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Article de revue

Professorenrecht  ?

Le champ du droit privé européen

Pages 147 à 158

Notes

  • [1]
    La traduction littérale de Professorenrecht en français est « droit des Professeurs ». Ce terme revêt un sens particulier dans le contexte allemand où les Professeurs d'université jouent traditionnellement un rôle important dans l'élaboration et la systématisation de la législation.
  • [2]
    Pierre Legrand, « Against a European Civil Code », Modern Law Review, vol. 60,1997, p. 44.
  • [3]
    P. Legrand lui-même décrit son sujet comme « une proposition qui rencontre apparemment une sympathie croissante dans les différents cercles politiques, professionnels et universitaires », ibid.
  • [4]
    Yves Lequette, « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », Le Dalloz, Chroniques, 28,2002, p. 2 202. Voir, également, Y. Lequette, « Vers un Code civil européen », Pouvoirs, 107,2003, p. 97.
  • [5]
    La notion de « champ » est utilisée sans prétention aucune à l’exactitude doctrinale. Cf. Pierre Bourdieu, « La force du droit. Éléments pour une sociologie du champ juridique », Actes de la recherche en sciences sociales, 64,1986, p. 2 et Mikael Madsen, Yves Dezalay, « The Power of the Legal Field : Pierre Bourdieu and the Law », dans Reza Banakar, Max Travers (eds), An introduction to Law and Social Theory, Oxford, Hart Publishing, 2002, p. 189.
  • [6]
    Ole Lando relate cette histoire dans Ole Lando, Hugh Beale (eds), Principles of European Contract Law – Parts I and II, La Hague, Kluwer, 2000, préface. Il convient de noter que l’idée avait déjà circulé dans les hautes sphères de la Commission. Voir, par exemple, Walter Hallstein, « Angleichung des Privat– und Prozessrechts in der Europäischen Wirtschaftsgemeinschaft », Rabels Zeitschrift, vol. 28,1964, p. 211.
  • [7]
    Résolution du Parlement européen sur un effort de rapprochement du droit privé, ( 1989) JO C 158/400. Towards a European Civil Code (Arthur Hartkamp et al. (eds), Dordrecht, Martinus Nijhoff, 1994) fut écrit spécifiquement pour surmonter le défi posé par le Parlement.
  • [8]
    Résolution du Parlement européen sur l’harmonisation de certains secteurs du droit privé des États membres, ( 1994) JO C 205/518.
  • [9]
    Cela inclut Christian von Bar et Ole Lando eux-mêmes mais également, par exemple, Guido Alpa (Rome), Hugh Beale (Commission de droit), Ulrich Drobnig (Hambourg), Roy Goode (Oxford) et Ewoud Hondius (Utrecht). Jacques Ghestin (Paris I) rejoignit seulement le Groupe d’études. Thomas Wilhelmsson, un membre de longue date de la Commission, est, lui, demeuré à l’écart.
  • [10]
    Communication de la Commission européenne sur le droit européen des contrats, COM ( 2001) 398. L’option 1 était la « non-action », dans l’espoir que le marché trouve ses propres solutions. La Commission a mis en ligne certaines contributions à la Communication sur son site internet (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ index_fr. htm ). Voir également, par exemple, Stefan Grundmann, Jules Stuyck (eds), An Academic Green Paper on European Contract Law, Deventer, Kluwer, 2002.
  • [11]
    Résolution du Parlement européen sur le rapprochement du droit civil et commercial des États membres, ( 2002) JO CX 140 E/538.
  • [12]
    Communication de la Commission, « Un droit européen des contrats plus cohérent – Un plan d’action », COM ( 2003) 68, p. 18. Un soutien communautaire à la rédaction du Sixième Programme de Rédaction est explicitement envisagé. Un « Appel à manifestation d’intérêt dans le but de mettre en place un réseau d’experts parties prenantes au Cadre commun de référence » a été publié récemment. Voir ( 1994) JO S 148.
  • [13]
    Pour un récapitulatif relativement ancien, voir Christoph Schmid, « The Emergence of a Transnational Legal Science in European Private Law », Oxford Journal of Legal Studies, vol. 19,1999, p. 673.
  • [14]
    La Zeitschrift für europäisches Privatrecht et la European Review for Private Law ont été lancées respectivement en 1992 et 1993.
  • [15]
    Voir Mauro Bussani, Ugo Mattei, The Common Core of European Private Law, Deventer, KLuwer, 2003. Les résultats de cette entreprise ont été publiés dans Reinhard Zimmermann, Simon Whittaker (eds), Good Faith in European Contract Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2000 ; James Gordley (ed.), The Enforceability of Promises in European Contract Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2001 ; Mauro Bussani, Vernon Valentine Palmer (eds), Pure Economic Loss in Europe, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, et Eva-Maria Kieninger (ed.), Security Rights in Moveable Property in European Private Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2004.
  • [16]
    Voir Walter van Gerven, Tort Law – Scope of Protection, Oxford, Hart Publishing, 1998 ; Walter van Gerven, Jeremy Lever, Pierre Larouche, Tort Law, Oxford, Hart Publishing, 2000 ; Hugh Beale, Hein Kötz, Athur Hartkamp, Denis Tallon, Contract Law, Oxford, Hart Publishing, 2002 ; Jack Beatson, Eltjo Schrage, Unjustified Enrichment, Oxford, Hart Publishing, 2003.
  • [17]
    Le très kantien « conflit des facultés », auquel donne lieu l’intégration juridique européenne, forme un thème récurrent dans l’œuvre de C. Joerges. Cf., par exemple, « The Europeanisation of Private Law as a Rationalisation Process and as a Contest of Disciplines – An Analysis of the Directive on Unfair Terms in Consumer Contracts », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 175.
  • [18]
    Pour un exemple de cette assurance nouvellement acquise, voir, notamment, Klaus Peter Berger, « Harmonisation of European Contract Law : The Influence of Comparative Law », International and Comparative Law Quaterly, vol. 50,2001, p. 877 (« Il est aujourd’hui couramment admis que le droit comparé joue un rôle décisif dans l’harmonisation du droit privé européen. »).
  • [19]
    Voir, par exemple, O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », Common Market Law Review, vol. 35,1998, p. 821 à 826 (« Le droit des contrats n’est pas un folklore. Il relève de l’éthique, de l’économie et de la technique. »).
  • [20]
    Pour une tentative de relevé topographique de ce champ, voir Harm Schepel, Rein Wesseling, « The Legal Community : Judges, Lawyers, Officials and Clerks in the Writing of Europe », European Review of Private Law, vol. 12,2004.
  • [21]
    Stephen Weatherill (Oxford) et Christian Joerges (IUE de Florence) font également figure d’importantes exceptions.
  • [22]
    Pour une critique, voir H. Schepel, « The Enforcement of EC Law in Contractual Relations : Case Studies in How Not to “Constitutionalise” Private Law », European Review of Private Law, vol. 12,2004, p. 661-675.
  • [23]
    À cet égard, il est significatif que le dossier de la Commission européenne relatif au droit européen des contrats relève encore de la compétence de la Direction générale « Santé et protection des consommateurs ».
  • [24]
    C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », Columbia Journal of European Law, vol. 8,2002, p. 379-385.
  • [25]
    C. von Bar proteste contre le fait que la Communication de la Commission « soit entièrement tournée vers les exigences économiques du marché commun ; la dimension symbolique d’un droit privé européen uniforme n’est même pas mentionnée », ibid., p. 379-383.
  • [26]
    O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », art. cité. Pour des tentatives plus abouties, voir Jürgen Basedow, « A Common Contract Law for the Common Market », Common Market Law Review, vol. 33,1996, p. 1 169. « Je dépense donc je suis », ironise Y. Lequette dans « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », cité, p. 2 202 à 2 206.
  • [27]
    La nécessité d’un raisonnement convaincant sur le fondement de l’article 95 TCE s’est accrue depuis la décision de la Cour de Justice des Communautés européennes Publicité en faveur des produits du tabac (C-376/98 Allemagne contre Parlement et Commission ( 2000) Rec. I-8419). Voir, par exemple, S. Weatherill, « The Commission’s Options for Developing EC Consumer Protection and Contract Law : Assessing the Constitutional Basis », European Business Law Review, vol. 13,2002, p. 497.
  • [28]
    Christian von Bar, Ole Lando, Stephen Swann, « Communication on European Contract Law : Joint Response of the Commission on European Contract Law and the Study Group on European Civil Code », European Review of Private Law, vol. 10,2002, p. 183,194 et suiv.
  • [29]
    Cette contribution au processus de consultation est, comme toutes les autres, consultable sur le site Internet de la Commission (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ index_en. htm). Mais von Bar ne se démonte pas : « Que la preuve concrète puisse ou non en être apportée, on constate chaque jour que la diversité des systèmes de droit privé entrave le développement du marché intérieur » ( cf. C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », art. cité, p. 379-385).
  • [30]
    Cela ne constitue évidemment pas une nouveauté dans le discours juridique européen. Voir, par exemple, Peter Fitzpatrick, « New Europe and Old Stories : Mythology and Legality in the European Union », dans Peter Fitzpatrick, James Henry Bergeron (eds), Europe’s Other : European Law Between Modernity and Postmodernity, Aldershot, Ashgate, 1998, p. 27.
  • [31]
    Pour une analyse détaillée, voir Hugh Collins, « European Private Law and the Cultural Identity of States », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 353 et « The Voice of the Community in Private Law Discourse », European Law Journal, vol. 3,1997, p. 407.
  • [32]
    C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », art. cité, p. 379-385.
  • [33]
    O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », art. cité, p. 821-826.
  • [34]
    J. Basedow, « Rechtskultur – zwischen nationalem Mythos und europäischem Ideal », Zeitschrift für europäisches Privatrecht, vol. 3,1996, p. 379.
  • [35]
    R. Zimmermann, « Civil Code and Civil Law : The “Europeanization” of Private Law within the European Community and the Re-emergence of a European Legal Science », Columbia Journal of European Law, vol. 1,1995, p. 63,105.
  • [36]
    Ibid., R. Zimmermann, « Savigny’s Legacy : Legal History, Comparative Law, and the Emergence of a European Legal Science », Law Quarterly Review, vol. 112,1996, p. 576. Van Gerven insiste sur le fait que « l’histoire juridique de l’Europe montre [que] la fabrication d’un droit commun en Europe est autant le travail des juges et des universitaires que celui des législateurs » ; cf. W. van Gerven, « The Case-law of the European Court of Justice and National Courts as a Contribution to the Europeanisation of Private Law », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 367.
  • [37]
    C. von Bar, O. Lando, S. Swann, « Communication on European Contract Law : Joint Response of the Commission on European Contract Law and the Study Group on European Civil Code », art. cité, p. 183-239.
  • [38]
    Y. Lequette, « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », cité, p. 2 202-2 210 (« [L]’autorité scientifique de M. von Bar aurait-elle suffi à lui ouvrir les portes de la Grand’Chambre de la Cour de Cassation ? Il est permis d’en douter. »).
  • [39]
    La citation est tirée de la contribution d’Orgalime (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ 2.1.7.pdf).
  • [40]
    La citation est tirée de la contribution de la Law Society (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ 4.12.pdf).
  • [41]
    Voir la résolution du Parlement européen relative au Plan d’action ( 2003) JO C 76/96 (demandant à ce que « les usagers du droit tels que les juges, les juristes, les notaires, les entreprises et les consommateurs soient impliqués dans l’élaboration du “Cadre commun de référence” » et remarquant que « la Commission n’a jusqu’ici pas prêté attention à ces groupes ») et la résolution du Conseil relative à « un droit européen des contrats plus cohérent » ( 2003) JO C 246/1 (demandant à la Commission de prendre en compte les « besoins concrets des opérateurs économiques et des consommateurs et les structures et les cultures juridiques existant dans les États membres ».)

1Comparatiste prestigieux, Pierre Legrand est bien connu pour sa pugnacité. En 1997, il publia « Contre un Code civil euro péen », une diatribe contre l’idée, jugée arrogante et rétrograde, d’harmonisation du droit privé européen : ce projet qui « relève d’une réécriture de l’histoire européenne », cherche, selon lui, à créer « une nouvelle séparation entre le monde juridico-politique et la société » et « reflète le progrès d’une bureaucratie européenne composée en grande partie de fonctionnaires déracinés »  [2]. Au moment de la publication de cet article, l’exercice pouvait sembler quelque peu donquichottesque : si l’artillerie était puissante, la cible apparaissait comme une vague idée en apesanteur, dénuée de fondement intellectuel sérieux, de soutien idéologique et de parrainage politique  [3]. En 2002, Yves Lequette, privatiste de grand renom, publia son propre pamphlet contre l’idée de Code civil européen. Mais le combat, alors, ne relevait plus du simple débat d’idées : plusieurs dizaines de privatistes issus de toute l’Europe, désormais réunis en groupes d’études et en projets de recherche, bénéficiaient, pour esquisser les articles et les principes du futur code, de généreux soutiens financiers. Les institutions politiques de la Communauté européenne avaient adopté des résolutions, publié des Livres blancs, lancé une série de consultations et établi des plans d’action. Et la cible, dorénavant, avait un nom. Le Professeur von Bar, cheville ouvrière du plus important projet de Code civil européen, s’était frayé un chemin jusqu’à la Grand’ Chambre de la Cour de Cassation pour y exposer ses vues. En anglais. Le Professeur Lequette exprima alors publiquement son inquiétude au sujet du discours de von Bar, « tant il montre à quel point est délibérée, organisée et avancée l’entreprise qui entend priver, de manière purement technocratique, les peuples qui composent l’Europe de leurs droits civils, alors même que ceux-ci constituent une pièce importante de leur histoire, de leur culture et de leur identité »  [4]. Entre-temps, le champ du droit privé européen s’était consolidé  [5]. L’un des objectifs de cet article est de décrire les contours de ce champ – ses acteurs, son architecture, ses fondements intellectuels et idéologiques et les enjeux qu’il recouvre. Un autre objectif est d’analyser l’interaction entre ce nouveau champ et celui, mieux établi, du droit communautaire. Le débat relatif au Code civil européen est en effet intéressant en tant que tel, mais il offre surtout un passionnant exemple de construction sociale du droit – et des juriste – dans le contexte de l’intégration européenne.

L’entreprise de Code civil européen

2L’entreprise a été menée, dès sa conception, par une alliance d’acteurs universitaires et politiques se confortant mutuellement. Un beau soir de 1974, lors d’un dîner dans les jardins de Tivoli après une conférence à Copenhague, le Professeur Ole Lando et Winfried Hauschild de la Commission européenne décidèrent que « nous » avions besoin d’un Code européen. Lando partit ensuite à la recherche de « personnes qualifiées », des réunions se tinrent à Bruxelles, la Commission fournit des financements, et, en 1982, la Commission sur le droit européen des contrats – un groupe d’éminents privatistes issus de tous les États-membres – entreprit de dégager les principes d’un tel droit  [6]. En 1989, le Parlement européen adopta une résolution demandant que débute la rédaction d’un « Code européen commun de droit privé » et appelant à « un encouragement moral et matériel des études de droit comparé menées au sein de la Communauté et, plus généralement, des efforts de codification »  [7]. En 1994, le Parlement réitéra son appel à la rédaction d’un code et préconisa de « continuer à soutenir la Commission sur le droit européen des contrats, plus connue sous le nom de Commission Lando »  [8]. En 1998, von Bar créa le Groupe d’études sur un Code civil européen. Que cela ait été l’intention première ou non, le Groupe d’études est devenu le successeur, plutôt que le rival, de la Commission Lando, en attirant dans ses rangs un bon nombre de membres de cette dernière  [9]. En 2001, avec le marché intérieur solidement instauré et un dispositif complet de Directives relatives à la protection du consommateur, la Commission réapparut finalement dans le tableau en publiant sa Communication sur le droit européen des contrats. Conformément à la politique établie depuis l’avènement de la sub-sidiarité et de la bonne gouvernance, elle ne formulait pas explicitement des propositions précises mais se bornait à présenter un éventail d’options destinées à encourager le débat et la réflexion. Outre l’idée évidemment populaire d’améliorer la qualité et la cohérence de la législation communautaire en vigueur, les options sérieuses étaient au nombre de deux : promouvoir le développement des principes communs de droit européen des contrats conduisant à une plus grande convergence des droits nationaux, et adopter une législation exhaustive au niveau communautaire  [10]. Le Parlement européen ne prit même pas la peine de démontrer que ces deux options devaient être mises en œuvre l’une après l’autre plutôt que d’être considérées comme exclusives l’une de l’autre. Il établit même un calendrier : la recherche comparative sur les principes communs et la terminologie devrait être achevée en 2005 ; à partir de cette date, les trésors nouvellement découverts devraient être diffusés dans des programmes universitaires et dans le monde juridique afin que, dès 2010, un corpus de règles sur le droit des contrats puisse être adopté au sein de l’Union européenne  [11]. La Commission révéla en 2003 un Plan d’action annonçant son intention de concentrer les efforts sur le développement de ce qui est dorénavant appelé un « Cadre commun de référence », un Code type en droit des contrats qui, on l’espère, sera largement accepté par les opérateurs économiques et pris comme point de référence par les parlements nationaux. La Commission opérait ainsi son travail d’harmonisation de façon graduelle et par « le bas ».

3Bien entendu, la rédaction d’un tel code requiert d’importantes recherches. Cependant, comme le souligne la Commission, « il est bien évident que la Commission n’a nullement l’intention de “réinventer la roue” » dans ce domaine : « Bien au contraire, il est remarquable que jamais auparavant on n’ait observé une telle floraison d’activités de recherche dans le domaine du droit européen des contrats. Il est essentiel que ces activités (… ) se poursuivent et soient pleinement exploitées. En conséquence, l’objectif principal est de combiner et de coordonner les recherches en cours afin de les inscrire dans un cadre commun … »  [12].

Le champ du droit privé européen

4À travers toute l’Europe, un nombre impressionnant de recherches universitaires sont, en effet, en cours. Pour un sujet encore largement dans les limbes, le succès du droit privé européen est même stupéfiant  [13]. Des revues universitaires prospèrent  [14], des cours et des enseignements sont proposés sur tout le continent, des écoles spécialisées se créent et des projets de recherche transnationaux se montent, financés par la Commission mais aussi, de façon encore plus significative, par des organismes scientifiques nationaux. L’essentiel de cette activité consiste, naturellement, à faire exister la discipline. Le « Groupe Trento » rassemble, chaque année, en Italie, des dizaines de privatistes et de comparatistes qui cherchent à « exhumer » le noyau dur du droit privé européen  [15]. À Louvain et Maastricht, sous la direction de Walter van Gerven, un groupe de recherche compile la jurisprudence du Ius Commune et publie, tome après tome, un volumineux matériel pédagogique qui en « révèle » les principes communs  [16].

5La construction d’un champ de droit privé européen est, à bien des égards, le résultat d’une lutte entre différentes disciplines cherchant à affirmer leur supériorité épistémologique  [17]. Le droit comparé, grâce à l’enthousiasme politique et universitaire que soulève l’idée de droit privé commun, connaît une sorte de nouvelle jeunesse. Si certains, comme Legrand, s’élèvent avec véhémence contre la réduction de leur art au statut de boîte à outils de la codification, il n’en demeure pas moins que le droit privé comparé est désormais un domaine de recherche passionnant et en pleine expansion, abondamment financé et soutenu politiquement par les institutions communautaires  [18]. L’émergence d’un droit privé « européen » bouleverse la configuration des droits privés nationaux. Dans la mesure où les fonds de recherche et la visibilité politique se déplacent vers des projets européens communs, les privatistes « internistes » comme Lequette se retrouvent en position défensive, présentés – voire raillés – comme dépassés, conservateurs et provinciaux  [19]. La « nouvelle » science juridique ne consiste pas à ordonner le droit positif, mais à en découvrir les structures fondamentales et à dégager des similitudes entre les différents systèmes juridiques. L’émergence de ce champ de droit privé européen ouvre alors un conflit – ce point est très important pour notre propos – avec le champ du droit communautaire  [20].

6Les communautaristes forment un groupe très uni, qui circule tout naturellement entre l’université, les institutions politiques et le monde économique. Leur ethos est profondément pragmatique, ouvertement hostile aux idées grandioses, et sous-tendu par une conception clairement instrumentale du droit. Leur engagement collectif en faveur de l’intégration estompe leurs divergences politiques et leurs controverses techniques. Ils sont presque tous publicistes. À la très notable exception de Walter van Gerven, qui fut Avocat général près la Cour de Justice des Communautés européennes de 1988 à 1994 et qui est l’une des personnes les plus influentes dans ce champ, très peu d’entre eux sont également privatistes  [21].

Des récits concurrents : la nécessité d’un droit privé harmonisé

7Pour les communautaristes, l’impact de l’intégration européenne sur les droits privés nationaux découle logiquement de la nature du droit européen. Il constitue, d’une part, la traduction attendue des principes de primauté et de l’effet direct du droit communautaire : du point de vue du droit européen, tout obstacle à l’effectivité du droit communautaire doit être écarté, et peu importe, conceptuellement, que cet obstacle relève du droit de la consommation, du droit procédural, du droit des sociétés ou du droit des contrats  [22]. Cet impact, d’autre part, est inhérent au concept de marché intégré. Les directives concernant les clauses contractuelles abusives, la responsabilité du fait des produits, le time-sharing et même le commerce électronique sont conçus comme des mesures « de correction du marché » destinées à protéger les consommateurs et les travailleurs contre l’effet dérégulateur de la libre circulation des personnes, des biens et des services  [23]. Du point de vue du droit communautaire, il n’y a que peu de différences conceptuelles entre la nécessité d’harmoniser les normes de sécurité pour les jouets et celle d’introduire des clauses de nullité dans les contrats conclus lors de démarchages à domicile ou sur Internet. Ce qui compte n’est pas tant l’harmonisation du droit privé en tant que tel que la construction d’un dispositif qui permette l’application uniforme des règles juridiques structurant le marché intérieur.

8Mais quand les communautaristes raisonnent en fonction du but à atteindre, les privatistes, eux, tendent à privilégier la cohérence du système juridique. Et ils ont le sentiment que l’approche communautaire du marché intégré menace de détruire l’œuvre de toute leur vie. Comme le souligne von Bar : « Les juristes européens ont conscience que les choses ne peuvent pas rester en l’état du fait de la conception qu’ont les institutions de l’Union européenne de la fonction législative. Une directive qui, du point de vue de Bruxelles, apparaît simplement comme une réussite dans l’harmonisation d’un pan du droit, peut, en effet, conduire à la formation, au sein des systèmes juridiques nationaux, de nouvelles lignes de fracture (… ). Le recours aux directives, qui découle aujourd’hui d’une approche sectorielle et incrémentale exclusivement conçue sous l’angle du droit de la protection du consommateur, constitue d’ores et déjà une menace permanente pour la qualité et la cohérence d’ensemble de nos systèmes nationaux de droit privé »  [24].

9Dans ces conditions, se borner à dénoncer « l’ignorance de Bruxelles » en matière de droit privé revient à minimiser les problèmes systémiques que pose le droit européen : ce n’est pas en « améliorant » une législation au coup par coup qu’on préservera la qualité et la cohérence des systèmes nationaux de droit privé. Seule une science juridique authentiquement européenne peut en garantir la préservation.

10L’intégrité scientifique et la cohérence systémique n’offrent, cependant, pas de raisons suffisantes pour que la communauté européenne entreprenne d’adopter des mesures d’harmonisation du droit des contrats. C’est là un des paradoxes du débat sur le droit privé européen : les partisans de l’idée de Code civil européen, tout pénétrés qu’ils sont de la grandeur, de l’élégance et de la force symbolique de leur ambition, n’en sont pas moins réduits à mener leur combat sur le terrain des règles et des modalités d’élaboration du droit communautaire  [25]. Le combat porte sur la question de la compétence ; le but est d’établir que la diversité des systèmes nationaux de droit des contrats fait obstacle au fonctionnement du marché intérieur. Ole Lando a parfaitement résumé l’argument en un simple syllogisme : « Les hommes d’affaires et leurs avocats peinent souvent à comprendre les droits étrangers. Ces derniers suscitent en eux un sentiment d’insécurité, et peuvent les conduire à rester à l’écart du marché intérieur des autres États membres. La diversité actuelle du droit des contrats en Europe peut ainsi être perçue comme un obstacle non tarifaire à la libre circulation. Or l’un des buts de l’Union est de supprimer toute restriction de concurrence au sein des Communautés. La diversité des droits qui restreignent ce commerce doit donc être supprimée »  [26].

11La compétence communautaire aurait pu, à une autre époque, être établie sur ce seul fondement. Mais avec les nouvelles sensibilités constitutionnelles de l’Union, c’est dorénavant loin d’être suffisant  [27]. La Communication de la Commission de 2001 a donc appelé à de meilleurs arguments et à des preuves concrètes, appel auquel von Bar et Lando ont consciencieusement tenté de répondre  [28]. Tout cela a cependant cessé de faire sens après que la Fédération européenne des Petites et Moyennes Entreprises, l’UAPME, a fait savoir que la diversité des droits ne constituait pas un obstacle significatif aux transactions transfrontalières  [29].

12Lutter sur le terrain de l’adversaire est, à l’évidence, rarement une bonne idée. Toute l’argumentation tendant à établir que l’Union européenne est bien compétente pour adopter un Code civil européen a dû être rédigée dans un langage et un moule intellectuel que les privatistes européens ne se sont jamais pleinement appropriés et dans lesquels ils ne se sont jamais réellement sentis à l’aise. La complexité du processus décisionnel européen, la navigation à vue entre les orientations du marché et l’intérêt du consommateur, les limites constitutionnelles à l’action législative de l’Union, tout cela relève des règles d’un autre jeu, pratiqué dans le champ du droit communautaire. Ce n’est pas dans ce champ que les privatistes européens cherchent vraiment à investir leur capital.

Le droit, les juristes et l’intégration juridique

13Le champ du droit privé européen se pose comme le gardien autoproclamé de l’idéal européen. Là gît un autre paradoxe de tout ce débat : les tenants de ce nouveau champ sont plus profondément immergés dans la symbolique de la construction étatique que les représentants du contre-modèle qui leur a permis de se définir, à savoir les gardes-barrières du nationalisme juridique  [30]. Le droit privé est partie intégrante de l’histoire, de la culture et de l’identité d’une nation, c’est un point que les communautaristes de droit privé ne disputeront pas à Lequette  [31]. Mais ils ajouteront, avec von Bar, « qu’ils sont collectivement comptables du destin du droit privé, et non des modalités d’expression de la souveraineté nationale et que l’enjeu culturel, pour être indéniable, consiste à construire une culture de droit privé authentiquement européenne »  [32]. Le projet d’un Code civil européen est légitimé, d’une part, par son degré de sophistication scientifique (protégé de toute pression « politique ») et, d’autre part, par un vaste discours de théorie historique et sociologique relatif au patrimoine juridique commun de l’Europe, ainsi qu’aux fonctions culturelles, sociales et politiques du droit privé (et des juristes). En vérité, le mouvement de fond dont il est porteur signe plutôt la faillite de ces deux types de discours de légitimation.

14Pour contrer les accusations de scientisme « technocratique » coupé de la société et de la vie du droit, on avance la thèse d’une identité commune des juristes européens. Ole Lando, par exemple, considère avec optimisme que les conditions de l’unification du droit privé sont, au plan sociologique, d’ores et déjà réunies : « La plupart des gardiens et des prédicateurs de notre droit et de notre système de justice ont été élevés dans des foyers bourgeois dotés de solides traditions morales. En Europe, c’est la classe moyenne et, en général, les parents de nos juges et de nos professeurs qui ont assuré le rôle de gardiens de la morale. Les pères étaient présents et savaient se tenir. À l’école puis à l’université, les aspirants juristes se sont montrés bons élèves, relativement vertueux et solidement unis à leur famille. Beaucoup d’entre eux étaient de droite. Leur vie professionnelle les a confortés dans leurs attitudes bourgeoises et dans leur vision conservatrice du monde. (… ) Par conséquent, la communauté des juristes européens partage des valeurs juridiques très similaires. Il en va de même, par hypothèse, pour les peuples européens en général, puisqu’ils vivent dans des sociétés aux structures économiques et politiques relativement similaires et partagent les mêmes valeurs morales. Cela devrait nous permettre d’élaborer un Code européen des obligations »  [33].

15Ce qu’enseignent et apprennent, à l’université, ces bons bourgeois et bons pères de famille, forme le soubassement du champ du droit privé européen. Tout se passe comme si la science juridique s’identifiait à la culture juridique européenne : à lui seul, le sentiment de « fraternité » qui unit les juristes européens accouchera d’une culture juridique authentiquement européenne et d’une conscience juridique vraiment commune. Le « règne du droit » qui s’exprime par le caractère contraignant des règles juridiques générales et abstraites, la systématisation du droit par la science juridique, ainsi que la technicité du droit considéré comme un domaine réservé aux seuls juristes à l’exclusion des profanes, forme les fondations sur lesquelles se construit ce prodige  [34]. Les codifications nationales ne sont que des aberrations politiques et des interruptions du progrès scientifique, « une étape transitoire dans une tradition continue »  [35]. Une codification opérée par un parlement est, en effet, vouée à ralentir l’inexorable marche vers une véritable Europe juridique : « À l’instar de Savigny, nous devons croire en la “croissance organique de la science juridique” plutôt que nous fier aux parlements »  [36]. La doctrine, en « exhumant » et en « révélant » des règles et des principes communs, prétend mettre au jour ni plus ni moins que le Volksgeist européen. C’est le Professorenrecht qui jette un pont entre la sphère politico-juridique et la vie sociale ; c’est lui qui surmonte la contradiction entre une harmonisation « par le haut » et une harmonisation « par le bas » du droit privé. Selon von Bar et Lando, l’européanisation du droit privé « ne peut se réaliser qu’à partir de l’énonciation impartiale de principes dégagés par une recherche minutieuse de droit comparé, la diversité juridique étant alors transcendée grâce à un développement objectif des règles les plus appropriées à un droit privé s’appliquant à l’ensemble de la Communauté. Toute autre méthode serait totalement inappropriée »  [37].

16Il s’agit, à l’évidence, d’un équilibre fragile qui n’est pas totalement nouveau. Le champ doit, d’une part, maintenir son autonomie, d’autre part, bénéficier du soutien politique des institutions communautaires pour garder son dynamisme, conserver le bénéfice des fonds de recherche et ouvrir les portes de la Grand’Chambre de la Cour de Cassation  [38]. Or il est dorénavant évident que le champ aura besoin de s’ouvrir pour maintenir cette vitalité. S’il est en effet ressorti une chose de la procédure de consultation engagée par la Commission, c’est bien que l’Europe n’est pas prête pour le Professorenrecht. Les organisations patronales déplorent que les scientifiques et les experts « perdent de vue les aspects pratiques » du fait de l’absence du monde des affaires dans le processus de codification  [39]. Les associations d’avocats soulignent que les initiatives « devraient être conduites par des praticiens plutôt que par des universitaires »  [40]. Legrand trouve même un surprenant allié dans le grand cabinet juridique de Clifford Chance qui ressent le besoin d’expliquer que les différences entre les droits des contrats des États membres « ne sont pas façonnées en fonction de considérations purement scientifiques mais en fonction de la structure, de la philosophie et du langage de l’ensemble du système juridique des différents pays ». Le Parlement et le Conseil européens en ont pris bonne note et demandent à la Commission d’ouvrir la procédure à de nouveaux acteurs  [41]. Reste à savoir si le champ est en mesure d’admettre de nouveaux entrants, sans perdre son autonomie et sa supériorité épistémologique.

17Pendant des décennies, la construction d’un champ juridique transnational européen a été l’œuvre d’une communauté relativement homogène, d’un groupe cosmopolite de juristes, de fonctionnaires et de juges accrochés à l’idée que le droit, dans son essence, transcende les frontières nationales tant politiques que culturelles. Pendant des décennies, ce groupe a détenu un monopole épistémologique sur la quasi-totalité des questions touchant à l’intégration européenne. L’apparition du débat sur le Code civil européen a ouvert ce champ à un groupe totalement nouveau, composé de comparatistes et de privatistes qui, pour la plupart, s’étaient jusqu’alors tenus à l’écart des questions européennes. Dans le champ du droit privé européen, la sophistication technique est autrement plus valorisée que chez les pragmatiques du droit communautaire. Ses défenseurs s’identifient eux-mêmes comme une élite professionnelle, et en tirent une fierté très supérieure à celle qu’éprouvent les serviteurs traditionnels, relativement modestes, de l’intégration communautaire. Ce champ nourrit de grandioses visions et théories relatives au rôle que doivent jouer le droit et les juristes dans le projet d’intégration européenne, et ce d’autant plus que les privatistes européens situent la qualité transcendante du droit dans leur propre personne. Mais le champ du droit privé européen, à l’instar du champ communautaire où les juristes ont dû s’effacer devant les politiques pour l’élaboration de la Constitution, devra s’ouvrir à des outsiders s’il veut franchir une nouvelle étape dans l’unification juridique et établir un Code civil européen. Aujourd’hui, la construction d’un ordre politique ne relève plus d’une entreprise simplement juridique, et la réussite d’un champ juridique se mesure aussi à l’aune des limites qu’il fixe à son propre combat, et aux critères dont il se dote pour estimer que ses objectifs ont été atteints.

18Traduit de l’anglais par Adeline Patrouiller

Notes

  • [1]
    La traduction littérale de Professorenrecht en français est « droit des Professeurs ». Ce terme revêt un sens particulier dans le contexte allemand où les Professeurs d'université jouent traditionnellement un rôle important dans l'élaboration et la systématisation de la législation.
  • [2]
    Pierre Legrand, « Against a European Civil Code », Modern Law Review, vol. 60,1997, p. 44.
  • [3]
    P. Legrand lui-même décrit son sujet comme « une proposition qui rencontre apparemment une sympathie croissante dans les différents cercles politiques, professionnels et universitaires », ibid.
  • [4]
    Yves Lequette, « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », Le Dalloz, Chroniques, 28,2002, p. 2 202. Voir, également, Y. Lequette, « Vers un Code civil européen », Pouvoirs, 107,2003, p. 97.
  • [5]
    La notion de « champ » est utilisée sans prétention aucune à l’exactitude doctrinale. Cf. Pierre Bourdieu, « La force du droit. Éléments pour une sociologie du champ juridique », Actes de la recherche en sciences sociales, 64,1986, p. 2 et Mikael Madsen, Yves Dezalay, « The Power of the Legal Field : Pierre Bourdieu and the Law », dans Reza Banakar, Max Travers (eds), An introduction to Law and Social Theory, Oxford, Hart Publishing, 2002, p. 189.
  • [6]
    Ole Lando relate cette histoire dans Ole Lando, Hugh Beale (eds), Principles of European Contract Law – Parts I and II, La Hague, Kluwer, 2000, préface. Il convient de noter que l’idée avait déjà circulé dans les hautes sphères de la Commission. Voir, par exemple, Walter Hallstein, « Angleichung des Privat– und Prozessrechts in der Europäischen Wirtschaftsgemeinschaft », Rabels Zeitschrift, vol. 28,1964, p. 211.
  • [7]
    Résolution du Parlement européen sur un effort de rapprochement du droit privé, ( 1989) JO C 158/400. Towards a European Civil Code (Arthur Hartkamp et al. (eds), Dordrecht, Martinus Nijhoff, 1994) fut écrit spécifiquement pour surmonter le défi posé par le Parlement.
  • [8]
    Résolution du Parlement européen sur l’harmonisation de certains secteurs du droit privé des États membres, ( 1994) JO C 205/518.
  • [9]
    Cela inclut Christian von Bar et Ole Lando eux-mêmes mais également, par exemple, Guido Alpa (Rome), Hugh Beale (Commission de droit), Ulrich Drobnig (Hambourg), Roy Goode (Oxford) et Ewoud Hondius (Utrecht). Jacques Ghestin (Paris I) rejoignit seulement le Groupe d’études. Thomas Wilhelmsson, un membre de longue date de la Commission, est, lui, demeuré à l’écart.
  • [10]
    Communication de la Commission européenne sur le droit européen des contrats, COM ( 2001) 398. L’option 1 était la « non-action », dans l’espoir que le marché trouve ses propres solutions. La Commission a mis en ligne certaines contributions à la Communication sur son site internet (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ index_fr. htm ). Voir également, par exemple, Stefan Grundmann, Jules Stuyck (eds), An Academic Green Paper on European Contract Law, Deventer, Kluwer, 2002.
  • [11]
    Résolution du Parlement européen sur le rapprochement du droit civil et commercial des États membres, ( 2002) JO CX 140 E/538.
  • [12]
    Communication de la Commission, « Un droit européen des contrats plus cohérent – Un plan d’action », COM ( 2003) 68, p. 18. Un soutien communautaire à la rédaction du Sixième Programme de Rédaction est explicitement envisagé. Un « Appel à manifestation d’intérêt dans le but de mettre en place un réseau d’experts parties prenantes au Cadre commun de référence » a été publié récemment. Voir ( 1994) JO S 148.
  • [13]
    Pour un récapitulatif relativement ancien, voir Christoph Schmid, « The Emergence of a Transnational Legal Science in European Private Law », Oxford Journal of Legal Studies, vol. 19,1999, p. 673.
  • [14]
    La Zeitschrift für europäisches Privatrecht et la European Review for Private Law ont été lancées respectivement en 1992 et 1993.
  • [15]
    Voir Mauro Bussani, Ugo Mattei, The Common Core of European Private Law, Deventer, KLuwer, 2003. Les résultats de cette entreprise ont été publiés dans Reinhard Zimmermann, Simon Whittaker (eds), Good Faith in European Contract Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2000 ; James Gordley (ed.), The Enforceability of Promises in European Contract Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2001 ; Mauro Bussani, Vernon Valentine Palmer (eds), Pure Economic Loss in Europe, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, et Eva-Maria Kieninger (ed.), Security Rights in Moveable Property in European Private Law, Cambridge, Cambridge University Press, 2004.
  • [16]
    Voir Walter van Gerven, Tort Law – Scope of Protection, Oxford, Hart Publishing, 1998 ; Walter van Gerven, Jeremy Lever, Pierre Larouche, Tort Law, Oxford, Hart Publishing, 2000 ; Hugh Beale, Hein Kötz, Athur Hartkamp, Denis Tallon, Contract Law, Oxford, Hart Publishing, 2002 ; Jack Beatson, Eltjo Schrage, Unjustified Enrichment, Oxford, Hart Publishing, 2003.
  • [17]
    Le très kantien « conflit des facultés », auquel donne lieu l’intégration juridique européenne, forme un thème récurrent dans l’œuvre de C. Joerges. Cf., par exemple, « The Europeanisation of Private Law as a Rationalisation Process and as a Contest of Disciplines – An Analysis of the Directive on Unfair Terms in Consumer Contracts », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 175.
  • [18]
    Pour un exemple de cette assurance nouvellement acquise, voir, notamment, Klaus Peter Berger, « Harmonisation of European Contract Law : The Influence of Comparative Law », International and Comparative Law Quaterly, vol. 50,2001, p. 877 (« Il est aujourd’hui couramment admis que le droit comparé joue un rôle décisif dans l’harmonisation du droit privé européen. »).
  • [19]
    Voir, par exemple, O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », Common Market Law Review, vol. 35,1998, p. 821 à 826 (« Le droit des contrats n’est pas un folklore. Il relève de l’éthique, de l’économie et de la technique. »).
  • [20]
    Pour une tentative de relevé topographique de ce champ, voir Harm Schepel, Rein Wesseling, « The Legal Community : Judges, Lawyers, Officials and Clerks in the Writing of Europe », European Review of Private Law, vol. 12,2004.
  • [21]
    Stephen Weatherill (Oxford) et Christian Joerges (IUE de Florence) font également figure d’importantes exceptions.
  • [22]
    Pour une critique, voir H. Schepel, « The Enforcement of EC Law in Contractual Relations : Case Studies in How Not to “Constitutionalise” Private Law », European Review of Private Law, vol. 12,2004, p. 661-675.
  • [23]
    À cet égard, il est significatif que le dossier de la Commission européenne relatif au droit européen des contrats relève encore de la compétence de la Direction générale « Santé et protection des consommateurs ».
  • [24]
    C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », Columbia Journal of European Law, vol. 8,2002, p. 379-385.
  • [25]
    C. von Bar proteste contre le fait que la Communication de la Commission « soit entièrement tournée vers les exigences économiques du marché commun ; la dimension symbolique d’un droit privé européen uniforme n’est même pas mentionnée », ibid., p. 379-383.
  • [26]
    O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », art. cité. Pour des tentatives plus abouties, voir Jürgen Basedow, « A Common Contract Law for the Common Market », Common Market Law Review, vol. 33,1996, p. 1 169. « Je dépense donc je suis », ironise Y. Lequette dans « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », cité, p. 2 202 à 2 206.
  • [27]
    La nécessité d’un raisonnement convaincant sur le fondement de l’article 95 TCE s’est accrue depuis la décision de la Cour de Justice des Communautés européennes Publicité en faveur des produits du tabac (C-376/98 Allemagne contre Parlement et Commission ( 2000) Rec. I-8419). Voir, par exemple, S. Weatherill, « The Commission’s Options for Developing EC Consumer Protection and Contract Law : Assessing the Constitutional Basis », European Business Law Review, vol. 13,2002, p. 497.
  • [28]
    Christian von Bar, Ole Lando, Stephen Swann, « Communication on European Contract Law : Joint Response of the Commission on European Contract Law and the Study Group on European Civil Code », European Review of Private Law, vol. 10,2002, p. 183,194 et suiv.
  • [29]
    Cette contribution au processus de consultation est, comme toutes les autres, consultable sur le site Internet de la Commission (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ index_en. htm). Mais von Bar ne se démonte pas : « Que la preuve concrète puisse ou non en être apportée, on constate chaque jour que la diversité des systèmes de droit privé entrave le développement du marché intérieur » ( cf. C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », art. cité, p. 379-385).
  • [30]
    Cela ne constitue évidemment pas une nouveauté dans le discours juridique européen. Voir, par exemple, Peter Fitzpatrick, « New Europe and Old Stories : Mythology and Legality in the European Union », dans Peter Fitzpatrick, James Henry Bergeron (eds), Europe’s Other : European Law Between Modernity and Postmodernity, Aldershot, Ashgate, 1998, p. 27.
  • [31]
    Pour une analyse détaillée, voir Hugh Collins, « European Private Law and the Cultural Identity of States », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 353 et « The Voice of the Community in Private Law Discourse », European Law Journal, vol. 3,1997, p. 407.
  • [32]
    C. von Bar, « From Principles to Codification : Prospects for European Private Law », art. cité, p. 379-385.
  • [33]
    O. Lando, « Guest Editorial : European Contract Law after the Year 2000 », art. cité, p. 821-826.
  • [34]
    J. Basedow, « Rechtskultur – zwischen nationalem Mythos und europäischem Ideal », Zeitschrift für europäisches Privatrecht, vol. 3,1996, p. 379.
  • [35]
    R. Zimmermann, « Civil Code and Civil Law : The “Europeanization” of Private Law within the European Community and the Re-emergence of a European Legal Science », Columbia Journal of European Law, vol. 1,1995, p. 63,105.
  • [36]
    Ibid., R. Zimmermann, « Savigny’s Legacy : Legal History, Comparative Law, and the Emergence of a European Legal Science », Law Quarterly Review, vol. 112,1996, p. 576. Van Gerven insiste sur le fait que « l’histoire juridique de l’Europe montre [que] la fabrication d’un droit commun en Europe est autant le travail des juges et des universitaires que celui des législateurs » ; cf. W. van Gerven, « The Case-law of the European Court of Justice and National Courts as a Contribution to the Europeanisation of Private Law », European Review of Private Law, vol. 3,1995, p. 367.
  • [37]
    C. von Bar, O. Lando, S. Swann, « Communication on European Contract Law : Joint Response of the Commission on European Contract Law and the Study Group on European Civil Code », art. cité, p. 183-239.
  • [38]
    Y. Lequette, « Quelques remarques à propos du projet de Code civil européen de M. von Bar », cité, p. 2 202-2 210 (« [L]’autorité scientifique de M. von Bar aurait-elle suffi à lui ouvrir les portes de la Grand’Chambre de la Cour de Cassation ? Il est permis d’en douter. »).
  • [39]
    La citation est tirée de la contribution d’Orgalime (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ 2.1.7.pdf).
  • [40]
    La citation est tirée de la contribution de la Law Society (http ://europa. eu. int/ comm/ consumers/ cons_int/ safe_shop/ fair_bus_pract/ cont_law/ comments/ 4.12.pdf).
  • [41]
    Voir la résolution du Parlement européen relative au Plan d’action ( 2003) JO C 76/96 (demandant à ce que « les usagers du droit tels que les juges, les juristes, les notaires, les entreprises et les consommateurs soient impliqués dans l’élaboration du “Cadre commun de référence” » et remarquant que « la Commission n’a jusqu’ici pas prêté attention à ces groupes ») et la résolution du Conseil relative à « un droit européen des contrats plus cohérent » ( 2003) JO C 246/1 (demandant à la Commission de prendre en compte les « besoins concrets des opérateurs économiques et des consommateurs et les structures et les cultures juridiques existant dans les États membres ».)
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