Notes
-
[1]
Fagoaga & Saavedra 1981 ; Capel 1992.
-
[2]
Rodrigo 1992 ; O’Connor 1987 et 2003 ; Kirkpatrick 2003 ; Blanco 2000 et 2003 ; Aguilera Sastre 2002 et 2004 ; Aguado & Sanfeliu 2015 ; Capel Martínez 2012.
-
[3]
Martínez Sierra María 1952 et 1953.
-
[4]
Blanco 2006 : 338.
-
[5]
Créée en 1870 par le pédagogue Fernando de Castro, elle a permis aux femmes espagnoles de classe moyenne d’accéder à l’enseignement académique et scientifique, les formant selon les principes de l’Institución libre de enseñanza (Institution libre d’enseignement), important projet pédagogique humaniste mis en œuvre à partir de 1876 par Francisco Giner de los Ríos.
-
[6]
Voir liste des sources.
-
[7]
L’institucionisme (« el institucionismo ») est un mouvement pédagogique et intellectuel développé en Espagne par la Institución Libre de Enseñanza. Voir note 5.
-
[8]
Mangini 2001 ; Blanco 2002.
-
[9]
Melucci 2002.
-
[10]
Ramos 2005 ; Espigado 2005 et 2010.
-
[11]
Aguado & Ramos 2002 ; Ramos 2005.
-
[12]
Solbes, Aguado & Almela 2015.
-
[13]
Réponse publiée dans Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1920 ; Rodrigo 1992.
-
[14]
Voir liste des sources. Le dernier ouvrage est une anthologie de textes déjà publiés dans Feminismo… et Nuevas cartas… Voir Blanco 2003.
-
[15]
Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1917.
-
[16]
Rodrigo 1992 : 114.
-
[17]
Blanco 2002 : 174.
-
[18]
Kirkpatrick 2003 : 132-133.
-
[19]
Martínez Sierra María 1953.
-
[20]
Ibid. : 75-76.
-
[21]
Ibid. : 76.
-
[22]
Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1920 : 13.
-
[23]
Matilla Quiza 2002 : 91-92 ; Aguado & Sanfeliu 2015.
-
[24]
Kirkpatrick 2003 : 129-163.
-
[25]
Aguado & Ramos 2002 ; Bussy Genevois 1999 ; Yusta 2006.
-
[26]
Nelken 1931 : 21-22.
-
[27]
Martínez Sierra María 1931 : 32 ; Aguado 2013 : 95.
-
[28]
« El día de María Martínez Sierra », ABC, 13 septembre 1931, cité par Rodrigo 1992 : 227.
-
[29]
Aguilera Sastre 2002 : 52-56.
-
[30]
Héroïne du xixe siècle, symbole de la lutte libérale contre le régime absolutiste du roi Fernando vii, Maria da Pineda est exécutée en 1831 pour avoir brodé un drapeau avec la légende « Loi, liberté, égalité ».
-
[31]
« Realidad. Conferencia leída en el Ateneo de Madrid el día 4 de mayo de 1931 », Martínez Sierra María 1931 : 129.
-
[32]
Nash 1994 et 2012.
-
[33]
Ramos 2006 ; Núñez 1999 ; Nash 2009 ; Gómez Blesa 2009.
-
[34]
Aguado 2013 : 144-145.
-
[35]
Aguado 2011 : 169.
-
[36]
Martínez Sierra María 1931 : 32-33.
-
[37]
Sanfeliu 2019.
-
[38]
Aguado & Sanfeliu 2015 ; Aguilera Sastre 2006 : 83-99.
-
[39]
« Entrevista a María Lejárraga », El Heraldo de Madrid, 14 juin 1933, cité in Rodrigo 1992 : 132.
-
[40]
Nash 1999 ; Fauré 2010 : 566, 624.
-
[41]
Ortega López 2011.
-
[42]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 219.
-
[43]
« Mitin Feminista », El Socialista, 27 octobre 1933, p. 6.
-
[44]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 124-127.
-
[45]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 150-151.
-
[46]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 129.
-
[47]
Blanco 1989 : 32, 40.
-
[48]
Martínez Sierra María 1931 : 32.
-
[49]
Martínez Sierra María 1946 : 4 ; Rodrigo 1992 : 320-334.
-
[50]
Aguado 2008 ; Scott 1989.
-
[51]
María Lejárraga est mis par moi entre parenthèses pour signifier que le texte est de María, pas de Gregorio.
« Pour avoir développé son savoir, une femme n’est pas moins femme ; Pour avoir gagné en conscience et en volonté, une femme n’est pas moins femme. Pour avoir vaincu quelques paresses séculaires, se trouvant capable de travail et d’intérêt pour la vie, une femme n’est pas moins femme… Au contraire ».
1Si la figure de Clara Campoamor (1888-1972), l’avocate suffragiste qui a bataillé pour que la Seconde République accorde le droit de vote aux femmes [1], est connue au-delà des spécialistes de l’Espagne, celle de María Lejárraga (1874-1974) l’est beaucoup moins. Écrivaine renommée du modernisme, socialiste, députée du parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) durant la Seconde République, féministe par ses écrits et ses actes, sa vie est pourtant riche de multiples dimensions. De paradoxes également, apparents ou réels.
2Ces facettes font de María Lejárraga une intellectuelle indispensable pour comprendre, à travers sa pensée, ses expériences et ses écrits, les débats citoyens et féministes qui eurent lieu en Espagne durant le premier tiers du xxe siècle. Elles permettent aussi d’entrer au cœur du débat identitaire qu’une militante a avec elle-même et d’examiner l’influence de la Seconde République sur sa personnalité.
3Sa vie et ses œuvres ont souvent été étudiées en effectuant une distinction radicale entre sa figure politique et sa figure littéraire [2]. Elle-même le fait dans ses deux ouvrages de mémoires [3]. Cependant, ces deux questions sont étroitement liées, surtout depuis les années 1920 et encore plus durant la Seconde République [4], comme voudrait le montrer cet article. Il s’appuie sur l’analyse des nombreux écrits de María Lejárraga, ainsi que sur des travaux déjà publiés d’historien.nes, dont l’auteure de ces pages.
La modernité d’une perspective politique
4María de la O Lejárraga naît à San Millán de la Cogolla (La Rioja), le 28 décembre1874, dans une famille aisée et cultivée. Son père est chirurgien et sa mère élève ses enfants dans le système d’éducation français. En 1880, la famille s’installe à Madrid, ce qui permet à María d’étudier à l’Asociación para la enseñanza de la mujer [5]. Après des études supérieures de commerce et à l’école normale, elle travaille comme enseignante (de 1897 à 1907) et épouse en 1900 Gregorio Martínez Sierra. En 1903, elle fonde avec Juan Ramon Jiménez la revue Helios puis, en 1907, Renacimiento. À partir de 1908, elle se consacre pleinement à l’écriture, en particulier des pièces de théâtre pour la Compañía cómico-dramática Martínez Sierra dirigée par son mari. La plupart de ses ouvrages sont publiés sous le pseudonyme de son mari, à l’exception de quelques œuvres significatives comme sa première publication Cuentos breves (Contes courts, 1899), l’article « Escuelas profesionales para la mujer » (Écoles professionnelles pour la femme) dans la revue La Escuela Moderna (1901) et, plusieurs années plus tard, La mujer española ante la República (La femme espagnole face à la République, 1931), ainsi que ses deux ouvrages de mémoires publiés en 1952 et 1953 [6].
5Les écrits et les discours de María Lejárraga reflètent clairement, tout au long de sa vie, sa formation culturelle et intellectuelle solide et montrent, sans l’ombre d’un doute, les références idéologiques concrètes qui configurent son identité : le féminisme, le socialisme et les idées philosophiques et pédagogiques de « l’institucionisme » (liberté de pensée et formation intégrale des personnes) [7]. Ces références se trouvent non seulement dans ses écrits expressément féministes et politiques, mais aussi dans l’ensemble des œuvres littéraires et théâtrales qu’elle signe Gregorio Martínez Sierra. L’écrivaine évoque, dans tous ses écrits et à maintes reprises, un nouveau modèle de femme moderne. Elle défend de manière didactique dans ses pièces de théâtre et essais que les femmes ne peuvent atteindre la liberté et l’égalité que par le travail et l’accès à l’éducation.
6María Lejárraga est une figure du débat féministe qui traverse la société espagnole du premier tiers du xxe siècle [8]. Alors que les organisations et les revendications féministes se sont répandues en Europe de manière particulièrement intense depuis la Première Guerre mondiale, l’Espagne est également touchée, de façon plus modeste. Les mécanismes utilisés pour la diffusion de la culture féministe sont les mêmes que pour toute autre culture politique : la parole et l’écriture, par les journaux et les revues, par les réunions et les conférences, par les interventions parlementaires pendant la Seconde République espagnole (1931-1939). Les différents instruments d’action collective et de mobilisation sociale sont également utilisés [9]. Tous ces mécanismes contribuent à « l’éveil féminin » qui a débuté en Espagne au xixe siècle dans le cadre du socialisme utopique, de la libre pensée et de la laïcité de fin du siècle, et qui s’est ensuite développé parmi les socialistes à partir de la Première Guerre mondiale [10].
7Affirmer que la problématique féminine n’a pas suscité un intérêt particulier pour le socialisme espagnol du premier tiers du xxe siècle est devenu un lieu commun de l’historiographie. Cette affirmation vient du fait que la culture socialiste, comme les autres cultures politiques de l’époque, partage de nombreux préjugés sur ce qu’est et doit être une femme : les classes ouvrières ont intériorisé l’idéologie de la domesticité et le modèle idéal de la féminité domestique. Cependant, des propositions d’égalité entre hommes et femmes sont également présentes dans les cultures ouvrières depuis le début du xxe siècle et sont des références pour d’autres modèles possibles de genre [11].
8Ces propositions sont présentes dans les discours et les publications de femmes socialistes, dont Margarita Nelken, María Cambrils, María Domínguez et María Lejárraga elle-même, qui ont « éveillé » le féminisme entre la Première Guerre mondiale et la Seconde République [12]. Cette dernière, qui s’inscrit dans la mouvance socialiste bien avant son adhésion au PSOE en 1931, s’exprime dès 1915 et jusqu’en 1930, dans le journal ABC et la revue Blanco y Negro, dans la section « La femme moderne ». En 1917, elle interpelle les intellectuels et les politiciens sur ce qu’ils pensent du féminisme et reçoit de Largo Caballero, vice-président de la centrale syndicale socialiste UGT, la réponse suivante :
En tant que socialiste, le féminisme doit être l’une des nombreuses revendications auxquelles aspire mon parti, le Parti socialiste ouvrier espagnol, dont le programme affirme l’égalité des droits politiques et civils pour tous les citoyens, hommes et femmes [13].
10Publiés sous le nom de son mari, les articles de María sont rassemblés au fil des années dans cinq ouvrages : Cartas a las mujeres de España (Lettres aux femmes d’Espagne, 1916), Feminismo, feminidad, españolismo (Féminisme, féminité, espagnolisme, 1917), La mujer moderna (La femme moderne, 1920), puis Nuevas cartas a las mujeres de España (Nouvelles lettres aux femmes d’Espagne,1932) et Cartas a las mujeres de América (Lettres aux femmes d’Amérique, 1941) [14].
11Ses idées féministes sont également défendues dans diverses conférences, comme par exemple celle intitulée « De feminismo » (« Du féminisme ») tenue le 2 février 1917 au théâtre Eslava de Madrid lors de l’événement organisé par la coopérative Protection de la femme au travail. À cette occasion comme à d’autres, c’est Gregorio qui parle. Il défend vivement l’idée que les femmes doivent cultiver leurs capacités et leur intelligence et défendre le féminisme face aux connotations négatives qui l’identifient à une perte de « l’essence » féminine :
Ce droit de se perfectionner et de vivre pleinement, que personne depuis longtemps ne conteste à l’homme, est précisément celui que le féminisme revendique pour les femmes. En conséquent, vous êtes obligées, en tant que femmes, d’être féministes [...] parce que si vous ne l’êtes pas, vous contredisez la raison même de votre existence [15].
13Comment comprendre que cette conférence soit prononcée par Gregorio Martínez Sierra ? Et que les écrits féministes de María, comme presque toutes ses publications, soient signés du nom de son mari ? Certaines historiennes, comme Antonina Rodrigo, évoquent un paradoxe ou une contradiction, une fidélité mal comprise et une dévotion amoureuse [16]. D’autres, comme Alda Blanco, parlent d’une stratégie essentielle dans la biographie d’une féministe aussi intelligente et aussi engagée pour la cause des femmes, et l’expliquent comme un moyen d’obtenir une liberté de création et une protection face aux critiques [17]. Pour Susan Kirkpatrick, l’écrivaine adopte l’idée selon laquelle les créations artistiques, et surtout les représentations théâtrales, sont des œuvres de collaboration, et que le nom ou la marque Gregorio Martínez Sierra représente deux individus, son mari et elle-même [18].
14María s’en est expliqué elle-même, notamment dans son ouvrage de mémoires Gregorio y yo (Gregorio et moi) dont le sous-titre évoque « une collaboration d’un demi-siècle » [19]. C’est d’abord, à ses yeux, une stratégie pour développer sa vocation littéraire de romancière et de dramaturge, un terrain difficile pour une femme dans la société espagnole du premier tiers du xxe siècle. María voulait que la qualité de ses œuvres soit reconnue et elle le serait bien plus avec la signature d’un homme comme l’avait montré l’expérience de ses deux premières publications-collaborations avec son mari : El poema del trabajo (Le poème du travail, 1898), signé Gregorio Martínez Sierra, et Cuentos breves, publié sous son nom d’épouse (1899). La première fut saluée dans la famille, la seconde pas du tout, bien que la publication didactique de Maria ait été considérée par le Conseil d’instruction publique comme utile pour servir de texte dans les écoles primaires. María commente ainsi la mésaventure :
J’ai ressenti – intérieurement, comme il est de coutume pour moi – une formidable colère, et j’ai juré par tous mes dieux : « Vous ne verrez jamais mon nom imprimé sur la couverture d’un livre à nouveau ». J’ai décidé que les créations de notre union intellectuelle ne porteraient rien de plus que le nom du père [20].
16D’autre part, María évoque l’amour qui la liait à son mari :
Peut-être la raison la plus forte était le romantisme d’amoureuse. Mariée, jeune et heureuse, j’ai été prise par cette fierté d’humilité qui domine les femmes. Nos œuvres sont des filles du mariage légitime, et le nom du père est suffisant [...] Maintenant, je suis vieille et veuve, je suis obligée de proclamer ma maternité afin de recueillir mes droits d’auteur [21].
18Enfin, disparaître sous un pseudonyme masculin favorise une plus large diffusion de ses idées féministes, notamment par les pièces de théâtre et les romans qui s’adressent à l’ensemble de la société. Malgré la contradiction apparente d’une signature masculine, le succès et la reconnaissance sociale – ses œuvres ont été représentées dans les meilleurs théâtres de Madrid – lui ont permis de promouvoir directement et indirectement les questions féminines et féministes. Ils lui ont également ouvert l’accès aux milieux intellectuels et forgé des relations sociales utiles pour réaliser ses projets culturels, civiques et associatifs destinés aux femmes.
19Maria Lejárraga n’est pas qu’une féministe de l’écriture. Des décennies durant, elle s’est engagée dans l’action civique et a pratiqué un activisme associatif en faveur de l’égalité des femmes. En 1918, elle est l’une des fondatrices de l’Union de mujeres españolas (Union des femmes espagnoles), avec la Marquise de Ter, et en 1919 elle fait partie du comité du Consejo supremo feminista (Conseil suprême féministe) d’Espagne. Elle se consacre par la suite à la préparation du huitième congrès de l’Alliance internationale pour le suffrage des femmes, qui devait se tenir à Madrid en 1920, grâce aux liens établis entre les groupes féministes espagnols et l’Alliance par l’intermédiaire de María. Même si des désaccords entre les groupes organisateurs conduisent au choix de la ville de Genève, María assiste au congrès en tant que déléguée, aux côtés d’Isabel de Palencia, et collabore à la rédaction d’une charte des droits des femmes visant à reconnaître l’égalité politique, administrative et civile des femmes et des hommes, tant au niveau national qu’international. Ce congrès laisse une empreinte importante dans sa biographie, la convainquant que l’avancée du féminisme est inévitable en Europe, et la pousse à publier durant la même année (1920) La mujer moderna (La femme moderne) dans lequel elle rassemble les réponses à l’enquête qu’elle avait elle-même menée en 1917 auprès de différents intellectuels espagnols sur la question féministe. Ce livre est cependant, comme nous l’avons vu, signé Gregorio Martínez Sierra [22].
20Deux ans plus tard, en 1922, elle fonde conjointement avec Clara Campoamor, Elisa Soriano et César Juarros la Sociedad española de abolicionismo (Société abolitionniste espagnole) pour lutter contre la légalisation de la prostitution. C’est dans cette organisation qu’elle anticipe son action future au sein du Patronato de protección a la Mujer (Conseil de protection de la femme) sous la Seconde République. De même, María est l’une des premières organisatrices et bibliothécaires du Lyceum Club fondé par María de Maeztu en 1926. Elle y tient des conférences sous son nom et tente, en vain, de lui conférer une orientation plus sociale [23].
21Cette panoplie d’actions et d’adhésions à des associations souligne l’ancienneté de l’engagement citoyen et féministe de María Lejárraga. Cependant, à partir de 1931, elle devient une femme politique active sur la scène sociale et publique de son pays, et non plus seulement une écrivaine moderniste, dramaturge et journaliste éminente [24].
Citoyenne face à la République : action et politique pour les femmes
22En 1931, la proclamation de la Seconde République ou de la « nouvelle Espagne » républicaine entraîne immédiatement une nouvelle visibilité et présence des femmes dans la vie publique. En même temps, le contexte de démocratisation permet la légalisation de nombreuses revendications égalitaires et féministes formulées antérieurement par les femmes, ainsi que le développement de leurs droits de citoyenneté, y compris le suffrage et la citoyenneté politique [25]. Il favorise également le développement de discours égalitaires dans les cultures républicaines et socialistes. Parallèlement, le besoin de lutter contre la mobilisation de la droite génère un programme d’action visant à accroître la mobilisation politique des femmes et à les émanciper de la tutelle de l’Église, objectif laïc commun au républicanisme.
23Les femmes socialistes sont particulièrement conscientes des « désavantages » politiques et culturels de la gauche, en raison des caractéristiques liées à la condition sociale des femmes espagnoles et des références traditionnelles et catholiques associés à la féminité « authentique » dans l’imaginaire social dominant. Cette inquiétude se retrouve dans les discours de Victoria Kent, Maria Cambrils, Margarita Nelken, Clara Campoamor et d’autres, y compris évidemment Maria Lejárraga elle-même. Comme l’écrit Margarita Nelken, en 1931, dans son livre La mujer ante las Cortes Constituyentes (La femme face aux Assemblées Constituantes) :
Quelques dizaines de filles universitaires, quelques dizaines de filles affiliées à des mouvements de jeunesse et à des groupes socialistes, ayant agi avec enthousiasme lors des dernières élections, quelques milliers de femmes, dont des femmes prolétaires ou paysannes poussées par les difficultés de leur vie d’une part, et par une identification étroite aux hommes de leur entourage d’autre part, vers des idéaux de gauche [...] ne sont pas représentatives de l’écrasante majorité de femmes directement et ouvertement opposées aux idéaux de leurs compagnons, de leurs pères ou de leurs fils [26].
25De son côté, María Lejárraga souligne l’importance qu’ont pour les femmes les règlements et les décrets d’urgence adoptés entre avril et mai 1931 :
Le gouvernement provisoire de la République a fait pour les femmes en quinze jours, plus que tous les gouvernements monarchiques successifs ne firent depuis le règne d’Alphonse X le Sage [27].
27En tant que femme socialiste et féministe, l’avènement de la République est, écrit-elle, « la plus grande joie de [sa vie] » : « Le 14 avril, j’ai cru rajeunir et je me suis lancée dans la rue pour assister, avec enthousiasme, à l’éclosion d’un peuple » [28].
28La Seconde République représente un tournant dans la biographie même de l’écrivaine. C’est une nouvelle étape dans son engagement politique (elle adhère au PSOE en 1931), dans son activisme et dans la confiance qu’elle a en elle-même pour transmettre aux femmes les valeurs et les principes républicains, socialistes et féministes. L’enthousiasme et la joie que lui inspire l’avènement de la République font d’elle la meilleure propagandiste et défenseuse de la République [29]. Ce changement se marque aussi dans le nombre de ses publications (qui diminue) et celui de ses conférences (qui augmente), tenues dans des théâtres, à l’Athénée de Madrid, dans les Maisons du Peuple et à La Cívica. Plus encore dans la signature qu’elle utilise. Si le recueil d’articles déjà cité, Nuevas cartas a las mujeres (1932), paraît sous le nom de Gregorio Martínez Sierra, elle commence à utiliser non le pseudonyme mais son propre prénom suivi du nom marital. Ainsi, La mujer ante la República (La femme face à la République), publié en 1931, est signé María Martínez Sierra. Elle accole même son premier nom de famille sur deux articles, publiés dans La Región (Santander), signant María Lejárraga de Martínez Sierra.
29Composé des cinq conférences tenues à l’Athénée de Madrid en mai 1931, et de la conférence prononcée le mois suivant en commémoration du centenaire de l’exécution de Mariana Pineda [30], La mujer ante la República (1931) a un contenu politique puissant. María appelle les femmes à soutenir la République naissante, expliquant passionnément que seule la République peut donner des réponses à leur asservissement et leur permettre d’atteindre leurs objectifs de liberté et d’égalité. Dans un discours à la fois intellectuel et émotionnel, et avec un langage clairement politique, elle étaye la nécessité d’établir des liens entre femmes et République, usant de références tantôt égalitaires et tantôt maternelles, afin de mieux atteindre ses destinataires. Le féminisme, la féminité et la maternité semblent liés dans son discours de manière plus complémentaire que dichotomique. Elle s’adresse aux femmes en tant que mères biologiques et sociales, et en tant que citoyennes et éducatrices. Elle les nomme « mères de la République », stratégie discursive par laquelle elle s’approprie les références maternelles du féminisme : « Pour les hommes, la patrie est la mère ; pour les femmes, elle est l’enfant » [31].
30María Lejárraga donne une nouvelle signification aux représentations symboliques traditionnelles de la maternité en tant qu’élément clé de l’identité féminine. Le féminisme maternaliste, déjà présent dans le féminisme historique espagnol, réunissait traditionnellement des discours mettant directement en question le système fondé sur l’hégémonie du genre et d’autres acceptant la négociation des relations de genre [32]. María Lejárraga donne au maternalisme une nouvelle dimension politique, en l’assortissant de demandes égalitaires et en l’inscrivant dans une perspective citoyenne. Elle construit et diffuse de nouvelles références identitaires pour les femmes : en tant que citoyennes, celles-ci doivent veiller à la croissance de la République comme on le ferait avec un enfant. Cette nouvelle identité féminine offre, dans le contexte particulier de l’Espagne républicaine, des réponses à la tension et à la complexité des relations entre femmes et espace public, entre citoyenneté et genre [33].
31María Lejárraga œuvre ainsi pour rapprocher les principes républicains – également socialistes dans ce cas – des femmes et pour mobiliser politiquement ces dernières durant la Seconde République [34]. À partir de ses références idéologiques socialistes, la future députée énonce déjà en 1931 ce que les femmes peuvent offrir à la République, et ce qu’elles peuvent attendre d’elle, tout en montrant pédagogiquement pourquoi il faut la soutenir. Selon elle, les femmes doivent appuyer la République, en tant que citoyennes détentrices de droits politiques et, dans une perspective maternaliste, en tant que mères. Elles ne sont pas seulement mères de citoyens – comme elles ont été définies durant la Révolution française après la négation de leurs droits politiques – mais mères de la République elle-même, en tant que citoyennes à part entière [35]. Ce modèle de féminité républicaine utilise stratégiquement l’ensemble des objectifs égalitaires et références maternalistes, avec un langage permettant d’être entendu de larges secteurs de la population féminine :
Le pays, notre enfant, est sous l’influence d’un changement qui est, tout simplement, un phénomène de croissance. Il vit une espèce d’adolescence qui n’est pas, ni ne peut être, la dernière avancée de son évolution. En attendant qu’il atteigne sa maturité, soutenons de toutes nos forces le régime qui vient de s’implanter. Travaillons aussi pour nous former et pour aider à gouverner la maison [36].
33Femme politique au sens le plus large du terme durant la Seconde République, María Lejárraga est également une femme d’action. En tant que bonne enseignante, ses multiples initiatives se concrétisent d’abord dans des projets pédagogiques de citoyenneté. De manière presque parallèle à la création de l’Union republicana femenina (Union républicaine féminine) par Clara Campoamor en 1931 [37], María Lejárraga fonde en 1932 l’Asociación femenina de educación cívica (Association féminine d’éducation civique) – La Cívica –, association qui revêt un caractère plus social que le Lyceum Club : elle s’adresse aux femmes ouvrières et à celles des classes moyennes, avec l’objectif de les former civiquement, professionnellement et culturellement [38]. Il s’agit notamment d’« éveiller les femmes de la classe moyenne, beaucoup plus endormies et ignorantes que celles du peuple, à la conscience d’une responsabilité citoyenne » [39]. Dans La Cívica, des centaines de femmes ont entendu parler du collectivisme, du pacifisme, de l’internationalisme, de l’abolitionnisme, de l’éducation sexuelle ou des problèmes sociaux et politiques pour la première fois. Elles y ont trouvé, en même temps, un espace de sociabilité féminine et de dynamisme culturel et intellectuel.
34María fonde aussi la revue Cultura integral y femenina en 1933. Sur un plan politique plus général, elle adhère à la fois au Patronato de protección a la mujer (Conseil de protection de la femme), et à l’organisation Mujeres contra la guerra y el fascismo (Femmes contre la guerre et le fascisme) – ultérieurement connue comme l’Agrupación de mujeres antifascistas (AMA, Regroupement des femmes antifascistes). Initialement plurielle, créée de façon unitaire par des femmes républicaines, socialistes, communistes et sans affiliation politique, cette dernière organisation allait tomber progressivement sous le contrôle des femmes du parti communiste, avec à leur tête la présidente Dolores Ibárruri (La Pasionaria) [40].
35L’engagement politique, qui accompagne l’engagement féministe de María Lejárraga, se renforce encore lorsqu’elle accepte de se présenter en tant que candidate socialiste pour la circonscription de Grenade aux élections législatives de novembre 1933. Ceci représente un nouveau tournant, à partir duquel l’écrivaine milite non seulement par l’écriture et l’associationnisme civique, mais aussi avec d’autres instruments ouvertement politiques pour contrecarrer la forte mobilisation des catholiques contre la législation républicaine et leur dénonciation des femmes socialistes comme antiespagnoles et dénuées de féminité, comme des « non-femmes » [41]. Le combat idéologique et politique autour des modèles de féminité devient alors une question clé. Malgré l’hégémonie du modèle de la femme traditionnelle subordonnée, les femmes occupent pour la première fois, selon María Lejárraga, « des lieux où on s’attendait normalement à trouver des hommes » [42] et la diffusion de nouveaux modèles de féminité, tant conceptuels que pratiques, constitue un vrai travail politique et idéologique. María, qui allait être élue, mène, aux côtés d’un candidat socialiste de premier rang, Fernando de los Ríos, une campagne électorale intense. Oratrice et propagandiste, elle parcourt les différents villages de la province en s’adressant en particulier aux femmes, à toutes les femmes. Comme elle l’écrit :
Il est nécessaire de parler à toutes les femmes, qu’elles soient ou non de notre classe. La femme ouvrière a moins que quiconque besoin de ces actes de propagande parce qu’elle sait accomplir son devoir […] Je vais parler, pour autant, non en tant que socialiste mais en tant que femme [43].
37Cette campagne électorale fait d’elle une militante socialiste, ainsi qu’une féministe soucieuse de la situation des femmes de son pays. María Lejárraga, comme d’autres femmes de gauche, agit comme une citoyenne détentrice de droits, prête à parcourir des chemins jusqu’alors réservés aux hommes. Elle allait d’ailleurs choisir le titre Una mujer por los caminos de España (Une femme sur les chemins de l’Espagne) pour l’un de ses ouvrages de mémoires, rédigé en exil en Argentine et publié en 1952. Elle y décrit les expériences personnelles et politiques qui ont suivi sa décision d’agir directement dans le milieu politique, en tant que candidate et propagandiste socialiste en 1933 et en 1936. Conjointement, elle développe une analyse de genre attentive à la situation réelle de la majorité des femmes espagnoles des années 1930, soulignant leur « inexistence » et le poids de la culture patriarcale dans l’Espagne rurale :
Nos campagnes ont sans doute atteint quelques groupes restreints de la classe moyenne madrilène, ainsi que les enthousiastes parmi les adhérentes du Club Lyceum et de l’Association Féminine d’Éducation Civique, foyers de notre féminisme […]. Les organisations ouvrières des grandes villes, centres de l’industrie, ont formé leurs adhérentes de manière plus solide grâce à l’action syndicale […]. Cependant la grande masse amorphe, la femme de la classe moyenne provinciale, la femme qui travaille loin des organisations syndicales, la femme paysanne, n’a aucune formation […] Je n’ai trouvé aucune femme à convaincre. Puisqu’à Grenade et dans sa province la femme n’existe pas. Ce n’est pas une exagération. Socialement, elle n’existe pas. Elle ne compte pas voire il ne lui est jamais venu à l’esprit, ni à elle ni à quiconque, qu’elle pourrait compter […] [44].
39Ses souvenirs sont riches en émotions et en analyses des pratiques socioculturelles et de la vie quotidienne des femmes de l’Andalousie rurale que la candidate souhaitait rencontrer durant les conférences et interventions politiques de sa campagne électorale. Partant de sa vocation pédagogique, María espérait pouvoir parler à ces paysannes et gagner leur sympathie à la cause socialiste. Cependant, ces dernières, même les femmes de militants ou sympathisants socialistes, n’osaient pas assister aux activités politiques ni se rendre sur les places publiques. Voici ce que María écrit de sa visite à la Casa del Pueblo (Maison du Peuple) – lieu de réunion des socialistes – d’Alfacar à Granada :
« Où sont les femmes ? », demandai-je. Elles ne sont pas venues. Elles n’ont pas voulu venir, par gêne… La gêne (reparo en espagnol) est un terme polyvalent qui signifie à la fois chez les Andalous la peur du qu’en-dira-t-on, la timidité, l’aversion à l’inconnu, la conscience de sa propre indignité et trop de respect pour le mystère du méconnu ou de l’inhabituel… [45].
41Et plus loin dans l’ouvrage :
Les femmes sont absentes, les femmes n’existent ni dans la Maison du Peuple, ni dans les rues, ni dans les cafés [46].
43Ces expériences renforcent l’engagement politique de María Lejárraga, qui entend créer les conditions éducatives et législatives pour que les femmes adviennent et avancent vers l’égalité. C’est aussi et précisément grâce à ces expériences qu’elle prend conscience du paradoxe ou de la contradiction de son ancienne stratégie d’utilisation d’une signature masculine pour publier un texte féministe [47]. Elle commence alors, et non par hasard, à chercher une solution et à développer son activisme sur la scène publique avec un nouveau sujet féminin, un sujet actif qu’elle ne mentionne toutefois presque pas dans ses mémoires : elle-même, le sujet « je », la première personne du singulier. Durant la Seconde République, ce nouveau sujet donne à ses écrits et à sa personnalité un raisonnement féministe lucide, à partir duquel elle allait ensuite aborder une réflexion autobiographique sur les expériences vécues.
44La vie parlementaire de María Lejárraga est courte. La répression, par le gouvernement radical de la CEDA (Confédération espagnole des droites autonomes) de la révolution des Asturies d’octobre 1934, conduit, entre autres, à l’abandon, par le groupe socialiste, du Parlement. María se consacre alors à son activité de membre du comité national de Mujeres contra la guerra y el fascismo (Femmes contre la guerre et le fascisme), appelé alors Pro infancia obrera (Pour l’enfance ouvrière) à cause de la semi-clandestinité dans laquelle il se trouve. Depuis ce comité, elle lance une campagne en faveur de la liberté de la presse et aide les enfants dont des membres de la famille sont en prison. À partir de 1936, elle abandonne l’activité parlementaire, même si elle participe à la campagne électorale du Front populaire. Au début de la guerre civile, le gouvernement républicain l’envoie en Suisse en tant qu’attachée commerciale. La victoire des insurgés franquistes la tourmente jusqu’à la fin de sa vie, puisqu’elle ne retourne jamais en Espagne et meurt à Buenos Aires en 1974, presque à l’âge de cent ans, exilée de l’Espagne républicaine qu’elle aimait « comme une mère aime son enfant », expression utilisée en 1931 dans La mujer española ante la República [48]. De son exil, elle affirme que le nom de sa patrie doit être le premier mot enseigné :
Avec ces lettres on écrit et en ces lettres on lit, on comprend et on aime l’ESPAGNE ; avec ces lettres, par ces lettres, on comprend le concept de LIBERTÉ [49].
46***
47Cet article souligne combien l’histoire des féminismes et de leurs relations avec les différentes cultures politiques ne peut être écrite de manière correcte sans une étude approfondie et contextualisée des individualités et des parcours féminins. Le parcours de María Lejárraga, écrivaine moderniste, féministe et militante socialiste, fait entrer dans la complexité de l’histoire de l’Espagne du premier tiers du xxe siècle. Elle a recherché des espaces d’action publique dans la société de son temps et a élaboré des propositions féministes diverses à partir de ses expériences identitaires et de ses références politiques. Les liens et les contradictions entre l’expérience biographique de María et ses discours et actions de caractère égalitaire et féministe constituent également des éléments clés de l’histoire des femmes, de l’histoire politique et sociale de la Seconde République espagnole, voire de l’histoire des processus de démocratisation de l’Espagne au xxe siècle [50].
Bibliographie
Sources
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Mots-clés éditeurs : écriture, María Lejárraga, identité, féminisme, socialisme, Seconde République espagnole
Mise en ligne 09/08/2021
https://doi.org/10.4000/clio.19988Notes
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[1]
Fagoaga & Saavedra 1981 ; Capel 1992.
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[2]
Rodrigo 1992 ; O’Connor 1987 et 2003 ; Kirkpatrick 2003 ; Blanco 2000 et 2003 ; Aguilera Sastre 2002 et 2004 ; Aguado & Sanfeliu 2015 ; Capel Martínez 2012.
-
[3]
Martínez Sierra María 1952 et 1953.
-
[4]
Blanco 2006 : 338.
-
[5]
Créée en 1870 par le pédagogue Fernando de Castro, elle a permis aux femmes espagnoles de classe moyenne d’accéder à l’enseignement académique et scientifique, les formant selon les principes de l’Institución libre de enseñanza (Institution libre d’enseignement), important projet pédagogique humaniste mis en œuvre à partir de 1876 par Francisco Giner de los Ríos.
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[6]
Voir liste des sources.
-
[7]
L’institucionisme (« el institucionismo ») est un mouvement pédagogique et intellectuel développé en Espagne par la Institución Libre de Enseñanza. Voir note 5.
-
[8]
Mangini 2001 ; Blanco 2002.
-
[9]
Melucci 2002.
-
[10]
Ramos 2005 ; Espigado 2005 et 2010.
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[11]
Aguado & Ramos 2002 ; Ramos 2005.
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[12]
Solbes, Aguado & Almela 2015.
-
[13]
Réponse publiée dans Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1920 ; Rodrigo 1992.
-
[14]
Voir liste des sources. Le dernier ouvrage est une anthologie de textes déjà publiés dans Feminismo… et Nuevas cartas… Voir Blanco 2003.
-
[15]
Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1917.
-
[16]
Rodrigo 1992 : 114.
-
[17]
Blanco 2002 : 174.
-
[18]
Kirkpatrick 2003 : 132-133.
-
[19]
Martínez Sierra María 1953.
-
[20]
Ibid. : 75-76.
-
[21]
Ibid. : 76.
-
[22]
Martínez Sierra Gregorio (Lejárraga) 1920 : 13.
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[23]
Matilla Quiza 2002 : 91-92 ; Aguado & Sanfeliu 2015.
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[24]
Kirkpatrick 2003 : 129-163.
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[25]
Aguado & Ramos 2002 ; Bussy Genevois 1999 ; Yusta 2006.
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[26]
Nelken 1931 : 21-22.
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[27]
Martínez Sierra María 1931 : 32 ; Aguado 2013 : 95.
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[28]
« El día de María Martínez Sierra », ABC, 13 septembre 1931, cité par Rodrigo 1992 : 227.
-
[29]
Aguilera Sastre 2002 : 52-56.
-
[30]
Héroïne du xixe siècle, symbole de la lutte libérale contre le régime absolutiste du roi Fernando vii, Maria da Pineda est exécutée en 1831 pour avoir brodé un drapeau avec la légende « Loi, liberté, égalité ».
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[31]
« Realidad. Conferencia leída en el Ateneo de Madrid el día 4 de mayo de 1931 », Martínez Sierra María 1931 : 129.
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[32]
Nash 1994 et 2012.
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[33]
Ramos 2006 ; Núñez 1999 ; Nash 2009 ; Gómez Blesa 2009.
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[34]
Aguado 2013 : 144-145.
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[35]
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[36]
Martínez Sierra María 1931 : 32-33.
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[37]
Sanfeliu 2019.
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[38]
Aguado & Sanfeliu 2015 ; Aguilera Sastre 2006 : 83-99.
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[39]
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[40]
Nash 1999 ; Fauré 2010 : 566, 624.
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[41]
Ortega López 2011.
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[42]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 219.
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[43]
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[44]
Martínez Sierra María 1989 [1952] : 124-127.
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[45]
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[46]
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[47]
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[48]
Martínez Sierra María 1931 : 32.
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[49]
Martínez Sierra María 1946 : 4 ; Rodrigo 1992 : 320-334.
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[50]
Aguado 2008 ; Scott 1989.
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[51]
María Lejárraga est mis par moi entre parenthèses pour signifier que le texte est de María, pas de Gregorio.