Le rapport du langage à la politique mérite de figurer parmi les questions que posent l’ascension d’Emmanuel Macron et le développement de son action. Le discours prononcé le 9 avril dernier devant les évêques de France vaut sans doute d’être considéré à l’aune d’une incontestable virtuosité d’expression, et par les attitudes qu’il incarne peut-être plus que par les positions qu’il défend.
Jusqu’à présent, on en a surtout retenu, pour y voir un écart par rapport au devoir de laïcité, la phrase litigieuse prononcée d’emblée : « le lien entre l’Église et l’État s’est abîmé » et ce lien, dit le Président aux évêques, « il importe à vous comme à moi de le réparer ». De par ses résonances juridiques, le mot lien (repris dans la suite du discours par l’affirmation des « liens indestructibles entre la nation française et le catholicisme » concrétisés par des apports, mais parmi d’autres sources de nos traditions) est sans doute excessif puisque la loi de séparation des Églises et de l’État de 1905 visait précisément à abolir l’idée même d’une relation organique entre les deux puissances. Au demeurant, la « réparation » envisagée n’est pas le rétablissement des « liens » antérieurs à 1905 ; au-delà des expressions de considération, voire de respect, elle se ramène à promouvoir un dialogue qui n’apparaît pas fondamentalement différent des consultations auxquelles les pouvoirs publics procèdent auprès de diverses associations, notamment lors de la préparation de certains projets de lois…