Notes
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[*]
Cédric Levaque, psychologue, psychothérapeute analytique. Membre de l’Association freudienne de Belgique. Co-responsable de l’Unité Assuétude du service de Santé mentale Chapelle-aux-Champs, Bruxelles.
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[1]
Équipe composée de psychiatres, de psychologues et d’assistants sociaux spécialisés dans le traitement des assuétudes, en consultations ambulatoires ou en hospitalisation qui ont formé un réseau : « Réseau Dépendance Bruxelles Est ».
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[2]
Lorsque nous parlons des enfants d’alcooliques, nous parlons du lien de filiation et non de cette période de la vie qu’est l’enfance. Ceux qui nous consultent sont tout autant des adultes que des adolescents et des jeunes enfants avec leurs parents.
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[3]
Chemama, R., Dépression, la grande névrose contemporaine. Toulouse, érès, 2006. p. 34.
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[4]
Ce point a déjà fait l’objet d’une publication précédente. Faoro-Kreit B., Hers D., Levaque C., Anselot C., « Comment aider les enfants d’alcoolique ? L’apport de la fratrie. » Revista Analisis, vol. 3, n° 5. Medelin-Colombia, 2004.
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[5]
Freud S. (1915), « Pulsions et destins des pulsions. », in: Métapsychologie. Paris, Gallimard, 1968. p. 25.
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[6]
Même si Freud a déjà introduit le terme de pulsion en 1905 dans les Trois essais sur la théorie de la sexualité, ce n’est qu’à partir de Pulsions et destin des pulsions qu’il développe et élabore ce concept qu’il sera par ailleurs amener à revisiter ultérieurement.
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[7]
Lacan J., Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse – Le Séminaire, Livre XI (1964), Paris, Le Seuil, 1973.
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[8]
Le grand Autre est le lieu où se structure les chaînes signifiantes qui permettent l’élaboration des structures langagières et le processus de subjectivation.
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[9]
Freud élaborera cette logique linéaire à deux reprises. La première en 1915 dans Pulsions et destin des pulsions où Freud soutient l’idée que le but actif est premier par rapport au but passif. La seconde, neuf ans plus tard, dans son texte Le problème économique du masochisme, où il affirmera le contraire. En 1964, lorsque Lacan étudie la question de la pulsion, il ne tiendra pas compte du texte de 1924 et revisitera largement Pulsions et destin des pulsions.
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[10]
Lacan J., Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse - Le Séminaire, Livre XI (1964), Paris, Le Seuil, 1973. p. 162.
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[11]
Ces questions, ces domaines psychiques qui sont problématiques pour les enfants d’alcoolique restent avant tout singuliers. A titre d’exemple, pour les uns, cela se traduira dans leurs rapports au corps, tandis que pour d’autres, cela se cristallisera autour de l’énigme de la paternité, de la maternité ou encore de la sexualité.
-
[12]
Ce manque-à-être est lié à la perte inéluctable de l’objet d’amour premier ainsi qu’au fait que l’humain est un être sexué d’un des deux types de sexe et non des deux.
-
[13]
Blandine Faoro-Kreit dans son article sur la femme alcoolique décrit la question de l’emprise pulsionnelle dans laquelle sont prises les femmes alcooliques. Roussaux J.-P., Faoro-Kreit B., Hers D., « La rencontre avec la femme alcoolique », in: L’alcoolique en Famille, Dimensions Familiales des Alcoolismes et implications thérapeutiques. Bruxelles : De Boeck Université, 2000.
-
[14]
Penot B., La Passion du sujet freudien. Entre pulsionnalité et signifiance. Toulouse, érès, 2001. p. 33.. »
-
[15]
Fédida P., Des bienfaits de la dépression – Éloge de la psychothérapie. Paris, Odile Jacob, 2001. p. 232.. »
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[16]
Nous constatons que cette transmission des deux interdits est souvent escamotée, mise à mal, dans les familles où un membre présente un problème de dépendance.
-
[17]
Abraham N., Torok, M., L’écorce et le noyau. Paris, Philosophie Flammarion, 1987.
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[18]
Penot B., La Passion du sujet freudien. Entre pulsionnalité et signifiance. Toulouse, érès, 2001.
-
[19]
Pour certaines personnes dépendantes, dire « je suis un alcoolique » est à entendre comme une suppléance symbolique et imaginaire. Cette suppléance favorise une sorte de nomination par défaut qui vient enfin les inscrire, les arrimer comme nous le rencontrons parfois dans les groupements néphalistes.
-
[20]
Le symptôme est un phénomène subjectif qui, pour la psychanalyse, constitue non le signe d’une maladie mais l’expression d’un conflit inconscient. Chemama R., Vandermersch, B. Dictionnaire de la psychanalyse. Paris, Larousse-Bordas, 1995.
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[21]
Cette affirmation devrait faire l’objet d’un autre article où il serait question d’articuler Réel-Imaginaire-Symbolique-Syntome-Alcool pour rendre compte de la problématique alcoolique.
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[22]
Ginestet-Delbreil S., La terreur de penser – Sur les effets transgénérationnels du trauma. Plancoët : entendre l’archaïque, Diabase, 1997. p. 67.
Introduction
1Depuis plus de trois ans, l’équipe [1] au sein de laquelle je travaille se préoccupe des enfants [2] de patients dépendants de l’alcool. C’est avant tout au travers de leurs discours qu’il nous est apparu que nous, thérapeutes pour adultes, occupions une place singulière auprès de leurs enfants. Si les problématiques alcooliques reçoivent aujourd’hui un intérêt certain dans le domaine de la santé mentale, ce n’est que récemment que nous interrogeons et prenons en compte la souffrance des proches et surtout celle des enfants qui sont confrontés à cette problématique. Le peu de références bibliographiques à ce propos en atteste.
2Ces enfants sont pris dans des conflits de loyauté, confrontés au déni et embarrassés par des sentiments de honte. Parler de cette souffrance reste pour eux difficile car cela implique de mettre de côté cette maîtrise chèrement développée pour vivre dans ce milieu où, bien souvent, les positions générationnelles sont perturbées voire inversées. Face au temps, les positions subjectives de chacun se recréent fréquemment inlassablement selon les nécessités, un peu comme si leurs linéarités étaient, elles aussi, déniées. Etablir ce constat, c’est relever d’emblée l’affaiblissement de la loi du symbolique dans certaines de ces familles. Le symbolique n’est-il pas ce qui vient inscrire de la différence, de la distinction dans et entre les générations ? Roland Chemama écrit que « si cette structure temporel a une telle importance, c’est sans doute qu’elle participe à cette dimension de l’Autre par rapport auquel un sujet peut se repérer. C’est en cela qu’elle est partie intégrante du Symbolique comme tel. [3] » S’il est courant de constater que ces enfants endossent très tôt des responsabilités importantes au sein de leur famille, il importe d’entendre dans leurs discours combien ils se distinguent peu de leurs parents, partageant leurs souffrances, endossant leurs inquiétudes, leurs désespoirs…
3Les prises en charge que nous avons développées ont pour caractéristique de s’appuyer sur le groupe particulier qu’est la fratrie et ses ressources [4]. Cet outil qu’est le travail thérapeutique avec la fratrie semble être resté peu développé par les psychanalystes qui ont davantage étudié et privilégié les relations verticales laissant quelque peu de côté les liens fraternels.
4Parler du travail avec les fratries d’enfants d’alcoolique, c’est d’emblée évoquer, pour beaucoup de situations, la question du traumatisme. Pour Lacan, le trauma est une donnée inéluctable du fait même que le sujet est pris dans le langage. C’est ce que nous appelons communément le trauma de structure. Ceci posé, il n’en reste pas moins vrai que, dans notre clinique psychanalytique de l’assuétude, nous sommes confrontés à des traumatismes évènementiels liés à l’histoire du sujet et de sa famille. Dans cet écrit, nous allons montrer que ces vécus traumatiques ne sont pas sans répercussions sur le circuit pulsionnel des enfants et dès lors, sur la capacité qu’ils ont de s’éprouver eux-mêmes comme sujet avec leurs demandes et leurs désirs propres. Pour nombres d’entre eux, l’alcoolisme parental a pour effet de provoquer, à certains endroits, une effraction dans la chaîne signifiante. En guise de réponse, ils réagissent dans un registre imaginaire et c’est cela qui aliène leur psychisme. Ce qui importe, c’est n’est pas tant la réalité traumatique mais plutôt l’élaboration autour et à partir de ce qui est identifié comme traumatisme. Même si nous soutenons une certaine spécificité autour de la clinique de l’alcoolisme et de ses conséquences aux générations suivantes, ce n’est pas tant l’alcoolisme parental qui est traumatisant pour les enfants mais bien les élaborations conscientes et inconscientes qui viennent les perturber. Notre travail avec les membres des fratries porte donc principalement sur ces élaborations et sur les effets de la désorganisation signifiante tels que les répétitions « agies », l’absence de certaines représentations, les mécanismes de défense tels que le clivage et le déni.
La pulsion et son circuit
5La pulsion et son circuit sont des concepts qui nous permettent de cerner ce qui opère, ou plutôt, n’opère pas dans certaines dimensions (et ce, parfois même de manière partielle) chez les enfants d’alcoolique qui nous consultent.
6Dans son texte de 1915 Pulsions et destin des pulsions [5], Freud élabore son concept de trieb [6]. Une des préoccupations du Viennois à cette époque est de cerner les modalités de la satisfaction pulsionnelle. C’est à partir des couples pulsionnelles sadisme-masochisme et voyeurisme-exibitionnisme que Freud développe son circuit pulsionnel qu’il décrit en trois temps. A titre d’exemple, partons de la pulsion scopique et ce, au travers du verbe regarder. Le premier temps selon Freud est actif : dans l’exemple qui nous anime, nous allons vers un objet extérieur : « regarder ». Le second temps est réflexif : prenant comme objet une partie du corps propre : « se regarder ». Au troisième temps, qualifié de passif, nous devenons l’objet d’un autre, autre que Freud nomme nouveau sujet : c’est le temps du « se faire regarder ».
7En 1964, dans son séminaire Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse [7], Lacan reprend amplement cet article de Freud. Afin d’établir un lien entre la théorie freudienne et la théorie lacanienne concernant la pulsion, soulignons que ce « nouveau sujet » est repris par Lacan sous la notion « de grand Autre [8] ». La dimension de la pulsionnalité ne peut fonctionner en fait que par rapport à l’introduction de l’Autre. C’est effet à partir de la réponse de l’autre parental premier (la mère par exemple tient de lieu où se situe l’Autre) que la dimension subjective apparaît chez l’enfant. L’autre point important que nous relevons du séminaire de 1964 à propos de la pulsion concerne son circuit. Si Freud cerne la dynamique pulsionnelle dans une logique linéaire [9], Lacan dégage du texte freudien un mouvement d’aller-retour de la pulsion. Il peut ainsi représenter l’accomplissement pulsionnel sous la forme d’un circuit décrivant une boucle où se succèdent les trois modes pulsionnels posés en 1915. Enfin, toujours selon Lacan, le sujet apparaît lors de l’accomplissement du circuit de cette activité pulsionnelle. « Le sujet, qui est à proprement parler l’autre [c’est-à-dire le semblable], apparaît en tant que la pulsion a pu fermer son cours circulaire [10]. »
Le circuit pulsionnel des enfants à l’épreuve de l’alcoolisme parental
8Dans les familles à caractère traumatique où un des parents est alcoolique, qu’en est-il de la dynamique pulsionnelle et de son circuit ? A l’écoute du discours de nos patients, nous repérons que le temps passif de la pulsion (être entendu, être pris sur les genoux, être porté, bordé, pris en main… etc.), est court-circuité. Or, ce temps passif que Lacan qualifie de temps du « se faire », est essentiel dans l’accomplissement du circuit pulsionnel dont dépend l’avènement d’une position subjective c’est-à-dire d’une capacité accrue de s’éprouver soi-même comme sujet. Dans notre clinique des enfants d’alcoolique, cet éprouvé est fortement mis à mal, voire reste problématique pour la plupart. Le risque est d’hypothéquer pour la plupart la fonction de sujet par une aliénation invalidante : lorsque le circuit pulsionnel dysfonctionne autour de certaines questions [11] chez un individu, c’est le processus de subjectivation qui s’en trouve affecté.
9Si la pulsionnalité de l’enfant s’établit en lien avec la réponse pulsionnelle de l’autre parental, cette réponse dépend toutefois de la manière dont le parent supporte son incomplétude. Bien que le parent alcoolique soit un sujet divisé, barré, sa consommation d’alcool est une manière de tenter de suppléer, de combler cet insupportable de la réalité humaine qu’est le manque-à-être [12]. Dès lors, cette dépendance peut avoir comme corollaire que le parent, dans ses rapports avec ses enfants, ne se prête pas, ou sans suffisamment de plaisir, à ce jeu pulsionnel des différentes positions. A l’extrême, la réponse pulsionnelle qu’il renvoie reste trop défensivement dans la maîtrise ou dans l’emprise [13] engendrant ainsi une mise en souffrance de la subjectivation chez ses enfants. Dès lors, pour ces enfants, même devenus adultes :
- Soit la place qu’ils occupent dans la relation à l’autre (amis, conjoint…) est de l’ordre de la réparation, réparation dont l’objectif n’autre que de restaurer imaginairement le parent carencé. Il n’est pas rare d’ailleurs de constater chez eux une hyperactivité pour ainsi dire compulsive : ils sont pris dans l’agir pour l’autre. Bernard Penot, dans son ouvrage La passion du sujet freudien, affirme l’idée suivante : « Il s’agit de positions antalgiques par lesquelles le patient s’efforce indéfiniment, durant sa vie, de conjurer un défaut qualitatif d’investissement parental en retour, exacerbant une détresse première (l’hilflosigkeit de Freud) [14]. »
- Soit, à l’opposé, nous constatons qu’ils restent bloqués dans un rapport à l’autre où ils se rétractent dans une position passive afin d’éviter l’éventuelle destructivité éprouvée dans le lien relationnel. Pierre Fedida, à propos d’un enfant de 7 ans dont la mère buvait, souligne à quel point le phénomène d’immobilisation dépressive peut apparaître face à la violence psychique et la terreur vécue. Pour cet enfant, cette dépressivité était un moyen de faire taire en lui ses propres excitations et de se protéger des effractions internes/externes. « Ce qu’on appellerait ici effractions – ou encore “traumatismes” – mêle des sensations tout à fait disparates et hétérogènes. L’effraction est un excès d’excitation pouvant conduire en même temps au plaisir et au déplaisir. Le retrait dépressif peut être tenu pour une défense psychologique contre cet acharnement de la vie à vouloir faire vivre… L’observation pathologique que l’enfant développe sur le comportement de l’adulte et de la compréhension qu’il en acquiert ressemblent à une condition de survie, tant il est directement sensible et tant il partage le désespoir meurtrier auquel il assiste et participe quotidiennement [15]. »
« Répétitions agies »
10Cliniquement, chacun des membres de la fratrie est très souvent pris à son insu (et ce, de manière singulière) dans des « répétitions agies ». Ces répétitions manifestent un agencement pulsionnel en défaut de subjectivation du fait d’un rapport aux signifiants en carence dès le départ. Face à l’alcoolisation du parent, les enfants ne sont plus pris par l’ordre signifiant mais vont devoir se conformer au registre du signe. Pour Lacan, le signe est ce qui représente quelque chose (l’alcoolisation dans la clinique qui nous occupe) pour quelqu’un tandis que le signifiant représente le sujet (celui qui l’énonce) pour un autre signifiant. Travailler avec ces fratries, c’est avant tout essayer de ramener de l’énonciation (une parole subjective) là où il n’y a eu essentiellement que des faits, que des agissements. Cette absence d’énonciation possible autour de certains points indique que les signifiants y font défauts. Il ne s’agit pas de signifiants refoulés auxquels le sujet pourrait accéder au détour d’un travail thérapeutique par associations libres. Ces signifiants manquent à l’appel et donc, pour certains champs du psychisme, la représentation du sujet est comme passée à la trappe. Ce dont il s’agit s’avère donc de l’ordre d’un défaut de symbolisation. Cette carence est à mettre en lien avec les incapacités de liaisons psychiques (en terme freudien), de liaisons signifiantes (en terme lacanien), au niveau de la génération parentale. Au travers du travail avec la fratrie, c’est l’élaboration d’un discours partageable entre tous, c’est-à-dire un travail de connexions signifiantes entre des mots et des perceptions traumatiques agies qui s’élabore.
Marc (31 ans) et Sarah (28 ans) sont frère et sœur. Ils viennent en consultation depuis plus de 5 mois à raison d’une séance tous les 15 jours. C’est Marc qui est à l’initiative de ces entretiens, envoyé chez nous par son analyste auprès duquel il est en cure depuis environ 3 ans. Si d’emblée Marc parle de son lien problématique avec ses parents et surtout avec sa mère alcoolique, Sarah, de son côté, reste plus en retrait et est étonnée à plusieurs reprises des interventions de son frère concernant leur famille. Elle rétorque qu’elle n’a jamais vraiment été affectée ni par les alcoolisations de leur mère ni par les inquiétudes de leur père. En fait, Sarah a décidé très tôt de quitter la maison familiale pour « vivre son indépendance ». Elle a toujours trouvé des petits boulots d’étudiante à droite et à gauche tout en continuant ses études d’infirmière. Aujourd’hui, elle travaille dans un hôpital depuis plus de sept ans et assure, parallèlement à cela, des dépannages en tant qu’intérimaire. En un mot, toujours occupée, Sarah n’a pas une minute pour elle.
C’est dans un second temps du travail que Sarah va nous indiquer qu’elle est nettement plus affectée qu’elle ne le laissait entendre jusque-là par l’alcoolisme maternel. Elle nous apprend qu’elle partage son appartement avec une amie et que, depuis maintenant plusieurs années, celle-ci s’est mise à boire. Sarah n’en peut plus d’assumer cette amie, elle est au bout du rouleau mais, malgré tout, elle ne peut pas abandonner son amie et continue donc à tout faire pour elle : lui trouver du travail quand elle se fait renvoyer, payer sa part de loyer, payer ses dettes, se mêler de ses problèmes familiaux… Sarah ne fait pas de lien entre sa vie actuelle et son histoire familiale. Par contre son frère qui, de son côté, a été très attentif aux propos de sa sœur, prend alors la parole pour dire qu’il comprend tout à fait ce qu’elle ressent car ce qu’elle vit aujourd’hui, lui, il l’a vécu pendant des années à la maison avec leurs parents. Selon Marc, Sarah est prise à son tour dans une répétition des choses qui lui échappent totalement. Cette intervention de Marc sera lourde de conséquences pour Sarah qui, dorénavant, parlera d’elle et de son passé autrement. Sarah va progressivement subjectiver cette « répétition agie » à son insu qui la renvoyait sans cesse à quelque chose de subi originairement durant son enfance. Au fil des séances, le tissage d’un discours, en fratrie, donnera du sens aux répercussions traumatiques des évènements que tous deux ont vécus.
12Ce partage en fratrie a permis que se dégage à nouveau un discours générationnellement échangeable, que la compulsion de répétition se repère dans le présent, permettant au sujet de prendre une autre place dans cet agissement.
13La transmission d’une histoire familiale et singulière est une dimension essentielle au sein de toute famille, tout comme l’impératif de transmettre l’interdit du meurtre et de l’inceste [16]. Pour qu’une famille puisse transmettre son histoire, il est nécessaire que la génération parentale concernée ait une certaine aptitude à reconnaître quelque chose du manque-à-être qui a pu l’affliger. Or, dans beaucoup de famille où l’un des parents est alcoolique, cette donne reste voilée par l’alcoolisation. Tout finit par se focaliser autour de l’alcool ainsi que sur la personne qui boit. Seuls restent chez chacun des membres de la famille des vécus mais difficilement partageables. Dans certaines situations, le mécanisme de clivage peut rendre compte de l’inaccessibilité du matériel psychique et donc de l’impossibilité de mettre en lien ce que l’enfant agit et ce qu’il a vécu : la marque du sceau du déni vient à jamais sceller les mots (les maux). Dans d’autres cas, nous postulons l’idée d’une crypte au sens où N. Abraham et M. Torok [17] en parlent : un espace inclus dans le psychisme qui recèle les représentations et/ou les affects douloureux et menaçant, en lien avec des vécus traumatiques de l’enfance.
14Dans la réalité, tout le monde est sur ses gardes. La famille et son fonctionnement finissent, dans nombres de situations, à se résumer aux problèmes contingents à l’alcool. Chacun des membres agit, réagit, essaye de devancer les comportements, de s’adapter à la personne dépendante. Le mode de l’agir devient le mode privilégié de la famille, manière de suppléer à une énonciation qui fait défaut à de trop nombreux moments. Ce qui en soi est pathogène pour les générations ultérieures, c’est l’échec au sein de la famille à faire un mythe véritable, c’est-à-dire un corps de discours capable d’articuler l’ensemble des données familiales. Comme nous le rappelle Bernard Penot [18], Mythos en grec ne signifie ni plus ni moins que la « parole ».
« Remise en place » de cet aller-retour de la pulsion
15Notre place de thérapeute, garante d’un cadre, favorise à nouveau les échanges pulsionnels et langagiers au sein de la fratrie. Lors des séances, chacun des membres est amené à se faire objet pour l’autre (temps pulsionnel passif) et pour soi-même (temps pulsionnel réflexif). Chacun se voit ainsi offrir la possibilité de gagner davantage de liberté de jeu pulsionnel grâce à la réactualisation dans le transfert, soit sur les thérapeutes, soit sur les frères et sœurs, de cette compulsion à rejeter défensivement un certain assujettissement. Dans le cas présent, assujettissement est à lire en terme de recherche de satisfaction sur un mode passif. Cette recherche étant usuellement perçue chez ces enfants comme dégradante ou chosifiante. Le blocage du circuit de la pulsion est donc en soi dépassable au travers de l’expérience, en séance entre les différents membres de la fratrie, d’un jeu de réversibilité pulsionnel.
Laurent et Sylvain, pourtant frères, ne se voient plus depuis que leurs parents sont décédés. C’est Laurent qui a demandé à nous rencontrer avec son frère. Bien qu’étant l’aîné et âgé de 41 ans, il n’a toujours pas d’enfant. En fait, mais nous l’apprendrons au détour du travail, la question de la paternité lui pose problème. « Tous les hommes dans notre famille étaient alcooliques et dépressifs … je ne veux pas prendre le risque de transmettre cela à mes enfants… ». Ni Laurent, ni Sylvain ne sont pourtant alcooliques. Dans sa vie, Laurent est directeur d’une petite P.M.E. qu’il a fondé seul. Véritable homme d’affaire, il gère les choses comme il se plait à nous le raconter. Sylvain, de son côté, est marié et a trois enfants. En tant que cadet, il est, dit-il, « celui qui a toujours été épargné, mis de côté quand il s’agissait de prendre des décisions familiales importantes ». Sylvain nous fera assez rapidement part de ces périodes qu’il qualifie de blues, de malaise profond. Face à ce discours, Laurent réagira en monopolisant la parole en séance : il racontera l’histoire de la famille sur un mode rationnel et désaffectisé ; il est celui qui « sait ». Sylvain essayera tant bien que mal de laisser entendre à son frère qu’il a terriblement souffert d’avoir toujours été mis sur le côté, que l’on n’ai jamais fait appel à lui pour quoi que ce soit.
Après plusieurs mois, Laurent comme à son habitude prend la parole en début de séance mais cette fois-ci, la trame de ce qu’il énonce prend une autre tournure : il annonce tout de go à son frère que son épouse est enceinte. « …je n’osais pas t’en parler en dehors d’ici… je me rends compte que c’est très dur pour moi de montrer que je ne contrôle pas tout, de demander de l’aide…je ne sais d’ailleurs pas pourquoi… ». Laurent, pendant plusieurs séances et toujours exclusivement pendant celles-ci, va poser des questions à Sylvain à propos de la grossesse et surtout, sur la manière dont lui, le cadet, a vécu ce changement qu’est la paternité. Sylvain, au travers de ce nouvel évènement (la grossesse de sa belle-sœur) se voit pour la première fois mis à une place nouvelle aux yeux de son frère. Il devient dorénavant quelqu’un qui est aussi dépositaire d’un savoir et à qui Laurent, non sans inquiétudes, adresse une demande d’aide. Cet événement mais surtout ce que les deux hommes pourront échanger à cet égard, a ouvert un nouvel espace psychique grâce à ce véritable point de « bascule », de réversibilité pulsionnelle qui a pu s’énoncer au travers d’une demande. Laurent s’autorisera dorénavant à laisser poindre ses malaises, sa solitude en tant qu’enfant et adolescent face aux problèmes d’alcool de son père ainsi que sa difficulté de vivre cette lourde place d’aîné dans la famille. De son côté, Sylvain découvrira un frère qu’il ne connaissait pas. Ce dernier lui deviendra plus accessible, lui qu’il mettait toujours à cette place d’idéal inatteignable.
La question de l’altérité
17Ce travail de subjectivation vers lequel tendent les entretiens de fratrie a également comme incidence nouvelle dans la relation à l’autre de ramener la notion d’altérité. Cette notion est également primordiale dans l’émergence d’une subjectivité. Or, cette altérité est trop fréquemment éludée chez ces enfants d’alcoolique. Les processus de différenciation dans et entre les générations sont souvent télescopés. L’histoire de la fratrie, de la famille est parfois présentée dans un discours confus, peu représenté où les repères temporels sont très mal structurés.
18Les élaborations entre frères et sœurs ont pour corollaire de s’appuyer sur la notion d’être des semblables tout en étant tous différents en même temps. L’intérêt de ce type d’échange est d’autoriser, au sein de l’espace thérapeutique, qu’une parole, non plus agissante mais de l’ordre d’un discours structuré dans le temps, circule notamment autour des mêmes événements. S’il est rassurant de s’apercevoir que son frère ou sa sœur a ressenti les mêmes émotions, les mêmes frustrations, à penser de la même manière envers une situation traumatisante, il est toutefois riche pour eux d’éprouver et de reconnaître également les différences vécues. L’ouverture de cet interstice favorise alors l’apparition d’un nouveau type d’interpellations entre eux. Il est en effet nettement moins risqué d’exprimer sa colère, sa souffrance, son désespoir mais également sa joie et ses désirs envers un frère ou une sœur plutôt qu’envers un parent. Le tissage pulsionnel en fratrie est simplement moins dangereux en séance pour expérimenter cette mise en avant de soi.
19Cette question de l’altérité, nous pouvons l’analyser également entre le parent fragile et ses enfants. L’alcoolisme prend parfois tellement le devant de la scène familiale qu’il en vient à réduire ce parent à cette pseudo-identité d’alcoolique. Il n’est plus qu’un alcoolique [19]. Les enfants que nous recevons en consultations ont cette tendance récurrente à nous parler du parent fragile uniquement en ces termes. Or, ce parent peut aussi se décliner autrement, d’autres signifiants existent à le faire représenter pour l’autre. Notre travail se situe donc également à ce niveau-ci afin de permettre à ces enfants de trouver, chez le parent carencé, d’autres traits d’identification que l’alcoolisme. Notre intention est de redonner une place à la fonction de parentalité, de ramener de la génération dans le discours de chacun. Notons que les interventions les plus opérantes sont celles qui donnent une place prépondérante au transgénérationnel.
20Toutefois, ne pouvons-nous pas entendre dans le discours des enfants à propos du parent dépendant une défense contre l’émergence de ce qui pourrait, pour chaque sujet de la fratrie, faire symptôme ?
Alcool et symptôme
21Développer cette question nécessite un léger détour afin de considérer ce qu’il en est du statut de l’alcoolisme d’un point de vue symptomatique : l’alcoolisme est-ce bien un symptôme ? D’un point de vue médical oui, sans aucun doute. Nous pouvons également avancer l’idée que l’alcoolisme est un symptôme social que la justice prend par ailleurs en charge. Mais d’un point de vue psychanalytique, est-ce un symptôme [20] ? Nous pensons plutôt que l’alcoolisme fonctionne comme un écran qui vient justement occulter l’émergence du symptôme. Il s’agit d’un écran qui vient voiler cet insupportable de la réalité humaine qu’est le manque-à-être (sujet barré). Dans ce cas, l’alcoolisme est à percevoir comme une forme de suppléance quand le nouage par le symptôme (sinthôme) est déficient à faire tenir le sujet [21], quand le symptôme ne suffit plus au sujet pour être.
22Habituellement, une demande thérapeutique s’adresse à partir du moment où le symptôme devient intolérable. Parce que ce montage ne tient plus, le sujet énonce une demande afin d’être soulagé. Or, pour ces sujets, l’alcoolisation fait rarement symptôme et ce, d’autant plus que c’est précisément pour eux la solution qu’ils ont trouvée pour dépasser certaines difficultés. Travailler avec l’alcoolique consiste donc dans un premier temps à ôter cet écran qu’est l’alcool, c’est-à-dire de permettre à ces sujets de développer parallèlement à leur discours usuel sur l’alcool et leur identité d’alcoolique, un autre discours qui donnerait accès à une souffrance qui puisse être liée à des représentations et des conflits intra et extra psychiques.
23Dans certaines fratries d’enfants d’alcoolique, le symptôme n’est-il pas voilé par l’alcoolisation du parent ? Dans les premiers temps du travail, le discours des enfants porte davantage sur le parent fragile que sur eux-mêmes. Généralement, les membres des fratries (qu’ils soient enfants, adolescents ou adultes) viennent toujours pour le parent dépendant et non pour eux. Eux clament haut et fort qu’ils n’ont pas de problèmes, qu’ils viennent pour aider leur parent qui boit. En fin de compte, nombre de ces enfants, tout comme l’alcoolique lui-même, ont une difficulté à tisser une demande en leur nom propre. C’est l’autre qui fait symptôme.
24Toutefois, en se présentant à la consultation (même pour un autre), ces enfants acceptent consciemment ou inconsciemment de questionner leurs modes de fonctionnements individuels, fraternels et familiaux mais aussi, leurs demandes que les parents ne boivent plus, soient heureux, bien dans leur peau ; qu’ils sachent, eux les enfants, ce qu’ils doivent faire pour que ces parents arrivent à être abstinents… etc. Or ces demandes, une fois énoncées, peuvent révéler un double espace :
- Dans un premier espace, le parent dépendant devient porteur d’énigme et n’est plus stigmatisé comme étant la personne affublée d’un vice, d’un manque de volonté face à l’alcool. En étant ainsi à l’écoute de cet au-delà de la demande, les enfants nous désignent un savoir qui leur échappe. Espace donc d’énigmes pour les enfants mais, dès lors, pour les parents et également pour nous.
- Le second espace, moins accessible d’emblée, est l’espace où les vécus et les expériences sources de souffrances vont être pensées, verbalisés mis en lien. Espace où les identifications en souffrances vont pouvoir se « désidentifier » ou se structurer autrement.
Amélie et Laurence, toutes deux jeunes adultes, arrivent pour la première fois à notre consultation en compagnie de leur père. Amélie vit encore pour quelques mois chez son père, le temps de terminer ces études et de trouver un appartement avec son petit ami. Ce qui l’inquiète et qui l’a amenée à rassembler sa famille, c’est l’alcoolisme de son père et surtout, ce qui va se passer pour lui lorsqu’elle quittera son domicile. Cette parole énoncée surprend totalement monsieur qui d’emblée nous raconte que sa fille cadette s’inquiète toujours de trop pour lui, qu’elle angoisse d’ailleurs pour beaucoup de choses. Monsieur était persuadé qu’il venait à ce rendez-vous pour aider sa fille qui appréhende trop son départ de la maison. Monsieur ne nie nullement consommer de l’alcool en trop grande quantité mais essaye de rassurer Amélie. Laurence, qui jusque là est plutôt restée en position d’observatrice, décide de prendre la parole pour dire qu’elle trouve que c’est déjà deux bonnes raisons de se réunir ici. Elle ajoute au passage qu’elle ne voit pas encore pourquoi elle doit être là, d’autant plus qu’elle n’est presque plus jamais présente à la maison de son père. Face à cette affirmation, monsieur et Amélie s’unissent en cœur pour lui dire qu’elle est on ne peut plus présente de part ses contacts téléphoniques quotidiens où elle leurs dit qu’elle se sent mal dans sa peau, qu’elle est déprimée…
25Au fur et à mesure des séances, de notre place de thérapeute, nous allons favoriser l’émergence d’une parole plus subjective c’est-à-dire d’une parole où la place du sujet sera davantage prise en compte. L’intérêt est de créer un discours qui permet l’émergence d’un symptôme au sens analytique du terme afin que ces enfants et ce père puissent être à l’écoute d’eux-mêmes, qu’ils puissent « s’approprier » leur souffrance et ainsi, travailler à alléger l’inconfort de celle-ci. Autrement dit, qu’ils puissent chacun repérer la place et la fonction dans leur économie singulière mais aussi dans la dynamique familiale.
26Lorsque nous écrivons que ces enfants ne se présentent pas en énonçant une demande articulée autour de leurs symptômes, c’est pour mieux souligner combien certaines représentations sont en souffrance chez eux. Si le symptôme est une nécessité pour permettre la subjectivation et le fonctionnement de l’appareil psychique, nous constatons que, chez une très grande partie de ces enfants d’alcoolique, lorsqu’un récit est présent, il échoue à faire représentation pour certains domaines précis. Ils sont tristes, angoissés, constamment dans l’agir mais sont incapables d’énoncer pourquoi il y a cette tristesse, cet angoisse, cet agir. Une fois ce ressenti, cet agissement énoncé, les mots semblent inadéquats pour le faire partager à l’autre ; parfois, ils sont incapables de nommer ce qu’ils ressentent, faute de conflits psychiques. C’est dans ce sens-là que nous nous autorisons à avancer l’idée que le symptôme, au sens analytique du terme, est voilé par l’alcoolisme parental.
27Pour l’écrire encore autrement, le symptôme peut être considéré comme une souffrance mentalisée liée à une représentation et un conflit pulsionnel ; or, c’est justement ça qui fait défaut dans la clinique qui nous occupe. Il s’agit donc d’aider à dégager ces enfants de cet impossible à penser dans lequel ils sont pris et qui nous englue transferentiellement par moment. En effet, les thérapeutes peuvent parfois ressentir un sentiment de « lourdeur » lors de certains entretiens. Ces fratries peuvent également mettre à mal notre appareil à penser. Inutile de dire que dans une pareille situation, le silence de l’analyste a pour conséquence de renforcer encore plus la difficulté à penser. Comme nous l’avons écrit précédemment, il n’y a pas toujours d’association libre possible ici dans le chef de certains de ces enfants. Suzanne Ginestet-Delbreil, dans son livre « La terreur de penser » avance l’idée que « c’est à l’analyste de chercher ces associations qui manquent, c’est-à-dire de se situer comme quelqu’un qui sait que cela a un sens alors même qu’il ne sait pas lequel [22] ». Une de nos hypothèses de travail est que cet impossible à penser dans certains domaines est à mettre en lien avec ce voile sur le symptôme qu’est l’alcoolisme parental. Un peu comme si cette suppléance alcoolique venait faire écran au trauma de structure.
Conclusions
28Pour conclure, nous souhaitons rappeler que c’est avant tout à partir d’un questionnement, au plus proche de la clinique, que notre équipe a mis en place ce modèle de prise en charge. La souffrance des enfants de nos patients qui sont confrontés à cet agir répétitif qu’est l’alcoolisme, nous a convaincues de l’intérêt de développer cette approche particulière autour de la fratrie.
29Au travers de ce travail, nous repérons que ces enfants, même devenus adultes, restent « otages » d’une autre scène familiale qui leur échappe et ce, même s’ils ne cessent de l’agir. Dans cette clinique singulière, nous sommes confrontés à des bouts de réel non symbolisés qui font effraction dans la chaîne signifiante.
30Le but de notre démarche vise avant tout à permettre aux personnes qui nous consultent un accès à la subjectivation grâce à la remise en circuit de la demande à l’autre et du désir singulier de chacun. Lors des séances, les membres de la fratrie expérimentent à nouveau cette réversibilité de la pulsion entre eux et avec nous. Notre position en tant qu’analyste est de favoriser cette circularité pulsionnelle et la création d’un discours articulable, partageable, concernant les origines et les fragilités éventuelles des différents membres de la famille. Cela a comme conséquence l’émergence de davantage de pensées sur leur propre parcours et une subjectivation fantasmatique propre. Par ailleurs, au décours de ce suivi en fratrie, un grand nombre d’enfants nous interpellent pour entamer un travail analytique individuel, signe pour nous d’une certaine appropriation subjective de leur histoire et de ces avatars.
Bibliographie
Bibliographie
- Abraham N. et M. Torok (1987). L’écorce et le noyau, Paris, Philosophie Flammarion.
- Chemama R. (2006). Dépression, la grande névrose contemporaine, Toulouse, érès.
- Chemama R. et B. Vandermersch (1995). Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Larousse-Bordas.
- Faoro-Kreit B., Hers D., Levaque C. et C. Anselot (2004). « Comment aider les enfants d’alcoolique ? L’apport de la fratrie. » Revista Analisis, vol. 3, n° 5, Medelin-Colombia.
- Fédida P. (2001). Des bienfaits de la dépression – Éloge de la psychothérapie. Paris, Odile Jacob.
- Freud S. [1915] (1968). « Pulsions et destins des pulsions. », in: Métapsychologie, Paris, Gallimard.
- Ginestet-Delbreil S. (1997). La terreur de penser – Sur les effets transgénérationnels du trauma, Plancoët, Entendre l’archaïque, Diabase.
- Lacan J. [1964] (1973). Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse, Le Séminaire, Livre XI, Paris, Le Seuil.
- Penot B. (2001). La Passion du sujet freudien. Entre pulsionnalité et signifiance, Toulouse, érès.
- Roussaux J.-P., Faoro-Kreit B. et D. Hers (2000). « La rencontre avec la femme alcoolique », in: L’alcoolique en Famille, Dimensions Familiales des Alcoolismes et implications thérapeutiques, Bruxelles, De Boeck Université.
Notes
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[*]
Cédric Levaque, psychologue, psychothérapeute analytique. Membre de l’Association freudienne de Belgique. Co-responsable de l’Unité Assuétude du service de Santé mentale Chapelle-aux-Champs, Bruxelles.
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[1]
Équipe composée de psychiatres, de psychologues et d’assistants sociaux spécialisés dans le traitement des assuétudes, en consultations ambulatoires ou en hospitalisation qui ont formé un réseau : « Réseau Dépendance Bruxelles Est ».
-
[2]
Lorsque nous parlons des enfants d’alcooliques, nous parlons du lien de filiation et non de cette période de la vie qu’est l’enfance. Ceux qui nous consultent sont tout autant des adultes que des adolescents et des jeunes enfants avec leurs parents.
-
[3]
Chemama, R., Dépression, la grande névrose contemporaine. Toulouse, érès, 2006. p. 34.
-
[4]
Ce point a déjà fait l’objet d’une publication précédente. Faoro-Kreit B., Hers D., Levaque C., Anselot C., « Comment aider les enfants d’alcoolique ? L’apport de la fratrie. » Revista Analisis, vol. 3, n° 5. Medelin-Colombia, 2004.
-
[5]
Freud S. (1915), « Pulsions et destins des pulsions. », in: Métapsychologie. Paris, Gallimard, 1968. p. 25.
-
[6]
Même si Freud a déjà introduit le terme de pulsion en 1905 dans les Trois essais sur la théorie de la sexualité, ce n’est qu’à partir de Pulsions et destin des pulsions qu’il développe et élabore ce concept qu’il sera par ailleurs amener à revisiter ultérieurement.
-
[7]
Lacan J., Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse – Le Séminaire, Livre XI (1964), Paris, Le Seuil, 1973.
-
[8]
Le grand Autre est le lieu où se structure les chaînes signifiantes qui permettent l’élaboration des structures langagières et le processus de subjectivation.
-
[9]
Freud élaborera cette logique linéaire à deux reprises. La première en 1915 dans Pulsions et destin des pulsions où Freud soutient l’idée que le but actif est premier par rapport au but passif. La seconde, neuf ans plus tard, dans son texte Le problème économique du masochisme, où il affirmera le contraire. En 1964, lorsque Lacan étudie la question de la pulsion, il ne tiendra pas compte du texte de 1924 et revisitera largement Pulsions et destin des pulsions.
-
[10]
Lacan J., Les Quatre Concepts fondamentaux de la psychanalyse - Le Séminaire, Livre XI (1964), Paris, Le Seuil, 1973. p. 162.
-
[11]
Ces questions, ces domaines psychiques qui sont problématiques pour les enfants d’alcoolique restent avant tout singuliers. A titre d’exemple, pour les uns, cela se traduira dans leurs rapports au corps, tandis que pour d’autres, cela se cristallisera autour de l’énigme de la paternité, de la maternité ou encore de la sexualité.
-
[12]
Ce manque-à-être est lié à la perte inéluctable de l’objet d’amour premier ainsi qu’au fait que l’humain est un être sexué d’un des deux types de sexe et non des deux.
-
[13]
Blandine Faoro-Kreit dans son article sur la femme alcoolique décrit la question de l’emprise pulsionnelle dans laquelle sont prises les femmes alcooliques. Roussaux J.-P., Faoro-Kreit B., Hers D., « La rencontre avec la femme alcoolique », in: L’alcoolique en Famille, Dimensions Familiales des Alcoolismes et implications thérapeutiques. Bruxelles : De Boeck Université, 2000.
-
[14]
Penot B., La Passion du sujet freudien. Entre pulsionnalité et signifiance. Toulouse, érès, 2001. p. 33.. »
-
[15]
Fédida P., Des bienfaits de la dépression – Éloge de la psychothérapie. Paris, Odile Jacob, 2001. p. 232.. »
-
[16]
Nous constatons que cette transmission des deux interdits est souvent escamotée, mise à mal, dans les familles où un membre présente un problème de dépendance.
-
[17]
Abraham N., Torok, M., L’écorce et le noyau. Paris, Philosophie Flammarion, 1987.
-
[18]
Penot B., La Passion du sujet freudien. Entre pulsionnalité et signifiance. Toulouse, érès, 2001.
-
[19]
Pour certaines personnes dépendantes, dire « je suis un alcoolique » est à entendre comme une suppléance symbolique et imaginaire. Cette suppléance favorise une sorte de nomination par défaut qui vient enfin les inscrire, les arrimer comme nous le rencontrons parfois dans les groupements néphalistes.
-
[20]
Le symptôme est un phénomène subjectif qui, pour la psychanalyse, constitue non le signe d’une maladie mais l’expression d’un conflit inconscient. Chemama R., Vandermersch, B. Dictionnaire de la psychanalyse. Paris, Larousse-Bordas, 1995.
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[21]
Cette affirmation devrait faire l’objet d’un autre article où il serait question d’articuler Réel-Imaginaire-Symbolique-Syntome-Alcool pour rendre compte de la problématique alcoolique.
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[22]
Ginestet-Delbreil S., La terreur de penser – Sur les effets transgénérationnels du trauma. Plancoët : entendre l’archaïque, Diabase, 1997. p. 67.