« Tout s’achève en Sorbonne », proclamait Valéry à propos de la destinée des œuvres littéraires. Et ce diagnostic n’épargne pas les écrivains les plus agacés par les manières des professeurs, lesquels ne manquent pas d’occasions de prendre leur revanche. Jacques Laurent ne portait guère dans son cœur les universitaires et l’Université lui a bien rendu cette hostilité par le silence dont elle fit longtemps preuve à son égard, comme en témoigne la place quasi inexistante faite à son œuvre dans les manuels et dans les histoires scolaires de la littérature française. La qualité des travaux de Christophe Mercier (et notamment la précieuse Conversation avec Jacques Laurent de 1995) pouvait décourager les chercheurs d’aller plus avant. Depuis quelques années, cette situation a changé ; le monde de l’Université découvre que la littérature des années cinquante et soixante ne se réduisait pas aux abstractions du nouveau roman et que les hussards et autres non-conformistes offraient des nourritures bien plus savoureuses. Les recherches se sont diversifiées. Jacques Laurent a même fait l’objet d’une volumineuse thèse de doctorat, dont la lecture l’aurait sans doute fait frémir, tant le jargon utilisé relève des pires travers de la nouvelle critique. Sous la plume de François-Jean Authier, auteur de cette thèse, Poétique du travestissement. Jacques Laurent romancier, publiée en 2008 aux éditions Honoré Champion, nous sommes heureux d’apprendre, par exemple, que « l’isotopie scolaire envahit le discours laurentien avec une telle insistance que la part dénigrée du champ littéraire recouvre les seules limites d’une salle de classe »…