Notes
-
[1]
Peter M. Haas, « Introduction : Epistemic Communities and International Policy Coordination », International Organization, 46 (1), 1992, p. 1-35.
-
[2]
Stefan Malthaner, « Radicalization : The Evolution of an Analytical Paradigm », European Journal of Sociology, 58 (3), 2017, p. 369-401.
-
[3]
Est défini ici comme radical l’engagement qui, « à partir d’une posture de rupture vis-à-vis de la société d’appartenance, accepte au moins en théorie le recours à des formes non conventionnelles d’action politique éventuellement illégales, voire violentes ». Isabelle Sommier, « Engagement radical, désengagement et déradicalisation. Continuum et lignes de fracture », Lien social et Politiques, 68, 2012, p. 15.
-
[4]
Ted Gurr, Why Men Rebel, Princeton, Princeton University Press, 1970.
-
[5]
Entre 2002 et 2018, les trois pays occidentaux les plus frappés par le terrorisme étaient par ordre décroissant les États-Unis, le Royaume-Uni et la France (Institute for Peace and Economics, Global Terrorism Index 2019, Sidney, 2019, p. 38-43). De la « Déclaration de jihad contre les Américains » (1998) au « Message à la France de la part de Mudjahidines du pays du Sham » (2013), ces deux pays sont des cibles privilégiées des djihadistes, le cas britannique étant lié au cas américain.
-
[6]
Edna Reid, « Evolution of a Body of Knowledge : An Analysis of Terrorism Research », Information Processing and Management, 33 (1), 1997, p. 97-98.
-
[7]
Peter R. Neumann, Scott Kleinmann, « How Rigorous Is Radicalization Research ? », Democracy and Security, 9 (4), 2013, p. 378. Nous traduisons les citations d’ouvrages en anglais.
-
[8]
Alex Peter Schmid, « The Literature on Terrorism », dans A. P. Schmid (ed.), The Routledge Handbook of Terrorism Research, Londres, New York, Routledge, 2011, p. 457-474 ; John Horgan, « Terrorism Research Has not Stagnated », Chronicle of Higher Education, 8 mai 2013.
-
[9]
Lisa Stampnitzky, « Disciplining an Unruly Field : Terrorism Experts and Theories of Scientific/Intellectual Production », Qualitative Sociology, 34 (1), 2011, p. 13-14.
-
[10]
Arun Kundnani, « Radicalisation : The Journey of a Concept », dans Christopher Baker-Beall, Charlotte Heath-Kelly, Lee Jarvis (eds), Counter-radicalisation : Critical Perspectives, Londres, New York, Routledge, 2015, p. 18.
-
[11]
Sam Raphael, « In the Service of Power : Terrorism Studies and US Intervention in the Global South », dans Richard Jackson, Marie Breen Smyth, Jeroen Gunning (eds), Critical Terrorism Studies. A New Research Agenda, Londres, New York, Routledge, 2009, p. 49-65.
-
[12]
A. P. Schmid, « The Literature on Terrorism », cité, p. 470.
-
[13]
P. R. Neumann, S. Kleinmann, « How Rigorous Is Radicalization Research ? », art. cité, p. 377.
-
[14]
Stuart Gottlieb (ed.), Debating Terrorism and Counterterrorism : Conflicting Perspectives on Causes, Contexts, and Responses, Los Angeles, CQ Press, 2014.
-
[15]
Jonathan Rae, « Will It Ever Be Possible to Profile the Terrorist ? », Journal of Terrorism Research, 3 (2), 2012, p. 64-74.
-
[16]
R. Jackson, « The Core Commitments of Critical Terrorism Studies », European Consortium for Political Research, 6, 2007, p. 247.
-
[17]
J. Horgan, « From Profiles to Pathways and Roots to Routes : Perspectives from Psychology on Radicalization into Terrorism », The Annals of the American Academy of Political and Social Science, 618 (1), 2008, p. 80-94.
-
[18]
Lorenzo Bosi, « État des savoirs et pistes de recherche sur la violence politique », Critique internationale, 54 (1), 2012, p. 174.
-
[19]
Frank Foley, Max Abrahms, « Terrorism and Counterterrorism », dans Robert A. Denemark, The International Studies Encyclopedia, Londres, Blackwell Publishing, 2010.
-
[20]
Gordon H. McCormick, « Terrorist Decision Making », Annual Review of Political Science, 6, 2003, p. 491.
-
[21]
Ibid.
-
[22]
Ibid., p. 492.
-
[23]
J. Horgan, « Understanding Terrorist Motivation : A Socio-psychological Perspective », dans Magnus Ranstorp (ed.), Mapping Terrorism Research : State of the Art, Gaps and Future Directions, Londres, New York, Routledge, 2007, p. 110.
-
[24]
Robert A. Pape, « The Strategic Logic of Suicide Terrorism », American Political Science Review, 97 (3), 2003, p. 343-361 ; Erica Chenoweth, Nicholas Miller, Elizabeth McClellan, Hillel Frisch, Paul Staniland, Max Abrahms, « Correspondence. What Makes Terroristes Tick », International Security, 33 (4), 2009, p. 180-186.
-
[25]
Martha Crenshaw, « The Causes of Terrorism », Comparative Politics, 13 (4), 1981, p. 379.
-
[26]
M. Abrahms, « Why Terrorism Does not Work », International Security, 31 (2), 2006, p. 42-78.
-
[27]
Peter R. Neumann, Michael L. R. Smith, The Strategy of Terrorism : How It Works and Why It Fails, Londres, New York, Routledge, 2008.
-
[28]
M. Abrahms, « What Terrorists Really Want », International Security, 32 (4), 2008, p. 96.
-
[29]
Donatella Della Porta, « On Violence and Repression : A Relational Approach (The Government and Opposition/Leonard Schapiro Memorial Lecture, 2013) », Government and Opposition, 49 (2), 2014, p. 159-187.
-
[30]
Ami-Jacques Rapin, « L’objet évanescent d’une théorie improbable : le terrorisme et les sciences sociales », Les Cahiers du réseau multidisciplinaire d’études stratégiques, 5 (1), 2008, p. 196.
-
[31]
La sensibilité est la propriété d’une variable à repérer tous les positifs. La spécificité est la propriété d’une variable à éliminer les faux positifs. Ainsi, la pauvreté est faiblement spécifique car seule une fraction marginale des pauvres (présence de la condition) s’engage dans le terrorisme (absence du résultat) et faiblement sensible car parmi les terroristes (présence du résultat), une fraction significative n’est pas pauvre (absence de la condition).
-
[32]
Florence Gaub, Alexandra Laban, « Arab Futures : Three Scenarios for 2025 », European Union Institute for Security Studies Report, 22, 2015, p. 19.
-
[33]
Sofia Pinero Kluch, Alan Vaux, « Culture and Terrorism : The Role of Cultural Factors in Worldwide Terrorism (1970-2013) », Terrorism and Political Violence, 29 (2), 2017, p. 16.
-
[34]
James Piazza, « Rooted in Poverty ? Terrorism, Poor Economic Development, and Social Cleavages », Terrorism and Political Violence, 18 (1), 2006, p. 171.
-
[35]
J. Piazza, « Repression and Terrorism : A Cross-national Empirical Analysis of Types of Repression and Domestic Terrorism », Terrorism and Political Violence, 29 (1), 2017, p. 102-118.
-
[36]
Ángel Gómez, Lucía López-Rodríguez, Hammad Sheikh, Jeremy Ginges, Lydia Wilson, Hoshang Waziri, Alexandra Vázquez, Richard Davis, Scott Atran, « The Devoted Actor’s Will to Fight and the Spiritual Dimension of Human Conflict », Nature Human Behaviour, 9 (1), 2017, p. 673-679.
-
[37]
Mobilisation de l’Alliance Athéna, création du Conseil scientifique sur les processus de radicalisation (COSPRAD) en 2017, renforcement du groupement d’intérêt scientifique « Moyen-Orient et mondes musulmans », création de plusieurs postes profilés pour l’étude de l’islam et de la radicalisation, efforts portant sur le pilotage des recherches, avec par exemple l’appel à projets de l’Agence nationale de la recherche lancé en novembre 2015.
-
[38]
Clément Beunas, « Du “radical” au “radicalisé”. Les usages médiatiques et politiques de la notion de « déradicalisation » en France (2014-2017) », Déviance et Société, 43 (1), 2019, p. 3-39.
-
[39]
Xavier Crettiez, « Penser la radicalisation. Une sociologie processuelle des variables de l’engagement », Revue française de science politique, 66 (5), 2016, p. 709-727.
-
[40]
Laurent Bonelli, Fabien Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, Paris, Le Seuil, 2018 ; Marc Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », Études de l’IFRI. Focus stratégique, 79, 2018.
-
[41]
Xavier Crettiez, Romain Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, INHESJ/CESDIP/Mission de recherche Droit et Justice, 2017 ; Hugo Micheron a mené une enquête incluant 20 entretiens individuels dont une dizaine seulement sont utilisés pour illustrer ponctuellement son propos. Hugo Micheron, Le jihadisme français. Quartiers, Syrie, prisons, Paris, Gallimard, 2019.
-
[42]
Tobie Nathan, Les âmes errantes, Paris, L’iconoclaste, 2017 ; Dounia Bouzar, Français radicalisés. Enquête : ce que révèle l’accompagnement de 1 000 jeunes et de leurs familles, Paris, Éditions de l’Atelier, 2018 ; Guillaume Monod, En prison, paroles de djihadistes, Paris, Gallimard, 2018.
-
[43]
P. R. Neumann, « Introduction », dans P. R. Neumann (ed.), Radicalization, Londres, New York, Routledge, 2015, p. 8.
-
[44]
Cette base a fait l’objet de plusieurs présentations et analyses dans la revue Études polémologiques. Voir en particulier les dossiers « La violence en chiffres », 37 (1), 1986 ; 42 (2), 1987 ; 46 (2), 1988.
-
[45]
Dossiers de justice et des Services pénitentiaires d’insertion et de probation, dossiers des mineurs de retour de zone syro-irakienne, Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes (FIJAIT), Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), entre autres.
-
[46]
Léo Mouren, Morgane Heuclin-Reffait, Agathe Charnet, Laura Wojcik, Ghalia Kadiri, Romain Cluzel, « Depuis la France, 68 chemins pour le jihad », Libération, 21 mars 2016.
-
[47]
Xavier Crettiez, Yvan Barros, « La réalité de la menace djihadiste en France : 2015-2018 », Chaire Citoyenneté, Sciences Po Saint-Germain-en-Laye, 2019.
-
[48]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité.
-
[49]
L. Bonelli, F. Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, op. cit.
-
[50]
Xavier Crettiez, Romain Sèze, Jennifer Boirot, Sociologie des processus de radicalisation djihadiste, recherche en cours pour la Direction de l’administration pénitentiaire.
-
[51]
D. Bouzar, Français radicalisés. Enquête : ce que révèle l’accompagnement de 1 000 jeunes et de leurs familles, op. cit.
-
[52]
Olivier Galland, Anne Muxel (dir.), La tentation radicale. Enquête auprès des lycéens, Paris, PUF, 2018, p. 96.
-
[53]
Olivier Bobineau, Pierre N’Gahane, La voie de la radicalisation. Comprendre pour mieux agir, Paris, Armand Colin, 2019.
-
[54]
Mathieu Rigouste, « L’ennemi intérieur, de la guerre coloniale au contrôle sécuritaire », Cultures & Conflits, 67, 2007, p. 166.
-
[55]
Ibid.
-
[56]
Yvan Jounot, « Prévention de la radicalisation », Rapport pour le Premier ministre, non publié, 2013.
-
[57]
Farhad Khosrokhavar, Le nouveau jihad en Occident, Paris, Robert Laffont, 2018 ; F. Khosrokhavar, Radicalisation, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014 ; F. Khosrokhavar, Quand al-Qaïda parle : témoignages derrière les barreaux, Paris, Grasset, 2006 ; Gilles Kepel, Antoine Jardin, Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, Paris, Gallimard, 2015 ; Alain Bertho, Les enfants du chaos. Essai sur le temps des martyrs, Paris, La Découverte, 2016 ; François Burgat, Comprendre l’islam politique. Une trajectoire de recherche sur l’altérité islamiste, 1973-2016, Paris, La Découverte, 2016 ; William McCants, Christopher Meserole, « The French Connection. Explaining Sunni Militancy around the World », Foreign Affairs, 24 mars 2016 ; Olivier Roy, Le djihad et la mort, Paris, Le Seuil, 2016 ; T. Nathan, Les âmes errantes, op. cit. ; Fabien Truong, Loyautés radicales. L’islam et les « mauvais garçons » de la nation, Paris, La Découverte, 2017.
-
[58]
Notamment Sébastien Sarron en décembre 2014 à Nantes ; Abdel-Malik Petitjean en juillet 2016 à Saint-Étienne-du-Rouvray ; Farid Ikken en juin 2017 à Paris ; l’autrice de la tentative d’attentat à Rennes arrêtée en décembre 2017 ; l’Afghan suspecté de l’attaque au couteau à Villeurbanne en septembre 2019.
-
[59]
R. Sèze, « Débat autour de La tentation radicale d’Olivier Galland et Anne Muxel », Champs de Mars, 31 (2), 2018, p. 105-114.
-
[60]
O. Bobineau, P. N’Gahane, La voie de la radicalisation. Comprendre pour mieux agir, op. cit., p. 16, 65, 164.
-
[61]
Pierre Bourdieu, Homo academicus, Paris, Éditions de Minuit, 1984.
-
[62]
O. Galland, A. Muxel (dir.), La tentation radicale. Enquête auprès des lycéens, op. cit.
-
[63]
X. Crettiez, R. Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, cité.
-
[64]
G. Kepel, Jihad. Expansion et déclin de l’islamisme, Paris, Gallimard, 2000.
-
[65]
G. Kepel, A. Jardin, Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, op. cit.
-
[66]
F. Khosrokhavar, Le nouveau jihad en Occident, op. cit. ; F. Khosrokhavar, Radicalisation, op. cit. ; F. Khosrokhavar, Quand al-Qaïda parle : témoignages derrière les barreaux, op. cit.
-
[67]
X. Crettiez, R. Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, cité, p. 75-78.
-
[68]
F. Truong, Loyautés radicales. L’islam et les « mauvais garçons » de la nation, op. cit.
-
[69]
A. Bertho, Les enfants du chaos. Essai sur le temps des martyrs, op. cit.
-
[70]
Pierre Manent, Situation de la France, Paris, Desclée de Brouwer, 2015.
-
[71]
W. McCants, C. Meserole, « The French Connection. Explaining Sunni Militancy around the World », art. cité.
-
[72]
F. Burgat, Comprendre l’islam politique. Une trajectoire de recherche sur l’altérité islamiste, 1973-2016, op. cit.
-
[73]
S. Atran, L’État islamique est une révolution, Paris, Actes Sud, 2016.
-
[74]
O. Roy, Le djihad et la mort, op. cit.
-
[75]
Ibid.
-
[76]
T. Nathan, Les âmes errantes, op. cit.
-
[77]
Dounia Bouzar, Christophe Caupenne, Soulayman Valsan, La métamorphose opérée chez le jeune par les nouveaux discours terroristes. Recherche-action sur la mutation du processus d’endoctrinement et d’embrigadement dans l’islam radical, Lille, Centre de prévention des dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI), 2014.
-
[78]
Plateforme de signalements du ministère de l’Intérieur, 2014.
-
[79]
Ibid., 2016.
-
[80]
Ibid., 2015.
-
[81]
L. Mouren, M. Heuclin-Reffait, A. Charnet, L. Wojcik, G. Kadiri, R. Cluzel, « Depuis la France, 68 chemins pour le jihad », art. cité.
-
[82]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité.
-
[83]
L. Bonelli, F. Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, op. cit.
-
[84]
F. Khosrokhavar, Radicalisation, op. cit.
-
[85]
Morgan Kelly, « Inequality and Crime », Review of Economics and Statistics, 82 (4), 2000, p. 530-539.
-
[86]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité, p. 22.
-
[87]
G. Monod, En prison, paroles de djihadistes, op. cit.
-
[88]
Antoine Mégie, « Le contentieux judiciaire antiterroriste depuis 2015 : “massification”, spécialisation et politisation », dans R. Sèze (dir.), Les États européens face aux militantismes violents. Dynamique d’escalade et de désescalade, Paris, Riveneuve, 2019, p. 187-206.
-
[89]
Angela McGilloway, Priyo Ghosh, Kamaldeep Bhui, « A Systematic Review of Pathways to and Processes Associated with Radicalization and Extremism amongst Muslims in Western Societies », International Review of Psychiatry, 27 (1), 2015, p. 49.
-
[90]
Jean Baechler, Les phénomènes révolutionnaires, Paris, PUF, 1970, p. 147.
-
[91]
Richard Bernstein, « Upper Crust Is often Drawn to Terrorism », The New York Times, 30 décembre 2009.
-
[92]
I. Sommier, « Engagement radical, désengagement et déradicalisation. Continuum et lignes de fracture », art. cité, p. 17.
-
[93]
Charles Tilly, « Terror, Terrorism, Terrorists », Sociological Theory, 22 (1), 2004, p. 12.
-
[94]
Marc Sageman, « The Stagnation in Terrorism Research », Terrorism and Political Violence, 26 (4), 2014, p. 576.
-
[95]
Nous remercions Xavier Crettiez, Loïc Le Pape, Christian Leuprecht ainsi que les deux évaluateurs anonymes de Critique internationale pour leurs commentaires constructifs et leurs conseils précieux sur les versions antérieures de cet article.
1es attaques commises à Toulouse et à Montauban par Mohammed Merah en mars 2012 ont marqué la résurgence du djihadisme en France, dix-sept ans après les attentats attribués au Groupe islamique armé (GIA) en lien avec la guerre civile algérienne (juillet-octobre 1995). Elles ont également provoqué une multiplication des études sur le sujet, lesquelles ont mobilisé des approches variées et cependant issues d’une même communauté épistémique [1]. L’approfondissement du débat invite à déconstruire plusieurs postulats sur lesquels repose cette communauté pour répondre à une question plus complexe qu’il n’y paraît : qui sont les djihadistes français ?
2Cette résurgence du djihadisme a suscité la mobilisation de plusieurs disciplines : principalement les études sur l’islam, qui s’intéressent au développement de l’islam politique et à la « radicalisation » de ses organisations au cours de la seconde moitié du xxe siècle, mais aussi la sociologie des mouvements sociaux et des violences politiques, ainsi que la (socio) psychologie dont la « radicalisation » était l’un des objets depuis les années 1970. Ces travaux ont en commun de reprendre des catégories de l’action publique : l’acte terroriste n’existe de manière indiscutable qu’en tant qu’infraction, de la même manière qu’il n’est question de radicalisation que depuis que la puissance publique entend la prévenir. Qu’ils s’approprient ou rejettent ces termes, les chercheurs contribuent à la dynamique initiée par la puissance publique en livrant des analyses sur les causes d’un phénomène devenu une préoccupation collective. Ce contexte stimule la structuration d’un « paradigme analytique » [2] intriqué avec les logiques politiques. Certes, cette proximité rend nécessaire un débat éthique, mais peu de travaux interrogent son influence sur la construction de la radicalisation comme objet d’étude. Entreprendre des recherches dans ce domaine, mais toujours dans le but de répondre aux préoccupations des institutions de sécurité et de justice et avec des ancrages disciplinaires différents, conduit à nous interroger sur nos objets et sur leurs limites : qu’étudie-t-on exactement lorsque l’on veut analyser une radicalité définie via le prisme des pouvoirs publics ? La diversité des sources utilisées dans nos recherches – entretiens biographiques, dossiers de justice, rapports d’évaluation établis par l’administration pénitentiaire, signalements au ministère de l’Intérieur – rend la réponse à cette question incertaine et tempère les prétentions à l’objectivité.
3En effet, la caractérisation des populations engagées dans une radicalité [3] liée à l’islam demeure tributaire d’une représentation que l’État tend à se faire d’un « ennemi intérieur » : de jeunes hommes racisés, issus de l’immigration musulmane, ayant fait l’expérience de la précarité, et en désaffiliation scolaire ou sans emploi, voire délinquants. Par-delà leurs désaccords, les recherches structurantes du débat français sont bâties sur ce même cadrage. Néanmoins, les premières enquêtes de terrain opposent à ce postulat un portrait plus nuancé, dont l’analyse détaillée affine la connaissance du phénomène, prérequis à des politiques publiques éclairées. Nous examinerons donc ici la constitution d’un paradigme analytique portant sur ce qui est indissociablement un problème public et un objet de réflexion. Nous mettrons en perspective la production d’un discours académique, ici circonscrit à la sociologie et à la science politique, sur le djihadisme français avec les conditions sociopolitiques de son développement. Il s’agit donc non seulement de dresser un état de l’art sur le sujet, mais aussi de réfléchir sur ce qui apparaît comme un postulat devenu discutable.
4La question de savoir qui sont les djihadistes et, par extension, quelles sont les racines de cette violence avait déjà été posée aux États-Unis avec l’apparition des terrorism studies dans la seconde moitié des années 1970 [4]. Nous retracerons donc tout d’abord l’essor de ce champ après les attentats du 11 septembre 2001, essor marqué par la porosité entre préoccupations collectives, attentes politiques et financements publics, et travaux universitaires. Ces derniers ont établi différentes théories de la violence infra-étatique qui sont incontournables en raison de leur profusion, de leur productivité et de l’ascendant croissant de l’anglais dans la recherche internationale. Nous traiterons ensuite de la recherche française sur la « radicalisation », plus récente, certes, mais structurée comme aux États-Unis par la demande politique, dans un contexte sécuritaire analogue. Cette similarité des conditions de production a orienté les problématiques explorées, au point de rapprocher les champs de recherche français et américain qui, au demeurant, ne connaissent pas de filiation intellectuelle et sont issus de deux pays ayant des rapports différents au Moyen-Orient. En France, la difficulté d’accès aux sources primaires, voire la rareté de celles-ci, empêchent les chercheurs d’élaborer un savoir empiriquement fondé et les obligent à se livrer à une théorisation essentiellement hypothético-déductive de cette violence, en prenant pour objet une même population : des jeunes venant de quartiers paupérisés, issus de l’immigration musulmane. Ils tentent de trouver dans ces traits communs les racines de la violence djihadiste, reproduisant ainsi le paradigme politique dominant, au risque de produire une définition tautologique de ce qu’est une « population radicalisée ». Enfin, nous soulignerons la prégnance de ce tropisme qui s’impose comme postulat commun aux thèses pourtant contradictoires qui clivent le débat français, et vis-à-vis desquelles les résultats discordants des premières enquêtes quantitatives invitent à s’inscrire en rupture. Ce n’est qu’à la condition de se donner les moyens d’affronter cet impensé que les théories sur le djihadisme français pourront se doter de fondements crédibles.
Les terrorism studies : un champ interstitiel structuré par trois ontologies de la violence
5En France, le développement des études sur les violences liées à l’islam date des années 2010. Il a été précédé d’une dizaine d’années par celui des terrorism studies aux États-Unis, les études dans les deux pays restant relativement indépendantes. Ces recherches ont pour caractéristique commune d’être apparues dans les deux pays occidentaux les plus ciblés par le djihadisme [5]. Aux États-Unis, comme plus tard en France, elles se sont développées en réponse aux demandes sécuritaires des institutions publiques, demandes qui ont inévitablement influencé non seulement leurs problématiques et théorisations de cette violence, mais aussi leurs financements.
L’émergence des recherches américaines sur la violence infra-étatique
6Dans le monde anglo-saxon, les études sur le terrorisme étaient depuis les années 1970 réservées à de rares spécialistes [6]. Après le 11 Septembre, des entrepreneurs sécuritaires ont exploité la demande politique pour capter les subventions allouées à cet objet, si bien que « de nombreux responsables admettent aujourd’hui qu’après 2001 les contrôles étaient insuffisants et que des “recherches indigentes” ont été financées » [7]. Il s’est ensuivi que, malgré des avis divergents [8], l’idée selon laquelle le champ était en stagnation s’est installée durablement [9]. Au milieu des années 2000, cet effet conjoncturel s’est déplacé vers l’étude de la radicalisation, concomitamment avec un important « terrorisme intérieur » en Europe [10]. Certains chercheurs sont toutefois parvenus, eux aussi, à saisir cette opportunité de financement [11]. Le champ s’est peu à peu structuré (laboratoires, diplômes, revues spécialisées, réseaux internationaux) et a gagné en rigueur, preuve, s’il en fallait, qu’« à côté d’une quantité d’inepties prétentieuses, un corpus assez fiable de connaissances consolidées a[vait] émergé » [12] depuis les années 1970. Ce constat ne doit cependant pas faire oublier que la dimension interstitielle de ce champ continue de poser d’importants problèmes ontologiques, épistémologiques et normatifs. En effet, le niveau de robustesse des études est moindre que dans les autres sciences, un tiers d’entre elles étant jugées insatisfaisantes sur le plan empirique ou méthodologique [13].
7Aux États-Unis, la porosité de ce champ de recherche avec la demande publique a inévitablement centré ses problématiques sur les causes jugées structurales de la violence [14], à savoir la pauvreté et la religion. Une autre branche du champ s’est intéressée aux causes individuelles, comme les prédispositions psychologiques, dans l’espoir de dessiner un profil-type du terroriste. De nombreux chercheurs ont cependant estimé que ces analyses étaient insuffisantes car superficielles ou infructueuses [15], voire biaisées par l’excuse de la violence ou sa dépolitisation par psychiatrisation, essentialisation du religieux, ou pathologisation de l’engagement [16]. La recherche d’hypothétiques racines (roots) et profils (profiles) du terrorisme a été alors délaissée au profit de celle des trajectoires (routes) et itinéraires (pathways) menant à la violence militante [17]. En somme, à la quête du « pourquoi » s’est substituée celle, jugée plus productive, du « comment ». Cette tendance, qui visait à sortir de l’impasse d’un introuvable modèle explicatif des violences politiques, est cependant restée dépendante de la demande sociopolitique. Avec les attentats de Madrid (2004) et de Londres (2005), l’Europe était devenue une cible du djihadisme mené par Al-Qaïda. Ces attaques ont eu pour résultat de légitimer le recours croissant à des outils répressifs et mais aussi à des outils visant à prévenir la dissidence interne violente. La branche Prevent du programme antiterroriste britannique CONTEST lancé en 2003 en est l’archétype. Plus tard, les répercussions internationales de la guerre civile syrienne ont provoqué l’essaimage et la généralisation de ces politiques en Europe. Or leur expérimentation a suscité des besoins en expertise qui à leur tour nécessitaient des financements. D’où une contradiction : tandis que les recherches se déplaçaient vers la question des trajectoires (le « comment », après les apparentes impasses du « pourquoi »), les racines du djihadisme (ce « pourquoi ») demeuraient l’intérêt central des institutions subventionnaires. La quête des causes a été favorisée par les approches quantitatives et explicatives qui prévalaient aux États-Unis.
Une triple ontologie de la violence infra-étatique comme réponse académique à un problème public
8Les recherches sur le djihadisme ont produit trois ontologies de la violence politique, centrées respectivement sur l’individu, l’organisation et les structures politiques. L’ontologie individuelle, dominante et s’appuyant sur la psychologie, se décline en quatre approches : celle de la pathologie mentale [18], largement rejetée [19] mais populaire ; celle de la blessure narcissique et du besoin qu’elle entraîne de restaurer l’estime bafouée [20] ; celle de la privation relative par rapport à un groupe de référence [21] ; celle, enfin, qui établit une passerelle avec la sociologie, et fait des violences militantes un « problème interactif et développemental » [22]. Cette dernière approche rejette l’« identité terroriste » statique que l’on retrouve parfois dans les deux premières pistes [23]. Elle met en évidence les multiples dimensions de l’engagement, violent ou non. Rejetant une stricte ontologie individuelle ou structurale, elle insiste sur les modalités plutôt que les causes de l’engagement dans les violences militantes, modalités qui englobent le besoin de l’individu en recherche de sens, le cadrage de cette quête par un discours idéologique, et l’engagement dans l’action par l’intégration d’un réseau.
9L’ontologie organisationnelle s’intéresse aux rationalités mises en œuvre par les acteurs et leurs organisations : la rationalité pure (modèle stratégique) et la rationalité limitée (modèles solidariste et organisationnel). Dans l’idéal-type du modèle stratégique ou instrumental, la violence sert à établir la crédibilité du groupe, à mobiliser la communauté prétendument représentée, à forcer la polarisation entre partisans et opposants ou à provoquer une répression génératrice de soutien [24], bref, à montrer à l’État ciblé le « prix du refus » [25]. Cette parcimonie théorique s’accompagne d’une simplification parfois excessive. Ainsi, comment expliquer les violences entre groupes, la non-revendication d’attentats, l’usage de la force autrement qu’en dernier recours ? Dans le modèle solidariste [26], l’engagement violent pourrait être la conséquence d’un besoin de « solidarité sociale » [27] : les organisations violentes permettent à l’individu de « développer de forts liens affectifs » tandis qu’elles « préservent systématiquement l’unité sociale, même au prix de l’avancée des revendications politiques » [28]. La dichotomie entre revendications politiques (rationalistes) et unité sociale (solidariste) est cependant floue lorsque ces deux objectifs se confondent, comme dans le cas de l’État islamique. Dans le modèle organisationnel, le comportement d’une organisation résulte de la congruence ou de l’affrontement des rationalités individuelles [29]. Cette approche fait des agents des « entrepreneurs de violence » remplissant trois fonctions : « la mobilisation de ressources, leur intégration et leur allocation » [30].
10L’ontologie structurale est l’approche cherchant le plus directement à identifier les racines du terrorisme par les facteurs macrosociologiques. Pourtant, peu de modélisations existent, en raison de leur faible falsifiabilité (sur quelle base les réfuter ?) et de leur manque de sensibilité ou de spécificité [31]. Les causes structurales apparaissent donc surtout comme des causes permissives (le « terreau du terrorisme »). On discerne trois approches. La première promeut l’analyse relationnelle du couple terrorisme/antiterrorisme et envisage le terrorisme comme conséquence de la domination politique, dans un cadre marxien, postcolonial ou nationaliste. Le terrorisme serait l’« arme du faible », selon la vision clausewitzienne de la guerre comme continuation de la politique. Ce serait en soi une violence politique, la religion étant une sous-catégorie ou un vecteur du politique. La deuxième est d’ordre culturaliste : Al-Qaïda serait un réseau (approche fonctionnaliste) et une identité (approche culturaliste), faisant du discours religieux une explication. La troisième recourt à des indicateurs quantitatifs (Global Terrorism Database, base du Chicago Project on Security and Terrorism, entre autres) pour tester les résultats des deux premières. En faveur des hypothèses de la domination sociopolitique, la violence politique est corrélée à des indicateurs démographiques et socioéconomiques [32], bien que la pauvreté brute ne soit pas un prédicteur. En faveur des hypothèses culturalistes, certaines attitudes (expériences de marginalisation sociale, de souffrance, de colère, de désespoir) favorisent la tolérance à la violence contre l’adversaire politique [33]. En outre, les sociétés plus diverses ethno-religieusement et hétérogènes socialement [34] ainsi que les régimes autoritaires [35] connaissent davantage de terrorisme. Enfin, les valeurs positives transcendantes, comme l’effort au service du groupe, mobilisent plus que les émotions négatives (privation, discrimination) et l’espérance de gain, montrent Scott Atran et ses collègues [36] dans un rare croisement de la tradition anthropologique qualitative française et de la tradition psychologique et positiviste américaine.
L’émergence des recherches sur la violence liée à l’islam en France : des problématiques et objets tributaires d’un contexte politique
11Comme aux États-Unis, les recherches françaises sur la radicalité liée à l’islam ont pris leur essor tardivement et sous le choc des attentats, comme l’attestent les problématiques et les objets formulés. Elles sont toutefois le résultat d’une histoire sécuritaire (donc aussi coloniale) spécifique. Les États-Unis ont été frappés par une violence « exogène », la France par un « terrorisme intérieur », résultat de la radicalisation d’un « ennemi intérieur ». Aussi la porosité entre recherche et logiques politiques combinée à la rareté des sources premières mène-t-elle à une construction de l’objet reproduisant le paradigme politique dominant : la jeunesse masculine venant de quartiers paupérisés et issue de l’immigration musulmane.
Un intérêt collectif pour la « radicalisation »
12L’inscription tardive des recherches françaises dans ce champ est due à la volonté de rendre compte de ce qui est apparu comme un problème public (2012-2014) puis comme un objet d’action publique (depuis 2014). De fait, ces recherches n’ont émergé de façon significative qu’en 2014-2015. À partir du moment où elles ont été confrontées à la lutte contre la radicalisation, les administrations ont eu des besoins nouveaux, en matière d’expertise notamment. Elles ont donc soutenu des recherches (-actions) susceptibles d’informer leurs décisions : détection, ressorts des processus de radicalisation, évaluation des dispositifs de désengagement, résilience. Ces travaux avaient commencé dès les années 2000 sous l’impulsion de la Direction de l’administration pénitentiaire, qui a commandé des rapports au sociologue Farhad Khosrokhavar (années 2000), puis notamment à l’Association française des victimes du terrorisme et à l’association Dialogues citoyens (2015-2016) afin d’affiner les outils de détection, ainsi qu’au Centre international pour la prévention de la criminalité sur le suivi des individus identifiés comme radicalisés en milieu ouvert (2017-2018), tout en continuant à soutenir diverses recherches susceptibles d’informer sa politique en détention. De multiples appels d’offres ont maintenu cette dynamique, parallèlement à la mise en œuvre de la lutte contre la radicalisation. Ils émanaient principalement du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation, mais aussi des ministères des Affaires sociales (soutien aux recherches sur les liens entre sport et radicalisation), de la Justice (la Protection judiciaire de la jeunesse a promu des recherches sur le public qu’elle suit au motif de la radicalisation et sur les mineurs de retour de Syrie), de l’Enseignement supérieur [37], ou encore de l’Intérieur (le Bureau central des cultes a lancé un appel à projets pour une recherche sur l’« islam de rupture » en mars 2016).
13Les recherches sur la radicalisation ont ainsi contribué à identifier les causes d’un problème public et à y apporter des réponses. Cette impulsion collective s’est cependant heurtée à des problèmes inhérents au terrain : difficultés d’accès aux acteurs concernés ; sécurité physique et juridique des chercheurs ; questions déontologiques et juridiques liées à la rencontre de personnes fichées ou en détention ; et, in fine, valorisation des résultats de ces enquêtes. On retrouve ici le même problème que pour la recherche américaine : la majorité des publications sur le sujet reposaient sur trop peu de connaissances empiriques, et devaient se contenter de proposer une réflexion sur les usages (médiatiques et politiques) du terme [38], des revues de littérature offrant des repères précieux dans un champ en diversification [39], ou d’examiner ces engagements sur la base de sources secondaires.
14À partir du milieu des années 2010, des études alimentées par des enquêtes de terrain se sont développées, qui s’appuyaient soit sur des données produites par les institutions [40], soit sur des entretiens biographiques [41], soit sur le travail de praticiens de leurs auteurs [42]. Ces travaux ont été les premiers à fournir un matériau empirique décrit avec précision. Ils ont introduit des éléments solides à des débats parfois spéculatifs. Pourtant, les hypothèses qui en résultent ne peuvent être généralisées faute d’échantillons volumineux : compte tenu de « la rareté du terrorisme et [du] faible nombre de terroristes » [43], les données accumulées avec le temps demeurent trop peu nombreuses. Avant qu’apparaisse cet intérêt collectif pour la radicalisation, la seule base de données renseignant la violence subétatique en France était celle constituée par Didier Bigo et Daniel Hermant sur la période 1971-1991 [44], dans la continuité du projet de concevoir des « baromètres polémologiques » initié par l’Institut français de polémologie (1945-1993). La collecte de ces données est toutefois restée à un stade exploratoire et les difficultés d’accès au matériau ont conduit à favoriser des approches qualitatives reposant sur de petits échantillons. Certes, les sources requises pour des enquêtes quantitatives existent [45], mais elles demeurent difficilement exploitables, en raison d’impératifs liés au respect des libertés individuelles, au secret de la défense nationale et à la préservation du secret de l’enquête. Cette carence tend néanmoins à être comblée par la compilation d’informations en accès libre, principalement d’origine médiatique, à l’instar des bases de données américaines. Une base de données renseigne ainsi les trajectoires de 68 Français décédés en Syrie [46], ou encore l’analyse de 78 projets d’attentats aboutis, échoués ou déjoués et de leurs 145 auteurs [47]. La recherche « Violences radicales militantes » a élaboré une base recensant 5 547 faits dits terroristes commis de 1986 à 2017 en France, qui agrège sources médiatiques, archives policières et privées. Le laboratoire d’idées Globsec conduit un projet européen sur les liens entre radicalisation, terrorisme et criminalité en Europe, qui s’appuie sur une base de données rassemblant 312 individus impliqués dans des faits de terrorisme djihadiste en Europe, dont 78 en France. D’autres chercheurs ont mobilisé les sources produites par les institutions publiques, comme l’analyse de 137 décisions de condamnations pour faits de terrorisme entre 2014 et 2017 [48], celle de 133 dossiers de mineurs suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse [49] ou celle, en cours de développement, sur la base d’environ 300 rapports d’évaluation produits par l’administration pénitentiaire [50]. Parmi les praticiens du désengagement producteurs d’une expertise sur la radicalisation, Dounia Bouzar se distingue par le volume de personnes qu’elle déclare accompagner, et dont elle propose une analyse fondée sur un échantillon de 1 000 familles [51]. Enfin, le déploiement d’une prévention primaire de la radicalisation après les attentats de janvier 2015 a renforcé l’intérêt des chercheurs pour les vulnérables à la radicalisation. D’où deux grandes enquêtes quantitatives. La première s’efforce de saisir les « facteurs prédictifs » [52] de la radicalité par une enquête auprès de 6 828 lycéens. La seconde est une étude sociologique de la « radicalisation non violente », conçue comme précurseuse de la violence, à partir d’un corpus de 1 040 adolescents et jeunes adultes [53].
Un objet dominant : la violence des marges
15La porosité de ce champ de recherche avec les logiques politiques se mesure non seulement aux partis pris théoriques et épistémologiques, mais aussi aux objets qu’il se donne. Le glissement sémantique du qualificatif « radical », d’une démarche révolutionnaire à un faisceau d’identification au djihadisme, est intimement lié aux conditions d’émergence de la radicalisation comme problème public. Ce procès est lui-même enchâssé dans des représentations collectives, voire dans une communauté épistémique au sein de laquelle les études consacrées à ces phénomènes font sens. L’enjeu est dès lors d’expliciter le contexte socio-historique qui produit et rend possible aujourd’hui le savoir sur la radicalisation liée à l’islam et qui permet de trouver une certaine cohérence dans ces études foisonnantes.
16En France, la compréhension par l’État de la résurgence du djihadisme au début des années 2010 s’inscrit dans une tendance à l’« ethnicisation » d’un ennemi intérieur. À partir des années 1970, marquées par l’industrialisation et l’urbanisation, et lorsque la menace migratoire a peu à peu remplacé la menace soviétique, l’étranger a incarné le délinquant moderne : « Le migrant originaire du monde arabe devient l’idéal-type d’une menace géopolitique, religieuse et identitaire à partir de l’intensification des antagonismes internationaux au Proche-Orient » [54]. Avec les attentats de 1985-1986, la figure du terroriste a été « ré-ethnicisée pour désigner un potentiel de conversion au terrorisme international islamiste dans la population arabo-musulmane en France » [55]. En 1995, les attentats de Khaled Kelkal ont personnifié cet ennemi intérieur, tandis que la délinquance des jeunes issus de l’immigration musulmane devenait un enjeu de société. Depuis, l’amalgame pauvreté-migration-terrorisme hante le débat public, comme l’attestent les controverses suscitées par les violences urbaines de 2005. Les attaques de Mohammed Merah en mars 2012 puis celle de la cellule Cannes-Torcy quelques mois plus tard ont conduit le ministre de l’Intérieur Manuel Valls à déclarer la lutte « contre les réseaux qui sont dans nos quartiers » et la « menace terroriste » qu’ils représentent (journal télévisé de TF1, 6 octobre 2012). Les départs pour la région syro-irakienne se sont ensuite multipliés, et la radicalisation est apparue comme une déclinaison de la carrière délinquante qui affecterait en priorité les jeunes « vulnérables » des quartiers paupérisés [56]. L’amalgame entre radicalisation et délinquance de populations vulnérables forgé lors de la mise à l’agenda politique de la radicalisation a été conforté par le cadrage des attentats de janvier 2015, vus comme le symptôme de la déliquescence des valeurs institutrices du social justifiant que la prévention s’étende au niveau primaire, en particulier à l’école. Il s’est ensuivi un faisceau d’initiatives qui ont inscrit la réponse publique dans un projet aussi bien social (réduire les inégalités, restaurer la cohésion sociale) que moral (faire vivre les « valeurs de la République », l’« esprit du 11 janvier »). Derrière la célébration de l’unité du corps social figure la peur de sa désagrégation dont certaines franges de la société manifesteraient déjà les prémices. En témoignent les déclarations du Premier ministre M. Valls sur cet « apartheid territorial, social et ethnique » qui mine le tissu social (discours à l’Assemblée nationale, 13 janvier 2015), celles du ministre de la Ville Patrick Kanner au sujet de la « centaine de Molenbeek français », ou encore le projet (avorté) du Président François Hollande d’inscrire dans la Constitution la déchéance de nationalité pour les binationaux condamnés pour terrorisme afin de les expulser du corps national. Le cadrage de la radicalisation après les attentats de janvier 2015 a ainsi renoué avec l’héritage colonial.
17La force de cet imaginaire est telle qu’elle confère un caractère d’évidence à un postulat partagé par la plupart des recherches sur le sujet. Si leurs divergences sont réelles et si elles réfutent l’existence d’un profil-type du djihadiste, toutes s’accordent sur les caractéristiques sociologiques d’une population qui serait objectivement (pré) disposée à la radicalité liée à l’islam [57]. Certes, ce postulat renvoie à des données objectives. En raison des difficultés d’accès aux sources primaires, la plupart des recherches s’appuient sur les informations, relayées par les médias, que communiquent les institutions de justice et de sécurité. Or, si les auteurs d’attentats djihadistes qui ont frappé le sol national depuis 2012 sont en effet de jeunes hommes issus de l’immigration musulmane et provenant de quartiers paupérisés, il y a quelques exceptions à ce profil [58]. Par ailleurs, longtemps perçues comme les victimes de ces violences, les femmes en sont depuis peu considérées également comme les actrices.
18La prégnance de ce tropisme explique que les rares enquêtes quantitatives visant à identifier les vulnérabilités au djihadisme tendent à se focaliser sur cette population. Olivier Galland et Anne Muxel proposent d’évaluer dans quelle mesure la socialisation religieuse peut disposer à la radicalité, mais leurs résultats sont largement induits par les choix cumulés de l’hypothèse de départ, du cadre théorique, de leur définition du fondamentalisme ainsi que des biais de l’enquête, et ils demeurent in fine discutables : leur enquête postule et construit à la fois le potentiel à la radicalité d’une population et d’une religion déjà perçues comme à risque dans l’imaginaire collectif [59]. De même, pour Olivier Bobineau et Pierre N’Gahane, les « orphelins du sens » vivant une « radicalisation identitaire » sont bien, dans les « années 1980, la deuxième génération issue de l’immigration maghrébine (...) dont ils semblent être les représentants dans les quartiers dits sensibles » [60]. Si cette enquête sépare explicitement violence et radicalité et n’attribue pas à l’islam une essence propice à la radicalisation, la population sur qui s’exerce l’appel de la radicalité reste bien la même.
Questionner le paradigme dominant
19Si le tropisme associant la violence djihadiste à cette « population à risque » a acquis une valeur d’évidence dans les approches qui structurent le débat français, les résultats discordants des premières enquêtes quantitatives incitent à le questionner.
Trois approches du djihadisme
20Ce tropisme est décliné en trois approches – culturaliste, minoritariste et générationnelle – qui pour être complémentaires n’en demeurent pas moins contradictoires sur certains aspects cruciaux, en raison de postulats théoriques différents et de positionnements professionnels distincts dans les champs académique, politique et médiatique [61].
21L’approche culturaliste affirme que certaines socialisations à l’islam prédisposent à la violence djihadiste. Gilles Kepel, et dans son sillage Bernard Rougier et Hugo Micheron, considèrent que des réseaux musulmans de troisième génération (Frères musulmans, salafis), plus revendicatifs, islamisent une part croissante de la population des quartiers paupérisés, perméable à la doctrine d’Abou Moussab al-Souri qui cible le « ventre mou » européen de l’« ennemi lointain » américain. Dotée d’une ontologie structurale (le contenu religieux et politique comme idéologie totale) et organisationnelle (l’influence des réseaux), cette approche fait de l’offre de djihadisme la principale variable d’explication du phénomène. Franchissant un pas supplémentaire, O. Galland et A. Muxel affirment l’existence d’une disposition à la radicalité intrinsèque à l’islam, en particulier à ses versants fondamentalistes [62]. Cette autre approche a l’avantage de détailler les convictions et objectifs des djihadistes, mais elle présente trois limites. La première est sa propension au nominalisme : analyser les écrits religieux et doctrinaires, même en langue originale, et le discours que les acteurs tiennent sur eux-mêmes rend le chercheur prisonnier des biais du texte, et le conduit à négliger les pratiques. La deuxième est sa vulnérabilité à plusieurs arguments fallacieux. Celui de la pente glissante : si salafisme et djihadisme partagent des références doctrinales communes, le passage de l’un à l’autre n’est pas automatique et leurs rapports sont de facto complexes [63]. Celui de l’essentialisme : lire les émeutes de 2005 comme la manifestation d’une identité musulmane réduit les individus à leur appartenance religieuse. Celui de l’argument circulaire : analyser la propension à la violence de jeunes musulmans par des questions formulées de manière à obtenir une plus forte tolérance à la violence chez les musulmans contient la réponse dans la question. La troisième limite est l’absence de cause initiale : alors que le « déclin de l’islamisme » [64] était censé advenir, sa résurgence ne peut s’expliquer uniquement par la persistance de son offre. C’est pourquoi la marginalisation économique et politique ainsi que l’espoir incarné par le projet djihadiste sont mentionnés comme conditions permissives par G. Kepel [65].
22L’approche minoritariste explique au contraire le djihadisme par la demande. La minorisation des populations racisées, issues de l’immigration des quartiers paupérisés, créerait une demande de projet de société alternatif à un modèle sociopolitique oppressif et discriminant. Elle mobilise ainsi une ontologie structurale (le parler musulman comme norme endogène pour renverser l’hégémonie culturelle ici et autoritaire là-bas) et individuelle (la quête de rétributions compensant une marginalisation symbolique et matérielle). La minorisation peut être socioéconomique, à travers la frustration sociale [66], le déni d’actorité [67], le conflit identitaire [68] ou encore la disparition d’un horizon commun [69]. Elle peut également être politique, à travers l’échec de l’intégration [70], la « culture politique française » et sa « laïcité agressive » [71], l’héritage colonial et postcolonial dans les pays d’origine et en France [72] ou encore le désir de destruction créatrice révolutionnaire face à la perception du manque de sens du projet de société démocratique-libérale qui transforme les citoyens en consommateurs privés d’un espoir transcendant [73]. La force de cette approche repose sur la prise en compte de la dimension politique du djihadisme, sur l’interaction entre violence et contre-violence ainsi que sur la subjectivité des acteurs, mais ses limites sont, elles aussi, réelles. L’une est son manque de spécificité : quand bien même les auteurs d’attentats appartiendraient tous à une certaine jeunesse marginalisée, tous les jeunes marginalisés ne se tournent pas vers la violence. L’autre est le manque d’adéquation de sens dans la présomption de causalité : nombre de condamnés pour terrorisme n’ont aucun passé militant [74], ce qui impliquerait que l’effet de minorisation soit largement inconscient, ou a contrario qu’il faille prendre pour argent comptant les narrations reconstruites a posteriori par les acteurs.
23L’approche générationnelle, enfin, repose sur un effet démographique : alors que la première génération d’immigration musulmane avait misé sur l’intégration économique et culturelle, la deuxième génération, toujours sous-classée sur ces deux plans, abandonnerait à la fois la pensée décoloniale et le sécularisme pour adopter un cadre de pensée radical propre au passage à l’âge adulte, la coloration religieuse étant particulièrement transgressive dans un contexte de laïcité et le djihadisme constituant la meilleure offre de radicalité disponible. La dimension religieuse ou politique de cette radicalité étant superficielle, son ressort est essentiellement psychologique, qu’il s’agisse d’un désir nihiliste de salvation individuelle [75] ou d’une « fragilité existentielle » résultant d’une « filiation flottante » due à un défaut de transmission de la première génération et d’une déconnexion avec un présent qui n’offre qu’une « universalité abstraite » [76]. Son ontologie est donc essentiellement individuelle (rétributions symboliques de l’engagement pour l’individu en perte de sens) mais contient une composante structurale (une structure d’opportunité politique générant une demande de reconnaissance par une génération culturellement désaffiliée). Cette approche permet d’intégrer la variable temporelle par l’effet générationnel et de dés-exceptionnaliser la radicalité djihadiste mais elle présente, elle aussi, des limites : tout d’abord, son potentiel à la généralisation – quelle est la part effective de djihadistes qui ne sont pas issus de la « deuxième génération » ou qui sont fortement dotés en capital religieux ou culturel ? –, ensuite, sa dépendance à des caractérisations psychologiques (nihilisme ou fragilité existentielle) mal définies ou difficilement mesurables.
Les résultats des premières enquêtes quantitatives : mise en cause d’un tropisme dominant ou nécessité de différencier les objets ?
24Ce débat repose donc sur un postulat commun, donnant lieu à des explications discordantes. Les premières enquêtes quantitatives françaises devraient permettre de caractériser les populations sympathisantes ou militantes du djihadisme, et ainsi de confronter ces explications aux données. Or la comparaison de leurs résultats laisse perplexe, ceux-ci sont en effet tellement contradictoires que l’on en vient à s’interroger sur la pertinence du tropisme sous-jacent à toutes ces approches.
25La jeunesse des personnes concernées est leur seul point commun : 19,5 ans pour D. Bouzar, 24 ans à 26 ans pour Marc Hecker, et 25 ans pour Léo Mouren et al. Les caractéristiques sociologiques sont en revanche différentes. D. Bouzar, dont l’échantillon diversifié va de la seule identification au fondamentalisme aux actes criminels, fait état de 44 % de classes populaires, 50 % de classes moyennes et 6 % de classes aisées. M. Hecker, dont les observations sont assez proches de celles de L. Mouren et al., obtient des résultats presque inverses : niveau d’éducation plus faible (50 % sans diplôme), insertion professionnelle difficile (chômage et précarité pour la majorité), et pauvreté (revenu mensuel moyen de 1 000 euros). Le rôle de l’expérience migratoire et du rapport à l’islam suscite d’âpres débats, mais les données sont sporadiques. Sans fournir de chiffres, Tobie Nathan indique, sur la base des jeunes qu’il reçoit après signalement par le ministère de l’Intérieur, que beaucoup sont immigrés, sans provenir majoritairement du Maghreb. Pour M. Hecker, les condamnés pour terrorisme djihadiste se caractérisent au contraire par « un rapport [familial] plus étroit au Maghreb et à l’Afrique subsaharienne que la moyenne », sans que l’on sache s’ils relèvent de la « deuxième génération » ou des générations postérieures. La prévalence de l’« origine musulmane » est elle aussi discutée, et appréhendée à travers des taux de conversion présentant des variations importantes : 80 % [77], 55 % [78], 50 % [79], 38 % [80], 33 % [81], 26 % [82]. S’ils proviennent en partie de l’arbitraire des définitions de la conversion, ces écarts suggèrent également le faible pouvoir explicatif de la religion, du moins ses effets différenciés selon le type de radicalité [83].
26Les dissonances de ces résultats restent à expliquer. Elles résident, au moins partiellement, dans les modalités de constitution des échantillons : signalements divers, mineurs suivis par la Protection judiciaire de la jeunesse, personnes condamnées pour infractions terroristes, auteurs d’attentats, Français décédés en Syrie. Il faut se garder de la tentation de confondre dans le même problème (public) les résultats de ces études et les individus qu’elles examinent. De fait, l’hétérogénéité sociale des personnes signalées est bien plus forte que celle des auteurs d’attentats. Les signalements impliquant des logiques d’objectivation diverses, donc renvoyant à des faits moins sociologiquement significatifs que la violence, le visage de la « radicalisation » serait logiquement plus hétérogène que celui du « terrorisme ». Le portrait plus homogène de l’individu engagé dans le terrorisme pourrait s’expliquer par le fait que la minorisation sociopolitique prédispose davantage à l’engagement : l’expérience de la frustration sociale inciterait, plus que d’autres situations, aux violences militantes [84], l’expérience de la délinquance serait plus fréquente dans ce type de profil [85] et constituerait un apprentissage de la transgression et de la violence [86]. Pourtant, ce lien est contesté. Guillaume Monod indique, sur la base d’une quarantaine de djihadistes qui le consultent en détention, que seul un tiers aurait fait l’expérience de la délinquance [87]. Antoine Mégie, quant à lui, observe lors des procès de djihadistes que ceux-ci ont rarement un passé délinquant [88].
27En résumé, le constat de la surreprésentation parmi les djihadistes d’une jeunesse populaire, issue de l’immigration récente et (supposément) musulmane, sur lequel reposent les trois théories du djihadisme, est empiriquement fragile et discutable. En effet, une fois écartés la jeunesse et le genre masculin, « le périmètre des traits communs s’arrête » [89]. Cette discussion conduit donc à l’alternative suivante : soit un seul des résultats obtenus est vrai, soit les résultats décrivent des phénomènes différents. C’est cette dernière piste que suivent Laurent Bonelli et Fabien Carrié dont l’analyse granulaire permet de préciser bien des hypothèses qui secouent les débats théoriques et médiatiques. Ils suggèrent en effet d’employer une démarche abductive alternant induction empirique et déduction théorique : une typologie croisant des degrés de régulation familiale et d’intégration dans des réseaux de pairs, et aboutissant à une approche relationnelle de la radicalisation (non violente). Celle-ci recouvre alors quatre processus distincts plutôt qu’un phénomène en soi, selon que l’identification au discours radical est faible ou forte, et que son appropriation est individuelle ou collective. Les individus les plus engagés (« radicalité utopique ») sont aussi les plus fortement intégrés sur le plan social et investis sur le plan scolaire. Cela n’est pas sans rappeler le phénomène de faction dissidente de l’élite [90] que l’on retrouve volontiers à la tête des organisations terroristes [91]. Le tropisme dominant qui lie minorisation sociopolitique et disponibilité pour la violence militante ne peut donc être généralisé. Une nouvelle fois, la construction de l’objet est un enjeu crucial : ne pas segmenter et isoler une violence (le djihadisme) des autres (étatiques ou non) ; ne pas agglomérer des phénomènes n’ayant que certains points en commun (par exemple un référent religieux).
28Au-delà de leurs désaccords, les études sur les violences perpétrées au nom de l’islam en France ont en commun un postulat que les résultats des premières enquêtes remettent en question. Comment cette contradiction s’est-elle structurée ? En prenant pour objet la « radicalisation », les recherches tendent à assigner un ensemble de faits devenus un objet de préoccupation collective et d’action publique à la représentation que la France cultive de son « ennemi intérieur ». Ce faisant, elles naturalisent un problème construit sociopolitiquement. On aboutit alors à une « quête sans fin des causes de la violence » [92]. Sans fin, parce que la radicalisation « n’est pas un phénomène unique causalement cohérent » [93], comme l’indique la diversité des caractéristiques de la « population radicalisée », qui ne s’explique pas seulement par le fait que cette population soit appréhendée via des objets de recherches différents. La propension à et les modalités de l’engagement violent ne se résument pas à l’appartenance à une obsédante « population à risque ».
29La connaissance des phénomènes visés, dont l’utilité pour les politiques publiques conditionne le développement, suppose de résoudre cette contradiction. Comment procéder ? L’étude des racines de cette violence suppose de caractériser préalablement les populations qu’elle engage sur la base d’échantillons volumineux autorisant une approche structurelle. Les bases de données des institutions publiques sont assez vastes pour permettre des approches inductives susceptibles de faire contrepoids à l’abondance d’approches hypothético-déductives insuffisamment vérifiées. Le corollaire sera très probablement une complexification de l’objet et du problème « radicalisation ».
30Paradoxalement, c’est la réticence – certes motivée – des institutions à ouvrir ces bases de données, alors même qu’elles promeuvent les recherches sur cette violence, qui freine la connaissance. Dans le cas américain, « le refus de partager les données accumulées a contribué à creuser un gouffre entre communauté du renseignement et universitaires qui a empêché le développement d’idées utiles et peut-être contre-intuitives sur les raisons pour lesquelles des individus recourent à la violence politique » [94]. Seule une volonté politique forte permettrait de combler ce fossé. À cet égard, le choix du ministère de l’Intérieur en août 2019 de confier à l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice une recherche sur le Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste avait permis de faire un pas en avant. La décision du Premier ministre Édouard Philippe de supprimer cet institut après l’attaque du 3 octobre 2019 à la Préfecture de police de Paris, sous prétexte d’une rationalisation de l’administration, a conduit à faire deux pas en arrière [95].
Notes
-
[1]
Peter M. Haas, « Introduction : Epistemic Communities and International Policy Coordination », International Organization, 46 (1), 1992, p. 1-35.
-
[2]
Stefan Malthaner, « Radicalization : The Evolution of an Analytical Paradigm », European Journal of Sociology, 58 (3), 2017, p. 369-401.
-
[3]
Est défini ici comme radical l’engagement qui, « à partir d’une posture de rupture vis-à-vis de la société d’appartenance, accepte au moins en théorie le recours à des formes non conventionnelles d’action politique éventuellement illégales, voire violentes ». Isabelle Sommier, « Engagement radical, désengagement et déradicalisation. Continuum et lignes de fracture », Lien social et Politiques, 68, 2012, p. 15.
-
[4]
Ted Gurr, Why Men Rebel, Princeton, Princeton University Press, 1970.
-
[5]
Entre 2002 et 2018, les trois pays occidentaux les plus frappés par le terrorisme étaient par ordre décroissant les États-Unis, le Royaume-Uni et la France (Institute for Peace and Economics, Global Terrorism Index 2019, Sidney, 2019, p. 38-43). De la « Déclaration de jihad contre les Américains » (1998) au « Message à la France de la part de Mudjahidines du pays du Sham » (2013), ces deux pays sont des cibles privilégiées des djihadistes, le cas britannique étant lié au cas américain.
-
[6]
Edna Reid, « Evolution of a Body of Knowledge : An Analysis of Terrorism Research », Information Processing and Management, 33 (1), 1997, p. 97-98.
-
[7]
Peter R. Neumann, Scott Kleinmann, « How Rigorous Is Radicalization Research ? », Democracy and Security, 9 (4), 2013, p. 378. Nous traduisons les citations d’ouvrages en anglais.
-
[8]
Alex Peter Schmid, « The Literature on Terrorism », dans A. P. Schmid (ed.), The Routledge Handbook of Terrorism Research, Londres, New York, Routledge, 2011, p. 457-474 ; John Horgan, « Terrorism Research Has not Stagnated », Chronicle of Higher Education, 8 mai 2013.
-
[9]
Lisa Stampnitzky, « Disciplining an Unruly Field : Terrorism Experts and Theories of Scientific/Intellectual Production », Qualitative Sociology, 34 (1), 2011, p. 13-14.
-
[10]
Arun Kundnani, « Radicalisation : The Journey of a Concept », dans Christopher Baker-Beall, Charlotte Heath-Kelly, Lee Jarvis (eds), Counter-radicalisation : Critical Perspectives, Londres, New York, Routledge, 2015, p. 18.
-
[11]
Sam Raphael, « In the Service of Power : Terrorism Studies and US Intervention in the Global South », dans Richard Jackson, Marie Breen Smyth, Jeroen Gunning (eds), Critical Terrorism Studies. A New Research Agenda, Londres, New York, Routledge, 2009, p. 49-65.
-
[12]
A. P. Schmid, « The Literature on Terrorism », cité, p. 470.
-
[13]
P. R. Neumann, S. Kleinmann, « How Rigorous Is Radicalization Research ? », art. cité, p. 377.
-
[14]
Stuart Gottlieb (ed.), Debating Terrorism and Counterterrorism : Conflicting Perspectives on Causes, Contexts, and Responses, Los Angeles, CQ Press, 2014.
-
[15]
Jonathan Rae, « Will It Ever Be Possible to Profile the Terrorist ? », Journal of Terrorism Research, 3 (2), 2012, p. 64-74.
-
[16]
R. Jackson, « The Core Commitments of Critical Terrorism Studies », European Consortium for Political Research, 6, 2007, p. 247.
-
[17]
J. Horgan, « From Profiles to Pathways and Roots to Routes : Perspectives from Psychology on Radicalization into Terrorism », The Annals of the American Academy of Political and Social Science, 618 (1), 2008, p. 80-94.
-
[18]
Lorenzo Bosi, « État des savoirs et pistes de recherche sur la violence politique », Critique internationale, 54 (1), 2012, p. 174.
-
[19]
Frank Foley, Max Abrahms, « Terrorism and Counterterrorism », dans Robert A. Denemark, The International Studies Encyclopedia, Londres, Blackwell Publishing, 2010.
-
[20]
Gordon H. McCormick, « Terrorist Decision Making », Annual Review of Political Science, 6, 2003, p. 491.
-
[21]
Ibid.
-
[22]
Ibid., p. 492.
-
[23]
J. Horgan, « Understanding Terrorist Motivation : A Socio-psychological Perspective », dans Magnus Ranstorp (ed.), Mapping Terrorism Research : State of the Art, Gaps and Future Directions, Londres, New York, Routledge, 2007, p. 110.
-
[24]
Robert A. Pape, « The Strategic Logic of Suicide Terrorism », American Political Science Review, 97 (3), 2003, p. 343-361 ; Erica Chenoweth, Nicholas Miller, Elizabeth McClellan, Hillel Frisch, Paul Staniland, Max Abrahms, « Correspondence. What Makes Terroristes Tick », International Security, 33 (4), 2009, p. 180-186.
-
[25]
Martha Crenshaw, « The Causes of Terrorism », Comparative Politics, 13 (4), 1981, p. 379.
-
[26]
M. Abrahms, « Why Terrorism Does not Work », International Security, 31 (2), 2006, p. 42-78.
-
[27]
Peter R. Neumann, Michael L. R. Smith, The Strategy of Terrorism : How It Works and Why It Fails, Londres, New York, Routledge, 2008.
-
[28]
M. Abrahms, « What Terrorists Really Want », International Security, 32 (4), 2008, p. 96.
-
[29]
Donatella Della Porta, « On Violence and Repression : A Relational Approach (The Government and Opposition/Leonard Schapiro Memorial Lecture, 2013) », Government and Opposition, 49 (2), 2014, p. 159-187.
-
[30]
Ami-Jacques Rapin, « L’objet évanescent d’une théorie improbable : le terrorisme et les sciences sociales », Les Cahiers du réseau multidisciplinaire d’études stratégiques, 5 (1), 2008, p. 196.
-
[31]
La sensibilité est la propriété d’une variable à repérer tous les positifs. La spécificité est la propriété d’une variable à éliminer les faux positifs. Ainsi, la pauvreté est faiblement spécifique car seule une fraction marginale des pauvres (présence de la condition) s’engage dans le terrorisme (absence du résultat) et faiblement sensible car parmi les terroristes (présence du résultat), une fraction significative n’est pas pauvre (absence de la condition).
-
[32]
Florence Gaub, Alexandra Laban, « Arab Futures : Three Scenarios for 2025 », European Union Institute for Security Studies Report, 22, 2015, p. 19.
-
[33]
Sofia Pinero Kluch, Alan Vaux, « Culture and Terrorism : The Role of Cultural Factors in Worldwide Terrorism (1970-2013) », Terrorism and Political Violence, 29 (2), 2017, p. 16.
-
[34]
James Piazza, « Rooted in Poverty ? Terrorism, Poor Economic Development, and Social Cleavages », Terrorism and Political Violence, 18 (1), 2006, p. 171.
-
[35]
J. Piazza, « Repression and Terrorism : A Cross-national Empirical Analysis of Types of Repression and Domestic Terrorism », Terrorism and Political Violence, 29 (1), 2017, p. 102-118.
-
[36]
Ángel Gómez, Lucía López-Rodríguez, Hammad Sheikh, Jeremy Ginges, Lydia Wilson, Hoshang Waziri, Alexandra Vázquez, Richard Davis, Scott Atran, « The Devoted Actor’s Will to Fight and the Spiritual Dimension of Human Conflict », Nature Human Behaviour, 9 (1), 2017, p. 673-679.
-
[37]
Mobilisation de l’Alliance Athéna, création du Conseil scientifique sur les processus de radicalisation (COSPRAD) en 2017, renforcement du groupement d’intérêt scientifique « Moyen-Orient et mondes musulmans », création de plusieurs postes profilés pour l’étude de l’islam et de la radicalisation, efforts portant sur le pilotage des recherches, avec par exemple l’appel à projets de l’Agence nationale de la recherche lancé en novembre 2015.
-
[38]
Clément Beunas, « Du “radical” au “radicalisé”. Les usages médiatiques et politiques de la notion de « déradicalisation » en France (2014-2017) », Déviance et Société, 43 (1), 2019, p. 3-39.
-
[39]
Xavier Crettiez, « Penser la radicalisation. Une sociologie processuelle des variables de l’engagement », Revue française de science politique, 66 (5), 2016, p. 709-727.
-
[40]
Laurent Bonelli, Fabien Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, Paris, Le Seuil, 2018 ; Marc Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », Études de l’IFRI. Focus stratégique, 79, 2018.
-
[41]
Xavier Crettiez, Romain Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, INHESJ/CESDIP/Mission de recherche Droit et Justice, 2017 ; Hugo Micheron a mené une enquête incluant 20 entretiens individuels dont une dizaine seulement sont utilisés pour illustrer ponctuellement son propos. Hugo Micheron, Le jihadisme français. Quartiers, Syrie, prisons, Paris, Gallimard, 2019.
-
[42]
Tobie Nathan, Les âmes errantes, Paris, L’iconoclaste, 2017 ; Dounia Bouzar, Français radicalisés. Enquête : ce que révèle l’accompagnement de 1 000 jeunes et de leurs familles, Paris, Éditions de l’Atelier, 2018 ; Guillaume Monod, En prison, paroles de djihadistes, Paris, Gallimard, 2018.
-
[43]
P. R. Neumann, « Introduction », dans P. R. Neumann (ed.), Radicalization, Londres, New York, Routledge, 2015, p. 8.
-
[44]
Cette base a fait l’objet de plusieurs présentations et analyses dans la revue Études polémologiques. Voir en particulier les dossiers « La violence en chiffres », 37 (1), 1986 ; 42 (2), 1987 ; 46 (2), 1988.
-
[45]
Dossiers de justice et des Services pénitentiaires d’insertion et de probation, dossiers des mineurs de retour de zone syro-irakienne, Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes (FIJAIT), Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), entre autres.
-
[46]
Léo Mouren, Morgane Heuclin-Reffait, Agathe Charnet, Laura Wojcik, Ghalia Kadiri, Romain Cluzel, « Depuis la France, 68 chemins pour le jihad », Libération, 21 mars 2016.
-
[47]
Xavier Crettiez, Yvan Barros, « La réalité de la menace djihadiste en France : 2015-2018 », Chaire Citoyenneté, Sciences Po Saint-Germain-en-Laye, 2019.
-
[48]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité.
-
[49]
L. Bonelli, F. Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, op. cit.
-
[50]
Xavier Crettiez, Romain Sèze, Jennifer Boirot, Sociologie des processus de radicalisation djihadiste, recherche en cours pour la Direction de l’administration pénitentiaire.
-
[51]
D. Bouzar, Français radicalisés. Enquête : ce que révèle l’accompagnement de 1 000 jeunes et de leurs familles, op. cit.
-
[52]
Olivier Galland, Anne Muxel (dir.), La tentation radicale. Enquête auprès des lycéens, Paris, PUF, 2018, p. 96.
-
[53]
Olivier Bobineau, Pierre N’Gahane, La voie de la radicalisation. Comprendre pour mieux agir, Paris, Armand Colin, 2019.
-
[54]
Mathieu Rigouste, « L’ennemi intérieur, de la guerre coloniale au contrôle sécuritaire », Cultures & Conflits, 67, 2007, p. 166.
-
[55]
Ibid.
-
[56]
Yvan Jounot, « Prévention de la radicalisation », Rapport pour le Premier ministre, non publié, 2013.
-
[57]
Farhad Khosrokhavar, Le nouveau jihad en Occident, Paris, Robert Laffont, 2018 ; F. Khosrokhavar, Radicalisation, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2014 ; F. Khosrokhavar, Quand al-Qaïda parle : témoignages derrière les barreaux, Paris, Grasset, 2006 ; Gilles Kepel, Antoine Jardin, Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, Paris, Gallimard, 2015 ; Alain Bertho, Les enfants du chaos. Essai sur le temps des martyrs, Paris, La Découverte, 2016 ; François Burgat, Comprendre l’islam politique. Une trajectoire de recherche sur l’altérité islamiste, 1973-2016, Paris, La Découverte, 2016 ; William McCants, Christopher Meserole, « The French Connection. Explaining Sunni Militancy around the World », Foreign Affairs, 24 mars 2016 ; Olivier Roy, Le djihad et la mort, Paris, Le Seuil, 2016 ; T. Nathan, Les âmes errantes, op. cit. ; Fabien Truong, Loyautés radicales. L’islam et les « mauvais garçons » de la nation, Paris, La Découverte, 2017.
-
[58]
Notamment Sébastien Sarron en décembre 2014 à Nantes ; Abdel-Malik Petitjean en juillet 2016 à Saint-Étienne-du-Rouvray ; Farid Ikken en juin 2017 à Paris ; l’autrice de la tentative d’attentat à Rennes arrêtée en décembre 2017 ; l’Afghan suspecté de l’attaque au couteau à Villeurbanne en septembre 2019.
-
[59]
R. Sèze, « Débat autour de La tentation radicale d’Olivier Galland et Anne Muxel », Champs de Mars, 31 (2), 2018, p. 105-114.
-
[60]
O. Bobineau, P. N’Gahane, La voie de la radicalisation. Comprendre pour mieux agir, op. cit., p. 16, 65, 164.
-
[61]
Pierre Bourdieu, Homo academicus, Paris, Éditions de Minuit, 1984.
-
[62]
O. Galland, A. Muxel (dir.), La tentation radicale. Enquête auprès des lycéens, op. cit.
-
[63]
X. Crettiez, R. Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, cité.
-
[64]
G. Kepel, Jihad. Expansion et déclin de l’islamisme, Paris, Gallimard, 2000.
-
[65]
G. Kepel, A. Jardin, Terreur dans l’Hexagone. Genèse du djihad français, op. cit.
-
[66]
F. Khosrokhavar, Le nouveau jihad en Occident, op. cit. ; F. Khosrokhavar, Radicalisation, op. cit. ; F. Khosrokhavar, Quand al-Qaïda parle : témoignages derrière les barreaux, op. cit.
-
[67]
X. Crettiez, R. Sèze (dir.), Saisir les mécanismes de la radicalisation violente : pour une analyse processuelle et biographique des engagements violents, cité, p. 75-78.
-
[68]
F. Truong, Loyautés radicales. L’islam et les « mauvais garçons » de la nation, op. cit.
-
[69]
A. Bertho, Les enfants du chaos. Essai sur le temps des martyrs, op. cit.
-
[70]
Pierre Manent, Situation de la France, Paris, Desclée de Brouwer, 2015.
-
[71]
W. McCants, C. Meserole, « The French Connection. Explaining Sunni Militancy around the World », art. cité.
-
[72]
F. Burgat, Comprendre l’islam politique. Une trajectoire de recherche sur l’altérité islamiste, 1973-2016, op. cit.
-
[73]
S. Atran, L’État islamique est une révolution, Paris, Actes Sud, 2016.
-
[74]
O. Roy, Le djihad et la mort, op. cit.
-
[75]
Ibid.
-
[76]
T. Nathan, Les âmes errantes, op. cit.
-
[77]
Dounia Bouzar, Christophe Caupenne, Soulayman Valsan, La métamorphose opérée chez le jeune par les nouveaux discours terroristes. Recherche-action sur la mutation du processus d’endoctrinement et d’embrigadement dans l’islam radical, Lille, Centre de prévention des dérives sectaires liées à l’islam (CPDSI), 2014.
-
[78]
Plateforme de signalements du ministère de l’Intérieur, 2014.
-
[79]
Ibid., 2016.
-
[80]
Ibid., 2015.
-
[81]
L. Mouren, M. Heuclin-Reffait, A. Charnet, L. Wojcik, G. Kadiri, R. Cluzel, « Depuis la France, 68 chemins pour le jihad », art. cité.
-
[82]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité.
-
[83]
L. Bonelli, F. Carrié, La fabrique de la radicalité. Une sociologie des jeunes djihadistes français, op. cit.
-
[84]
F. Khosrokhavar, Radicalisation, op. cit.
-
[85]
Morgan Kelly, « Inequality and Crime », Review of Economics and Statistics, 82 (4), 2000, p. 530-539.
-
[86]
M. Hecker, « 137 nuances de terrorisme. Les djihadistes de France face à la justice », art. cité, p. 22.
-
[87]
G. Monod, En prison, paroles de djihadistes, op. cit.
-
[88]
Antoine Mégie, « Le contentieux judiciaire antiterroriste depuis 2015 : “massification”, spécialisation et politisation », dans R. Sèze (dir.), Les États européens face aux militantismes violents. Dynamique d’escalade et de désescalade, Paris, Riveneuve, 2019, p. 187-206.
-
[89]
Angela McGilloway, Priyo Ghosh, Kamaldeep Bhui, « A Systematic Review of Pathways to and Processes Associated with Radicalization and Extremism amongst Muslims in Western Societies », International Review of Psychiatry, 27 (1), 2015, p. 49.
-
[90]
Jean Baechler, Les phénomènes révolutionnaires, Paris, PUF, 1970, p. 147.
-
[91]
Richard Bernstein, « Upper Crust Is often Drawn to Terrorism », The New York Times, 30 décembre 2009.
-
[92]
I. Sommier, « Engagement radical, désengagement et déradicalisation. Continuum et lignes de fracture », art. cité, p. 17.
-
[93]
Charles Tilly, « Terror, Terrorism, Terrorists », Sociological Theory, 22 (1), 2004, p. 12.
-
[94]
Marc Sageman, « The Stagnation in Terrorism Research », Terrorism and Political Violence, 26 (4), 2014, p. 576.
-
[95]
Nous remercions Xavier Crettiez, Loïc Le Pape, Christian Leuprecht ainsi que les deux évaluateurs anonymes de Critique internationale pour leurs commentaires constructifs et leurs conseils précieux sur les versions antérieures de cet article.