Qui, comme l’auteur de cette préface, vient de relire d’un coup tous les écrits de François Furet consacrés au xxe siècle, après en avoir lu la plupart, au fur et à mesure, pendant quarante ans d’amitié et de complicité intellectuelle, ne peut qu’être frappé par leur unité dans la diversité et par leur continuité dans le changement.
Comment retrouver sans émotion cette conclusion d’un article sur André Glucksmann datant de 1975 – vingt ans avant Le Passé d’une illusion – qui en trace le programme : « De ces colères un peu vagues, de ces cris littéraires qui ont au moins le mérite de réveiller la gauche occidentale d’une révérence trop longue, il faudrait avoir le courage patient de ne pas faire la source de prophéties nouvelles mais le point de départ d’une vraie histoire du xxe siècle. L’heure est plus à l’inventaire rationnel de notre passé récent qu’à l’invective des espoirs déçus » ?
Entre-temps, il y aura eu la succession d’œuvres individuelles de François Furet et d’entreprises collectives dirigées par lui qui ont révolutionné l’interprétation de la Révolution française. Et il y aura eu son attention constante consacrée à la fois aux événements politiques et aux débats intellectuels, à la fois à l’évolution de la France et à celle de l’Union soviétique, des États-Unis et d’Israël, à la fois à la dimension politique de l’interprétation historique et à la dimension historique de l’interprétation du présent.
Toute l’œuvre de François Furet témoigne du lien indissoluble entre ces deux dimensions et du caractère central de ce lien…