Le fait marquant et la divine surprise, depuis 1978, furent évidemment la disparition du communisme et la dissolution de l’URSS. Elles ont eu pour conséquences principales la remise en marche de l’histoire, bloquée et déviée depuis 1914, et la diffusion universelle de l’idéal démocratique. Ce triomphe a été suivi de désillusions et de récriminations, comme si la démocratie, étant œuvre humaine, pouvait ne pas être disgraciée et si le choix était entre la cité idéale et une cité imparfaite, alors que notre nature et notre condition nous condamnent à devoir préférer ce qui marche normalement mal à ce qui le fait anormalement. Définissons la démocratie comme une certaine manière de régler les relations de pouvoir entre acteurs humains, réunis pour réaliser ensemble la bonne vie, dont la condition première de possibilité est la paix par la justice. Son principe fondateur est l’enracinement de toute relation de pouvoir dans ceux qui obéissent et qui consentent à le faire, en déléguant leur pouvoir originel et natif à des compétents putatifs à titre provisoire, circonscrit et réversible. Ce principe vaut dans tous les domaines d’activité, si bien que ses conséquences ne s’appliquent pas seulement au politique, mais encore à tout l’humain. L’influence ubiquitaire d’un régime politique est due à la centralité du politique dans les affaires humaines et au fait que le pouvoir est au cœur du politique. Le principe fondateur de la démocratie est limpide, comme le sont toutes ses implications, dont la gamme des libertés et la distinction du public et du privé…