Contraste 2013/2 N° 38

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Article de revue

Accueillir un enfant atteint d'épilepsie en structure d'accueil petite enfance

Partage d'expérience du multi-accueil de l'association Une Souris verte

Pages 271 à 291

Notes

  • [*]
    Judicaëlle Brioir, responsable du centre de formation « Une Souris verte », Lyon, judicaelle.brioir@hotmail.fr
  • [1]
    A. Lagueyte (pour polycap-adepo33), Dr F. Villéga, « L’enfant polyhandicapé épileptique et l’institution », 2009.
  • [2]
    Nouveau Testament, Évangile selon saint Luc.
  • [3]
    M. Pilard, C. Brosset, A. Junod, « Les représentations sociales et culturelles de l’épilepsie », Méd. Afr. noire, 39, p. 652-657. Aux Pays-Bas, l’idée que l’épilepsie a quelque chose à voir avec la magie est loin d’être morte chez certaines personnes. En 1996, on a évoqué le cas d’une personne ayant été fouettée et mise à l’écart à cause de ses crises. Des traitements tout aussi violents (coups, tonte des cheveux, privation de nourriture) visant à faire sortir les mauvais esprits du corps de la personne ont toujours cours en zones rurales de l’Inde. Source : oms « Épilepsie : conséquences sociales et aspects économiques », Aide-mémoire n° 166, 2001.
  • [4]
    Au Royaume-Uni, une loi interdisant aux épileptiques de se marier n’a été abrogée qu’en 1970. Aux États-Unis d’Amérique, le dernier État à abroger une loi similaire ne l’a fait qu’en 1980. En Inde et en Chine, l’épilepsie est toujours considérée comme une raison d’interdire ou d’annuler un mariage… Source : oms « Épilepsie : conséquences sociales et aspects économiques », op. cit.
  • [5]
    L’équipe du multi-accueil Une Souris verte est une équipe pluridisciplinaire, faisant appel aux compétences de diverses professionnelles : psychomotriciennes, eje, auxiliaires de puériculture, agents titulaires du cap petite enfance, aides maternelles, ergothérapeute (à temps partiel), puéricultrices (direction incluse). La diversité des formations professionnelles n’implique pas de cloisonnement de rôle auprès des enfants. Tous participent aux soins (au sens du care) quotidiens de l’enfant. Cette pluridisciplinarité apporte une grande complémentarité de regards et de compétences au sein de l’équipe.
  • [6]
    Je fais référence ici à mon expérience au sein d’un orphelinat à Calcutta au début des années 2000. Les enfants présentant des crises d’épilepsie, pour la plupart non diagnostiquées et non correctement traitées, étaient considérés comme « possédés » par des esprits mauvais. Contrarier l’enfant pouvait réveiller cet esprit maléfique… et l’enfant se trouvait dans une position d’enfant « tout-puissant » mais exclu symboliquement puisque n’ayant pas les mêmes règles et devoirs que les autres…
English version

1L’association Une Souris verte est née en 1989 de la volonté de parents confrontés aux difficultés (refus) de trouver une place d’accueil en structure de la petite enfance en raison de la déficience ou de la maladie de leur enfant...

L’association Une Souris verte

2Le projet de l’association part d’un postulat simple : chaque petit homme a sa place dans la société, quelles que soient sa situation, ses limites, ses difficultés. Il a non seulement une place mais il contribue à faire vivre l’humanité et la tolérance, si fondamentales dans tous les groupes humains.

3La mobilisation de ce groupe de parents a abouti en 1991 à l’ouverture d’une crèche de dix-huit places dont un tiers étaient réservées à des enfants « différents », accueillis en mixité avec les enfants du quartier…

4Après plus de vingt ans d’existence, l’association Une Souris verte a toujours comme objectif de sensibiliser aux différences et de favoriser l’inclusion dans la société des jeunes enfants en situation de handicap. Au fil des années, en réponse aux besoins constatés sur le terrain, l’association a développé des actions sur trois axes principaux :

  • l’accueil d’enfants en situation de handicap et l’accompagnement de leur famille ;
  • l’information à destination des parents, des professionnels et du grand public ;
  • la formation en direction des acteurs et professionnels.
Une des valeurs associatives d’Une Souris verte repose sur le partage et la mutualisation des compétences et des savoirs. À ce titre elle participe à de nombreux réseaux locaux ou nationaux (Acepp, réseau R4P, collectif La Courte-échelle, plateforme nationale Grandir ensemble, collectif Les P’tits Cailloux, etc.)

La structure multi-accueil Une Souris verte

5L’accueil du jeune enfant en collectivité est l’activité originelle et le pôle pilote de l’association Une Souris verte. Et les objectifs initiaux en sont toujours d’actualité :

  • considérer l’enfant en situation de handicap d’abord comme un enfant, afin qu’il puisse aller à la rencontre des autres, malgré ses difficultés ou ses limites, et être accueilli dans la société ;
  • autoriser les parents à prendre du temps pour eux, pour leurs autres enfants, grâce à un accueil adapté ;
  • permettre aux jeunes enfants et à leurs parents de changer leur regard sur le handicap par le partage au quotidien.
Le fonctionnement de la structure d’accueil et l’organisation de l’équipe découlent des valeurs associatives suivantes.

Accueillir chaque enfant et sa famille dans sa singularité

6Chaque enfant est singulier, chaque famille est singulière. Chacun est considéré avec ses différences, ses particularités et de ce fait il n’existe pas de protocole d’accueil figé. Les modalités d’accueil pour chaque enfant sont établies à l’inscription. Il s’agit d’élaborer un temps de présence, qui convienne le mieux possible à l’enfant et à la situation familiale.

7Un référent est proposé à chaque enfant accueilli. Ce professionnel va être à l’écoute de l’enfant et particulièrement disponible pour l’accueillir, ainsi que son parent, tout au long de son passage dans l’établissement. Les premières fois, ensemble, ils vont convenir de la mise en place des temps d’adaptation. Les parents peuvent alors échanger au sujet de l’enfant, d’eux-mêmes, de leurs attentes, de leurs inquiétudes. Ce membre de l’équipe sera leur interlocuteur privilégié, garant d’une stabilité et d’une continuité autour de l’enfant, dans le souci de respecter leur intimité et de créer des repères.

Offrir sa place à chacun

8Dans le souci de répondre aux besoins de l’ensemble des enfants accueillis au sein de la structure, chaque demande d’admission est étudiée attentivement. La place à offrir à l’enfant sera toujours interrogée, en ayant le souci de l’équilibre dans la vie du groupe et des capacités et disponibilités de l’équipe pour répondre aux besoins – ordinaires – de chacun des enfants.

9Chaque enfant est considéré dans son individualité et se voit offrir une place qui lui est propre : propre à ses moyens, à ses capacités, à ses envies et non relative à son âge ou à sa taille. Il n’y a pas de cloisonnement d’âge au sein des deux unités, petits, moyens et grands se retrouvent dans le même espace. L’équipe est vigilante à adapter l’environnement pour qu’il soit sécurisant et sécurisé et pour favoriser des liens entre les enfants. Comme dans toute structure, il existe des limites à l’accueil des enfants : Une Souris verte est une structure petite enfance et non une structure médicalisée ou spécialisée. Ainsi, pour certains enfants peut se poser la question des actes médicaux et thérapeutiques éventuellement nécessaires sur son temps d’accueil et en seront alors interrogées les modalités…

Repérer et répondre aux besoins de l’enfant, dans le souci de son bien-être

10L’enfant communique ses besoins : les rires, les pleurs, les silences sont autant de signes qui nous aident à repérer ses besoins et à y répondre. Pour cela, nous mettons en place des outils qui permettent une meilleure connaissance de l’enfant : l’observation, les échanges avec les parents, les transmissions et la circulation de l’information, les réflexions d’équipe, l’organisation du personnel.

11Ainsi, permettre le respect du rythme de chacun, de chaque individualité dans le collectif est essentiel. Les activités ne sont pas programmées mais partent du besoin des enfants.

Soutenir la parentalité

12Notre rôle en tant que structure de la petite enfance est d’accompagner et/ou de soutenir la parentalité. C’est-à-dire « être à côté de » par l’écoute, le dialogue, le soutien, l’observation, le respect, la valorisation, la guidance en partenariat.

13Tout parent qui confie son enfant, en situation de handicap ou non, reste le garant de son bien-être. Chaque accueil est individualisé et personnalisé. L’organisation d’équipe permet qu’un professionnel soit disponible aux temps d’accueil pour chaque famille. Des entretiens individuels peuvent être proposés à la demande des parents ou des professionnels.

Accueillir un enfant épileptique : un accueil plus particulier ?

14Parmi les enfants accueillis au sein de la structure depuis plus de vingt ans, certains étaient ou sont atteints d’épilepsie. Cette maladie se manifeste différemment en fonction des enfants et certaines de ces manifestations interrogent les professionnels dans leurs pratiques de façon bien plus particulière que toute autre forme de déficience, y compris dans le champ du polyhandicap. Malgré une équipe renforcée quantitativement, pluridisciplinaire et plus qualifiée que dans d’autres structures, malgré « l’habitude » d’accueillir et d’accompagner des tout-petits au développement atypique, les professionnels se trouvent en difficulté face à certains de ces enfants atteints d’épilepsie…

15Nous ne faisons pas ici allusion aux formes d’épilepsie « simple », réagissant bien au traitement proposé et sans manifestation apparente : « Il y a le pai au cas où, tout est noté, ça rassure, et dans le quotidien, on oublie [l’épilepsie] », dit une professionnelle.

16Il s’agit là plutôt des formes plus complexes, difficiles à traiter sur le plan médical – voire à diagnostiquer – et de manifestations souvent imprévisibles dans le quotidien. Sans doute est-il nécessaire de (re)penser nos représentations sociales et culturelles, d’affronter les affects mobilisés en chacun de nous par certaines manifestations de l’épilepsie.

Des représentations et des affects…

17

« L’histoire de l’épilepsie peut se résumer comme 4 000 ans d’ignorance, de superstition et de stigmatisation, suivies de 100 ans de connaissances, de superstition et de stigmatisation ».
(Rajendra Kale [1])

18Maladie connue depuis fort longtemps, l’épilepsie semble avoir toujours suscité peur et effroi chez les spectateurs de ces manifestations. Bien qu’elle ait été identifiée comme une maladie d’origine biologique – et donc de cause naturelle – depuis l’Antiquité, ne se sont pas moins développées des croyances autour d’origines surnaturelles, de causes supra-humaines, croyances entraînant bien souvent des attitudes de stigmatisation de la personne épileptique.

19

« Et comme il approchait, le démon le jeta sur le sol et le secoua de convulsions. Mais Jésus menaça l’esprit impur, guérit l’enfant et le remit à son père[2]. »

20Cette évocation de l’enfant épileptique dans la Bible rattache l’épilepsie au domaine du sacré, à l’intervention de démons prenant possession du corps et de l’esprit de l’enfant. Au fil des siècles, diverses pratiques de guérison ont été expérimentées, de la prise de remèdes à base de plantes ou de métaux aux pratiques rituelles religieuses de prières, exvotos aux saints guérisseurs, fontaines de dévotion et rituels de guérison, etc. Dans nombre de cultures africaines ou asiatiques l’épilepsie est vécue comme étant l’œuvre de génies, démons, djinns… esprits dont on se protège par le biais d’amulettes, d’intercessions de guérisseur/gourou/chaman, parfois d’une mise à l’écart du sujet épileptique par peur d’une contagion possible [3]

21Dans certaines sociétés dites « modernes », le lien entre manifestations épileptiques et magie ou sorcellerie est encore retrouvé dans les croyances populaires et des pratiques légales de discrimination et d’exclusion sociale avaient encore cours jusqu’à récemment [4]. Quelles que soient les interprétations données à cette maladie, elle surprend toujours. La crise peut survenir à tout moment et tous, parents et professionnels, sommes confrontés à cette quasi-impossibilité de savoir, de comprendre, de « s’y faire »…

22

Élise, petite fille âgée d’un peu plus de 1 an, est accueillie depuis quelques mois dans la structure. Elle souffre d’épilepsie sévère, avec des crises fréquentes pouvant passer inaperçues mais nécessitant une prise de Valium. Elle présente une hypotonie très importante et surtout des temps d’éveil extrêmement restreints. Dans les premiers mois de son accueil, elle ne se manifestait jamais. Aujourd’hui encore les professionnelles sont obligées de la réveiller pour la nourrir ou la changer… « Elle dort tout le temps. » Depuis les premiers jours elle passe toute la journée, y compris le temps de sieste, dans la pièce de vie pour rester dans le champ de vision des adultes…

23« Les parents éprouvent souvent de fortes angoisses de mort lorsque leur enfant a une crise. Ils ont tendance alors à développer un comportement anxieux, ayant toujours besoin de garder un œil sur leur enfant » (Clément, 2001). Les professionnelles qui accueillent cette petite fille au quotidien partagent ces mêmes angoisses. L’absence de réactions de l’enfant, son atonie, son manque de vitalité les renvoient à des images de mort difficiles à gérer émotionnellement et induisant un malaise, une angoisse latente – « difficile à gérer pour nous avec les autres enfants », dit une professionnelle – tant le contraste est important. Dans l’accueil de cette enfant, ce ne sont pas tant les convulsions possibles ou le retard de développement psychomoteur qui inquiètent les professionnelles mais son atonie et son apparente apathie. Calme, trop calme, ne se manifestant pas, cette enfant pourrait vite « être oubliée », passer inaperçue. Tout au contraire, sa présence mobilise psychiquement les professionnelles, a même pu être vécue comme intrusive par certaines, envahies par une angoisse massive de mort et un fort sentiment d’impuissance. Quelques membres de l’équipe évoquent des similitudes avec les ressentis éprouvés lors d’accueil d’enfants atteints de maladies dégénératives engageant le pronostic vital.

24Ces affects provoqués par la présence – ou ne serait-ce plutôt « l’absence » ? – de l’enfant les conduisent à réorganiser leur travail d’équipe les jours où elle est accueillie. Par peur de « passer à côté » d’une crise de l’enfant, et par désir aussi de « profiter de chaque moment possible d’éveil », aussi infime soit-il, une professionnelle reste à proximité de l’enfant en quasi-permanence, avec le besoin de toujours garder un œil sur elle : « On ne peut pas la lâcher. »

Assurer le bien-être de chacun des enfants

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Sabrina, 18 mois, est une enfant hypotonique qui présente des manifestations épileptiques au réveil, sous forme de trémulations. Les professionnelles l’accompagnent lors des crises par des attitudes de contenance, par le toucher (stimulations tactiles sur les membres) et par la voix.

26Le souhait profond des professionnelles d’être là pour l’enfant épileptique dans le moment de la crise, de ne pas le « laisser seul » est très présent et les conduit à penser leur organisation d’équipe en fonction des enfants présents chaque jour. Lors du réveil de sieste, une des professionnelles présentes va veiller à être systématiquement au chevet de Sabrina afin qu’elle ne soit pas seule lors de la survenue des tremblements. Elle assure une présence contenante à l’enfant, en relation individuelle, pendant que ses collègues gèrent le reste du groupe d’enfants. Cette présence tout à la fois physique, sensorielle, psychique relève du holding et du handling de Winnicott. Parler à l’enfant, maintenir le contact, même quand il possède peu de moyens d’expression, permet de relier l’avant et l’après-crise, de mettre en mots la suspension possible et d’assurer la continuité de la relation malgré « l’absence »…

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Elie, 3 ans, présente des troubles moteurs importants, des difficultés respiratoires nécessitant une mise sous oxygène et une épilepsie sous forme d’absences. Son accueil, sur des temps limités, mais offrant des temps de répit à sa maman, mobilise une professionnelle qui reste près de lui…

28Sur les temps d’accueil d’Elie, une professionnelle reste assise à côté de lui, au sein de la salle de vie, installe des jouets près de lui, accessibles aux autres enfants en invitation à jouer afin de ne pas l’isoler. Cette proximité physique liée à la surveillance de l’oxygène est aussi – et peut-être d’abord – pour ne pas passer à côté d’une crise, pour être présente à l’enfant « au cas où… ». Elle rassure aussi les professionnelles.

29Néanmoins, il me semble important de souligner qu’au-delà d’une première image de « un adulte pour un enfant » – ce qu’il est impossible de mettre en place en permanence dans une structure collective sans stigmatiser l’enfant bénéficiaire –, ce positionnement dans l’espace d’un adulte, assis au sol, posé, dans l’observation, bénéficie aussi aux autres enfants qui trouvent là un interlocuteur à leur hauteur, disponible à leurs sollicitations, attentif à leurs interactions et soutenant, par son attitude observante, leurs explorations et découvertes en tout genre.

30C’est ce même souci du bien-être de l’enfant qui va permettre aux professionnelles dans certaines situations de dépasser leurs angoisses et de modifier leurs attitudes éducatives, celles-ci pouvant être influencées par les ressentis et représentations face à la particularité de quelques enfants. Les pratiques éducatives répondent certes aux besoins des enfants mais aussi parfois à ceux des professionnelles…

31Au début de son accueil, Sabrina dormait dans la pièce de vie, ce qui assurait les professionnelles de ne pas manquer son réveil et surtout l’apparition des trémulations – et les rassurait. Progressivement, dans le souci de répondre aux besoins de l’enfant en termes de rythmicité et de repères dans l’espace, Sabrina a été installée dans le dortoir pour la sieste, comme les autres enfants, afin de lui offrir la possibilité de structurer ses représentations spatio-temporelles.

32Nous l’avons vu, garder un œil en permanence ou quasi-permanence sur l’enfant répond à une angoisse des adultes et à un besoin de se rassurer, de lutter contre le sentiment d’impuissance mais aussi contre celui d’une culpabilité liée à l’impression diffuse d’abandonner l’enfant à sa crise… C’est en prenant peu à peu conscience des besoins de l’enfant, besoins ordinaires – et non liés spécifiquement à ses manifestations épileptiques – que les professionnelles ont pu dépasser leurs propres besoins de réassurance et proposer des réponses plus classiques, ordinaires et adaptées à la situation de l’enfant (dormir dans le dortoir comme les autres enfants). Ce cheminement demande du temps, des échanges avec les parents, des négociations en équipe aussi… Pour l’autre fillette également concernée par ce besoin des professionnelles de garder un œil sur elle, ce cheminement est en cours, l’enfant dort toujours dans la salle de vie, mais tout près de la porte du dortoir car, me dira avec beaucoup de lucidité et d’humilité une professionnelle, « je ne suis pas prête à la lâcher… (du regard !) ».

Travailler en équipe

33L’accueil d’enfants atteints de déficiences ou maladies chroniques nécessite une importante cohésion d’équipe où chaque professionnelle, quelle que soit sa formation initiale [5], puisse partager ses savoirs et savoir-faire, sans hiérarchisation des compétences et des connaissances par rapport à chaque enfant accueilli. Cette cohésion passe par une confiance solide entre les membres de l’équipe, confiance autorisant l’expression des représentations et des affects, y compris les plus négatifs. Accepter de poser, de partager ses craintes, peurs, malaises face à un enfant ou une situation, sans crainte d’être jugée comme étant une « mauvaise professionnelle ». Pouvoir entendre l’expression des ressentis négatifs d’une collègue sans porter de jugement… et respecter le cheminement de chacune, la temporalité nécessaire à chaque individualité.

34

Une des professionnelles de l’unité sur laquelle est accueillie Élise est très mal à l’aise face à la petite fille. Elle ne parvient pas à s’en occuper en soin individuel. L’absence apparente de vitalité de l’enfant, d’une grande proximité d’âge avec sa propre enfant, lui renvoie des images et angoisses mortifères. Ses collègues respectent ses ressentis et prennent soin de la petite fille pendant qu’elle-même est disponible aux autres enfants du groupe…

35Cet exemple vient illustrer ce travail d’équipe, où chacun des membres peut exprimer en confiance ses affects, mettre des mots sur ses ressentis en se sentant suffisamment en sécurité et respecté. Il est primordial pour le bien-être des professionnelles, et donc des enfants, de se sentir écouté, soutenu par ses pairs.

36Ce travail d’équipe implique aussi une réflexion sur les notions de transmission et partage des informations entre professionnelles, transmissions écrites et transmissions orales tout au long de la journée afin d’assurer une réelle continuité dans l’accueil de chaque enfant, d’assurer une cohérence de travail entre professionnelles, avec les enfants et les parents. Il est important que la professionnelle présente au moment du départ de l’enfant sache comment s’est passée sa journée, avant qu’elle-même n’ait commencé son service, qu’elle soit en mesure de transmettre les informations relatives à la journée de l’enfant à ses parents.

37Tout enfant accueilli à la crèche Une Souris verte a un référent au sein de l’équipe. Il s’agit même plus précisément d’un système de coréférence, ce qui permet d’apporter un regard complémentaire et offre un soutien en particulier dans les situations délicates ou complexes à accompagner au quotidien. Ainsi, une professionnelle n’est jamais seule à porter l’accueil d’un enfant, c’est-à-dire non pas être la seule (ou les deux seules) à s’occuper de lui au quotidien mais bien être dans un portage psychique d’avoir le souci de cet enfant et de sa famille. Dans les premiers temps de l’accueil, une des référentes est plus particulièrement disponible et systématiquement présente lors des temps d’accueil de l’enfant, puis elle passe progressivement le relais à sa collègue et ensuite à l’équipe.

38Il est intéressant de noter que c’est justement lors de ce passage de relais que ce sont développées dans l’équipe les angoisses relatives à l’accueil des enfants précédemment évoquées, dans un phénomène de contagion, de transmission psychique des peurs que l’équipe a pu combattre peu à peu, relativiser grâce aux échanges fréquents entre ses membres, en analyse des pratiques, etc., et surtout dans les échanges avec les parents…

Le partage avec les parents : une coconstruction de l’accueil

39Pour tout enfant accueilli dans la structure, les parents sont les premiers interlocuteurs des professionnelles et leurs principales sources d’informations sur l’enfant. Ce sont eux qui donnent les renseignements nécessaires sur ses habitudes de vie, ses goûts, ses capacités, en particulier lorsqu’il ne peut les communiquer lui-même. Mais plus que pour les autres, lorsque les professionnelles sont interpellées par un enfant qui les questionne fortement et pour lequel elles ne savent, malgré leurs observations et toute leur attention, si elles répondent bien à ses besoins – et parfois même quels sont ses besoins –, les échanges avec les parents sont indispensables. Dans bien des situations, les parents vont pouvoir lever, par le partage de leur savoir sur leur enfant, les craintes exprimées par les professionnelles :

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Élise, en plus de son atonie et de ses crises d’épilepsie, a tendance à régurgiter après les repas. Or elle n’est pas en capacité de se retourner seule et les professionnelles craignaient le risque d’étouffement dans son sommeil, bien qu’elle soit couchée légèrement sur le côté. Le papa de l’enfant, lui-même médecin, les a rassurées sur l’absence de danger vital y compris en cas de crise passée inaperçue…

41Les échanges avec les parents s’accompagnent d’une relation de confiance réciproque. Les professionnelles expriment toutes leur besoin de sentir la confiance des parents envers elles lorsqu’ils leur confient leur enfant, leur confiance en leur capacité à bien en prendre soin, alors qu’elles-mêmes sont en doute en raison des particularités médicales de l’enfant. Toutes expriment l’aide que les parents leur ont apportée par leur connaissance précieuse de leur enfant, par l’échange des « trucs et astuces » pour répondre à ses besoins au quotidien, par l’expression aussi de leur sentiment de « ne pas savoir » eux non plus. Parents et professionnelles avancent ensemble, tâtonnent, partagent leurs observations et s’en enrichissent mutuellement.

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« Au moment du repas j’ai pu remarquer qu’à chaque fois que je donnais à Élise la purée printanière à base de légumes avec du poisson (donnée dans le biberon) elle recrachait tout et ne mangeait pas grand-chose. Cela est arrivé à plusieurs reprises, j’ai donc essayé de lui donner plutôt des légumes verts avec de la viande et j’ai pu remarquer qu’elle mangeait mieux. Cela était peut-être une préférence de goût car elle a meilleure appétit quand c’est les légumes verts avec de la viande. Vu qu’Élise ne communique pas beaucoup, j’essaie de détecter le moindre changement de comportement ou “détail… »

43Dans cet exemple rapporté par la professionnelle référente de l’enfant, cette observation d’une possible préférence gustative a été transmise aux parents qui ont apprécié ce partage, en particulier le papa qui portait plus son attention sur la pathologie de sa fille et a ainsi pu (ré)investir des aspects ordinaires du soin quotidien, ceux relevant du maternage et non du médical. Pour cette même enfant, un sac contenant des objets de la maison fait lien avec la crèche dans l’objectif de donner des repères de continuité à l’enfant sur ses temps d’éveil, certes courts, souvent provoqués par l’adulte, mais, semble-t-il, un peu plus fréquents…

44Ces échanges peuvent se faire sur plusieurs modalités complémentaires en fonction de ce qui correspond le mieux aux parents : cahier de liaison, temps de transmissions à l’arrivée et au départ de l’enfant à chaque accueil… Ils s’appuient sur les observations fines des adultes, source inestimable et indispensable d’informations sur l’état de l’enfant, en particulier quant les modalités de communication sont perturbées.

45Ces échanges en confiance permettent à chacun des partenaires de se sentir reconnu, qualifié… et moins seul face aux différences et incertitudes liées à la pathologie de l’enfant. Ainsi, c’est grâce aux échanges avec les parents que les professionnelles peuvent s’autoriser aussi à prendre de la distance par rapport à ce qu’elles imaginent nécessaire au bien-être de l’enfant, comme en témoigne l’exemple de Sabrina lors de ses trémulations.

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« Le corps hypertonique de l’enfant dans les bras m’obligeait à me raidir (à être tendue) pour la soutenir, mais en réajustant avec les parents nous l’accompagnons en la couchant ce qui est plus confortable pour nous (plus détendu) et pour elle. »

47Les professionnelles avaient pour habitude, dans le souci d’apporter confort et contenance à l’enfant lors de ses crises, de la prendre dans leurs bras en un enveloppement réconfortant. Mais cela les épuisait, tant il leur fallait se tendre, se crisper. C’est en échangeant avec les parents, en particulier avec le papa qui leur a expliqué qu’à la maison il laissait sa fille dans son lit lors des trémulations sans chercher à la contenir physiquement, qu’elles ont pris conscience que la qualité de leur présence psychique accompagnée d’un toucher par pression était suffisamment contenante et rassurante pour l’enfant. « À l’origine, le portage est psychique avant d’être physique » (Sharara, Moro, 2000). Et ce portage est partagé par l’ensemble des adultes qui entourent l’enfant dans son quotidien. Cette proximité d’attention à l’enfant, entre les parents et les professionnelles, est à la fois source et conséquence d’empathie entre ces partenaires, sans toutefois sombrer dans la confusion.

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« Un soir à la transmission de fin de journée, alors qu’une maman habillait son enfant pour partir, celui-ci s’est mis à faire une crise d’épilepsie. Sa mère l’a entouré de ses bras, l’a rassuré en lui parlant, en lui faisant des bisous ; elle était très touchante. Mais j’ai eu l’impression que cette maman était gênée du regard qu’auraient pu poser les autres parents qui se trouvaient dans le hall. Cette scène m’a marquée parce que cela m’a rendue triste de voir cette maman cacher la crise de son enfant. »

Dans le quotidien de la structure…

49Comme pour tout enfant accueilli à la crèche Une souris verte, les professionnelles adaptent l’aménagement des espaces, l’installation des enfants en fonction des besoins et capacités de chacun. Le détournement du matériel de puériculture classique est largement utilisé dans la structure où sièges autos et coussins d’allaitement par exemple servent de sièges contenants et de soutien pour les enfants qui en ont besoin. De même pour les enfants épileptiques, des adaptations et aménagements sont pensés au cas par cas. Ainsi, un petit garçon faisant des crises avec chutes a-t-il porté un casque pour éviter des blessures à la tête, notamment dans la salle de bains où le risque de blessure en cas de chute n’était pas négligeable. Lors des activités d’éveil sensoriel, les objets lumineux étaient évités, car l’enfant étant photosensible, les flashs étaient des déclencheurs potentiels de crise épileptique…

50Le partage d’informations avec les parents, les capacités d’observation des professionnelles sont les principaux outils aidants dont celles-ci disposent pour accomplir leur mission d’accueil de qualité des enfants qui leur sont confiés. Cette attention à l’enfant, aux plus infimes signaux émis donne des indices précieux pour répondre au mieux à ses besoins. Ainsi, la professionnelle référente de la petite Élise a-t-elle pu interpeller l’infirmière de l’équipe juste avant que ne se déclenche une crise convulsive.

51

« Je ne sais pas dire exactement quoi, mais j’ai senti que quelque chose n’était pas comme d’habitude, qu’elle n’allait pas bien. Alors j’ai appelé ma collègue (infirmière). Juste après, les convulsions ont commencé… »

52Le souci de la professionnelle, son attention bienveillante, sa connaissance de l’enfant lui ont permis de déceler les prémices de la crise et de pouvoir l’accompagner au mieux…

53Il arrive aussi que les manifestations épileptiques de l’enfant induisent des comportements éducatifs plus particuliers des adultes. Nous l’avons évoqué précédemment, les professionnelles sont parfois amenées à modifier leurs pratiques en réponse à leur inquiétude et pour satisfaire leur besoin de garder l’enfant dans leur champ de vision. Il n’est pas rare d’observer, pour des enfants un peu plus grands, que ces craintes des manifestations épileptiques conduisent les adultes, parents ou professionnelles, à adopter des attitudes éducatives insuffisamment contenantes. Les enfants n’ont alors plus de repères structurants sur lesquels se construire.

54

Ainsi Sanjay, 6 ans, présentant une épilepsie avec des crises convulsives régulières et perte de connaissance, pouvait-il sauter sur les tables, les lits, vider les placards comme il le voulait dans la section de l’orphelinat, nul ne se risquant à lui opposer la moindre frustration de peur de déclencher une crise. Ce que le petit garçon avait parfaitement compris malgré sa déficience intellectuelle avérée et ses troubles de la personnalité[6].

55Dans cet exemple, le manque de limites fermes et structurantes avait un effet renforçateur de la problématique de construction de la personnalité de l’enfant. Il n’est pas rare de voir des parents ne plus oser frustrer leur enfant par crainte de la survenue d’une crise, ce qui, à terme, peut lui faire adopter des comportements inappropriés à la vie en société et donc vite qualifiés de « troubles »…

56Au sein de la structure d’accueil Une Souris verte, malgré le nombre non négligeable d’enfants atteints d’épilepsie qui ont été ou sont toujours accueillis, très peu de crises manifestes ont eu lieu en présence des autres enfants du groupe. L’organisation de l’équipe est telle que trémulations, absences et autres manifestations sont gérées par les professionnelles et semblent a priori ne pas perturber les autres enfants. Habitués à tous bénéficier chaque jour de temps en individuel, plus ou moins long en fonction de leurs besoins, ils ne s’étonnent pas qu’une professionnelle accompagne tous les réveils de sieste de l’un d’entre eux. Ils respectent le calme auprès de l’enfant qui dort dans la salle de vie, vont parfois demander « elle dort ? », jouent avec l’enfant sous oxygène comme avec celui qui est sanglé dans un siège moulé ou avec celui qui est allongé sur un tapis…

Les protocoles d’accueil individualisés

57Pour les enfants accueillis dans la crèche Une Souris verte qui présentent des troubles de santé nécessitant ou pouvant nécessiter des gestes relevant du soin infirmier, est établi un pai – protocole d’accueil individualisé. Ce pai s’entend comme un protocole de soin, non comme un projet (éducatif), et permet donc aux professionnelles de connaître la conduite à tenir en cas d’urgence ou de difficultés particulières. Ainsi pour chaque enfant présentant une épilepsie, quelle qu’elle soit, est établi un pai sur lequel sont notés le traitement pris par l’enfant, la conduite à tenir en cas de crise, la nécessité – ou non – de donner un traitement « en urgence », etc. Dans la majorité des situations, ce document, établi conjointement par les parents, la directrice de la structure et le médecin, s’avère un outil efficace pour rassurer les professionnelles. Les choses sont posées, ont été expliquées…

58Mais parfois, ce pai, initialement fait pour sécuriser tout le monde, a un effet inverse et se révèle potentiellement angoissant. Ainsi l’indication de faire une injection de Valium à un enfant au-delà d’une certaine durée de la crise convulsive a-t-elle parfois inquiété les professionnelles. D’une part existe une crainte du geste médical, injection de Valium par voie intrarectale par exemple, que toutes ne se sentent pas à même d’assurer. Mais surtout, au-delà de la représentation de ce geste – les deux professionnelles puéricultrices de l’équipe assurent une présence infirmière quotidienne dans la structure d’accueil –, c’est l’indication d’une durée des convulsions avant l’administration du traitement qui a cristallisé certaines angoisses. Comment savoir quand a débuté la crise si l’enfant n’est pas en permanence sous les yeux des adultes ? À partir de quel moment compter (avant de faire l’injection), etc. ?

59Ainsi le pai, au lieu d’atteindre son objectif de réassurance en posant clairement le cadre des éventuels gestes d’urgence, a probablement d’abord mis à nu les angoisses, les fantasmes mortifères sous-latents des professionnelles…

60Dans un autre cas, le pai, par une petite phrase dans son contenu, a bousculé la professionnelle référente de l’enfant concerné.

61

Sur le PAI établi pour un enfant, la professionnelle a pu lire que les parents avaient demandé qu’il n’y ait pas de réanimation de leur enfant en cas de crise nécessitant l’intervention du samu. Cette demande, écrite noir sur blanc, ainsi posée sur le papier, a profondément touché la professionnelle.

62Loin de la projeter dans un jugement de cette expression des parents mais plutôt dans une représentation de leur souffrance, cette phrase conduit la professionnelle à s’identifier aux parents et à éprouver de la compassion à leur égard, en percevant et reconnaissant leur douleur de parents, entraînant une réaction de solidarité en les accompagnant au mieux dans leur parentalité (et en accueillant leur enfant…).

Les limites de l’accueil

63L’accueil d’enfants atteints d’épilepsie complexe, souvent associée à un tableau clinique plus large et tout aussi compliqué, peut mettre à mal une équipe de professionnels, aussi qualifiés et compétents soient-ils. Ainsi ces enfants, par les manifestations de leur pathologie ou syndrome, viennent plus fortement et particulièrement interpeller les professionnelles et les mobilisent psychiquement. Elles éprouvent le besoin fréquent de parler de leurs ressentis émotionnels face à ces enfants, de mettre de la distance par rapport à leurs affects, que ce soit lors des séances régulières d’analyse de la pratique (toutes les deux semaines), en réunions d’équipe, lors de temps de formation ou d’échanges plus informels… L’attention soutenue dont elles font preuve auprès de ces enfants peut rapidement être exténuante.

64

« […] Ces questionnements qui surgissent à chaque manifestation de l’enfant : est-ce le hoquet ou une crise ? Si ses yeux partent, est-ce qu’il est fatigué ou en crise ? »

65Ces questionnements incessants, toujours en recherche de réponse sans certitude d’être dans le juste, le « bon » pour l’enfant pourraient vite conduire à un épuisement professionnel. Par ailleurs, comme souvent lors de la confrontation à des manifestations d’épilepsie, les professionnelles peuvent être soumises à des sentiments ambivalents.

66

« Une fois, pendant le soin du nez, Élise avait émis son premier son à la crèche : elle avait pleuré. C’était la première fois que je l’entendais et, c’est bête à dire, mais ça m’a fait plaisir de l’entendre pleurer… C’était au tout début de son accueil quand elle était tout le temps endormie… »

67Les pleurs d’un enfant ne sont généralement pas vecteurs de plaisir, mais dans ce cas particulier, c’est pourtant là le sentiment de la professionnelle, car au moins, un pleur est un son, un moyen d’expression, d’expression de vie… Pour d’autres, cette ambivalence se traduit autrement, en admettant l’importance d’accueillir l’enfant (ne serait-ce que par le temps de relais apporté aux parents) et en questionnant en même temps l’intérêt de l’accueil de l’enfant (intérêt du collectif ?)… C’est par leur capacité à verbaliser ces ressentis ambivalents que les professionnelles parviennent à mettre au travail leurs représentations, à prendre une distance suffisamment bonne pour continuer à être dans un accueil bienveillant de l’enfant et de ses parents… et à rester bienveillantes envers elles-mêmes, sans s’auto-disqualifier.

68Néanmoins, afin de veiller à l’équilibre du groupe, de pouvoir continuer à répondre aux besoins individuels de tous les enfants, elles reconnaissent avec beaucoup de lucidité qu’il ne leur serait pas possible d’accueillir un plus grand nombre d’enfants les mobilisant autant psychiquement… Une autre limite à l’accueil exprimée serait la trop grande fréquence pour un même enfant de crises entraînant un geste médical (injection de Valium) ou l’appel du samu par exemple…

Pour conclure

69Il m’est apparu tout au long de ce travail de préparation et de rédaction que le sujet traité était bien plus déstabilisant que bien d’autres thèmes du champ du handicap ou de la maladie. Épilepsie qui « prend par surprise » tous ceux qui y sont confrontés d’une façon ou d’une autre ? Et malgré cela, l’accueil de jeunes enfants atteints d’épilepsie à forme complexe en structure ordinaire de la petite enfance n’en est pas moins possible, et bénéfique aux enfants et à leurs parents. Accueil certes exigeant – mais n’est-ce pas le cas de tout accueil de jeune enfant ? – sans doute plus exigeant que les autres car plus générateur d’affects parfois contradictoires, parfois violents, et pourtant féconds. Ces accueils ne nécessitent pas d’aménagements ou de matériels spécifiques mais requièrent un réel travail d’équipe, une solide confiance entre parents et professionnels. Les limites à l’accueil d’un enfant épileptique reposent dans les limites des professionnels : « Les questions qui se posent, c’est surtout par rapport à nous… »


Activités de l’association Une Souris verte

70L’accueil d’enfants en situation de handicap et l’accompagnement de leur famille :

  • multi-accueil Une Souris verte (augmentation en 2010 de 18 à 32 places à la journée + 4 en demi-journée) ;
  • 2 micro-crèches de 10 places chacune ;
  • le « café des parents » ;
  • Signe avec moi.
L’information à destination des parents, des professionnels et du grand public :
  • site Internet de l’association : unesourisverte.org ;
  • portail Internet : enfant-different.org ;
  • centre de documentation et d’information ;
  • réseau documentaire (Redoc 69 H) ;
  • actions de sensibilisation grand public (soirées, création d’outils de sensibilisation, etc.).
La formation en direction des acteurs et professionnels :
  • le centre de formation à destination des professionnels qui accueillent et accompagnent l’enfant en situation de handicap ou atteint d’une maladie chronique invalidante et sa famille ;
  • le réseau Différences et petite enfance (réseau rassemblant plus de 130 structures petite enfance, centres de loisirs et structures spécialisées, et ouvert à tous les acteurs de la petite enfance de la Ville de Lyon).

Bibliographie

  • Bibliographie-sitographie

    • Clément, M.C. 2001. « Le syndrome de West, un orage cérébral dans la vie psychique du nourrisson et de ses parents », Contraste, 15-16, p. 175-197.
    • oms. 2001. Épilepsie : « Conséquences sociales et aspects économiques », Aide-mémoire n° 166.
    • Pilard, M. ; Brosset, C. ; Junod, A. 1992. « Les représentations sociales et culturelles de l’épilepsie », Méd. Afr. noire, 39, p. 652-657.
    • Sharara, R. ; Moro, M.-R. 2000. « Le portage des bébés », Journal de puériculture, 213, p. 412-418.
    • www.polycap33.wix.com.polycap33
    • www.who.int/mediacentre/factsheets/fr/

Mots-clés éditeurs : observation, confiance, représentations, échanges

Mise en ligne 05/11/2013

https://doi.org/10.3917/cont.038.0271

Notes

  • [*]
    Judicaëlle Brioir, responsable du centre de formation « Une Souris verte », Lyon, judicaelle.brioir@hotmail.fr
  • [1]
    A. Lagueyte (pour polycap-adepo33), Dr F. Villéga, « L’enfant polyhandicapé épileptique et l’institution », 2009.
  • [2]
    Nouveau Testament, Évangile selon saint Luc.
  • [3]
    M. Pilard, C. Brosset, A. Junod, « Les représentations sociales et culturelles de l’épilepsie », Méd. Afr. noire, 39, p. 652-657. Aux Pays-Bas, l’idée que l’épilepsie a quelque chose à voir avec la magie est loin d’être morte chez certaines personnes. En 1996, on a évoqué le cas d’une personne ayant été fouettée et mise à l’écart à cause de ses crises. Des traitements tout aussi violents (coups, tonte des cheveux, privation de nourriture) visant à faire sortir les mauvais esprits du corps de la personne ont toujours cours en zones rurales de l’Inde. Source : oms « Épilepsie : conséquences sociales et aspects économiques », Aide-mémoire n° 166, 2001.
  • [4]
    Au Royaume-Uni, une loi interdisant aux épileptiques de se marier n’a été abrogée qu’en 1970. Aux États-Unis d’Amérique, le dernier État à abroger une loi similaire ne l’a fait qu’en 1980. En Inde et en Chine, l’épilepsie est toujours considérée comme une raison d’interdire ou d’annuler un mariage… Source : oms « Épilepsie : conséquences sociales et aspects économiques », op. cit.
  • [5]
    L’équipe du multi-accueil Une Souris verte est une équipe pluridisciplinaire, faisant appel aux compétences de diverses professionnelles : psychomotriciennes, eje, auxiliaires de puériculture, agents titulaires du cap petite enfance, aides maternelles, ergothérapeute (à temps partiel), puéricultrices (direction incluse). La diversité des formations professionnelles n’implique pas de cloisonnement de rôle auprès des enfants. Tous participent aux soins (au sens du care) quotidiens de l’enfant. Cette pluridisciplinarité apporte une grande complémentarité de regards et de compétences au sein de l’équipe.
  • [6]
    Je fais référence ici à mon expérience au sein d’un orphelinat à Calcutta au début des années 2000. Les enfants présentant des crises d’épilepsie, pour la plupart non diagnostiquées et non correctement traitées, étaient considérés comme « possédés » par des esprits mauvais. Contrarier l’enfant pouvait réveiller cet esprit maléfique… et l’enfant se trouvait dans une position d’enfant « tout-puissant » mais exclu symboliquement puisque n’ayant pas les mêmes règles et devoirs que les autres…
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