« Madame, si c’est possible, c’est fait ; impossible, cela se fera. » Cette promesse de Calonne à Marie-Antoinette, que Michelet rapporte dans son Histoire de la Révolution française, traduit bien l’approche désinvolte des questions budgétaires du ministre de Louis XVI. La Reine pourra acheter Saint-Cloud et le Roi Rambouillet. Les comptes, pourtant, finissent toujours par être soldés : aucun des expédients nés de l’imagination fertile de l’administration royale ne viendra à bout des déséquilibres des comptes publics. Pour remédier à l’état désastreux des finances au terme d’un siècle de banqueroute royale, les États généraux sont convoqués en 1789. Michelet conclut, lapidaire : « La Révolution gâta tout. Elle écarta durement le voile gracieux qui couvrait la ruine publique. Le voile arraché laissa voir le tonneau des Danaïdes. »
La nécessité que ressentit le Roi de faire appel aux députés de la nation pour mettre en ordre ses finances illustre le caractère fondamental du lien entre la démocratie représentative et le contrôle du budget : c’est pour consentir à l’impôt que les premières assemblées sont apparues. Ce lien était présent à l’esprit des contemporains. Un des fermiers généraux de Louis XVI note ainsi que, « si les peuples le croyaient despote, il lui serait impossible d’ouvrir des emprunts ; ou, s’il prenait cette voie, elle lui serait si coûteuse que l’Angleterre, dans une guerre quelconque, finirait toujours par avoir le dernier écu ». Le seul vote des recettes et des dépenses n’est certes pas une garantie de bonne gestion des deniers publics : c’est la légitimité de la monarchie et le crédit de l’État que les États généraux devaient rétablir…