux salaires que les entreprises belges : on pénaliserait alors la possibilité qu’ont les entreprises portugaises de se développer sur le marché européen. C’est tout différent s’il s’agit d’emplois non temporaires" [31].
98Cette formulation constitue une véritable provocation pour les syndicats. L’accepter serait ouvrir une brèche au principe d’égalité salariale, de protection sociale et de conditions de travail sur un territoire donné. Volontairement ou involontairement, cette déclaration donne des arguments à tous ceux qui craignent que l’achèvement du marché intérieur ne conduise à des processus de "dumping social".
99A l’exception de cet article, les autres modifications sont mineures. L’étendue du droit de grève est précisée ou encore la notion de contrat écrit apparaît (art. 12).
100Il se confirme que l’enjeu principal n’est plus la charte mais bien le programme d’action qui doit l’accompagner.
Le projet final approuvé lors du Conseil européen de Strasbourg (octobre-décembre 1989) [32]
101Le Conseil des ministres des Affaires sociales tranche cette question épineuse des marchés publics et des contrats temporaires. Il apporte également de nouvelles modifications à cette charte. Le problème des emplois temporaires liés aux marchés publics reçoit un traitement particulier. A défaut d’accord politique, il est tout simplement ôté de la charte pour figurer dans le programme d’action. Notons que le Portugal, et dans une moindre mesure l’Espagne, n’étaient pas opposés au maintien de la formulation précédente, mais ces pays n’étaient pas à même d’empêcher le retrait de cette partie controversée de la charte. Pour autant, on n’en est pas revenu à la première formulation [33].
102Les bénéficiaires de la charte ont changé. Tandis que l’avant-projet utilisait fréquemment le terme citoyen et le projet recourait à celui de personne, la version définitive emploie le terme de travailleur qui apparaît ainsi pour la première fois dans l’intitulé de cette charte. Ce choix n’est pas innocent. Il accompagne le recentrage progressif de la charte vers les domaines traditionnels de compétence communautaire, que ce soit par le biais du Traité (égalité homme-femme, libre circulation, santé-sécurité, formation), de programmes d’action (jeunes, handicapés) ou de propositions de directive (contrat atypique, information-consultation des travailleurs).
103D’autres modifications sont également apportées.
104Concernant la formation professionnelle (art. 15), les obligations des autorités publiques, des entreprises ou des interlocuteurs sociaux deviennent symboliques du fait d’un changement de mode. Alors que le projet utilisait l’indicatif présent (doivent), la version définitive utilise le conditionnel (devraient). De même, une formation pour les jeunes travailleurs devrait (au lieu de doit) avoir lieu pendant le temps de travail (art. 23).
105De manière générale, les termes utilisés deviennent plus imprécis, sinon fort vagues. Par exemple, l’article 5 par. 1 du projet qui stipulait : "il convient (..) que soit institué un salaire décent, notamment au niveau du salaire de base" est devenu dans la version définitive : "il convient que (…) soit assuré aux travailleurs une rémunération équitable, c’est-à-dire une rémunération suffisante pour leur permettre d’avoir un niveau de vie décent".
106Dans le même ordre d’idée, la notion de revenu minimum disparaît au profit de "ressources suffisantes" (art. 10, art. 25).
107Les dispositions du chapitre consacré à la protection des enfants et des adolescents sont également fortement atténuées. L’âge minimum pour commencer à travailler est abaissé de 16 à 15 ans. La formation professionnelle post-scolaire doit avoir une "durée suffisante" alors que le projet prévoyait deux ans. La durée du travail pour les travailleurs de moins de 18 ans, antérieurement fixée à 40 heures, doit être seulement "limitée". Enfin, il est ajouté à l’article 21 : "Tout jeune doit recevoir une rénumération équitable, "conformément aux pratiques nationales".
108Ces dernières modifications n’ont pas suffi pour infléchir la position du gouvernement conservateur britannique. Lors du Sommet de Strasbourg, la déclaration solennelle est donc adoptée par onze chefs d’Etat ou de gouvernement.
109Conjointement à cette charte, le programme d’action est déposé. Avant de passer à l’examen de ce dernier, nous avons synthétisé quelques réactions aux projets de la Commission et à la version finale adoptée à Strasbourg.
Quelques réactions aux projets de la Commission
110Les syndicats [34] ont été déçus que les propositions de la Commission ne prennent pas en compte leurs revendications. Au-delà des critiques sur le caractère non contraignant de cette charte et la faiblesse de son contenu, les syndicats ont rapidement compris que les enjeux s’étaient déplacés vers le programme d’action [35]. Ils ont livré néanmoins une dernière bataille en rassemblant à Bruxelles, le 18 octobre, plus de 17.000 militants et délégués pour exiger que soit tenu compte des demandes syndicales.
111L’UNICE a également fait une série de remarques bien que, globalement, le projet tel qu’adopté réponde largement à son attente et, en tous cas, apaise ses craintes à l’encontre d’une charte ayant des effets contraignants [36].
112Le Parlement européen a fait de la dimension sociale du marché intérieur un de ses chevaux de bataille [37]. Pourtant, il n’a pas réussi à imposer son empreinte dans le débat sur la charte sociale [38]. Dans une résolution adoptée le 22 novembre 1989 [39], le Parlement européen a fait part de ses regrets face au projet de la Commission, tout en rappelant ses priorités. Exclu de la préparation d’un avant-projet par la demande formulée au Comité économique et social [40], le Parlement européen s’est résigné à se centrer sur le programme d’action tentant d’être à la pointe des revendications.
113Lors du Conseil des ministres des Affaires sociales du 30 novembre 1989, le président du Parlement européen, Enrique Baron Crespo, a fait part de la déception du Parlement européen vis-à-vis de la charte communautaire et du programme d’action de la Commission. Il a également regretté que le Parlement européen ne puisse amender le projet présenté au Sommet de Strasbourg [41].
2 – Le programme d’action
114La Commission a adopté son nouveau programme le 29 novembre 1989 et celui-ci a été porté à la connaissance du Conseil avant que la charte ne soit adoptée [42].
115Ce document contient quarante-sept "initiatives", regroupées sous treize intitulés qui correspondent à ceux de la charte communautaire avec un ajout qui concerne des "initiatives" dans le domaine du marché du travail. Ces "initiatives" seront présentées en 1990 et en 1991 et la Commission demande que les autres institutions communautaires se prononcent endéans un délai de 18 à 24 mois ; concrètement, le Conseil des ministres pourrait adopter un certain nombre de propositions avant la fin de 1992. A ce jour, aucun texte de proposition de directive n’est publié.
116Le document communautaire contient une introduction générale et, pour chacun des treize domaines délimités, un bref rappel des dispositions en vigueur et de leurs objectifs. Les treize intitulés sont :
- le marché du travail,
- l’emploi et la rémunération,
- l’amélioration des conditions de vie et de travail,
- la libre-circulation,
- la protection sociale,
- l’association et la négociation collective,
- l’information, la consultation et la participation des travailleurs,
- l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes,
- la formation professionnelle,
- la santé et la sécurité sur le lieu de travail,
- la protection des enfants et des adolescents,
- les personnes âgées,
- les personnes handicapées.
117A l’intérieur de chacun de ces chapitres se trouvent mélangées des "initiatives" de nature très différente. Si l’on retient celles qui relèvent du domaine législatif, on peut répertorier trois propositions de règlement (dont deux dans le domaine de la libre-circulation), dix-sept propositions de directives (dont dix pour le seul domaine de la santé et la sécurité sur les lieux de travail) et cinq propositions d’instrument communautaire dont la nature contraignante ou non doit encore être définie. Le reste des "initiatives" annoncées n’appartient pas au domaine normatif et est constitué de recommandations, de memoranda, ou de communications de la Commission. Ceci ne signifie pas que les sujets qui s’y rapportent sont sans importance : il s’agit, par exemple, de considérer la convergence des objectifs des systèmes de protection sociale ou encore "les critères communs relatifs à des ressources et à des prestations suffisantes dans les systèmes de protection sociale".
118Il est au moins trois questions complémentaires auxquelles la Commission fournit pour l’instant une réponse pragmatique avec son programme d’action. Premièrement, quels sont les sujets qui retiennent l’attention de l’organe communautaire ? Deuxièmement, sur ces sujets, faut-il ou non une intervention communautaire et avec quel degré d’implication ? Troisièmement, faut-il privilégier une démarche législative ou contractuelle, la question se posant aussi bien pour la Communauté européenne que pour chaque Etat ?
119Pour chacune de ces questions, on peut estimer qu’il n’y a pas de réponses définitives. Ces dernières sont en effet fonction d’un processus historique qui conduit des Etats-nations vers une entité sans doute de type fédéral ; elles dépendent des choix et des capacités de décision et d’influence des acteurs politiques, économiques et sociaux. Or, précisément, nous sommes dans une période (de transition ?) où chacun cherche encore ses marques.
120Si l’on considère les compétences juridiques explicites, inscrites dans les Traités, il est assez clair que les principales compétences communautaires en droit social sont dérivées de l’objectif de libre-circulation (des travailleurs). Ce sont donc des droits "liés au marché intérieur" [43] et, avec l’approfondissement du processus d’intégration des marchés nationaux, la question est posée d’une possible, voire nécessaire, extension de la législation sociale européenne pour réguler le marché du travail : ainsi, par exemple, en matière de marché public.
121Mais quels sont exactement les domaines qui doivent être couverts et de quelle manière ? La réponse n’est pas claire d’autant plus que vient se greffer sur cette question, celle des droits sociaux dits "fondamentaux" et des normes internationales du travail de l’OIT.
122Dans son programme d’action, au paragraphe 5 de l’introduction générale, la Commission déclare :
"La Commission a donc limité ses propositions de directives ou de règlements aux cas où une législation communautaire lui paraît nécessaire pour réaliser la dimension sociale du marché intérieur et, de façon plus générale, pour contribuer à réaliser la cohésion économique et sociale de la Communauté. Il s’agit pour l’essentiel de propositions visant la sécurité sociale des travailleurs migrants, la libre-circulation, les conditions de travail, la formation professionnelle et l’amélioration, notamment du milieu de travail, pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs".
124On retrouve ici nommées les compétences juridiques explicites de la Communauté, mais aussi de manière générale, les thèmes des conditions de travail et d’amélioration du milieu de travail. Quelle signification donner à ces notions ? Tel est le débat de fond, déjà ancien, qui semble conditionner une extension ou non des compétences communautaires.
125Dans ce cadre, la Commission prend l’initiative avec son programme d’action soit de reproposer une nouvelle mouture d’anciens projets de directives, soit de réviser des directives existantes, soit d’innover en considérant de nouvelles propositions sans toutefois se prononcer sur la nature juridique de celles-ci.
Sept propositions du programme d’action
126Reprenons ceci plus en détail en nous centrant sur les sujets qui sont les plus sensibles politiquement. Sept propositions du programme peuvent être retenues. Elles appartiennent à quatre des treize intitulés, à savoir l’emploi et la rémunération, l’amélioration des conditions de vie et de travail, la libre-circulation et l’information, consultation et participation des travailleurs. Pour cinq des sept propositions, la Commission a proposé une consultation conjointe des interlocuteurs sociaux et des groupes de travail CES-UNICE ont été constitués à cet effet.
Anciennes propositions de directives
127- Une proposition de directive sur les contrats et relations de travail autres qu’à temps plein et à durée indéterminée doit être présentée en 1990 et se substituer à deux propositions déposées en 1982. L’intention de la Commission, formulée de manière très générale, est d’arrêter des prescriptions minimales pour les formes de travail dites atypiques en termes de conditions de travail et de protection sociale. Cette proposition est jugée d’autant plus importante que le travail à temps partiel et à durée déterminée s’est fortement développé dans la plupart des pays de la Communauté.
128- En matière d’information et de consultation des travailleurs dans les entreprises multinationales, il est prévu également en 1990 la remise sur le métier d’une ancienne proposition dont la dernière version date de 1983. La Commission parle toutefois "d’instrument communautaire" alors que les versions antérieures étaient des propositions de directive.
129- Proposition de directive pour l’aménagement du temps de travail. En 1983, la Commission avait soumis au Conseil une recommandation. Celle-ci était restée lettre morte tandis que se développaient dans chaque pays des revendications et des politiques de réduction négociée du temps de travail et de flexibilité. L’objectif serait ici de définir des prescriptions minimales en matière de durée maximale du travail, de travail de nuit, de congés, d’heures supplémentaires, de travail de week-end, etc.
Révision de directives existantes
130- Révision de la directive de 1975 relative aux licenciements collectifs. Cette directive ne porte pas atteinte à la liberté de l’employeur de procéder à des licenciements collectifs. Son objectif est d’informer les travailleurs en imposant à l’employeur de consulter préalablement les syndicats et d’avertir les autorités publiques lorsque ce type de licenciement est envisagé. La révision de cette directive se justifie, selon la Commission, pour prendre en considération les cas où les décisions de licenciement sont prises par les sociétés-mères situées dans un autre Etat membre que celui concerné par le licenciement des travailleurs.
Nouvelles propositions
131- Proposition d’instrument communautaire sur les conditions de travail applicables aux travailleurs d’un autre Etat effectuant dans le pays d’accueil des travaux dans le cadre de la libre-prestation des services, notamment pour compte d’une entreprise de sous-traitance.
132- Proposition d’instrument communautaire concernant l’inclusion d’une clause sociale dans les contrats publics.
133Ces deux nouvelles propositions sont directement liées à certains effets attendus de l’ouverture plus grande des marchés et notamment des marchés publics. Dans les deux cas, ce qui est en jeu c’est le principe de territorialité et celui de l’égalité de traitement de tous les travailleurs auxquels doivent s’appliquer la législation et les conventions collectives en vigueur sur le territoire où se réalise le travail. La première proposition sera présentée en 1990, la seconde en 1991. La Commission s’est gardée jusqu’à ce jour de se prononcer sur l’opportunité d’une directive ou bien d’une recommandation. Dans son programme, on parle d’instrument communautaire.
134Dans les domaines touchant à ces deux propositions, des arrêts récents de la Cour de justice des Communautés européennes ont précisé l’état du droit communautaire. En ce qui concerne l’insertion de clauses sociales dans les contrats publics, la Cour de justice a estimé que de telles mesures pouvaient être autorisées sous réserve qu’elles ne soient pas source de discrimination entre les soumissionaires potentiels [44]. Dans le cas des travailleurs exerçant temporairement leurs activités dans un autre Etat membre, la Cour de justice a jugé que la réglementation des conditions salariales et de travail était du ressort des Etats membres [45]. Ces deux arrêts importants dans des domaines politiquement sensibles montrent le rôle central que la Cour de justice des Communautés européennes peut avoir en matière sociale.
135- Proposition de directive concernant l’établissement d’un formulaire, élément de preuve des contrats et relations de travail. La proposition de directive fixerait au niveau communautaire les prescriptions minimales devant être respectées dans tous les pays membres. Chaque travailleur aurait le droit de demander à son employeur une preuve de son contrat de travail qui doit notamment indiquer la nature de l’emploi, la durée du contrat, contenir une référence aux lois et conventions collectives applicables,…
Positions des acteurs
136Par rapport à l’ensemble du programme d’action, le Parlement européen a pris position en adoptant le 16 février 1990 le rapport Chanterie [46]. Dans ce rapport, le Parlement européen est relativement sévère pour la Commission : "Le programme de travail de la Commission pour 1990 et les mesures qui y sont proposées constituent une base insuffisante pour parvenir à un développement équilibré de la dimension sociale" [47].
137Le Parlement européen souhaite essentiellement, d’une part, que le calendrier soit accéléré et, d’autre part, que la Commission interprète de manière extensive les dispositions du Traité sur le plan social. Pour le calendrier, le Parlement souhaite que l’ensemble des propositions à portée normative soit présenté d’ici au 31 décembre 1990 dans la perspective de leur adoption avant le 1er janvier 1993. Sur les domaines couverts, le Parlement européen déplore que la Commission n’envisage pas d’initiatives sur les thèmes du salaire minimum et du revenu minimum.
138La Confédération européenne des syndicats-CES s’est exprimée avant même que le programme d’action ne soit formellement approuvé par la Commission [48]. Ses observations sont similaires à celles du Parlement. Quinze priorités ont été formulées dont certaines ne se retrouvent pas dans le programme d’action, en particulier : le droit à un revenu minimum (la Commission propose simplement une recommandation), le droit d’association, de négociation et d’action collective transfrontalières, y compris la grève, pour les travailleurs des secteurs privés et publics pour lequel la Commission ne veut pas intervenir, considérant que c’est de la responsabilité des Etats membres.
139Pour l’UNICE, en vertu du principe de subsidiarité, des instruments communautaires en vue de réglementer la politique sociale ne devront être introduits au niveau communautaire que dans les domaines où ils sont indispensables pour assurer le bon fonctionnement du marché intérieur et/ou pour éviter des distorsions de concurrence [49]. Les propositions "sensibles" que nous avons mentionnées ci-dessus seraient donc rejetées par l’UNICE si elles devaient devenir des instruments contraignants.
140Ces différentes prises de position montrent que le compromis ne sera pas facile à trouver et les débats qui vont s’engager cette année seront assurément révélateurs de l’évolution du droit social européen.
En guise de conclusion
141La lecture du programme d’action de la Commission, de même que la connaissance des débats antérieurs au sein de la Communauté, permettent d’identifier deux thèmes de controverse autour desquels les discussions ont tendance à se focaliser : celui de la base juridique des propositions de législation communautaire en matière sociale et celui du contenu même de ces propositions, le programme de la Commission annonçant la définition de "prescriptions minimales".
142Ces deux thèmes sont de grande importance ; il reste toutefois des questions de fond posées aux différents acteurs sociaux. Ces questions concernent notamment les compétences en matière sociale des institutions de la Communauté, l’évolution des marchés du travail dans un contexte européen renouvelé et enfin, l’appréciation portée par les acteurs sociaux, économiques et politiques sur la place du droit relativement aux pratiques contractuelles dans le cadre des relations industrielles nationales et européennes. Cette liste n’est évidemment pas exhaustive ; nous proposons de la passer rapidement en revue en commençant par les questions les plus immédiates.
La base juridique et les prescriptions minimales
143Un des noeuds du débat actuel est celui du choix et, en cas de contestation, de sa validation par la Cour de justice des Communautés européennes, de la base juridique (c’est-à-dire l’article qui fonde l’intervention communautaire) de chacune des propositions. Aujourd’hui, seul un article du Traité permettant un vote à la majorité qualifiée autoriserait quelque espoir de voir des propositions adoptées. Or, pour les principales propositions, une lecture stricto sensu du Traité révèle qu’une base juridique requérant l’unanimité est de mise.
144Rien n’interdit une lecture "novatrice" de certains articles mais cette voie est ténue en l’absence de consensus politique. Ainsi, par exemple, la distinction établie par E. Vogel-Polsky selon laquelle la politique sociale communautaire relève des compétences explicites du Traité mais aussi implicites et de l’ordre public social international, clarifie conceptuellement la nature et la justification des droits envisagés [50]. Toutefois, cette interprétation du Traité a surtout une valeur tactique dans la mesure où elle sert à justifier le recours au vote à la majorité pour l’ensemble des propositions.
145Si compromis il y a, dans le contexte actuel, il se fera sur des contenus d’exigences jugées minimales. L’interrogation porte alors sur l’intérêt véritable d’une telle législation et pour quel pays ? Sans doute ne faut-il pas négliger la place du symbolique dans les processus de décision politique mais on ne peut sous-estimer les risques d’effets pervers pour les législations sociales nationales les plus avancées.
146Malgré la liste explicite des propositions formulées par la Commission et reprise par le Parlement européen comme par la CES, la demande de droit social européen reste peu claire tant pour l’objectif réellement poursuivi que pour le contenu des propositions et donc leur impact. Ce manque de clarté peut s’expliquer par différents problèmes auxquels il n’est objectivement pas aisé de répondre, ni en théorie ni du point de vue des différents acteurs compte tenu de leurs contraintes respectives.
Le principe de subsidiarité et la reforme des Traités
147La notion de subsidiarité, c’est-à-dire le niveau pertinent pour mener des politiques, est au cœur d’une réflexion sur la construction européenne. Le passage de l’organisation d’un marché unifié vers une union économique et monétaire impose en effet une redéfinition et une clarification de l’agencement des pouvoirs et compétences.
148Une nouvelle réforme des Traités est rendue nécessaire pour avancer dans l’union économique et monétaire. Parallèlement, l’idée d’une révision des Traités en fonction de l’union politique a fait aussi son chemin. Dans cette perspective, pourquoi ne pas saisir cette opportunité pour reposer, d’une part, le débat sur les compétences sociales explicites et, d’autre part, sur la majorité nécessaire ? Différentes pistes de réflexion ont déjà été élaborées dans cette éventualité. L’aide-mémoire du gouvernement belge à la présidence irlandaise s’engage dans cette voie, en préconisant le recours à la majorité qualifiée pour l’ensemble des politiques européennes et en souhaitant une définition plus précise des compétences de chaque instance là où il s’agit de "domaines sensibles où les traditions nationales sont fréquemment divergentes" [51].
149D’autre part, certains ont souligné le caractère évolutif de cette répartition. En conséquence, il conviendrait davantage de modifier les articles du Traité qui empêchent le développement potentiel d’une législation sociale européenne, comme par exemple la suppression de l’alinéa 2 de l’article 100A ou encore la définition trop limitée présente à l’article 118A. Pourquoi ne pas revoir également l’article 118B sur le dialogue entre interlocuteurs sociaux en prévoyant par exemple une obligation de négociation ?
La place du droit relativement à celle des conventions
150L’examen quotidien de la vie communautaire révèle le rôle important, sinon décisif, joué par la Cour de justice dans tous les domaines du droit communautaire. En l’absence de décisions politiques, la jurisprudence de la Cour de justice a contribué à définir et délimiter la politique sociale communautaire. Notons que les arrêts de la Cour prennent en considération l’ensemble de la législation communautaire. Certaines questions sociales ne sont pas appréhendées comme telles, vu l’absence de législation y afférente, mais en fonction de leur compatibilité avec le Traité et le droit dérivé communautaire. Par exemple, suite à la plainte d’une entreprise, la Cour vient de rendre un arrêt selon lequel le repos du dimanche n’est pas contraire à la libre-concurrence [52].
151La place du droit dans les relations industrielles, tant sur le plan de l’opposition classique entre approche législative et/ou contractuelle, mais aussi sur l’importance croissante de la jurisprudence dans la régulation des relations employeur-travailleur est sujette à débats et à préoccupations, en tous cas en Belgique.
152A ce jour, aucun schéma cohérent n’est proposé sur les places respectives de la législation et de la convention au plan européen, mais la réforme des Traités évoquée plus haut devrait anticiper le rôle de la Cour.
Les orientations économiques communautaires
153Depuis environ quinze ans, les mutations technologiques et l’internationalisation accrue des relations économiques ont conduit à une révision des orientations de politique économique dans les pays de l’OCDE. La priorité donnée à la compétitivité mondiale a nécessité de nombreuses adaptations pour les groupes d’entreprises en matière de recherche et de développement et d’investissements productifs appuyées par les politiques d’aides directes et indirectes des Etats. Il en est résulté aussi de nouvelles donnes pour les marchés du travail avec, en particulier, le développement de multiples formes de "flexibilité".
154Dans ce mouvement général, le projet de l’intégration accélérée des marchés nationaux ("l’objectif 1992") a joué à plein. Il en est attendu davantage de croissance économique et davantage d’emplois ; ces conséquences sont d’ailleurs la réponse maîtresse de la Commission vis-à-vis de tous ceux qui s’inquiètent du primat de la libre-concurrence et de la libre-circulation sur toute autre considération.
155Mais, par ailleurs "1992" réduit encore davantage l’autonomie des politiques nationales. La seule alternative réside dans l’exercice de choix de politiques qui garantissent une orientation européenne commune dans des domaines dont dépendent le financement de l’éducation et de la formation professionnelle ainsi que la sécurité sociale. A cet égard, l’évolution des systèmes nationaux de fiscalité est déterminant. Or, la subordination du "social" à "l’économique" risque de se trouver renforcée par l’ouverture des marchés des capitaux et par le désaccord politique persistant sur la fiscalité européenne (exemples du précompte mobilier et du secret bancaire) qui conduit à une compétition fiscale entre chaque pays et à une tendance à la baisse de la pression fiscale sur les revenus des capitaux. En outre, le projet d’union monétaire européenne et les contraintes renforcées qu’elle aura sur les politiques budgétaires des Etats rend également plus dépendant le financement futur des systèmes de sécurité sociale et donc l’évolution des prestations sociales.
156La réforme des Traités paraît dans le sens en tout cas d’une suppression de ce qui limite les compétences actuelles de la Communauté ; il devrait y être inscrit également une capacité normative potentielle plus vaste que celle qui y est explicitée aujourd’hui.
157La réforme des Traités sera toutefois insuffisante si elle ne se complète pas d’une clarification des choix politiques des différents acteurs quant aux objectifs européens de politique économique et sociale.
Annexe 1 – Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs [53]
158"Les Chefs d’Etat ou de gouvernement des Etats membres de la Communauté européenne réunis à Strasbourg le 9 décembre 1989.
159Considérant que les Etats membres sont convenus, aux termes de l’article 117 du Traité CEE, de la nécessité de promouvoir l’amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs permettant leur égalisation dans le progrès.
160Considérant que dans le prolongement des conclusions des Conseils européens de Hanovre et de Rhodes, le Conseil européen de Madrid a estimé que, dans le cadre de la construction du marché unique européen, il convient de donner aux aspects sociaux la même importance qu’aux aspects économiques et que, dès lors, ils doivent être développés de façon équilibrée.
161Considérant les résolutions du Parlement européen du 15 mars 1989 et du 14 septembre 1989 et l’avis du Comité économique et social du 22 février 1989.
162Considérant que la réalisation du marché intérieur est le moyen le plus efficace pour la création d’emplois et pour assurer le maximum de bien-être dans la Communauté ; que le développement et la création d’emplois doivent être la première priorité dans la réalisation du marché intérieur ; qu’il appartient à la Communauté de relever les défis de l’avenir sur le plan de la compétitivité économique, en tenant compte notamment des déséquilibres régionaux.
163Considérant que le consensus social contribue au renforcement de la compétitivité des entreprises, de l’économie tout entière et à la création d’emplois ; qu’à cet égard il est une condition essentielle pour assurer un développement économique soutenu.
164Considérant que la réalisation du marché intérieur doit favoriser le rapprochement dans le progrès des conditions de vie et de travail, ainsi que la cohésion économique et sociale de la Communauté européenne tout en évitant les distorsions de concurrence.
165Considérant que la réalisation du marché intérieur doit conduire, pour les travailleurs de la Communauté européenne, à des améliorations dans le domaine social, notamment au regard de la libre circulation, des conditions de vie et de travail, de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail, de la protection sociale, de l’éducation et de la formation.
166Considérant que, pour assurer l’égalité de traitement, il convient de lutter contre les discriminations sous toutes leurs formes, notamment celles fondées sur le sexe, la couleur, la race, les opinions et les croyances et que, dans un esprit de solidarité, il importe de lutter contre l’exclusion sociale.
167Considérant qu’il appartient aux Etats membres de garantir que les travailleurs des pays tiers et les membres de leur famille séjournant légalement dans un Etat membre de la Communauté européenne, puissent bénéficier pour leurs conditions de vie et de travail d’un traitement de nature comparable à celui dont bénéficient les travailleurs de l’Etat membre concerné.
168Considérant qu’il convient de s’inspirer des Conventions de l’Organisation internationale du travail et de la charte sociale européenne du Conseil de l’Europe.
169Considérant que le Traité, modifié par l’Acte unique européen, contient des dispositions établissant les compétences de la Communauté relatives notamment à la libre circulation des travailleurs (art. 7, 48-51), à la liberté d’établissement (art. 52-58), au domaine social, dans les conditions prévues par les articles 117-122 - notamment en ce qui concerne l’amélioration de la sécurité et de la santé dans le milieu de travail (art. 118A), le développement du dialogue entre partenaires sociaux au niveau européen (art. 118B), l’égalité des rémunérations féminines pour un même travail (art. 119), aux principes généraux pour la mise en œuvre d’une politique commune de formation professionnelle (art. 128), à la cohésion économique et sociale (art. 130A et 130E) et plus généralement au rapprochement des législations (art. 100, 100A et 235) ; que la mise en œuvre de la charte ne saurait entraîner une extension des compétences de la Communauté telles qu’elles sont définies par les Traités.
170Considérant que la présente charte vise, d’une part, à consacrer les progrès déjà réalisés dans le domaine social, par l’action des Etats membres, des partenaires sociaux et de la Communauté.
171Considérant qu’elle vise d’autre part à affirmer de façon solennelle que la mise en œuvre de l’Acte unique doit pleinement prendre en compte la dimension sociale de la Communauté et que, dans ce contexte, il est nécessaire d’assurer aux niveaux appropriés le développement des droits sociaux des travailleurs de la Communauté européenne, en particulier des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants.
172Considérant que, conformément aux conclusions du Conseil européen de Madrid, le rôle respectif des normes communautaires, des législations nationales et des relations conventionnelles, doit être clairement établi.
173Considérant qu’en vertu du principe de subsidiarité les initiatives à prendre concernant la mise en œuvre de ces droits sociaux relèvent de la responsabilité des Etats membres et des entités qui les constituent et, dans le cadre de ses compétences, de la responsabilité de la Communauté européenne ; que cette mise en œuvre peut prendre la forme de lois, de conventions collectives ou de pratiques existantes aux différents niveaux appropriés et qu’elle nécessite dans de nombreux domaines l’implication active des partenaires sociaux.
174Considérant que la proclamation solennelle des droits sociaux fondamentaux au niveau de la Communauté européenne ne peut justifier, lors de sa mise en œuvre, de régression par rapport à la situation actuellement existante dans chaque Etat membre.
175Ont adopté la déclaration suivante constituant la "charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs".
Libre circulation
1761. Tout travailleur de la Communauté européenne a le droit à la libre circulation sur tout le territoire de la Communauté, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d’ordre public, de sécurité publique et de santé publique.
1772. Le droit à la libre circulation permet à tout travailleur d’exercer toute profession ou tout métier dans la Communauté selon les principes de l’égalité de traitement, pour l’accès au travail, les conditions de travail ainsi que la protection sociale du pays d’accueil.
1783. Le droit à la libre circulation implique également :
- l’harmonisation des conditions de séjour dans tous les Etats membres, notamment pour le regroupement familial ;
- la suppression des obstacles résultant de la non-reconnaissance de diplômes ou de qualifications professionnelles équivalentes ;
- l’amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs frontaliers.
Emploi et rémunération
1794. Toute personne a droit à la liberté du choix et de l’exercice d’une profession, selon les dispositions régissant chaque profession.
1805. Tout emploi doit être justement rémunéré.
181Il convient à cet effet que, selon des modalités propres à chaque pays :
- soit assurée aux travailleurs une rémunération équitable, c’est-à-dire une rémunération suffisante pour leur permettre d’avoir un niveau de vie décent ;
- les travailleurs soumis à un régime de travail autre que le contrat à temps plein et à durée indéterminée bénéficient d’un salaire de référence équitable ;
- les salaires ne puissent faire l’objet de retenue, de saisie ou de cession, que conformément aux dispositions nationales ; ces dispositions devraient prévoir les mesures assurant au travailleur le maintien de moyens nécessaires pour son entretien et celui de sa famille.
1826. Toute personne doit pouvoir bénéficier gratuitement des services publics de placement.
Amélioration des conditions de vie et de travail
1837. La réalisation du marché intérieur doit conduire à une amélioration des conditions de vie et de travail des travailleurs dans la Communauté européenne. Ce processus s’effectuera par un rapprochement dans le progrès de ces conditions, notamment pour la durée et l’aménagement du temps de travail et les formes de travail autres que le travail à durée indéterminée telles que le travail à durée déterminée, le travail à temps partiel, le travail intérimaire, le travail saisonnier.
184Cette amélioration doit entraîner, là où cela est nécessaire, le développement de certains aspects de la réglementation du travail, tels que les procédures de licenciement collectif ou celles concernant les faillites.
1858. Tout travailleur de la Communauté européenne a droit au repos hebdomadaire et à un congé annuel payé dont les durées doivent être rapprochées dans le progrès, conformément aux pratiques nationales.
1869. Les conditions de travail de tout salarié de la Communauté européenne doivent être précisées soit dans la loi, soit dans une convention collective, soit dans un contrat de travail selon des modalités propres à chaque pays.
Protection sociale
187Selon les modalités propres à chaque pays :
18810. Tout travailleur de la Communauté européenne a droit à une protection sociale adéquate et doit bénéficier, quel que soit son statut et quelle que soit la taille de l’entreprise dans laquelle il travaille, de prestations de sécurité sociale d’un niveau suffisant.
189Les personnes exclues du marché du travail, soit qu’elles n’aient pu y avoir accès, soit qu’elles n’aient pu s’y réinsérer et qui sont dépourvues de moyens de subsistance doivent pouvoir bénéficier de prestations et de ressources suffisantes, adaptées à leur situation personnelle.
Liberté d’association et négociation collective
19011. Les employeurs et les travailleurs de la Communauté européenne ont le droit de s’associer librement en vue de constituer les organisations professionnelles ou syndicales de leur choix pour la défense de leurs intérêts économiques et sociaux.
191Tout employeur et tout travailleur a la liberté d’adhérer ou de ne pas adhérer à ces organisations, sans qu’il puisse en résulter pour lui un dommage personnel ou professionnel.
19212. Les employeurs ou les organisations d’employeurs, d’une part, et les organisations de travailleurs d’autre part ont le droit, dans les conditions prévues par les législations et les pratiques nationales, de négocier et de conclure des conventions collectives.
193Le dialogue entre partenaires sociaux au niveau européen qui doit être développé peut déboucher, si ceux-ci l’estiment souhaitable, sur des relations conventionnelles notamment au plan interprofessionnel et sectoriel.
19413. Le droit de recourir en cas de conflits d’intérêts à des actions collectives inclut le droit de grève sous réserve des obligations résultant des réglementations nationales et des conventions collectives. Afin de faciliter le règlement des conflits du travail, il convient de favoriser, conformément aux pratiques nationales, l’institution et l’utilisation, aux niveaux appropriés, de procédures de conciliation, de médiation et d’arbitrage.
19514. L’ordre juridique interne des Etats membres détermine dans quelles conditions et dans quelle mesure les droits prévus aux articles 11 à 13 sont applicables aux forces armées, à la police et à la fonction publique.
Formation professionnelle
19615. Tout travailleur de la Communauté européenne doit pouvoir avoir accès à la formation professionnelle et en bénéficier tout au long de sa vie active. Il ne peut y avoir dans les conditions d’accès à cette formation de discrimination fondée sur la nationalité.
197Les autorités publiques compétentes, les entreprises ou les partenaires sociaux, chacun dans la sphère de leurs compétences, devraient mettre en place les dispositifs de formation continue et permanente, permettant à toute personne de se recycler, notamment en bénéficiant de congés-formation, de se perfectionner et d’acquérir de nouvelles connaissances compte tenu notamment de l’évolution technique.
Égalité de traitement entre les hommes et les femmes
19816. L’égalité de traitement entre les hommes et les femmes doit être assurée. L’égalité des chances entre les hommes et les femmes doit être développée. A cet effet, il convient d’intensifier partout où cela est nécessaire les actions pour garantir la mise en œuvre de l’égalité entre hommes et femmes notamment pour l’accès à l’emploi, la rémunération, les conditions de travail, la protection sociale, l’éducation, la formation professionnelle et l’évolution des carrières.
199Il convient également de développer des mesures permettant aux hommes et aux femmes de concilier leurs obligations professionnelles et familiales.
Information, consultation et participation des travailleurs
20017. L’information, la consultation et la participation des travailleurs doivent être développées, selon des modalités adéquates, en tenant compte des pratiques en vigueur dans les différents Etats membres.
201Ceci vaut en particulier dans des entreprises ou des groupes comportant des établissements ou des entreprises situés dans plusieurs Etats membres de la Communauté européenne.
20218. Cette information, cette consultation et cette participation doivent être mises en œuvre en temps utile, notamment dans les cas suivants :
- lors de l’introduction dans les entreprises de changements technologiques ayant des incidences importantes pour les travailleurs en ce qui concerne les conditions de travail et l’organisation du travail ;
- à l’occasion de restructurations ou de fusions des entreprises affectant l’emploi des travailleurs ;
- lors de procédures de licenciement collectif ;
- lorsque des travailleurs, en particulier transfrontaliers, sont affectés par des politiques d’emploi menées par l’entreprise où ils sont employés.
Protection de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail
20319. Tout travailleur doit bénéficier dans son milieu de travail de conditions satisfaisantes de protection de sa santé et de sa sécurité. Des mesures adéquates doivent être prises pour poursuivre l’harmonisation dans le progrès des conditions existantes dans ce domaine.
204Ces mesures tiendront compte notamment de la nécessité d’une formation, d’une information, d’une consultation et d’une participation équilibrée des travailleurs en ce qui concerne les risques encourus et les mesures prises pour supprimer ou réduire ces risques.
205Les dispositions concernant la mise en œuvre du marché intérieur doivent concourir à cette protection.
Protection des enfants et des adolescents
20620. Sans préjudice de règles plus favorables aux jeunes, notamment celles assurant par la formation leur insertion professionnelle et sauf dérogations limitées à certains travaux légers, l’âge minimal d’admission au travail ne doit pas être inférieur à l’âge auquel cesse la période de scolarité obligatoire, ni en tout cas à 15 ans.
20721. Tout jeune exerçant un emploi doit percevoir une rémunération équitable, conformément aux pratiques nationales.
20822. Les mesures nécessaires doivent être prises en vue d’aménager les règles de droit du travail applicables aux jeunes travailleurs afin qu’elles répondent aux exigences de leur développement et aux besoins de leur formation professionnelle et de leur accès à l’emploi.
209La durée du travail des travailleurs de moins de dix-huit ans doit notamment être limitée - sans que cette limitation puisse être contournée par le recours à des heures supplémentaires - et le travail de nuit interdit, exception faite pour certains emplois déterminés par les législations ou les réglementations nationales.
21023. Les jeunes doivent pouvoir bénéficier, à la fin de la scolarité obligatoire, d’une formation professionnelle initiale d’une durée suffisante pour leur permettre de s’adapter aux exigences de leur vie professionnelle future ; pour les jeunes travailleurs, une telle formation devrait avoir lieu pendant le temps de travail.
Personnes âgées
211Selon les modalités propres à chaque pays :
21224. Tout travailleur de la Communauté européenne doit pouvoir bénéficier, au moment de la retraite, de ressources lui assurant un niveau de vie décent.
21325. Toute personne ayant atteint l’âge de la retraite, mais qui se verrait exclue du droit à la pension et qui n’aurait pas d’autres moyens de subsistance, doit pouvoir bénéficier de ressources suffisantes et d’une assistance sociale et médicale adaptées à ses besoins spécifiques.
Personnes handicapées
21426. Toute personne handicapée, quelles que soient l’origine et la nature de son handicap, doit pouvoir bénéficier de mesures additionnelles concrètes visant à favoriser son intégration professionnelle et sociale.
215Ces mesures d’amélioration doivent notamment concerner, en fonction des capacités des intéressés, la formation professionnelle, l’ergonomie, l’accessibilité, la mobilité, les moyens de transport et le logement.
Mise en œuvre de la charte
21627. La garantie des droits sociaux fondamentaux de la présente charte ainsi que la mise en œuvre des mesures sociales indispensables au bon fonctionnement du marché intérieur relèvent plus particulièrement, dans le cadre d’une stratégie de cohésion économique et sociale, de la responsabilité des Etats membres conformément aux pratiques nationales, notamment par voie de législation et par voie de conventions collectives.
21728. Le Conseil européen invite la Commission à présenter, le plus vite possible, les initiatives qui relèvent de ses compétences prévues aux Traités en vue de l’adoption des instruments juridiques pour la mise en œuvre effective, au fur et à mesure de la réalisation du marché intérieur, de ceux des droits qui relèvent de la compétence de la Communauté.
21829. La Commission établira chaque année, au cours du dernier trimestre, un rapport sur l’application de la charte par les Etats membres et par la Communauté européenne.
21930. Le rapport de la Commission est transmis au Conseil européen, au Parlement européen et au Comité économique et social".
Annexe 2 – Programme d’action de la Commission pour la mise en œuvre de la charte sociale
220Le programme que la Commission développe dans sa "Communication sur son programme d’action relativement à la mise en œuvre de la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux" présente les propositions nouvelles qui devront être réalisées pour atteindre les objectifs généraux de la charte [54]. C’est pour respecter le principe de subsidiarité, selon lequel une action communautaire n’est entreprise que dans la mesure où les objectifs peuvent être réalisés plus adéquatement au niveau européen qu’à celui des Etats, que les propositions présentées ne touchent qu’une partie de la problématique reprise par certains articles de la charte.
221Les propositions reprises dans le programme seront présentées au Conseil avant la fin de 1992. La Commission a par ailleurs demandé à ce dernier de s’engager à prendre une décision dans un délai de 18 mois (et en tout cas dans les deux ans) après transmission des propositions.
Initiatives qui seront développées par la Commission dans le cadre du programme d’action
1 – Marché du travail
222- Publication d’un rapport annuel sur l’emploi en Europe
223Outil d’analyse de l’évolution du marché de l’emploi, ce rapport sera discuté chaque année au Parlement européen, au Comité économique et social, au Comité permanent de l’emploi et entre les interlocuteurs sociaux.
224- Mise en place d’un "Observatoire" et d’un système de documentation sur l’emploi
225Anticiper les évolutions structurelles du marché du travail constituera l’objectif de l’"Observatoire" de l’emploi. Il bénéficiera pour ce faire des expériences acquises dans le cadre d’initiatives existantes (MISEP, ELISE, SYSDEM).
226- Programmes d’action concernant la création d’emplois pour des groupes spécifiques
227A la lumière du rapport d’évaluation qui sera établi, la Commission pourra présenter des propositions concernant l’élargissement des programmes LEDA et ERGO.
228- Révision de la partie II du règlement 1612/68 relatif à la mise en contact et de la compensation des offres et des demandes d’emploi ainsi que des décisions procédurales y afférentes (SEDOC)
229Une refonte du système de documentation SEDOC s’avère indispensable pour améliorer la transparence du marché du travail nécessaire à la poursuite d’autres travaux en cours dans le domaine de la correspondance des qualifications professionnelles.
230- Suivi et évaluation des interventions du Fonds social européen
231L’évaluation aura pour but tant d’apprécier l’impact des interventions du Fonds par rapport aux objectifs fixés (chômage de longue durée, jeunes de moins de 25 ans) que de mesurer leur incidence sur les problèmes structurels spécifiques dans les régions en retard de développement.
2 – Emploi et rémunération
232- Avis sur l’institution par les Etats membres d’une rémunération équitable
233S’il n’appartient pas à la Communauté de fixer un salaire de référence décent, la Commission estime cependant qu’il est de sa responsabilité de porter (en relation étroite avec les Etats membres) une appréciation sur ce problème. Elle intégrera dans son avis la question du maintien de la rémunération pendant les jours de congé et de maladie.
234- Directive sur les contrats et relations de travail autres qu’à temps plein et à durée indéterminée
235Actualiser deux propositions de directives (sur le travail volontaire à temps partiel ainsi que sur le travail temporaire et les contrats à durée déterminée) pendantes depuis 1982. La proposition de directive fixerait au niveau communautaire les prescriptions minimales devant être respectées dans tous les pays membres.
3 – Amélioration des conditions de vie et de travail
236- Directive pour l’aménagement du temps de travail
237Certaines prescriptions minimales en matière de durée maximale du travail, de temps de repos, de congés, de travail de nuit ou de week-end, d’heures supplémentaires systématiques doivent permettre de fixer un cadre général aux accords conventionnels en matière de flexibilité.
238- Directive du Conseil concernant l’établissement d’un formulaire élément de preuve des contrats et relations de travail
239Un projet de directive visera à accorder à chaque intéressé le droit de demander à son employeur un élément de preuve de son contrat de travail. Il s’agit d’assurer par ce biais une plus grande transparence dans les droits et obligations respectives des employeurs et des salariés.
240- Révision de la directive du Conseil du 17 février 1975 (75/129/CEE) concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives aux licenciements collectifs
241Une révision de cette directive est nécessaire pour prendre en compte les éventuelles restructurations transfrontalières qu’induira le marché intérieur.
242- Mémorandum relatif à l’insertion sociale des migrants ressortissants des Etats tiers
243Ce mémorandum, qui prolonge la résolution du Conseil du 16 juillet 1985, mettra l’accent sur la qualité des services administratifs et sociaux (logement, éducation) fournis aux migrants.
4 – Libre circulation
244- Révision du règlement de la Commission (CEE) 1251/70 du 29 juin 1970 relatif au droit des travailleurs de demeurer sur le territoire d’un Etat membre après y avoir occupé un emploi
245Cette révision est nécessaire pour s’aligner sur les modifications, notamment en ce qui concerne le champ d’application personnel et le renforcement du principe de l’égalité de traitement, que le Conseil est appelé à introduire au règlement 1612/68 et à la directive 68/360.
246- Proposition de règlement portant extension des règlements 1408/71 relatifs à l’application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l’intérieur de la Communauté et 574/72 (fixant les modalités d’application du règlement 1408/71) à toutes les personnes assurées
247Il s’agit d’étendre à d’autres catégories de personnes (travailleurs du secteur public, étudiants et non-actifs) la coordination communautaire des régimes de sécurité sociale qui est réalisée pour les travailleurs salariés et non-salariés.
248- Proposition d’instrument communautaire sur les conditions de travail applicables aux travailleurs d’un autre Etat effectuant dans le pays d’accueil des travaux dans le cadre de la libre prestation de services, notamment pour compte d’une entreprise de sous-traitance
249L’activité de sous-traitance devrait respecter les principes qui découlent de l’application de la législation nationale d’ordre public ainsi que de l’application des conventions colletives en vigueur. La Commission recourra aux instruments communautaires appropriés pour assurer le respect de ces principes.
250- Proposition d’instrument communautaire concernant l’inclusion d’une clause sociale dans les contrats publics
251Eviter le "dumping social" en garantissant la concurrence loyale et le respect de l’égalité de traitement des travailleurs détachés.
252- Communication sur les régimes complémentaires de sécurité sociale
253La multiplicité des régimes complémentaires de sécurité sociale rend la transférabilité des droits très complexe. La Commission proposera le cas échéant des mesures appropriées en la matière.
254- Communication de la Commission au Conseil sur les conditions de vie et de travail des citoyens de la Communauté résidant dans les régions frontalières et en particulier des travailleurs frontaliers
255Devant la diversité des situations dans les Etats membres, la communication veillera à développer une réflexion sur un problème qui touche un nombre important de citoyens, particulièrement concernés par la réalisation du marché intérieur.
5 – Protection sociale
256- Recommandation sur la protection sociale : convergence des objectifs
257La diversité des systèmes nationaux rend l’harmonisation illusoire. Une stratégie qui va dans le sens d’une convergence des objectifs s’impose cependant si l’on veut éviter que les divergences ne constituent un frein à la libre circulation.
258- Recommandation portant sur des critères communs relatifs à des ressources et à des prestations suffisantes dans les systèmes de protection sociale
259Cette initiative vise, dans un esprit de solidarité, les citoyens les moins favorisés de la Communauté. Elle se fonde sur une Résolution du Conseil qui souligne que "l’existence de garantie de ressources est une composante fondamentale de la lutte contre l’exclusion sociale".
6 – Liberté d’association et négociation collective
260- Communication sur le rôle des partenaires sociaux dans la négociation collective
261La communication intégrera l’évolution des conventions collectives au niveau européen et le règlement des conflits.
7 – Information, consultation et participation des travailleurs
262- Instrument communautaire sur les procédures d’information, de consultation et de participation des travailleurs d’entreprises de dimension européenne
263La proposition modifiée de directive qui est sur la table du Conseil depuis 1983 a pour but de mettre au point des systèmes adéquats d’information et de consultation des travailleurs (systèmes de représentation équivalents dans toutes les entreprises européennes, diffusion d’information et consultation avant la prise de décision…)
264- Instrument communautaire concernant l’actionnariat et la participation financière des salariés
265La participation pourrait être introduite par voie législative ou être laissée à la libre négociation des interlocuteurs sociaux. Il s’agit de fixer le cadre légal qui encourage cette participation.
8 – Égalité de traitement entre les hommes et les femmes
266- Troisième programme communautaire pour l’égalité des chances pour les femmes
267Poursuivre et adapter l’action communautaire dans le domaine de l’égalité des chances en redéfinissant les "orientations stratégiques", c’est ce que devrait permettre les enseignements tirés de l’évaluation du deuxième programme qui arrive à échéance en 1990.
268- Directive portant sur la protection de la femme enceinte au travail
269Intégrer de manière plus spécifique les problèmes des femmes enceintes dans le cadre de l’action que mène la Communauté dans le domaine de la santé-sécurité. La prise en compte des problèmes spécifiques rencontrés ne doit cependant pas créer des obstacles supplémentaires pour l’emploi des femmes.
270- Recommandation relative aux modes de garde des enfants
271Les liens existants entre l’emploi et les possibilités de garde des enfants sont évidents. Si une action strictement communautaire n’est pas à même de résoudre ce problème, il s’agit en tous cas de porter le débat au plan européen.
272- Recommandation concernant un code de bonne pratique pour la protection de la grossesse et de la maternité
273Améliorer la protection de la grossesse et de la maternité afin de permettre aux femmes d’assumer conjointement leur vie de famille et leur activité professionnelle devient un impératif si l’on veut mobiliser toutes les compétences nécessaires à la réussite du grand marché. Ici aussi, la Communauté agira dans le respect du principe de subsidiarité, laissant aux Etats la responsabilité première d’adopter les mesures minimales dans un délai raisonnable.
9 – Formation professionnelle
274- Proposition d’instrument communautaire sur l’accès à la formation professionnelle
275Le congé de formation ainsi que la mise en place de dispositifs de formation continue et permanente sont les éléments que la Commission entend défendre dans le cadre de cette proposition.
276- Actualisation de la proposition de décision du Conseil de 1963 concernant les principes généraux pour la mise en œuvre d’une politique commune sur la formation professionnelle
277Il s’agit de réviser, à la lumière des principes adoptés dans le cadre de décisions plus récentes ainsi que des arrêts de la Cour de justice, les principes généraux établis en 1963.
278- Communication concernant la rationalisation et la coordination des programmes d’action communautaire dans le domaine de la formation professionnelle initiale et continue
279La Communauté mènera une réflexion visant à rationnaliser et à coordonner les actions spécifiques qu’elle mène dans le domaine de la formation continue, de l’insertion professionnelle des jeunes, …
280- Proposition concernant le programme commun d’échanges de jeunes travailleurs et d’échanges de jeunes
281Prolonger d’une année (jusqu’à fin 1991) le troisième programme commun d’échanges de jeunes travailleurs et faire des propositions pour poursuivre et rationaliser les autres programmes en cours, tel est l’objectif de la Commission.
282- Correspondance des qualifications
283En 1990, huit secteurs couvrant 117 professions qui regroupent quelque 300 activités professionnelles bénéficieront de la reconnaissance des qualifications. La Commission examinera la possibilité d’élargir cette possibilité à l’ensemble des professions.
10 – Protection de la santé et de la sécurité dans le milieu de travail
284- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales de santé et sécurité pour promouvoir une meilleure assistance médicale à bord des navires
285La directive proposée vise à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs à bord des navires par l’amélioration de l’assistance médicale à bord.
286- Proposition de Directive du Conseil concernant les prescriptions minimales de santé et sécurité concernant le travail sur des chantiers temporaires et mobiles
287La Directive vise l’intégration de prescriptions de santé dès le stade initial de la conception du chantier, elle définit la responsabilité en matière de sécurité et santé de tous les intervenants sur le chantier temporaire ou mobile et établit les prescriptions de sécurité pour certaines tâches.
288- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales applicables à l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs dans le secteur industriel d’exploration et d’exploitation par forage
289C’est suite à l’accident de la plate-forme off-shore "Piper Alpha" et, pour répondre à une demande du Parlement européen que la Commission élaborera une proposition pour les travailleurs de ce secteur.
290- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales applicables à l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs dans le secteur industriel des carrières et des mines à ciel ouvert
291Dans ce secteur, qui n’est pas couvert par la directive 89/391, les taux d’accidents sont plus élevés que dans d’autres secteurs industriels. Il convient donc de prendre des dispositions pour améliorer la santé et la sécurité des travailleurs qui y sont occupés.
292- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour les bateaux de pêche
293Il s’agit là aussi d’un secteur où les risques sont importants. La Commission fixera les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives aux procédés de travail à bord de ces navires.
294- Recommandation aux Etats membres concernant l’adoption d’une liste européenne de maladies professionnelles
295Cette recommandation consisterait en une mise à jour de la liste européenne des maladies professionnelles qui sont reprises dans des textes datant respectivement de 1962 et 1966.
296- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales concernant la signalisation de sécurité et de santé sur le lieu de travail
297Actualiser et étendre le champ d’application de la directive sur les lieux de travail, ainsi que les directives 77/575 et 79/640, afin d’y intégrer des mesures couvrant spécifiquement la signalisation.
298- Proposition de directive du Conseil définissant un système d’information spécifique pour des travailleurs exposés à certains agents industriels dangereux
299La proposition concerne la préparation de fiches d’information sur les agents dangereux. Les fiches sur les substances chimiques requises par les directives se rapportant à la mise sur le marché des substances chimiques seront également envisagées dans le cadre de cette proposition.
300- Proposition de directive du Conseil concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé relatives à l’exposition des travailleurs aux risques dus aux agents physiques
301Il s’agit dans ce domaine de mettre en place les mesures préventives et correctives nécessaires à la réduction des possibilités de surexposition, d’accident et de maladie liés aux agents physiques (vibrations, rayonnements électro-magnétiques…).
302- Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 83/477/CEE concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à une exposition à l’amiante pendant le travail
303Cette modification intégrera les progrès intervenus dans les connaissances scientifiques et dans la technologie, ainsi que l’expérience acquise dans l’application de la directive 83/477.
304- Proposition de directive du Conseil pour les prescriptions minimales de sécurité et de santé concernant les activités de transport
305La proposition a pour but de fixer les prescriptions minimales pour la prévention des situations dangereuses et la protection de tous les travailleurs concernés.
306- Mise en place d’un projet d’agence en matière de sécurité, d’hygiène et de santé
307L’agence sera chargée de promouvoir les échanges d’information et d’expérience, elle apportera son appui à la mise en œuvre des programmes relatifs au milieu de travail.
11 – Protection des enfants et des adolescents
308- Directive du Conseil concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des jeunes
309Fixer l’âge minimum d’admission à l’emploi dans la Communauté, interdire le travail de nuit, limiter la durée du travail et prévoir un contrôle médical régulier pour les jeunes de moins de 18 ans seront les objectifs de cette directive.
12 – Personnes âgées
310- Initiative communautaire en faveur des personnes âgées (communication et proposition de décision)
311Dans une société où le nombre de personnes âgées ne cesse de croître, la Commission considère qu’il faut sensibiliser l’ensemble des milieux intéressés à la situation de ces personnes. Elle entend par ailleurs développer un programme d’action à leur intention.
13 – Personnes handicapées
312- Proposition de décision du Conseil établissant le troisième programme d’action communautaire en faveur des personnes handicapées (HELIOS) pour la période de 1992 à 1996
313Améliorer l’égalité des chances pour les personnes handicapées en intensifiant l’action entreprise dans le cadre des programmes précédents seront les objectifs mis en avant par cette proposition.
314- Proposition de directive du Conseil concernant la mise en place de mesures visant à promouvoir l’amélioration des conditions de déplacement des travailleurs à mobilité réduite
Notes
-
[1]
Anne Raulier, Guy Deregnaucourt, Les politiques sociales de la Communauté européenne, Courrier hebdomadaire du CRISP, No 1267-1268, 1990.
-
[2]
SEC (88) 1148, 14 septembre 1988.
-
[3]
La notion de droits fondamentaux n’est pas équivalente à celle de contenus ou normes minimaux. La reconnaissance du droit de grève, à la négociation collective, à la sécurité sociale ne sont pas des droits minimaux mais bien fondamentaux.
-
[4]
CCE, Une stratégie de coopération pour la croissance et l’emploi, Economie Européenne, No 26, novembre 1985, pp 5-85. Ce rapport a fait l’objet d’une très large convergence de vues entre les interlocuteurs sociaux (CES, UNICE, CEEP) au sein du dialogue social de Val-Duchesse.
-
[5]
Afin d’éviter toute confusion, nous parlons de charte sociale européenne pour la charte du Conseil de l’Europe et de charte communautaire pour les différents projets proposés.
-
[6]
Le Comité économique et social a établi un rapport sur "les aspects sociaux du marché intérieur (Espace social européen)" (Doc CES 5/87, 17 septembre 1987) dont le rapporteur était M. Beretta. Suite à ce rapport, le Comité économique et social décide de présenter un avis d’initiative dont la rédaction fut confiée au même rapporteur et qui fut adopté le 19 novembre 1987 par 97 voix ; il y eut 44 votes négatifs et 13 abstentions (Doc CES 1069/87).
-
[7]
CCE, Discours du Président Delors devant le Congrès de la CES, 12 mai 1988, SEC (88) 758, 17 mai 1988.
-
[8]
CES, Charte communautaire des droits sociaux adoptée par le comité exécutif des 1 et 2 décembre 1988, 16 décembre 1988.
-
[9]
Pour rappel, la CES avait adopté, au début de 1988, un texte précisant ses revendications concernant l’espace social européen. CES, Réalisation de l’espace social européen dans le marché intérieur, Programme social européen, adopté par le comité exécutif des 11 et 12 février 1988.
-
[10]
Dans l’ensemble des conventions de l’OIT, la CES pointe celles qui lui paraissent comme les plus importantes, à savoir les conventions 87 (liberté syndicale, 12), 98 (droit d’organisation et négociation collective, 11), 100 (égalité de rémunération, 12), 111 (discrimination emploi et professionnelle, 9), 122 (politique de l’emploi, 11), 154 (négociation collective, 2). Le nombre de pays de la Communauté européenne ayant ratifié chaque convention est indiqué en gras.
-
[11]
CES, Résolution sur la charte sociale adoptée le 18 avril 1988. Les améliorations proposées tiennent, d’une part, à une meilleure procédure de consultation des interlocuteurs sociaux et d’autre part, à la mise en place de procédures de plainte et réclamation permettant un recours de travailleurs et de leur organisation syndicale en cas de non-respect de la charte.
-
[12]
Sur cette notion d’interdépendance des traités sociaux, voir E. Vogel-Polsky, L’Europe sociale en l’an 2.000, in Observatoire social européen, Europe, Le défi social, Ed. Ciaco, 1989, pp. 107-133.
-
[13]
Bruno Trentin, secrétaire général de la CGIL italienne, résume ce problème en une phrase : "il faut que les syndicats deviennent d’abord un interlocuteur avant de trouver ses interlocuteurs, un interlocuteur homogène capable d’intervenir sur le grand jeu européen". Bruno Trentin, L’Europe syndicale en crise, Revue politique et parlementaire, No 91, Paris, janvier-février 1989, p. 44.
-
[14]
Pour rappel, l’UNICE est favorable à une harmonisation dans cinq domaines : la santé-sécurité, la mobilité, l’éducation et la formation, l’égalité des chances, la cohésion économique et sociale.
-
[15]
UNICE, La dimension sociale du marché intérieur, Bruxelles, 30 novembre 1988.
-
[16]
L’UNICE a trouvé des arguments dans le rapport Padoa-Schioppa, Efficacité, stabilité et équité, Une stratégie pour l’évolution du système économique de la Communauté européenne, Bruxelles, 1987, minéo. Pour une discussion critique de ce concept, voir Jean Vogel, L’ambiguïté du principe de subsidiarité, in M. Carrieri et al. (coord.), Vers l’Europe sociale, Rome, 1990, miméo. pp. 149-158 ; et Anne Raulier, Guy Deregnaucourt, op. cit.
-
[17]
CCE, 1992 : La nouvelle économie européenne, Economie européenne, No 33, mars 1988.
-
[18]
Cet avis avait été demandé par le ministre de l’Emploi et du Travail en date du 19 novembre 1989, CNT, Avis No 930 sur le Projet de charte communautaire des droits sociaux fondamentaux du 24 octobre 1989, Doc. 1.114/3-1.
-
[19]
Le fait que cet avis porte sur les projets de la Commission, ne change rien aux conclusions qu’on peut en tirer. C’est pourquoi nous n’avons pas respecté ici un ordre chronologique.
-
[20]
M. Jamoulle, V. Bertrand, L’incidence du droit communautaire sur le droit belge du travail, Cahier de droit européen, 1989/1-2.
-
[21]
Voir Anne Raulier et Guy Deregnaucourt, op. cit.
-
[22]
Eliane Vogel-Polsky, L’Europe sociale de l’an 2000, in Observatoire social européen, Europe, Le défi social, op. cit., p. 114.
-
[23]
Nous n’entrons pas ici dans la discussion des possibilités pour la Communauté européenne de signer de telles conventions. Pour les personnes intéressées par cet aspect, un chapitre entier y est consacré in E. Vogel-Polsky et alii, L’Europe sociale 1992, Illusion, alibi ou réalité, février 1989, minéo.
-
[24]
Idem, p. 68.
-
[25]
E. Vogel-Polsky, Intégration des droits sociaux fondamentaux dans l’ordre juridique communautaire par la ratification d’instruments du droit social international par la Communauté, in F. Guarriello et alii (dir.), Vers l’Europe sociale, La charte européenne des droits sociaux et le programme d’action, Rome, janvier 1990, minéo, p. 147. Pour les rapports entre une intégration communautaire de ces droits sociaux et les procédures de contrôle actuellement applicables, voir, Lammy Betten, Prospect for a Social Policy of the European Community and its Impact on the functioning of the European Social Charter, in Lammy Betten (ed.), The Future of the European Social Policy, Ed. Kluwer, Deventer, Boston, 1990, pp. 101-138.
-
[26]
Comité économique et social, Avis sur les droits sociaux fondamentaux communautaires, CES 270/89, 22 février 1989, Rapporteur F. Staedelin.
-
[27]
En gras l’amendement de Löw du groupe I.
-
[28]
Agence Europe, No 4964, 27-28 février 1989, pp. 14-15.
-
[29]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, COM (89) 248, 30 mai 1989.
-
[30]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux, COM (89) 471, 2 octobre 1989.
-
[31]
Europolitique, No 1527, pp. 7-8.
-
[32]
CCE, Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, Doc 9517/89, 30 octobre 1989.
-
[33]
L’exclusion de ces articles de la charte communautaire a été compensée par une clause mentionnant l’objectif de "respect de la compétitivité des entreprises", voir Europolitique, No 1533, 21 octobre 1989, p. 6.
-
[34]
Pour des raisons de lisibilité et afin de ne pas répéter inutilement les arguments, nous avons synthétisé les réactions à l’avant-projet et au projet proposé par la Commission. Les réactions des différents acteurs à la charte sociale et au programme d’action sont présentées dans CCE, Europe sociale, No 1, 1990.
-
[35]
Et ce malgré les menaces antérieures et particulièrement celles du Deutsche Gewerkschaftbund-DGB allemand. "Sans un socle minimum de règles sociales, le Marché intérieur n’est pas acceptable pour les travailleurs et le consensus des syndicats à la poursuite du processus d’intégration économique doit être remis en question". Voir Résolution du Comité directeur du Deutsche Gewerkschaftbund-DGB, CES, 10 mai 1989. Une lettre datée du 15 novembre 1989 adressée à Jacques Delors confirme le changement forcé de stratégie de la part de la CES, voir Information presse, CES, 15 novembre 1989.
-
[36]
UNICE, Avis de l’UNICE sur la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux, 19 octobre 1989.
-
[37]
Le Parlement européen s’était déjà prononcé sur différents aspects de l’espace social européen lors de la séance plénière du 15 mars 1989. Voir Résolution sur l’espace social européen, JOC 96, 17 avril 1989.
-
[38]
M. Buron, parlementaire européen, résume particulièrement bien la situation du Parlement européen : "Le Parlement européen : un partenaire oublié…, mais obstiné", Europe sociale, op. cit, p. 14.
-
[39]
Parlement européen, Résolution sur la charte communautaire des droits fondamentaux, Doc A3-69/89, 22 novembre 1989.
-
[40]
Le Parlement européen, sans remettre en cause le choix du Comité économique et social, fait valoir qu’il détient une légitimité forte dont il eut été souhaitable de tenir compte : "Choix tout à fait justifié (celui du Comité économique et social) … mais le Parlement n’aurait-il pu, lui aussi - expression de l’ensemble des citoyens de l’Europe -, être consulté sur ce thème", M. Buron, Europe sociale, Ibidem.
-
[41]
Voir Europolitique, No 1545, 2 décembre 1989, p. 11.
-
[42]
Communication de la Commission sur son programme d’action relatif à la mise en œuvre de la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, COM (89) 568, 29 novembre 1989. La liste et un résumé succinct de l’objet des quarante-sept initiatives que compte prendre la Commission figurent en annexe de ce Courrier hebdomadaire.
-
[43]
E. Vogel-Polsky, Quel futur pour l’Europe sociale après le Sommet de Strasbourg ?, Droit social, No 2, février 1990, pp. 219-227. Dans cet article, E. Vogel-Polsky établit une distinction entre les éléments constitutifs d’une politique sociale communautaire qui peuvent reposer soit sur des compétences sociales explicites, soit sur des compétences sociales implicites (liées aux domaines que la réalisation du marché intérieur va nécessairement affecter), soit sur l’ordre public social international (p. 225).
-
[44]
Affaire C-31/87.
-
[45]
Affaire C-113/89.
-
[46]
Rapport sur les initiatives législatives prioritaires en matière sociale à inscrire dans le programme de travail de la Commission pour 1990, PE 137.270.
-
[47]
Op. cit., partie B, Exposé des motifs, p. 5.
-
[48]
CES, Propositions de la CES pour le programme d’action, 14 novembre 1989.
-
[49]
Cité par Europe, No 1575, 19 janvier 1990, p. 15.
-
[50]
Cf. E. Vogel-Polsky, Quel futur pour l’Europe sociale après le Sommet de Strasbourg ?, op. cit.
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[51]
Pour le texte intégral, voir Europe documents, Agence Europe, 29 mars 1990.
-
[52]
Europe, No 5129, 10 novembre 1989.
-
[53]
Les chefs d’Etat ou de gouvernement de onze Etats membres ont adopté ce texte.
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[54]
Les commentaires des propositions de la Commission ont été synthétisés. Pour le texte intégral, voir COM (89) 568, 29 novembre 1989.