Couverture de CPE_051

Article de revue

Biélorussie 2004

Vers un troisième mandat de Alexandre Loukachenko

Pages 61 à 75

Notes

  • (1)
    Voir le rapport de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe, hhttp :// wwww. venice. coe.int.
  • (2)
    Voir Sovetskaïa Beloroussia, 21 juillet 2004.
  • (3)
    Voir le site internet de la Commission électorale centrale, http :// wwww. rec. gov. by.
  • (4)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 26 octobre 2004.
  • (5)
    Jean-Charles Lallemand, Ioulia Shukan, « Quand “élections” rime avec “répressions”», Perspectives biélorussiennes, Paris, n° 34-35, juin- septembre 2004.
  • (6)
    Voir Sovetskaïa Beloroussia, 18 novembre 2004.
  • (7)
    Il s’agit de Youri Zakharenko, ancien ministre de l’Intérieur (disparu le 7 mai 1999), de Victor Gontchar, ancien vice-président du Parlement de Biélorussie (disparu le 16 septembre 1999), d’Anatoly Krassovski, homme d’affaires (disparu en même temps que V. Gontchar), et de Dmitri Zavadski, caméraman de la chaîne de télévision russe ORT (disparu le 7 juillet 2000).
  • (8)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 2 novembre 2004.
  • (9)
    Pour les conclusions du Conseil Affaires générales et Relations extérieures, voir hhttp :// wwww. diplomatie.gouv.fr/actu ; disponibles fin novembre 2004.
  • (10)
    Pour le texte de Democracy Act, voir http :// wwww. charter97. org/ bel/ news/ 2004/ 10/ 27.
  • (11)
    Voir http :// wwww. charter97. org/ bel/ news/ 2004/ 07/ 30.
  • (12)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 25 février 2004.
  • (13)
    Voir les données du ministère des Statistiques de Biélorussie, disponibles fin novembre 2004 sur le site http :// wwww. president. gov. by/ minstat/ ru/ indicators.
  • (14)
    Voir Belorousski rynok, 6-13 novembre 2004.
  • (15)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 6 décembre 2004.

1En Biélorussie, l’année 2004 a été marquée par la tenue, le 17 octobre, des élections législatives auxquelles s’est ajouté un référendum en vue d’autoriser le président Loukachenko à briguer un troisième mandat, contrairement aux dispositions constitutionnelles. Il était impératif pour le pouvoir de faire élire un Parlement toujours aussi loyal et d’assurer la victoire du « oui » au référendum, ce qui a eu pour effet d’accroître les répressions contre la société civile. Par ailleurs, la tendance du régime à se replier sur lui-même, coupant la Biélorussie et ses habitants de tout contact avec l’Occident, s’est encore accentuée.

Des élections confisquées

2En 2004, le chef de l’Etat biélorussien a eu recours à son instrument favori, le référendum constitutionnel, pour prolonger son pouvoir au-delà des deux mandats prévus par la Constitution, et ce, en infraction à l’article 112 du Code électoral, qui proclame qu’aucune question relative à l’élection du Président ne peut être soumise au vote direct du corps électoral [1]. Cette consultation référendaire était attendue depuis longtemps par les milieux de l’opposition, le Président biélorusse ayant fait, courant 2004, plusieurs déclarations sans ambiguïté dans ce sens. Ainsi, en avril, lors de son allocution annuelle devant le Parlement, Alexandre Loukachenko a assuré qu’il ne se représenterait à l’élection présidentielle que si le peuple biélorussien lui apportait son soutien. De même, lors de la conférence de presse du 20 juillet 2004, devant dresser le bilan des dix ans de sa présidence, le chef de l’Etat a, une fois de plus, réaffirmé qu’il n’examinerait la possibilité de briguer un troisième mandat que si le « peuple en décidait ainsi » [2]. Le 7 septembre, il a enfin annoncé sa décision d’organiser un référendum constitutionnel le même jour que les élections législatives. Les électeurs devaient se prononcer à la fois sur la possibilité pour le Président de briguer un troisième mandat, et sur l’annulation des dispositions constitutionnelles qui limitaient l’exercice du pouvoir présidentiel à deux mandats consécutifs.

3Une campagne agressive dans les médias, puis une habile manipulation des résultats du scrutin ont porté leurs fruits : d’après les chiffres officiels, le « oui » l’a emporté avec 79,42 % des voix contre 9,90 % pour le « non », le taux de participation s’élevant à 90,28 % [3]. Désormais, A. Loukachenko disposera du droit d’exercer autant de mandats présidentiels qu’il le souhaitera, en prétendant accomplir ainsi la « volonté du peuple ».

4Les élections législatives du 17 octobre 2004, appelées à renouveler la Chambre des représentants, ont permis au Président de remporter un nouveau succès électoral. Son souhait de disposer d’un Parlement qui lui soit tout dévoué N° 1047 janvier-février 2005 et d’éviter les écueils de la législature sortante au cours de laquelle s’était formé, au sein du Parlement, un groupe contestataire, Respublika, a ainsi été réalisé. Conformément aux vœux du chef de l’Etat, 108 des 110 sièges ont été pourvus dès le premier tour. Le second ne s’est déroulé que dans une seule circonscription et un nouveau scrutin devra être organisé dans quelques bureaux de vote de la ville de Grodno, où les élections ont été invalidées. Les 46 députés sortants qui avaient fait preuve de loyauté envers le régime ont tous été réélus, tandis que les contestataires, comme les membres de Respublika qui étaient allés jusqu’à organiser, en juin 2004, une grève de la faim de dix-huit jours pour obtenir l’adoption par le Parlement d’amendements au Code électoral, étaient éliminés de la compétition [4]. Il en a été de même pour les candidats des partis d’opposition réunis au sein de la coalition Cinq +, qui n’ont obtenu aucun siège au sein de la nouvelle assemblée.

5Il s’agit du Front populaire, du Parti de l’union civique, du Parti des communistes, du Parti du travail et de la Hromada social-démocrate, auxquels s’ajoutent diverses ONG. Outre la barrière de l’enregistrement par des commissions électorales locales inféodées au régime, nombre d’entraves ont été mises au déroulement de la campagne électorale de ces candidats : censure de certaines parties de leurs interventions à la radio et à la télévision enregistrées à l’avance, refus de mettre à leur disposition des locaux appropriés à la tenue de meetings électoraux, etc. [5]. Le pouvoir a par ailleurs veillé à ce que des organisations pro-présidentielles, telles que la Fédération des syndicats de Biélorussie, qui réunit la plupart des syndicats de branches, et l’Union républicaine de la jeunesse, chargée de l’encadrement politique des jeunes, soient représentées au sein de la nouvelle assemblée, soulignant une fois de plus son aspiration à voir l’Etat se construire selon un modèle corporatiste.

6Au lendemain des deux scrutins, dans la soirée du lundi 18 octobre, quelques milliers de personnes se sont réunies dans la capitale biélorusse pour dénoncer les fraudes électorales. Si, ce jour-là, les forces de l’ordre se sont bornées à encadrer le cortège, le 19 octobre, la répression n’a pas épargné les manifestants pacifiques, les journalistes et les responsables de l’opposition. Après avoir dispersé le rassemblement à coups de matraque, la police a interpellé une quarantaine de personnes, parmi lesquelles les caméramans des chaînes russes NTV et RenTV. Nombre d’opposants arrêtés ce jour-là ont été condamnés à des peines de dix à quinze jours d’emprisonnement. Le leader du Parti de l’union civique, Anatoli Lebedko, a dû même être hospitalisé avec des côtes cassées et un traumatisme crânien, après un passage à tabac.

7La mobilisation protestataire n’a malheureusement duré que quelques jours, mais elle s’est progressivement essoufflée, ne rassemblant parfois que quelques centaines de personnes, principalement des jeunes militants du mouvement Zoubr (Bison). On peut y voir la preuve que l’opposition biélorussienne, en butte aux répressions et dépourvue d’accès aux médias, n’est pas capable de rassembler la population sous ses couleurs.

8Les résultats des élections au Conseil de la République, chambre haute du Parlement, qui se sont tenues entre le 25 octobre et le 13 novembre 2004, n’ont pas non plus échappé à la mainmise des autorités. Les six soviets régionaux et celui de la ville de Minsk, renouvelés en mars 2003 et totalement inféodés au pouvoir officiel, ont ainsi désigné, conformément à la Constitution, chacun huit représentants, les huit sièges restants étant attribués par le président Loukachenko en personne.

Intensification de la répression

9Durant la période préélectorale, le pouvoir s’est crispé sur ses positions, avec pour conséquence un harcèlement accru de tous les acteurs de la société civile critiques à son égard. Alors que le matraquage pour le « oui » à la Biélorussie de A. Loukachenko battait son plein, les chaînes de télévision biélorussiennes multipliant les clips propagandistes, les autorités se sont attaquées à la presse indépendante nationale et locale. Ainsi, la possibilité, dont dispose le ministère de l’Information d’émettre un avertissement à l’encontre d’un journal puis, au bout de deux mises en garde, de décider de sa suspension, a été largement utilisée. Au total, entre août et octobre 2004, douze journaux locaux ont ainsi été fermés de façon temporaire. En outre, les autorités ont multiplié les entraves à la distribution de la presse indépendante, et ce bien avant le coup d’envoi du marathon électoral. Sous l’impulsion du ministère de l’Information dont ils relèvent, les monopoles d’Etat Belpotchta et Belsoiouzpetchat, chargés respectivement de la diffusion des périodiques aux abonnés et de leur vente en kiosques, ont dénoncé de manière unilatérale, début janvier 2004, leurs contrats avec le journal indépendant Belorousskaïa delovaïa gazeta. Son éditeur a donc été contraint de mettre en place son propre réseau de distribution dont les capacités sont beaucoup plus limitées que celles des monopoles d’Etat.

10Les chaînes de télévision russes n’ont pas non plus été épargnées. Cette fois, c’est la chaîne russe RTR, et plus particulièrement son reportage sur la manifestation de l’opposition du 21 juillet, qui a suscité le mécontentement du régime. Ses journalistes, accusés d’avoir fait preuve de partialité et d’avoir gonflé le nombre des participants, ont été privés de leur accréditation. Depuis, les autorités ne cessent de différer l’engagement de négociations sur une éventuelle réouverture du bureau de la RTR à Minsk.

11Les répressions à l’encontre des figures de proue de l’opposition se sont poursuivies en 2004. C’est ainsi que, le 26 avril, Mikhail Marinitch, ancien ambassadeur de Biélorussie en Lettonie, Estonie et Finlande et candidat indépendant à l’élection présidentielle de septembre 2001, a été inculpé de vol de documents classés « secret », de détention illégale d’une arme à feu, d’abus de pouvoir et de détournement à des fins personnelles d’équipements informatiques (en fait des dons de l’ambassade des Etats-Unis en Biélorussie à l’association présidée par l’accusé), et placé sous les verrous. Il sera finalement condamné, fin décembre, à cinq ans de prison, ce qui permet au régime d’éliminer ce concurrent éventuel de la course présidentielle de 2006. Un autre chef d’accusation, celui de la diffamation à l’égard du chef de l’Etat, a également été instrumentalisé par les autorités. C’est parce qu’ils auraient composé et diffusé un poème diffamatoire à l’égard de A. Loukachenko, que le président et le vice-président du comité national de grève, mis en place à l’initiative de petits entrepreneurs indépendants, le plus souvent des commerçants, Valeri Levanevski et Alexandre Vassiliev, ont été condamnés, le 7 septembre 2004, à deux ans de détention.

12En novembre, une enquête a été diligentée à l’encontre du vice-président du Comité Helsinki de Biélorussie, Garry Pogoniajlo, accusé, lui aussi, d’avoir tenu des propos diffamatoires sur le président Loukachenko lors d’une interview accordée à une télévision suédoise. Enfin, l’usage de la violence contre les opposants est toujours fréquent. De retour de Moscou où il s’était rendu pour rencontrer des parlementaires russes, Valéri Vrolov, leader du groupe parlementaire Respublika, a été agressé dans la soirée du 5 juillet, par cinq personnes cagoulées qui l’attendaient à l’entrée de son immeuble, ce qui semble prouver que les voyages en Russie des responsables de l’opposition continuent d’inquiéter les autorités.

13En 2004, l’Université européenne des sciences humaines (UESH) s’est retrouvée dans la ligne de mire des dirigeants biélorussiens. Créé en 1992 et regroupant de nombreux cursus universitaires mixtes, comme la Faculté francobiélorussienne des sciences politiques, cet établissement privé a été jusque-là plus au moins toléré par les autorités.

14Cette situation a radicalement changé fin 2003, quand le ministre de l’Education, A. Radkov, a lancé une première attaque contre cette université qu’il a accusée d’accueillir « trop de professeurs étrangers ». En janvier 2004 le ministre a durci le ton, et a exigé la démission du recteur, le professeur A. Mikhailov. Le refus d’obtempérer de ce dernier n’a fait qu’irriter davantage les autorités. La Direction des affaires présidentielles, en charge de la gestion des locaux, que l’UESH occupait jusque-là, l’a ainsi sommée, le 21 juillet, de quitter les lieux avant quinze jours. En même temps, le ministère de l’Education a dépêché une commission ad hoc censée contrôler le respect par celle-ci des normes prescrites par la licence d’enseignement qui lui avait été accordée en mai, et notamment de l’obligation pour tout établissement universitaire de disposer de locaux adaptés à ses activités. Le 28 juillet, il a décidé de retirer à l’UESH sa licence puisque celle-ci ne pouvait pas justifier de la conformité des locaux dont elle venait d’être privée...

15Cette offensive à l’encontre de l’un des meilleurs établissements privés de Biélorussie s’explique par le fait qu’il bénéficiait de fonds importants en provenance de l’Occident, qui échappaient au contrôle du pouvoir, situation que celui-ci ne semble plus vouloir accepter.

16Par ailleurs, l’UESH a été sanctionnée pour son ouverture sur le monde, celle-ci n’allant certainement pas de pair avec l’idéologie officielle et, moins encore, avec la volonté affichée par le régime de soustraire le pays et ses habitants à toute influence occidentale.

17Le régime biélorussien paraît en effet avoir définitivement opté pour une politique de repli. Ainsi, lors de son intervention du 17 novembre devant le nouveau Parlement, le président Loukachenko a annoncé que la possibilité donnée aux enfants biélorussiens vivant dans les territoires affectés par la catastrophe de Tchernobyl d’effectuer des séjours à l’étranger serait supprimée.

18Selon le chef de l’Etat, même s’ils leur permettaient de passer un certain temps en dehors des zones contaminées, ces séjours étaient loin de leur être bénéfiques, parce qu’ils en revenaient « totalement changés, pervertis par le mode de vie consumériste des pays occidentaux » [6]. La limitation des contacts avec l’étranger, associée à un flot continu de propagande, semble être perçue par le régime de A. Loukachenko comme le meilleur moyen de contrer l’ostracisme dont le frappe la communauté internationale et d’assurer sa pérennité.

Un régime de plus en plus isolé

19L’isolement du régime biélorussien s’est accentué courant 2004. Les autorités ne sont pas parvenues à obtenir de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe que celle-ci revienne sur sa décision du 13 janvier 1997 de suspendre le statut d’invité spécial du Parlement biélorussien, au motif que celui-ci n’avait pas été élu, mais nommé par le Président à la suite du référendum de novembre 1996. En outre, une résolution très ferme concernant les disparitions d’opposants [7] a été adoptée le 28 avril 2004, à partir des conclusions de l’enquête réalisée à Minsk par la Commission des affaires juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire. Cette dernière a réclamé l’ouverture d’une instruction impartiale et indépendante à ce sujet, afin de sanctionner de hauts responsables de l’Etat, tels que le procureur général V. Cheïman (accusé d’avoir lui-même organisé des disparitions alors qu’il occupait les fonctions de Secrétaire d’Etat à la sécurité), le ministre de l’Intérieur, V. Naoumov, et le ministre des Sports et du Tourisme (ancien ministre de l’Intérieur), Iouri Sivakov, ainsi qu’un agent des forces spéciales, D. Pavloutchenko. Dans une deuxième résolution votée également le 28 avril, l’Assemblée parlementaire a dénoncé les persécutions contre la presse indépendante, les pratiques systématiques d’intimidation auxquelles se livrent des agents de l’Etat, notamment ceux du ministère de l’Information, à l’encontre de journalistes, de maisons d’édition, d’imprimeries et de distributeurs de la presse écrite.

20Le 27 septembre 2004, l’Union européenne, suivie par les Etats-Unis la Bulgarie, la Roumanie, la Turquie, la Croatie, l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, la Macédoine, la Serbie, l’Islande, le Lichtenstein et la Norvège ont décidé d’interdire de séjour sur leurs territoires respectifs les quatre personnalités du régime biélorussien soupçonnées d’être impliquées dans les disparitions d’opposants. L’ouverture d’une instruction indépendante a été posée, une fois de plus, comme condition préalable à l’annulation de ces sanctions.

21Les atteintes aux libertés syndicales dont les autorités sont coutumières ont été dénoncées par l’Organisation internationale du travail (OIT). Ayant constaté les multiples ingérences de l’Etat dans les affaires des syndicats, une commission d’enquête de cet organisme a formulé le 8 octobre 2004 une série de recommandations à l’égard du gouvernement biélorussien, dont la mise en application doit être effective au 1er juin 2005 ; faute de quoi il interviendra auprès de Bruxelles pour que soient reconsidérées les préférences tarifaires dont la Biélorussie bénéficie dans ses relations commerciales avec l’Union européenne.

22Les élections législatives et le référendum constitutionnel de 2004 ont présenté pour l’Europe, les Etats-Unis et les organisations internationales une nouvelle occasion de dénoncer la dérive autoritaire du régime biélorussien. Ainsi, le 28 octobre, le Parlement européen, à la suite de l’OSCE, a déclaré que ces élections ne correspondaient pas aux normes internationales et ne pouvaient donc « nullement être qualifiées de libres et équitables » [8].

23Les eurodéputés ont également refusé de reconnaître la légitimité du référendum et donc le droit pour A. Loukachenko de se présenter au scrutin de 2006. Ils ont condamné les brutalités dont ont été victimes ceux qui manifestaient contre les résultats des élections.

24Enfin, ils ont engagé les gouvernements européens à continuer à tenir à l’écart le président Loukachenko et ses suppôts, ainsi qu’à adopter une série de sanctions bien ciblées.

25A cet égard, le Conseil Affaires générales et Relations extérieures de l’Union européenne (UE), qui réunit les ministres des Affaires étrangères des Vingt-cinq, a établi, le 22 novembre 2004, de nouvelles pénalités à l’encontre du régime biélorussien. Désormais, l’UE et les Etats membres ne pourront entrer en relation avec le président Loukachenko et son gouvernement que par « l’intermédiaire de la présidence de l’UE, du Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, de la Commission ou de la troïka » [9]. Les autres contacts, qu’ils soient liés à des rencontres multilatérales ou au règlement de questions transfrontalières, seront limités au minimum. En outre, seront interdits de séjour sur le territoire de l’UE les hauts dignitaires du régime jugés responsables des fraudes électorales et des répressions ayant suivi les scrutins et dont la liste devra être dressée début 2005. Enfin, le Conseil a signifié aux autorités biélorussiennes qu’elles devraient mettre un terme au harcèlement des partis politiques, des médias indépendants, des ONG et les a pressées, en particulier, d’annuler immédiatement la décision de retirer sa licence d’enseignement à l’Université européenne des sciences humaines de Minsk.

26Du côté américain, le président G. W. Bush a promulgué, le 20 octobre 2004, le Belarus Democracy Act, qui stipule, d’une part, l’interdiction de toute aide publique à destination de la Biélorussie (à l’exception de la fourniture, au titre de l’aide humanitaire, de produits pharmaceutiques et alimentaires) et prévoit, d’autre part, une augmentation de l’assistance financière aux ONG œuvrant à la démocratisation du pays, ainsi que la diffusion vers la Biélorussie d’émissions de radio et de télévision [10].

27Cependant, le régime biélorussien semble prêter peu d’attention aux mises en demeure et aux sanctions de l’Occident, multipliant les gestes susceptibles de le heurter. Ainsi, alors que le Conseil de sécurité de l’Onu exigeait du Soudan qu’il mette fin aux violences perpétrées par les milices progouvernementales dans la province du Darfour et menaçait le pays de sanctions internationales, Minsk a accueilli en grande pompe, juillet 2004, le Président soudanais, Omar Hassan Ahmad Al Bashir. Selon nombre d’experts, cette visite, présentée officiellement comme devant permettre d’approfondir la coopération entre les deux pays dans les domaines scientifique, technique et commercial, aurait, en réalité, été organisée par Khartoum dans le but de renforcer sa coopération militaire avec Minsk et de mettre au point de nouveaux contrats d’achat d’armements [11].

28Par ailleurs, des accords de coopération dans les domaines économique, scientifique, sécuritaire, culturel, touristique et éducatif ont été signés entre la Biélorussie et l’Iran, lors de la visite d’Etat du Président iranien, Mohammad Khatami, qui s’est déroulée du 9 au 11 septembre 2004.

Bras de fer avec Gazprom

29En 2004, après plusieurs mois de tensions, le régime biélorussien semble avoir réussi à imposer ses propres conditions à la société russe Gazprom.

30La partie de bras de fer entre Minsk et le groupe gazier remonte à l’automne 2003, à l’époque où le gouvernement russe, au vu du retard pris par la vente partielle à Gazprom de l’entreprise d’Etat gérant les gazoducs, Beltransgaz, et par la constitution d’une société mixte russo-biélorussienne, prévues dès 2002 en échange de tarifs préférentiels sur le gaz, a décrété, à compter du 1er janvier 2004, la suppression de ces derniers. De plus, pour infléchir les positions de son partenaire récalcitrant et le contraindre à accélérer la cession de Beltransgaz, Gazprom a interrompu, à partir de la même date, la totalité de ses livraisons. Le 19 février le groupe russe est allé encore plus loin en stoppant le transit du gaz par la Biélorussie, parce qu’il avait constaté des prélèvements sauvages de gaz.

31Cette décision a provoqué la colère du président Loukachenko qui a accusé les dirigeants russes de commettre un « acte de terrorisme envers le peuple biélorussien », en le laissant sans chauffage pendant l’hiver. Ce à quoi le ministre russe des Affaires étrangères a répliqué que « les erreurs de la politique intérieure et extérieure de la Biélorussie, qui ont eu pour conséquence de freiner le développement socio-économique du pays et d’entraîner son isolement sur la scène internationale, n’étaient imputables qu’au Président biélorussien lui-même » [12].

32A ce conflit se sont ajoutées des dissensions au sujet des prix des livraisons et du transit du gaz. Le gouvernement biélorussien réclamait, en effet, un tarif préférentiel pour le gaz qu’il achetait, et une augmentation des droits de transit en vue de les aligner sur ceux versés à l’Ukraine. Cependant, si Gazprom s’est efforcé de demeurer ferme sur ses positions, il a laissé sa filiale Itera, tout comme d’autres groupes russes dépendants de lui pour l’accès aux gazoducs, livrer à la Biélorussie des quantités suffisantes de gaz, afin de ne pas provoquer de crise économique chez un partenaire aussi proche. Enfin, un nouvel accord a été signé, début juin 2004, quelques jours après la rencontre des présidents V. Poutine et A. Loukachenko, aux termes duquel, Minsk obtenait un tarif préférentiel (46,68 dollars pour 1000m3 de gaz) en échange duquel il renonçait au relèvement des droits de transit.

33Quant à la question du changement de statut de l’entreprise gérant le réseau biélorussien de gazoducs, elle a été provisoirement retirée des négociations, ce qui semble prouver une nouvelle fois, que, tout en prétendant chercher à rationaliser les relations avec la Biélorussie, V. Poutine n’est pas prêt à « lâcher » un partenaire privilégié. En même temps, il est peu probable que Gazprom ait définitivement abandonné l’idée d’obtenir de Minsk le respect de ses engagements.

34Il reste surtout à trouver des moyens efficaces de pression sur le régime de A. Loukachenko, qui continue à refuser l’ouverture des entreprises biélorussiennes au capital russe, afin de se protéger contre l’apparition d’intérêts économiques puissants, susceptibles de menacer son autorité.

35Plus préoccupées par l’issue du marathon électoral présidentiel en Ukraine que par la volonté du chef de l’Etat biélorussien de briguer, en 2006, un troisième mandat présidentiel, les autorités russes ont implicitement cautionné le référendum constitutionnel organisé à l’initiative de A. Loukachenko. En effet, si V. Poutine s’est gardé de prendre position à ce sujet, il n’a cependant pas rejoint les pays occidentaux dans leur condamnation unanime des résultats de ce plébiscite.

36Bien plus, le ministère russe des Affaires étrangères a qualifié de contre-productives les sanctions décidées à l’encontre du régime biélorussien par les pays occidentaux et principalement par les Etats-Unis.

Absence de réformes sur fond de croissance économique

37Comme les années précédentes, la Biélorussie a continué d’afficher une forte croissance économique. Ainsi, la progression du PIB entre janvier et octobre 2004, par rapport à la même période de 2003, a été de 11,1 %, alors que les résultats des dix premiers mois de 2003 par rapport à 2002, avec 6,5 % de hausse, avaient été moins spectaculaires [13]. Une augmentation de la demande extérieure sur certains types de produits biélorussiens (particulièrement sur le marché russe) et une croissance consécutive du volume global des exportations (32,6 % entre janvier et octobre 2004 par rapport à la période correspondante de 2003, contre 23,5 % au cours des dix premiers mois de 2003) ont constitué en 2004, tout comme l’année précédente, le principal facteur d’entraînement du PIB. Les tracteurs, les poids lourds, les engrais et les produits pétrochimiques figuraient toujours parmi les marchandises destinées à l’exportation. En octobre 2004, le gouvernement semblait avoir relativement bien maîtrisé l’inflation :
si, en 2003, la hausse de l’indice des prix à la consommation s’élevait à 28,5 %, elle se chiffrait, au cours des dix premiers mois de 2004, à seulement 10,3 %.

tableau im1
Principaux indicateurs économiques de la Biélorussie en 1996-2003 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 PIB (variation en %) 2,8 11,4 8,4 3,4 5,8 4,7 4,7 6,8(1) Production industrielle (variation en %) 3,5 18,8 12,4 10,3 7,8 5,9 4,5 6,8(1) Production agricole (variation en %) 2,4 - 4,9 - 0,7 - 8,3 9,3 1,8 1,5 6,8(1) Ventes au détail (variation en %) 30,5 17,9 26,1 10,7 11,8 28,2 12,9 9,9 Formation brute de capital fixe (variation en %) - 3,1 21,7 10,1 - 4,0 2,3 - 2,3 6,6 16,8(2) Taux de chômage officiel (en % des actifs, en décembre) 4,0 2,8 2,3 2,0 2,1 2,3 3,0 3,1 Indice des prix à la consommation (moyenne annuelle, %) 52,7 63,9 73,2 293,7 168,9 61,4 42,8 28,5 Solde budgétaire (en % du PIB) - 2,2 - 1,1 - 1,0 - 2,0 - 0,2 - 1,9 - 1,8 - 1,0(1) Exportations de marchandises (en millions de dollars) 5 651,4 7 301,2 7 069,7 5 908,9 7 326,4 7 450,6 8 020,9 9 964,3 - vers la CEI 3 763,6 5 378,9 5 160,2 3 621,6 4 399,2 4 493,7 4 384,4 5 453,4 - vers le reste du monde 1 887,8 1 922,3 1 909,5 2 287,3 2 927,2 2 956,9 3 636,5 4 510,9 Importations de marchandises (en millions de dollars) 6 939,3 8 688,8 8 549,3 6 673,7 8 646,2 8 286,4 9 092,3 11 504,9 - de la CEI 4 570,1 5 817,0 5 554,5 4 288,8 6 070,4 5 796,8 6 295,3 8 006,2 - du reste du monde 2 369,2 2 871,8 2 994,8 2 384,9 2 575,8 2 489,6 2 797 3 498,7 Balance commerciale (en millions de dollars) - 1 287,9 - 1 387,6 - 1 479,6 - 764,8 - 1 319,8 - 835,8 - 1 071,4 1 540,6 Balance des transactions courantes (en % du PIB) - 3,8 - 5,7 - 7,3 - 1,8 - 3,1 - 3,5 - 2,6 - 2,3(2) Dette extérieure brute (en % du PIB) 10 16 22 22 22 20 15 18(3) Investissements directs étrangers nets (en millions de dollars) 105 350 201 443 119 96 453 200(1) (1) Estimation (2) Janvier-septembre (3) Fin septembre. Sources : Commission économique pour l’Europe (Onu), Economic Survey of Europe, 2004, n° 1 et années antérieures ; Berd, Transition Report Update, avril 2004 ; Comité interétatique des statistiques de la CEI.

Commission économique pour l’Europe (Onu), Economic Survey of Europe, 2004, n° 1 et années antérieures ; Berd,

38Le commerce extérieur n’a pas connu de changements majeurs. Selon les données du ministère des Statistiques, entre janvier et août 2004,63 % environ des échanges ont été réalisés au sein de la CEI, dont plus de 90 % avec la Russie [14]. Celle-ci est toujours le principal partenaire commercial de la Biélorussie, se situant loin devant l’Allemagne, la Grande-Bretagne, la Pologne, les Pays-Bas, la Lituanie et la Lettonie. En 2004, la balance commerciale reste déficitaire, le montant du solde s’étant élevé entre janvier et septembre 2004, à environ 1,3 milliard de dollars.

Les relations France-Biélorussie

39Malgré l’importante progression enregistrée en 2003 dans les échanges entre la France et la Biélorussie, le solde commercial est demeuré négatif en défaveur de la France et le déficit s’est même considérablement creusé (il a été multiplié par six).

40Les importations françaises de combustibles et de carburants, qui ont représenté 80 % environ du total, ont connu une très nette augmentation, puisqu’elles sont près de cinq fois supérieures à celles de 2002. Les produits chimiques, articles en caoutchouc ou en plastique, les équipements mécaniques, ainsi que les produits de l’industrie automobile ont constitué en 2003 les principaux postes des exportations françaises à destination de la Biélorussie (respectivement 25,8 %, 18,5 % et 12,3 % du total).

41Avec le retrait par les autorités biélorussiennes de sa licence d’enseignement à l’Université européenne des sciences humaines de Minsk, le 28 juillet 2004, disparaît la Faculté franco-biélorussienne de sciences politiques, qui proposait des cursus universitaires mixtes depuis 1993, sous l’égide du ministère français des Affaires étrangères et en coopération avec les Instituts d’études politiques de Strasbourg, de Grenoble, de Lyon et de Lille.

tableau im2
Les échanges France – Biélorussie, 2001-2003 (millions d’euros) 2001 2002 2003 Exportations (fob) 69,3 75,2 86,3 Importations (cif) 71,0 112,8 318,7 Solde - 1,7 - 37,6 - 232,4 Source : Douanes françaises

Douanes françaises

42A défaut de restructurer les entreprises d’Etat qui pour 40 % d’entre elles, d’après les statistiques officielles, fonctionnent à perte, le gouvernement a continué de subventionner la production industrielle et agricole (par le biais notamment de crédits à taux bonifiés), tout comme les prix des produits et services de première nécessité, creusant par là même le déficit budgétaire. En octobre 2004, celui-ci représentait 1,8 % du PIB, alors que le plafond pour l’ensemble de l’année, fixé initialement à 1,5 %. a été porté, par un décret présidentiel, à 1,8 % au printemps, puis à 2 % à l’automne.

43Alors que 80 % des entreprises sont toujours publiques, les autorités biélorussiennes non seulement affirment ne pas êtes favorables à la privatisation de l’industrie nationale, mais se montrent également prêtes à remettre en cause les privatisations effectuées vers le milieu des années 1990. Ainsi, en 2004, l’entreprise phare du secteur pharmaceutique, Belmedpreparaty, transformée en société par actions en 1994-1995, a été renationalisée. Cette opération a été soigneusement préparée de façon à être la moins coûteuse possible pour l’Etat. Après qu’une enquête du Comité de contrôle d’Etat eut relevé, dix ans après la privatisation, nombre d’irrégularités dans le processus de transformation de Belmedpreparaty en société par actions, le ministère de l’Economie a déposé, en mai 2004, un recours en justice : il demandait que la privatisation de cette entreprise soit frappée de nullité et que les paquets d’actions détenus par les actionnaires privés soient restituées à l’Etat, sans droits à dédommagement. Fin octobre 2004, la justice biélorussienne, inféodée au pouvoir, a donné entière satisfaction à cette requête.

44En 2004, le gouvernement a continué à accréditer l’idée selon laquelle le chômage en Biélorussie était un phénomène marginal : en 2003, selon les données officielles il n’aurait concerné que 3,1 % des actifs. Cependant, on ne peut accorder que peu de crédit à ce type d’informations officielles dans la mesure où nombre de chômeurs ne se font pas enregistrer à la Bourse du travail, en raison de l’extrême modicité des indemnités, préférant chercher un emploi dans l’économie grise. En revanche, il semble que le problème des arriérés de salaires et de retraites, qui s’est posé de manière aiguë en 2003 et a même été l’une des causes de la démission, en juillet, du Premier ministre Guennadi Novitski, ait été résolu : en novembre 2004, ceux-ci ne représentaient plus en effet 0,02 % de la masse salariale totale [15].

45Le Fonds monétaire international a annoncé, le 30 novembre 2004, que son représentant permanent en Biélorussie quitterait le pays en janvier 2005, étant donné l’absence de toute avancée dans la coopération avec Minsk. En effet, le gouvernement biélorussien continue de refuser les réformes économiques préconisées par cette institution et dont la mise en œuvre conditionne l’attribution de ses financements. Rappelons que le dernier crédit stand-by a été accordé à la Biélorussie en 1995.

46Après le succès remporté au référendum, le régime biélorussien semble s’être engagé dans une nouvelle phase de consolidation de son pouvoir, afin que rien ni personne ne vienne perturber la réélection de A. Loukachenko en 2006. Les derniers remaniements au sommet de l’Etat, effectués par le Président à la fin de novembre 2004, viennent confirmer cette hypothèse.

47Ainsi, Victor Cheïman, jusqu’alors procureur général, a été nommé chef de l’administration présidentielle en remplacement de Oural Latypov, qui occupait ce poste depuis octobre 2001.

48Que des fonctions aussi stratégiques aient été confiées à ce serviteur fidèle du régime en dit long sur les « nouvelles » orientations que les autorités entendent donner à leur politique tant intérieure qu’extérieure. En tout cas, l’image de la Biélorussie sur la scène internationale ne s’en trouvera certainement pas redorée. Impliqué dans les disparitions d’opposants et interdit de séjour dans la plupart des pays européens et aux Etats-Unis, V. Cheïman fait figure de repoussoir. Par contre, cet affidé de A. Loukachenko, partisan de la ligne « dure », et qui ne recule devant rien pour parvenir à ses fins, fera sans doute merveille pour permettre au Président de garder le pays sous sa coupe jusqu’en 2006 et même bien au-delà.


Annexe

49Chronologie 2004

508 janvier
Al’occasion du 60e anniversaire de la libération de la Biélorussie de l’occupation nazie, amnistie de 3 880 prisonniers et allègement des peines de 14 000 autres condamnés ; en fait, cette mesure vise à désengorger les prisons.

519 janvier
La poste biélorusse dénonce de façon unilatérale le contrat portant sur la distribution aux abonnés du journal Bielorousskaïa delovaïa gazeta ; celle-ci avait déjà été suspendue pendant trois mois en 2003.

5227 janvier
La commission des affaires juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe adopte un rapport sur la disparition d’opposants en Biélorussie et recommande à l’Assemblée de maintenir la suspension du statut d’invité spécial du Parlement biélorussien, décidée en 1997.

5310 février
Entretiens à Moscou entre le Premier ministre russe, M. Kassianov, et son homologue biélorussien, S. Sidorski. Les parties ne parviennent à aucun accord sur l’introduction du rouble russe comme monnaie commune de l’Union de la Russie et de la Biélorussie et sur la reprise des approvisionnements en gaz, suspendus le 1er janvier en raison du non-respect par Minsk de ses engagements envers la compagnie russe Gazprom.

5423 février
Décret présidentiel rendant les chefs d’entreprise responsables de la formation idéologique de leurs salariés.

5511 mars
La Cour constitutionnelle de Biélorussie prend position en faveur de l’abolition de la peine capitale.

5614 avril
Dans son adresse au Parlement, le président Loukachenko félicite le gouvernement pour les résultats obtenus dans le domaine économique au cours du premier trimestre et se déclare prêt à déléguer certaines compétences à l’institution qui sera chargée de la gestion de l’Espace économique commun (Russie, Biélorussie, Ukraine, Kazakhstan). Il promet également que les élections législatives de l’automne se dérouleront de façon « démocratique ».

5715 avril
La commission des droits de l’homme des Nations unies vote une résolution condamnant les violations des droits de l’homme en Biélorussie.

5828 avril
L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe adopte une résolution : appelant ses membres à exercer le « maximum de pressions », y compris des sanctions, sur le gouvernement biélorussien tant qu’il ne procédera pas à une enquête crédible sur les disparitions de membres de l’opposition ; condamnant les persécutions perpétrées contre les médias indépendants.

593-21 juin
Grève de la faim de trois députés pour protester contre le refus du Parlement d’examiner leurs propositions d’amendements à la loi électorale. Le 22, la loi est votée sans que ces dernières aient été prises en compte.

605 juin
Entretiens, à Sotchi, entre les présidents Poutine et Loukachenko. Les parties doutent qu’il soit possible d’introduire une monnaie commune d’ici à 2005, mais considèrent que le problème de la fourniture de gaz naturel « est quasiment résolu ».

6110 juin
Lors d’un séminaire gouvernemental, le président Loukachenko déclare que les technologies de pointe œuvreront davantage à l’augmentation de la production que les investissements étrangers qui, selon lui, resteront peu importants. Le lendemain, il demande au gouvernement d’étudier la possibilité de créer une Silicon Valley à la biélorusse.

6215 juin
? Décret présidentiel sur la privatisation des exploitations agricoles collectives : les acquéreurs doivent s’engager à maintenir leur spécialisation et leur personnel et à régler leurs dettes.
? Le président du Conseil de l’intelligentsia biélorusse annonce la création d’un Mouvement pour des élections loyales.

6330 juin
La Chambre des représentants vote : 1) les amendements à la loi sur a) les ONG, qui pourront être fermées de façon temporaire ou définitive si elles ne respectent pas les dispositions relatives aux soutiens apportés par l’étranger et aux manifestations sur la voie publique ; b) les partis politiques, dont les membres ne pourront pas appartenir à un autre parti et qui n’auront pas le droit de recevoir des aides de l’étranger ; de plus, pour être enregistré, un parti doit être représenté dans quatre des six régions du pays ainsi qu’à Minsk. 2) la loi étendant les prérogatives du KGB.

648 juillet
La délégation biélorusse à l’Assemblée parlementaire de l’OSCE signe une déclaration conjointe avec le groupe de travail sur la Biélorussie de cette organisation par laquelle elle s’engage à faire respecter les critères démocratiques lors des scrutins d’octobre.

6512 juillet
Zianon Pazniak, président du Parti chrétien conservateur, lance un appel au boycottage des élections d’octobre, position qualifiée d’« impasse » par d’autres formations d’opposition, notamment la coalition Cinq +.

6621 juillet
Manifestation à Minsk, qui réunit quelque 4 000 personnes, pour protester contre les dix années passées au pouvoir par A. Loukachenko.

6728 juillet
Le ministre de l’Education nationale retire sa licence à l’Université européenne des sciences humaines au prétexte qu’elle n’a pas de locaux conformes aux normes pour dispenser ses enseignements ; cette décision est confirmée le 23 août par la Cour suprême.

686 août
Les autorités grecques, soutenues par les vingt-quatre autres membres de l’UE, interdisent au ministre biélorussien des Sports, Iouri Sivakov, d’assister aux Jeux olympiques d’Athènes, au motif qu’il serait impliqué dans la disparition de trois hommes politiques et d’un journaliste.

6917 août
Décret présidentiel fixant les élections au Conseil de la République, entre le 18 août et le 18 novembre ; ses 64 sièges sont pourvus par les six régions, la ville de Minsk et le Président qui y envoient chacun huit représentants.

703 septembre
Décret présidentiel autorisant les partis à envoyer des délégués auprès de la Commission électorale centrale, mais sans voix délibérative.

7127 septembre
L’UE interdit l’accès de son territoire à quatre officiels biélorusses impliqués dans les disparitions, entre 1990 et 2000, de trois opposants et d’un journaliste. Les Etats-Unis, puis d’autres pays encore prennent le même engagement. Le 28, Minsk menace l’UE et les Etats-Unis de représailles.

727 octobre
Inauguration, par le président Loukachenko, d’un mémorial à Félix Dzerjinski (fondateur de la Tchéka), en présence des chefs des services de sécurité de la CEI.

7317 octobre
1) Référendum constitutionnel autorisant le Président sortant, A. Loukachenko, à solliciter un troisième mandat en 2006. Participation : 90,28 % ; « oui » : 79,4 % des inscrits ; « non »: 9,9 %. 2) Elections législatives destinées à renouveler les 110 sièges de la Chambre des représentants : selon la Commission électorale centrale, sur les 108 sièges pourvus, l’opposition n’en recueille aucun. Celle-ci et nombre d’ONG dénoncent des fraudes massives. Le 19, la police arrête une quarantaine de manifestants qui protestent contre les résultats officiels.

7420 octobre Promulgation par le président G. W. Bush du Belarus Democracy Act qui interdit aux agences gouvernementales américaines d’investir en Biélorussie ou de lui accorder des crédits (sauf pour des raisons humanitaires) et prévoit une augmentation du soutien financier aux ONG et aux médias indépendants.

7522 octobre Vote par la Douma d’Etat de la Fédération de Russie d’une résolution affirmant que les élections législatives et le référendum constitutionnel en Biélorussie ont été des scrutins « libres, ouverts, démocratiques et loyaux ».

7627 octobre Les formations de la coalition Cinq + décident de lancer une campagne d’information sur les deux scrutins du 17 octobre.

7728 octobre Le Parlement européen, considérant que les scrutins du 17 octobre n’ont été ni libres, ni loyaux, adopte une résolution qui demande à la Commission européenne et aux membres de l’UE de « renforcer leur politique d’isolement à l’égard du président Loukachenko et de son régime », tant qu’ils ne respecteront pas les valeurs démocratiques.

7822 novembre Le Parti social-démocrate, le Parti de l’union civique, le Front populaire, le Parti des femmes « Espoir », le Parti des communistes, etc.

79concluent un accord en vue de l’élection présidentielle de 2006, aux termes duquel ils s’engagent à faire de la Biélorussie « un Etat indépendant, fondé sur les valeurs démocratiques européennes ».

808 décembre Le président de la Fédération des syndicats de Biélorussie accuse les syndicats indépendants de « faire de la politique et de vouloir renverser le gouvernement et le Président ».

81Principales formations politiques Partis pro-Loukachenko :

  • Parti communiste (issu d’une scission de 1996 du Parti des communistes)
  • Parti libéral-démocrate
  • Parti agrarien

82 Partis de l’opposition :

83

  • Front populaire
  • Parti de l’union civique
  • Parti des communistes
  • Parti du travail
  • Hromada social-démocrate
  • Parti des femmes « Espoir »

Résultats des dernières élections

84? Elections législatives (17 octobre 2004)
Le Parlement est bicaméral, les deux chambres de la législature biélorussienne ont été renouvelées en octobre-novembre 2004. Les élections à l’Assemblée nationale, chambre basse du Parlement, ont eu lieu le 17 octobre. Selon la Commission électorale centrale (CEC), le taux de participation s’est élevé à 90,14 %. 98 % des sièges ont été pourvus dès le premier tour. Le deuxième tour des élections n’a eu lieu (le 27 octobre) que dans une circonscription (sur 110) et un nouveau scrutin devra être organisé ultérieurement dans une circonscription de la ville de Grodno, où les résultats des élections ont été invalidées par la CEC. Conformément aux vœux du président A. Loukachenko, les femmes représentent 30 % des nouveaux élus. Par contre, aucun représentant de l’opposition ne siègera à l’Assemblée nationale. Les élections au Conseil de la République, chambre haute du Parlement, se sont tenues entre le 25 octobre et le 13 novembre. 56 sièges de sénateurs ont ainsi été pourvus au scrutin indirect, les six soviets régionaux et le soviet de la ville de Minsk, d’une part, et le président Loukachenko, de l’autre, ayant désigné, en application de la Constitution biélorussienne, huit représentants au Conseil.

85? Référendum d’initiative présidentielle (17 octobre 2004)
D’après la Commission électorale centrale, le taux de participation au référendum s’est élevé à 90,28 % des inscrits. Le « oui » au troisième mandat présidentiel de A. Loukachenko et à la suppression de la limitation par la Constitution du pouvoir présidentiel à deux mandats consécutifs l’a emporté avec 79,42 %, contre 9,90 % pour le « non ». A. Loukachenko avait été élu pour un deuxième mandat en 2001.

Composition du gouvernement en novembre 2004

86

  • Premier ministre : Sergueï Sidorski
  • Premier vice-Premier ministre : Vladimir Semachko
  • Vice-Premiers ministres : Ivan Bambiza, Vassili Gapeev, Vassili Dolgolev, Vladimir Drajine, Andreï Kobiakov
  • Ministres :
    • Affaires étrangères : Sergueï Martynov
    • Défense : Léonid Maltsev
    • Economie : Nikolaï Zaïchenko
    • Intérieur : Vladimir Naoumov
    • Finances : Nikolaï Korbut
    • Energie : Edouard Tovpenets
    • Information : Vladimir Rousakevitch
    • Santé : Ludmila Postoyalko
    • Education : Alexandre Radkov

Sélection bibliographique

  • Chaplygin (Vladimir), « Russian and Belarus Monetary Union : Phantom or Reality ?», Intereconomics, vol. 39, n° 1,2004, pp. 29-35.
  • Deyermond (Ruth), « The State of the Union : Military Success, Economic and Political Failure in the Russia-Belarus Union », Europe-Asia Studies, vol. 56, n° 8, décembre 2004, pp. 1191-1206.
  • Fonds monétaire international, Republic of Belarus. Report on the Observance of Standards and Codes Fiscal Transparency Module, novembre 2004,21 p.
  • Goujon (Alexandra), «2003 en Biélorussie : travail idéologique et dissolution des associations », synthèse n° 122, La Lettre de la Fondation Robert Schuman, février 2004.
  • Goujon (Alexandra), « Les nouveaux voisins de l’Union européenne : stratégies identitaires et politiques en Ukraine, Biélorussie et Moldavie », Les études du CERI, n° 109,2004, pp. 1-41.
  • Human Rights Center « Viasna », Chronicle of the Human Rights Violations in Belarus in 2003, Minsk, 2004,236 p.
  • Ioffé (Grigory), « Understanding Belarus : Questions of Language », Europe-Asia Studies, vol. 55, n° 7, novembre 2003, pp. 1009-1048.
  • Mandel (David), Labour after Communism : Auto Workers and their Unions in Belarus, Ukraine and Russia, Black Rose Books, Montréal, New York, 2004,283 p.
  • Matsuzato (Kimitaka), « Belarus : a Populist Island in an Ocean of Clan Politics. The Lukashenka Regime as an Exception Among CIS », Europe-Asia Studies, vol. 65, n° 2,2004, pp. 235-262.
  • Robinson (Neil), Reforging the Weakest Link : Global Political Economy and Post-Soviet Change in Belarus, Ukraine and Russia, Aldershot, Hants, England, 2004, 165 p.
  • Shukan (Ioulia), « Biélorussie. Consolidation du régime : pas de répit », in La Russie et les autres pays de la CEI en 2003, Le courrier des pays de l’Est, n° 1041, janvier-février 2004, pp. 63-77.
  • The Economist Intelligence Unit, « Belarus », Country Report (trimestriel), Country Profile (annuel).

Notes

  • (1)
    Voir le rapport de la Commission de Venise du Conseil de l’Europe, hhttp :// wwww. venice. coe.int.
  • (2)
    Voir Sovetskaïa Beloroussia, 21 juillet 2004.
  • (3)
    Voir le site internet de la Commission électorale centrale, http :// wwww. rec. gov. by.
  • (4)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 26 octobre 2004.
  • (5)
    Jean-Charles Lallemand, Ioulia Shukan, « Quand “élections” rime avec “répressions”», Perspectives biélorussiennes, Paris, n° 34-35, juin- septembre 2004.
  • (6)
    Voir Sovetskaïa Beloroussia, 18 novembre 2004.
  • (7)
    Il s’agit de Youri Zakharenko, ancien ministre de l’Intérieur (disparu le 7 mai 1999), de Victor Gontchar, ancien vice-président du Parlement de Biélorussie (disparu le 16 septembre 1999), d’Anatoly Krassovski, homme d’affaires (disparu en même temps que V. Gontchar), et de Dmitri Zavadski, caméraman de la chaîne de télévision russe ORT (disparu le 7 juillet 2000).
  • (8)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 2 novembre 2004.
  • (9)
    Pour les conclusions du Conseil Affaires générales et Relations extérieures, voir hhttp :// wwww. diplomatie.gouv.fr/actu ; disponibles fin novembre 2004.
  • (10)
    Pour le texte de Democracy Act, voir http :// wwww. charter97. org/ bel/ news/ 2004/ 10/ 27.
  • (11)
    Voir http :// wwww. charter97. org/ bel/ news/ 2004/ 07/ 30.
  • (12)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 25 février 2004.
  • (13)
    Voir les données du ministère des Statistiques de Biélorussie, disponibles fin novembre 2004 sur le site http :// wwww. president. gov. by/ minstat/ ru/ indicators.
  • (14)
    Voir Belorousski rynok, 6-13 novembre 2004.
  • (15)
    Voir Belorousskaïa delovaïa gazeta, 6 décembre 2004.

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