Couverture de COME_070

Article de revue

Liban Conseil de Sécurité et souveraineté

Pages 113 à 134

Notes

  • [1]
    La liste des Etats défaillants (Failed States index) établie par le « Fund of the peace » (site : www.fundforpeace.org) depuis 2005 est à cet égard instructive. Elle comporte quatre catégories de situations de l’Etat, du risque élevé de défaillance à la stabilité : « alert », « warning », « moderate » et « sustainable » et les Etats sont classés à partir de 1 (Etat à risque le plus élevé) par ordre décroissant de risque de défaillance. Le Liban est en 2005 n° 37 (catégorie « warning », en 2006 n° 65 (catégorie « warning »), en 2007 n° 28 (catégorie « alert »), en 2008 n° 18 (catégorie « alert »).
  • [2]
    Enzo Cannizzaro, « Entités non-étatiques et régime international de l’emploi de la force ; une étude sur le cas de la réaction israélienne au Liban », RGDIP (Revue générale de droit international public), 2007, p.333.
  • [3]
    Le retrait de l’armée syrienne est intervenu le 26 avril 2005, après l’assassinat de Rafic Hariri en février 2005, date à laquelle 14000 soldats syriens étaient encore présents au Liban. Sur la réaction du CS à ce retrai, voir CS/8372, 5127e séance (communiqué de presse). Quant au retrait total d’Israël, il est encore, en octobre 2008, subordonné au règlement de la question des fermes de Chebaa.
  • [4]
    Texte sur le site du Conseil constitutionnel de la République libanaise : www. conseil-constitutionnel.gov.lb/fr/taef.htm ; voir aussi : Sami SALHAB, « La résolution 1559 du Conseil de sécurité et l’Accord de Taëf, compatibilité juridique et incompatibilité politique », Confluences Méditerranée, n° 56, hiver 2005-2006, p 83.
  • [5]
    Enzo CANNIZZARO, art cit à la note 1 supra.
  • [6]
    Voir aussi : Hervé ASCENSIO, « Effets juridiques et efficacité des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies portant sur le Liban », Les Cahiers de l’Orient, printemps 2009, n° 94, p 37.
  • [7]
    S/PRST/2005/4, 15 février.
  • [8]
    S/2005/203, 24 mars.
  • [9]
    Rapport de la Commission S/2005/775 du 12 décembre.
  • [10]
    Lettre S/2005/783, 13 décembre.
  • [11]
    S/2006/893, 15 novembre.
  • [12]
    Cette analyse diverge de celle du Professeur Salhab pour qui, dans l’article précité (note 3 ci-dessus), la résolution 1559 « impose des obligations » (p 83) ; il estime par ailleurs que, quoique adoptée dans le cadre du chapitre VI, elle revêt un caractère obligatoire en vertu de l’article 25 disposant que les Etats membres « s’engagent à appliquer les résolutions du CS » (p 89). L’article 25 ne vise pas les « résolutions » mais les « décisions » ; or ici, le langage du CS n’est en rien celui de la décision, mais celui de la recommandation.
  • [13]
    S/PRST/2007/17, 11 juin, rappelant les textes précédents pertinents.
  • [14]
    Lettre S/2005/208, 29 mars.
  • [15]
    S/2005/662, 20 octobre.
  • [16]
    Josiane Tercinet, « Observations sur une résolution très spéciale : la 1701 (2006) établissant la FINUL II », Arès, n° 59, avril 2008, p 101.
  • [17]
    Sur la difficulté à repérer les « puissances occidentales » : Josiane Tercinet, « Les puissances occidentales et les opérations de paix », Annuaire français de relations internationales, vol IX, 2008, p.581.
  • [18]
    S/PV.5028 ; 2 septembre 2004.
  • [19]
    S/PV.5160, 7 avril 2005.
  • [20]
    S/PV.5511, 11 août 2006.
  • [21]
    S/PV.5685, 30 mai 2007.
  • [22]
    Josiane TERCINET, les deux art cit (voir les notes 14 et 15).
  • [23]
    Josiane TERCINET, « La participation de la France, membre permanent du Conseil de sécurité, à la FINUL », Arès, 1978-1979, p 344.
  • [24]
    Ghassan EL Ezzi, « Printemps libanais ? », Confluences Méditerranée », n° 56, hiver 2005-2006, p 9.
  • [25]
    Est à cet égard significative la formule du représentant du Liban au CS lors de la discussion sur le vote de la 1701 lorsqu’il évoque « la lutte du Liban pour recouvrer la pleine souveraineté sur l’ensemble de son territoire », signe qu’hélas cette souveraineté est battue en brèche : S/PV.5511, 11 août 2006, p 21.
  • [26]
    Préambules de la résolution 1595 (2005), de la 1664 (2006), de la 1757 (2007), notamment.
  • [27]
    On pourra certes objecter qu’il y en a bien d’autres. La présence des réfugiés palestiniens a évidemment pris la forme à une certaine époque d’Etat dans l’Etat, entraînant le Liban dans la guerre civile et dans la guerre internationale avec Israël. Ce facteur d’instabilité semble aujourd’hui en phase « dormante ». Mais le « risque » est bien toujours là. Les événements récents montrent que certains mouvements islamistes présents dans la zone de Tripoli ou au Sud ou dans la Bekaa et soutenus de l’extérieur constituent une nouvelle menace dont le potentiel pourrait croître.
  • [28]
    Voir note 3 ci-dessus.
  • [29]
    Rapport de la mission Fitzgerald d’établissement des faits après l’assassinat de R Hariri, S/2005/203, 24 mars (§6).
  • [30]
    A/58/879 et S/2004/699, 30 août.
  • [31]
    S/PV.5028, 2 septembre 2004.
  • [32]
    S/PV.5028, 2 septembre 2004.
  • [33]
    S/PV.5511, 11 août 2006.
  • [34]
    A/58/879-S/2004/699, 30 août 2004.
  • [35]
    S/2004/794, 5 octobre.
  • [36]
    S/2004/777, 3 octobre.
  • [37]
    Josiane TERCINET, art cit (voir les notes 14 et 15 ci-dessus).
  • [38]
    Josiane Tercinet, art cit sur la FINUL II, p 102.
  • [39]
    S/2007/281, 14 mai : « Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement libanais pense que le moment est venu pout le Conseil de sécurité de faire en sorte que le tribunal spécial pour le Liban devienne une réalité. Nous vous demandons donc de soumettre d’urgence au Conseil de sécurité notre demande […]. Une décision contraignante […] serait en plein accord avec l’importance que l’Organisation des Nations Unies attache à cette question depuis le début, lorsque la commission d’enquête a été établie. Tout retard supplémentaire […] serait préjudiciable à la stabilité du Liban, à la cause de la justice, à la crédibilité de l’organisation elle-même et à la paix et à la sécurité dans la région ».
  • [40]
    Le Monde, 15 septembre 2006.
  • [41]
    S/PV.5511, 11 août 2006, p 20.
  • [42]
    Salué par le CS dans la déclaration présidentielle S/PRST/2008/17, 22 mai 2008.
  • [43]
    Le Monde, 17 octobre 2008.
  • [44]
    L’Express, 8 janvier 2009. L’Orient Le Jour, 27 avril 2009.
  • [45]
    Rapport du Secrétaire général sur l’application de la résolution 1701 : S/2008/45, 27 juin 2008 (précédant le renouvellement de la FINUL jusqu’au 31 août 2009, à l’unanimité, par la résolution 1832 du 27 août).
  • [46]
    L’Orient Le Jour, 6 mai 2009.
  • [47]
    L’Orient Le Jour, 5 septembre 2008, p.4.
  • [48]
    Le Tribunal spécial pour le Liban commence à fonctionner le 1er mars 2009.
  • [49]
    L’Orient Le Jour, 23 septembre 2008, p.4. L’annonce est faite dans un communiqué émanant des deux ministères des affaires étrangères, après l’adoption d’un décret syrien prévoyant l’ouverture d’une ambassade à Beyrouth, c’est-à-dire, dans le droit des relations diplomatiques, d’une mission diplomatique de première classe.

1 Le Liban est un Etat largement hors norme, tant au plan interne qu’au plan international. Au plan interne, ses structures politiques de base constituées à partir de formations confessionnelles dominées par le clanisme rendent difficile une représentation effective et efficace du demos ; d’un autre côté, règne une authentique liberté d’expression. Il en résulte une sorte de démocratie biaisée qui empêche la réalisation d’un Etat de droit totalement abouti. Les normes sont élaborées avec difficulté ; leur mise en œuvre est problématique faute, pour les pouvoirs publics, de contrôler intégralement le maintien de l’ordre et la sécurité sur la totalité du territoire.

2 Cela rejaillit sur la dimension internationale : un Etat dont le gouvernement ne peut imposer son autorité sur l’intégralité de l’espace national est au pire failli, au minimum défaillant. Le Liban donne ainsi l’image d’un Etat en partie déliquescent, en convalescence permanente, avec des rechutes périodiques [1]. Il a besoin de s’appuyer sur une « béquille » extérieure, à moins que celle-ci ne lui soit plus ou moins imposée, comme la béquille syrienne. Dans les situations de crises aiguës- les « rechutes »-, qui prennent parfois l’allure d’un conflit, voire d’une guerre, la « communauté internationale », incarnée en vertu de la Charte des Nations Unies par le Conseil de sécurité, est amenée à se pencher sur le cas libanais. Progressivement, les catégories classiques du droit international deviennent difficiles à lui appliquer [2]. Fait défaut aujourd’hui une théorie juridique de l’Etat failli ou déliquescent (ou défaillant) ou encore du quasi-Etat (type Somaliland), qui serait en même temps la reconnaissance d’une certaine… faillite du droit international classique, très « stato-centré ».

3 Aussi bien n’est-il pas dépourvu d’intérêt de se pencher sur les grandes résolutions adoptées par le Conseil de sécurité (ci-après CS) depuis la célèbre 1559 de 2004 afin d’observer quel appui est apporté par la communauté internationale à l’Etat libanais pour l’aider à retrouver l’effectivité de son pouvoir.

4 Jusqu’en 2004, les résolutions restent sur ce terrain relativement en retrait. Certes, figure inlassablement, notamment dans celles qui intéressent la FINUL (Force intérimaire des Nations Unies au Liban), la formule de la 425 du 19 mars 1978 selon laquelle le CS appuie vigoureusement « l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance politique du Liban à l’intérieur de ses frontières internationales », signe que leur respect n’existe pas. Plus récemment, à partir de l’automne 2004, les fêlures s’accentuent : une réforme constitutionnelle, tendant à prolonger le mandat du Président en exercice, est imposée de l’extérieur ; parallèlement les milices, libanaises ou non, continuent à saper l’autorité de l’Etat. Le 14 février 2005, l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, emblématique de la reconstruction après la guerre civile, est assassiné ; les attentats et assassinats politiques se succèdent sans que la recherche et le jugement efficaces et effectifs des coupables semblent nationalement possibles. C’est ensuite l’épisode du conflit de l’été 2006 avec l’intervention armée d’un Etat étranger non dirigée au départ contre l’Etat libanais lui-même, mais contre la milice d’un mouvement qu’il héberge. A plusieurs reprises, le CS est amené à adopter des résolutions assez inédites pour essayer d’appréhender des situations qui ne le sont pas moins, soit, pour ne mettre l’accent que sur les plus caractéristiques :

5

  • la 1559 (2004) (2 septembre) relative aux forces armées étrangères, aux milices libanaises et non libanaises et à l’élaboration de règles constitutionnelles sans interférence étrangère ;
  • la 1595 (2005) (7 avril) créant une commission d’enquête internationale indépendante (« la Commission ») sur l’attentat contre Rafic Hariri ;
  • la 1701 (2006) (11 août) établissant la FINUL dite « renforcée » ou « II » ;
  • la 1757 (2007) (30 mai) décidant de l’entrée en vigueur le 10 juin 2007 de l’Accord sur la création d’un Tribunal spécial pour le Liban annexé à la résolution.

6 Ces résolutions sont bien évidemment le reflet de la vision de la question libanaise par cette incarnation particulière, mais incontournable pour les questions de sécurité internationale, qu’est le CS, donc de ses membres, les uns permanents, les autres variables au gré des renouvellements auxquels l’instance est soumise ; elles expriment donc la partition, le jeu de la communauté internationale (I). En résulterait-il que le Liban ne serait que le pion de ce jeu, totalement manipulé par l’instance onusienne ? Il suffit d’accorder quelque attention à ces textes, à leur élaboration et à leur portée pour se rendre compte qu’il n’en est heureusement rien et que le Liban sait tirer son épingle de ce jeu (II).

Le jeu de la communauté internationale

7 Mises à part certaines compétences intéressant le fonctionnement de l’ONU, le Conseil de sécurité est investi par la Charte du « maintien de la paix et de la sécurité internationales » ; l’article 24 lui confère « la responsabilité principale » dans ce domaine et par ailleurs l’ONU ne peut « intervenir dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d’un Etat » selon la formule bien connue de l’article 2 § 7. Le CS ne peut donc traiter d’une question si elle n’est pas « internationalisée » au sens des articles précités (A). Une fois qu’il en est saisi, il s’exprime au « nom » (article 24) des membres de l’ONU, autrement dit de tous les membres. C’est la position de principe. Cependant, dans le cas des résolutions étudiées, il semble bien que l’écriture de la partition incombe largement aux puissances occidentales (B).

L’internationalisation des « questions » libanaises

8 Une question n’est traitable par le CS que si, soit à la fois elle ne relève pas exclusivement de la compétence nationale (affaire interne) et est « susceptible » de menacer la paix internationale (chapitre VI), soit elle « menace » directement cette paix (chapitre VII) ; dans le premier cas, le CS ne pourra adopter qu’une « recommandation » ; dans le deuxième cas, il pourra prendre une « décision », c’est-à-dire un acte ayant force obligatoire, contraignant pour l’Etat visé, même si ce dernier ne demande pas l’intervention du CS et/ou n’y donne pas son accord et il pourra adopter des mesures coercitives non militaires (les « sanctions » de l’article 41 de la Charte des Nations Unies) ou militaires (le recours à la force au-delà de la légitime défense de l’article 42).

Le lien avec une potentielle menace pour la paix

9 Le texte le plus délicat à cet égard est la résolution 1559 puisqu’elle demande non seulement le retrait des forces étrangères (§2), mais aussi la dissolution de toutes les milices, y compris libanaises (§3), l’extension du contrôle exercé par le gouvernement à l’ensemble du territoire (§4) et qu’elle se déclare favorable à ce que les élections présidentielles se déroulent selon un processus électoral libre et régulier, « conformément à des règles constitutionnelles élaborées en dehors de toute interférence ou influence étrangère » (§5). On serait tenté de voir là des ingérences dans les affaires intérieures libanaises. Pourtant la démonstration inverse peut être faite sans difficulté majeure.

10 On peut trouver un élément d’extranéité dans chacune des rubriques. Le retrait des forces étrangères, évoqué depuis la résolution 425 (1978) ne soulève pas de problème [3]. La référence à l’« interférence ou influence étrangère » au §5 n’est qu’une application du principe de non- intervention, ce qui « internationalise » la formule sur les élections et la réforme constitutionnelle ; il convient d’ailleurs de souligner à cet égard que l’intérêt du CS pour les processus constitutionnels s’est déjà manifesté quatre mois auparavant à propos d’Haïti dans la résolution 1542 (2004) qui confère à la MINUSTAH, sur la base du chapitre VII, au § 7 de la section I, mandat de « pourvoir au bon déroulement du processus constitutionnel ». La dissolution des milices est rattachable à la question de l’effectivité du contrôle exercé par le gouvernement sur son territoire, caractéristique indispensable à la qualification d’Etat d’une entité ; d’ailleurs, la résolution 1559, comme les résolutions qui l’ont précédée depuis 1978 souligne en préambule « l’intégrité territoriale, la souveraineté et l’indépendance politique du Liban ». Le lien avec la sphère internationale et plus précisément le droit international existe. Il est renforcé si l’on tient compte du fait que le contenu de la résolution 1559 reprend le texte d’un accord interétatique, l’Accord syro-libanais de Taëf ratifié par l’Assemblée nationale libanaise le 5 novembre 1989 [4]. Il reste à savoir si l’on est dans ces domaines en présence d’une situation à risques pour la paix internationale. L’imbroglio dans lequel la « guerre de 33 jours » entre le Hezbollah et Israël a plongé la région et… les juristes [5] au cours de l’été 2006 permet de répondre positivement, au moins en ce qui concerne la présence des milices libanaises [6]. L’expérience a prouvé dans le passé que celle des milices palestiniennes pouvait aussi constituer un grand risque de cette nature. L’absence d’une réelle indépendance du fait d’une présence syrienne trop longtemps prolongée compromettant l’indépendance du Liban ne pouvait que contribuer à la fragilisation de la situation dans la région.

11 Pour la résolution 1595 (2005) créant la Commission (d’enquête internationale indépendante), le fondement est différent. Elle est rattachable à la lutte contre le terrorisme. Le CS, depuis la résolution 1368 (12 septembre 2001) considère que tout acte de terrorisme international constitue une menace pour la paix internationale et entre dans son champ de compétence. Est-on, en l’espèce, en présence de terrorisme « international » ? Cette qualification suppose qu’un Etat (ou un mouvement) étranger soit impliqué. Or, précisément, il y a doute. A la suite de l’attentat contre Rafic Hariri, le CS « demande au gouvernement libanais de traduire en justice les auteurs, organisateurs et commanditaires » et prie le Secrétaire général de suivre la situation et de faire un rapport d’urgence [7]. En application de cette déclaration, le Secrétaire général crée une mission d’établissement des faits confiée à Peter Fitzgerald. Le rapport de ce dernier en date du 24 mars 2005 établit que l’enquête menée par les autorités libanaises souffre « de graves insuffisances » et considère qu’une enquête internationale indépendante est indispensable à la découverte de la vérité (§62). Il ajoute que « le Liban aura besoin d’un soutien politique au niveau international et régional pour sauvegarder son unité et mettre son fragile édifice politique à l’abri de pressions indues » [8]. Il est évident que le résultat de l’enquête devrait permettre non seulement de découvrir les responsables, mais encore de savoir si ceux-ci sont d’origine extérieure au Liban, ce qui confèrerait à l’attentat un caractère international. En somme, la création par le CS d’une commission à cet effet relève d’une sorte de principe de précaution juridique. Le rattachement à une question de sécurité internationale réside là. C’est ainsi que la résolution 1595 « décide », « en harmonie » avec la lettre des autorités libanaises du 29 mars 2005, de créer, pour trois mois renouvelables à dater de son opérationnalité, la Commission, basée au Liban, pour aider les autorités locales à enquêter. Elle exhorte le gouvernement libanais à prendre en compte les constatations et conclusions de la Commission et décide que celle-ci doit bénéficier de son entière coopération. Le §3 demande à tous les Etats et parties de coopérer pleinement avec la Commission : la Syrie est à l’évidence concernée.

12 L’existence d’un lien entre le propos de la résolution 1701 et la paix et la sécurité internationales relevant de l’évidence, il ne paraît pas utile d’y consacrer des développements.

13 La base de la résolution 1757 relative au Tribunal spécial pour le Liban est plus complexe. Certes, la création par le CS d’un tribunal totalement international ou mixte pour juger des responsables de crimes de guerre et autres graves manquements à la suite d’un conflit est devenue banale ; la notion de sécurité internationale absorbant désormais celle de sécurité humaine, le rattachement de telles entités à la paix et à la sécurité internationales est opéré sans problème. En l’espèce, il en va différemment. Initialement, c’est le Liban qui est censé juger les responsables d’un attentat terroriste qualifiable certes d’international mais qui a visé un de ses ressortissants sur son territoire. Cependant, face à la multiplication des attentats et à la trop lente progression de l’enquête [9] le Premier ministre libanais demande le 13 décembre 2005 la création d’un tribunal international [10]. Le CS en accepte le principe dans la résolution 1644 du 15 décembre 2005 et prie le Secrétaire général d’aider le gouvernement libanais à cet effet. Les négociations avec ce dernier se déroulent entre janvier et septembre 2006 et un texte d’accord est annexé à un rapport du 15 novembre 2006 [11]. Assez classiquement, l’Accord entre l’ONU et le Liban sur la création du Tribunal spécial pour le Liban est signé respectivement le 23 janvier et le 6 février 2007. A partir de là, comme souvent dans le cas libanais, la situation se complique. Le Président du Parlement refuse de convoquer une session de ce dernier pour autoriser la ratification de l’Accord en dépit du souhait de la majorité parlementaire. Le Premier ministre demande alors au Conseil de sécurité de décider de l’entrée en vigueur de l’Accord sur le Tribunal. C’est ainsi que la résolution 1757 ne crée pas le Tribunal mais décide que l’Accord entrera en vigueur le 10 juin 2007 : le CS se substitue à une autorité de ratification défaillante. Le cas est inédit. Certes l’existence de l’attentat établit le lien avec la sécurité internationale, mais le maintien de cette dernière conduit le CS hors des sentiers battus. Bien entendu, cela ne peut se faire que par l’adoption d’une résolution contraignante, puisqu’il faut passer outre à une autorité nationale défaillante. Recommander ne suffit plus.

Recommandation ou décision

14 Au titre du chapitre VI, le CS ne peut en principe adopter que des recommandations et son éventuelle action requiert le consentement de l’Etat intéressé. Dans le cadre du chapitre VII, le CS a le choix entre recommandation et décision en vertu de l’article 39 ; en pratique, si le CS se place sous l’empire du chapitre VII, c’est qu’il entend décider.

15 Sur ce point, les quatre résolutions et leur environnement ménagent quelques surprises.

16 La résolution 1559 n’est en rien contraignante. Ne cherchant pas à dramatiser une situation déjà bien complexe, elle se garde d’évoquer une menace pour la paix internationale qui n’existe pas à ce moment-là, même si la situation interne est tendue. Le CS adopte ce que l’on pourrait appeler un profil bas, car lorsqu’il prend la résolution la réticence du gouvernement libanais à son égard est connue (cf.infra, II° Partie) ; cela dit, comme il n’entend pas « agir » à proprement parler (par exemple créer une force de paix), il n’a pas besoin de l’accord du gouvernement ; il se contente donc de « demander » ou de se déclarer « favorable ». Ce n’est pas du tout le langage de la décision, dont les conditions ne sont pas réunies [12]. Cela n’empêchera pas le CS de suivre la mise en œuvre du texte dans plusieurs déclarations et résolutions, pour constater que, si des progrès ont été réalisés, ils n’intéressent pas toutes les dispositions [13].

17 La résolution 1595 (Commission d’enquête) ne constate pas l’existence d’une menace pour la paix et la sécurité internationales et n’est pas fondée sur le chapitre VII ; elle ne relève donc pas de la catégorie des résolutions contraignantes, imposées à un Etat. Mais le langage est, dans certaines dispositions, celui de la décision (§§ 1 et 3) car elle crée une commission d’enquête sur un acte de terrorisme, soit un organe subsidiaire relevant de son pouvoir créateur en vertu de l’article 29 de la Charte. Certes la Commission fonctionnera en territoire libanais, mais elle n’est pas imposée à l’Etat puisque celui-ci en a approuvé l’établissement [14]. Par ailleurs, le CS « donne pour instruction à la Commission d’arrêter ses procédures d’enquête, en tenant compte du droit et des procédures judiciaires libanais » (§6) : il y a la volonté de respecter le système juridique de l’Etat concerné. Toutefois, un peu plus de six mois après, le CS durcit son propos. A l’occasion du renouvellement du mandat de la Commission, la résolution 1636 du 31 octobre 2005, au vu du rapport de cette dernière du 20 octobre [15] établissant la coopération limitée des autorités syriennes et la tromperie de certains responsables syriens, considère que l’attentat de l’année précédente constitue une menace contre la paix et la sécurité internationales et sur la base du chapitre VII décide (§3) de « sanctions » éventuelles contre les suspects (interdiction des déplacements à l’étranger et gel des avoirs financiers) ; c’est donc l’artillerie lourde des mesures non militaires de l’article 41 de la Charte qui est théoriquement mise en branle ; elle impose en outre à la Syrie d’arrêter les responsables syriens soupçonnés de culpabilité et étend les pouvoirs de la Commission à la Syrie. Il est vrai que ces dispositions visent surtout la Syrie, mais elles intéressent aussi le Liban dès lors que des suspects se trouveraient sur son territoire. Par la suite, la résolution 1644 du 15 décembre 2005 prolongeant la Commission jusqu’au 15 juin 2006 reste fondée sur le chapitre VII et souligne l’obligation de coopération de la Syrie ; elle n’élargit pas le mandat de la Commission à tous les attentats commis depuis le 1° octobre 2004, contrairement au souhait du Premier ministre Siniora, mais l’autorise à fournir une assistance technique aux autorités libanaises pour enquêter sur eux (§7) . Les quatre résolutions suivantes (1686 du 15 juin 2006, 1748 du 27 mars 2007, 1815 du 2 juin 2008 et 1852 du 17 décembre 2008 prolongeant la Commission, y compris les dernières la prorogeant jusqu’au 28 février 2009) ne sont plus fondées sur le chapitre VII, des progrès ayant été accomplis dans l’enquête.

18 La plus curieuse des résolutions à cet égard est sans doute la 1701 : elle constate à la fin du préambule que « la situation au Liban constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales », ce qui lui permettrait de recourir au chapitre VII, mais elle ne le fait pas. Pourtant, la suite de la résolution emprunte au vocabulaire du chapitre VII, notamment en autorisant la FINUL à « prendre toutes les mesures nécessaires », c’est-à-dire à recourir à la force, et en décidant un embargo sur les fournitures d’armes (§15). C’est en somme le chapitre VII, sans le dire [16], alors que trois de ses dispositions sont mises en œuvre : les articles 39, 41 et 42.

19 La résolution 1757 n’hésite pas à reprendre la terminologie de la 1636, d’abord en fin de préambule en « considérant une fois de plus que cet acte terroriste et ses incidences constituent une menace pour la paix et la sécurité internationales », puis elle décide « en vertu du chapitre VII » (§ 1) de l’entrée en vigueur de l’Accord sur le Tribunal et de son Statut qui lui sont annexés. Il est vrai que le caractère décisoire est indispensable à l’efficacité de la résolution puisque son objet est de faire passer en force l’entrée en vigueur des textes annexés.

20 Dans toutes les grandes résolutions « Liban » de la période récente, est perceptible la volonté de la communauté internationale, s’exprimant par le truchement du CS, d’aider le gouvernement à restaurer son autorité à l’intérieur de son territoire, dans le respect de sa souveraineté. On perçoit immédiatement la difficulté : il s’agit en réalité d’aider un Etat fragilisé dans sa qualité d’Etat à redevenir pleinement souverain mais, dans le même temps, on réaffirme à chaque fois qu’il est déjà, à la base, pleinement souverain, parce qu’Etat et qu’on cherche à consolider sa place sur la scène internationale ; il ne faut donc pas s’étonner si le CS est conduit à certaines contorsions pour rester dans le chemin de la légalité. Les choses seraient relativement simples si tous les membres de la communauté internationale à travers le CS avaient la même vision des mesures à prendre. Il n’en rien et la question semble largement mise en musique par les puissances occidentales.

La partition des puissances occidentales

21 Derrière chacune des résolutions, on retrouve prioritairement des puissances occidentales, qu’il s’agisse de l’initiative, du vote ou du contenu. Il est évident que cet activisme est alimenté par leurs intérêts nationaux.

Des résolutions élaborées (conçues, mises au point) par les puissan ces occidentales [17]

22 Le projet de résolution 1559 est élaboré par les Etats-Unis et la France et il est ensuite coparrainé par l’Allemagne, les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni [18]. La résolution 1595 est présentée par le Danemark, les Etats-Unis, la France, la Grèce, le Japon, les Philippines, la Roumanie et le Royaume-Uni [19]. Basée sur un projet américano-français, la résolution 1701 est présentée par le Danemark, les Etats-Unis, la France, le Ghana, la Grèce, le Royaume-Uni et la Slovaquie [20]. Le projet de la résolution 1757 est présenté par la Belgique, les Etats-Unis, la France, l’Italie, le Royaume-Uni et la Slovaquie [21]. Ainsi, à chaque fois, le projet est présenté au CS par les trois membres permanents occidentaux et par tous les membres non permanents de l’UE, que l’on peut assimiler à des « Occidentaux ». En revanche, le Japon ne parraine pas la 1701 alors qu’il est membre du CS au moment du vote. Peu de non Occidentaux s’associent aux projets : les Philippines pour la résolution 1595 et le Ghana pour la résolution 1701. Deux projets sont donc présentés par les seuls Occidentaux membres du CS : la résolution 1559 et la résolution 1757. Ce sont aussi les deux textes qui n’obtiennent pas l’unanimité des voix.

23 Aucun vote négatif n’est émis à propos de ces projets de résolution. Autrement dit, aucun Etat ne rejette les textes et aucun membre permanent ne fait jouer son veto. Cependant, des abstentions significatives sont à décompter pour la résolution 1559 et la résolution 1757. La résolution 1559 obtient le nombre plancher de voix pour qu’une résolution soit adoptée par le CS, soit 9 (sur les 15 membres) ; 6 membres s’abstiennent donc, deux permanents, la Chine et la Russie, auxquels s’ajoutent l’Algérie, le Brésil, le Pakistan et les Philippines ; plusieurs abstentionnistes estiment que le texte porte sur les affaires intérieures du Liban (Algérie, Brésil, Chine, Pakistan, Philippines, Russie), qu’il n’y a pas de menace pour la paix (Algérie, Brésil, Pakistan), qu’il aurait fallu placer la question dans le contexte global du Moyen-Orient (Algérie, Pakistan et la Russie, qui aurait voulu amender le texte dans ce sens). La résolution 1559 est donc très « occidentale », quoique au niveau du vote, elle obtienne les voix du Chili et du Bénin.

24 Pour la résolution 1757, on recense 5 abstentions : Afrique du Sud, Chine, Indonésie, Qatar et Russie ; deux permanents s’abstiennent donc à nouveau ; les quatre premiers cités mettent en avant que la résolution passe outre aux dispositions de la Constitution libanaise en matière de ratification ; la Russie estime que le recours au chapitre VII ne se justifie pas car la situation n’est pas comparable à celle qui a vu la création du TPIY et du TPIR : il n’y a pas commission d’un crime international (crime de guerre ou contre l’humanité ou génocide). Cependant, tous les Etats sont convaincus de la nécessité du Tribunal.

25 Il est intéressant de relever que l’argumentation de la Russie est plus nuancée que celle des autres abstentionnistes dans les deux cas.

26 Sur le fond, le contenu des résolutions est donc forcément d’inspiration occidentale. Pour la plus longue d’entre elles, la résolution 1701 (4 p ½ et 19 §), la France en discute pied à pied les termes. En effet, elle souhaite être présente, mais ses militaires, qui ont gardé le souvenir du Drakkar à Beyrouth en 1983 veulent un mandat robuste et une Force musclée [22]. C’est qu’évidemment derrière l’intérêt pour le Liban se profilent des intérêts nationaux.

Des résolutions reflétant des intérêts nationaux

27 Dans le cas de la France, il y a bien entendu la tradition historique génératrice d’un lien spécial. En tant que puissance mandataire, elle a dessiné le « Grand » Liban actuel et son intérêt pour le Liban ne s’est jamais démenti. Sans doute se sent-elle quelque peu responsable d’un pays dont elle a défini les limites, mais aussi le système politique. C’est encore au Liban que la France est entrée pour la première fois en maintien de la paix en 1978. Initialement, les membres permanents du CS semblaient devoir être interdits d’opérations de maintien de la paix pour risque de partialité, la présence du Royaume-Uni dans l’UNFICYP à partir de 1964 étant présentée comme une exception liée à la période coloniale. Puis dans les années 1970, la France souhaite participer pour renforcer son statut de membre permanent. Le conflit de 1978 et la demande libanaise d’une participation française à la FINUL lui permettent de réaliser ce souhait et depuis, elle est constamment présente dans la FINUL [23]. Plus récemment, le Liban peut constituer un bon créneau pour jouer un rôle au Proche-Orient. Il ne faut pas négliger non plus, dans la période proche, à la fois les griefs de la France à l’égard de la Syrie à partir de 2002 [24] et l’intérêt personnel du précédent chef de l’Etat français pour le Liban, dû en partie à ses liens avec Rafic Hariri ; ce facteur a joué un rôle important dans l’intérêt de la France pour les résolutions 1559 et 1595. Le fait que la France soit très présente dans la FINUL, dont elle a déterminé largement les contours en fonction de considérations militaires d’efficacité et de crédibilité, s’explique aussi par le rôle qu’elle veut voir jouer par l’Union européenne en matière de gestion de crises. Les Européens sont au premier plan au sein de la FINUL II et cela correspond aux intérêts français de poursuite du rêve de puissance à travers l’UE.

28 Une démonstration du même type pourrait être faite à propos des Etats-Unis. Un Liban fort et indépendant peut rendre plus difficile la connexion entre l’Iran et la Palestine via la Syrie. Cela rejoint l’intérêt des Européens, l’UE étant le principal bailleur de fonds de la Palestine, quitte à ce que les soutiens des uns et des autres aillent selon les cas plutôt à Israël ou à la Palestine.

29 Derrière le multilatéralisme onusien incarné vaille que vaille par un Conseil de sécurité à la représentativité imparfaite sont ainsi en embuscade des intérêts nationaux nombreux et divers. Serait-ce à dire que le Liban, déjà bien mal en point au plan interne, serait de surcroît instrumentalisé de l’extérieur sous couvert de la bienveillance de la communauté internationale ? Il semble heureusement qu’une réponse négative puisse être apportée à la question, car le Liban sait fort bien tirer son épingle du jeu.

L’épingle du jeu libanaise

30 Fragile, le Liban l’est et le sait [25]. Il n’en est pas moins un Etat, membre des Nations Unies, ce qui est un label d’étatisme. Il joue de cette carte pour non seulement mettre en avant sa souveraineté, à la fois qualité essentielle et rempart ultime de l’Etat (A), mais encore formuler des exigences qu’il parvient à faire accepter par la communauté internationale (B).

L’étendard de la souveraineté comme rempart de l’Etat liba nais

31 Dans la théorie juridique, la souveraineté est la résultante de l’existence de l’Etat qui se manifeste dès lors que sont réunis un territoire à l’intégrité respectée, une population juridiquement rattachée à l’entité en quête de qualification étatique et une organisation effective des pouvoirs publics ; c’est une qualité conférée à l’Etat et bien évidemment battue en brèche en cas de défaillance de celui-ci. Fragile, le Liban n’est pas pour autant failli et les résolutions du CS mettent inlassablement en avant « le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique du Liban, sous l’autorité unique et exclusive du gouvernement libanais » [26]. Il y a là une carte maîtresse pour les pouvoirs publics libanais et ils prônent la souveraineté pour empêcher les ferments de dissociation venus de l’extérieur comme de l’intérieur.

Souveraineté et risque de dissociation venant de l’extérieur

32 Dans le contexte des résolutions étudiées, le risque externe de dissociation le plus délicat à aborder provient essentiellement de la Syrie [27] car il ne se dévoile pas aussi franchement, si l’on peut dire, que les interventions armées israéliennes. La Syrie se présente comme l’amical voisin qui ne vous veut que du bien mais qui finit par être excessivement envahissant et qu’il est difficile de bouter hors de chez soi parce qu’il a rendu des services et que ses moyens sont importants. La position libanaise exprimée lors de l’adoption des diverses résolutions joue très habilement sur deux tableaux : à la fois elle met en avant la possibilité de demander l’aide de la Syrie mais aussi de revendiquer, implicitement, l’indépendance par rapport à ce -trop- proche parent.

33 Il convient de rappeler que les rapports avec la Syrie, présente en territoire libanais avec l’accord du gouvernement libanais depuis 1976, sont basés, plus récemment, en premier lieu sur le document d’Entente nationale (pour mettre fin à la guerre civile), dénommé plus communément « Accord de Taëf », du 5 novembre 1989 [28]. Dans sa partie II sur la « Souveraineté de l’Etat libanais sur l’ensemble de son territoire », il prévoit que « les forces syriennes aideront […] les forces légales libanaises à étendre l’autorité de l’Etat libanais dans un délai maximum de deux ans » après la ratification du texte, l’élection du président, la formation du « Gouvernement d’Entente Nationale » et l’adoption des réformes politiques. Il est prévu à la fin de cette période un « redéploiement » (et non un retrait) des troupes syriennes dans certaines régions et un accord entre les deux gouvernements devant déterminer la durée de la présence des troupes syriennes. Tout cela fait beaucoup de conditions à réunir avant l’esquisse d’un retrait. La partie IV de l’Accord, portant sur « les relations libano-syriennes » termine le document avec cette formule finale : « La Syrie, soucieuse de la sécurité du Liban, de son indépendance et de son unité ainsi que de l’entente de ses fils, ne permettra aucune action susceptible de menacer la sécurité du Liban, son indépendance et sa souveraineté ». L’influence syrienne qui s’accentue à partir de 1990 est consacrée en 1991 par un traité bilatéral de « Fraternité, coopération et coordination » [29] ; la formule rappelle la terminologie en usage dans les rapports entre l’Union soviétique et ses satellites pendant la guerre froide. Aucun délai précis n’est donc fixé à la réduction ou au retrait des forces de la Syrie, mais celle-ci n’est pas moins érigée en garante de l’indépendance et de la souveraineté libanaise.

34 Jusqu’au retrait des forces israéliennes du Sud-Liban en 2000, la présence syrienne n’est guère contestée. Elle commence à l’être à partir de ce moment-là. Les rapports entre le premier ministre Hariri et le président Lahoud, proche de la Syrie, se tendent jusqu’à aboutir à la crise de 2004 sur la prolongation après révision constitutionnelle du mandat présidentiel. La réforme est, après revirement, soutenue par la Syrie et, à la suite d’un entretien avec le président syrien, le Premier ministre libanais comprend qu’il n’a pas d’autre choix que de soutenir la prorogation car il se sent menacé. C’est dans ce contexte complexe que la résolution 1559 est mise aux voix le 2 septembre. On comprend bien que R. Hariri appuie le texte mais il ne peut pas le faire officiellement.

35 Pour éviter d’envenimer la situation, son gouvernement adresse le 30 août au CS et au Secrétaire général une lettre dans laquelle il écrit qu’il espère que ce dernier interviendra « en vue d’empêcher que ce projet n’aille de l’avant et de prévenir ce grave précédent qui pourrait faire sortir l’ONU de son rôle fondamental en l’amenant à s’immiscer dans les affaires intérieures d’un pays membre » ; la lettre précise que « la présence des troupes syriennes au Liban est liée à l’Accord de Taëf et à des accords bilatéraux » et qu’elle est « sous la supervision des institutions légitimes compétentes des deux pays » [30]. Lors du débat précédant le vote au CS, le représentant du Liban met l’accent sur le fait que la présence syrienne repose sur plusieurs accords, que la Syrie est un pays « ami » et que le projet de résolution « constitue une ingérence dans les affaires intérieures d’un Etat » en se mêlant de l’élection présidentielle ; il demande que le projet soit retiré [31]. C’est, à l’époque, le prix à payer pour éviter la crise avec le voisin. Du moins cela permet-il de mettre l’accent sur la souveraineté libanaise qui recouvre, comme pour tout Etat, le droit de demander une aide extérieure et d’avoir des relations privilégiées avec certains Etats. Le Premier ministre Hariri n’en est pas moins accusé par la Syrie d’avoir appuyé le texte ; il démissionne le 9 septembre et le 2 octobre, l’ancien ministre Marwan Hamadé échappe de peu à un attentat, début d’une funeste série. En somme, à la place d’une crise politique franche, ce sont les personnalités politiques qui sont visées.

36 Plus récemment, alors que les troupes syriennes se sont retirées le 26 avril 2005, le discours officiel s’est fait plus incisif, quoique toujours implicite, sur les interférences syriennes. Ainsi lors de l’adoption de la résolution 1757 sur le Tribunal, le représentant du Liban, après avoir remercié le CS « d’exprimer son appui constant à l’indépendance, à la souveraineté, à la sécurité et à la liberté du Liban », relève l’importance du Tribunal « chargé d’identifier les criminels et de dissuader quiconque de mettre notre liberté et notre souveraineté en péril » ; il ajoute : « Nul ne peut espérer contraindre les Libanais à choisir entre leur quête de justice et leur droit à la paix, à la sécurité et à la stabilité. Il n’est pas non plus acceptable en vertu de quelque norme que ce soit que les Libanais soient forcés de choisir une voie plutôt qu’une autre ni que la responsabilité des actes commis contre les Libanais soit imputée aux victimes ».

Souveraineté et risques de dissociation venant de l’intérieur

37 C’est peut-être là que le bât blesse le plus puisque c’est la question du Hezbollah et surtout de sa milice, dont les activités ont entraîné le Liban dans la « guerre des 33 jours » en 2006, même s’il n’est évidemment pas question de minimiser le rôle d’Israël qui a déclenché les véritables hostilités armées. Là encore, les autorités libanaises ne peuvent qu’être nuancées car le Hezbollah est une force politique soutenue par une part importante de la population ; il est populaire en raison de son activité sociale mais aussi parce qu’il a longtemps sauvé la fierté nationale en osant affronter Israël.

38 Au moment du vote de la résolution 1559, la lettre du Premier ministre évoquée ci-dessus n’évoque pas la question alors que le projet demande la dissolution des milices. Son silence peut être interprété comme signifiant, au minimum, l’absence d’un désaccord sur ce point. En revanche, le représentant du Liban lors de la discussion soutient la thèse habituelle selon laquelle « il n’y a pas de milices au Liban, mais une résistance nationale libanaise… Ces forces de résistance existent aux côtés des forces nationales libanaises ; nos autorités militaires en déterminent la taille et la présence en fonction de nos besoins » [32]. Le discours consiste donc à faire « comme si » l’Etat contrôlait la milice. L’apparence de la souveraineté est sauve. A vrai dire, le propos n’insiste guère sur cet aspect de la résolution ; cette discrétion renvoie sans doute à celle du chef de gouvernement dans sa lettre.

39 La résolution 1701 ne donne pas mandat à la FINUL II de désarmer les milices et elle ne mentionne le Hezbollah que pour lui demander, dans le contexte de fin de la « guerre », de cesser toutes ses attaques. Indirectement, elle vise cependant les milices en soulignant que le gouvernement libanais doit étendre son autorité à l’ensemble du territoire « de sorte qu’aucune arme ne s’y trouve sans le consentement du Gouvernement libanais et qu’aucune autorité ne s’y exerce autre que celle du Gouvernement libanais » (§3) ; puis au § 8 elle lance un appel à Israël et au Liban, notamment en vue d’une application intégrale des Accords de Taëf « qui exigent le désarmement de tous les groupes armés au Liban » afin que « seul l’Etat libanais soit autorisé à détenir des armes et à exercer son autorité au Liban » ; enfin le § 15 « décide » l’embargo sur la fourniture d’armement « à toute entité ou individu situé au Liban » et le §14 demande au Gouvernement libanais de sécuriser ses frontières à cette fin. C’est donc au Gouvernement qu’il incombe de veiller à l’exercice de son autorité, comme il sied aux autorités d’un Etat souverain. Dans son intervention au CS [33], le représentant du Liban s’efforce de ménager habilement, si l’on peut dire, la chèvre et le chou. Il relève d’abord que la guerre d’Israël n’a pas été menée que contre le Hezbollah mais bien contre le Liban, ce qui revient à « libaniser » le conflit et à ne pas diaboliser le Hezbollah ; la suite du propos montre néanmoins que le gouvernement préfèrerait que les causes de l’existence de cet Etat dans l’Etat disparaissent en appelant de ses vœux le règlement de la question des fermes de Chebaa « ce qui éliminera l’une des causes sous-jacentes du conflit » puisqu’on sait qu’elle constitue une des justifications au maintien de la milice chiite ; il ajoute que le gouvernement « a décidé de déployer les forces armées libanaises au Sud-Liban en tant que seule force militaire », appuyée par la FINUL. On sent que le gouvernement accepte de moins en moins de voir son autorité diminuée tant par l’existence d’un pouvoir militaire d’origine interne hors de son contrôle qu’en raison des récurrentes incursions (voire davantage) israéliennes. La FINUL II est sa meilleure carte à cet effet et c’est pourquoi son représentant met l’accent sur son « rôle déterminant ».

40 On sent bien, dans les deux cas, Syrie et Hezbollah, que le discours gouvernemental au CS tend à se faire de plus en plus « souverainiste », même si c’est avec la discrétion que la complexité de la situation impose. Marcher sur des œufs au plan régional ou interne n’implique pas que l’on renonce à faire prévaloir son point de vue auprès d’une communauté internationale qui affiche le souci de la souveraineté libanaise. Aussi le Liban n’hésite-t-il pas à formuler des exigences, souvent couronnées de succès.

La formulation d’exigences largement acceptées par la com munauté internationale

41 Le Liban sait fort bien jouer des cartes qu’il détient, puisqu’il occupe une place importante dans le Moyen-Orient si compliqué : la communauté internationale/CS n’a pas besoin d’y voir multipliés les facteurs de crise ; un Liban stable va dans le sens de ses intérêts, comme de ceux de ses membres pris individuellement. Dès lors le Liban, au nom de sa souveraineté n’hésite pas à guider la plume du CS, même si ses souhaits ne sont pas nécessairement exaucés.

Une stratégie de revendication parfois tenue en échec

42 Evidemment, relève de cette catégorie l’épisode de la résolution 1559. On l’a vu, deux jours avant le vote, le gouvernement libanais, sentant que la situation est dangereuse (les menaces syriennes à l’égard du Premier ministre même ne sont plus voilées), demande au Secrétaire général d’intervenir auprès du CS « en vue d’empêcher que ce projet n’aille de l’avant » [34]. Il n’est pas écouté, bien que le représentant libanais ait, lors du débat au CS précédant le vote, affirmé que rien ne justifie « ce projet de résolution, qui constitue une ingérence dans les affaires intérieures d’un Etat membre », estimant que « jamais l’Organisation ne s’est ingérée d’une telle façon dans les affaires d’un Etat quel qu’il soit ». La résolution n’en est pas moins adoptée car la détermination de certains Etats est grande à voir condamnées les mainmises syriennes et miliciennes sur le Liban ; et encore une fois, il convient de souligner que les autres membres du CS n’empêchent pas le vote même si certains marquent leur réserve en s’abstenant. Evidemment sur le fond, cela ne mécontente sans doute pas les autorités gouvernementales libanaises mais la tension régionale le rend prudent. Aussi renouvelle-t-il ses réserves le 5 octobre dans une lettre au CS [35] à la suite du premier rapport du Secrétaire général (du 3 octobre) sur la mise en œuvre de la résolution 1559 [36]. Il met l’accent sur la responsabilité d’Israël dans la situation, excessivement minimisée selon lui dans le rapport ; il estime que la résistance du Hezbollah prendra fin avec l’occupation des terres libanaises, que la question du départ de l’armée syrienne est purement bilatérale et que la prolongation du mandat présidentiel s’est faite dans le respect des règles constitutionnelles à une confortable majorité. On sait que ces gages de bonne volonté à l’égard de la Syrie et de ses soutiens resteront sans effet et qu’il faudra le cataclysme du 14 février 2005, résultante largement de la 1559, pour faire évoluer la situation.

Des exigences souvent acceptées

43 Durant l’été 2006, lorsque commence à être évoquée la nature de l’opération à mettre en place une fois les hostilités terminées, plusieurs positions sont présentées. Israël accuse la FINUL de partialité envers le Hezbollah et veut sa dissolution. D’autres sont favorables à une force multinationale musclée, éventuellement sous contrôle de l’OTAN. C’est le Liban qui pousse au maintien et au renforcement de la FINUL, car il redoute qu’une force multinationale ne soit perçue comme une force d’occupation « impérialiste » [37]. En même temps, il exclut le recours au chapitre VII, ne voulant pas apparaître comme se faisant imposer la présence internationale dans le souci d’affirmer sa souveraineté [38]. C’est ce qui explique les distorsions de la résolution 1701, qui emploie le vocabulaire et contient des dispositions caractéristiques du chapitre VII sans que jamais celui-ci soit évoqué (cf.supra). Par ailleurs, le Liban inspire largement le contenu, en ce qui concerne l’aide que la FINUL doit apporter et au gouvernement et aux forces armées libanaises afin de restaurer la souveraineté de l’Etat dans le Sud. Le même gouvernement, amputé d’ailleurs peu après du Hezbollah, n’en reste pas moins désigné comme l’interlocuteur officiel de la FINUL II. Or il se trouve confronté, l’année suivante, au refus du président du Parlement de convoquer une session de l’assemblée dont le vote serait nécessaire à la ratification de l’Accord ONU/Liban sur la création et le statut du Tribunal spécial. Le Premier ministre libanais adresse alors une lettre au Secrétaire général afin que le CS adopte une résolution « contraignante » décidant de l’entrée en vigueur de l’Accord, nonobstant l’absence de ratification, en fournissant in fine l’argument juridique nécessaire au recours au chapitre VII : la menace pour la paix et la sécurité [39]. Le CS va suivre ; autrement dit en août 2006, le Liban refuse la référence au chapitre VII alors qu’il eût été approprié et ledit chapitre VII est escamoté ; en mai 2007, il la demande instamment, dans une hypothèse juridiquement complexe et il est exaucé. Le chapitre VII et le CS sont donc instrumentalisés par le frêle Liban. Pas si frêle que cela, donc ! Mais fort habile, sachant jouer de ses atouts et soucieux de faire respecter ses droits. Ainsi, alors que la FINUL II est dotée d’un élément naval, l’Allemagne a, au départ, la responsabilité de cette composante destinée à aider le gouvernement à empêcher le trafic d’armes. Or le Liban entend avoir un contrôle total sur une bande côtière de 6 à 7 milles, ce qui de l’avis des marins allemands ne leur permettrait pas d’exercer un contrôle effectif. Après négociations, un compromis est trouvé : des officiers libanais monteront à bord des navires allemands et seront consultés pour toute activité proche du littoral [40]. Dans un ordre d’idée voisin, lors de la discussion précédant le vote sur la résolution 1701, le représentant libanais, de manière assez ironique eu égard aux longues tractations auxquelles a donné lieu l’élaboration du texte, notamment en raison de la volonté française de voir la Force dotée d’un mandat robuste, déclare : « Nous apprécions la sincère impatience manifestée par beaucoup d’intervenants face au retard dans l’obtention d’un accord sur la résolution » [41]. On ne saurait mieux décrire ses propres impatiences.

44 Le Conseil de sécurité sert de caisse de résonance aux crises et conflits internationaux qu’il a pour tâche d’apaiser : c’est la responsabilité qui lui a été conférée. Que les crises libanaises y soient traitées dans leur habituelle complexité est normal. Comme à chaque fois qu’une question est abordée dans cette instance, derrière le CS, ce sont les Etats membres qui s’expriment, avec une prime pour les membres permanents dotés du droit de veto. Il ressort de l’examen des grandes résolutions intéressant le Liban que quelles ques soient les sensibilités des membres du CS, aucun d’eux n’a pris le risque d’empêcher le vote de ces résolutions, si délicates et controversées qu’elles aient pu être. Elles traduisent donc bien le point de vue de cet organe, directoire de la « communauté internationale » pour les affaires qui touchent à la paix et à la sécurité. C’est un fait que les contempteurs des résolutions doivent prendre en considération : elles formulent le souhait d’un Liban réellement indépendant doté d’un gouvernement maître chez lui. D’un autre côté, même si ces textes font le jeu de certaines puissances, ils sont loin de traduire une instrumentalisation du Liban, bon défenseur de sa problématique souveraineté.

45 Evidemment, si le CS est plutôt un organe favorable à l’Etat libanais et qu’il peut aider à régler ses difficultés, il ne détient pas plus dans ce cas que dans les autres le remède-miracle. La solution suppose le règlement de multiples questions liées au contexte proche-oriental. La situation interne semble en meilleure voie depuis l’Accord inter-libanais de Doha du 21 mai 2008 [42] qui a permis l’élection du président de la République libanaise et la constitution d’un gouvernement d’union nationale. La Syrie est disposée depuis le sommet de Paris sur l’Union pour la Méditerranée du 13 juillet 2008 à accepter l’échange de missions diplomatiques qui marquerait la banalisation des relations entre les deux Etats. Subordonné, dans un premier temps, au sort du traité bilatéral de fraternité, coopération et coordination plutôt déséquilibré au profit de la Syrie, l’établissement des relations diplomatiques tarde à venir. Puis l’annonce en est faite le 15 octobre 2008 [43]. C’est évidemment une date historique puisque l’événement signifie reconnaissance du Liban par la Syrie. Pour autant, la date de l’échange des missions n’est pas précisée. Le 31 décembre 2008, Damas accepte la demande d’accréditation de l’ambassadeur libanais à Damas, le diplomate Michel Khoury. Quelques jours auparavant, la Syrie envoie à Beyrouth son premier conseiller et deux attachés de la future mission, dont il semble qu’elle serait dirigée dans un premier temps par un chargé d’affaires et non par un ambassadeur ; le drapeau syrien flotte depuis lors sur le local de la mission. Le 25 mars 2009, l’ambassadeur de Syrie au Liban, M. Ali Abdel Karim reçoit l’agrément du chef de l’Etat libanais. L’ambassadeur du Liban en Syrie arrive à Damas le 21 avril 2009. Les étapes sont ainsi savamment distillées [44]. La question des fermes de Chebaa, évoquée dans le préambule de la résolution 1701, signe de son importance, n’est, en juin 2009, pas réglée ; or la Syrie en fait dépendre la délimitation de la frontière avec le Liban, ce qui renvoie aux calendes grecques une question que la résolution 1680 du 17 mai 2006 encourageait « vivement » la Syrie à régler (ainsi d’ailleurs que l’établissement de relations diplomatiques avec le Liban) (§4). Cependant les travaux de cartographie de l’ONU pour une définition de la zone sont achevés ; mais à la fin juin 2008, le Secrétaire général constate qu’il n’y a toujours aucune réaction de la Syrie ou d’Israël et que globalement aucun progrès n’est intervenu dans la délimitation de la frontière libano-syrienne [45]. En visite au Sud-Liban début mai 2009, le Secrétaire général adjoint de l’ONU, chef du DOMP, Alain Le Roy, note le début du marquage de la frontière israélo-libanaise, même si Israël occupe toujours le nord de Ghajar, les collines de Kfarchouba et les fermes de Chebaa [46]. En toute hypothèse, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a déclaré en septembre 2008 que même après la libération des fermes de Chebaa, sa formation garderait ses armes [47].

46 Pourtant selon un sondage effectué par un organisme américain, 76 % des Libanais interrogés estiment que seule l’armée libanaise devrait porter des armes ; 82 % sont favorables au démantèlement des milices libanaises, le Hezbollah payant peut-être là pour ses actions armées de mai 2008 ; 74 % soutiennent les Nations Unies, 80 % la FINUL , 85 % le Tribunal [48], 80 % l’établissement de relations diplomatiques avec la Syrie et la délimitation des frontières ; enfin, 65% estiment que le gouvernement libanais peut assurer la sécurité contre 34% en faveur du Hezbollah [49]. Pas plus qu’une hirondelle ne fait le printemps, un sondage ne peut signifier que toutes les difficultés sont réglées. Du moins, celui-ci fait-il souffler une petite brise d’encouragement pour les Nations Unies et d’optimisme pour le Liban… Après tout, les élections du 7 juin 2009 se sont déroulées pacifiquement et démocratiquement. ?

Notes

  • [1]
    La liste des Etats défaillants (Failed States index) établie par le « Fund of the peace » (site : www.fundforpeace.org) depuis 2005 est à cet égard instructive. Elle comporte quatre catégories de situations de l’Etat, du risque élevé de défaillance à la stabilité : « alert », « warning », « moderate » et « sustainable » et les Etats sont classés à partir de 1 (Etat à risque le plus élevé) par ordre décroissant de risque de défaillance. Le Liban est en 2005 n° 37 (catégorie « warning », en 2006 n° 65 (catégorie « warning »), en 2007 n° 28 (catégorie « alert »), en 2008 n° 18 (catégorie « alert »).
  • [2]
    Enzo Cannizzaro, « Entités non-étatiques et régime international de l’emploi de la force ; une étude sur le cas de la réaction israélienne au Liban », RGDIP (Revue générale de droit international public), 2007, p.333.
  • [3]
    Le retrait de l’armée syrienne est intervenu le 26 avril 2005, après l’assassinat de Rafic Hariri en février 2005, date à laquelle 14000 soldats syriens étaient encore présents au Liban. Sur la réaction du CS à ce retrai, voir CS/8372, 5127e séance (communiqué de presse). Quant au retrait total d’Israël, il est encore, en octobre 2008, subordonné au règlement de la question des fermes de Chebaa.
  • [4]
    Texte sur le site du Conseil constitutionnel de la République libanaise : www. conseil-constitutionnel.gov.lb/fr/taef.htm ; voir aussi : Sami SALHAB, « La résolution 1559 du Conseil de sécurité et l’Accord de Taëf, compatibilité juridique et incompatibilité politique », Confluences Méditerranée, n° 56, hiver 2005-2006, p 83.
  • [5]
    Enzo CANNIZZARO, art cit à la note 1 supra.
  • [6]
    Voir aussi : Hervé ASCENSIO, « Effets juridiques et efficacité des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies portant sur le Liban », Les Cahiers de l’Orient, printemps 2009, n° 94, p 37.
  • [7]
    S/PRST/2005/4, 15 février.
  • [8]
    S/2005/203, 24 mars.
  • [9]
    Rapport de la Commission S/2005/775 du 12 décembre.
  • [10]
    Lettre S/2005/783, 13 décembre.
  • [11]
    S/2006/893, 15 novembre.
  • [12]
    Cette analyse diverge de celle du Professeur Salhab pour qui, dans l’article précité (note 3 ci-dessus), la résolution 1559 « impose des obligations » (p 83) ; il estime par ailleurs que, quoique adoptée dans le cadre du chapitre VI, elle revêt un caractère obligatoire en vertu de l’article 25 disposant que les Etats membres « s’engagent à appliquer les résolutions du CS » (p 89). L’article 25 ne vise pas les « résolutions » mais les « décisions » ; or ici, le langage du CS n’est en rien celui de la décision, mais celui de la recommandation.
  • [13]
    S/PRST/2007/17, 11 juin, rappelant les textes précédents pertinents.
  • [14]
    Lettre S/2005/208, 29 mars.
  • [15]
    S/2005/662, 20 octobre.
  • [16]
    Josiane Tercinet, « Observations sur une résolution très spéciale : la 1701 (2006) établissant la FINUL II », Arès, n° 59, avril 2008, p 101.
  • [17]
    Sur la difficulté à repérer les « puissances occidentales » : Josiane Tercinet, « Les puissances occidentales et les opérations de paix », Annuaire français de relations internationales, vol IX, 2008, p.581.
  • [18]
    S/PV.5028 ; 2 septembre 2004.
  • [19]
    S/PV.5160, 7 avril 2005.
  • [20]
    S/PV.5511, 11 août 2006.
  • [21]
    S/PV.5685, 30 mai 2007.
  • [22]
    Josiane TERCINET, les deux art cit (voir les notes 14 et 15).
  • [23]
    Josiane TERCINET, « La participation de la France, membre permanent du Conseil de sécurité, à la FINUL », Arès, 1978-1979, p 344.
  • [24]
    Ghassan EL Ezzi, « Printemps libanais ? », Confluences Méditerranée », n° 56, hiver 2005-2006, p 9.
  • [25]
    Est à cet égard significative la formule du représentant du Liban au CS lors de la discussion sur le vote de la 1701 lorsqu’il évoque « la lutte du Liban pour recouvrer la pleine souveraineté sur l’ensemble de son territoire », signe qu’hélas cette souveraineté est battue en brèche : S/PV.5511, 11 août 2006, p 21.
  • [26]
    Préambules de la résolution 1595 (2005), de la 1664 (2006), de la 1757 (2007), notamment.
  • [27]
    On pourra certes objecter qu’il y en a bien d’autres. La présence des réfugiés palestiniens a évidemment pris la forme à une certaine époque d’Etat dans l’Etat, entraînant le Liban dans la guerre civile et dans la guerre internationale avec Israël. Ce facteur d’instabilité semble aujourd’hui en phase « dormante ». Mais le « risque » est bien toujours là. Les événements récents montrent que certains mouvements islamistes présents dans la zone de Tripoli ou au Sud ou dans la Bekaa et soutenus de l’extérieur constituent une nouvelle menace dont le potentiel pourrait croître.
  • [28]
    Voir note 3 ci-dessus.
  • [29]
    Rapport de la mission Fitzgerald d’établissement des faits après l’assassinat de R Hariri, S/2005/203, 24 mars (§6).
  • [30]
    A/58/879 et S/2004/699, 30 août.
  • [31]
    S/PV.5028, 2 septembre 2004.
  • [32]
    S/PV.5028, 2 septembre 2004.
  • [33]
    S/PV.5511, 11 août 2006.
  • [34]
    A/58/879-S/2004/699, 30 août 2004.
  • [35]
    S/2004/794, 5 octobre.
  • [36]
    S/2004/777, 3 octobre.
  • [37]
    Josiane TERCINET, art cit (voir les notes 14 et 15 ci-dessus).
  • [38]
    Josiane Tercinet, art cit sur la FINUL II, p 102.
  • [39]
    S/2007/281, 14 mai : « Compte tenu de ce qui précède, le gouvernement libanais pense que le moment est venu pout le Conseil de sécurité de faire en sorte que le tribunal spécial pour le Liban devienne une réalité. Nous vous demandons donc de soumettre d’urgence au Conseil de sécurité notre demande […]. Une décision contraignante […] serait en plein accord avec l’importance que l’Organisation des Nations Unies attache à cette question depuis le début, lorsque la commission d’enquête a été établie. Tout retard supplémentaire […] serait préjudiciable à la stabilité du Liban, à la cause de la justice, à la crédibilité de l’organisation elle-même et à la paix et à la sécurité dans la région ».
  • [40]
    Le Monde, 15 septembre 2006.
  • [41]
    S/PV.5511, 11 août 2006, p 20.
  • [42]
    Salué par le CS dans la déclaration présidentielle S/PRST/2008/17, 22 mai 2008.
  • [43]
    Le Monde, 17 octobre 2008.
  • [44]
    L’Express, 8 janvier 2009. L’Orient Le Jour, 27 avril 2009.
  • [45]
    Rapport du Secrétaire général sur l’application de la résolution 1701 : S/2008/45, 27 juin 2008 (précédant le renouvellement de la FINUL jusqu’au 31 août 2009, à l’unanimité, par la résolution 1832 du 27 août).
  • [46]
    L’Orient Le Jour, 6 mai 2009.
  • [47]
    L’Orient Le Jour, 5 septembre 2008, p.4.
  • [48]
    Le Tribunal spécial pour le Liban commence à fonctionner le 1er mars 2009.
  • [49]
    L’Orient Le Jour, 23 septembre 2008, p.4. L’annonce est faite dans un communiqué émanant des deux ministères des affaires étrangères, après l’adoption d’un décret syrien prévoyant l’ouverture d’une ambassade à Beyrouth, c’est-à-dire, dans le droit des relations diplomatiques, d’une mission diplomatique de première classe.
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