Comment est partagée la richesse produite par les entreprises entre ceux qui apportent le travail et ceux qui apportent le capital ? Comment ce partage a-t-il évolué au cours des années passées ? Deux rapports officiels ont récemment été consacrés à cette question (les rapports Cotis [2009] et Cette, Delpla et Sylvain [2009]) qui préoccupe beaucoup médias et hommes politiques. En partie à cause d’une confusion fâcheuse avec une seconde question, également légitime, mais distincte : quelle est l’inégalité de la distribution des revenus et comment évolue-t-elle ? Dans l’esprit de beaucoup, il y a d’un côté les capitalistes, qui sont les riches, et d’un autre les travailleurs, qui sont les pauvres, et répondre à la première question est la meilleure façon d’éclairer la seconde. En réalité, il y a des travailleurs qui ont des salaires élevés et des capitalistes qui ont des revenus bas, et même des ménages qui cumulent salaires élevés et revenus capitalistiques élevés. On s’intéressera ici à la seule question du partage de la richesse produite entre les deux grands facteurs de production que sont le travail et le capital.
La réponse classique à la question du partage consiste à considérer le poids des salaires dans le PIB, 58 %, et à dire que le reste, 42 %, est la rémunération du capital – souvent assimilée aux « dividendes ». Gilles Saint-Paul (2004) a déjà expliqué dans Commentaire que « l’évolution de la part salariale [est] un indicateur mal choisi et mal interprété ». Mais il n’a pas été assez entendu, et il n’est pas inutile de redire que la présentation classique n’est pas acceptable, pour au moins cinq raisons…