Notes
-
[1]
M. de Azambuja, Et puis, un jour, nous perdons pied, Paris, Gallimard, 2010, p. 65.
-
[2]
Traduction de Leconte de Lisle.
-
[3]
J. André, Les désordres du temps, Paris, puf, 2010, p. 10.
-
[4]
A. Green, « Genèse et situation des états limites », dans J. André et coll., Les états limites, Paris, puf, coll. « Petite bibliothèque de psychanalyse », 1999, p. 56.
-
[5]
H. Searles (1986), Mon expérience des états limites, Paris, Gallimard, coll. « Connaissance de l’inconscient », 1994.
-
[6]
Ibid., p. 202.
-
[7]
O. F. Kernberg, « The destruction of time in pathological narcissism », International Journal of Psychoanalysis, vol. 89, 2008, p. 299-312.
-
[8]
J. André, Rapport : « L’événement et la temporalité. L’après-coup dans la cure », Revue française de psychanalyse, vol. 73, n° 5, p. 1345.
-
[9]
A. Green, Le temps éclaté, chapitre « Le temps et l’autre », Paris, Minuit, 2000, p. 157-183.
-
[10]
P. Aulagnier, « Le droit au secret : condition pour pouvoir penser », Nouvelle revue de psychanalyse, n° 14, « Du secret », Paris, Gallimard, 1976.
-
[11]
A. Green, La folie privée, Paris, Gallimard, 1990.
-
[12]
D. Anzieu (1978), « Machine à décroire : sur un trouble de la croyance dans les états limites », dans Le travail de l’inconscient, textes choisis, présentés et annotés par R. Kaës, Paris, Dunod, 2009.
-
[13]
J. André, Les désordres du temps, op. cit., p. 88.
« Il va falloir se réveiller et sortir de l’hypnose, de la glaciation qui permettait la survie, se réveiller et ressentir les peurs mêmes qui le faisaient fuir de lui-même, se réveiller et voir à nouveau les Cyclopes, le regard de Moïse, les dieux ivres et les Sirènes. Et cette fois, traverser ces paysages avant d’arriver à Ithaque, qui ne sera pas la ville rêvée mais une ville avec quelques rêves. »
Mémoire et identité de soi : le cas d’Ulysse
1Je retiens de L’odyssée d’Homère racontée par J.-P. Vernant ce moment où Calypso offre à Ulysse, s’il accepte de demeurer à ses côtés, de le rendre immortel et d’écarter de lui pour toujours la vieillesse et la mort. Tel un dieu, il vivra en sa compagnie, dans l’éclat permanent du jeune âge : ne jamais mourir, ne pas connaître la décrépitude du vieillissement, tel est l’enjeu de l’amour partagé avec la magicienne. Calypso dont le nom est tiré de ?????????, littéralement « cacher », est une nymphe cachée du monde ayant le pouvoir de l’oubli du temps. Ulysse, retenu captif sept ans dans cette île aux confins du monde, vit un face-à-face amoureux avec la magicienne dans une solitude totale à deux. Après un temps triste de réflexion où il pleure toutes les larmes de son corps – véritable moment limite – Ulysse refuse l’offre et fait un choix héroïque : il souhaite retrouver Pénélope, sa femme, avec qui il partage une « entente », une communauté de valeur. Il veut retrouver les racines de son histoire, sa mémoire, son identité. Lorsqu’elle lui demande si son choix est motivé par une beauté supérieure de Pénélope, Ulysse lui répond : « Non, tu es plus belle, plus grande, plus merveilleuse que Pénélope ; Mais Pénélope, c’est ma vie, c’est mon Pays. » Sa femme, c’est aussi sa mémoire, son identité. La fidélité à l’autre prend son origine dans la fidélité à soi. C’est cette entente même qui fonde la notion de couple. Cette entente peut abriter un secret que seul le couple partagera. Calypso lui proposait l’amnésie, la magie mélancolique de l’éternité : il serait jeune, beau et fort éternellement. Mais qui entendrait parler de lui ? S’il reste près d’elle, il devra oublier qui il est et rester à jamais sans nom dans la mémoire des hommes. Qui pourrait raconter ou chanter ses exploits ? Ulysse songe à la mélancolie des dieux qui envient aux vivants leur mortalité ; en refusant l’immortalité, il choisit d’aller dans le sens de sa mémoire qui fonde son identité. Au retour d’Ulysse à Ithaque, Pénélope, après l’épreuve de l’arc, lorsqu’elle attend un signe infaillible qui lui donnera la certitude qu’il est bien l’homme qu’elle a épousé il y a vingt ans met à l’épreuve un secret qu’ils étaient seuls à partager, le secret du lit conjugal : lorsqu’ils se sont connus, Ulysse a commencé à construire le domaine autour d’un lit. Ce lit a été fait par lui en prenant comme pied de lit un des oliviers qu’il a taillé et qui est enraciné dans le sol du palais. Par conséquent, c’est un lit inamovible, enraciné dans la terre et dans les souvenirs. Elle demande alors à une servante de déplacer le lit pour préparer la chambre nuptiale. Ulysse entre alors dans une rage folle en s’exclamant : « Ô femme ! Quelle triste parole as-tu dite ? Qui donc a transporté mon lit ? Aucun homme vivant, même plein de jeunesse, n’a pu, à moins qu’un dieu lui soit venu en aide, le transporter, et même le mouvoir aisément [2]. » Entendant cela, Pénélope tombe dans ses bras : elle comprend qu’il est celui qu’il prétend être, L’Ulysse de sa jeunesse. En se reconnaissant, tous deux retrouvent une part de leur identité prenant racine dans la mémoire du bois et de la terre.
Immobiliser le temps, effacer la mémoire : la magie négative dans les fonctionnements limites
2Immobiliser le temps, confondre les lieux, conserver la jeunesse et la beauté éternelle, effacer les visages qui attachent une vie ; voici ce que proposait la magicienne à Ulysse : une sorte de shoot toxicomaniaque ouvrant sur un présent pur. Qu’impliquent de telles opérations magiques pour la psyché ? S’agit-il d’éviter phobiquement la souffrance dépressive liée à la conscience de l’inévitable fin de vie ? S’agit-il au regard de modalités narcissiques d’un déni de l’horreur du vieillissement ? Entrer dans un temps illimité, n’est-ce pas entrer dans la mort ? La clinique psychanalytique des cas limites donne à découvrir au clinicien une temporalité proche de celle présente dans la proposition de Calypso faite à Ulysse : le temps passe, mais le fonctionnement reste inchangé ; les visages sont remplacés mais les histoires sont les mêmes, les chaos se configurent de la même manière, et même la présentation du corps refuse l’action du temps. On retrouve ainsi certains sujets à 40 ou 50 ans se comportant, s’habillant, évoluant comme des adolescents. Malgré les signes flagrants de leur aspect hors temps, eux ne voient rien et bien souvent ne se rappellent rien ! Sans une mémoire assurant un minimum de constance, fortifiant le sentiment de continuité d’exister, l’identité ne peut tenir. Le sentiment d’être identique à soi malgré les différentes épreuves de la vie fonde la croyance même d’exister dans une forme relative de permanence. On remarque que la clinique des cas limites offre souvent au clinicien à découvrir un monde où la routine est exécrée. On pourrait même avancer que leur routine se constitue d’inlassables changements (de partenaire affectif, d’investissements divers, d’états de détresse toujours renouvelés), telle une succession de chaos. Il faut alors zapper, bouger, s’occuper, changer d’investissements à court terme… On peut du reste sans trop exagérer penser que ce style d’existence est, somme toute, bien adapté aux exigences de la société occidentale mondialisée : le quantitatif (plaisir-excitation) a pris le pas sur le qualitatif et la question du sens – dans un tel système – devient un luxe accessoire.
3Le recours au passé dans une vie qui ne cesse de changer devient alors superflu. De même, le sentiment de nostalgie semble peu éprouvé. Une caractéristique que j’apparente à un fonctionnement magique chez ces sujets consiste en cette aptitude à créer du chaos là où tout pouvait être simple, cette capacité à engendrer de la souffrance à partir de situations ordinaires potentiellement positives. Cette « fatalité » dans la multiplication de toutes ces histoires qui finissent mal permet l’utilisation prévalente de mécanismes de défense régressifs (tel que le clivage, le déni, l’idéalisation primitive et la dévalorisation). Et comme le montre justement Green, si des rapports entretenus à un niveau superficiel autorisent des contacts faciles, plus ces rapports deviennent intimes, moins ça va : c’est cela même qui fonde l’idée d’une folie privée. Si un grand nombre d’auteurs nord-américains recourent aux idées d’un « Moi faible » ou d’une « identité diffuse » pour caractériser les pathologies borderline, il sera plus intéressant d’approfondir des liens entre mémoire et identité. Que serait du reste un « Moi fort » sinon un Moi paranoïaque ou obsessionnel ? Une mémoire diffuse, en revanche, semble constituer une caractéristique récurrente chez nombre de sujets « limites ».
L’éradication du passé et la confusion des temps
« La psychanalyse n’a pas de programme arrêté. Introduire un brin de désordre dans une vie réglée d’obsessionnel est un premier pas vers un peu plus de liberté. Mais quand le désordre est au commencement, c’est la conquête d’un rythme, d’une règle qui fera figure de changement émancipateur. L’idée est la même : rompre avec ce à quoi l’on est trop soumis, desserrer les entraves, gagner en liberté [3]. »
5Comme l’ont observé de nombreux auteurs, les cas limites donnent souvent à constater une grande difficulté à se souvenir du passé. Une amnésie totale peut même recouvrir certaines parties de la vie. Si une part importante de la psychothérapie analytique tient au travail de perlaboration permettant de redonner du sens à l’histoire d’une vie et déjouer ainsi les pièges de la répétition, l’incapacité de ces patients à retrouver des fragments de souvenirs sur une période longue de leur existence ne rend pas aisée cette visée. Avec quel temps faudra-t-il travailler ? Les rares souvenirs d’enfance mis en scène dans la cure semblent partiels ou télescopés de sorte que, techniquement, le clinicien ne sait plus trop avec quel passé travailler sinon celui induit par les traces d’un présent inscrit à chaque séance au cours du cheminement thérapeutique. Ici, la mémoire du thérapeute peut témoigner et se souvenir de ce qui aura été fréquemment « effacé » par le patient. On peut se demander si le clivage, roi de cette organisation, permet de tenir écarté le passé du présent : une scène du passé où l’image du moi a été blessée devient alors comme effacée de la mémoire. Lorsqu’il arrive au thérapeute de faire état de ce dont il a été témoin – lorsque par exemple le patient répète toujours le même fonctionnement relationnel et que ce dernier vit cela comme s’il s’agissait de la première fois – le patient, je crois, est sincère lorsqu’il affirme qu’il ne se « souvient de rien ». Tout au plus, sa mémoire se donne à percevoir comme une juxtaposition de séquences temporelles. Pour A. Green, la prévalence de l’amnésie dans les fonctionnements limites témoigne non pas de l’activité de refoulement mais plutôt d’un effacement des traces rappelant l’hallucination négative. Évoquant une cure avec un patient-limite, il observe :
« Une mémoire blanche avec, au cours des séances, des phénomènes que j’ai fini par comprendre comme des hallucinations négatives de ses pensées. C’est-à-dire que les mots n’évoquaient plus les pensées qui y étaient associées par rapport à des thèmes abordés en séance. Quand je les lui rappelais lors d’une séance ultérieure, il disait : “Ça, j’ai dit ça moi ? Je ne vois pas de quoi vous parlez.” Bien entendu, j’ai pris longtemps cela pour du refoulement jusqu’au jour où j’ai compris qu’il y avait quelque chose de plus radical dans la négativation appartenant à l’ordre de la pensée, et que ceci relevait très probablement de l’hallucination négative [4]. »
7Cette hypothèse est discutée par H. Searles [5] pour lequel ces périodes d’amnésie correspondent à une indistinction sujet/objet ayant comme conséquence de faire disparaître celui-ci : les cas limites ne seraient pas en mesure de distinguer l’objet du transfert et l’objet du passé. Dans son approche des états limites, Searles privilégie la piste du fonctionnement autistique. Dans cette optique, le transfert délirant ne vaut plus comme relation d’objet réactualisée dans le transfert mais bien plutôt comme réactualisation de la perception de l’objet lui-même. Le thérapeute se base alors davantage sur des éléments du présent qui rejouent dans l’actualité du lien thérapeutique certains enjeux relationnels oubliés, comme effacés de la conscience. Pour Searles, cette « amnésie » découle d’une certaine configuration familiale où les parents eux-mêmes, pour des raisons qui leur sont propres (chagrins, traumas, déceptions, blessures non dépassées), ont tenté d’oublier leur passé. Il importe dans un fonctionnement « sain » de pouvoir s’appuyer sur sa propre histoire pour construire un avenir où les enfants partagent avec les parents une généalogie commune porteuse de sens. Or, ici, tout se passe comme si ces parents, en s’interdisant l’utilisation de la ressource du passé, en viennent, de façon non consciente, à projeter dans les liens à leur enfant les conflits non dépassés vécus avec leurs propres parents : « […] L’enfant se retrouve, souvent à un âge très tendre, dans la position de mère ou de père de son propre parent. » On assisterait à une confusion des limites dans le lien transgénérationnel. Selon lui, plus ce « transfert transgénérationnel » a eu lieu précocement, plus l’adulte borderline est gravement malade. Mais le déplacement des transferts ne s’arrête pas là : de son côté, le sujet limite aura tendance à rendre son thérapeute responsable de tous ses malheurs, de sorte qu’il fait souvent tout son possible pour le taquiner, le provoquer, le faire enrager. Cette amnésie aurait pour fonction de préserver l’enfant d’affects d’une rare violence, et par effet de miroir, de protéger le parent de son propre passé. Cette mémoire amnésiée aurait le pouvoir de protéger le patient d’un envahissement par le sentiment de culpabilité, ou même de son propre suicide. Une posture thérapeutique vivement recommandée sera celle de ne pas forcer à la remémoration, de respecter cet ensevelissement protecteur, cette mémoire suicidée. Comme le rappelle Searles [6], c’est plutôt dans l’actualité des liens thérapeutiques difficiles qui le lient au patient que le thérapeute pourra se faire une idée de ce qu’a vécu intérieurement le père ou la mère du patient. Lorsque cet effacement des traces a lieu à l’intérieur même du dispositif thérapeutique (le patient oubliant ce qu’il a pu dire au cours des séances précédentes) cela donne la possibilité au clinicien d’être en quelque sorte « témoin » d’une mémoire oubliée. Ce point est important car dans ce genre de suivi thérapeutique, s’installe souvent une période où le thérapeute devient gardien de cette mémoire qui se construit au fil des séances. Il est à noter que cette mémoire-là se construit à deux. Ainsi, va se mettre laborieusement en place au fil de la traversée thérapeutique une temporalité plus souple et plus dynamique où le passé peut se lier au présent et au futur.
8Car le temps des sujets limites se caractérise bien souvent par les adverbes « jamais » ou « toujours » qui figent le temps et ses modifications. Un grand pas est accompli au regard des premières périodes où le sujet n’en finissait pas de se sentir exister dans un présent pur, sans passé, sans futur. Comment vivre, construire sa propre histoire, lorsque le passé est amnésié ? Il n’est pas rare d’ailleurs que certains sujets produisent des efforts surhumains pour s’anesthésier, « se défoncer », s’amnésier, comme pour tuer la mémoire, « gommer », mettre des blancs à la place de traces vivantes. L’expérience thérapeutique dans le meilleur des cas amènera le sujet à s’interroger sur le sens du temps. Cette interrogation mène celui qui se la pose inéluctablement à la conscience de sa finitude. C’est sans doute justement cette prise de conscience que le sujet limite tient par-dessus tout à éviter phobiquement. Et s’il faut éviter la mort, il faudra éviter les temps morts, l’attente, l’absence, et tout ce qui pourrait se présenter comme relevant de ce qui relève du « travail du négatif ». La cure est là pour familiariser le sujet avec cette négativité porteuse de vie pour lui permettre d’inventer au plus profond de lui des espaces et des temps de replis intérieurs. La création de cet espace ne peut se construire sans l’autre.
Investissement d’objet, temporalité subjective et sentiment d’identité
9O. Kernberg [7] décrit les caractéristiques d’une temporalité subjective particulière au sein de l’organisation narcissique pathologique de la personnalité. Il distingue la temporalité subjective des sujets névrosés (tendant à l’investissement d’objet total) et celle des sujets rabattus vers une libido narcissique. Tout se passe comme si ces derniers produisaient de grands efforts pour meurtrir le temps afin de s’assurer une illusion de permanence et d’éternité. Dans cette configuration, une expérience nouvelle aura du mal à être intégrée ; la compulsion de répétition démontrera que le temps ne passe pas, qu’il est figé.
10Cette immobilisation du temps peut durer longtemps : nombre de patients narcissiques en viennent à « se réveiller » à l’âge de 40, 50, ou 60 ans avec un sens désespéré d’années perdues. Apparaissent seulement des souvenirs rigides, statiques, stéréotypés, ne se présentant pas comme résultants de la construction d’une histoire commune, de sorte que dans une telle séquence interactionnelle, aucune durée de temps investie n’est établie. Les personnalités narcissiques ressentent fréquemment plus tard dans leur vie une sensation de ne pas avoir vécu suffisamment : la vie est passée sans laisser de traces… L’expérience du rétrécissement du temps dans ce cas peut amener à une angoisse de mort intense et grandissante, un sentiment d’injustice de la brièveté de leur vie telle qu’elle est vécue. Cette peur est également en rapport aux angoisses infantiles d’abandon et de solitude. Un sentiment profond de futilité de la vie prédomine lorsqu’il y a absence d’investissement dans l’amour, le travail, les idéaux, les enfants, les valeurs, l’énigme de l’autre.
11En contraste, l’investissement objectal permet la construction d’un passé vécu, et de fait l’allongement de la sensation de la durée de temps vécu. Car le temps objectal connaît le manque, l’absence, la frustration. C’est un temps plus habitué à s’adapter à l’autre, à s’arranger avec l’absent. Cette disposition aura comme effet d’allonger la sensation du temps.
12L’investissement fort et stable d’un lien à l’autre donnera l’occasion de ressentir un grand nombre d’états affectifs positifs et négatifs dont ceux relevant de la culpabilité et de la dépression, de l’espoir et de la croyance en l’autre. D’une certaine manière l’établissement du lien de confiance en l’autre établit un lien de confiance dans le temps. Même si l’être a souffert dans le passé, il est amené à croire que le futur réparera tant bien que mal les cicatrices et que dans cette entreprise, l’autre l’aidera. Les propos de Kernberg apportent un complément à ceux de Searles à propos des transferts transgénérationnels : les temps de l’enfance peuvent s’allonger après la vie adulte avec l’internalisation d’identifications d’objets parentaux significatifs à des étapes différentes de la vie de sorte qu’un futur peut être projeté. Dans ce futur ouvert, l’identité est partiellement façonnée sur celle d’une génération aînée. Ainsi, l’acceptation de son passé et la résolution des conflits œdipiens et préœdipiens précoces permettent l’identification avec ses propres enfants de sorte que l’expérience globale de vie est enrichie par un avenir projeté. Le fait de revivre un passé assumé (intégré) dans sa recréation créative et sa modification avec une jeune génération permet en somme à l’identité de s’allonger simultanément vers le futur et le passé. Cet enrichissement de l’expérience de vie dans le sens d’une vie vécue intensément va de pair avec l’allongement de la sensation subjective du temps. Ces développements sont pertinents pour la psychopathologie et la psychologie des processus de vieillissement. L’expansion du sentiment d’identité implique la capacité de l’identification avec des générations passées et futures, leurs intérêts, conflits et expériences donnant sens à la continuité de la vie. Parce qu’une sorte de permanence dans le sentiment d’exister est liée à la prise de conscience de sa propre finitude. En partageant sa mortalité avec l’autre, le sujet vit sa vie en ayant l’impression de l’habiter pleinement. Cette idée est particulièrement bien rendue par l’histoire d’Ulysse.
13Peut-on se sentir exister sans la mémoire de son histoire, de là d’où l’on vient, qui l’on aime, où l’on va ? Dans son rapport sur l’après-coup, J. André va dans ce sens : « Vu de la libido objectale, “le temps est éponyme du manque”. Vu de la libido narcissique, il est éponyme de la mort. C’est Narcisse qui écrit le Temps avec une majuscule. Le temps objectal naît de l’absence, le Temps narcissique naît de l’impuissance, d’une mégalomanie négative [8]. » On comprend mieux cette horreur du vieillissement, la hantise liée à l’écoulement du temps, le primat du visuel – d’une image figée aux apparences – tendant à disqualifier toutes autres formes de perceptions. Dans cette optique du traitement de l’information, la vision externe prime sur la vision interne. Cette temporalité immortelle chez les sujets pris au piège de Narcisse éclaire mieux la grande difficulté pour les sujets limites à s’engager franchement dans une direction.
L’inlassable rond-point de la compulsion de répétition
14S’il est un rond-point faisant tourner inlassablement le sujet dans une temporalité circulaire et mortifère, c’est bien, je crois, la compulsion de répétition présentant cette particularité de constituer une mémoire amnésique tendant à meurtrir le temps. Car la compulsion de répétition gèle le passage du temps signifiant : néantisant l’effet du temps, elle répète inlassablement et sans le savoir dans l’actualité ce qui a été oublié dans le passé. Pour Green, elle est « forclusion de la temporalité, positive et entière, occupant tout l’espace disponible, n’admettant aucune place pour le négatif [9] ». Elle s’articule selon lui au fantasme omnipotent d’immobiliser le temps. Au plan métapsychologique, se dégage un certain nombre d’incidences produites par la compulsion de répétition : c’est une mémoire amnésique et agissante : elle exprime une force contraignant à agir ou à reproduire un affect oublié ; elle pousse à un retour incoercible du même ou de l’identique s’accomplissant indépendamment du principe de plaisir. L’agir court-circuite la pensée. Et comme l’écrivait Lacan dans son séminaire sur l’angoisse : l’acte arrache à l’être son incertitude. La situation traumatique ou conflictuelle, plutôt que d’être élaborée par la pensée, est agie et répétée dans l’actuel. Cette activité procède d’une externalisation du conflit (à la différence des organisations névrotiques qui internalisent le conflit). On retrouve dans ce fonctionnement circulaire une caractéristique de la forclusion décrite par Lacan : ce qui n’a pas été admis par le symbolique fait retour dans le réel. Dans ce passage en force vers l’extérieur, ce qui est visé est le mortifère retour au même. Cette compulsion à répéter est toutefois ouverte au temps : elle implique la liaison de certains éléments de la vie psychique à défaut de quoi aucune répétition ne serait possible. Si certains éléments sont liés, ils le sont de façon anarchique et chaotique. La circularité du temps imposée par la clôture de la répétition gagne à être pensée dans sa dimension narcissique.
15La compulsion de répétition peut aussi amener à rechercher activement la reviviscence d’une situation douloureuse ou humiliante. Repliant l’être sur ses propres zones aveugles, elle l’amène sous la contrainte autoadministrée à revivre sur une autre scène (actuelle, externe) des affects oubliés par la conscience. Ainsi, la compulsion de répétition ne saurait être pensée sans recourir au concept freudien de masochisme moral. Cliniquement, si elle devient en quelque sorte l’ennemie du processus analytique, elle est souvent l’alliée de la réaction thérapeutique négative. Dans cette optique, détruire l’autre, le désinvestir, l’abandonner, peut être entendu comme une tentative de subjectivation ou même comme épreuve de survie. Régulièrement attaqué dans sa présence même, il est bon que le thérapeute ne prenne pas ces attaques comme de l’agressivité manifestée à son égard (cela est trop souvent constaté chez des soignants qui méconnaissent la clinique du transfert). Le recours à l’analyse du transfert-contre-transfert est particulièrement indispensable pour survivre à ces cures. Pour ce faire, le thérapeute sera amené non sans difficultés à travailler l’établissement d’une « bonne distance » laissant une part supportable au manque entre présence et absence. Quand on connaît le degré de dépendance anaclitique des cas limites naviguant entre l’angoisse d’intrusion et celle d’abandon, on peut imaginer l’importance du tact clinique dans cette laborieuse entreprise.
La construction d’un espace d’intimité dans la cure
16Le brouillage de la mémoire peut-il s’envisager comme une protection contre les menaces d’intrusion ? Face aux tentatives d’intrusion, le psychique ne sait plus rien car il n’y a plus de traces. Et lorsqu’il y a des traces, tout est brouillé. Il faudrait évoquer, si la métaphore est parlante, une technique de brouillage militaire permettant à un engin de guerre de ne pas être détecté par les radars, sonars, etc. Car chez les sujets limites, c’est souvent la guerre. Une guerre de tranchées où l’existence est chaque jour menacée de bombes qui emportent tout sur leur passage. Mais si des bombes explosent à l’extérieur, des mines implosent à l’intérieur : cette guerre a lieu entre les forces de vie et les forces destructrices, entre les tendances à la construction et celles qui détruisent. Ceci est parfaitement frappant dans la vie affective de ces sujets. Dès qu’un attachement affectif fait naître la hantise de la dépendance à l’autre, on s’arrange pour tout démolir. Le thérapeute se trouve ainsi pris dans une sorte de double mouvement tendu entre la nécessité d’assurer (et d’instituer) une permanence (de temps, d’espace) et celle de ne pas être trop intrusif. Il faudra trouver cette « bonne distance », assurée en partie par le tact clinique et l’intuition. Grâce à ces cures, j’ai pu mieux imaginer dans quelle mesure le recours privilégié au mensonge et à la dissimulation avait pu être si important dans la vie psychique de ces personnes pour échapper à l’empire de la puissance de quelqu’un qui saurait tout et face à qui il serait impossible de se fabriquer un espace intime. Comme le rappelait P. Aulagnier dans un article de 1976, le droit au secret est une condition pour pouvoir penser : « Se préserver le droit et la possibilité de créer des pensées, et plus simplement de penser, exige que l’on s’arroge celui de choisir les pensées que l’on communique et celles que l’on garde secrètes [10]. » Selon elle, cette possibilité (du secret) permettra de délimiter certaines constructions idéiques telles que les fantasmes des autres formes de pensées. L’utilisation du secret induit la distinction entre ce qui est de l’ordre de la sphère publique et ce qui relève de la sphère intime. Le monde intime semble justement mal construit ou peu utilisable au sein de ces organisations psychopathologiques. Le sujet peut parler de sa sexualité de la manière la plus crue sur un ton comparable à celui employé pour parler du temps qu’il fait dehors. Sur un autre plan, ces sujets mettent du temps pour investir une parole qui raconte autre chose que tout ce qui s’est passé dans la journée. Comme s’ils avaient été habitués à devoir tout raconter (au parent) jusqu’au moindre détail.
17Paradoxalement, surgit parfois une telle peur concernant le viol d’un espace privé qu’on peut imaginer que cet espace (d’intimité) ne se construit pas par anticipation de sa destruction. Si cet espace intime n’est pas construit, ce qu’il y a à cacher, c’est le rien, le vide. Dans ce cas rien n’est à défendre car rien n’a été construit de peur d’être anéanti. S’il n’y a rien à défendre à l’intérieur, il faudra investir les objets bien classés dans le hit-parade de la société capitaliste : l’argent, les apparences externes, la réussite socioprofessionnelle, le pouvoir, et autres objets visibles par l’autre. Le monde est un enfer au sein duquel il faut faire comme si ça tenait. Et si des efforts surhumains sont accomplis pour maintenir – vue de l’extérieur – une bonne adaptation socioprofessionnelle ou familiale, c’est à l’intérieur que ça craque. Ce que je souhaite amener par là tient à la difficulté pour le clinicien d’opérer des liens – de temps, de scènes, d’histoires, d’affects, de sens – là où tout est fait pour écraser les différences, pour – si j’ose le néologisme – « pragmatiser » la vie au plus haut point, de sorte qu’au sein d’une telle existence, il n’y a plus de désirs. Comme si le désir était devenu un luxe subtil au sein d’une organisation prise dans une lutte folle pour la survie de son sentiment d’identité. Tout se passe comme si le désir avait régressé aux qualités qui caractérisent le besoin.
L’empire du pragmatisme et la difficulté à imaginer l’invisible
18Dans ce phénomène de « pragmatisation », le clivage est roi : il organise les éléments selon la règle binaire du « bon/mauvais », du « vrai/faux », et ne laisse que très peu de place à toute activité interprétative. L’absence mal symbolisable rend le travail du deuil inaccessible, ce qui a pour conséquence d’étayer les processus mélancoliques. Ne disposant plus du pouvoir de fabriquer une présence à partir de l’absence, le sujet limite devient incapable de se fabriquer un monde de secours, c’est-à-dire un rêve diurne, une rêverie, une flânerie. Cela donnera un certain style de discours et d’existence accroché au présent pur, à l’humeur du moment : une temporalité présente ne voulant rien savoir de l’attente ni de la frustration, un fonctionnement psychique prisonnier du recours à l’alternance compulsive et répétitive du couple illusion-dévalorisation. Dans le chapitre sur « le concept de limite [11] », Green décrit cette grande difficulté d’élaboration psychique avec les associations comme si on avait affaire à des « noyaux bruts qui à certains moments se déchargent sans possibilité de liaison qui donnerait le sens qu’aurait chez un névrosé un désir inconscient ». Raconter un rêve équivaudrait alors à une décharge où toute tentative d’interprétation est mort-née. Tout se passe comme si l’interprétation n’enclenchait rien et ne donnait lieu à rien qui ressemblerait à une mobilisation interne. Il y a ce qui est utile pour mon confort d’existence immédiat, et ce qui ne l’est pas. « Si je vais bien je n’ai plus besoin du psy, si je vais trop mal j’ai besoin de lui. » Dans cette logique, aller chez le psy équivaut à « être mal » ; de ce fait, s’il m’arrive « d’être bien », j’annule la séance ou bien je viens en disant « n’avoir rien à dire car tout va bien » ! Dans cette configuration, les erreurs du thérapeute peuvent être profitables lorsque le sujet s’aperçoit que le thérapeute idéalisé est « imparfait », et qu’il est embarqué avec lui dans la galère du transfert. L’« imparfait », c’est aussi un temps conjuguant une action au passé, une situation perdue pour laquelle il est humain de pouvoir ressentir de la nostalgie. Ce temps assure à la parole que même si l’action est passée, elle peut se raconter dans le présent : même si elle n’est plus, elle peut habiter le présent. Plus que pour toute autre entité psychopathologique (sauf peut-être la phobie), l’organisation limite donne à constater une nécessité de voir. Sans la vision, tout se passe comme si l’objet se mettait à disparaître. Ceci n’est pas sans évoquer cette difficulté caractéristique de ces personnes à intérioriser les objets. Un être parti loin devient un « disparu ». On imagine aisément comment le téléphone va être utilisé pour vérifier sans cesse la permanence de l’existence de l’autre… et les effets fâcheux de cette insécurité intérieure sur l’autre. Les bornes recherchées à l’extérieur servent en partie à lutter contre le climat de confusion et contre l’angoisse du devenir, l’angoisse du temps. Comme dans une présentation météo où il n’y aurait que deux temps possibles – le bonheur ou la détresse – Marie, à chaque début de séance, donne le ton. Tout se passe comme si elle était gouvernée par une sorte de baromètre subjectif lui indiquant si « ça va » ou pas, mesurant la météo des humeurs et ressentis de l’immédiateté. J’ai souvent vécu ce baromètre des affects comme un tyran autocrate déguisé en ami démocrate. Mesurant et évaluant les ressentis il semble dire : « Vous voyez, je suis bon patient : je vous dis ce que je ressens à l’intérieur. » Sauf que cette mesure fatale va inaugurer toute une politique comportementale dans une direction où personne ne pourra intervenir pour adoucir le vent de la tempête où le torrent de pluie. Au fond, cet état affectif devient la seule croyance instable auquel le sujet en fonctionnement limite adhère sans méfiance. Et lorsque des événements positifs viennent à être vécus, il faudrait alors arrêter la thérapie immédiatement ! Jusqu’à la séance suivante où tout s’est effondré !
Comment vivre sans croire ? la construction du temps objectal dans la cure
19Si les deux protagonistes de la cure sont amenés à construire et approfondir un lien de confiance mutuel, ce lien prendra son origine dans un espoir partagé. Pour croire, encore faut-il pouvoir faire confiance à l’autre, mais aussi en soi ! L’étymologie du terme confiance, cum-fides (avec foi), ne dit pas autre chose. Le cas limite, lui, veut des garanties, des assurances. Dans cette configuration, j’ai relevé la présence récurrente d’un parent omniprésent condensant les deux fonctions maternelle et paternelle (une sorte de « Père-mère », ou bien de « Mère-père »), très exigeant des résultats (scolaires, académiques, sportifs, artistiques, etc.) mais n’accordant aucune confiance à l’enfant. De sorte que l’enfant, n’ayant guère reçu la confiance de l’autre, a du mal à intérioriser cette confiance et de fait éprouvera un grand trouble lorsqu’il s’agira de se faire confiance à soi ou bien d’investir sa confiance dans l’autre. Souvent, ce type de parent – de façon très inconsciente – ne parvient à accorder à son enfant que des compliments invalidants, du côté des reproches. Cet enfant aura toujours été susceptible de « mal faire ». Justement, dans les psychothérapies analytiques, le thérapeute est présent et pourtant il ne demande rien. Ce mode de présence – non exigeante d’un rendement particulier – est à mon sens un des ressorts dans ces cures.
20Comme le soulignait justement D. Anzieu dès 1978, les cas limites éprouvent une grande difficulté à croire. Pour croire, il faut s’adresser à l’Autre, se fier à l’inconnu, reconnaître la puissance des phénomènes invisibles. Dans son article sur la « Machine à décroire [12] », il pose justement la question : que se passe-t-il lorsque les croyances primaires qui drainent la vie font défaut ? Certaines de ces croyances sont vitales. Croire au fonctionnement naturel de son propre corps ; en la continuité de soi ; en la réalité du monde extérieur ; en la conscience des autres… Pour lui : « La croyance est une nécessité humaine pour vivre. On ne peut pas vivre sans croire que l’on vit. » Sans cela, « l’humain n’adhérera pas à son être et aura du mal à habiter sa vie ». Lacan, dans son séminaire (1972-1973) intitulé Les non-dupes errent, approche cette idée. La verticalité permise par la croyance permet à l’humain de se dresser, de sortir de l’errance du sens. Lorsque la parole du sujet est d’une effroyable lucidité, la vie devient une sorte de réalité cauchemardesque, hyperréaliste, non protégée par le fantasme ou la barrière du rêve. Sans cette aptitude à rendre présent l’absent ou à absentéiser une présence, le fonctionnement psychique se binarise et s’aliène au pendant pragmatique de l’activité perceptive.
21L’enjeu de la cure consiste en la construction commune d’un recours possible à l’entre-deux pour sortir du binaire, du « oui/non » imposé d’ailleurs de manière croissante par les impératifs de la société néolibérale et des questionnaires issus du dsm. L’expérience psychanalytique au contraire est appelée à réanimer la curiosité relative aux énigmes de la vie et de la mort. Et justement, en installant du temps de la mort dans le temps de la vie, l’analyse doit pouvoir ouvrir un espace de jeu et réanimer une rythmicité. Et justement peut-être lorsque tout se passe comme si le patient était amené à vivre tous les événements de manière frontale sans aucun espace de jeu possible, la sollicitation de l’humour sera déterminante dans ces cures. Non seulement pour le patient mais aussi – et surtout ! – pour le thérapeute. Car le fait de rester capable de penser face à des angoisses primitives, à des attaques constantes des processus de liaisons, à la plus grande confusion, nécessite chez le thérapeute une grande souplesse de fonctionnement psychique, qu’il garde la capacité d’être surpris. Devenir « patient » implique d’accepter de perdre des bouts de son Moi, de perdre raison logique, de s’exposer à de rares angoisses et troubles de pensée. Dans cette aventure, seule l’alliance thérapeutique peut atténuer la détresse originaire car elle autorise un partage des sacrifices avec ce veilleur de rêves, gardien d’une certaine animation de la vie psychique ouverte sur l’inconnu, l’imprévu, l’énigme. Devenir patient implique l’attente. Or, lorsqu’on ne cesse de « zapper », on n’attend pas.
22Parfois arrive un jour où après avoir régulièrement ignoré ou attaqué la présence du thérapeute, le sujet découvre que l’autre existe, qu’il souffre avec lui, et qu’il est peut-être opportun de désirer le réparer. Ce moment de reconnaissance de l’autre marque souvent le début d’une prise de conscience de ses actes. Et puis, comme l’écrit J. André, vient un jour où il est donné d’entendre ces mots simples – « Depuis la dernière séance », « au début quand je venais ici… » – marquant les traces de l’appropriation de la temporalité : « La temporalité, les temporalités ont une genèse psychique, plus ou moins accomplie, plus ou moins réussie, souvent ratée, esquissée, parfois même non constituée. L’inscription psychique dans le temps, la temporalisation n’est pas une donnée, c’est au mieux un résultat [13]. »
23Si les limites de l’analysibilité caractérisent en effet la clinique de ces « cas difficiles », on peut rendre hommage à cette clinique particulière pour assurer la survie des débats et remettre en question des modèles théorico-cliniques trop schématiques au sein des sociétés analytiques. Les modalités d’accueil, d’écoute, d’interprétation et tous les outils dont dispose l’analyste sont éprouvés, utilisés, testés, de sorte que jamais, depuis les débuts de la psychanalyse, les analystes n’ont été appelés à être plus inventifs, à improviser, solliciter le jeu, inviter l’humour, et créer.
Bibliographie
Bibliographie
- André, J. 2009. Rapport : « L’événement et la temporalité. L’après-coup dans la cure », Revue française de psychanalyse, vol. 73, n° 5.
- André, J. 2010. Les désordres du temps, Paris, puf, coll. « Petite bibliothèque de psychanalyse ».
- Anzieu, D. 1978. « Machine à décroire : sur un trouble de la croyance dans les états limites », dans Le travail de l’inconscient, textes choisis, présentés et annotés par R. Kaës, Paris, Dunod, 2009.
- Aulagnier, P. 1976. « Le droit au secret : condition pour pouvoir penser », Nouvelle revue de psychanalyse, n° 14, « Du secret », Paris, Gallimard.
- Azambuja, M. (de). 2010. Et puis, un jour, nous perdons pied, Paris, Gallimard, coll. « Tracés ».
- Estellon, V. 2009. « Fonctionnement limite et engendrement du dispositif thérapeutique », dans F. Marty (sous la direction de), Psychopathologie de l’adulte : 10 cas cliniques, Paris, In press.
- Estellon, V. 2010. Les états limites, Paris, puf, coll. « Que sais-je ? »
- Green, A. 1990. La folie privée, Paris, Gallimard.
- Green, A. 1993. Le travail du négatif, Paris, Minuit.
- Green, A. 2000. Le temps éclaté, Paris, Minuit.
- Green, A. 2007. « From the ignorance of time to the murder of time : from the murder of time to the misrecognition of temporality in psychoanalysis », Journal Psychoanalysis in Europe, n° 61, p. 12-25.
- Green, A. 2008. « Freud’s concept of temporality : differences with current ideas », International Journal of Psychoanalysis, vol. 89 (5), oct., p. 1029-1039.
- Kernberg, O. F. 2008. « The destruction of time in pathological narcissism », International Journal of Psychoanalysis, vol. 89.
- Lacan, J. 1973-1974. Séminaire XXI, Les non dupes errent, séance du 13 novembre 1973.
- Searles, H. 1994. Mon expérience des états limites, Paris, Gallimard, coll. « Connaissance de l’inconscient ».
Mots-clés éditeurs : confiance, partage, amnésie, identité, compulsion de répétition, mémoire diffuse
Date de mise en ligne : 20/03/2012.
https://doi.org/10.3917/cm.085.0131Notes
-
[1]
M. de Azambuja, Et puis, un jour, nous perdons pied, Paris, Gallimard, 2010, p. 65.
-
[2]
Traduction de Leconte de Lisle.
-
[3]
J. André, Les désordres du temps, Paris, puf, 2010, p. 10.
-
[4]
A. Green, « Genèse et situation des états limites », dans J. André et coll., Les états limites, Paris, puf, coll. « Petite bibliothèque de psychanalyse », 1999, p. 56.
-
[5]
H. Searles (1986), Mon expérience des états limites, Paris, Gallimard, coll. « Connaissance de l’inconscient », 1994.
-
[6]
Ibid., p. 202.
-
[7]
O. F. Kernberg, « The destruction of time in pathological narcissism », International Journal of Psychoanalysis, vol. 89, 2008, p. 299-312.
-
[8]
J. André, Rapport : « L’événement et la temporalité. L’après-coup dans la cure », Revue française de psychanalyse, vol. 73, n° 5, p. 1345.
-
[9]
A. Green, Le temps éclaté, chapitre « Le temps et l’autre », Paris, Minuit, 2000, p. 157-183.
-
[10]
P. Aulagnier, « Le droit au secret : condition pour pouvoir penser », Nouvelle revue de psychanalyse, n° 14, « Du secret », Paris, Gallimard, 1976.
-
[11]
A. Green, La folie privée, Paris, Gallimard, 1990.
-
[12]
D. Anzieu (1978), « Machine à décroire : sur un trouble de la croyance dans les états limites », dans Le travail de l’inconscient, textes choisis, présentés et annotés par R. Kaës, Paris, Dunod, 2009.
-
[13]
J. André, Les désordres du temps, op. cit., p. 88.