Couverture de COMLA1_206

Article de revue

Wine Calling, résistance éthique de vignerons engagés

Pages 51 à 66

Notes

  • [1]
    Néologisme formé à partir du nom du célèbre critique américain Robert Parker auquel ses détracteurs reprochent d’ériger ses préférences personnelles en standard œnologique à l’échelle mondiale.
  • [2]
    Jonathan Nossiter dans La Revue du vin de France, 2014 : https://www.larvf.com/,vin-mondo vino-films-vins-italie-jonathan-nossiter,4363638.asp
  • [3]
    Aubertot Jean-Noël, Jean-Marc Barbier, Alain Carpentier, Jean-Joël Gril, Laurence Guichard, Philippe Lucas, Serge Savary, Isabelle Savini, Marc Voltz, Pesticides, agriculture et environnement. Réduire l’utilisation des pesticides et limiter leurs impacts environnementaux. Expertise scientifique collective, synthèse du rapport, INRA et Cemagref (France), 2005, p. 11.
  • [4]
    Chauvet Jules, Le vin en question, Entretien avec Hans Ulrich Kesselring, Paris, Les éditions de l’Épure – Marie Rocher, 1998.
  • [5]
    Créée dans le but de promouvoir les produits du terroir et de les protéger contre la fraude, l’AOC est un label français qui prescrit les conditions de production et le processus d’élaboration de ces produits dans un cahier des charges strict permettant ainsi leur homologation. L’AOP (Appellation d’origine protégée) est un label européen qui réglemente la production, la transformation et l’élaboration des produits dans une zone géographique donnée. Elle permet ainsi d’étendre la protection juridique des produits à l’échelle européenne, voire au-delà. Elle a d’ailleurs remplacé l’AOC pour la plupart des produits à l’exception des vins.
  • [6]
    Voir à ce propos : Moutat Audrey, « Discours transgressifs des vins naturels », Revue des œnologues, n166, 2018, p. 9-11 ; Moutat Audrey, « Les vins naturels, singuliers à plus d’un titre », in Jocelyne Pérard & Claudine Wolikow (dir.), Vignobles et vins singuliers de l’unique au pluriel, Dijon, Éditions Chaire UNESCO, Centre Georges Chevrier, 2019a, p. 289-306 ; Moutat Audrey, « Créativité et rhétorique des discours promotionnels sur les vins naturels », Recherches en communication, n48, 2019b, p. 69-91. Disponible sur : http://sites.uclouvain.be/rec/index.php/rec/article/view/11723/8553
  • [7]
    Relevant du ministère chargé de l’économie, la DGCCRF est une administration qui veille au bon fonctionnement des échanges marchands et s’assure « du respect des règles de la concurrence, de la protection économique des consommateurs [et] de la conformité des produits et des services » (https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/dgccrf).
  • [8]
    Fontanille Jacques, Formes de vie, Liège, Sigilla, Presses Universitaires de Liège, 2015.
  • [9]
    Bertrand Denis, Précis de sémiotique littéraire, Paris, Nathan, 2000.
  • [10]
    Fontanille Jacques, « Textes, objets, situations et formes de vie. Les niveaux de pertinence du plan de l’expression dans une sémiotique des cultures », in Denis Bertrand & Michel Costantini (dir.), Transversalité du Sens, Paris, Presses universitaires de Vincennes, 2007. Disponible à : https://www.unilim.fr/pages_perso/jacques.fontanille/textes-pdf/CSituations_pratiques2004_06.pdf
  • [11]
    Leleu-Merviel Sylvie, « Montage culinaire, la partition du légume », Communication & langages, n164, 2010, p. 54.
  • [12]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [13]
    Verón Eliseo, « L’analyse du contrat de lecture », Les médias : expériences et recherches actuelles, IREP, 1985.
  • [14]
    Jacques Fontanille, art.cit.
  • [15]
    Entretien avec Bruno Sauvard dans le dossier de presse consacré au film documentaire.
  • [16]
    Stéphane et Marjorie Gallet, interviewés par Pierre Casamayor pour la Revue du Vin de France, no 598, 2016.
  • [17]
    Barthes Roland, Introduction à l’analyse structurale du récit, Paris, Seuil, 1981.
  • [18]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [19]
    Bonescu Mihaela, Convivalité et communication : de l’imaginaire social à la gare communicante, thèse de doctorat, Université de Bourgogne, 2007.
  • [20]
    Boutaud Jean-Jacques, De la commensalité – du goût – des aliments, Paris, Jean-Paul Rocher éditeur, 2005.
  • [21]
    Boutaud Jean-Jacques & Verón Eliseo, Sémiotique ouverte, Paris, Hermès Lavoisier, 2007.
  • [22]
    Pinel Vincent & Pinel Christophe, Dictionnaire technique du cinéma, Paris, Armand Colin (1996), 2016.
  • [23]
    C’est nous qui soulignons.
  • [24]
    Greimas Algirdas Julien, Sémantique structurale, Paris, Puf, 1966.
  • [25]
    Nous verrons un peu plus loin que ce clivage sera réactivé dans le documentaire mais selon une axiologie inversée : le « nous » sera celui de la normalité nature tandis que le « eux » renverra aux labels conventionnels.
  • [26]
    Barthes Roland, « Rhétorique de l’image », Communication, n4, 1964, p. 40-51.
  • [27]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [28]
    Jacques Fontanille, art. cit.
  • [29]
    Jost François, « Pour une séméiologie des médias », Signata, n2, 2011, p. 139-153. Disponible sur http://journals.openedition.org/signata/631
  • [30]
    Massotte Pierre, Le défi des vins doux naturels, Londres, ISTE Éditions, 2017, p. 98.
  • [31]
    Couégnas Nicolas, Du genre à l’œuvre. Une dynamique sémiotique de la textualité, Limoges, Lambert-Lucas, 2014.
  • [32]
    Voir à ce propos Audrey Moutat, 2019a et 2019b.
  • [33]
    Jean-Jacques Boutaud & Eliseo Verón, op. cit.
  • [34]
    Catellani Andrea, « Vin nature et vin biologique. Observations sur quelques aspects de la communication œnologique », Lexia, 19-20, p. 473.
  • [35]
    Ibid., p. 473-474.
  • [36]
    Ibid., p. 474.
  • [37]
    Ibid.
  • [38]
    Morin Edgar, « De la culturanalyse à la politique culturelle », Communications, n14, 1969, p. 5-38.
  • [39]
    Filmé en plan serré, Michaël Georget égraine des mottes de terre aériennes entre ces mains afin d’attester les bienfaits de ses pratiques sur la santé de son sol.
  • [40]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [41]
    Andrea Catellani, art. cit., p. 475.
  • [42]
    Barthes Roland, « Rhétorique de l’image », Communication, n4, 1964, p. 40-51.
  • [43]
    Jacques Fontanille, art. cit.
  • [44]
    Jacques Fontanille, ibid.

Introduction

1En 2004, le réalisateur américain indépendant Jonathan Nossiter ébranlait le monde œnologique et bousculait les esprits du public avec son célèbre Mondovino. Dans ce documentaire engagé, il dénonce l’industrialisation des vins et une standardisation du goût irrespectueuse du terroir et engendrée par la parkérisation [1]. Dix ans plus tard, ce sont des vignerons italiens nature qu’il met à l’honneur dans Résistance naturelle. Plus intimiste, ce nouveau documentaire suit le quotidien de « rebelles pacifistes, qui ont su proposer un modèle actif, positif, qui ont réfléchi à comment repenser le monde, comment opérer une résistance éthique à un système qui ne marche plus, refuser le marché tout en trouvant une manière de survivre, de vivre [2] ». En puisant certains plans dans la culture cinématographique anticonformiste (Zavattini, Chaplin, Hitchcock, Bresson, Soldati, Rossellini, Monicelli, etc.), Jonathan Nossiter alerte les spectateurs sur les problèmes écologiques et sanitaires soulevés par les pratiques vitico-vinicoles conventionnelles. Des problèmes que l’INRA (Institut national de la recherche agronomique) et le Cemagref (Centre national du machinisme agricole du génie rural, des eaux et des forêts) avaient eux-mêmes pointés en 2005 dans leur rapport d’expertise : alors qu’elle ne représente que 3,7 % de la surface agricole utile (SAU) française, la vigne fait pourtant l’objet d’une vingtaine de traitements annuels, soit 20 % de la consommation nationale de pesticides (30 % des fongicides) [3].

2À travers la parole engagée de ces vignerons italiens, c’est également le cadre réglementaire et la normalisation imposée par la Denominazione di Origine Controllata (équivalente à l’AOC, Appellation d’origine contrôlée, en France) qui se trouvent dans le viseur du réalisateur de Résistance naturelle. Standardisation du goût et altération du terroir sont de nouveau au cœur du débat, ici porté par le mouvement des vins naturels.

3Initié à partir des propositions de Jules Chauvet, cet engagement pour un respect de la nature et de son cycle repose sur des pratiques organiques (sans engrais, pesticides chimiques ni désherbants) afin de préserver le sol et son écosystème. La vinification se veut « non interventionniste », sans levures exogènes, sulfites ou autres intrants afin que le vin puisse être le « reflet de son sol [4] » et de son terroir. Ne satisfaisant pas le cahier des charges des AOC et AOP [5] contre lesquelles les vignerons nature s’insurgent, le vin naturel est longtemps resté sans cadre réglementaire. Cette absence de reconnaissance officielle a alors nourri les stratégies communicationnelles des plus rebelles, vignerons autoproclamés « pirates du vin » ou « vitihackers », où les étiquettes humoristiques, les noms insolites ou provocants et les blogs accusateurs et impertinents qui transgressent les codes de l’œnologie conventionnelle [6]. Or, depuis le 3 février 2020, le vin naturel accède à un véritable statut dans le paysage œnologique grâce à une charte d’engagement établie par l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) [7] et le Syndicat de défense des Vins Nature’l. Le label « Vin méthode nature » préconise ainsi un raisin issu « d’une agriculture biologique engagée et certifiée », une vendange manuelle, des levures indigènes, aucun intrant ni sulfites avant et lors des fermentations (possibilité d’ajustement à hauteur de 30 mg/l maximum avec obligation de le renseigner sur l’étiquette).

4Si les vins naturels sont nécessairement produits à partir de raisins issus de l’agriculture biologique et résultent parfois de pratiques viticoles relevant de la biodynamie, ils se distinguent néanmoins de ces deux types de vins. Fondée sur les théories anthroposophiques de Rudolf Steiner, la biodynamie préconise des modes d’agriculture exploitant les richesses de la biodiversité et des préparations naturelles administrées selon un calendrier lunaire, dans le but de préserver l’expression des sols. Reconnu par la certification Demeter, le vin produit en biodynamie est issu de raisins biologiques et peut faire l’objet d’un ajout de sulfites en cave – dans des quantités toutefois inférieures à celles d’un vin biologique. Outre des règles agricoles respectueuses de l’environnement, le vin biologique est également soumis à des contraintes de vinification rigoureuses – liste limitative d’additifs, interdiction de certaines pratiques (telles que l’électrodialyse ou la désalcoolisation partielle) et de l’utilisation de produits de synthèses – instaurées par un cahier des charges européen depuis le 8 février 2012.

5Une reconnaissance tardive, un engagement profond et radical qui dépasse les exigences du biologique et de la biodynamie, une communication parfois offensive… le vin naturel séduit autant qu’il indigne. Qu’on les aime ou les déteste, qu’importe ! Les vignerons nature font parler d’eux ! Ainsi, afin de connaître davantage leurs motivations, leurs idées et les principes qui les animent… en somme leur forme de vie [8], nous avons décidé de focaliser notre attention sur le quotidien d’un petit groupe de vignerons nature d’Occitanie, que Bruno Sauvard a suivis dans son film documentaire Wine Calling (2018). Il s’agira ainsi de comprendre comment opère la médiatisation de cette micro-culture nature à travers l’analyse des discours de ces femmes et de ces hommes qui travaillent la vigne, élèvent leur vin et le dégustent avec leurs propres mots, loin des conventions discursives propres au vin conventionnel. Mais il n’est plus question ici de blogs, étiquettes ou noms de cuvée irrévérencieux mais de la parole ordinaire du quotidien de vignerons engagés pour un idéal de vie. Ainsi tâcherons-nous de mettre en évidence la manière dont ces valeurs engagées éco-responsables se concrétisent dans des formes de discours et traduisent cette forme de vie spécifique.

6Pour mener à bien cette entreprise, nous adopterons une démarche relevant de la sémiotique, théorie des systèmes de signes et de leur signification grâce à laquelle nous pourrons déterminer la manière dont se structure la parole engagée de ces vignerons nature. Plus particulièrement, nous emprunterons à la sémiotique narrative [9] et à la théorie des niveaux de pertinence [10]. Cette parole engagée, rendue sensible par les discours, s’incarne en effet dans différentes formes d’expression du sens, selon un parcours orienté de la forme de vie aux signes. Ainsi, cet engagement éthique pour la préservation du terroir et le respect de la nature (niveau de la forme de vie) conditionne l’ensemble des strates de ce parcours génératif : au niveau des stratégies, il s’agit de renoncer à un mode de production rentable en opérant des choix tels que la sélection de parcelles plus réduites, des choix culturaux en perpétuelle expérimentation ou encore en mesurant l’adéquation des cépages. Cela implique des pratiques vitico-vinicoles fortement contraintes (culture à bras sans engrais, vendanges manuelles, non recours au filtrage ni au collage, absence d’intrants…) dans le but de produire un vin éco-responsable (niveau des objets), conforme à l’ethos de ces vignerons et doté de propriétés organoleptiques fidèles à l’authenticité du terroir. Le niveau des textes-énoncés s’incarne, quant à lui, dans des discours moins policés (billets de blogs, commentaires de dégustation, témoignages…) mettant en jeu de nouveaux signes (lexique de dégustation) qui viennent bouleverser les codes du monde œnologique.

7Dans ce cadre, l’analyse des discours nous permettra d’identifier les manifestations effectives de cette idéologie et de déterminer les logiques narratives qui la sous-tendent.

L’appel du vin naturel

8Réalisé en 2018 par Bruno Sauvard, après une année d’immersion dans le vignoble du Languedoc Roussillon, Wine Calling est un film documentaire dynamique qui suit le quotidien de huit vignerons nature, des vendanges à la mise en bouteille. Parmi eux, beaucoup de néo-vignerons à l’instar de Jean-François Nicq, auparavant enseignant de physique-chimie et militant communiste, Jean-Sébastien Gioan, ancien conducteur de chantier puis coursier, Stéphane Morin, ex-photographe ou encore Laurence Manya Krief, qui a quitté son poste de cadre dirigeante dans une grande entreprise pour se consacrer à son exploitation située à Banyuls.

9Avant d’entrer dans l’analyse de ce film documentaire, attardons-nous quelques instants sur ses différentes formes de médiatisation, à savoir son titre, son affiche, le synopsis et la bande-annonce qui le caractérisent.

Wine Calling – Le vin se lève !

10Comme le rappelle Sylvie Leleu-Merviel, « le titre est en quelque sorte la figure de proue des médiations extérieures [11] ». Ainsi, Wine Calling. Le vin se lève ! donne immédiatement le ton engagé et militant qui ne va pas sans rappeler celui de Résistance naturelle bien que la portée sémiotique s’avère ici plus subtile. Personnifié, le vin apparaît comme l’acteur [12] principal de ce film, un héros en souffrance qui lance un appel, voire un cri, afin de faire entendre sa voix (par l’exclamation) en se levant et s’élevant contre l’ordre établi. Mais ce cri, c’est également celui que poussait la ville de Londres dans l’album London Calling, du groupe punk rock britannique populaire dans les années 1970-1980, The Clash. À travers son titre métaphorique, fondé sur la culture populaire musicale, Bruno Sauvard dresse le parallèle entre cet album engagé et hétéroclite, mêlant reggae, ska, rockabilly, etc., et son documentaire sur des vignerons aux profils divers, qui produisent des vins émancipés des codes et des cadres réglementaires de l’œnologie conventionnelle. Ainsi le réalisateur propose-t‑il à son spectateur le contrat de lecture [13] (Verón, 1985) suivant : à la manière de London Calling, Wine Calling invite son public, et principalement la jeunesse, à une prise de conscience collective qui repose sur la responsabilité individuelle.

11Ce parallèle entre les Clash et les vignerons de ce film documentaire ne s’arrête pas là. Il pointe également les problèmes d’une légitimité identitaire et de la conformité des objets sémiotiques [14] qu’ils produisent. Comme le précise Bruno Sauvard :

12

Le titre du film a été un réel point de départ. Cette référence à l’album des Clash m’a permis de placer l’intention. Pour clarifier sa genèse, je me souviens d’un documentaire montrant Joe Strummer en pleine phase de création. Enfermé dans un hangar, il écrit ses morceaux en buvant du vin et s’exprime face caméra : « on dit que je suis un punk et que je fais de la musique punk. En réalité, je ne fais rien d’autre que du rock’n roll ». Deux choses m’ont interpellé. La première, c’est l’idée similaire que nos vignerons font du vin et du vrai, sans artifices. La seconde touche à l’aspect artistique de leur activité : chacun donne une pâte à son vin. Un artiste sort un album tous les ans et un vigneron, un millésime. Goûter un vin, écouter un album, c’est reconnaître quelques notes et en découvrir de nouvelles. Mon ambition était de travailler cette analogie. Il ne faut pas oublier que le vin nature est un vin de garage, on parlait même de « vin de grange » [15].

13Tandis que Joe Strummer, leader des Clash, était considéré comme un punk alors qu’il se revendiquait rockeur, les vignerons nature sont souvent considérés comme des apprentis vignerons, des « fainéants [qui prônent de] faux goûts ou les prennent pour des expressions du terroir » [16], alors qu’ils affirment au contraire « travailler normalement ».

Une affiche aux accents bucoliques

14La dimension symbolique de ce titre, qui résume l’idéologie et la forme de vie du vin nature par une mise en perspective de l’identité de ces acteurs, se déploie également sur l’affiche. La typographie militaire verte, semblable à celle que l’on retrouve sur les cantines de soldats, cristallise le combat écologique. La luminosité du texte et la texture des lettres rappellent, quant à elles, la peinture des graffitis militants. Et pourtant, les visuels se veulent pacifiques, lyriques et bucoliques. Sur ce patchwork de dix photographies au centre duquel se trouve une bouteille de vin, aucun signe de contestation, de lutte ou de rébellion mais des tranches de vie de ces hommes, femmes et enfants au beau milieu des vignes : travail viticole, moments de loisirs et plaisirs partagés en famille ou entre amis (baignade dans une rivière, fêtes avec vin et musique). Quasi artistiques (contrastes du crépuscule, effets de contre-jour, cadrages décentrés et profondeur de champ réduite), ces photographies résument à elles seules une idéologie fondée sur le partage, la convivialité et l’amour de la nature.

15Alors qu’il était si présent dans le titre, le vin se fait discret sur cette affiche : il apparaît en filigrane à travers un subtil micro-récit [17] allant de la grappe de raisin dont il est issu (située en haut au centre de l’affiche) à sa consommation (en bas, au centre) en passant par sa mise en bouteille (au milieu du patchwork photographique). Ce sont ses adjuvants [18], les vignerons qui lui permettent de se lever, qui se trouvent ainsi mis à l’honneur. Élément fédérateur – mais discret – de cette affiche, le vin exerce le rôle de « catalyseur du lien social [19] » dont les valeurs symboliques [20] ne reposent plus sur la gastronomie et sa critique œnologique mais sur la simplicité de l’« agriculture paysanne ».

16Cette dimension esthétique [21], qui joue sur les formes du quotidien et les figures de la convivialité, du partage et de l’hédonisme, rend sensible l’ethos des vignerons nature : liberté, authenticité et simplicité.

Synopsis d’une forme de vie

17« Exposé sommaire en quelques lignes […] du contenu dramatique ou documentaire d’un film », le synopsis « représente déjà une première mise en forme de la matière première narrative du film [22] ». Troisième niveau du plan de pertinence des textes-énoncés, le synopsis assure la promotion du film en mettant l’accent sur le concept central développé. Rappelons-le ici :

18

Depuis une dizaine d’années, le monde du vin est en pleine effervescence, bousculé par une contre-culture comme le rock a pu l’être par le punk en son temps. Un peu partout en France et plus particulièrement en Occitanie, de joyeux rebelles ont investi nos terroirs pour inventer le vin qu’ils aiment : naturel et sans artifice. Bien plus qu’un vin bio, c’est un vin d’émotion et de réaction, un vin qu’aucun label ne régit, un vin libre. Wine Calling part à la rencontre de ces nouveaux vignerons qui réinventent notre rapport au vivant. Ces hommes et ces femmes préfigurent une agriculture paysanne en mouvement. Solidaire, éthique, festive, une nouvelle utopie émerge de nos coteaux, explorons-la [23] !

19C’est donc bien d’une forme de vie (« une nouvelle utopie ») dont il est question dans ce documentaire, et non de l’objet vin nature à proprement parler. Elle se trouve investie dans ce texte à travers les isotopies [24] suivantes :

20

  • La dissidence : « contre-culture », « rebelles », « réaction » ;
  • L’insoumission : « qu’aucun label ne régit », « libre » ;
  • La joie de vivre : « joyeux », « festive » ;
  • L’hédonisme : « vins qu’ils aiment », « émotion » ;
  • La créativité : « inventer », « réinventent », « agriculture paysanne en mouvement » ;
  • La solidarité : « solidaire ».

21Plus particulièrement, ce synopsis condense les niveaux de pertinence de la forme de vie, des pratiques et de l’objet en montrant comment la matière première (le raisin) engage des pratiques spécifiques dans l’avènement d’un nouvel objet. Cette forme de vie repose sur un système de valeurs opposé à celui qui fait figure de norme (« contre-culture »). Dans ce cadre, les vignerons assument non plus le rôle de l’adjuvant mais celui d’un sujet qui agit et engage des pratiques conformes à son ethos. En effet, ces nouveaux sujets créent un objet de valeur en rupture avec les valeurs conventionnelles : « bien plus qu’un vin bio », ce vin hédonique est « naturel et sans artifice ». Il fait montre d’une authenticité radicale en somme.

22Dès lors, ce synopsis met en évidence une opposition entre deux systèmes de valeurs : une culture normée, le système incarné par un « nous » (« nos terroirs »), et une contre-culture affranchie de toute règle, propre à un « eux » identifié comme un envahisseur ayant « investi nos terroirs [25] », mais que le réalisateur nous invite à « explorer ».

Natural winemakers calling

23Composée d’une série de plans sélectionnés, la bande-annonce de Wine Calling met en évidence les temps forts du film sous la forme d’un condensé de séquences les plus représentatives de son concept. Au-delà de son objectif conatif (inciter le public à aller voir le film en salle), elle permet ainsi de véhiculer la forme de vie des vignerons nature à travers ses différentes formes d’expression (objectif cognitif).

24Dynamique, elle offre une très grande variété de plans qui se succèdent au rythme des propos des vignerons et des morceaux de musique rock, punk, swing. Dans cette bande-annonce, les vignerons ne sont plus simplement des sujets mais se réalisent pleinement en tant qu’acteurs, dotés de traits physiques et d’une voix grâce à laquelle ils expriment leurs idées. Placée au premier plan, leur parole structure la bande-annonce au sein de laquelle l’image se trouve exercer une fonction d’ancrage [26]. Onze moments sont ainsi identifiables :

25

  • Le pressurage : « Moi, j’fais vraiment du vin sans rien… pressé avec les pieds… tout propres attention ! » Ce témoignage léger, sur fond de la chanson Sun song du groupe de rock Electric Octopus Orchestra, ouvre la bande-annonce sur un rythme rebelle et engagé. Le traveling avant en plongée sur des vignes cadrées en plan d’ensemble cède la place à des plans rapprochés et des gros plans sur des vignerons qui foulent les raisins, des bouteilles de vin, des grappes de raisin et le vignoble qui se succèdent au rythme de la chanson.
  • Le travail du vin naturel : « Les gens qui pensent que faire du vin naturel, c’est juste mettre du raisin dans une cuve et pas y toucher mais ils sont fous… faut travailler mille fois plus que sur un vin conventionnel ! » Le ton militant initié par la musique et le « moi » affirmé du premier vigneron (sous-entendu opposé aux autres) est ici renforcé par les propos de Laurence Manya Krief qui défend la légitimité de son travail et s’insurge contre la pensée de ses opposants [27]. À l’écran, des plans sur le travail de la vigne, le remplissage de la cuve, le pressurage, les tests et la mise en bouteille s’enchaînent rapidement pour illustrer ses propos.
  • L’expérimentation permanente : « C’est en mouvement perpétuel, tu vois, le vin nature ». « Quand t’as que des certitudes, c’est une catastrophe ! » La dynamique des pratiques de production du vin nature est incarnée dans la succession rapide des plans sur la vigne et un vigneron tenant sa tête entre ses mains. Une relation de proximité commence alors à s’instaurer entre les vignerons et les spectateurs grâce à l’usage du tutoiement.
  • Le soin de la vigne : « Je mets au monde quelque chose et je l’accompagne pour bien l’élever… donc là j’suis en train d’accoucher en fait, vous réalisez pas ! » Cette métaphore de l’accouchement et de l’élevage, qui complète les propos précédents de la vigneronne, se concrétise dans le gros plan sur une goutte de vin d’un rouge sang éclatant qui coule lentement. Elle tient également en la succession de plans rapprochés et de gros plans montrant la taille du cep si bien que le spectateur se trouve lui-même au plus près de la vigne ; immersion renforcée par un cadrage à ras de sol, selon une légère contre-plongée.
  • La pensée commune : « Ce sont des vins de fainéant ! Ils sont bourrés de défauts, mais ils séduisent les néovignerons comme les néoconsommateurs qui s’habituent à ces faux-goûts ou les prennent pour des expressions du terroir. Une régression ». La lecture de cette interview de Stéphane et Marjorie Gallet du domaine Le Roc des Anges réalisée par Pierre Casamayor pour la Revue du Vin de France affirme l’opposition entre ces deux formes de vie opposées : celle du vin conventionnel d’une part, celle du vin naturel de l’autre. Cette opposition est renforcée par le contraste entre les propos lus par Loïc Roure et les plans successifs qui défilent à l’écran : vendangeurs qui s’affairent dans les vignes jusqu’au crépuscule et transportent à plusieurs des caisses pleines de raisin, amateurs qui dégustent avec plaisir un verre de vin viennent ainsi infirmer les arguments de Stéphane et Marjorie Gallet.
  • Le terroir : « Sur des vignes qui sont centenaires et qu’on te dit que ça représente pas ton terroir… tu te dis qu’y a quand même un truc qui va pas ». Sur fond de vignes et de paysages viticoles, c’est le terroir, moteur de cette contre-culture, qui se trouve implicitement défini. Une définition non partagée par cet opposant, de nouveau représenté par un « on » exclusif qui renvoie, sans les nommer, aux cahiers des charges des AOC et AOP.
  • Le partage : « Mais ce que j’ai trouvé ici, c’est le collectif ». « On partage les choses quoi ». Bouteilles débouchées, vignerons en train de trinquer, célébration du redémarrage du pressoir après réparation… La revendication laisse ici la place à la convivialité et à la solidarité. Ce moment amorce une relation plus intime avec les vignerons en invitant le spectateur à découvrir leur idéal de vie. Cette transition est amorcée par la disparition de la musique rock au profit des sons de ces moments de vie ordinaire.
  • Un choix de vie : « Ces gens-là font ce qu’ils font par choix avec l’envie de partager et de transmettre ». Scènes familiales, couples main dans la main au crépuscule, moment de convivialité autour d’une bouteille… les plans, qui s’enchaînent au rythme de la musique de Kitty, Daisy & Lewis, immergent le spectateur dans la vie simple que « ces gens » ont choisie.
  • Des préoccupations sanitaires : « Ils salopent pas leur sol. Ils salopent pas la santé des gens. Ils expriment des trucs. Ils prennent des risques ». Cette vie simple repose sur des convictions et des choix, autrement dit des stratégies [28] risquées, exposés par la voix d’Antonin Iommi-Amunategui et des plans sur un vigneron qui présente des poignées de terre de son vignoble et sur des moments de consommation du vin.
  • Un engagement : « On va pas changer le monde en allant au bureau de vote, on va changer le monde en allant vers les vignes ». Le « ils » propre à désigner ces vignerons nature cède sa place à un « on » collectif qui inclut le spectateur et l’invite à adhérer à cette forme de vie cristallisée par des plans festifs, conviviaux et joyeux.
  • La magie du vin nature : « C’est quand même magique. On a des raisins et puis quelques mois après, on peut se prendre une cuite… C’est génial ! » Ces propos conclusifs de Stéphane Morin, accompagnés de plans montrant successivement la main d’un vigneron qui presse un raisin entre ses doigts, les vendanges à l’aube, Mickaël Georget, l’oreille plaquée contre son tonneau de vin ou encore l’ombre d’un vigneron qui déguste un verre dans sa cave, synthétisent l’ensemble du cycle du vin nature et l’émerveillement des acteurs pour leur objet de valeur.

26L’ensemble se clôt sur le titre du film, Wine Calling. Le vin se lève !, sur fond d’un rapide traveling en plongée qui, en suivant les vignes avant de s’élever vers le ciel, vient intensifier le propos. La bande-annonce se termine là où elle avait commencé : dans les vignes. Ce qu’il y a entre ces deux moments, ce sont les stratégies et les pratiques fondées sur l’idéologie nature. La bande-annonce concrétise ainsi la « promesse pragmatique [29] » du réalisateur : inviter à une prise de conscience à travers l’exploration d’une utopie « solidaire, éthique et festive ».

27Par ailleurs, elle se compose de quelques plans esthétiques qui mettent en jeu des contrastes de lumière, des contre-jours et des effets de halo. Les couleurs vertes, or, rouges et marron sont celles de la vigne, du vin et des chais. Les plans d’ensemble des vignerons dans leurs vignes, les cadrages en ras de sol, en légère contre-plongée, ainsi que le réglage de la focale floutant les vignes au profit du vigneron viennent immerger le spectateur au cœur du vignoble de façon ubiquitaire. Quant à l’enchaînement rapide des gros plans et des plans rapprochés, il permet de tisser une relation de proximité avec ces acteurs. Au-delà de l’objectif cognitif visant à informer le public sur le travail du vin naturel, cette bande-annonce remplit une fonction affective : partager le quotidien de ces vignerons permet de quitter la sphère de la revendication, appuyée par la musique rock, pour arriver à une sphère plus intime, celle de la convivialité, laquelle met en éveil la sensibilité du spectateur. La musique joue un rôle fondamental dans cette articulation : alors que Sun song ouvrait la bande-annonce avec agitation, le swing du morceau (Baby) Hold Me Tight du trio Kitty, Daisy & Lewis la conclut sur un ton festif. Wine Calling affirme ainsi une éthique de la revendication pacifique et festive que les propos de Jean-François Nicq résument en ces termes : « Au départ, tu penses que tu vas changer le monde. Alors que nous, ce n’est plus ce qu’on veut faire. Nous, on fait notre truc dans notre coin, on est bien… on n’emmerde personne ».

Récit d’une forme de vie engagée

Un « contre-genre » du documentaire

28Film documentaire français de 90 minutes, Wine Calling cherche à restituer la réalité du quotidien de huit vignerons nature du Roussillon, dans le but d’informer, mais également de sensibiliser, le public sur leur mode de vie et l’idéologie qui les anime. En cassant les codes classiques du documentaire viticole, ce documentaire s’avère à l’image de son sujet : libre et sensoriel. Si l’angle d’attaque s’inscrit dans une volonté de montrer « des vignerons dans leur humanité et non pas dans leur expertise paysanne », la trame narrative ne suit pas de logique pré-établie. Après avoir « fermé [s]on carnet de notes au bout de trois jours », Bruno Sauvard se laisse « séduire » par ces vignerons, sans scénario. Au plus près de la vie de ses protagonistes, sans voix off ni témoignages de spécialistes, le réalisateur s’efface afin de garantir une immersion totale du spectateur. Loin d’adopter une posture didactique, Wine Calling se veut plutôt lyrique : plans rapprochés sur les vignerons, jeux d’ombres et de lumières, effets de flous, cadre dans le cadre… ancrent le documentaire dans une logique affective visant à produire des émotions chez le spectateur.

29À cela s’ajoute le rôle méta-discursif de la musique, fil conducteur de ce documentaire et symbole de la forme de vie qu’il cherche à montrer. En effet, plus de la moitié des vignerons protagonistes de ce documentaire font de la musique, à l’instar de Stéphane Morin qui a baptisé une de ses cuvées « Chic et pas Cher » en référence à une chanson du punk Arno. Des morceaux de rock, punk, reggae, blues, swing… rythment les différentes séquences du documentaire selon les tempos variables marquant des temps forts, entre démonstration des pratiques engagées des sujets et partage d’un quotidien familial ordinaire. Ainsi, la séquence d’ouverture du documentaire offre un condensé de plans qui s’enchaînent au son de la chanson Berlin des Black Rebel Motorcycle Club afin de faire brusquement pénétrer le spectateur dans l’univers des vignerons nature. Ce type de son énergique, récurrent dans le documentaire, contraste fortement avec des morceaux plus tranquilles tels que Ali Baba de John Holt ou Country Boy de The Heptones. Si cette musique reggae au tempo lent invite au calme et à la sérénité que suscite la séquence du travail à la vigne dès l’aube, elle se charge d’une seconde valeur sémiotique, à savoir représenter la personnalité du personnage à l’écran.

30Ainsi la musique incarne-t‑elle l’identité du vigneron qu’elle accompagne, à l’image du vin naturel qui, nous dit Massotte, « est le reflet de la personnalité du vigneron, du terroir et de l’environnement dans lequel les raisins ont grandi et ont été vinifiés [30] ».

31La musique, propre au style [31] du réalisateur, fait également partie intégrante de la « contre-culture » du vin naturel qui emprunte à la culture populaire dans ses dispositifs communicationnels (noms de cuvées, étiquettes, blogs) [32]. En outre, associée aux protagonistes et à leurs instants de vie, la musique permet au spectateur d’expérimenter ces différents instants qu’il a ainsi l’impression de partager avec les vignerons. Le documentaire se dote alors d’une dimension esthésique [33] qui met en éveil les sens du spectateur, selon une imbrication polysensorielle, permettant des associations entre les propriétés sensibles de la musique et des images d’une part, et l’ethos ainsi que l’identité des acteurs en présence d’autre part.

Une rhétorique identitaire

32Dans son article consacré aux vins nature et biologique, Andrea Catellani distingue entre deux rhétoriques du vin : référentielle et identitaire. La première « cherche à construire une impression de sérieux, de rationnel, de contrôle [34] » à travers une stratégie de discours fondée sur une « terminologie technique, une certaine abondance de chiffres et pourcentages (l’aspect quantitatif) et l’usage d’outils comme la liste (ensemble organisé de points, qui exprime les résultats d’un travail d’analyse, ou d’articulation didactique) [35] ». La seconde, quant à elle, repose sur le système de valeurs qui fonde la forme de vie et à partir de laquelle elle « construit une représentation du sujet (l’agriculteur, “auteur” et même artiste), de la nature, des “opposants” (la chimie industrielle, le vin conventionnel technicisé et homogénéisée, etc.) [36] ».

33En montrant le quotidien ordinaire des vignerons et de leur famille, Wine Calling relève essentiellement de cette rhétorique identitaire. Convivialité, solidarité dans l’effort, entraide dans les moments difficiles, communion avec la nature, le documentaire propose une « forme d’humanisme œnologique [37] », le vin étant un enfant dont on « accouche » et que l’on « accompagne » pour bien l’« élever ».

34Il n’empêche que le documentaire emprunte parfois un ton didactique qui distille, çà et là, quelques informations techniques et explications sur les pratiques engagées. Les données géologiques et géographiques du terroir de Banyuls, les principes de macération carbonique et de fermentation à froid, les analyses en laboratoire afin de déterminer la quantité d’azote et l’acidité (équilibre) du jus, les mesures de CO2 ou encore les risques de piqûres lactiques et d’infections bactériennes sont abordés dans le fil de la discussion, avec simplicité et proximité, sans ambages scientifiques.

À travers les discours, l’ethos

35Cette idéologie des vins nature repose fondamentalement sur le respect du terroir dont il est question dès les premières minutes du documentaire : au beau milieu de ses vignes situées sur des coteaux plein nord, Laurence Manya Krief présente le terroir de Banyuls selon ses critères géographiques et les pratiques culturales dont il a fait l’objet (murets de pierres sèches, travail du sol non mécanisable et culture bio). Ainsi, l’approche de la vigneronne ne semble guère éloignée de celle de l’Organisation internationale de la vigne et du vin qui définit le terroir en ces termes :

36

  • Le « terroir » vitivinicole est un concept qui se réfère à un espace sur lequel se développe un savoir collectif des interactions entre un milieu physique et biologique identifiable et les pratiques vitivinicoles appliquées, qui confèrent des caractéristiques distinctives aux produits originaires de cet espace ;
  • Le « terroir » inclut des caractéristiques spécifiques du sol, de la topographie, du climat, du paysage et de la biodiversité.

37Fondé sur la mise en œuvre de pratiques spécifiques grâce auxquelles le vin sera le reflet de l’espace où il a été produit, le terroir, et plus précisément le contenu qui lui est associé, constitue le nœud de la discorde entre les vignerons nature et la normalisation conventionnelle : « Ils refusent l’appellation sur des vignes qui sont centenaires, en agriculture biologique, vinifiées sans rien d’autre que du jus de raisin. Et qu’on te dit que ça, ça représente pas ton terroir ! Tu te dis qu’y a un truc qui va pas ». Au-delà de l’engagement des vignerons pour la préservation de la nature, c’est l’incompréhension qui demeure, liée à un sentiment d’exclusion : « Nous, en tous les cas dans cette région ici, on a été plus ou moins mis de côté des appellations… tu vois… parce qu’on n’est pas dans les critères gustatifs et ainsi de suite. Bon, c’est leur problème. Ils ont décidé que, effectivement, on correspond pas aux critères d’appellation. Donc on en est sorti ». Exclusion qui conduit à une marginalisation obligeant les vignerons « à réinstaurer un climat de confiance » avec le consommateur.

38La parole engagée dans ce documentaire se situe donc dans l’affirmation d’une légitimité des pratiques vitico-vinicoles adoptées, porteuses d’une authenticité vraie, celle du terroir. Naturalistes, ces pratiques se conforment à une idéologie proche du « néo-archaïsme [38] », confiante dans le vitalisme de la nature : elles consistent en un travail avec le cheval, l’usage de bouses de cornes et de paillage pour nourrir une terre qui a été « désactivée par la chimie » afin que la vigne puisse retrouver une « connexion ».

39Au-delà de la justification des propos par la démonstration [39], l’affirmation de ces pratiques et de cet ethos repose sur l’opposition d’un « moi » (ou d’un « nous »), animé par son propre système de valeurs, contre l’obscurantisme d’un « ils », opposant, voire anti-destinateur judicateur [40] guidé par une axiologie opposée. Sans jamais les nommer, ce sont les acteurs de l’œnologie conventionnelle et de sa normalisation dont il est pourtant question. Cet anticonformisme est subtilement montré à travers les messages sur les T-shirts portés par les vignerons (« Les timbrés du vin », « Mettez un peu de rock dans votre vin », « Pots de vin 2015 », « Globules rouges »), les noms de certains vins (« Chuck Barrick », « Carbo culte », « ça plane pour toi », « Java ») et les photos extraites de films de la culture populaire française tels que La traversée de Paris ou Les tontons flingueurs. Cette lutte à demi-mot passe également par une identité bien assumée et une valorisation de cet ethos plutôt que par la critique ouverte et la polémique. Bruno Sauvard notera d’ailleurs qu’il a volontairement écarté les vignerons radicaux aux discours rebelles que l’on peut voir se propager sur Internet. La prise de parole débute donc très souvent par un « moi » ou « pour moi » engageant la responsabilité individuelle de chacun dans cette lutte collective : « Moi j’fais du vin sans rien », « Pour moi, la décision de laisser l’herbe dans le sol et de faire des paillages, c’était pour moi une logique », « Moi, je ne mets pas d’engrais », « pour moi, c’est ça du vin ». Car lorsque les revendications se veulent plus virulentes, elles émanent des témoignages d’autres acteurs, tels que le journaliste très engagé Antonin Iommi-Amunategui, qui apparaît comme un porte-parole du combat mené :

40

Ils travaillent proprement dans leurs vignes pour avoir un beau raisin qui, ensuite, n’est pas salopé par des produits chimiques. Donc c’est une cohérence de A à Z, du début à la fin. Mais effectivement, c’est pas forcément leur boulot de parler de cet aspect militant, ni non plus encore moins d’écrire dessus. Et donc là, il faut des journalistes, il faut des médias.

41Responsabilité individuelle mais collectivité : la force de l’engagement tient dans le collectif, sans cesse mis en exergue dans ce documentaire de telle sorte que cette forme de vie s’apparente à une sorte de microcosme, « naturalisme individualiste mais avec des accents communautaires [41] » : « C’est des gros chantiers que t’as à faire une fois. Donc c’est bien de les faire à quinze. C’est l’intérêt du collectif. Autrement… », « Tu retrouves un groupe, ça t’aide aussi […] On repartait aussi avec des idées, avec des trucs… Tu vois. Donc ça nous a pas mal apporté ».

42Le partage des connaissances et des expériences, qu’elles soient positives ou négatives, contribue à la construction d’un « savoir collectif », afin de ne pas renouveler les erreurs du passé : « cela fait un peu partie des problèmes qu’on a aujourd’hui […] On dit c’est des problèmes de plein de choses mais c’est nous qui faisons plein de conneries. Il faut le dire ». L’expérimentation permanente et l’écoute de ses prédécesseurs inscrivent les pratiques et les savoirs dans une sorte de filiation de Jules Chauvet à Alex Castex en passant par Marcel Lapierre : « Moi, j’pars un peu du principe, si tu veux, qu’il y a des gens qui ont déblayé tout un tas de choses, qui ont travaillé déjà. Et j’aime bien vraiment aller puiser dans ces connaissances-là, et essayer déjà d’écouter l’autre ». L’argumentation des vignerons met ainsi en jeu cet « héritage » laissé par des scientifiques qui, à partir du triptyque géologique (sol), biologique (plante) et climatique (ciel), ont conceptualisé l’« effet terroir ». Fondée sur l’explication et la logique de la preuve, cette structure argumentative est renforcée par les effets de montage : l’accumulation des plans sur les différentes tâches réalisées (dramatisation de l’effort), le rythme de la musique (intensité de moments forts) de même que la fonction de relais [42] des paroles des chansons engagent un méta-discours qui légitime les propos des vignerons en leur apportant de la profondeur et une certaine intensité.

43Si les textes-énoncés [43] que ces vignerons portent sur le vin empruntent aux discours de la dégustation conventionnelle, et plus particulièrement la métaphore de l’être humain, cette dernière prend ici tout son sens. Humanisé sous les traits de cet enfant dont on « accouche » et que l’on « accompagne » pour l’« élever » dignement, dans le respect des valeurs, le vin est vivant, à l’image de la nature. Une particularité que l’on retrouve également chez une visiteuse du festival ViniCircus pour qui le vin est un véritable acteur qui « raconte une histoire », qui « l’emmène chez lui », « déploie son paysage sonore, olfactif, visuel » mais aussi, et surtout, qui est à l’image de son vigneron. Cette filiation entre le vin et le vigneron, soulevée à plusieurs reprises dans le documentaire, semble d’ailleurs être un critère fondamental pour le consommateur. Vin d’émotion et de plaisir, « frais » et au « fruit éclatant », qui « explose en bouche », le vin naturel révèle une « vérité cachée », celle du travail du vigneron qui l’a produit.

44Cette personnification se trouve parfois poussée à l’extrême, comme dans l’explication des bienfaits de la mise en carafe par Céline Georget où le Carignan, « homme de caractère » qui « se la pète » mais reste néanmoins « doux » et « fidèle », se libère du « short S » dont il a été affublé lors de son passage en bouteille :

45

Le vin, tu le mets dans une barrique, il est à l’aise, il est dans un beau volume, dans du bois, il a un super échange et tout. Et là, et ben nous on vient le mettre dans une bouteille. Donc là, il passe d’un super short XXL à un S. Et là il est… un peu comme ça, il essaye de se mettre à l’aise mais il y arrive pas trop parce que là, il est un peu coincé. Voilà. Et nous le rôle, c’est que, ben du coup, on veut le faire déguster donc toi tu l’ouvres et hop tu verses. Ben il est encore comme ça tu vois. Par contre, si tu lui laisses un p’tit quart d’heure et là, tu viens, comme tu lui as défait son p’tit bouton et tout et qu’là il s’ouvre et tout, au bout d’un quart d’heure, il est là dans le verre, il se dit « purée, ch’suis bien là ! » et là, tu vas le déguster à sa juste valeur.

46Tutoiement, langage décomplexé, familiarité… tels sont les dispositifs langagiers adoptés par les vignerons nature pour parler de leur vin, avec simplicité et proximité, loin des formulations élitistes qui instancient parfois une distance avec les amateurs non confirmés. Et bien que la terminologie employée (niveau des signes) s’appuie sur les mêmes descripteurs (« frais », « élégant », « délicat », « puissant », « fin ») que ceux utilisés pour décrire les vins conventionnels, certains vignerons se laissent parfois aller à quelques fantaisies (« décoiffé », « avec des tripes »).

Conclusion : Wine Calling, un infra-récit socio-politique

47Wine Calling n’est donc pas un manifeste radical contre le système régi par les règles et la norme du vin conventionnel. Il s’agit plutôt d’un engagement pour un idéal de vie fondé sur le respect de la nature, la solidarité et l’hédonisme. Chaque plan de pertinence met en évidence un aspect de cette revendication identitaire, à la fois pour le vigneron lui-même et le vin qu’il produit.

48Toutefois, derrière ces différents niveaux de pertinence se cache un infra-récit socio-politique. En s’affranchissant des règles préconisées par les labels, ces vignerons nature proposent une autre manière de faire du vin et mettent en jeu des stratégies [44] de vie risquées. En effet, ils travaillent constamment « sur le fil du rasoir », « sans filet » en faisant le choix de vivre avec le minimum : « évidemment, c’est pas l’aspect économique qui motive tout ça », « Si au bout de 10 ans, t’arrives à remonter à 1 euro pour pouvoir être un peu plus tranquille à la fin et pis (sic) payer plus de main-d’œuvre et payer plus les gens avec qui tu travailles et avoir plus de matos, voilà, ça se calcule comme ça ». Une telle décision repose avant tout sur un principe, celui de rendre leurs vins accessibles à leurs consommateurs : « Moi déjà j’trouve que les vins que je fais sont relativement chers quand tu vas les acheter chez le caviste. Donc plus cher que ça ben à ce moment-là y’a, au bout d’un moment y’a plus personne que je connais qui pourrait les acheter. Non, ça marche pas non plus ».

49À cela s’ajoute une implication écologique et sanitaire : ces vignerons refusent tout pesticide, tout engrais chimique et tout intrant dans le but de préserver leur propre santé mais également celle de leurs consommateurs qui éprouveront le « plaisir de boire sainement ». Ce principe, ils le justifient pour certains à travers le témoignage de leur expérience, celle de la perte d’un parent, « exposé à des molécules » de traitements chimiques, ou de leur propre maladie engendrée par l’usage de produits phytosanitaires.

50Quant à la dimension sociale de leur engagement, elle repose sur la réactivation des valeurs de solidarité, d’entraide et de la non-concurrence qui se concrétisent dans leurs actes : vendanger le vignoble de son collègue malade, réparer un pressoir en panne ou encore « ramasser ton voisin » lorsqu’il tombe par terre.

51Entre intensités et détentes du rythme d’une forme de vie simple, animée par une « soif de vie et de connerie » partagée, Wine Calling n’en reste pas moins un film-documentaire engagé. À travers ces tranches de vie ordinaire, où alternent les moments de fête et des petits bonheurs de la vie familiale et les moments de travail, Bruno Sauvard met en garde le spectateur contre les pratiques conventionnelles. Plus qu’une critique implicite, son documentaire est une invitation au combat qu’il lance explicitement à la fin de son documentaire, à travers la voix de Michaël Georget. Alors qu’il dresse le bilan positif des pratiques vitico-vinicoles grâce auxquelles le vin naturel est parvenu à s’élever à une certaine qualité, il soulève également la nécessité de maintenir le combat pour cette qualité et la préservation de son authenticité, mis en péril par les négociants pour lesquels le vin nature constitue un véritable marché. Wine Calling laisse ainsi le spectateur avec cette mise en garde tandis que les vignerons, eux, se retrouvent en toute convivialité, au bord de l’eau, accompagnés par le son du titre Liberté, Égalité, Fragilité de Mickey 3D. Une façon de faire réfléchir le spectateur citoyen…

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Mots-clés éditeurs : récit, film documentaire, engagement éthique, niveaux de pertinence, vins naturels, forme de vie

Date de mise en ligne : 05/01/2021

https://doi.org/10.3917/comla1.206.0051

Notes

  • [1]
    Néologisme formé à partir du nom du célèbre critique américain Robert Parker auquel ses détracteurs reprochent d’ériger ses préférences personnelles en standard œnologique à l’échelle mondiale.
  • [2]
    Jonathan Nossiter dans La Revue du vin de France, 2014 : https://www.larvf.com/,vin-mondo vino-films-vins-italie-jonathan-nossiter,4363638.asp
  • [3]
    Aubertot Jean-Noël, Jean-Marc Barbier, Alain Carpentier, Jean-Joël Gril, Laurence Guichard, Philippe Lucas, Serge Savary, Isabelle Savini, Marc Voltz, Pesticides, agriculture et environnement. Réduire l’utilisation des pesticides et limiter leurs impacts environnementaux. Expertise scientifique collective, synthèse du rapport, INRA et Cemagref (France), 2005, p. 11.
  • [4]
    Chauvet Jules, Le vin en question, Entretien avec Hans Ulrich Kesselring, Paris, Les éditions de l’Épure – Marie Rocher, 1998.
  • [5]
    Créée dans le but de promouvoir les produits du terroir et de les protéger contre la fraude, l’AOC est un label français qui prescrit les conditions de production et le processus d’élaboration de ces produits dans un cahier des charges strict permettant ainsi leur homologation. L’AOP (Appellation d’origine protégée) est un label européen qui réglemente la production, la transformation et l’élaboration des produits dans une zone géographique donnée. Elle permet ainsi d’étendre la protection juridique des produits à l’échelle européenne, voire au-delà. Elle a d’ailleurs remplacé l’AOC pour la plupart des produits à l’exception des vins.
  • [6]
    Voir à ce propos : Moutat Audrey, « Discours transgressifs des vins naturels », Revue des œnologues, n166, 2018, p. 9-11 ; Moutat Audrey, « Les vins naturels, singuliers à plus d’un titre », in Jocelyne Pérard & Claudine Wolikow (dir.), Vignobles et vins singuliers de l’unique au pluriel, Dijon, Éditions Chaire UNESCO, Centre Georges Chevrier, 2019a, p. 289-306 ; Moutat Audrey, « Créativité et rhétorique des discours promotionnels sur les vins naturels », Recherches en communication, n48, 2019b, p. 69-91. Disponible sur : http://sites.uclouvain.be/rec/index.php/rec/article/view/11723/8553
  • [7]
    Relevant du ministère chargé de l’économie, la DGCCRF est une administration qui veille au bon fonctionnement des échanges marchands et s’assure « du respect des règles de la concurrence, de la protection économique des consommateurs [et] de la conformité des produits et des services » (https://www.economie.gouv.fr/dgccrf/dgccrf).
  • [8]
    Fontanille Jacques, Formes de vie, Liège, Sigilla, Presses Universitaires de Liège, 2015.
  • [9]
    Bertrand Denis, Précis de sémiotique littéraire, Paris, Nathan, 2000.
  • [10]
    Fontanille Jacques, « Textes, objets, situations et formes de vie. Les niveaux de pertinence du plan de l’expression dans une sémiotique des cultures », in Denis Bertrand & Michel Costantini (dir.), Transversalité du Sens, Paris, Presses universitaires de Vincennes, 2007. Disponible à : https://www.unilim.fr/pages_perso/jacques.fontanille/textes-pdf/CSituations_pratiques2004_06.pdf
  • [11]
    Leleu-Merviel Sylvie, « Montage culinaire, la partition du légume », Communication & langages, n164, 2010, p. 54.
  • [12]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [13]
    Verón Eliseo, « L’analyse du contrat de lecture », Les médias : expériences et recherches actuelles, IREP, 1985.
  • [14]
    Jacques Fontanille, art.cit.
  • [15]
    Entretien avec Bruno Sauvard dans le dossier de presse consacré au film documentaire.
  • [16]
    Stéphane et Marjorie Gallet, interviewés par Pierre Casamayor pour la Revue du Vin de France, no 598, 2016.
  • [17]
    Barthes Roland, Introduction à l’analyse structurale du récit, Paris, Seuil, 1981.
  • [18]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [19]
    Bonescu Mihaela, Convivalité et communication : de l’imaginaire social à la gare communicante, thèse de doctorat, Université de Bourgogne, 2007.
  • [20]
    Boutaud Jean-Jacques, De la commensalité – du goût – des aliments, Paris, Jean-Paul Rocher éditeur, 2005.
  • [21]
    Boutaud Jean-Jacques & Verón Eliseo, Sémiotique ouverte, Paris, Hermès Lavoisier, 2007.
  • [22]
    Pinel Vincent & Pinel Christophe, Dictionnaire technique du cinéma, Paris, Armand Colin (1996), 2016.
  • [23]
    C’est nous qui soulignons.
  • [24]
    Greimas Algirdas Julien, Sémantique structurale, Paris, Puf, 1966.
  • [25]
    Nous verrons un peu plus loin que ce clivage sera réactivé dans le documentaire mais selon une axiologie inversée : le « nous » sera celui de la normalité nature tandis que le « eux » renverra aux labels conventionnels.
  • [26]
    Barthes Roland, « Rhétorique de l’image », Communication, n4, 1964, p. 40-51.
  • [27]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [28]
    Jacques Fontanille, art. cit.
  • [29]
    Jost François, « Pour une séméiologie des médias », Signata, n2, 2011, p. 139-153. Disponible sur http://journals.openedition.org/signata/631
  • [30]
    Massotte Pierre, Le défi des vins doux naturels, Londres, ISTE Éditions, 2017, p. 98.
  • [31]
    Couégnas Nicolas, Du genre à l’œuvre. Une dynamique sémiotique de la textualité, Limoges, Lambert-Lucas, 2014.
  • [32]
    Voir à ce propos Audrey Moutat, 2019a et 2019b.
  • [33]
    Jean-Jacques Boutaud & Eliseo Verón, op. cit.
  • [34]
    Catellani Andrea, « Vin nature et vin biologique. Observations sur quelques aspects de la communication œnologique », Lexia, 19-20, p. 473.
  • [35]
    Ibid., p. 473-474.
  • [36]
    Ibid., p. 474.
  • [37]
    Ibid.
  • [38]
    Morin Edgar, « De la culturanalyse à la politique culturelle », Communications, n14, 1969, p. 5-38.
  • [39]
    Filmé en plan serré, Michaël Georget égraine des mottes de terre aériennes entre ces mains afin d’attester les bienfaits de ses pratiques sur la santé de son sol.
  • [40]
    Denis Bertrand, op. cit.
  • [41]
    Andrea Catellani, art. cit., p. 475.
  • [42]
    Barthes Roland, « Rhétorique de l’image », Communication, n4, 1964, p. 40-51.
  • [43]
    Jacques Fontanille, art. cit.
  • [44]
    Jacques Fontanille, ibid.

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