Sur la nef embrasée, une poutre, puis une autre tombent, loin des tours occidentales mais vers elles : la plus proche de l’échafaudage s’est inclinée puis appuyée sur sa voisine, faisant jaillir flammes et étincelles au moment de leur jonction. Le poids de ces deux-là s’est vite incliné, à son tour, vers la troisième, et ainsi de suite, faisant songer aux dominos debout et proches : le premier tombe, tous les autres suivent.
L’eau intervenait plus à l’ouest, vers les tours. Si les pompiers avaient arrosé ces flammes, l’eau se serait mise en cuvette sur les voûtes gothiques et aurait, par son poids, entraîné leur effondrement. Le risque de désagrègement du monument tout entier eût alors été patent ! Des pans de murs extérieurs, les plus décorés, auraient été ruinés.
Votre étonnement devant le faible écartement entre les poutres, que vous voyiez verticales mais qui étaient inclinées, vers le sommet, à 55 degrés, pente de la toiture, devant, aussi, leur apparence grêle, prouvait votre sens de l’observation. Mais, pour un charpentier, ce faible écartement, ces chevrons peu épais, c’est justement la superbe, la magistrale invention de ses confrères du début de ce xiiie siècle : la charpente à chevrons formant fermes, dite aussi « charpente à chevrons portant fermes ».
À la fin du xiie siècle, l’adoption générale d’une nouvelle manière de bâtir – qu’à la fin du xviiie siècle les historiens d’art ont appelée l’art gothique – a obligé les charpentiers à modifier profondément leur art, « l’art du trait »…