On peut admettre que toute élection à forte incidence politique n’est finalement que la conjonction d’une conjoncture générale et d’un mouvement de l’opinion. Les deux scrutins des 21 et 28 mars 2004 - le second accentuant fortement l’effet du premier - illustrent ce schéma.
Pour la conjoncture, c’est l’exaltation du vote sanction : déroute, débâcle, Bérézina. Les mots ont manqué pour qualifier l’échec du gouvernement, au point qu’a été confortée la théorie des élections intermédiaires sous forme de désaveu du pouvoir en place. Du coup, les principaux traits de la consultation, poussée sensible de l’opposition socialiste, hausse non prévue de la participation et bonne résistance du FN, ont été présentés comme des signes concordants de ce désaveu.
Tout naturellement, c’est à l’aune des critères économiques et sociaux - croissance, chômage, pouvoir d’achat, exclusion - que la défaite gouvernementale a été mesurée, celle-ci s’exprimant en particulier par les revers des « ministres candidats », de Gilles de Robien en Picardie, Jean-Paul Delevoy dans le Nord, François Fillon en Pays de Loire, à un moindre degré Jean-François Copé en Île-de-France. Sous cet angle, le basculement à gauche de certains départements à forte tradition industrielle - Loire-Atlantique, Doubs, Oise, Seine-Maritime, celui de la Somme étant évité de peu - ne s’interprète pas différemment. En revanche, l’explication par la conjoncture internationale, pourtant souvent avancée avant le scrutin - terrorisme, événements d’Espagne -, n’a pas été retenue par les commentateurs…