Notes
- (1)Les informations données dans cet article sont tirées de l’ouvrage de S. Peyrouse, Des chrétiens entre athéisme et islam : regards sur la question religieuse en Asie centrale soviétique et post-soviétique, préface de Patrick Michel, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004, 406 p., de données écrites et orales collectées sur place entre septembre 2002 et août 2004, ainsi que de rapports rédigés par des organisations de défense des droits de l’homme et religieux; on citera à ce titre tout particulièrement ceux écrits par Igor Rotar et Félix Corley sur le site www. forum18. org
- (2)Pour des chiffres sur les minorités nationales, consulter : Kratkie itogi perepisi naselenia 1999 goda v respublike Kazakhstana, Agentstvo respubliki Kazakhstana po statistike, Almaty, 1999 ; N. E. Masanov, Z. B. Abylhojin, I. V. Erofeeva, A. N. Alekseenko, G. S. Baratova, Istoria Kazakhstana, narody i kultury (Almaty, Dajk-press, 2001 ; Etnitcheskij atlas Ouzbekistana, Fond Sodejstvia Ouzbekistana, 2002 ; C. Poujol, Dictionnaire de l’Asie centrale, Ellipses, Paris, 2001 ; P. Kolstoe, Russians in the Former Soviet Republics, Hurst & Company, Londres, 1995.
- (3)Article 58 de la Constitution kazakhe, article 8 de la Constitution kirghize, article 8 de la Constitution tadjike, article 11 de la Constitution turkmène, article 61 de la Constitution ouzbèke.
- (4)Les réactions à l’encontre du prosélytisme et, de manière plus générale, des mouvements protestants, font l’objet d’articles dans les journaux orthodoxes locaux, Slovo Jizni en Ouzbékistan, Vedi et Svet Pravoslavia au Kazakhstan.
- (5)I. Rotar, « Kazakhstan : is Religion Extremism ?», 27 juillet 2004, Forum 18 News, www. forum18. org
- (6)Narodnoe Slovo, 15 mai 1998.
- (7)I. Rotar, « Uzbekistan : Justice Department Tries to Limit Churches and Mosquees Number », 18 mars 2004, Forum 18 News, op. cit.
- (8)I. Rotar, « Uzbekistan. Religious Freedom Survey July 2003 », Forum 18 News, op. cit.
- (9)Seule une église orthodoxe devrait être prochainement construite dans cette région. Information recueillie au Centre culturel russe à Noukous, mai 2004.
- (10)I. Rotar, « Turkmenistan : State Interference with Islamic Religious Life in the North East », 4 mars 2004, Forum 18 News, op. cit.
- (11)Pour plus de détails, cf. S. Peyrouse, Des chrétiens entre athéisme et islam, op cit., pp. 232-235.
- (12)Le mouvement le plus « politisé » est en fait l’Eglise orthodoxe, qui maintient une longue tradition de coopération avec le pouvoir politique. Elle a, dans cette logique, refusé de soutenir la moindre action ou contestation politique comme l’auraient par exemple souhaité les cosaques au Kazakhstan. Voir M. Laruelle, S. Peyrouse, Les Russes du Kazakhstan. Identités nationales et nouveaux Etats dans l’espace post-soviétique, préface de Catherine Poujol, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004,354 p.
- (13)Sur le contrôle de l’islam en Ouzbékistan, voir par exemple B. Babadjanov, « Islam officiel contre islam politique en Ouzbékistan aujourd’hui : la Direction des Musulmans et les groupes non-hanafî », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. 31, n° 3,2000, pp. 151-164.
- (14)Cet attentat apparaît aujourd’hui avoir été fomenté par le Président lui-même, afin d’organiser de vastes purges au sein de l’appareil gouvernemental et administratif.
- (15)S. Peyrouse, « La gestion du fait religieux en Asie centrale : poursuite du cadre conceptuel soviétique et renouveau factice », Cahiers d’Asie centrale, n°13-14, à paraître en décembre 2004.
- (16)Voir F. Guérin, « Tadjikistan. Menaces sur la réconciliation nationale », Le courrier des pays de l’Est, janvier-février 2004, n° 1041, pp. 180-193.
1Les cinq Etats d’Asie centrale, bien que de population majoritairement musulmane, comptent aujourd’hui encore de nombreuses minorités européennes de tradition chrétienne [1].
2Russes, Ukrainiens, Biélorusses, Polonais et Allemands ont certes commencé à quitter cette région progressivement au début des années 1970, puis plus massivement après 1985 à l’occasion de la perestroïka ainsi qu’avec le démantèlement de l’URSS en 1991.
3Néanmoins, les Russes sont aujourd’hui encore plusieurs millions en Asie centrale, essentiellement au Kazakhstan, et sont également présents dans les quatre autres pays (Kirghizstan, Turkménistan, Ouzbékistan, Tadjikistan).
4Selon le recensement de 1999, les Allemands étaient 353 000 au Kazakhstan (près d’un million en 1989) et 21 000 au Kirghizstan, leur communauté étant beaucoup plus réduite dans les autres Etats [2]. D’autres nationalités sont également représentées dans des proportions plus modestes : Coréens, Grecs, Arméniens, ainsi que quelques Tatars chrétiens. Ces populations confèrent au christianisme d’Asie centrale toute sa diversité puisque, outre l’Eglise russe orthodoxe et quelques groupuscules de Vieuxcroyants, toutes les principales confessions chrétiennes sont représentées, de l’Eglise catholique aux courants protestants (Eglises luthérienne, baptiste, adventiste du septième jour, mennonite, pentecôtiste, presbytérienne, témoins de Jéhovah). La plupart de ces confessions sont apparues dans la région lors de sa colonisation par la Russie au XIXe siècle. Elles ont par la suite, comme ailleurs, essuyé les pressions et répressions du régime soviétique athéiste. La perestroïka leur a offert, au terme des années 1980, une liberté jusque-là inconnue, symbolisée par la construction ou la restauration, dans tous les Etats d’Asie centrale, de milliers de mosquées, ainsi que de centaines d’églises. La pratique religieuse a recouvré alors une visibilité en partie disparue durant des décennies.
Le nouveau contexte de l’indépendance
5Au lendemain de l’indépendance, chaque chef d’Etat a cherché à se départir de sa réputation d’apparatchik soviétique en donnant à la population et au monde extérieur une nouvelle image de la religion. Désormais, selon la Constitution et la législation, l’athéisme d’Etat est aboli, chacun peut pratiquer la religion de son choix et tout individu est égal devant la loi quelle que soit son appartenance confessionnelle. La séparation de l’Etat et de la religion est spécifiée dans chaque Constitution [3]. La prédominance numérique et symbolique de l’islam n’implique officiellement aucune discrimination à l’égard des autres religions présentes, celui-ci ne revêtant aucun caractère officiel.
6Dans ce nouveau contexte, chaque confession chrétienne tente d’asseoir sa présence et d’affirmer sa légitimité non seulement face aux autorités politiques, à la population et aux institutions musulmanes, mais également face à une diversité confessionnelle chrétienne croissante. Pourtant, l’émigration des populations européennes compromet considérablement le développement du christianisme dans la région. Nombre de confessions tentent dès lors de maintenir leur présence en recourant au prosélytisme parmi les populations éponymes de tradition musulmane, pratiquantes ou non. Les Eglises protestantes et, dans une moindre mesure, l’Eglise catholique, parviennent ainsi à convertir un certain nombre d’autochtones et à constituer des groupes de fidèles composés d’une majorité (ou parfois uniquement) de Kazakhs, de Kirghizes, d’Ouzbeks, etc.
7Certaines bénéficient de l’aide de mouvements missionnaires venus d’Occident ou sont concurrencées par d’autres courants qui installent dans la région de nouvelles tendances du christianisme (méthodistes, presbytériens et charismatiques).
8Ce prosélytisme n’est pas sans susciter des réactions, en particulier au sein de l’Eglise orthodoxe qui se refuse à une telle pratique [4], mais également de la part de la hiérarchie musulmane des Directions spirituelles. Ces deux institutions insistent sur le respect du principe de stricte séparation entre nationalités éponymes musulmanes et populations européennes chrétiennes.
9L’Eglise orthodoxe s’est d’autant plus figée sur cette position qu’elle se considère comme l’une des principales victimes des mouvements protestants, qui auraient, selon elle, attiré nombre de ses fidèles. Certains musulmans, notamment des oulémas (théologiens), ont également manifesté leur mécontentement à l’égard du prosélytisme chrétien, acceptant mal de voir se multiplier les cas de reniement de l’islam. Ces tensions ont conduit à un accord entre les hiérarchies musulmane et orthodoxe : toutes deux se refusent à faire du prosélytisme parmi les nationalités appartenant par tradition à l’autre religion et font pression sur les autorités politiques de manière à ce que la liberté religieuse soit plus strictement encadrée, allant parfois jusqu’à demander l’expulsion des mouvements dits étrangers.
10Si les autorités politiques ont répondu à ces appels de manière différente selon les pays, toutes cependant gardent un œil attentif sur le développement du phénomène religieux. Ont ainsi été renouvelées ou maintenues nombre de structures ou de procédures de contrôle qui existaient sous le régime soviétique, comme les Comités aux affaires religieuses ou l’enregistrement des communautés : cette procédure implique pour chaque groupe constitué de déposer ses statuts et de fournir des renseignements de tous ordres. La situation des chrétiens et, de manière plus large, la place de la religion restent cependant très sensiblement différentes selon les pays.
? Kazakhstan, Kirghizstan et Tadjikistan : vers une remise en cause de la liberté confessionnelle ?
11Si le Kazakhstan a conservé certaines des structures soviétiques, en particulier le Comité aux affaires religieuses, il n’en accorde pas moins une grande liberté aux religions en général et au christianisme en particulier. Cette situation a été favorisée par la présence d’importantes minorités européennes, ce qui a conduit les autorités à ne pas s’opposer aux cultes dits étrangers que sont les confessions d’obédience protestante et à signer un concordat avec le Vatican dès 1998. L’enregistrement des communautés religieuses, bien que recommandé, n’est pas obligatoire. Toutefois, plusieurs d’entre elles ont été soumises au cours de ces dernières années à des pressions de l’administration locale, qui exigeait d’elles leur officialisation : les pouvoirs locaux sont en effet confortés par certaines ambiguïtés législatives, le code administratif stipulant que les communautés refusant de se faire enregistrer sont passibles d’amendes. Ces contradictions juridiques sont perçues comme un moyen, pour les autorités, de faire pression sur certains mouvements jugés indésirables.
12Ces mesures ont touché les quelques communautés ayant refusé de s’acquitter du droit d’enregistrement (soit près de 100 euros), et celles s’opposant pour des raisons idéologiques, comme certains groupes baptistes, à tout contrôle de l’Etat. Ces pressions restent cependant minoritaires par rapport au nombre de communautés chrétiennes qui parviennent à exercer leurs activités sans entrave. Le Kazakhstan connaît en effet aujourd’hui une véritable diversité religieuse et abrite des minorités non chrétiennes, comme Hare Krishna ou Bahaï, souvent réprimées dans d’autres Etats de l’ex-URSS. En septembre 2003, un congrès inter-religieux mondial s’est tenu à Astana, réunissant des représentants des principales religions et confessions (musulmanes, chrétiennes, juives et bouddhistes). N. Nazarbaiev a affirmé à cette occasion, son respect du pluralisme religieux. L’immense majorité des dignitaires et des croyants de confession chrétienne reconnaissent donc volontiers bénéficier dans ce pays de libertés étendues. Les pressions exercées sur telle ou telle communauté émanent généralement de l’administration locale, qui continue souvent à appliquer certains principes et pratiques soviétiques.
13Toutefois, de nombreux responsables politiques ou religieux, musulmans et orthodoxes, ont critiqué le développement des mouvements prosélytes et proposé que la liberté religieuse soit restreinte. Plusieurs projets de révision des lois ont été rédigés à partir de la seconde moitié des années 1990, aucun d’eux n’ayant cependant abouti à ce jour. Un nouveau projet, examiné en juillet 2004, pourrait néanmoins limiter très considérablement, s’il était adopté, les activités des confessions religieuses dites non traditionnelles. Ce projet, qui déclare lutter contre l’extrémisme, sans pour autant que cette notion ne soit définie, permettrait d’exercer de fortes pressions sur l’ensemble des mouvements prosélytes jugés gênants : il suffirait qu’une organisation religieuse soit déclarée extrémiste par n’importe quel pays étranger pour être considérée comme telle au Kazakhstan. Compte tenu de la situation régnant dans nombre d’Etats du monde, tout mouvement religieux serait dès lors potentiellement menacé. Ce projet semble par ailleurs avoir été perçu par les autorités locales comme un encouragement du pouvoir central à exercer des pressions sur les groupes tenus pour suspects [5].
14La situation est relativement similaire au Kirghizstan. Ce pays se caractérise par une grande diversité de mouvements chrétiens qui parviennent à agir dans des conditions jugées excellentes, selon les dires des principaux concernés et malgré des pressions exercées çà et là. Au Tadjikistan, ils connaissent également un environnement favorable, mais la guerre civile (qui a pris fin en 1997) et l’émigration des populations européennes ont considérablement limité leur développement et leur diversité. Tout comme au Kazakhstan, un certain nombre d’ambiguïtés dans la réglementation, en particulier concernant la procédure d’enregistrement, permettent l’adoption de mesures jugées abusives par les croyants. Au Kirghizstan, un décret signé en 1996 par le Président, Askar Akaev, a rendu obligatoire l’enregistrement des communautés religieuses, condition non mentionnée dans la législation les concernant. Les autorités politiques se défendent de toute intention répressive ou de vouloir maintenir le cadre soviétique en justifiant cette procédure comme un simple mode de recensement des mouvements religieux présents sur le territoire. Au Tadjikistan, l’enregistrement pour l’obtention d’un statut juridique est interprété par les autorités locales comme une obligation ; le code administratif prévoit ainsi de sanctionner par des amendes les groupes qui s’y refusent ou qui ne remplissent pas, pour des raisons diverses, les conditions.
15Néanmoins, tant au Kirghizstan qu’au Tadjikistan, nombre de communautés non enregistrées continuent d’exercer leurs activités en toute quiétude, dans la mesure où elles ne provoquent pas de remous au sein de la population locale en se livrant à un prosélytisme jugé provocateur. On mentionnera néanmoins les conflits survenus au Kirghizstan entre les autorités centrales et des groupes pentecôtistes, parfois entièrement ou majoritairement composés de Kirghizes (supposés être « par nature » musulmans), certains d’entre eux s’étant vu infliger de lourdes amendes et ayant été menacés d’interdiction. Ces incidents sont souvent interprétés par les croyants eux-mêmes comme un excès de zèle de l’administration locale. Les pressions émanent cependant de plus en plus de la population musulmane (les imams ou les responsables locaux en charge du fait religieux), en particulier dans la partie sud du pays peuplée d’une importante communauté ouzbèke, et où l’islam est beaucoup plus pratiqué que dans le Nord. Au Tadjikistan, certains aspects de la vie religieuse restent largement contrôlés : ainsi, tout ouvrage religieux étranger entrant sur le territoire doit être visé par une commission d’experts du Comité aux affaires religieuses.
16Toutefois, remettre en cause les principes fondamentaux de la liberté religieuse dans ce pays constituerait une atteinte à l’accord de paix signé en 1997 entre les communistes et l’opposition musulmane et démocratique, qui accordait certains droits à cette dernière, comme la participation au gouvernement, et autorisait la formation de partis politiques à caractère religieux. De plus, le pouvoir n’a pas pour l’instant la capacité d’exercer un contrôle sur l’ensemble des structures religieuses. Néanmoins, comme au Kazakhstan, des projets de lois fixant certaines limites à la liberté religieuse sont à l’étude, mais ceux-ci n’ont pas été diffusés.
? Ouzbékistan : durcissement législatif et répression
17En Ouzbékistan, la législation libérale adoptée durant la perestroïka, puis après l’indépendance, laquelle octroyait à la religion un large espace de liberté, a été profondément remaniée dans un sens restrictif en 1998 [6]. L’une des principales mesures fut de maintenir la règle de l’enregistrement, mais en exigeant pour chaque communauté 100 signatures de personnes majeures (contre dix dans la loi précédente).
18Alors que les populations européennes connaissent une forte émigration, ce durcissement législatif condamne à la disparition de nombreuses communautés chrétiennes vivant en dehors des grandes villes, lesquelles comptent souvent moins de 50 individus. Par ailleurs, le prosélytisme, quelle que soit sa forme, est désormais strictement interdit (article 5 de la loi sur la liberté de conscience et sur les organisations religieuses du 1er mai 1998). Toute tentative de convertir un musulman peut ainsi entraîner une peine de prison : des missionnaires protestants ont été à ce titre incarcérés plusieurs mois, voire plus d’une année.
19Contrairement au Kazakhstan, au Kirghizstan et au Tadjikistan, le rassemblement de membres d’une communauté non enregistrée, donc considérée comme illégale, est réprimé. Les réunions privées, officiellement autorisées si elles ne sont pas dirigées par un leader religieux et si aucun enseignement n’y est dispensé, sont en réalité très surveillées et font périodiquement l’objet de sanctions de la part des autorités. Tout enseignement religieux doit être autorisé et est soumis à un contrôle très strict. La littérature religieuse est également au centre de l’attention du pouvoir politique : toute brochure publiée à l’étranger ou dont le titre contient un terme à connotation religieuse doit être visée par l’administration avant de pénétrer sur le territoire ouzbek. Le régime de Islam Karimov censure aujourd’hui pratiquement tous les ouvrages importés. Les autorités se défendent de toute critique en arguant que seuls ceux destinés aux réseaux de distribution sont contrôlés, bien que les douanes examinent en réalité tous les ouvrages, même ceux à usage personnel.
20Ces mesures visent avant tout à limiter l’expansion du protestantisme, et en particulier des mouvements connus pour leur activisme, comme les baptistes, les adventistes du septième jour, les pentecôtistes et surtout les témoins de Jéhovah, afin, entre autres, de donner satisfaction à la Direction spirituelle des musulmans et à l’éparchie orthodoxe basée à Tachkent. Selon elles, un croyant ouzbek se doit d’être musulman et un Russe orthodoxe. La mesure juridique la plus commune consiste à refuser l’enregistrement des groupes jugés indésirables, même si ceux-ci remplissent toutes les conditions exigées.
21Ces refus ne sont souvent agrémentés d’aucune justification et sont systématiques lorsque les communautés sont essentiellement constituées d’Ouzbeks ou de Tadjiks. Tel est le cas dans la république autonome du Karakalpakstan ou dans la vallée du Ferghana, où les populations européennes sont désormais extrêmement minoritaires.
22La législation en Ouzbékistan apparaît donc comme un cadre formel à géométrie variable, adaptée aux desiderata des autorités centrales et locales.
23Plusieurs communautés ont, par exemple, été interdites car elles dispensaient un enseignement de la religion à des mineurs, activité qui n’avait pas été mentionnée lors de leur enregistrement. Une Eglise baptiste située à Ourgentch, au Khorezm, dans l’est du pays est ainsi tombée sous le coup d’une telle mesure [7]. Le contexte actuel conduit donc nombre de ces communautés à être aussi discrètes que possible même si les services de police et de renseignement disposent d’informations et de données précises sur elles.
24Cette législation restrictive s’accompagne de multiples pressions quotidiennes, officielles comme officieuses, mais toutes encouragées par les autorités. Elles sont exercées par la police et les services secrets, lesquels sont autorisés à procéder, au nom de la lutte contre les activités religieuses clandestines, à des perquisitions de domiciles privés et à des arrestations. La sanction consiste d’abord à infliger une amende égale à cinq fois le salaire minimum ainsi que de courtes peines d’emprisonnement. Une récidive (ou jugée comme telle) donne lieu, en application des codes pénaux et administratifs, à une augmentation du montant de l’amende (entre 50 et 100 fois le salaire mensuel) et à une incarcération de plusieurs années.
25Depuis 1998, les communautés chrétiennes non enregistrées n’ont cessé d’être harcelées par les autorités. Elles font l’objet de menaces sous toutes leurs formes, à commencer par des appels téléphoniques anonymes, des accusations outrancières sans fondement (trafic de drogue, espionnage pour le compte de l’Occident) et des violences au cours d’interrogatoires à répétition, la police refusant, de plus, d’enregistrer leurs plaintes. Dans le cadre d’une campagne non officielle contre le prosélytisme, plusieurs actes de torture auraient été perpétrés au Karakalpakstan [8]. Les pressions sur les enfants des familles suspectées d’appartenir à des communautés religieuses non reconnues sont fréquentes, tout comme celles exercées sur les étudiants membres de courants protestants, plusieurs d’entre eux ayant été menacés d’être expulsés de l’université. On se retrouve donc dans une situation proche de celle de la période soviétique : détenir des ouvrages tels que la Bible ou les Evangiles peut constituer un délit, surtout si les autorités administratives y voient une « preuve » de prosélytisme ou d’un enseignement religieux clandestin. Les fréquentes perquisitions aux domiciles des croyants donnent lieu à la confiscation et à la destruction des livres à caractère religieux.
26De manière générale, tout argument peut être aujourd’hui utilisé pour mettre à l’écart un croyant jugé trop actif, argument qui conduit parfois à des amalgames pour le moins étonnants : ainsi, certains chrétiens sont accusés de « wahhabisme », à l’instar des musulmans suspectés d’intégrisme. Sont particulièrement visés les nouveaux chrétiens de nationalité ouzbèke, dont la religion « traditionnelle » est l’islam et dont la conversion serait susceptible, selon les autorités, de provoquer des troubles et de menacer la stabilité du pays. Al’heure actuelle, seule l’Eglise orthodoxe, proche du pouvoir, semble échapper à ces difficultés. Face aux multiples accusations de violation des principes fondamentaux de la liberté de conscience émanant des organisations internationales et d’Etats étrangers, l’Ouzbékistan a voulu se dédouaner en autorisant l’enregistrement d’un certain nombre de communautés installées à Tachkent. La capitale du pays n’est cependant qu’une vitrine derrière laquelle sont dissimulées des exactions multiples et répétées à l’encontre des religions non traditionnelles, notamment dans les régions les plus reculées. Au Karakalpakstan, dont le territoire couvre plus du tiers de la superficie de l’Ouzbékistan, les pressions sont aujourd’hui extrêmement fortes à l’encontre du fait religieux et aucun édifice chrétien n’y est ouvert à ce jour [9].
? Turkménistan : l’extrême réduction du paysage religieux
27La situation dans ce pays est très semblable à celle de l’Ouzbékistan, où la séparation de l’Eglise et de l’Etat, proclamée dans la Constitution, est en fait limitée par l’intrusion permanente de ce dernier dans les affaires de la première. Le paysage religieux y est cependant encore plus réduit. Si tous les Etats d’Asie centrale connaissent aujourd’hui un culte de la personnalité plus ou moins développé, celui-ci atteint son paroxysme au Turkménistan.
28Autoproclamé Prophète, Saparmourat Niazov exige que son livre, Ruhnama (Code spirituel), qualifié selon ses propres discours de « livre saint », soit placé à côté du Coran dans les mosquées et de la Bible dans les églises, et que chaque culte célébré ou chaque sermon prononcé lui rende hommage.
29A l’entrée des mosquées, les musulmans sont invités à toucher le livre comme un croyant se doit de toucher un livre sacré [10].
30La situation des minorités religieuses est extrêmement difficile, à l’exception, là encore, de celle de l’Eglise orthodoxe. L’enregistrement des communautés religieuses a été rendu plus complexe par une loi adoptée en 1996, posant comme condition préalable la collecte de 500 signatures de personnes majeures. Cette clause a donné lieu à l’interdiction de toutes les communautés chrétiennes, excepté les orthodoxes et une représentation diplomatique du Vatican à Achgabat. L’application des lois y est, une fois de plus, à géométrie variable : nombre de communautés protestantes qui remplissaient tous les critères requis, en particulier celui des 500 signatures, ne sont pas parvenues à se faire enregistrer, tandis que l’Eglise orthodoxe qui, dans les villes de moyenne importance, rassemble souvent moins de 50 fidèles, a obtenu un statut légal. Son poids et sa reconnaissance restent cependant limités, dans la mesure où elle ne compte actuellement qu’une douzaine de communautés enregistrées dans tout le pays.
31La suppression, en mars 2004, sous la pression internationale, de la règle des 500 signatures n’a pas été suivie de grands changements : deux communautés protestantes (adventiste du septième jour et baptiste) ont dès lors réussi à être enregistrées, mais toutes les autres confessions chrétiennes demeurent interdites. La communauté arménienne, nombreuse au Turkménistan, n’a pu obtenir l’autorisation d’ouvrir un lieu de culte spécifique, malgré les requêtes répétées de l’ambassadeur de son pays. Chaque célébration du culte est de toute façon soumise à l’autorisation du Comité aux affaires religieuses et tout est fait pour que les groupes récemment enregistrés ne puissent trouver de local où le célébrer. Les membres de ce Comité peuvent assister officiellement à tous les offices et cet organisme perçoit 20 % des donations effectuées en faveur des communautés religieuses.
32Ainsi, les très rares communautés chrétiennes autorisées ne peuvent, à l’heure actuelle, mener une réelle activité, ne serait-ce que célébrer leur culte. Comme Tachkent en Ouzbékistan, la capitale turkmène, Achgabat, est une vitrine, les confessions chrétiennes non orthodoxes étant illégales dans le reste du pays, quel que soit le nombre de croyants. Certains responsables de confessions non reconnues ne cachent pas leur peur de demander à se faire enregistrer, cette simple requête offrant au pouvoir un moyen de répression contre les croyants. La plupart des confessions d’obédience protestante restent par ailleurs convaincues que l’enregistrement leur sera systématiquement refusé. D’autres mesures prises par S. Niazov pour tenter de masquer les persécutions religieuses, comme la décriminalisation des activités religieuses non enregistrées, n’ont en pratique rien changé.
33Les groupes clandestins, majoritaires, sont contraints de changer très régulièrement de lieux cultuels pour échapper à la police secrète. Cette dernière a également en charge la gestion des questions religieuses et intervient régulièrement lors de la célébration des cultes officieux pour emmener tous les participants ? enfants compris ? au poste de police et les soumettre à un interrogatoire. Les croyants accusés de chercher à déstabiliser la société sont soumis à de fortes amendes et sont souvent exclus de leur travail. Comme en Ouzbékistan, nombre d’entre eux ont affirmé avoir été roués de coups lors des interrogatoires, avoir été parfois emprisonnés pour des peines de plusieurs mois ou plus et contestent les « preuves » de leur accusation, selon eux fabriquées. Sont essentiellement touchés les mouvements protestants.
34Contrairement aux autres Etats de la région, de stricts contrôles sont exercés sur les communautés orthodoxes enregistrées, les prêtres responsables des paroisses ayant pour obligation de rapporter les activités de leurs membres à la police secrète, ces derniers étant eux-mêmes régulièrement convoqués.
35Comme sous le régime soviétique, les communautés sont infiltrées par des membres des services de la Sécurité d’Etat et le clergé est très étroitement surveillé, toute nomination devant être approuvée par les autorités politiques.
36Ces dernières se sont même employées à soustraire l’Eglise orthodoxe du Turkménistan à la juridiction officielle du diocèse de Tachkent, cette subordination ayant été perçue comme une immixtion ouzbèke en territoire turkmène. Elle a été placée sous le contrôle d’un prêtre officiel, membre du Comité aux affaires religieuses, choisi par les autorités turkmènes et dont l’une des fonctions est de veiller à ce que le culte du chef de l’Etat soit observé dans les églises. Il est de ce fait considéré avec suspicion par une partie des croyants et contribue à semer le trouble au sein de la communauté. Cette position lui permet cependant de faire pression afin d’interdire les autres confessions chrétiennes.
37Les croyants se plaignent également
des mesures très lourdes frappant
l’enseignement religieux : il n’est
pratiquement plus possible de le
dispenser de façon officielle et a essentiellement pour cadre le domicile familial, comme à l’époque soviétique. En
outre, la littérature religieuse est quasi
inexistante : les kiosques des quelques
églises orthodoxes reconnues vendent
essentiellement des icônes et des objets
de culte, les bibles et autres ouvrages
religieux étant rares et à un prix inaccessible pour la majeure partie de la
population. Les journaux orthodoxes
édités en Russie ont été interdits par un
décret de septembre 2002 et les ouvrages
religieux étrangers sont confisqués par
la police à leur entrée dans le pays. Il
est également devenu très difficile
pour tout citoyen turkmène de quitter
le territoire. Ainsi, plusieurs membres
de congrégations protestantes ont été
empêchés de sortir du pays pour se
rendre à une réunion de leur mouvement. Les prêtres orthodoxes eux-mêmes ne parviennent plus à communiquer avec leurs coreligionnaires de
Russie. Le contrôle systématique de
toute forme de communication, comme
Internet, entrave tout lien avec
l’étranger. La situation religieuse au
Turkménistan apparaît aujourd’hui
pour les croyants plus difficile encore
qu’à l’époque de l’URSS brejnévienne :
la diversité religieuse qui existait
malgré tout durant la période soviétique est aujourd’hui en voie de disparition.
Le cas chrétien face à l’islam
38Malgré une remise en cause de la liberté religieuse dans l’ensemble de l’Asie centrale, on constate une grande différence entre le Kazakhstan, le Kirghizstan et le Tadjikistan, où les croyants profitent encore de conditions très favorables, et le Turkménistan et l’Ouzbékistan, où la répression est au contraire extrêmement fréquente. Ces différences pourraient cependant s’estomper progressivement si les trois premiers Etats finissaient par adopter des législations plus strictes, comme le laissent craindre les divers projets de lois soumis aux Parlements depuis plusieurs années et les débats, souvent secrets, à leur propos.
39Il faut également noter que toutes les mesures prises par les autorités ne sont pas dirigées contre le christianisme dans son ensemble, puisque l’orthodoxie y est bien traitée. Ces mesures visent en réalité à limiter les activités d’un certain nombre de courants chrétiens dits non traditionnels et souvent considérés comme des sectes. Les autorités politiques des Etats d’Asie centrale maintiennent ainsi une classification en partie élaborée sous le régime soviétique : la « religion traditionnelle » est celle du peuple éponyme ou des principales minorités présentes dans le pays (Eglise orthodoxe pour les Russes, Eglise luthérienne ou catholique pour les Allemands, Eglise catholique pour les Polonais, etc.), tandis que les « sectes » menaceraient la stabilité sociale, voire l’indépendance du pays. Cette classification ne repose sur aucun fondement sérieux, mais permet au pouvoir de marginaliser toute communauté cherchant à échapper au cadre de contrôle imposé [11]. Certains mouvements, présents depuis le régime tsariste ? baptistes, adventistes, etc. ? sont tolérés, mais différemment selon les pays. En revanche, ceux apparus lors de la perestroïka et aidés par des missionnaires étrangers sont suspects aux yeux des autorités et peuvent être soumis à de fortes pressions. Cette appréhension du spectre religieux est non seulement commune à l’ensemble de l’Asie centrale, mais également à tous les Etats de la CEI, chacun l’appliquant ensuite de manière plus ou moins stricte.
40Autre constatation, tout aussi importante, les mesures prises à l’encontre de la religion ne s’inscrivent pas dans une volonté de discrimination à l’égard du christianisme et en faveur de la religion majoritaire, à savoir l’islam ; elles sont, au contraire, généralement bien davantage dirigées contre ce dernier, le christianisme en Asie centrale n’étant pas politisé [12]. Tous les dirigeants ont en effet cherché avant tout à éviter que l’islam ne devienne un moyen de remettre en cause les structures et les frontières des Etats et de contester la légitimité des élites, en place depuis les années 1970-1980. Ces dix dernières années ont ainsi été marquées par de véritables offensives contre l’islam dit wahhabite, terme dépréciatif utilisé pour condamner toute mouvance politisée, mais également tout musulman qui refuserait, en particulier au Turkménistan et en Ouzbékistan, de se soumettre aux conditions imposées par le pouvoir.
41Chaque pays a adopté des mesures contre des pratiquants musulmans ou des mosquées jugés suspects. L’Ouzbékistan a ainsi engagé une répression systématique ces dernières années, en arrêtant, en emprisonnant et souvent en torturant nombre d’individus soupçonnés de pratiquer leur religion de manière trop « zélée ». Ces actes ont d’abord été justifiés par les attentats de février 1999 (visant le Président et des institutions d’Etat), puis durcis après des attaques armées contre la police en mars-avril 2004. Disparitions et exécutions sans jugement sont fréquentes dans un pays où les organisations de défense des droits de l’homme estiment entre 6 000 et 7 000 le nombre de prisonniers politiques, la plupart étant détenus pour des motifs religieux. Ils sont généralement accusés de détenir des brochures interdites publiées par des mouvements extrémistes (Mouvement islamique d’Ouzbékistan ou Hizb at-Tahrîr) ou encore de participer au trafic de drogue, d’armes, etc. La plupart des inculpés contestent ces accusations, montées, selon eux, de toutes pièces par les autorités.
42Les contrôles exercés par le pouvoir politique sont beaucoup plus étroits à l’encontre de l’islam que des communautés chrétiennes. La nomination ou la révocation d’imams dépend des Directions spirituelles [13], tandis que le clergé chrétien est à cet égard beaucoup plus indépendant. Plusieurs imams en Ouzbékistan et au Turkménistan ayant refusé de se soumettre aux exigences des dirigeants politiques ont été accusés de complicité avec des groupuscules extrémistes et condamnés à de longues peines de prison. L’équité des procès est largement contestée : censés être ouverts au public, ils sont néanmoins généralement interdits à tout journaliste ou militant des droits de l’homme et la possibilité de se défendre est quasi inexistante. De manière générale, la vie quotidienne des pratiquants musulmans en Ouzbékistan devient de plus en plus difficile : le simple fait de porter une barbe ou tout vêtement à connotation religieuse a conduit nombre de pratiquants à être interrogés par la police et, pour certains d’entre eux, à être emprisonnés.
43La situation est sensiblement la même au Turkménistan, où S. Niazov a décidé de mener une politique de répression au lendemain du prétendu attentat perpétré contre lui en novembre 2002 [14]. Les quelques imams qui ont osé, dans ce pays, contester le culte de la personnalité et refuser les directives consistant à placer sur un pied de quasi-égalité le Coran et Ruhnama ont immédiatement fait l’objet des foudres des autorités. S. Niazov a souhaité, par ailleurs, mettre un terme à la construction de nouvelles mosquées, malgré les demandes de la communauté musulmane dans un certain nombre de villes et de villages.
44La présence de Tadjiks parmi les prisonniers de Guantanamo, à Cuba, a été utilisée par le président Emomali Rakhmonov pour invoquer le danger extrémiste planant sur son pays. En conséquence, plusieurs dizaines de mosquées ont été fermées et un tiers du personnel religieux a été limogé. Des restrictions, de moindre ampleur cependant, ont également été adoptées au Kazakhstan et au Kirghizstan, en particulier contre les mosquées non enregistrées. Les répressions les plus dures sont menées à l’encontre des membres de Hizb at-Tahrîr ou d’autres groupuscules islamistes, mais il n’a jamais été fait mention jusqu’à présent d’un chef d’accusation ou d’un procès truqués. De plus en plus contestés sur la scène internationale, les dirigeants politiques des Etats d’Asie centrale cherchent à recouvrer un certain crédit, notamment en organisant des conférences sur les thèmes liés à la religion et à la laïcité. En Ouzbékistan, ces manifestations, souvent co-gérées par des organisations de défense des droits de l’homme, qui n’en ont que le nom car entièrement inféodées aux autorités politiques, ne constituent en fait que la vitrine d’une république où toute expression critique est interdite. Ainsi, les modes de penser le religieux restent empreints du modèle soviétique : la prétendue séparation de l’Eglise et de l’Etat est en fait unilatérale, la religion n’étant qu’un instrument aux mains des autorités, qui la contrôlent par le biais d’institutions créées sous le régime précédent et plus ou moins maintenues en l’état [15].
45Le christianisme en Asie centrale n’est en aucun cas victime d’une politique délibérée des autorités centrales souhaitant faire de l’islam la religion unique du pays. Les contrôles et exactions commises à l’encontre des croyants chrétiens s’inscrivent dans un cadre plus large, celui d’un durcissement des politiques autoritaires menées dans tous les Etats. Le Kazakhstan et le Kirghizstan, tout d’abord considérés comme des havres de démocratie dans la région, ont considérablement restreint la liberté d’expression qui avait été accordée à la société civile et à la presse au lendemain de l’indépendance, et ont sanctionné un certain nombre d’opposants politiques jugés trop virulents (licenciements, incarcérations). Le Tadjikistan, secoué par la guerre civile, avait connu à partir des accords de paix signés en 1997 un certain pluralisme politique aujourd’hui remis en cause par la reprise en main du président Rakhmonov [16]. Le durcissement politique a été, en revanche, bien plus précoce en Ouzbékistan et au Turkménistan, où toute opposition politique a été réprimée quasiment dès l’indépendance, la liberté d’expression et celle de la presse y étant totalement inexistantes. Aussi bien la religion dans son ensemble que le fait minoritaire dans sa spécificité apparaissent à ce titre comme le miroir d’une situation politique plus générale.
Notes
- (1)Les informations données dans cet article sont tirées de l’ouvrage de S. Peyrouse, Des chrétiens entre athéisme et islam : regards sur la question religieuse en Asie centrale soviétique et post-soviétique, préface de Patrick Michel, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004, 406 p., de données écrites et orales collectées sur place entre septembre 2002 et août 2004, ainsi que de rapports rédigés par des organisations de défense des droits de l’homme et religieux; on citera à ce titre tout particulièrement ceux écrits par Igor Rotar et Félix Corley sur le site www. forum18. org
- (2)Pour des chiffres sur les minorités nationales, consulter : Kratkie itogi perepisi naselenia 1999 goda v respublike Kazakhstana, Agentstvo respubliki Kazakhstana po statistike, Almaty, 1999 ; N. E. Masanov, Z. B. Abylhojin, I. V. Erofeeva, A. N. Alekseenko, G. S. Baratova, Istoria Kazakhstana, narody i kultury (Almaty, Dajk-press, 2001 ; Etnitcheskij atlas Ouzbekistana, Fond Sodejstvia Ouzbekistana, 2002 ; C. Poujol, Dictionnaire de l’Asie centrale, Ellipses, Paris, 2001 ; P. Kolstoe, Russians in the Former Soviet Republics, Hurst & Company, Londres, 1995.
- (3)Article 58 de la Constitution kazakhe, article 8 de la Constitution kirghize, article 8 de la Constitution tadjike, article 11 de la Constitution turkmène, article 61 de la Constitution ouzbèke.
- (4)Les réactions à l’encontre du prosélytisme et, de manière plus générale, des mouvements protestants, font l’objet d’articles dans les journaux orthodoxes locaux, Slovo Jizni en Ouzbékistan, Vedi et Svet Pravoslavia au Kazakhstan.
- (5)I. Rotar, « Kazakhstan : is Religion Extremism ?», 27 juillet 2004, Forum 18 News, www. forum18. org
- (6)Narodnoe Slovo, 15 mai 1998.
- (7)I. Rotar, « Uzbekistan : Justice Department Tries to Limit Churches and Mosquees Number », 18 mars 2004, Forum 18 News, op. cit.
- (8)I. Rotar, « Uzbekistan. Religious Freedom Survey July 2003 », Forum 18 News, op. cit.
- (9)Seule une église orthodoxe devrait être prochainement construite dans cette région. Information recueillie au Centre culturel russe à Noukous, mai 2004.
- (10)I. Rotar, « Turkmenistan : State Interference with Islamic Religious Life in the North East », 4 mars 2004, Forum 18 News, op. cit.
- (11)Pour plus de détails, cf. S. Peyrouse, Des chrétiens entre athéisme et islam, op cit., pp. 232-235.
- (12)Le mouvement le plus « politisé » est en fait l’Eglise orthodoxe, qui maintient une longue tradition de coopération avec le pouvoir politique. Elle a, dans cette logique, refusé de soutenir la moindre action ou contestation politique comme l’auraient par exemple souhaité les cosaques au Kazakhstan. Voir M. Laruelle, S. Peyrouse, Les Russes du Kazakhstan. Identités nationales et nouveaux Etats dans l’espace post-soviétique, préface de Catherine Poujol, Paris, Maisonneuve et Larose, 2004,354 p.
- (13)Sur le contrôle de l’islam en Ouzbékistan, voir par exemple B. Babadjanov, « Islam officiel contre islam politique en Ouzbékistan aujourd’hui : la Direction des Musulmans et les groupes non-hanafî », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. 31, n° 3,2000, pp. 151-164.
- (14)Cet attentat apparaît aujourd’hui avoir été fomenté par le Président lui-même, afin d’organiser de vastes purges au sein de l’appareil gouvernemental et administratif.
- (15)S. Peyrouse, « La gestion du fait religieux en Asie centrale : poursuite du cadre conceptuel soviétique et renouveau factice », Cahiers d’Asie centrale, n°13-14, à paraître en décembre 2004.
- (16)Voir F. Guérin, « Tadjikistan. Menaces sur la réconciliation nationale », Le courrier des pays de l’Est, janvier-février 2004, n° 1041, pp. 180-193.