Couverture de COHE_180

Article de revue

Livres reçus

Pages 164 à 170

Témoignage et trauma, (Implications psychanalytiques), Jean-François Chiantaretto, C. Trevisan, J. Altounian, R. Waintreter, P. Réfabert, Paris, Dunod, 2004

1 Quels sont les effets, sur le plan de la réalité psychique individuelle, de la violence qui s’est déployée tout au long du siècle dernier sur la scène collective de l’histoire ? En quoi les traumas ainsi générés se rapprochent-ils et se différencient-ils des traumas auxquels les psychanalystes sont confrontés dans leur pratique ordinaire, et les amènent-ils à les repenser ?

2 Ces questions, Violence d’État et psychanalyse les posait en 1989, dans cette même collection « Inconscient et culture », à partir du contexte lié à la dictature militaire en Argentine. Le présent ouvrage prend en somme la suite, en retrouvant ces mêmes questions dans différents contextes historiques (la Grande Guerre, le génocide arménien, la Shoah), et posés du point de vue des témoins survivants.

3 Les auteurs ici réunis travaillent à rendre sensibles différentes modalités selon lesquelles l’expérience traumatique attaque l’étayage testimonial sur la psyché de l’autre. Un tel étayage est au cœur du lien social et de la place de chacun dans le monde des semblables différents, du fait de la composition relationnelle de l’être humain.

4 Il s’agit ainsi d’approcher les récits des survivants aux catastrophes collectives mettant en cause l’appartenance humaine des victimes – à les approcher, en ce qu’ils obligent à penser la destruction et la survie, tout à la fois sur les plans intrapsychique, intersubjectif et social. Il s’agit aussi de rendre compte du dispositif testimonial à l’œuvre dans la cure et dans la construction psychique du Je.

En finir avec l’inconscient, (Pour un renouveau de la psychanalyse), Pierre Clément, Liber, Montréal, 2004

5 La psychanalyse peut-elle se passer de la notion d’inconscient ? Ou encore, peut-on décrire l’appareil psychique en adoptant résolument le seul point de vue de la conscience, et cela sans renoncer aux hypothèses freudiennes sur l’Œdipe, le refoulement, etc. ? Ni hérétique ni faussement provocateur, tel est en tout cas le pari que relève l’auteur de cet ouvrage.

6 Empruntant aussi bien à la philosophie qu’aux neurosciences les plus récentes, et riche d’une grande expérience clinique, Pierre Clément montre que la conscience n’est ni le simple lieu de manifestation de symptômes de forces inconscientes, ni une partie superficielle de notre identité. Elle a tout simplement plusieurs facettes qu’il faut savoir saisir dans leur spécificité et dans leur complémentarité. Menée avec clarté et maîtrise, la réflexion proposée ici ne manquera pas de contribuer à renouveler la psychanalyse et la compréhension de notre vie psychique.

7 Diplômé de médecine et de philosophie, Pierre Clément est psychiatre et pratique la psychanalyse. Il est également professeur adjoint à l’université d’Ottawa.

Résistances et transferts, (Enjeux cliniques et crise du politique), Sous la direction de Patrick Chemla, érès, 2004, 144 pages, 16 euros

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« Cet ouvrage à plusieurs voix tente de déployer les enjeux des résistances sans esquiver les écarts irréductibles entre psychanalyse et politique. Double aliénation qui traverse les pratiques institutionnelles et, sans doute aussi plus largement, toute communauté humaine.
Il est donc avant tout question d’enjeux cliniques et du désir mis en acte par les soignants et les psychanalystes à l’épreuve du transfert, mais aussi des potentialités de résistance de l’humain confronté à la destruction, aux génocides passés et actuels. Dans cette visée, l’ouvrage se conclut sur l’actualité du conflit du Proche-Orient et sur les folies identitaires autour de l’appropriation de l’origine, qui déchirent cette région mais sont aussi à nos portes. »
(Patrick Chemla)

9 Patrick Chemla, psychiatre hospitalier, psychanalyste (Reims) et président de l’association La criée. Avec la participation de Janince Altounian, Yacine Amhis, Fethi Ben Slama, Alain Brossat, Hildegarde Charlot, Pierre Delion, Pascale Hassoun, Véronique Jouvel, Emile Lumbroso, Jean Oury, Blandine Ponet, Mnique Tricot.

Monoparentalité précaire et femme sujet, Gérard Neyrand, Patricia Rossi, érès, 2004, 240 pages, 22 euros

10 L’augmentation de la monoparentalité va de pair avec une précarisation accrue de beaucoup de femmes élevant seules leurs enfants. Pour elles, occuper la position de « chefs de famille » est d’autant plus difficile qu’elles n’y ont généralement pas été préparées, et que la précarité économique se conjugue avec un isolement relationnel et une fragilisation psychologique.

11 Cette évolution pose la question de la place des femmes dans la démocratie, ainsi que celle de la maternité et du féminin, et de leur lien à la paternité, pour les psychismes individuels. Elle nécessite de concevoir un soutien qui ne soit pas seulement économique, mais qui intègre les dimensions sociale et psychologique.

12 Dans cet ouvrage, les auteurs articulent sociologie et psychanalyse pour rendre compte de la complexité de ce problème social, mais surtout, ils explorent les pistes possibles pour une meilleure prise en charge de ces femmes chefs de famille par les intervenants sociaux.

13 Gérard Neyrand, sociologue (Aix-en-Provence), s’intéresse aux questions touchant à l’après-séparation, la parentalité, la petite enfance.

14 Patricia Rossi, psychologue clinicienne, psychanalyste (Marseille), participe à la conception et à la réalisation de dispositifs dans la cité, relatifs à la parentalité et à la lutte contre l’exclusion sociale.

Penser Freud avec Patrick Mahony, Sous la direction de Louise Grenier et Isabelle Lasvergnas, Liber, Montréal, 2004

15 Psychanalyste, exégète et critique de Freud, de l’homme aussi bien que de son œuvre, Patrick Mahony a renouvelé l’interprétation de la psychanalyse et secoué l’institution psychanalytique. L’examen minutieux auquel il soumet les grandes études de cas de Freud fait date, et ses efforts pour soustraire la pensée à l’idéalisation du fondateur agissent comme un choc. « Penser Freud avec Patrick Mahony », c’est donc emboîter le pas à celui qui poursuit, depuis près de trente ans, un parcours original et exigeant d’interrogation de l’héritage freudien.

16 Fruit d’une collaboration entre auteurs venus d’horizons divers, et qui tous reconnaissent l’apport d’un travail historique et interdisciplinaire exemplaire, cet ouvrage entre en résonance avec la lecture passionnée et hors norme que propose Patrick Mahony. Outre deux textes originaux de ce dernier, on y trouvera une analyse de ses positions théoriques et cliniques, de sa méthode d’investigation et de sa critique. Certains s’inspirent de Mahony pour « penser Freud » à partir de la métaphore archéologique ou de la fiction littéraire. D’autres interrogent sa démarche historienne. Tous admettent une dette de savoir à l’égard de ce chercheur exceptionnel.

17 Collaborateurs : Autour de Patrick Mahony, Martin Gauthier, Louise Grenier, Marie-Claire Lanctôt-Bélanger, Isabelle Lasvergnas, Georges Leroux, André Lussier, Michelle Moreau Ricaud, Louise Verrette.

Qu’est-ce que le « réel » ?, Gérard Pommier, érès, 2004, 148 pages, 20 euros

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« Lorsque j’étais petit, je rêvais déjà beaucoup, et cela s’est plutôt aggravé depuis, malgré plusieurs incidents qui auraient dû me réveiller. Comme tout le monde, je me suis beaucoup heurté aux autres : aux autres de l’amour, aux autres de la politique, mais rien n’y a fait : j’ai continué à imaginer, plutôt qu’à évaluer, la réalité des situations. Déjà, au lycée, j’avais entendu parler d’un dénommé Platon, que j’ai beaucoup pratiqué depuis. Il disait, il y a plus de 2000 ans, que nous sommes enfermés dans une caverne et que nous n’avons qu’une perception très lointaine du réel. Mais au fond, qui se soucie du réel, sinon lorsqu’il y est contraint et forcé ? C’est pourquoi, sans m’en rendre compte, j’ai choisi la profession bizarre de m’occuper du rêve des autres qui m’en parlaient eux-mêmes dans l’espoir de comprendre ce que cela pouvait bien cacher de réel. Et puis, j’ai fréquenté mes collègues qui n’avaient que ce mot-là à la bouche : le Réel, comme si ce mot devait être la solution de toutes les énigmes – comme si le rêve ne trouvait pas sa solution grâce au rêve, grâce à sa réalisation qui laisse pourtant en suspens cet énigmatique Réel. Au bout du compte, je m’y suis mis sérieusement, car cette caverne philosophique de Platon ne convenait plus du tout à mon expérience de la psychanalyse. Il fallait bien que je tire les conclusions de ce qui devenait toujours plus évident : le Réel résulte avant tout du traumatisme sexuel. La caverne de Platon n’est après tout qu’une succursale de cette caverne d’Éros, qui a au moins l’avantage d’être beaucoup plus excitante. Vu sous ce jour, le Réel n’est-il pas, pour le coup, digne d’intérêt ? C’est en tout cas ce que j’ai essayé de montrer dans mon livre, qu’il s’agisse du réel du symptôme, de celui de l’amour, de celui de la science ou de la clinique psychanalytique. Ce n’est pas par hasard si le même mot est adéquat : le réel est toujours jeune ! »
(Gérard Pommier)

19 Gérard Pommier, psychanalyste (Paris), maître de conférences à l’université de Nantes.

Anorexie et inédie : une même passion du rien ? Pascal Guingand, Érès, 2000, 256 pages, 25 euros

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« L’ouvrage, qui est une version “revue et diminuée” de ma thèse de psychiatrie (1998), s’est construit à partir de deux propositions : d’une part, celle de Lacan qui tout au long des séminaires a affirmé que “l’anorexique mangeait le rien” ; d’autre part, celle de Guillet qui, dans un article de 1985 (“La jeûneuse chrétienne, généalogies de l’anorexie”), suggérait que “ce jeûne extraordinaire qu’est l’anorexie mentale pourrait bien être aussi un tour que nous joue une corporéité demeurée chrétienne à notre insu”. Ces postulats m’ont donné l’idée de proposer une nouvelle approche de l’anorexie mentale à partir d’une lecture psychanalytique inédite de l’anorexie sainte, celle des jeûneuses chrétiennes précisément, lointaines aînées de nos anorexiques actuelles. Inédite parce qu’elle dévoile le point aveugle des recherches actuelles sur l’anorexie mystique : la dévotion eucharistique, qui sous-tend toujours l’inédie, mais qu’on ignore faute d’appareil théorique. Grâce aux travaux du théologien Roland Sublon, pour qui l’acte eucharistique est formellement une lettre au sens lacanien du terme (soit l’involution signifiante), je propose une écriture originale, entre psychanalyse et théologie, au plus près de ce rien intemporel passionnément noué au corps. »
(Pascal Guingand)

21 Pascal Guingand, psychiatre, praticien au centre hospitalier d’Erstein (Bas-Rhin).

Faire la paix avec soi-même, Saverio Tomasella, Eyrolles, 2000

22 Ce guide montre comment retrouver l’estime et la confiance en soi en s’appuyant sur les concepts-clés de la psychanalyse : stade du miroir, défenses, projection, situations paradoxales…

23 À travers ces notions, l’auteur analyse les sentiments de honte, de culpabilité, d’insatisfaction ou encore le stress, qui nous animent au quotidien. Il explique également leurs implications dans notre vie de tous les jours. Il nous propose ensuite des pistes pour vivre en accord avec nous-même et avec les autres : méthode Alexander, massage énergétique, méditation, etc. Il s’appuie sur de nombreux exemples issus de ses séances de consultation.

24 Saverio Tomasella, psychanalyste et animateur de groupes, notamment de théâtre, est membre de la Fédération des ateliers de psychanalyse et de l’Association européenne Nicolas Abraham et Maria Torok.

La psychanalyse à coups de marteau, Jean-Bernard Paturet, érès, 2000, 144 pages, 10 euros

25 Depuis l’enfance, j’ai toujours été fasciné par les mythes. Ils m’ont transporté dans un univers magique : celui de la rêverie… Plus tard, j’ai découvert qu’ils ne se réduisaient pas aux histoires de familles des dieux mais qu’ils portaient en eux-mêmes un sens humain profond et caché. Mes études philosophiques m’ont fait rencontrer les penseurs grecs qui n’ont cessé d’exercer sur moi une continuelle séduction. Bachelard, par ailleurs, dans sa psychanalyse des éléments (Terre, eau, feu, air), m’a fait découvrir une démarche et une méthode, et à sa suite, j’ai tenté une sorte de psychanalyse du vin dans un essai intitulé L’esprit du vin. La lecture de Freud puis de Lacan a fourni les concepts d’une approche du sens profondément humain des mythes grecs. Mais je dois surtout à Nietzsche l’idée selon laquelle le vivant ne peut se connaître que par « résonance », et le « marteau » que le médecin « tape » sur la poitrine du malade pour entendre la sonorité produite et diagnostiquer ainsi la maladie est une métaphore qui oblige à privilégier l’écoute (comme en psychanalyse) des vibrations du texte. Entendre « en écho » place le lecteur dans une attitude de respect et de délicatesse à l’endroit des mythes qui, comme des êtres « vivants », parlent, appellent et interpellent.

26 (Jean-Bernard Paturet)

27 Jean-Bernard Paturet est professeur des universités à Montpellier 3, codirecteur de l’équipe de recherche « Esthétique et éducation en psychanalyse ».

Quand la famille marche sur la tête. Inceste, pédophilie, maltraitance, Martine Nisse, Pierre Sabourin, Le Seuil, coll. « CouleurPsy », 287 pages, 24 euros

28 Quand un enfant est abusé, maltraité, il exprime sa souffrance avec des mots, des symptômes et des comportements. C’est lui qui a honte et qui se sent coupable. Si son malaise n’est pas compris, l’enfant peut se taire pour longtemps, mais il peut aussi devenir menteur, voleur, hypocrite ou agresseur sexuel, perpétuant ainsi les actes des adultes qui lui ont fait violence.

29 « Quand la famille marche sur la tête », tout peut se mettre à marcher à l’envers – même la protection de l’enfance, et même la justice. C’est pourquoi il faut, selon Martine Nisse et Pierre Sabourin, construire une pratique thérapeutique qui s’étende à tous les partenaires de la protection de l’enfance, et intègre les différents intervenants sociaux, de la psychiatrie publique jusqu’à la justice pénale, au cœur même du processus thérapeutique – c’est ensuite seulement que la thérapie individuelle de l’enfant devient possible.

30 Cette conception, qui bouleverse nos usages, peut choquer – mais elle a aujourd’hui fait ses preuves.

31 Martine Nisse et Pierre Sabourin sont deux des trois fondateurs du Centre de thérapie familiale des Buttes-Chaumont (Paris), spécialisé dans la prise en charge thérapeutique des victimes et auteurs de violences familiales, et formant des professionnels de la santé venant de France et de l’étranger.

32 Martine Nisse est la directrice du Centre, thérapeute familiale et éducatrice spécialisée. Pierre Sabourin est psychiatre, psychanalyste et thérapeute familial.

Freud et Vienne, Sous la direction d’Alain Didier-Weil, érès, 2004, coll. « Actualité de la psychanalyse », 256 pages, 25 euros

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« Il y a un an, je visitais le musée Freud en compagnie de François Laquièze, directeur de l’Institut français de Vienne, lorsque la discussion nous porta un instant à évoquer le rapport de Freud aux villes qu’il adorait : Paris, Londres ou Rome. Alors que nous soulignions l’amour de Freud pour ces trois capitales, une question surgit : si Freud avait habité dans l’une d’entre elles, aurait-il été disposé à inventer la psychanalyse ? Sans réfléchir plus avant, je me rappelle avoir dit à François Laquièze que, non, il avait fallu que le destin fît de Freud un Viennois pour que la psychanalyse fût inventée par lui. Si tel était le cas, comment concevoir la façon dont les extraordinaires paradoxes viennois exposèrent Freud à la possibilité ou à la nécessité d’inventer la psychanalyse ? J’ai proposé à un certain nombre de chercheurs psychanalystes de se saisir de cette question et d’essayer d’y répondre. »

34 Alain Didier-Weil, psychiatre, psychanalyste, musicien de jazz, essayiste, auteur de pièces de théâtre, a dirigé ce recueil auquel participent Fabienne Ankaoua, Moufid Assabgui, Jean-Jacques Blévis, Daniel Bonetti, Jean Charmoille, Marco Antonio Coutinho Jorge, Anne Dufourmantelle, Jean-Pierre Faye, Jean Florence, Gérard Haddad, Ulrike Kadi, Serge Lesourd, Denise Maurano, Paola Mieli, Jean-Jacques Moscovitz, August Ruhs, Alain Vanier, Jean-Michel Vivès.

Essais sur la schizophrénie et le traitement des psychoses, I. L’impossible réalité, Ginette Michaud, érès, 2004, coll. « La clinique du transfert », 286 pages, 25 euros

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« Les pouvoirs publics s’intéressent à la formation et à l’exercice des psychothérapeutes et viennent de voter un texte de loi rendant une formation en psychopathologie obligatoire pour cet exercice. Et pour avoir été maître de conférences à l’université Paris VII, j’ai pu constater combien était éparpillée la formation en psychopathologie, quand elle existe. Les étudiants doivent chercher dans des lieux différents un éclairage pour la psychopathologie, pour l’aspect psychanalytique de cette pathologie, pour les aspects socioculturels. Le traitement chimiothérapique est envisagé dans les facultés de médecine, au cours de la formation de psychiatrie ? Pour la psychothérapie des psychoses, et spécialement la schizophrénie, aucune formation n’existe sauf dans des écoles de psychanalyse, ou maintenant dans les écoles conçues pour organiser la formation de celle-ci. J’avais donc le désir de réfléchir d’une façon globale à la schizophrénie, d’autant que certaines méthodes d’approche de sa structure rendent possible un engagement dans des traitements issus de la psychanalyse, avec des modalités autres que pour les névroses, en raison de cette différence. Dans cet ouvrage, j’ai traité d’abord de l’histoire du concept, puis la psychopathologie et la clinique, la notion de spécificité de la structure des psychoses, leurs mécanismes de défense contre la maladie, ce qu’ont apporté les théoriciens comme Freud et Lacan, des cliniciens comme Pankow, Leclaire et d’autres, et enfin ma propre expérience depuis plus de quarante ans. À l’attention des étudiants, des travailleurs psys, infirmiers et psychologues, et des lecteurs néophytes, j’ai tenté de recentrer dans cet essai une présentation théorique globale de la maladie, quoique non exhaustive, qui la rende accessible à la compréhension. De plus, et c’est le plus important, cette compréhension permet un optimisme thérapeutique qui tranche avec le regard découragé et la vision désespérante quant au pronostic de la schizophrénie, qui furent de règle jusqu’aux tout derniers travaux des chercheurs en psychopathologie. »

36 Ginette Michaud, psychiatre, psychanalyste, professeur honoraire de psychopathologie et psychanalyse à l’université Paris VII-Denis Diderot, spécialiste des psychoses et de la psychothérapie institutionnelle, auteur de nombreux ouvrages, dont Figures du réel (Denoël, 1999), travaille comme psychanalyste en cabinet privé à Paris. Elle est membre de l’Espace Analytique et présidente de l’Association Euro-Psy.

Peut-on devenir fou ?, Sous la direction de Patrick Delaroche et Jean-Paul Mouras, érès, 2004, coll. « Le Bachelier », 96 pages, 9,50 euros

37 L’éclosion à l’adolescence de la psychose, déjà là, bien entendu, dans les premières années, démontrerait s’il le fallait qu’il existe bien un processus ou une opération adolescente mobilisant profondément l’inconscient. Cette mobilisation explique que l’adolescence puisse « voisiner » avec la psychose. Les adolescents, comme les psychanalystes, se posent alors les questions suivantes : l’adolescence est-elle une seconde chance ? Une bonne rencontre pourrait-elle éviter la folie à celui (ou celle) dont c’est la destinée ? Les membres du Bachelier s’exposent ici dans un travail clinique autour de la folie adolescente où l’analyste ne peut qu’engager sa responsabilité sans échappatoire.

38 Patrick Delaroche est psychanalyste à Paris. Avec la participation de : Olivier Douville, Christian Hoffmann, Didier Lauru, Serge Lesourd, Jean-Paul Mouras, Jean-Jacques Rassial.

L’enfant, la parole et le soin. La clinique mise à l’épreuve, Jean-Luc Graber, érès, 2004, 264 pages, 25 euros

39 « Écouter, soigner, comprendre, assurer le passage » : ces quatre maîtres mots forment des repères probables pour rencontrer l’œuvre vivante de Jean-Luc Graber, pédopsychiatre et psychanalyste disparu en octobre 2000. Cet ouvrage en témoigne, qui rassemble une sélection d’une quinzaine de ses textes parmi les plus importants. Tous dessinent un espace où la clinique et le travail patient de la théorisation, le soin et l’invention de dispositifs institutionnels novateurs se mettent mutuellement et constamment à l’épreuve.

40 Jean-Luc Graber était assurément un remarquable clinicien, doué de cette écoute qui fait surgir chez l’autre la parole jusqu’alors « avortée dans le symptôme », comme il l’écrit dans le texte qui inaugure ce livre, perdue dans les « balbutiements du corps », sidérée par l’effroi de la folie et de la mort. Son expérience clinique quotidienne engagée auprès des patients, notamment des enfants, mais aussi auprès de tous ceux qui ont la charge et le souci d’en prendre soin, lui imposait de comprendre, de nommer (« l’annonce du handicap »), d’être attentif à « l’usage du secret », de déjouer les pièges « du double et de l’identité spéculaire ». On reconnaîtra, en le lisant, combien sa formation de psychanalyste inspirait son intelligence et son éthique.

41 Son extrême attention au « travail » du passage entre l’enfant, l’adolescent, les adultes, entre le champ médical, social, éducatif, psychiatrique, psychanalytique, l’a conduit à prendre l’initiative de plusieurs dispositifs de soin pour « accueillir l’enfant psychotique ». Plusieurs écrits rendent compte de l’approche institutionnelle originale que ce médecin résolument engagé dans le service public sut mettre en œuvre avec conviction et générosité.

42 Cet ouvrage peut assurément être lu comme le témoignage de l’empreinte que ce clinicien singulier, ce passeur constant, ce penseur rigoureux a laissée dans sa génération et dans celles qui l’ont suivie. Il est aussi un regard rétrospectif sur trente années d’une psychiatrie qui sut défier les nombreux pièges normatifs et instaurer une écoute du sujet en souffrance, au lieu de l’administrer depuis des savoirs déjà établis et des procédures écrites à l’avance.

43 En écho aux textes de Jean-Luc Graber, quelques-uns parmi ses proches l’accompagnent de contributions originales : André Beetschen, Anne Bourquin-Chassegros, André Carel, Bernard Chervet, Jean Furtos, et François Molénat. Ils lui rendent hommage dans l’esprit de rencontre et de réciprocité exigeante qui inspirait son style de vie. Catherine Graber joint sa voix à celles de ses fils et d’un frère de Jean-Luc Graber pour nous en faire partager quelques traits. (René Kaës)

Le corps et la peine des hommes, Pierre Benoit, Présentation de Jean Perroy, L’Harmattan, 2004, coll. « Psychanalyse et civilisation », 480 pages, 38 euros

44 Tout au long de sa vie d’homme, de médecin, de psychanalyste, Pierre Benoit (1916-2001) n’a cessé de se laisser interroger par la question de la souffrance. Reconnaître l’humain dans sa spécificité, au cœur même des processus en jeu dans le corps de celui qui souffre, comme à toutes les étapes du processus de l’hominisation et de l’humanisation, tel a été son projet. Observant que « la peine des hommes » n’est jamais dissociée des réalités langagières à l’œuvre au sein même du corps, il fut conduit à privilégier ce qui jamais ne manque dans les relations humaines : les effets de transfert. La question du transfert et de ce qui le « cause » devient ainsi l’objet même de sa recherche. Celle-ci lui permettra d’avancer plusieurs hypothèses sur les « structures génératives de l’humain ».

45 Ce qui est mis en lumière par sa réflexion a des implications qui relèvent aussi bien de l’éthique que du politique. La question même du « malaise dans la culture » est posée. L’œuvre de Pierre Benoit intéresse, en définitive, non seulement le psychanalyste et le médecin, mais aussi bien le biologiste et le physicien, le philosophe et le linguiste, l’anthropologue et le travailleur social…, ou pour mieux dire, quiconque a le souci de l’humain.

46 Pierre Benoit (1916-2001). Ancien chef de clinique et ancien assistant des Hôpitaux de Paris, il fut d’abord pédiatre et « médecin de famille ». Il exerça ensuite la psychanalyse pendant plus de quarante ans. Membre de la Société française de psychanalyse à partir de 1958, il suivit Jacques Lacan en 1964 à l’École freudienne de Paris. Pierre Benoit est décédé le 19 septembre 2001 à Ville d’Avray.

47 Jean Perroy, concepteur de cet ouvrage et rédacteur du texte de présentation, eut, comme Pierre Benoit, un parcours médical avant de pratiquer la psychanalyse. Il fut membre de l’ex-École freudienne de Paris.

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