Notes
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[1]
En témoigne par exemple la tenue à Montréal, en juin 2002, des journées d’étude de l’Association Charles Gide pour l’étude de la pensée économique, sur le thème « John Maynard Keynes : bilan et perspectives ». Textes disponibles sur le site hhttp:// www. philo. uqam. ca/ keynes/ francais/ index. html
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[2]
Voir à ce sujet Dostaler (2002).
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[3]
Voir à ce sujet Beaud et Dostaler ( 1993).
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[4]
Les travaux pionniers à cet égard sont ceux de O’Donnell ( 1989), Carabelli ( 1988) et Fitzgibbons( 1988).
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[5]
Plusieurs articles biographiques ont été consacrés à Keynes, dès le lendemain de sa mort. Celui de son ami et collaborateur Austin Robinson (1947) est le plus remarquable. Celui de Schumpeter ( 1946) mérite aussi d’être lu. Plus récemment, Milo Keynes ( 1975) a dirigé un ouvrage collectif sur la vie et l’œuvre de son oncle.
-
[6]
Le père de Keynes, John Neville, est décédé en 1949 ; sa mère, Florence Ada, en 1958.
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[7]
Les non-conformistes, qui n’acceptaient pas les 39 articles du dogme anglican, furent de ce fait longtemps écartés de certains postes, en particulier à l’Université.
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[8]
Les sœurs Stephen sont mieux connues sous les noms de Vanessa Bell et Virginia Woolf. Les frères, Adrian et Thoby, étudièrent au Trinity College de Cambridge.
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[9]
Il faut noter que O’Donnell ( 1989) est tiré d’une thèse de doctorat soutenue en 1982, dont Skidelsky avait connaissance.
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[10]
Duncan Grant deviendra plus tard le compagnon de Vanessa Bell. Les lecteurs de la biographie de Lytton Strachey par Holroyd ( 1967-1968) connaissaient ce volet de la vie de Keynes.
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[11]
Il faut souligner toutefois à cet égard le travail remarquable de Peter Clarke ( 1988), auquel Skidelsky fait référence.
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[12]
Skidelsky a fait l’acquisition de cette propriété, laissée à l’abandon pendant six ans après le départ de Lydia Keynes dans une maison de santé en 1976, et l’a rénovée. C’est là qu’il a écrit les deux derniers volets de sa biographie.
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[13]
Moggridge a publié une critique assez sévère de la biographie de Skidelsky (Moggridge 2002).
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[14]
Mini ( 1994) relie aussi l’œuvre de Keynes à sa psychologie, à ses angoisses et en particulier à un sentiment de culpabilité qui serait provoqué par ses activités homosexuelles.
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[15]
Nous remercions Marielle Cauchy, Robert Nadeau et un arbitre anonyme pour leur lecture attentive de ce texte et les corrections suggérées. Nous sommes évidemment le seul responsable des défauts du produit final. Nous avons disposé d’une aide financière du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.
ROBERT SKIDELSKY John Maynard Keynes trois volumes, Londres, Macmillan I. Hopes Betrayed : 1883-1920 1983,447 pages. II. The Economist as Saviour : 1921-1937 1992,731 pages. III. Fighting for Britain : 1937-1946 2000,580 pages.
1John Maynard Keynes, né en 1883, mort en 1946, est sans contredit l’économiste le plus célèbre et le plus influent du vingtième siècle. Et son influence est loin
2d’être éteinte. Alors qu’on croyait avoir assisté à ses obsèques dans les années soixante-dix, le keynésianisme semble renaître de ses cendres, et l’œuvre de Keynes fait de nouveau l’objet de débats intenses [1]. Avec Marx, Keynes est le seul économiste à avoir donné son nom à un mouvement de pensée qui participe à la fois d’une conception du monde et d’une vision politique. Il était beaucoup plus qu’un économiste. Il estimait que, dans une société idéale, « le problème économique sera refoulé à la place qui lui revient : l’arrière-plan; et que le champ de bataille de nos cœurs et de nos têtes sera occupé, ou plutôt réoccupé par nos véritables problèmes, ceux de la vie et des relations entre les hommes, ceux des créations de l’esprit, ceux du comportement et de la religion » (Keynes 1971 : 13).
3Keynes n’était pas un économiste professionnel. Il ne disposait d’aucun diplôme en économie, discipline dans laquelle sa formation académique s’était limitée à huit semaines. Ses études universitaires se sont principalement déroulées dans le champ des mathématiques et de la philosophie. Il est intervenu dans plusieurs domaines du savoir, sous diverses formes. Àl’aise dans le long traité, l’essai théorique ou l’article académique, il l’était tout autant dans l’ouvrage de vulgarisation, l’essai biographique, l’article de journal ou le mémorandum. Maître de la langue anglaise, il usait avec autant d’efficacité de la parole que de l’écrit [2]. Penseur, c’était aussi un homme d’action, un « publiciste », comme il se définissait lui-même, un prophète chargé de convaincre ses contemporains de l’urgente nécessité de procéder aux réformes radicales essentielles pour éviter l’écroulement d’une civilisation fragile menacée par la montée des extrémismes, fascisme et bolchevisme.
4Keynes était un homme-orchestre, incapable de ralentir ses activités et ses interventions. Enseignant, il fut tour à tour ou simultanément administrateur universitaire, journaliste, directeur de revue, fonctionnaire, membre de commissions gouvernementales, conseiller d’hommes d’État, militant politique, négociateur international, homme d’affaires, financier, spéculateur, fermier, collectionneur de livres rares et de tableaux, dirigeant d’organismes artistiques. Homme de paradoxes – qu’il cultivait –, il était perçu par les uns comme un dangereux révolutionnaire et par les autres comme un redoutable conservateur. Homme public, il accordait néanmoins la première place à une vie privée riche et intense, qu’il partageait avec ses amis du groupe de Bloomsbury, formé d’intellectuels et d’artistes, fer de lance de l’opposition au victorianisme et de l’entrée de l’Angleterre dans le modernisme. Époux, à partir de 1925, d’une ballerine célèbre, il eut avant cette date de nombreuses liaisons homosexuelles et mettait la réforme sexuelle, avec la paix et avant l’économie, au premier rang du programme du nouveau libéralisme qu’il prônait et qui n’a évidemment rien à voir avec le néolibéralisme contemporain. D’abord incomprises, décriées, combattues, ses propositions de réformes se sont finalement imposées, dans la dernière décennie de sa vie, après la publication en 1936 de sa Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, sous l’appellation de « révolution keynésienne » : après la guerre, tous les gouvernements des pays occidentaux ont reconnu qu’il est de la responsabilité des pouvoirs publics d’assurer un plein emploi que le fonctionnement spontané du marché n’était pas en mesure de garantir. Le keynésianisme, sous des avatars multiples parfois très éloignés de la pensée de l’inspirateur, accompagna trente années de croissance soutenue avant d’être remis en question, à la faveur des difficultés économiques du dernier quart du XXe siècle, par le monétarisme et les autres formes du néolibéralisme [3]. Les livres, monographies et ouvrages collectifs sur Keynes se comptent par centaines et les articles par milliers. Au départ, et pendant plusieurs années, l’essentiel de cette production était consacré à la Théorie générale. Ce livre complexe, difficile et parfois confus, a donné naissance à plusieurs interprétations et continue à susciter des lectures contradictoires. Puis on a commencé à s’intéresser à ses autres écrits, à la genèse et à l’évolution de ses idées. Cet intérêt a été stimulé par la publication en trente volumes, à partir de 1971, des Collected Writings of John Maynard Keynes. Mais seule une partie de l’œuvre économique est contenue dans les 13 500 pages de ce recueil, qui laissent en outre dans l’ombre les écrits philosophiques, les textes de jeunesse, les écrits privés et une énorme correspondance avec plus de quatre mille personnes. Les archives de Keynes, conservées à la bibliothèque de King’s College à Cambridge, sont aussi disponibles sur 170 rouleaux de microfilms. L’exploration de ce matériel a donné naissance, à partir des années quatre-vingt, à une nouvelle littérature qui met l’accent sur les liens entre les aspects philosophique, politique et économique de l’œuvre de Keynes [4].
5Ces matériaux ont aussi servi à la rédaction des biographies de Keynes. On en compte désormais cinq : outre les trois volumes de Skidelsky, celles de Harrod ( 1951), Hession ( 1984), Moggridge ( 1992) et Felix ( 1999) [5]. Seul Marx a suscité une activité biographique comparable. On ne compte, par exemple, qu’une biographie récente d’Adam Smith, de Ricardo, de Walras, de Marshall ou de Hayek. Il est vrai que la vie de plus d’un économiste même célèbre, en comparaison de celle de Keynes, peut sembler un peu terne. La pertinence de la biographie des créateurs, artistiques comme scientifiques, pour éclairer la genèse de leur œuvre est une question qui est loin de faire l’unanimité. En économie en particulier, y compris chez les historiens de la pensée, l’entreprise biographique est souvent considérée comme dénuée d’intérêt en regard de ce qu’on pourrait appeler la genèse interne des idées, et n’aiderait d’aucune manière à comprendre et à évaluer une œuvre scientifique. Cette attitude est très répandue en France, comparativement aux États-Unis, où l’histoire dite contextuelle ou externe est plus largement pratiquée et privilégiée. Ce débat nous semble quelque peu stérile. Les approches internes et externes ne sont pas nécessairement incompatibles. Une œuvre comme celle de Keynes s’inscrit dans une dynamique théorique, mais elle s’éclaire aussi à la lumière de la personnalité et de la vie de son auteur. Par ailleurs, l’histoire de cette vie est essentielle pour comprendre celle du temps dans lequel elle s’inscrit. Bien entendu, un seul homme ne peut faire l’histoire et on pourrait même envisager une révolution keynésienne sans Keynes; mais, en même temps, l’histoire économique, sociale et politique du XXe siècle n’aurait pas eu le même visage sans son œuvre et son action.
6La première biographie de Keynes, celle de Roy Harrod, est une « biographie autorisée ». Né en 1900, Harrod a rencontré Keynes, dont il est devenu l’ami et le collaborateur, dans les années vingt. C’est le frère de Keynes, Geoffrey, qui lui a suggéré d’écrire cet ouvrage, mettant à sa disposition les archives dont il avait hérité. Le livre est demeuré la référence biographique unique pendant plus de trente ans. Sur l’élaboration de l’œuvre de Keynes comme sur son contenu, sur ses activités publiques comme sur le contexte dans lequel elles s’inscrivent, cette biographie, œuvre d’un témoin privilégié, est un document important. Sa thèse sur les « présupposés de Harvey Road », qui orientent au départ la vision sociale de Keynes, a fait date. Keynes est né dans la confortable demeure du 6 Harvey Road, à Cambridge, où ses parents ont vécu jusqu’à leur mort, survenue après celle de leur fils [6]. Les présupposés sont ces valeurs que ses parents lui ont transmises et avec lesquelles il n’a jamais rompu, en dépit de sa remise en cause du victorianisme qui les sous-tend : le sens du devoir et l’éthique du travail, le souci du bien-être collectif, l’idée selon laquelle la société doit être dirigée par une élite bienveillante, la conviction que l’Angleterre est une nation plus éclairée que les autres et que l’empire britannique est un rempart de la civilisation.
7Cela dit, Harrod fait l’impasse sur plusieurs volets de la vie privée de Keynes, en particulier sa vie amoureuse, comme sur son attitude face à la conscription pendant la Première Guerre mondiale, alors qu’il avait demandé le statut d’objecteur de conscience. Il minimise l’importance de ses travaux de jeunesse, en particulier ses incursions dans le domaine de la philosophie, et voit dans le Treatise on Probability, publié en 1921, une parenthèse dans l’évolution de sa pensée, sans lien significatif avec son œuvre économique. Le groupe de Bloomsbury est également sous-estimé. En ce qui concerne la vie privée, il est clair que la pression des proches, parents et amis, comme les sentiments personnels de Harrod lui-même, expliquent sa réserve. Elle n’excuse pas l’étonnante manipulation des sources dont il disposait, en particulier des lettres. Le jeune Keynes qui ressort des pages de Harrod est un boy-scout un peu angélique, et l’homme mûr est une sorte de héros (quoique doté de quelques traits de caractère agaçants : arrogance, prétention, brutalité dans la discussion). Bref, la biographie de Harrod a parfois les allures d’une hagiographie.
8Dans ce contexte, la publication en 1983, un siècle exactement après la naissance de son héros, du premier volume de la biographie de Skidelsky a fait l’effet d’un coup de tonnerre. Historien, diplômé d’Oxford, Robert Skidelsky est professeur d’économie politique à l’Université de Warwick. Il a fondé et dirige la Social Market Foundation, une influente « boîte à idées » ( think tank) anglaise, qui cherche à concilier économie de marché et préoccupations sociales. Il est aussi un homme politique. D’abord membre du parti social-démocrate, il a adhéré en 1992 au parti conservateur. Membre de la chambre des Lords, il y fut porte-parole de son parti pour les questions budgétaires et fiscales. Ses prises de position contre l’intervention des troupes de l’OTAN en Serbie, qu’il qualifie d’« impérialisme éthique », ont provoqué sa mise à l’écart de cette fonction en 1999. Il a finalement quitté en octobre 2001 un parti qu’il juge désormais hystériquement anti-européen et xénophobe. Avant de s’attaquer à Keynes, Skidelsky avait signé des livres sur le gouvernement travailliste pendant la crise de 1929 ( 1967) et sur Oswald Mosley ( 1975). Singulier personnage de l’histoire politique anglaise, Mosley fut, dans les années vingt, un disciple de Keynes et même un précurseur de certaines thèses keynésiennes. Membre du gouvernement travailliste de Ramsay McDonald en 1929, il fonda en 1930 le « New Party » avant de prendre la direction, de 1932 à 1940, de l’Union britannique des fascistes. C’est à l’occasion de ces travaux que Skidelsky a décidé de concentrer ses recherches sur la vie et l’œuvre de Keynes. Il signe en 1970 avec Macmillan, l’éditeur de Keynes, un premier contrat prévoyant la livraison en décembre 1972 d’une biographie de 150000 mots. En fin de compte, c’est trente ans plus tard que la biographie, comprenant trois volumes et un million de mots, sera achevée ! Outre la complexité du personnage, l’abondance des matériaux disponibles, la difficulté d’accès à d’autres documents importants, Skidelsky attribue ce retard et l’inflation du nombre de pages au fait qu’il a dû, chemin faisant, apprendre son économie.
9Le résultat constitue une œuvre importante, dont la lecture est passionnante. Audelà de la vie de Keynes, c’est un tableau remarquable d’une tranche majeure de l’évolution politique, économique, sociale et culturelle de l’Angleterre. C’est donc, avant tout, un travail d’histoire. Cela n’empêche nullement une présentation détaillée de l’évolution de la pensée économique de Keynes. Le tour de force de Skidelsky consiste à donner une présentation chronologique d’une histoire multidimensionnelle, se déployant sur plusieurs plans qui peuvent paraître, au premier regard, totalement dissociés. Outre la coupure entre le Keynes privé, celui de Bloomsbury, et le Keynes public, ce dernier se retrouve en plusieurs lieux très différents : le monde académique de Cambridge, le monde des affaires de la City de Londres, le monde politique de Whitehall, celui du journalisme et plusieurs autres encore. Le lecteur parvient à suivre ces trames diverses et, ce faisant, a l’impression d’entrer un peu dans la vie et les pensées d’un personnage étonnant.
10Le premier volume offre une description détaillée de l’environnement social, intellectuel et familial dans lequel le jeune Keynes fut formé. Cet environnement était marqué par la crise des valeurs victoriennes et celle des valeurs religieuses sur lesquelles les premières prenaient appui. À la suite de John Stuart Mill, Henry Sidgwick et Alfred Marshall cherchaient dans une nouvelle morale laïque une issue à cette crise. Les parents de Keynes, John Neville et Florence Ada, étaient eux-mêmes plongés dans cette tourmente, que compliquait leur appartenance à la tradition religieuse non-conformiste [7]. Son grand-père maternel John Brown était d’ailleurs un célèbre prêcheur non-conformiste. Prêcheur laïque, Keynes se compara parfois à un prophète, tantôt Cassandre, tantôt Jonas devant les murs de Ninive.
11Keynes fut éduqué, sous l’étroite supervision de son père, dans les institutions les plus prestigieuses d’Angleterre, Eton, puis King’s College de Cambridge, où ces problèmes existentiels étaient débattus dans les cours, mais surtout dans de nombreux clubs de discussion que Keynes fréquentait assidûment. Il fut admis en 1903 dans la plus célèbre de ces sociétés, dite des Apôtres, fondée en 1820 et qui a compté dans ses rangs une partie de l’élite intellectuelle de l’Angleterre. Ce sont quelques apôtres et étudiants de Cambridge qui, avec les enfants de l’homme de lettres Leslie Stephen [8], sont à l’origine du groupe de Bloomsbury, qui se forme à partir de 1905 et auquel Keynes sera étroitement lié jusqu’à sa mort. Skidelsky traite assez longuement ce volet capital de sa vie.
12Le philosophe George Edward Moore, apôtre à la personnalité magnétique, publie en 1903 Principia Ethica. En 1938, deux ans après la publication de la Théorie générale, Keynes reviendra sur l’influence majeure que ce livre a eue sur lui, et sur le fait que la « religion » qu’ilya trouvée est toujours demeurée la sienne. L’éthique mooréenne contenait la solution aux tourments de ses aînés, en distinguant « être bon » et « faire le bien ». Indéfinissable, le bien ne peut être perçu que par l’intuition, qui nous apprend qu’il est lié aux bons états d’esprit. Ces derniers découlent eux-mêmes de la contemplation de la beauté, des relations amicales et amoureuses, de la recherche de la vérité. Un questionnement sur la manière d’atteindre le bonheur dans un monde caractérisé par l’incertitude va mener Keynes, à partir d’une lecture critique de Moore, à rédiger une série de textes philosophiques puis une dissertation sur les fondements logiques des probabilités qui lui vaudra un poste de fellow de King’s College en 1909. Constamment remanié pendant près de quinze années, ce travail sera finalement publié en 1921 sous le titre ATreatise on Probability. Skidelsky est le premier à avoir présenté ces travaux philosophiques de Keynes et à avoir insisté sur leur importance, y compris dans la genèse de sa vision économique [9]. Il considère toutefois qu’il n’y a pas vraiment de lien entre l’éthique de Keynes et son économie, la première relevant de son monde privé. Nous croyons au contraire que l’influence de l’éthique est aussi importante que celle de l’épistémologie dans la vision économique de Keynes.
13Bien entendu, ce sont les révélations sur la vie amoureuse de Keynes, en particulier sa liaison avec le peintre Duncan Grant [10], qui soulevèrent les réactions les plus vives à la parution du premier volume de Skidelsky. On a protesté contre cette mise au jour d’événements qui seraient sans pertinence pour comprendre la pensée économique du personnage. D’autres se sont appuyés sur ces révélations pour étayer leur critique d’une théorie économique selon eux erronée, notamment en voyant un lien entre la vie sexuelle de Keynes et sa condamnation de l’épargne. Il est en tout cas impossible de faire l’impasse sur cet aspect des choses. L’exaltation de l’homosexualité, que les apôtres appelaient la « Higher Sodomy », était entre autres une manière de rejeter la morale victorienne. L’éthique mooréenne permettait de la justifier. En même temps, l’illégalité des activités homosexuelles faisait de Keynes un criminel potentiel, menacé de chantage, en marge d’une société dont en même temps l’élite le comptait parmi ses membres. On ne peut certainement pas dissocier cette situation de sa vision de la société et de la politique. Il convient de souligner que Keynes, qui classait ses papiers avec soin, n’a jamais manifesté la volonté de voir détruite sa correspondance avec Strachey, Grant et quelques autres.
14Un autre apport majeur du premier volume est le récit de la métamorphose, pendant la Première Guerre mondiale, de l’universitaire cambridgien en fonctionnaire influent et conseiller des décideurs, sinon décideur lui-même. Skidelsky nous offre un compte rendu fascinant de cette ascension fulgurante, due à une intelligence, une rapidité de réflexion, un sens des réalités pratiques et une capacité de travail hors du commun. Le jeune Keynes devient vite l’architecte principal des relations financières internationales de son pays. Cela n’est pas sans créer des tensions chez un homme déchiré entre ses fonctions au service de l’État, sa nouvelle intimité avec la classe politique et le Premier ministre, et son appartenance à Bloomsbury. Représentant le Trésor britannique à la conférence de Paris de 1919, Keynes démissionne parce qu’il n’accepte pas le montant des réparations imposées à l’Allemagne, qu’il juge susceptible de préparer pour l’Europe des lendemains dangereux. Cette démission, suivie de la rédaction de ce qui est peut-être son meilleur livre, les Conséquences économiques de la paix ( 1919), le réconcilie avec Bloomsbury tout en le rendant célèbre à travers le monde.
15Le second volume décrit une nouvelle métamorphose, qui transforme un esthète en sauveur, un économiste libéral et orthodoxe en auteur d’un livre iconoclaste déclenchant ce que Keynes lui-même appelait, un an avant sa publication, une révolution dans la manière de voir l’économie et ses rapports avec la politique. Dans cette nouvelle perspective, la prégnance de l’incertitude dans laquelle sont prises les décisions joue un rôle capital, ce qui nous renvoie aux réflexions philosophiques du jeune Keynes. Contrairement à Skidelsky, nous croyons toutefois que Keynes avait, dès avant la Première Guerre mondiale, une vision critique de l’orthodoxie libérale. Évidemment, ilya eu un long processus de transformation et de maturation de sa vision économique par ailleurs étroitement lié au contexte historique dans lequel il s’est déroulé, et plus particulièrement aux problèmes concrets auxquels Keynes était confronté. Car il n’était pas d’abord un théoricien préoccupé exclusivement par des questions analytiques. Skidelsky donne ainsi à la révolution keynésienne son épaisseur historique [11], tout en offrant des descriptions du contenu théorique du Treatise on Money et de la Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie.
16Le récit de la genèse de la révolution keynésienne continue à être combiné, de manière très vivante, avec les autres « vies de Keynes », comme Skidelsky les nomme dans son chapitre initial. Les années vingt sont celles de son engagement politique le plus intense à l’intérieur du parti libéral, dans lequel Keynes continue à voir, en dépit des crises à répétition qu’il connaît, le seul vecteur d’une transformation raisonnable de la société. Avec les années trente et l’effondrement du parti, il se tourne de plus en plus vers le travail théorique, tout en occupant plusieurs fonctions dans des organismes gouvernementaux et commissions d’enquête. Sur les plans politique et théorique, sa vie se présente comme une succession de combats, contre l’écrasement économique de l’Allemagne par les réparations, contre le retour à l’étalon-or, contre le chômage, contre l’orthodoxie financière du Trésor britannique et de la Banque d’Angleterre. En même temps, la victoire dans ces divers combats lui paraît soumise à la condition qu’on parvienne à imposer, par la persuasion, la nécessité d’une troisième voie, que Skidelsky préfère appeler une nouvelle voie, au-delà du libéralisme classique, du socialisme marxiste et du fascisme. L’objectif ultime est de créer les fondements d’un monde meilleur dans lequel l’art, la recherche de la vérité, l’amitié et l’amour occuperont la première place. La publication, le 4 février 1936, de la Théorie générale est précédée, le 3, de l’ouverture du Arts Theater de Cambridge, à la création et à la direction duquel Keynes a consacré temps, argent et énergie. L’ordre chronologique reflète celui de ses priorités.
17En même temps qu’il s’enrichit par la spéculation, dont il fournit par ailleurs les meilleures analyses, Keynes cultive une vie privée dans laquelle Bloomsbury occupe toujours la première place. Son mariage en 1925 avec la ballerine russe Lydia Lopokova, tout en créant une stabilité qui favorisera son travail, provoquera toutefois un froid avec les « bloomsberries » qui n’acceptent pas facilement l’arrivée d’intrus dans leur cercle exclusif. Keynes réglera le problème en faisant l’acquisition, dans le voisinage immédiat de Charleston où logent Vanessa Bell et Duncan Grant, de la maison de Tilton, dans laquelle il rédigera désormais tous ses ouvrages majeurs [12]. Il le réglera aussi en se rendant indispensable par l’aide financière qu’il fournit généreusement à ses amis. Ses activités de plus en plus diverses de protecteur des arts, et d’abord d’impresario de sa propre épouse, s’inscrivent dans la vision de cet « économiste singulier » dont Skidelsky propose, dans le chapitre douze, un fascinant portrait psychologique.
18Le troisième volume s’ouvre avec le déclenchement de la révolution keynésienne, et le rôle qu’y joue son initiateur, mais aussi avec la première attaque importante de la maladie qui aura raison de Keynes à l’âge de soixante-deux ans, une endocardite infectieuse. Les premiers symptômes de cette maladie cardiaque s’étaient manifestés au début des années trente, sans être alors identifiés. Il n’existait pas, à l’époque, de véritable traitement. Un médecin hongrois, Janos Plesch, personnage original qui compta Einstein parmi ses patients, prit en charge Keynes à partir de 1939, devint son ami et lui permit sans doute de fonctionner à pleine vapeur et de survivre jusqu’à la fin de la guerre.
19Entre 1937 et 1946 se déroule une nouvelle transformation : celle de l’économiste désormais célèbre en haut personnage de l’État et en négociateur international. Au service du Trésor (mais sans rémunération, afin de préserver sa liberté d’action et de parole), conseiller spécial de trois chanceliers de l’Échiquier et du premier ministre Winston Churchill, Keynes se rend six fois aux États-Unis, le plus souvent pour de longues périodes et parfois à titre de chef de délégation. Ses derniers combats sont pour la construction d’un nouvel ordre économique international et la mise en place de nouvelles institutions et politiques économiques dans son pays, préalables essentiels à l’établissement d’un monde meilleur pour lequel il travaille aussi en présidant le futur Conseil des Arts de Grande-Bretagne. Mais c’est aussi un combat pour le maintien du statut international de l’Angleterre contre les prétentions hégémoniques des États-Unis. Pour Skidelsky, l’action de Keynes était mue essentiellement par son patriotisme britannique, au même titre que celle de Churchill. Les acteurs américains ne sortent d’ailleurs pas grandis du récit parfois manichéen de Skidelsky, pour qui le principal objectif des États-Unis semble être d’affaiblir l’Angleterre. L’interlocuteur de Keynes dans les négociations de Bretton Woods, Harry Dexter White, est présenté, documents à l’appui, comme un agent soviétique qui voulait substituer un condominium soviéto-américain à l’entente angloaméricaine souhaitée par Keynes. Quelle que soit l’interprétation qu’on puisse donner de ces événements, une chose est certaine, c’est que Keynes ne l’a pas emporté dans ces derniers combats, en particulier celui qui a abouti aux accords de Bretton Woods et la négociation du remboursement du prêt-bail accordé par les États-Unis. Il espérait, comme toujours, vaincre par son pouvoir de persuasion. Il avait, comme souvent, sous-estimé le rapport de force politique et économique. Depuis la Première Guerre mondiale déjà, l’Angleterre avait passé le flambeau aux États-Unis et son empire avait commencé à vaciller. C’est donc sur une certaine note d’amertume que se termine l’histoire racontée par Skidelsky. On y voit un Keynes affaibli par la maladie convaincre à contrecœur ses mandants d’autoriser la délégation britannique à signer, en décembre 1945, un accord financier très inférieur à ce qu’il avait estimé pouvoir obtenir puis, de retour chez lui, convaincre la Chambre des Lords d’accepter cette entente et les accords de Bretton Woods.
20On nous y présente aussi un Keynes qui, tout en gardant les idéaux de sa jeunesse, devient de plus en plus conservateur, socialement et politiquement. Déjà dans son deuxième volume, Skidelsky nous montrait comment sa vision économique allait en se radicalisant pendant que sa vision politique accomplissait le chemin inverse. Il insiste souvent sur le fait que ce penseur élitiste n’a jamais adhéré à des idéaux égalitaires ni même à l’idée de justice sociale, qu’il était opposé au socialisme et que finalement il n’a jamais appartenu au camp de la gauche. Les réformes qu’il proposait auraient visé à protéger un libéralisme somme toute assez classique. Cette appréciation est très discutable, tant sur la base même du récit que nous offre Skidelsky que sur celle du corpus des écrits de Keynes. Il est arrivé à ce dernier d’applaudir la révolution russe, d’écrire que le socialisme est la seule voie de l’avenir, de se déclarer à gauche du parti travailliste, pour lequel il a d’ailleurs voté en 1936. Il est en définitive très difficile de situer politiquement un homme qui se plaisait à semer la confusion sur ce plan, et il importe toujours de replacer ses professions de foi dans leur contexte.
21Si l’on peut faire un autre reproche à cette biographie, c’est justement de ne pas présenter clairement et de manière systématique le contexte historique, en particulier les événements politiques, nationaux et internationaux, mais aussi économiques, dans lequel s’inscrit l’action de Keynes. Pour le lecteur non informé, certains événements sont difficilement compréhensibles. Les dramatis personae, par ailleurs très utiles, figurant à la fin de chaque volume, ne sont pas l’instrument idéal pour se situer sur l’échiquier politique anglais. Bien entendu, cela aurait encore grossi un ouvrage déjà très considérable. Skidelsky nous promet une version réduite, en un volume, de sa trilogie. Il n’est pas certain que ce soit là une bonne idée. On voit mal comment le matériel couvert dans ces 1 800 pages pourrait être condensé sans perdre beaucoup d’intérêt et devenir plus difficilement compréhensible.
22Parmi les autres biographies, celle de Moggridge, comprenant près de mille pages, a été publiée la même année que le deuxième volume de Skidelsky. Il est peu probable que cette coïncidence malencontreuse ait été souhaitée tant par les éditeurs que par les auteurs. Moggridge, qui a annoté et publié une importante partie des Collected Writings, avait entrepris ce travail au milieu des années soixante-dix, à la suggestion de Richard Kahn et de Geoffrey Keynes. Une première version était terminée en 1985, qui fut laissée en jachère alors qu’il occupait des fonctions administratives à l’Université de Toronto. Peut-être attendait-il que Skidelsky ait publié la totalité de sa biographie avant de faire paraître la sienne [13]. Les deux œuvres sont de très grande valeur et, bien entendu, se recoupent en plusieurs points, puisqu’elles s’appuient sur les même sources. Le sous-titre qu’a donné Moggridge à la sienne, An Economist’s Biography, marque la différence avec celle de Skidelsky. Moggridge, lui-même économiste, traite plus en détail et en profondeur les contributions économiques de Keynes. Cela dit, comme son concurrent, il aborde les autres facettes de la vie de son personnage, et entre même dans plus de détails que Skidelsky en reproduisant ces étonnants documents dans lesquels Keynes tient une comptabilité complexe et mystérieuse de ses activités sexuelles entre 1901 et 1915.
23Les deux autres biographies de Keynes, celles de Hession et de Felix, sont nettement inférieures à celles de Skidelsky et de Moggridge, et pas seulement parce qu’elles sont beaucoup plus courtes. Celle de Hession, la seule disponible en français, est remplie d’erreurs factuelles et ne donne pas les sources des citations. Elle se présente comme l’illustration d’une thèse pour le moins singulière. Pour Hession, le caractère androgyne de Keynes, hérité de ses parents, serait le moteur de sa créativité. Il en serait de même pour les plus grands créateurs dans l’histoire. Dans sa biographie, Felix présente le contre-pied de la vision habituelle de l’enfance heureuse de Keynes. Sevré d’amour maternel, battu par son père et ses maîtres d’Eton, Keynes se serait vengé sa vie durant de ces humiliations. Plus critique que les autres biographes, Felix essaie d’expliquer comment l’œuvre économique de Keynes, qui serait un tissu d’erreurs et de contradictions, a pu avoir un tel impact [14]. Le grand nombre des biographies de Keynes illustre le fait qu’un livre n’épuise jamais la connaissance d’un être humain, surtout lorsque celui-ci porte, comme c’est le cas, plusieurs masques. On peut l’éclairer sous de nombreux angles. Son action et sa pensée peuvent donner lieu à des appréciations diverses et contradictoires. Mais on ne perce jamais totalement le mystère d’une vie. Freud le rappelait dans une lettre dans laquelle il félicitait Lytton Strachey pour sa biographie de la reine Elizabeth. Cet art de la biographie psychologique dans lequel Strachey est passé maître, son ami Keynes l’a d’ailleurs lui-même pratiqué avec un talent que lui enviait Virginia Woolf [15].
Bibliographie
Bibliographie
- BEAUD (Michel), DOSTALER (Gilles), 1993. La pensée économique depuis Keynes : historique et dictionnaire des principaux auteurs, Paris, Le Seuil (édition abrégée : Pointséconomie, 1996).
- CARABELLI (Anna), 1988. On Keynes’s Method, Londres, Macmillan.
- CLARKE (Peter), 1988. The Keynesian Revolution in the Making, 1924-1936, Oxford, Clarendon Press.
- DOSTALER (Gilles), 2002. « Discours et stratégies de persuasion chez Keynes », Sciences de la société, n° 55, pp. 122-136.
- FELIX (David), 1999. Keynes : A Critical Life, Westport, Greenwood Press.
- FITZGIBBONS (Athol), 1988. Keynes’s Vision : A New Political Economy, Oxford, Clarendon Press.
- HARROD (Roy F.), 1951. The Life of John Maynard Keynes, Londres, Macmillan.
- HESSION (Charles H.), 1984. John Maynard Keynes : A Personal Biography of the Man who Revolutionized Capitalism and the Way we Live, New York, Macmillan (traduction française : Paris, Payot, 1985).
- HOLROYD (Michael), 1967. Lytton Strachey : A Critical Biography, Londres, Heinemann, 2 vol.;
- éd. révisée, Lytton Strachey : The New Biography, New York, Farrar, Straus & Giroux, 1994. KEYNES (John Maynard), 1971. Essais sur la monnaie et l’économie : les cris de Cassandre, Paris, Payot (version française abrégée de Essays in Persuasion, Londres, Macmillan, 1931).
- KEYNES (John Maynard), 1971-1989. The Collected Writings of John Maynard Keynes, Londres, Macmillan, 30 vol.
- KEYNES (Milo) (ed.), 1975. Essays on John Maynard Keynes, Cambridge, Cambridge University Press.
- MINI (Piero V.), 1994. John Maynard Keynes : A Study in the Psychology of Original Work, Basingstoke, Macmillan.
- MOGGRIDGE (Donald), 1992. Maynard Keynes : An Economist’s Biography, Londres, Routledge.
- MOGGRIDGE (Donald), 2002. « “Rescuing Keynes from the economists ?”: The Skidelsky’s trilogy », European Journal of the History of Economic Thought, vol. 9, pp. 111-123.
- O’DONNELL (Rod M.), 1989. Keynes : Philosophy, Economics and Politics. The Philosophical Foundations of Keynes’s Thought and their Influence on his Economics and Politics, Londres, Macmillan.
- ROBINSON (Austin), 1947. « John Maynard Keynes, 1883-1946 », Economic Journal, vol. 57, pp. 1-68. SCHUMPETER (Joseph A.), 1946. « John Maynard Keynes 1883-1946 », American Economic Review, vol. 36, pp. 495-518.
- SKIDELSKY (Robert), 1967. Politicians and the Slump : The Labour Government of 1929-31, Londres, Macmillan.
- SKIDELSKY (Robert), 1975. Oswald Mosley, Londres, Macmillan.
Notes
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[1]
En témoigne par exemple la tenue à Montréal, en juin 2002, des journées d’étude de l’Association Charles Gide pour l’étude de la pensée économique, sur le thème « John Maynard Keynes : bilan et perspectives ». Textes disponibles sur le site hhttp:// www. philo. uqam. ca/ keynes/ francais/ index. html
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[2]
Voir à ce sujet Dostaler (2002).
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[3]
Voir à ce sujet Beaud et Dostaler ( 1993).
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[4]
Les travaux pionniers à cet égard sont ceux de O’Donnell ( 1989), Carabelli ( 1988) et Fitzgibbons( 1988).
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[5]
Plusieurs articles biographiques ont été consacrés à Keynes, dès le lendemain de sa mort. Celui de son ami et collaborateur Austin Robinson (1947) est le plus remarquable. Celui de Schumpeter ( 1946) mérite aussi d’être lu. Plus récemment, Milo Keynes ( 1975) a dirigé un ouvrage collectif sur la vie et l’œuvre de son oncle.
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[6]
Le père de Keynes, John Neville, est décédé en 1949 ; sa mère, Florence Ada, en 1958.
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[7]
Les non-conformistes, qui n’acceptaient pas les 39 articles du dogme anglican, furent de ce fait longtemps écartés de certains postes, en particulier à l’Université.
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[8]
Les sœurs Stephen sont mieux connues sous les noms de Vanessa Bell et Virginia Woolf. Les frères, Adrian et Thoby, étudièrent au Trinity College de Cambridge.
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[9]
Il faut noter que O’Donnell ( 1989) est tiré d’une thèse de doctorat soutenue en 1982, dont Skidelsky avait connaissance.
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[10]
Duncan Grant deviendra plus tard le compagnon de Vanessa Bell. Les lecteurs de la biographie de Lytton Strachey par Holroyd ( 1967-1968) connaissaient ce volet de la vie de Keynes.
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[11]
Il faut souligner toutefois à cet égard le travail remarquable de Peter Clarke ( 1988), auquel Skidelsky fait référence.
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[12]
Skidelsky a fait l’acquisition de cette propriété, laissée à l’abandon pendant six ans après le départ de Lydia Keynes dans une maison de santé en 1976, et l’a rénovée. C’est là qu’il a écrit les deux derniers volets de sa biographie.
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[13]
Moggridge a publié une critique assez sévère de la biographie de Skidelsky (Moggridge 2002).
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[14]
Mini ( 1994) relie aussi l’œuvre de Keynes à sa psychologie, à ses angoisses et en particulier à un sentiment de culpabilité qui serait provoqué par ses activités homosexuelles.
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[15]
Nous remercions Marielle Cauchy, Robert Nadeau et un arbitre anonyme pour leur lecture attentive de ce texte et les corrections suggérées. Nous sommes évidemment le seul responsable des défauts du produit final. Nous avons disposé d’une aide financière du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.