Notes
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[4]
Les aides techniques (publié 6 juillet 2016) : www.cnsa.fr/compensation-de-la-perte-dautonomie/aides-techniques
www.cnsa.fr/compensation-de-la-perte-dautonomie/aides-techniques/lobservatoire-du-marche-et-des-prix-des-aides-techniques. -
[5]
https://www.cramif.fr/handicap/handicap-aides-technique-cicat-escavie-asp
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http://rnt.over-blog.com/
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Pour rester simple et synthétique : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biais_cognitif
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Vidéo : D. Pradon, B. Guillon, S. Bouche, « Le fauteuil roulant : une aide technique à la mobilité ? État des lieux des innovations » – Colloque de l’Institut fédératif de recherche sur le handicap – 24 septembre 2015, université de Valenciennes.
« Il n’y a pas de bon vent pour celui qui ne connaît pas le port. »
Sénèque, Lettres à Lucilius
2 Ergothérapeute depuis quarante ans en établissement hospitalier et dans des structures médico-sociales pour enfants, puis en Centre d’information et de conseil en aides techniques (cicat) rejoint en 2001, je me suis orientée très tôt vers les personnes vivant des situations de handicap complexes, qui m’ont particulièrement touchée et mobilisée. Notre métier est mis en avant, parmi d’autres professions impliquées dans l’évaluation des besoins et la recherche de solutions en at (ca, afm, 2007). Cette problématique vaste et complexe, familière, est source de réflexions à partager pour améliorer nos pratiques.
3 L’objectif de l’ergothérapeute est de maintenir, de restaurer et de permettre les activités humaines de manière sécurisée, autonome et efficace. Le recours à des suppléances est central dans l’intervention auprès de jeunes atteints de lourdes déficiences souvent associées, physiques, cognitives, sensorielles, comportementales. Nous évoquerons ici la petite enfance où le handicap se vit et se partage dans l’intimité de la maison avec les parents, la fratrie, et dans la vie sociale, en courses, à la crèche, à l’école maternelle, au camsp, au parc… dans tous les moments où il se révèle, de jour comme de nuit, dans tous les lieux habituels ou occasionnels fréquentés. L’enfant a besoin d’une aide, à la fois humaine et matérielle, très supérieure et différente de celle que la dépendance et le manque d’autonomie induisent normalement à son âge. En lien avec des pathologies néonatales telles que la paralysie cérébrale, les incapacités vont se révéler progressivement dans cette période. Pour d’autres, des déficiences acquises surviennent sur des capacités qu’ils vont rapidement perdre, comme dans le cadre de maladies neuromusculaires évolutives. Les besoins vont croître au lieu de se réduire, au fur et à mesure de la croissance.
4 La décision d’acquisition des Aides techniques (at), souvent partagée, repose sur les parents. En amont, ils doivent choisir, seuls ou ensemble, aidés, conseillés, et parfois obligés. Pourquoi est-ce souvent si difficile de choisir les aides techniques qui apporteront à un petit enfant sévèrement handicapé les meilleures réponses face à des attentes multiples, à sa qualité de vie en famille et à des projets encore à définir ? Lors de notre intervention, nos difficultés et celles des parents se renforcent mutuellement dans la confrontation au marché, avec des différences de points de vue, de vécu et d’implication. Nous évoquerons d’abord les difficultés liées aux produits, au marketing, à la complexité des systèmes et à la complication des procédures de financement. Elles sont déjà importantes pour les professionnels habilités à fournir un conseil non commercial, en particulier les ergothérapeutes, les orthophonistes et les kinésithérapeutes. Mais les critères économiques et matériels du choix des at, si pénibles soient-ils, ne doivent pas focaliser toute l’attention, aux dépens des aspects humains, essentiels dans la décision. Ils sont liés à l’enfant se révélant handicapé, au parent vivant un vrai traumatisme, au professionnel impliqué, chacun avec ses attentes, ses aspirations, ses craintes, ses angoisses, ses limites (Gardou et coll., 1996).
5 Détailler les at, le marché et les procédures n’est donc pas le propos central. Les contours seront soulignés et le lecteur est renvoyé vers les collègues co-auteurs de cette revue, des sites de référence et des documents dont de précédents articles (Charrière, 2010 ; 2011). Il ne suffit pas non plus de s’arrêter au constat des problèmes pour s’en attrister ensemble : les at inutilisées, celles que les parents renonceront à acquérir, ces autres qui arrivent quand elles ne conviennent déjà plus. Avec le recul d’une expérience toujours pluridisciplinaire et de formations, en particulier sur le handicap et les ressources humaines, il me semble important d’approfondir certaines difficultés sur lesquelles individuellement ou collectivement nous avons prise, dont notre rationalité limitée et nos biais cognitifs agissant comme des filtres sur la situation. Après avoir mieux cerné, dans ce cadre, les concepts et les enjeux des at, éléments de systèmes complexes, nous nous centrerons sur ce qui se joue dans le choix et la décision, à commencer par le renoncement. Nous pourrons alors aborder des voies et des leviers d’amélioration du choix et de nos pratiques.
Le choix d’une at : concepts et enjeux pour des enfants sévèrement handicapés
Qu’est-ce qu’une Aide technique (at) ? Définitions, intérêts et problèmes
at, un terme aux contours mal définis
La première difficulté est terminologique
6 Dès qu’un produit Grand public (gp) ordinaire ne peut vraiment plus suffire, le recours à des aides dites techniques peut apporter des solutions aux problèmes concrets, émergeant de multiples situations de handicap. Le terme at, au sens le plus large, englobe tout le champ, le distinguant des autres formes d’aides, humaines et quelquefois animalières. La définition de référence est celle de la norme internationale iso 9999 des Produits d’assistance pour les personnes en situation de handicap [1]. Un référentiel avec un souci d’exhaustivité et une classification sont importants pour retrouver l’information dans des bases de données non commerciales, pour comparer et légiférer. Évolutive et intégrant de façon continue les progrès -technologiques du marché, la classification iso 9999 : 2011 répertorie depuis plusieurs décennies « tout produit, instrument, équipement ou système technique utilisé par une personne atteinte d’un handicap ou d’un désavantage social, fabriqué spécialement ou existant sur le marché destiné à prévenir, compenser, soulager ou neutraliser la déficience, l’incapacité ou le handicap ». Le terme at a été remplacé en 2007 par produit d’assistance afin d’harmoniser les langues internationales – en anglais : assistive product.
7 Entre produit gp et at, de nombreux produits standard entrent dans une zone intermédiaire, comme le Time Timer permettant de visualiser le temps qui reste. at simple et essentielle dans certains troubles du comportement, son principe se retrouve dans des produits gp à vocation pédagogique ou utilitaire. Un parent d’enfant autiste propose aussi une application intégrant l’at à un smartphone, utilisable dès le cp.
8Certains sont d’emblée créés en Conception Universelle – Universal Design –, dans une double approche fonctionnelle et sociale, pour faciliter l’usage par tous. Ils prennent en compte les besoins des minorités, les réponses profitant, au final, au plus grand nombre. John Elvesjö [2], un des fondateurs de l’entreprise suédoise Tobii spécialisée dans le contrôle au regard d’outils informatiques, assure : « Je suis certain que le tracking oculaire fera partie de l’équipement standard des téléphones, des voitures, des ordinateurs, des téléviseurs. » Sa société poursuit en parallèle des recherches, notamment sur les applications de suppléance et d’études dans le domaine de l’enfance.
9 La classification iso 9999 : 2011 des Produits d’assistance est indispensable. Onze catégories de base et des subdivisions ont été retenues selon la fonction principale suppléée. La rééducation des capacités, l’appareillage (hors dispositifs implantés), les soins et la protection personnelle, la mobilité personnelle, la communication et l’information, la manipulation des objets et des dispositifs, les loisirs correspondront, dans notre cadre, à de nombreux besoins. Viendront nécessairement les aménagements et adaptations des logements et d’autres lieux, comme l’accessibilité et la sécurité. Son codage à 6 chiffres facilite la recherche dans les bases de données non commerciales :
10 – Handicat, site du cicat de Lille, Hacavie : www.handicat.com
11 – cerahtec, site du cerah : http://cerahtec.invalides.fr
12 – eastin, le réseau européen d’informations sur les aides techniques www.eastin.eu
13 Ainsi, un siège de bain ou de douche pliant prend le code 09.33.03 se décomposant en :
14 09 : produit d’assistance aux soins et à la protection personnelle
15 09-33 : permettant de se laver, se baigner et se doucher
16 09-33-03 : chaises de bain/douche (etc.)
17 Il n’y a pas d’autre subdivision selon l’âge ou l’usage d’une baignoire ou d’une douche. La catégorisation doit s’admettre, même si d’autres usages coexistent et priment parfois, comme un lit servant de plan de change.
Les at recouvrent un large champ de produits industriels, artisanaux ou bricolés
18 Les parents cherchent généralement par eux-mêmes avant de découvrir les possibilités d’évaluation et d’essais ainsi que leurs procédures. Plus les déficiences sont lourdes, plus les besoins sont nombreux et plus la nécessité d’un matériel spécifique s’impose, parfois très précocement.
19 Prenons l’exemple des transats de bain avec soutien de tête. Ceux qui permettent d’adapter la posture inclinée, au niveau du dossier et de l’assise, sont des produits très appréciés des familles d’enfants dépendants. Ce plébiscite est lié à l’âge et au fait que les parents sont plus jeunes et donc plus aptes à les porter, même si beaucoup souffrent ou souffriront du dos. La recherche s’oriente d’abord vers un produit juste plus grand que le produit gp. Il est, au final, très peu vendu en France. Face à des besoins globaux et complexes, les solutions se diversifient et se modularisent.
20 Un support accessoire peut élever le transat pour ne pas avoir à se baisser, le transformant en chaise haute à roulettes. Replié aisément à plat, il s’embarque en voiture, et se pose au sol, dedans ou dehors, au jardin comme à la plage. Il devient au sens courant un siège modulable dans son ergonomie et un produit « ouvert » dans son usage.
21Lors d’essais comparatifs, le transat élévateur de type mécanique est régulièrement considéré comme plus fonctionnel par les parents qui découvrent ce produit alliant le bain sécurisé et l’aide au portage. Mais devant choisir et compte tenu de l’ensemble des investissements nécessaires, ils s’orientent souvent vers le produit le plus ouvert avec ses fonctions supplémentaires. C’est le cas également, par exemple, du siège conçu dans une optique multifonction, s’installant dans la baignoire, aux wc et dans la douche, et utilisable en chaise haute, sous réserve d’acquisition de nombreux accessoires, eux aussi coûteux.
22 D’autres alternatives existent. Le plan de toilette relevable, fixé au mur, sert aussi de plan de change, mais il ne permet qu’une douche allongée. Le transat, posé sur un système élévateur électrique, monopolise la baignoire ou nécessite davantage de manipulations et d’espace de rangement. Le Sur-bain Athéo, conçu par un parent qui a ensuite développé son entreprise, peut être réalisé sur mesure. Il se démonte et s’embarque assez facilement en voiture. Il existe en version chariot douche roulant.
23 Ajoutons dans la zone intermédiaire entre produits gp et at, pour les plus jeunes, des détournements d’objets, comme une piscine gonflable pour bébé placée dans un grand bac à douche, dans ou au-dessus d’une baignoire, et quelques bricolages ingénieux familiaux, comme la création d’une surbaignoire à partir d’un petit bac à sable ou d’une baignoire acrylique assez légère, astucieusement découpée. Dans une salle de bains inadaptée, en attente d’une autre solution, une maman a fabriqué un vrai hamac dans un solide rideau ajouré, s’immergeant dans la baignoire et utilisé sous surveillance. Le Concours des Papas Bricoleurs et Mamans Astucieuses (pbma), aujourd’hui Fab Life, organisé par Handicap International et la société Leroy-Merlin, cible particulièrement les enfants. Les propositions fréquentes autour du bain et du change démontrent l’importance de faire de ce temps partagé un moment de plaisir aussi confortable que possible, de part et d’autre, retardant l’arrivée du matériel spécialisé.
L’at est souvent un système emboîté à d’autres, matériels et humains
24 Elle peut être très simple, comme une orthèse fixant la cuillère à la main. Mais très souvent, ce sont les éléments qui peuvent être sommaires, pas l’at complète. Un trou peut en faire partie, comme la réalisation d’un évidement postérieur sur un corset-siège pour mieux placer le bassin et tirer les vêtements. Puis, par association, son socle peut s’attacher au fauteuil roulant, qui lui-même s’ancrera, pour les plus grands, dans une voiture aménagée. Une tablette de fauteuil roulant peut recevoir une aide de communication, un contacteur se fixer à l’appui-tête, etc. L’accessoirisation enfantine, à la fois élément marketing et vecteur puissant d’acceptabilité, en fait partie.
25Les at sont des systèmes orientés vers un but, faits d’éléments reliés entre eux, à l’enfant et à l’environnement physique et humain. Les parties se combinent par juxtaposition, association, emboîtement, etc., avec d’autres objets ordinaires ou spécifiques, d’autres personnes. L’élément est important, mais ses liens aux autres le sont plus encore, source de nombreuses difficultés et de toute notre attention.
26 L’activité à laquelle elles contribuent est elle-même indissociable de nombreuses autres, en particulier les tâches de base : portage, installation, positionnement, communication, etc. Jouer suppose de voir, écouter, manipuler… Les isoler est une étape théorique dans l’étude d’une situation dont la globalité et la complexité s’abordent en analysant les liens. Ainsi une at permettant de se déplacer est une aide de mobilité, et en même temps une aide de communication fondamentale, car elle permet d’aller vers l’autre, de le quitter, de l’éviter, de s’isoler si besoin. Ce faisant, l’enfant va « expérimenter la séparation et se détacher peu à peu de la figure protectrice » (Barbot, 2008). Comme le crayon du dessinateur, l’at est le simple outil d’un projet qui repose sur sa qualité.
27 Poursuivons l’exemple de la mobilité, tellement essentielle à ces enfants. L’at est une interface. Elle relie l’enfant, le sol – les sols différents –, l’adulte installateur ou pousseur s’il y a lieu, le jouet ou l’aide technique de communication embarqués et leurs supports. Un grand soin doit être porté au positionnement statique et dynamique de l’enfant, au degré d’inclinaison du corps. La plupart nécessitent une coque sur mesure avec, si besoin, des maintiens du tronc et des membres. D’autres se satisfont d’un produit multiréglable. La spécificité des roues et un blocage de rotation, si nécessaire, permettent de garder le cap. Des freins l’immobilisent. Des butoirs de protection aux angles aident à se dégager des obstacles. Certains sont étudiés pour être transportés en voiture. Le cahier des charges soucieux du détail est difficile à réaliser. Il oriente vers un fournisseur, appareilleur ou revendeur de matériel médical, guidant le choix de la technicité, du meilleur modèle. Il précise les points de vigilance lors des essais.
28De nombreuses at sont des interfaces entre deux utilisateurs ou plus. La poussette sert également au parent à transporter les courses ou le frère, debout sur une planche à roulettes. Le moyen de Communication améliorée et alternative (caa) est aussi l’outil de celui qui parle, d’où l’impératif de ne pas choisir uniquement à partir de l’évaluation des seules déficiences, incapacités et aptitudes de l’utilisateur final (Cataix-Nègre, 2012).
29 L’interaction at-personne fonctionne bien si l’outil est accepté par l’enfant et par l’adulte, et donc acceptable. Or, le parent peut ne pas se satisfaire d’une fausse verticalité. Il peut inversement ser réjouir quand le thérapeute verra « en transparence » des articulations qui souffrent. L’enfant appareillé de ses aides techniques, à une distance intime, doit être regardable, touchable, acceptable. On ne peut toucher l’autre sans être touché soi-même, exprime Pascal Prayez, soulignant la dimension affective et relationnelle du toucher. Cela concerne aussi l’auxiliaire, l’enseignant, la baby-sitter qui installent ou posturent. Tous n’y sont pas préparés.
30 N’évoquons pas trop vite un rejet systématique, un deuil qui ne peut se faire, quand les familles donnent aussi à voir une envie viscérale de positiver malgré la situation, d’additionner des moments de bonheur de leur enfant, comme la joie de Vianney, se propulsant sur son mini--fauteuil roulant manuel hors norme, fabriqué par sa maman et sa tante ergothérapeute. Tout porteur ou trotteur étaient inutilisables. Ce touchant ralliement autour d’un enfant handicapé se multiplie en France comme à l’étranger, en Belgique avec les Bricoleurs du cœur, aux États-Unis où un programme national de recherche, Go Baby Go, de conception et de sensibilisation communautaire, offre des voitures modifiées aux tout petits enfants à mobilité réduite, et tant d’autres. Autres pays, autres regards, autres usages, avec le ZipZac, très cher et non importé des États-Unis. Depuis peu, le Scoot Ride introduit un modèle commercial, jambes tendues.
Un produit grand public peut-il être considéré comme une at ?
31 Le problème se pose dans le cadre des at finançables. La loi ouvre le droit à leur prise en charge et délimite les critères. Le problème sera différent avec le type de financement, entre l’Allocation d’éducation de l’enfant handicapé (aeeh) et ses compléments, et la Prestation de compensation du handicap (pch [3]), plus couvrante mais aussi plus rigoureuse sur le cadre. Un objet courant utilisé d’une façon ordinaire n’est pas une at. Prenons le problème de prise en charge récurrent aujourd’hui des tablettes informatiques. Elles sont demandées pour des activités d’éveil, de communication et pédagogiques, ainsi que pour l’apprentissage d’un accès tactile, au doigt ou au poing, y compris dans le cas de handicaps sévères. Si l’enfant utilise une tablette pour compenser l’incapacité à écrire, à parler, à manipuler des cartes ou des pions de jeux de société virtuels, c’est une at. Mais il est possible que seuls les logiciels spécifiques soient reconnus finançables. S’il n’a pas besoin pour cela d’adaptation, et s’il utilise normalement une application standard, comme Fingerpaint, l’Ardoise magique ou la Dictée muette Montessori, même avec un décalage d’âge ou le besoin d’une orthèse, ce sera considéré comme un produit ordinaire ou de confort. S’il a besoin d’une interface d’entrée, comme le joystick J-Pad de Pretorian sur un iPad, assorti d’un gros contacteur et d’un bras support articulé, les accessoires seront des at finançables. Or doter un enfant de 4 ans d’un iPad n’est pas accessible à tous les foyers qui s’orientent plutôt vers un Androïd. Cette complexité requiert le besoin de conseils neutres au plan commercial. Une évaluation des besoins et une argumentation écrite par un ergothérapeute permettent à la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (cdaph) de statuer pour l’attribution de la pch.
32 Certaines at sont des Dispositifs médicaux (dm). Ces dm, conçus à des fins médicales, sont inscrits sur la Liste des produits et prestations remboursables par l’Assurance maladie (lpp), consultable sur son site www.ameli.fr. Ils couvrent l’audioprothèse, l’optique médicale, -l’orthoprothèse, la podo-orthèse, le matériel médical d’aide à la vie – dont les Sièges modulables et évolutifs (sme), les lits médicaux, les coussins et matelas de prévention d’escarres –, et les Véhicules pour les handicapés physiques (vhp) dont les fauteuils roulants, les tri--cycles et les poussettes. La lpp fait rentrer les vhp dans l’appareillage, comme l’orthoprothèse, d’où l’implication forte du Centre d’études et de recherche sur l’appareillage des handicapés (cerah) qui a pour mission la recherche en matière de handicap moteur et valide l’inscription de certains matériels, en particulier les vhp, à la lpp. Un cadre législatif précis réglemente tout le processus de délivrance et le financement des dm par l’Assurance maladie, ainsi que la prise en charge complémentaire de certains par la pch.
33 Le marché est très concurrentiel et animé dès lors que les produits sont finançables. Il est bien décrit dans de nombreux documents depuis les rapports Lecomte (2003), Gohet, en passant par celui de l’igas (Blanchard, 2013) jusqu’aux plus récentes études de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (cnsa [4]). En particulier, l’Observatoire du marché et des prix des aides techniques est missionné pour le suivre et améliorer les connaissances et l’information.
Les difficultés d’accès aux at sont constatées par les plus hautes instances administratives
34 La nouvelle Convention d’objectifs et de gestion (cog) entre l’État et la cnsa marque une nouvelle étape dans le renforcement des missions de celle-ci, dont le soutien aux politiques d’accès aux at (cnsa, 2016). La cog pointe le défaut de régulation de l’offre, qui « a pour principales conséquences son opacité pour les utilisateurs potentiels, la complexité des dispositifs de solvabilisation qui mobilisent différents financeurs, la longueur des délais et l’incomplétude des barèmes de prise en charge ». Ces constats permettent d’envisager des moyens correctifs. Les jeunes parents qui y sont confrontés actuellement ont besoin de l’appui de professionnels médico-sociaux expérimentés.
35 La question des bonnes pratiques des fournisseurs se pose suffisamment pour que la Fédération des prestataires de santé à domicile et, récemment, Cap’Handéo proposent des référentiels auxquels adhérer. Concilier éthique et marketing prend une dimension particulière dans un marché qui diffère de sa définition ordinaire quant à ses objectifs. Les fournisseurs doivent savoir constater les besoins du consommateur et, en amont, les prévoir pour adapter l’offre à la demande. La distinction réside dans le fait ou non de stimuler ou de susciter des besoins, qui n’en sont pas vraiment, de produits superflus et coûteux, ou d’encourager un renouvellement qui n’est pas encore justifié. Mais, hormis des pratiques clairement exagérées, est-ce si simple ? Le handicap exceptionnel d’un enfant, dans sa rareté et sa sévérité, amène à des solutions tout aussi exceptionnelles qui suscitent l’envie dès lors qu’elles sont connues. Le rejet de demande de financement est ressenti comme une double peine, une non-reconnaissance qui renforce encore cette envie. La réponse passe forcément par la possibilité d’essais comparatifs, y compris de produits haut de gamme, dans une neutralité commerciale qui recentrera sur le besoin. Ainsi, il est normal que de petits enfants atteints de pathologies neuromusculaires évolutives tirent un vrai bénéfice des fauteuils roulants électriques les plus innovants qu’ils essaient, puisque cette innovation répond à leurs incapacités multiples. Tous n’en ont pas besoin, cela dépend des difficultés environnementales de chacun.
36 La publicité, amalgamée souvent à l’information, dénie les risques pour inciter à un comportement. Les produits ne mettent pas en avant leurs faiblesses et leurs incompatibilités. Les modes d’emploi explicites se lisent rarement avant l’achat. Les défauts perçus à l’usage doivent remonter vers les fabricants.
37 Le secret professionnel s’impose à chacun, fournisseurs et ergo--thérapeutes, en même temps que doivent se communiquer des renseignements suffisamment précis pour améliorer la qualité du service rendu. Maîtriser les limites n’est pas facile. Des attitudes du marketing relationnel se remarquent parfois, telles que le tutoiement rapide des parents et l’utilisation de leur prénom, l’assimilation à des difficultés personnelles, pour devenir l’interlocuteur unique. D’autres misent davantage sur la collaboration parents-équipe pluridisciplinaire--fournisseur, et l’orientation de leur client vers un service médico-social ou un centre de conseil comme Escavie [5], s’il n’y a pas d’équipe de suivi.
38 La primauté du marché va aux at bénéficiant de prises en charge, du fait des besoins multiples des familles, et parallèlement, de celui des entreprises de ne pas attendre trop longtemps des commandes hypothétiques. Un tel marché, dit de niche, où la demande est faible, se développe donc peu face à de longs délais connus et aux incertitudes liées à la croissance et à l’évolutivité. Le choix tend plutôt vers les produits sans reste à charge ou grand public, dont beaucoup, à cette période de l’enfance, sont encore adaptés par les proches.
39 Plus la terminologie se précise, et, paradoxalement, plus le langage se charge d’incohérences par tous les usages approximatifs ou erronés. Le marketing porte une responsabilité, poussant volontairement parfois très loin les assimilations à des intitulés de produits pris en charge. Ainsi, des sièges-autos adaptés sont régulièrement prescrits comme sme selon l’indication des fabricants/importateurs. Un pédiatre de ville sait rarement qu’une telle prescription interdira durant trois ans celle d’un corset-siège, puisque le sme est son alternative depuis le Solaris, conçu pour les enfants polyhandicapés. La base de données de référence cerahtec indique, concernant les sièges-autos, que leur prise en charge lpp est inconnue. La Haute Autorité de santé (has), qui évalue les dm, se saisit régulièrement de modifications et de précisions des lignes génériques de la lpp. Dans ce champ, une procédure est en cours pour distinguer et protéger les produits de positionnement de qualité, tout aussi impératifs pour cette population et pour clarifier cette pratique anormale de prescription [6]. La reconnaissance comme dm ou at finançables des sièges-autos spécifiques et/ou des adjonctions nécessaires est essentielle pour ces enfants, sans quoi ces produits indispensables pourraient ne pas ou ne plus obtenir de prise en charge, ni par la lpp ni par la pch. Or ces enfants ont besoin de produits crash-testés répondant aux normes en vigueur et aux critères les plus exigeants, comme aujourd’hui l’impact latéral, tant que c’est possible. Et dans les cas exceptionnels où les réponses ne peuvent qu’être hors normes, avec une procédure légalement autorisée claire, doit permettre de les prescrire (Charrière et Guillot, 2012). Que dire en attendant aux familles et aux médecins ?
40 Plus le champ s’étend et se distend par des intérêts commerciaux concurrents, plus les choses se compliquent. Et plus la tâche du législateur, qui se doit d’être précis en évitant les abus, devient complexe et sa législation difficile à utiliser.
at, un terme longtemps imprononçable
41 Le terme d’at est difficile à exprimer de part et d’autre et à s’approprier pour les parents, en particulier avant l’annonce du diagnostic et la compréhension de sa signification au quotidien. Ce long cheminement douloureux est associé, implicitement et objectivement, au handicap et au terme « enfant handicapé ». On préfère évoquer une chaise, une poussette ou un jouet « adapté ». À l’étranger, revient le terme moins sensible d’« enfants à besoins spécifiques » – special needs children. Les mots du champ de l’appareillage, tels que corset-siège, chaussures orthopédiques, déambulateur, sont souvent les premiers à avoir un impact. Vécus comme réparateurs et/ou contraignants, ils ne sont jamais neutres et plutôt en lien avec la kinésithérapie. Il faudra certainement adapter le premier corset-siège à l’environnement et à l’activité, opter pour une aide de mobilité particulière aux multiples accessoires. Puis choisir un autre mobilier, en particulier le lit, une table à encastrement, et tant d’autres objets spécifiques comme une cuillère coudée, etc. Au fur et à mesure vient la nécessité de rencontres avec un ergothérapeute et la confrontation au marché complexe gravitant autour du milieu médico-social. Ce sont essentiellement des Revendeurs de matériel médical (rmm) et d’autres fournisseurs, fabricants et/ou importateurs. Le contact s’établit en magasin, dans la structure médico-sociale où ils sont conviés, et de plus en plus sur Internet, voire sur des salons comme Autonomic, Handica, et pourquoi pas Rehacare en Allemagne. Chacun apprend ce langage et aussi à l’adapter selon qu’il s’adresse à l’enfant, à un parent, et/ou à l’administration qui réglemente et finance, aux multiples professionnels avec leurs champs découpés de compétences, à l’aide de vie, à l’éducatrice, etc. Lus au fil de blogs parentaux, le « Motilo de compèt » de Timéo, la « moto » de Lucia et le bison d’Enora, agrémentés de photos et de vidéos en situation, sont les termes familiers des parents quand ils s’adressent à leurs enfants et aux proches. Quant à la prescription, elle distinguera l’appareil modulaire de verticalisation et de déambulation de la selle de déambulation sur support roulant. Ces mots complexes sont sans importance pour l’enfant, compliqués pour les adultes, mais essentiels pour ceux qui devront collaborer pour préciser, prescrire et financer la bonne assistance à la marche, celle qui lui procurera du plaisir, de l’activité, sans nuire à sa croissance.
Des outils répondant à des objectifs spécifiques et concrets
42 Les at donnent accès à de multiples activités, par et avec l’enfant, à la maison ou ailleurs, seul, en famille ou avec d’autres enfants et adultes. Lorsqu’il s’agit de jeunes enfants, le jeu, la communication et les activités pédagogiques seront aussi importants que les activités de la vie ordinaire, le soin à l’enfant malade et la rééducation. Les objectifs et les critères doivent être suffisamment précis pour être « opérationnalisés ».
Nous prendrons comme exemple d’activité l’accès au jeu dans le contexte de handicap extrême
43 Spontanée, universelle, droit fondamental des enfants, l’activité leur est interdite en tout ou grande partie. Jouer va permettre à cet enfant de prendre du plaisir en étant acteur et non spectateur. En ergothérapie, par des essais conjugués à une évaluation des capacités résiduelles, on cherchera l’accès le plus large, qui ne se limite pas aux jouets de table. Les situations-problèmes peuvent être liées à des vacances, ou des événements, comme Noël ou l’anniversaire. Ainsi, le plaisir de l’eau peut être sécurisé par un gilet de flottaison adapté à la taille. Les luges, les skis donnent lieu à de nombreuses adaptations ludiques ou pratiques. Le fauteuil roulant peut se cacher sous un déguisement, comme le Hatem’coptère du Concours Fab Life 2016, transformant le fauteuil en avion et l’enfant en aviateur !
44 L’installation est essentielle. Nous le savions il y a trente ans, en concevant le Cosmodule, un système d’installation pour jouer conçu avec l’aide de la société coram, dans le service de neurologie infantile de l’hôpital de Bicêtre. Ses modules se combinaient différemment pour maintenir l’enfant et le jouet dans une relation fonctionnelle efficace, assis ou à genoux. Il appartenait au projet Cosmojouet dédié aux handicaps physiques les plus sévères, primé par la Fondation Coloplast. Imaginez un espace comme un énorme jouet dans lequel l’enfant entre et trouve tout autour de lui de quoi utiliser ses moindres capacités optimisées dans le but de jouer, comme un siège sauteur suspendu ou des contacteurs déclenchant des effets lumineux. L’aidant qui guide son déplacement ou ses gestes et qui l’installe devait être attentif à ses envies et à son rythme.
45 L’accès aux jouets électriques ou virtuels demande au minimum un mode on/off par un contacteur unique. Le jeu ciblera un objectif : l’éveil, l’apprentissage, l’exercice d’une capacité particulière. L’expérience, renforcée de formations, de visites de salons, éliminera des solutions vouées à l’échec. Des essais plus spécifiques sont à organiser. L’initiative unique du Centre d’expertise et de ressources nouvelles technologies et communication (c-rnt [7]) de l’apf est à souligner. Connu pour son blog et ses fiches d’information, il propose à ses abonnés, parmi des kits de prêt, des valisettes d’alternatives techniques à tester, comme des jouets adaptables, des modes d’accès informatiques, des moyens de caa, etc.
46 L’enfant peut aussi indiquer la tâche à un aidant, par un code pictographique de communication. En feuilletant ensemble des catalogues, l’adulte perçoit ce qui capte son intérêt. Ainsi, Martin voulait jouer au jeu de stratégie Pièges, avec son plateau plein de trous, ses petites billes et les tirettes à actionner pour faire disparaître celles de l’adversaire. J’ai créé pour lui mon premier code de communication « circonstanciel » glissé dans la boîte de jeu. Ce bon moment partagé, à multiplier, est une opportunité de jeu à plusieurs, pour que le petit groupe de copains ou la fratrie puissent agir ensemble. Ils apprécieront peut-être aussi de partager une activité ordinaire, comme une recette de cuisine. Les contacteurs peuvent se connecter à une prise commandée, par exemple un Smoothie de bj Live !, sur laquelle un robot mixeur est branché. La participation sociale est en marche.
47 Jouer seul avec une console de jeux, une tablette ou un ordinateur permet aussi des moments d’activité indépendante pour que papa et maman puissent simplement souffler.
48 La différence doit être représentée dans les figurines et les personnages. L’association Toy Like Me milite pour que les fabricants, comme Playmobil, en proposent. Les princesses ou les héros peuvent aussi être handicapés.
49Des vignettes cliniques illustreront mon propos.
50 • Le puzzle géant de Noémie
51 Noémie veut participer à la réalisation collective d’un puzzle géant aimanté, sur tableau mural quadrillé. Barbara, son ergo--thérapeute, réalise un code de communication pour l’occasion, afin qu’elle montre à son auxiliaire les actions à réaliser à sa place. Elle appuie sur un bouton enregistré : « C’est mon tour ! » L’aidant tire une pièce, la fait tourner devant ses yeux. Noémie indique du regard, vers la droite, la gauche, et, avec son code, le numéro de la colonne au tableau et la couleur de la ligne. S’y ajoutent quelques pictos de métacommunication : « Tu triches, Je me suis trompée, J’ai gagné, Youpi, J’ai perdu, Stop, Je veux recommencer », et quelques messages habituels d’urgence, dont un pour demander l’outil complet de caa qu’elle apprend à utiliser.
52 • La licorne de Céline
53 Âgée de 5 ans, Céline est paralysée cérébrale, quadriplégique. Un schème involontaire de mouvements globaux entraîne ses mains de chaque côté du visage au repos. Il se majore quand, assise dans son corset-siège, elle fait un effort d’articulation, ou tente de toucher un objet. Ses yeux vifs sont un atout puissant de sa communication non verbale. L’assise un peu basculée en arrière, elle contrôle mieux sa tête soutenue par un cale-nuque en demi-lune.
54 La voici captivée par le jeu qu’elle découvre avec son éducatrice : un mini-golf posé sur sa table à encastrement, que nous avons conçu et bricolé pour elle. Tout est parti d’un gadget d’écolier : un bâtonnet avec une gomme au bout, en forme de club de golf. « On pourrait la fixer sur sa licorne ! » La balle viendra d’un vieux roulement à billes. Cette tige frontale était, il y a trente-cinq ans, l’unique accès direct à son clavier d’ordinateur muni d’un guide-doigt, pour dessiner ou s’initier à l’écriture. Elle aimait aussi qu’on y accroche un aimant au bout du fil pour « pêcher » ses petits poissons magnétiques. Le parcours de golf fut adapté aux mouvements de balayage qu’elle contrôlait avec sa tête. Un copain valide attiré par les rires fut initié aux règles simples et au tour de rôle, maniant un autre club du bout des doigts. Chacune de nous était dans son rôle. Je préparais Céline à l’accès à l’ordinateur pour la communication et la scolarité. Placée derrière elle, j’effectuais une manœuvre de décontraction de ses membres supérieurs, relâchant dès que possible la contrainte douce, en me faisant oublier. L’éducatrice, face à elle, était dans le sien. Elle expliquait et riait avec les enfants, leur faisant vivre un instant de vrai partage où ils se regardaient autrement et témoignaient de leurs capacités. Un instant furtif qui aura coûté beaucoup de ressources et devra être renouvelé pour prendre du sens.
55 C’est aussi en jouant que les enfants peuvent laisser entrevoir les répercussions pénibles voire traumatiques du handicap sur leur vie affective et relationnelle. Le psychologue va avoir besoin lui aussi d’outils spécifiques, ou de jouets adaptés pour les mettre en situation, par exemple en jouant au docteur, au kiné, au papa et à la maman, l’enfant distribuant les rôles. Il peut ainsi les écouter dans leurs formes d’expression volontaires et involontaires, et apporter des réponses de nature psychologique et non pas fonctionnelle. Françoise de Barbot (2008) a souligné l’originalité et l’importance de cette approche : « Pour qu’un jeune sujet émerge, il est important qu’il soit entendu et que son désir soit reconnu. » À l’aide, notamment, du logiciel Ordi Théâtre, conçu avec l’université de Namur dans un projet initié avec le professeur de psychologie Michel Mercier, ces enfants pouvaient manipuler des marionnettes virtuelles à l’aide d’un contacteur adapté, dont un personnage en fauteuil roulant, un loup, etc. Ils pouvaient décider d’enregistrer la scène pour la revoir et la reprendre plus tard. Le jeu permettait d’évoquer la frustration de ne pas pouvoir « faire », l’impuissance et le sentiment de culpabilité qui ont partie liée (Barbot, 2008). Devenue obsolète, aucune application, aujourd’hui, ne répond à une cible aussi spécifique.
L’at est-elle seulement une aide ?
Elle est facilitatrice sous conditions : la première est d’être plus acceptable et moins stigmatisante
56 L’acceptabilité des aides techniques peut contribuer à celle de la vie avec un handicap. L’acceptation est fragile et peut être facilement remise en cause par des événements. Le soin porté aux enfants se poursuit dans l’attention au produit, qui doit rester propre, présentable et efficace.
57 Certains produits induisent plus que d’autres une gêne, voire un rejet. La banale sangle qui relie les branches de lunettes n’est pas plus stigmatisante que celle qui relie des gants dans les manches de manteau. Des aspects objectifs marquent fortement la différence, comme le fauteuil roulant, la licorne. D’autres sont subjectifs. Le regard est sensible aux réactions ressenties comme négatives. L’enfant utilisateur perçoit celles venant des autres, en particulier de ses proches, qui eux-mêmes sont sensibles à ce qu’il paraît être : isolé dans sa poussette, fatigué de jouer ou douloureux dans son verticalisateur. Ce n’est pas l’at en elle-même, mais le comportement inhabituel induit ou la vue de l’enfant prolongé de son at, qui sont souvent inacceptables. Ainsi la maman de Damien a-t-elle remplacé sa poussette ordinaire trop petite par une autre marquant son handicap. Ce petit garçon marchant, autiste, manifeste un comportement agité ou auto-agressif dans un environnement bruyant. Elle est moins mal à l’aise pour sortir depuis qu’elle peut le sécuriser par le harnais et le signifier handicapé, réduisant les regards pesants de personnes croisées.
58 Un appareillage, un vph n’auront rien de stigmatisant dans un milieu spécialisé. Ils peineront pour certains à s’introduire en milieu ordinaire, même si une Auxiliaire de vie scolaire (avs) gère l’installation. Un ordinateur individuel pourra même être ressenti comme stigmatisant par l’enfant qui ne veut pas marquer sa différence.
59 Le plaisir des derniers pas, des dernières calligraphies de l’enfant souffrant de maladie dégénérative, est à respecter. Son attitude diffère du jeune paralysé cérébral de naissance, qui n’ayant connu que l’at l’apprécie d’autant. Michèle, atteinte d’amyotrophie spinale, ne s’investit pas dans l’apprentissage d’un ordinateur en vue du cp, pour prendre encore du plaisir à poursuivre, tant qu’elle le peut, celui d’une écriture manuelle très appliquée. Pour qu’elle accepte l’at qui finira par s’imposer, les deux sont poursuivis et l’alternative lui est proposée en situation.
60 Le smartphone utilisé comme outil de caa porté au cou, est interdit ordinairement dans l’école. Tout comme la tablette informatique fixée sur le fauteuil roulant, ils ajoutent à la différence d’autres problèmes, ceux de la responsabilité en cas de casse ou de vol et de la règle éducative générale. Les aides de mobilité feront craindre que l’enfant ne se blesse ou blesse un autre. Ces risques réels viennent s’ajouter aux risques perçus par l’acquéreur ou l’adulte qui s’en sert. Tout achat en induit, mais ici s’ajoute une dimension émotionnelle, allant de l’espoir énorme à la répulsion.
61 Un enfant lourd à porter le sera tant que ses parents le pourront. Leurs bras se tendent pour un corps à corps, un câlin qui sont bien autre chose que du maniement de charge. J’ai évoqué un lève-personne pour de jeunes enfants à obésité morbide, des mamans enceintes ou physiquement faibles, mais, sauf exception, il compliquait le problème. Les mamans ont trouvé, pour quelque temps encore, un soutien humain ou des solutions simples, comme un tabouret à roulettes. En se propulsant assise, avec Aurélie sur ses genoux, sa maman transformait le portage en jeu.
62 • Le verre à anses de Marine
63 On apprend de ses erreurs, comme de vouloir montrer les progrès de Marine, petite fille très dystonique, à sa maman qui ne demandait pas à les voir. Elle s’est trouvée là au moment du goûter à la halte-garderie. Bien installée en corset-siège devant une table à encastrement, « appareillée » d’un verre à anses, bras repliés, coudes serrés, Marine était capable depuis peu de porter un verre à moitié rempli à ses lèvres et de boire. Placée derrière elle, je la guidais, mes mains proches des siennes. Cette victoire récente s’était préparée dans la bonne humeur, le fait de faire gicler l’eau déclenchant ses rires. Sa maman, face à nous, la dévisageait, décontenancée. Trop tendue sous ce regard maternel, Marine renversa brutalement le verre dans un spasme et fondit en sanglots. Ni l’une ni l’autre n’étaient préparées. Rose ou moche, les caractéristiques du verre n’avaient aucune importance pour la maman, davantage pour Marine, comme le choix de son sirop. Une déchirure s’était faite dans le mécanisme de défense de cette maman, la forçant à voir ce qui l’effondrait. Il n’y avait pas d’envie ni de demande d’at pour la maison, où elle n’utilisait pas non plus son corset-siège. Avec l’aide de la psychologue, nous avons compris que ce que demandait sa maman, ce n’était pas d’arrêter cet apprentissage de l’autonomie. Mais la différence était trop insupportable. Au domicile même, elle continuait de la nourrir comme un tout-petit. Ma joie manifestée avait certainement été vécue comme culpabilisante pour cette maman qui mit longtemps à revenir.
L’aide ne doit pas devenir une gêne technique
64 Par souci de simplification, les at sont dites facilitatrices et répondant à des besoins à évaluer (site cnsa, 2016). Mais beaucoup génèrent en même temps des craintes, des contraintes, des efforts -psychologiques ou physiques pour l’enfant utilisateur final et pour ses proches. La question reste sensible, quels que soient l’âge et les incapacités à compenser. De nombreuses études ciblent les personnes âgées, où l’enjeu socio-économique est reconnu massif, mais il l’est de façon aussi importante et spécifique pour le jeune enfant.
65 L’at doit être utile sans contrepartie d’inconfort ou de douleur, ou bien ce n’est pas une aide technique. Dans un système complexe assimilant autant d’éléments, le moindre point névralgique empêche à lui seul son fonctionnement. Le produit devient une « gêne technique », cause de surhandicap. Le manque du bon accessoire, un mauvais réglage conduisent aussi à de la maltraitance. Un corps s’abîme à être mal installé. Un enfant s’éteint dans la passivité à regarder les autres, si déjà il peut les voir. L’absence de stimulation, de contact relationnel, d’expériences mobilisatrices revient à nier une part de son humanité (Barreyreet coll., 2011).
66 Tout produit a ses intérêts et ses limites. Aujourd’hui, la bonne motilité des yeux d’un enfant comme Céline serait assez précise pour contrôler au regard un ordinateur et un monde d’applications ludiques et pédagogiques. Sous réserve de beaucoup de problèmes encore de fiabilité et de coût. Mais ils n’en seront plus demain, quand la commande oculaire équipera les systèmes informatiques de base, comme, désormais, la reconnaissance vocale ou une voix de synthèse, depuis peu enfantine. Le contrôle par les mouvements de tête s’améliore également. Le très efficace Trackir et son réflecteur ne sont pas encore dépassés, dans notre cadre, par la reconnaissance de certains mouvements déjà intégrée dans des smartphones. Mais ces deux accès ne sont pas sûrs pour une commande de fauteuil roulant électrique, secoué et sous le soleil, à la différence des commandes spéciales mentonnières ou occipitales.
67 Même si l’enfant est captivé par l’activité virtuelle, faut-il le priver du plaisir sensori-moteur du jeu réel ? Le temps durant lequel les jeunes yeux fixent l’écran doit être borné, ce qui en laisse encore aux « tiges frontales ». Mais parce qu’elles encadrent le visage, elles doivent être particulièrement jolies, bien conçues et confortables, voire customisées, pour devenir moins stigmatisantes. Un orthoptiste peut conseiller pour ajuster l’embout à la fonction binoculaire. Toute orthèse fonctionnelle, même bien adaptée, peut être mal utilisée et demander des efforts inappropriés.
68 Il ne faut pas se satisfaire de l’efficacité d’un mode de contrôle unique. Multiplier les accès limite le risque d’appauvrir davantage les capacités motrices déjà contraintes par l’immobilité que l’appareillage statique induit.
Le risque de non-usage, de mésusage et d’abandon est bien réel
69 C’est d’abord une tendance naturelle. Un matériel sophistiqué est souvent sous-utilisé, comme nous le faisons avec nos outils multi--médias ou électroménagers, sans approfondir le mode d’emploi. L’accès aux notices, en particulier pour les produits sensibles ou de nouvelle technologie, est aujourd’hui grandement facilité par Internet, avant même l’acquisition, y compris en vidéos. Encore faut-il les consulter, transmettre l’information et le site aux aidants et s’assurer que tous ont acquis la compétence. Ce fait a été étudié pour les sièges-autos des enfants valides, mal installés dans des proportions alarmantes. Il se majore avec le handicap (Charrière et Guillot, 2012).
70 Se former, dans le cas de produits complexes, comme les fauteuils roulants électriques, est une évidence, et pourtant… (Pereira-Milhet et coll., 2012). Plutôt qu’un principe de précaution interdisant l’usage aux plus jeunes, mieux vaut suivre la démarche inverse de l’équipe du camsp Janine Levy, relatée en 2003 dans le film de A. Casanova et M. Saladin, Courir après les pigeons ! La formation de base du cerah, imposée aux prestataires, devrait se poursuivre par des formations complémentaires, nécessairement de plusieurs jours, proposées notamment par des fabricants, comme Invacare [8], aux prescripteurs et aux préconisateurs. Les limites du matériel reculent alors. Oui, on peut bloquer un fauteuil à l’allure des premiers pas, le doter d’une commande tierce-personne revenant à prendre les mains de l’enfant valide et d’un dispositif d’arrêt d’urgence, à distance, que tout parent rêverait parfois d’avoir ! Cela suppose du temps, un financement, de la pratique régulière, et d’oser prendre la responsabilité d’intervenir sur les réglages d’usine. Les rmm et les préconisateurs engagés dans ce choix sont peu nombreux. Aujourd’hui, la formation de base n’est obligatoire que pour les gérants, et les bonnes pratiques validées, comme le référentiel Cap’Handeo, se satisfont de très peu de formation par rapport à la somme de connaissances à maîtriser. Mais c’est un premier pas encouragé par les grandes associations, comme l’apf et l’afm, et notre profession.
71 • Le corset garchois de Nadjim
72 Nadjim, 4 ans, très hypotonique, porte un corset garchois. Il n’aime pas les transports en voiture et le manifeste. Sa maman pense à un nouveau siège-auto, or l’évaluation démontre qu’il convient encore. Nadjim supporte bien le corset dans sa poussette et dans son corset-siège. Nous l’installons dans les différentes situations sans les vêtements qui masquent le problème. Le rebord dur du corset descend un peu trop bas au niveau du pli de l’aine. Le coussinage du siège augmente la flexion des hanches. Les soubresauts et le freinage transforment l’inconfort en douleur qu’il exprime en refusant la situation. L’orthoprothésiste a simplement refait la découpe inguinale. Un conseil valable pour tous a été donné : ne pas mettre de vêtements trop épais qui empêchent le harnais de bien se positionner.
Réflexions sur le choix et la prise de décision d’acquérir l’at
73 Choisir, c’est renoncer. Comment clore une voie de progrès possible, face à l’incertitude et l’angoisse ? Le temps du choix devrait être celui du dialogue consensuel, de la collaboration et de la confiance entre la famille, le médecin, le spécialiste paramédical ou l’équipe -pluridisciplinaire, et le ou les fournisseurs, l’enfant y étant associé. Il devrait permettre de préciser des besoins et, en regard, de définir parmi différents produits le plus fonctionnel, répondant au mieux et au plus juste prix. La réalité montre d’autres fonctionnements, source de difficultés qui surhandicapent l’enfant. Repérées, elles sont autant de leviers d’amélioration dans des situations complexes, sous réserve de bien les identifier et d’une approche collective. « Là où il y a une volonté, il y a un chemin » (Groupe Térence, 1993).
Les différents choix concourant à l’acquisition
Le choix du produit se distingue de celui du fournisseur
74 Un même besoin peut orienter vers des produits et, en conséquence, des fournisseurs très différents.
75 Prenons un exemple simple, un tee-shirt porté sous un corset dont les coutures irritent la peau. Retourné, il forme souvent des plis. Un modèle original, sans couture, près du corps et respirant, acheté en magasin de sport devient une at. Un autre conçu pour cela et pour être joli sans corset, revendu sur le marché spécialisé, comme le tee-shirt Interface Corset bébé (Hop’Toys), doit être une at finançable. Un produit correspondant au « maillot pour orthèse du tronc avec col et mi-manche 100 % coton sans couture latérale », inscrit à la lpp et revendu par l’appareilleur, peut faire l’objet d’une prescription médicale et ne sert qu’à cela, se cachant sous l’appareillage.
76 La liberté de choisir son prestataire est un principe conventionnel fondamental de l’Assurance maladie.
Des choix administratifs lourds de conséquences vont se poser parallèlement pour le financement
77 L’aide de la mdph ou d’une assistante sociale est indispensable pour comprendre les enjeux du choix entre le bénéfice du complément d’aeeh et la pch, l’intérêt d’une complémentaire santé ou d’autres aides, les mécanismes de tiers payant spécifiques des différents financeurs.
Qui choisit, qui doit choisir ?
Les parents sont les premiers impliqués
78 Le handicap, partagé, est subi comme un traumatisme brutal par les parents. Or ce sont eux qui vont devoir décider et, en amont, s’impliquer dans le choix d’un matériel qui va le dévoiler un peu plus. Ils sont au début de constats réitérés de déficits isolés ou associés, cognitifs, moteurs, sensoriels, comportementaux… de leur évolutivité pour certains, et de leurs conséquences. Les histoires personnelles ne se ressemblent pas, mais elles ont des éléments en commun dont la compréhension éclaire notre intervention en ergothérapie, auprès de l’enfant et des familles.
79 Ils sont face à un langage compliqué que d’autres maîtrisent pour eux. À l’âge des premières prescriptions d’appareillage, si le choix n’est pas consenti, la décision d’acquérir, scellée par un acte, l’envoi d’une demande, d’une prescription ou d’une commande, fait encore violence. Elle est culpabilisante de l’avoir prise, et tout autant de ne pas bien faire. La décision doit se partager. Les fournisseurs ne s’y trompent pas, en récupérant tous les documents à envoyer par leurs services administratifs aux bons organismes, habitués aux oublis ou aux actes manqués. Un peu d’autonomie s’envole. Mais est-ce là qu’elle s’exerce vraiment ?
80 Nous avons collectivement et individuellement une responsabilité de tout faire pour éviter la sensation de manipuler, d’influencer, d’imposer, et de négocier entre nos points de vue. Comme le remarque Typhaine Mahé dans une étude sur le vécu des parents handicapés, accepter par défaut ou partiellement, jusqu’à être obligé, revient à subir et à ne pas pouvoir établir une relation de confiance avec les professionnels. Les défenses se renforcent. La critique, la revendication peuvent prendre le pas sur une communication constructive. Si la confiance manque le projet est bien difficile à établir.
81 Le choix se détermine aussi par la prescription médicale et la préconisation des évaluateurs paramédicaux. Le libre choix et l’autonomie parentale se confrontent à l’autorité médicale ou administrative. La confiance naît là, ou bien elle se perd dans un manque de temps, d’écoute, d’informations, un abord trop compliqué, des mots flous. Aujourd’hui comme hier, des méthodes promettent la réparation espérée, s’appuyant parfois sur la désespérance. Notre esprit doit pourtant être sans cesse ouvert, quêtant de vrais travaux de recherche. Car pour l’avoir trop fermé et par manque d’information, nous avons certainement retardé l’importation d’at qui ont montré ensuite tout leur intérêt. Citons le positionnement, encore à la peine en France malgré la forte cohésion d’équipes de médecine physique et de réadaptation organisées désormais en association, Positi’F [9], et soutenues solidement par l’afm. Autre exemple : le matériel associé à l’éducation conductive Petö, long à s’introduire. Des collègues belges de centre pour enfants nous en ont démontré l’intérêt. L’état d’esprit où l’éducation doit faire sens tout le temps peut profiter à d’autres méthodes et à nos pratiques françaises où les prises en charge sont prioritairement individuelles. En collectif, piloté ici par l’orthophoniste, puis là par l’ergothérapeute, ensuite par l’éducateur, à tour de rôle conducteur et accompagnant, l’enfant apprend à participer à son déshabillage et à l’habillage aux moments de la journée où il est utile de le faire, à déambuler pour aller au réfectoire, etc. Le matériel particulier se trouve distribué çà et là. Et que penser des méthodes ukrainiennes, comme Kozyavkin et de leurs matériels, sur lesquels on nous questionne, et de tant d’autres détaillés sur le web ? Deviennent-ils désirables parce qu’ils sont inaccessibles ?
82 Ici et là des pratiques concernant les at sont à encourager ou à proscrire. Les outils d’intervention spécialisée nécessaires à l’exercice de l’ergothérapeute ou de l’orthophoniste, en particulier, ne sont pas des at finançables, mais il faut un budget de fonctionnement conséquent. Or des collègues n’accèdent pas librement à Internet et aux télé--chargements d’applications même gratuites, voire ne disposent que de matériel de récupération ou peu coûteux. Ne faisons pas acquérir une aide à technologie avancée à un enfant sans qu’il l’ait réellement à disposition, en prolongeant pendant de longs mois un apprentissage saupoudré inefficace. Organisons-le autrement.
83 N’engageons pas de procédures de financement juste au moment où les enfants quittent une structure de suivi, sans travail collaboratif avec la nouvelle, alors que l’AT doit aussi lui être adaptée.
84 Des modèles étrangers peuvent ici aussi nous aider, comme la démarche canadienne, où l’ergothérapie se développe au niveau doctorat, ou en Suisse, beaucoup moins cloisonnée dans son approche, à l’exemple des collaborations entretenues à la Fondation suisse pour les téléthèses (fst).
Une part de choix doit revenir autant que possible à l’enfant
85 L’enfant se découvre à la fois handicapé et capable sous conditions, stigmatisé parfois. À sa façon, il comprend ce qui se dit ou ce qui s’exprime, sur ce sujet comme sur d’autres, l’aide apportée ou refusée, la gêne enlevée par les aidants ou non. Si le choix final ne lui revient pas, il peut avoir prise sur lui. Il le vit ; il a des attentes qui doivent être écoutées, et son vécu saisi. Il dira son inconfort s’il sait que des solutions seront apportées. Sinon, il peut souffrir en silence, habitué. Il exprimera peut-être aussi son souhait de ne pas être perçu comme différent, ce qui peut arriver beaucoup plus tôt qu’on ne pense (Barbot, 2008).
86 Lui demander son avis est, au-delà de l’évidence, un devoir. L’article 12 de la Convention relative aux droits de l’enfant mentionne : « Les États parties garantissent à l’enfant qui est capable de discernement le droit d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité. » Concernant les soins : « Les enfants, y compris les plus jeunes, devraient être inclus dans les processus de décision, d’une manière compatible avec l’évolution de leurs capacités. Ils devraient être informés des traitements proposés, de leurs effets et de leurs résultats, y compris sous une forme adaptée et accessible aux enfants handicapés. » La Convention balaie tous les secteurs de ce droit touchant à son intégrité, à l’éducation, aux loisirs, etc.
87 • Le trot’lapin suspendu de Malik
88 Taper dans un ballon de foot ! Voilà le choix d’activité, l’envie, qui brillait dans les yeux de Malik quand il regardait son frère et ses copains dans le jardin. Il déambulait dans les allées, soutenu par une sorte de culotte dans son verticalisateur mobile. Il pouvait entrer de plain-pied dans le logement, mais pas rouler sur la pelouse ou jouer au foot du fait de la barre horizontale qui reliait les roulettes avant. Un cadre de marche fut bricolé, avec quatre pieds supports très obliques, de grosses roulettes, et un soutien du tronc très près du corps. Il ne passait plus les portes, pas plus que le kart à pédales de son frère. Sa satisfaction venait du contact de ses pieds avec le ballon qui obéissait peu mais devenait la cible à rejoindre. Dans ce plaisir sensori-moteur, les copains, les règles, n’avaient pas d’intérêt pour lui, hormis celui qui lui renvoyait le ballon. Son at devenait un but mobile que Malik gardait avec fougue. L’herbe devint son terrain d’aventure, sous réserve de la proximité d’un adulte, car les irrégularités jusqu’au petit trottoir devenaient une source de prise de risque où il pouvait se dépasser, expérimenter.
89 Donner son avis ! Les moyens de caa trouvent là une justification primordiale. Encore faut-il que soient à disposition, appris, et que les mots utiles soient mis dans leurs occurrences, au-delà de la déclinaison des fruits et légumes et autres choix à intérêt limité (Cataix-Nègre, 2012). Des mots simples peuvent dire des réalités bouleversantes, auxquelles des réponses peuvent être apportées. « Maman – prendre – médicaments – Papa – sortir. » Sortir, c’est ça ? Non. Partir ? Non, bouche. Vomir ? Oui. Une des plus dures reformulations de ma carrière. La joie de Paul d’être compris était en décalage total avec ce qui se racontait, sans manifester aucune émotion négative. Juste de l’amour partagé dans le désespoir et le handicap extrêmes. Des mots/pictos simples pour des solutions qui ont pu être abordées avec les parents, comme de pouvoir souffler et de s’y autoriser.
90 La vie doit devenir acceptable, exprime Élisabeth Zucman, dans un livre dédié « aux mères courage, et aux pères courage aussi » (2007).
Comment choisir ?
91 Parmi de nombreux points sensibles, le rapport de l’igas (Blanchard et coll., 2013) souligne le manque d’information et de possibilité d’essais avant acquisition, concluant : « Force est donc de constater que les utilisateurs français d’aides techniques ont beaucoup d’excuses à se voir dicter leurs choix par les fournisseurs. »
L’excès d’informations est aussi préjudiciable que le manque
92 Il perd davantage le néophyte que la personne déjà initiée. L’expert en profite le mieux.
93 Un souci similaire existe en entretien, quand nous allons recevoir une famille inconnue dont il faut mesurer aussi le degré de connaissance et de maîtrise des outils d’informations. Un long contact -téléphonique permet de préparer le rendez-vous, l’un et l’autre devant un ordinateur relié à Internet, quand la famille le peut. Appels et rendez-vous seront renouvelés si nécessaire.
94 La recherche sur le réseau mondial Internet et dans les bases de données est devenue une clé pour celui qui sait utiliser leurs moteurs de recherche et leurs fonctions avancées sur Internet. La consultation de sites d’informations neutres et commerciales, scientifiques, etc., s’enrichit de ceux d’associations de familles et des blogs personnels. Ils ajoutent des visages à une expérience forcément limitée, aussi longue soit-elle, et des réflexions qui n’émergent pas dans une rencontre professionnelle ordinaire. Les enfants s’appellent Camille, Roxane, Lou, Thaïs, Jade, Romain, Emily, Loline, Théo, Éva… J’invite les stagiaires de nos écoles à s’en imprégner tout autant que des cours magistraux. Les parents échangent aussi via les associations, comme le blog Interparents de l’apf-bip.
95 Les moteurs généralistes comme Google sont intuitifs et puissants, mais très influencés par le marketing. Néanmoins, avec l’habitude, énormément de réponses et de contacts sont à portée à tout moment. Les sites étrangers d’at pédiatriques permettent d’observer d’autres pratiques et de relativiser des coûts. Ainsi en Australie, Special Needs Solutions [10] est à mettre en perspective avec la base de données Assistive Technology Australia [11]. La recherche de textes, d’images et de vidéos, la traduction automatique en toutes les langues, permettent de trouver des avancées mondiales. Comme le KidWalk, répondant au besoin de mobilité autonome mains-libres à l’école, promu par Christine Wright-Ott en Californie, ou le nouveau Pacer Rifton. Des crash-tests de sièges automobiles spécifiques se visualisent aussi sur YouTube, etc.
96Tentons de trier aussi la fausse information, l’effet de publicité ou un discrédit non fondé écrit dans un blog ou une liste de diffusion, et relayés sur Internet. C’est devenu le domaine par excellence des rumeurs amplifiées, de l’erreur, du mensonge, de l’illusion, des fausses personnalités mythomaniaques devenues cybermythomaniaques à audience démultipliée. Ils influencent la demande ou entraînent le rejet.
Ce marché confronte des fournisseurs, des consommateurs, des décideurs institutionnels
97 L’utilisateur d’at ou son représentant sont des consommateurs « presque » comme les autres. Ils ont des droits, comme le détaille l’Association des paralysés de France, avec le soutien de l’ufc-Que Choisir (Balsera et Chavance-Nicolas, 2007), régis par le Code de la consommation. Citons le bénéfice d’un délai de rétractation en vente à distance, dont par Internet, et l’obligation de délivrance conforme du fournisseur.
98 Lorsqu’il s’agit de dm, les procédures se trouvent dans le Code de la Sécurité sociale, la lpp et des conventions entre les rmm et l’Assurance maladie. Il peut exister des instances, comme le Groupe des relations avec les professionnels de l’appareillage (grapa) à la cramif qui contrôle la qualité de prestation de grand appareillage. Elles peuvent intervenir à la demande des assurés, des Caisses primaires d’assurance maladie ou des associations de personnes handicapées pour aider à résoudre les litiges entre assurés et fournisseurs.
99 Professionnels et famille découvrent un marché éclaté, avec parfois plusieurs intermédiaires, dont l’importateur, entre le fabricant, généralement étranger, et l’acquéreur. Il décide de ce qui entre en France, sur des critères forcément économiques. Nous comprenons les intérêts gagnants-gagnants, mais un importateur exclusif d’une marque peut refuser un produit ou retarder l’introduction du dernier modèle à son catalogue, alors que nous pouvons apprécier son intérêt sur des salons internationaux comme Rehacare, ou sur Internet.
100 La vente à distance se développe dans une démarche concurrentielle offensive. Les fournisseurs de proximité qui n’ont pas la double casquette soulignent le paradoxe de devoir en même temps avoir les prix les plus bas et procurer le meilleur service par des essais comparatifs, au domicile notamment. Un produit qu’ils demandent au fabricant, souvent avec un coût, sera renvoyé même s’il satisfait, dès lors qu’un achat ne peut se décider immédiatement compte tenu du temps pour réaliser le montage financier. Des sociétés organisent de nouvelles pratiques, comme le contact avec des familles proches, prêtes à vanter le produit sur les réseaux sociaux et les sites.
D’autres limites humaines entravent la prise de décision
101 En embrassant la complexité à l’échelle mondiale, nous voici avec un champ de possibilités et de problèmes trop ouvert pour une seule intelligence et une temporalité humaine. Notre rationalité est limitée, comme l’observait Herbert Simon, par l’insuffisance d’information, par nos biais cognitifs, bien connus en gestion de ressources humaines, et par l’incapacité à gérer trop d’informations. Autant que d’évaluer l’autre, l’utilisateur, la question devient : qu’est-ce qui me voile la réalité ? Ces biais [12] sont nombreux et plus subtils que le seul effet de publicité : effets de récence, de primauté, de simple exposition, préjugé, autocomplaisance, etc. Par exemple, en réfléchissant à certaines interventions, ne reconnaissons-nous pas en nous-mêmes une illusion de savoir, un effet de halo, c’est-à‑dire la sélection d’informations allant dans le sens d’une première impression que l’on a cherché à confirmer ? Ils s’ajoutent à d’autres aspects de nos personnalités.
102 Les parents y sont aussi confrontés. Concernant plus particulièrement les professionnels, je n’égratignerai que mon métier, mais ces dysfonctionnements humains ne nous sont pas spécifiques. Les schèmes de pensée (J. Piaget) d’un ergothérapeute sur les at évoluent tout au long de sa carrière où il deviendra certainement de plus en plus apte à différencier et à sous-catégoriser, à remettre en question ses catégories en fonction de critères qui lui échappaient avant. Comme l’enfant, par l’apprentissage et l’action, il continue, par l’expérience et la formation, d’ancrer des patterns, des modèles de réponse. S’il ne recherche pas lui-même de multiples points de vue, les informations probantes et scientifiquement prouvées se mêlent à la déformation professionnelle, qui est aussi biais cognitif. La phrase bien connue attribuée à A. Maslow, dans sa théorie de l’instrument, prend ici particulièrement son sens : « Si votre seul outil est un marteau, alors tout vous paraît être un clou. » Il y a une quarantaine d’années, nous n’avions que quelques outils et beaucoup moins de problématiques. Installer des enfants dans des coques moulées en plâtre était innovant, c’est devenu inacceptable. Nous découvrions avec enthousiasme les codes pictographiques canadiens, la première machine Carba de caa de Jean-Claude Gabus, fondateur de la fst, et le premier Macintosh avec son petit écran noir et blanc. Alors que nous croulons sous des milliers d’applications dont des magistrales, nous n’en utilisions que quelques-unes, simplissimes par rapport à aujourd’hui, mais avec des objectifs aussi ambitieux. Nous connaissions la même envie de ce qui se fait de mieux, la même satisfaction de la mise à disposition, alors que les usages étaient restreints du fait d’un matériel rare et cher. Et la même critique s’exprime sur les coûts quel que soit le niveau de suppléance apporté, comme l’application de synthèse vocale. Ils sont perçus comme trop chers même divisés par 10 ou par 100. Et gratuit, le produit fait douter de sa qualité.
Faciliter le choix des at : d’autres leviers d’amélioration
Axe produits et progrès technologiques
Les aides techniques sont utiles ou ne sont pas des aides techniques
103 Du produit d’assistance standard au matériel très adaptable, avoir le choix est précieux. La gêne technique doit être proscrite. Le regard croisé des fabricants, préconisateurs, prescripteurs, parents, chercheurs, est nécessaire. Nous le vivons au cicat Escavie. Le sujet mérite des recherches aussi bien technologiques qu’en sciences humaines et sociales. L’Institut fédératif de recherche sur les at pour les personnes handicapées (ifrath) y contribue, ainsi que le cerah, qui nous apporte des réponses concrètes et accessibles.
Il faut s’ouvrir à des solutions nouvelles scientifiquement probantes ou validées
104 Technique et at avancent de concert. Ainsi, une prothèse de main fonctionnelle, un bouton de joystick, un porte-verre sont désormais réalisables par impression 3D. L’exceptionnel rentre dans le quotidien des ingénieurs et des ergothérapeutes, des familles aussi, avec les accès aux ateliers collaboratifs de fabrication Fab Lab. Nous sommes déjà demain, comme le démontrent Jean-Paul Departe, ingénieur au Centre de Kerpape à Lorient, Guillaume Hessel à l’afm, militant de l’accessibilité numérique, ou Guy Ehretsmann (2015), ergothérapeute formateur, expert dans l’habitat. L’univers des at entre dans une autre dimension, mais avec prudence, comme l’explique sur YouTube Louise Bassieux, dans son mémoire de fin d’études d’ergothérapie.
105Imaginons encore… Des équipes mpr se saisiraient d’outils comme l’Headpod avec des moyens d’étude spécifiques, comme elles le font pour l’analyse quantifiée de la marche, ou les nappes de mesure de pression adaptées au positionnement. Des neuropsychologues et des orthoptistes se pencheraient sur le contrôle oculaire, pour comprendre certains troubles et collaborer à des projets de communication inimaginables sans le support de l’image et d’Internet. Citons en particulier la longue expérience de Judy Larivière, ergothérapeute spécialiste, relatée par l’Association québécoise du syndrome de Rett, exploitant en caa le mouvement naturel des yeux de fillettes à partir de 2 ans pour communiquer. Nous entendons aussi les réserves de ceux qui craignent en France un engouement irraisonné. Le processus est toujours le même. Comment en sortir, si ce n’est par l’expérimentation ?
106 L’innovation véhiculée par Internet questionne et nécessite des réponses claires. Que penser des exosquelettes pour jeunes enfants [13] comme celui développé par le Spanish National Research Council ? Que dire de la combinaison Molli Suit, du nf-Walker, de l’Innowalk, et de tout un matériel d’entrainement musculaire thérapeutique associé à l’activité ? Sont-ils efficaces ou non, expérimentaux, utiles à la rééducation ou en tant qu’at ? Dans ce cadre, où en est la commande par la pensée, dite Brain Computer Interface (bci) ? Les recherches disséminées au niveau mondial sont loin d’être validées et accessibles sur le terrain [14] qui en espère beaucoup. Mais des essais de matériel pointu peuvent se multiplier et se relier, dans une démarche documentée par une importante bibliographie, y compris étrangère, et des forums reliant les testeurs, afin de gagner du temps.
107Les essais organisés avec les fabricants y participent. Nous avons pu ainsi démontrer qu’un fauteuil roulant électrique six roues pouvait être monté dossier replié, à un étage élevé sans ascenseur, à l’aide d’un monte-escalier électrique utilitaire, l’enfant étant porté. Dans des situations de divorce où un aménagement double est impossible, ou dans le cadre de maladie à haut risque vital où le déménagement n’est pas envisagé, tout fauteuil roulant électrique junior assurant un positionnement adaptable n’est donc pas exclu en intérieur.
Axe intervention professionnelle en ergothérapie
Améliorer l’information/conseil
L’accès gratuit à une information fiable, pertinente et précise doit être défendu (ca, afm, 2007)
108 L’information technique, descriptive, comparative, est la base, mais elle doit aller plus loin. « J’ai des problèmes à toutes vos solutions. » Cette citation, attribuée à Woody Allen, résume bien notre vision des at. Des problèmes naissent forcément de l’usage et du cycle de vie du produit. L’information doit les cibler, ainsi que les conditions et les contraintes environnementales, les expliquer, pointer les insuffisances, les défauts et les limites. L’information commerciale se professionnalise. Les questions récurrentes que les familles nous posent et les nôtres sur tel produit ou sur telle méthode devraient amener des réponses vite accessibles d’un large collectif sans intérêt commercial, organisé, ouvert à des informations scientifiques et à un débat de bon niveau.
109 Pléthorique, elle se charge en désinformation. Les tests comparatifs et les retours d’usage non publicitaires vérifiés, en font aussi partie. Les alternatives sont ainsi réduites et les essais plus efficaces. Les quelques études produites avec les associations de consommateurs, comme l’ufc-Que Choisir ou l’inc-60 millions de Consommateurs, ont toujours été saluées par notre profession, montrant une voie à systématiser.
110 Les ouvrages les plus techniques se consultent en bibliothèque. Mais les normes qui détaillent la qualité de ces produits n’y sont pas. Beaucoup d’incompréhensions se clarifient pourtant dans leur lecture. Elles s’achètent obligatoirement à moins de se déplacer à l’afnor à Saint-Denis pour les consulter, parcimonieusement accessibles dans nos milieux.
111 Les structures de conseil et d’évaluation, non commerciales, d’accès gratuit ou pris en charge, ont fait leurs preuves, dans la globalité et l’expertise (Seuret, et coll., 2011). Elles ont besoin de se renforcer. Ce sont les cicat et les centres experts, parmi lesquels le cep de Strasbourg, Escavie, Hacavie, le cicat du gihp Aquitaine, le c-rnt, la Plateforme nouvelles technologies de l’hôpital de Garches, les équipes hospitalières pouvant réaliser des bilans et accompagner ce type de projets. Ainsi, à Escavie, des ergothérapeutes généralistes sur les questions fréquentes et habituelles de vie quotidienne, sont spécialistes après des années de pratiques et de formations, dans des domaines pointus. Claire Magne nous a ainsi rejoints récemment pour couvrir le champ des at ciblant les déficiences sensorielles, visuelles et auditives.
112 Envoyer son patient ou son client vers de telles plateformes, comme on recourt en médecine aux pôles spécialisés, appartiendra à l’ergothérapie de demain. Articuler le modèle économique et les facteurs humains n’est pas le plus facile. Certaines mutent quand d’autres disparaissent. La perte du cicat fondateur, le Comité national français de liaison pour la réadaptation des personnes handicapées (cnrh) en 2002, et en mai 2016, du service de référence d’aide au choix du fauteuil roulant de la Fondation Garches [15], rappellent la fragilité de nos modèles les plus remarquables.
Pour être à la hauteur de leur projet, ces structures doivent en permanence anticiper la demande
113 Pour les mises en situation écologique, à côté des at et aménagements, le besoin d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs suppose d’autres outils parmi lesquels les photos et les enregistrements audiovisuels, le chronomètre, l’inclinomètre, etc. Notre œil ne sait pas à l’avance où il doit se focaliser. Assis à table, Samuel avait besoin de segments jambiers pour contrôler l’appui au sol de ses membres inférieurs et non d’un simple repose-pieds. Il était instable et ses bras ne pouvaient pas se libérer de l’appui sur la table qui crispait ses poings. Ce fut évident en revoyant la vidéo prise à distance. Plus le handicap est sévère, plus les modes de recueil sont à inventer et à adapter, comme les pistes d’essais de vhp, les outils de mesure des troubles posturaux, ou les tests de pointage sur clavier et d’appui sur contacteurs. Ils sont comme les divers cadrans d’un « tableau de bord ». En essais comparatifs complexes, comme en circulation ou en entreprise, l’événement entraîne le besoin de regarder tel ou tel autre. Il est intéressant d’avoir un lieu d’évaluation qui permette d’explorer finement les choix. Il n’est pas réaliste au plan économique de disposer de toutes les at, ni de versions uniquement récentes. Mais l’ensemble doit permettre d’orienter vers tout ce qui est envisageable.
114 Les rapports concernant les at et les avis portés en haut lieu se succèdent, sans que la voie collaborative initiée par les cicat soit suffisamment redynamisée et renforcée. L’inégalité de traitement entre personnes âgées dépendantes et personnes handicapées s’exprime de plus en plus souvent (cnsa, 2016). Elle existe déjà entre les enfants à handicap extrême aux besoins multiples et coûteux et ceux qui ont un nombre réduit de déficiences. L’égalisation des chances garantissant les mêmes droits et obligations aux concitoyens, inscrite dans la loi Handicap de 2005, est toujours attendue. Loin de son esprit, des parents poursuivent, comme avant son introduction, les demandes d’aides privées et bénévoles, utilisant les réseaux sociaux, au plein sens de la quête philanthropique. Parallèlement, la vente des produits d’assistance sans garantie se développe sur les sites d’occasion, contre toutes les règles de prescription, à commencer par celles d’hygiène et de désinfection imposées aux rmm.
115 Les idées qu’avait portées en son temps l’ancienne Association nationale de l’appareillage des caisses d’assurance maladie (anacam) renaissent. L’acquisition d’at peut s’envisager dans l’optique du développement durable et de l’économie circulaire. La cnsa soutient actuellement des projets de mise en place ou d’étude de faisabilité de circuits de recyclage d’at. Le modèle économique à inventer n’est pas simple pour s’intégrer au marché français. D’autres pays se posent autrement les questions de fond. Ils témoignent d’un inintérêt d’être propriétaire d’at à durée d’usage très inférieure à leur durée de vie. Et surtout, ils actent la nécessité d’obtenir les at choisies à l’issue de l’évaluation ou de l’apprentissage, et non des mois voire des années après. La location et le prêt peuvent largement déborder leurs domaines habituels. Le marché de l’occasion peut bénéficier d’un cadre spécifique pour de bonnes sélections de produits gp utiles aux enfants handicapés, présentés avec l’information ciblée, comme le propose le site Ludosens pour « partager des jeux qui font grandir ». Mais concernant les at finançables, les usages d’aujourd’hui entre particuliers engagent à la prudence et à la réflexion.
Adapter sa méthodologie aux situations complexes
116 L’ergothérapeute peut aborder ce type de problématiques en associant une autre méthode, l’approche constructiviste des situations complexes. Enseignée au Conservatoire national de arts et métiers (cnam), en gestion de ressources humaines, elle m’a apporté une grille de lecture complémentaire (Terence, 1993). J’en retiendrai ici d’autres clés. Évitons de trop simplifier ou de prévoir de façon fermée l’intervention. Ainsi un questionnaire utile à une étude ou à une synthèse, bon outil ponctuel, n’est pas la bonne manière d’appréhender ce type de problèmes. Face à l’incertitude, il faut communiquer, échanger l’information, et pouvoir changer de voie, d’hypothèse, pour rallier l’objectif. Trop de complexité demande une intelligence collective et de savoir faire appel à son « quatrième cerveau », celui des autres. L’équipe que nous allons recomposer autour du projet est un système fonctionnant avec ses acteurs et leurs interactions dans un tissu relationnel et organisationnel à décoder.
117 La réalité nous rappelle régulièrement qu’un projet viable est aussi, au-delà de grands objectifs stratégiques, un projet opérationnalisable à sa base, c’est-à‑dire dont l’ensemble coordonné des tâches est exécutable par ses acteurs. Par l’enfant, par ses parents, ensemble et isolément lorsque la situation l’impose, par les professionnels -médico-sociaux, les fournisseurs, qui ont matière à anticiper. Leurs multiples actions doivent être organisées, outillées et encadrées autant que nécessaire. Le choix lui-même va associer des tâches de réglage, d’apprentissage qui peut se liquéfier dans le temps, faute de professionnels suffisamment disponibles, faute de maintenance dans et en dehors de la garantie, faute de définir qui prendra la peine d’installer et de recharger les batteries, ou simplement de se promener, de jouer, de communiquer ensemble, etc. Il faut au moment du choix valider toutes les faisabilités qui feront, à défaut, échouer le projet.
Le choix des lieux et des temps de notre intervention est important à côté de celui du matériel
118 Le lieu est déterminant. Un magasin virtuel ou physique, mais peu fourni, est rarement le sésame du choix. Des ergothérapeutes voient l’enfant en situation réelle, à domicile et là où s’exprime la difficulté, collaborant avec des fournisseurs. L’emmener autant que nécessaire dans des structures de conseil et d’évaluation est complémentaire. Par exemple, un siège-auto peut se tester au cicat où des modèles et un vrai siège de voiture permettent une simulation. Si le choix se porte sur un produit gp, en version normale ou adaptée, j’invite à d’abord poursuivre l’essai, sur les critères précisés, en magasin classique. Sinon, ou si le matériel gp est insuffisant, un conseil d’at ou d’alternatives à demander au rmm est assuré. Le siège-auto opté s’installe ensuite dans la voiture parentale et éventuellement dans celle des grands--parents et/ou de la société de transport habituelle. Il faudra circuler si la difficulté n’émerge pas au parking.
119 Certains essais ne peuvent être validés que dans l’intimité du domicile, et en présence de l’ergothérapeute s’il y est invité. Cela fait partie de l’autonomie des parents et de la construction de la confiance, pour se retrouver dans leur salle de bains, leurs wc, quelquefois même dans leur chambre où dort l’enfant. Beaucoup d’informations nous arrivent aujourd’hui par des photos, des vidéos réalisées par les parents, ou dans une coordination avec l’ergothérapeute du camsp ou d’une autre structure médico-sociale qui suit l’enfant.
120 Il est fréquent qu’un parent de jeune enfant handicapé vienne avec la fratrie. Sur place, il faut pouvoir, le temps d’une discussion entre adultes ou d’un essai, occuper ou faire veiller le ou les enfants. Cela s’anticipe. Leur relation est une information intéressante, qui peut devenir source de perturbation pour un enfant distractible.
121 Le choix du temps d’intervention est important. Évitons de trop le borner par avance. Tout particulièrement parce qu’il s’agit d’un enfant, le moment et la durée des essais doivent être adaptés pour le placer dans les meilleures conditions et éviter de multiplier inutilement les rendez-vous.
122 Certaines at demandent un apprentissage et la disponibilité du matériel pour valider le besoin. L’intérêt du prêt est débattu depuis longtemps, hormis les logiciels qui proposent des versions de démonstration. Lorsqu’il s’agit de valider un choix par un prêt, de bonnes pratiques s’imposent pour optimiser cette chance : anticiper la possibilité d’un usage suffisamment intensif durant la période d’essai, et rendre le matériel en état dans les délais. Elles ramènent à des aspects humains concourant au prêt et, de là, à la qualité du choix, comme je le tire de ma propre expérience de prêts de matériel et d’at de nouvelles technologies par Escavie dans le cadre d’un projet.
Aider à construire des objectifs spécifiques, concrets, réalisables et satisfaisants
123 La sévérité des incapacités rend les at incontournables et omni--présentes. Des priorités émergent dans chaque histoire individuelle. La réalité du projet et l’environnement ordinaire de vie sont prévalents sur la prescription et la standardisation (Biard et Danigo, 2008). Notre projet est d’aider à construire des objectifs spécifiques, concrets, réalisables et satisfaisants.
Rendre acteur et acteur social l’enfant sévèrement handicapé
124 L’at donne à l’enfant la possibilité d’être capable, source de satisfaction. Lui permettre d’agir et de montrer des capacités le place en position de sujet (Garel, 2006). Encore faut-il qu’il vive de façon répétée et non occasionnelle des expériences réussies pour qu’elles participent à la construction de l’estime et de la confiance qu’il peut avoir en lui. Elles naissent du jugement positif des personnes importantes pour lui, en particulier ses parents.
125 Le résultat acquis est en jeu et non la démonstration une performance. Pour reprendre une expression, le guidage tient du marionnettiste si l’enfant ne peut se passer du geste professionnel qui l’étaye. L’ergothérapeute est un vecteur d’autonomie. Notre rôle prend vraiment sens quand nous quittons l’enfant, qu’il joue avec un autre, utilise l’ordinateur à l’école, peut accompagner sa maman en courses. Cette difficulté se ressent, notamment, dans la communication ou le jeu. En apprenant à l’enfant l’usage d’at, nous devenons son premier partenaire et parfois le seul, dans le temps aménagé. Le projet doit se monter avec des complicités, des étapes.
Notre attention première se centre sur l’enfant lors des essais
126 Ce qui se dit au-dessus de sa tête, notamment par les familles en réponse aux questions, est parfois très lourd, comme beaucoup d’interviews de parents, sur Internet, le montrent. Est-ce si sûr qu’il ne comprend pas du tout le sens et la gravité de ce qui se dit ? Au-delà de l’évidence éthique, mon expérience auprès de personnes Locked-In Syndrome, enfermées à l’intérieur d’elles-mêmes, m’engage à toujours penser qu’il peut comprendre, malgré le masque du handicap. Certains essais peuvent se programmer, dans un premier temps, sans l’enfant handicapé, voire avec un mannequin pour démontrer le siège-auto, le lit, le bain, etc. Le parent et l’ergothérapeute sont alors plus libres de leur parole. L’enfant n’est pas l’objet de démonstration, il deviendra le sujet d’essais.
Aider l’enfant à accepter l’at et à l’intégrer à son projet de vie
127 Il l’élabore à sa façon d’enfant. Une orthophoniste expliquait en formation le choc vécu par des parents en réunion de voir leur fille de 6 ans, paralysée cérébrale, exprimer sur une vidéo, avec son aide de communication, que quand elle serait grande, elle regarderait la télévision le soir, se marierait et aurait des bébés. J’ai vécu ce même type d’expérience. Des larmes discrètes se percevaient derrière la bonne ambiance, la douleur ne pouvant s’exprimer là. Depuis toujours, des parents comme des professionnels rejettent les moyens de communication qui permettent de dire des choses trop dures à entendre (Charrière et Barbot, 1984). Que lui répondre quand il demande à sa façon pourquoi il est différent ? Comment rebondir en cachant son émotion ? Se préparer à la question, si besoin avec un psychologue, permet de mieux l’aborder, au lieu de se focaliser sur des aspects matériels ou sur l’absence de besoin : « Nous, nous le comprenons. »
128 On peut s’adresser au jeune enfant à propos de ses at. Ainsi, un changement peut le perturber jusqu’au refus, comme l’installation faite par un proche, ou même un simple porte-crayon. Des échelles picto--graphiques d’émotions voire de douleur peuvent permettre de cerner sa satisfaction. Tant de personnes vont poser des questions ou émettre des critiques devant lui que le sujet doit être abordé ailleurs en équipe et en famille, les doutes et les réponses à donner à l’enfant discutés. Comment lui expliquer, par exemple, notre besoin de le voir « verticalisé », quand cela provoque des sensations désagréables et l’envie d’uriner, mal interprétées par ceux qui vont le réinstaller ? Évoquer une dysplasie de hanches et ses conséquences avec des radiographies ne lui est pas accessible. Rendre tangible ce que l’appareillage lui permet déjà maintenant, sans lui mentir, peut l’être. Il sera sensible à l’écoute de son ressenti, et aux solutions trouvées comme passer aux toilettes avant, pratiquer une technique de relâchement pour l’installer. Une posture ne s’impose pas en forçant.
129 L’attention se porte aussi aux parents, à leurs attentes, leurs réactions, leur satisfaction, leur autonomie
130 Les besoins en la matière sont bien définis (ca, afm, 2007) : être informés dans un langage clair et compréhensible, être écoutés, ce qui va au-delà des aspects factuels et touche aux émotions, aux espoirs, être reconnus dans leur rôle de parents, leurs compétences, leur identité, être accompagnés.
131 Parler au sujet des at les renvoie à des maux insupportables. Il faut une vraie empathie lors de nos entretiens et des essais pour adopter une attitude facilitatrice et créer une atmosphère où les situations difficiles peuvent s’évoquer. La rancœur, la critique, la revendication, arrivent vite. Pour autant, elles ne doivent pas envahir l’entretien.
132 L’attention se porte sur les absents, le parent dans l’impossibilité physique ou psychologique d’assister aux essais, dans le rejet parfois, la fratrie que nous aimerions associer au projet autrement que dans l’intention. La qualité de vie individuelle est forcément en lien avec celle de la famille, même pour un enfant en institution. Peut-être même surtout, tant la distance physique peut créer un manque de communication, jusqu’à l’oubli pur et simple de la nécessité de les impliquer au fur et à mesure. Pour que la distance ne s’agrandisse pas davantage.
133 L’attention se porte sur les instances capables de simplifier, finaliser, rendre cohérent le système législatif complexe, compliqué, embolisateur de temps perdu à clarifier, réexpliquer. Il manquera pour conseiller utilement.
Conclusion
« Exister, c’est insister. »B. Himmich
135 À la sévérité du handicap fait écho l’énergie que développent les parents face au combat qu’ils vivent, et à celle fournie par tant d’enfants perçus comme passifs, dès lors qu’une activité motivante s’ouvre à eux.
136 L’acquisition d’une at n’est pas une fin en soi. La finalité est l’usage où elle doit se fondre dans le quotidien sans poser de problèmes et en améliorant la situation. Le confort de vie procuré, en famille, entre dans un champ qui va de la bienveillance à la bientraitance.
137 Le choix pour un enfant en situation de handicap sévère est loin d’être une adéquation simple entre un besoin et une réponse matérielle fonctionnelle. L’attention à porter aux facteurs humains est aussi essentielle pour que les produits d’assistance soient acceptables, que les nouvelles capacités de l’enfant puissent être développées et appréciées, et que lui-même, au final, soit satisfait, encouragé et accepté.
138 Accéder à la communication est certainement le fil rouge des situations complexes de handicap (Barreyre et coll., 2011). La communication avec et autour de l’enfant permet de construire un projet cohérent, en phase avec l’évolution des technologies, des métiers et des collaborations. Nous intervenons pour relier au mieux le plus petit au plus grand, de l’élément au système technique complexe, du jeune enfant aux structures administratives et sociales, des parents à la chaîne d’aidants. Un énorme chemin a été fait ces trente dernières années. L’avenir technologique s’est développé bien au-delà de nos espoirs d’alors, et continuera si nous en avons collectivement les moyens.
139 Mais quel que soit le matériel, il ne comblera pas le manque, il en réduira le poids. Charge à nous de l’alléger au mieux et de faire en sorte qu’il s’agisse bien d’aides… techniques.
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : parent, prise en charge, décision, Aide technique, handicap, ergothérapeute, enfant, autonomie
Date de mise en ligne : 27/04/2017.
https://doi.org/10.3917/cont.045.0129Notes
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[4]
Les aides techniques (publié 6 juillet 2016) : www.cnsa.fr/compensation-de-la-perte-dautonomie/aides-techniques
www.cnsa.fr/compensation-de-la-perte-dautonomie/aides-techniques/lobservatoire-du-marche-et-des-prix-des-aides-techniques. -
[5]
https://www.cramif.fr/handicap/handicap-aides-technique-cicat-escavie-asp
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[7]
http://rnt.over-blog.com/
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[12]
Pour rester simple et synthétique : https://fr.wikipedia.org/wiki/Biais_cognitif
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[15]
Vidéo : D. Pradon, B. Guillon, S. Bouche, « Le fauteuil roulant : une aide technique à la mobilité ? État des lieux des innovations » – Colloque de l’Institut fédératif de recherche sur le handicap – 24 septembre 2015, université de Valenciennes.