Notes
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[1]
De Staël 1810. Cette citation est très largement connue des contemporains : quatre recueils de citations publiés entre 1945 et 1980 la compilent et Beauvoir, visiblement troublée par cette opposition entre gloire et bonheur, en fait de nombreux usages et gloses dans son autobiographie.
-
[2]
Bard 2004. Comme il est nécessaire d’étudier le « genre des territoires », il est possible de réfléchir au genre des idées.
-
[3]
Pawin 2011 : 24.
-
[4]
H. Champly, Le Bonheur de Josie, Paris, Gedalge, 1946, 236 p. ; E.H. Porter, Pollyanna et le secret du bonheur (1913), Paris, Jeheber, 1946 ; J. Mesnil, Marianne ou la Volonté du bonheur, Paris, Éditions « Claudine », 1946, 19 p. ; P. Ramber, Le Bonheur de Janine, Paris, les Éditions du Hublot, 1946, 32 p. ; J. Sveinsson, Comment Nonni trouva le bonheur, Paris, Éditions Alsatia, 1946, 176 p. ; Y. Prost, Le Bonheur de Madame Alphée, Paris, Dumas, 1948, 192 p.
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[5]
Y. Trouard Riolle, Pour préparer le bonheur de votre foyer, Savennières, M.-et-L., 1947 ou Le Bonheur à la maison. Le conseiller pratique de la femme, périodique, 1947-1951.
-
[6]
Sauvy 1991 : 269-282.
-
[7]
Sur le tirage des Jeunes filles, voir Boschetti 1991 : 561 et 563.
-
[8]
Romans I, Les jeunes filles I, 1936.
-
[9]
Montherlant 1959 : 1006 et 1007.
-
[10]
Ibid. : 1003.
-
[11]
Ibid. : 1003.
-
[12]
Ibid. : 1003 et 1005.
-
[13]
Montherlant 1959 : 1004.
-
[14]
Ibid. : 1005.
-
[15]
Sohn 1996 : 1007.
-
[16]
Paquier 1947.
-
[17]
Montherlant 1959 : 1007.
-
[18]
Ibid. : 1008 et 1009.
-
[19]
Darras 1977 ; Meunier 1978.
-
[20]
Le Monde, 8 décembre 1978 : 15.
-
[21]
Maurois 1951.
-
[22]
Ibid. : 52.
-
[23]
Sondages, 16/7/1946 : 168.
-
[24]
Réalités, décembre 1955 : 80-88.
-
[25]
Sondages, 1957/3 : 38-42.
-
[26]
Duquesne 1963 : 206.
-
[27]
Sondages, 1970/1 et 2, p. 149.
-
[28]
Chaperon 2000 ; Picq 1993.
-
[29]
Le bien-être subjectif, traduction du subjective well-being, est évalué à partir de déclarations individuelles répondant à des questions du type « êtes-vous plutôt heureux, très heureux, plutôt malheureux, très malheureux ? » (Sur les diverses échelles de mesure, voir Diener 1984 : 542-575).
-
[30]
Veenhoven 1984 : 178 et 261.
-
[31]
L’effet d’autoprésentation désigne la propension des sondés à modifier leurs déclarations afin de se conformer aux attentes supposées de l’enquêteur et aux normes sociales légitimes : dans le cadre des études d’opinion sur le bonheur, il est particulièrement vif, dans la mesure où se déclarer malheureux constitue un aveu d’échec difficile, d’autant plus si le bonheur est considéré par le sondé comme son objectif principal. Comme on l’a montré, c’est plus souvent le cas chez les femmes. Dès lors, cet effet est sans doute plus fort pour elles.
-
[32]
Sondages, 1961/1 : 45.
-
[33]
Sondages, 1961/1 : 46.
-
[34]
Sohn 2000 : 197.
-
[35]
Arbois & Schidlow 1978 : 186.
-
[36]
Arbois & Schidlow 1978 : 186.
-
[37]
Sur la proportion des femmes au travail, voir Schweitzer 2002.
-
[38]
Jaffré 1978 : 190.
-
[39]
Sullerot 1973.
-
[40]
Sullerot 1973 : 13 ; Bard2001 ; Schweitzer 2002. Pour une comparaison avec la structure de la population active, Marchand & Thélot 1991.
-
[41]
Sullerot 1973 : 234.
-
[42]
Sullerot 1973 : 233.
-
[43]
Ibid. : 157.
-
[44]
Le statut et le revenu sont les facteurs les plus influents sur la satisfaction au travail : voir Baudelot & Gollac 2003.
-
[45]
Sullerot 1973 : 251, 254, 244.
-
[46]
Ibid. : 245.
-
[47]
Hirschman 1983 : 140.
-
[48]
Les trois extraits proviennent du même entretien, Sullerot 1973 : 248.
-
[49]
Sullerot 1973 : 252.
-
[50]
Sullerot 1973 : 246-247.
-
[51]
Sur la polémique à propos de l’amélioration objective du travail des femmes, cf. Lagrave 1991 : 443 sqq.
-
[52]
Bard 1999 : 329.
1 « La gloire est, pour les femmes, le deuil éclatant du bonheur » [1]. Cette célèbre citation de Mme de Staël, selon laquelle les femmes devraient choisir entre le bonheur et la réussite sociale, signale que le bonheur est, de longue date, un thème lié au genre. Sans souscrire à une quelconque naturalité du lien entre le bonheur et les femmes, cet article entend d’abord s’interroger sur l’évolution de cette configuration socioculturelle dans la France du second xx e siècle : au sein de la société française de l’après-guerre, la prégnance du bonheur varie selon le genre. Ce trait a des origines anciennes, mais il importe de souligner l’hystérésis des représentations et l’extrême variation des discours et de l’influence du bonheur pour les femmes et pour les hommes dans la France des années post-1945 : le bonheur a-t-il un genre ? [2] Le cas échéant, cette relation au genre s’atténue-t-elle au cours du second xx e siècle ? Les femmes ont-elles intériorisé la déclinaison spécifique du bonheur qui leur est proposé ?
2 Partant, cette étude des discours normatifs et de leur réception conduira vers une série d’interrogations portant sur les expériences des femmes en matière de vie heureuse. L’une des problématiques contemporaines en sciences sociales consiste en effet à interroger l’interaction entre les croyances et les sentiments, et le bonheur constitue un observatoire propice à cette investigation. Il s’agira donc d’étudier les ressentis dans les sphères privées et professionnelles : dans quelle mesure ont-elles été heureuses dans ces domaines ? L’ont-elles été autant que les hommes ? Peut-on relier l’évolution des normes sociales à celle des expériences ?
3 Afin d’y répondre, nous mobiliserons un corpus documentaire varié. Les représentations du bonheur et les normes sociales seront appréhendées à partir de documents publiés : l’ensemble des ouvrages dont le titre comprend le terme bonheur ou un terme appartenant à son champ sémantique – soit plus de 3 500 volumes – permettra de mener une étude quantitative ; au sein de ce massif, nous avons analysé quelques centaines de livres, pour l’étude qualitative, ainsi que quelques autres volumes particulièrement significatifs. L’historien n’ayant accès qu’aux sentiments déclarés, nous utiliserons des enquêtes, afin d’apprécier la réception des discours et les expériences des femmes, dans leur diversité : bien que les sondeurs participent largement de la construction de l’opinion dont ils prétendent témoigner, les sondages réalisés auprès d’échantillons représentatifs de la population étudiée sont particulièrement utiles pour notre problématique, parce que les réponses procèdent à la fois des normes sociales et des expériences individuelles. Les catégories n’étant pas assez fines et les résultats bruts non disponibles, il est souvent impossible de distinguer précisément, dans les sondages, les divers groupes de femmes et la manière dont se construisent, chez chacune, les sensibilités. Afin de compenser cette limite liée au type de sources mobilisées, nous les conjuguons à des enquêtes apportant des informations individuelles : de la sorte, il est possible d’aborder la diversité des expériences des femmes et de réaliser les jeux d’échelles nécessaires à la démonstration historique.
Le bonheur au féminin : des normes et de leur intériorisation
4 Quand on soulève la question du bonheur, on s’adresse d’abord aux femmes. Dans l’ensemble des ouvrages recensés, une forte proportion est destinée aux femmes, ou les évoque. Les romans dont le titre contient le terme bonheur sont souvent des romans d’amour, à l’eau de rose, dont les héroïnes sont des femmes, comme leur lectorat cible [3]. Entre 1945 et 1948, six romans associent dans leur titre le terme bonheur à un prénom de femme, tandis qu’aucun n’y accole un prénom masculin [4]. Dans la même veine, une majorité des guides de bonheur sont focalisés sur les femmes, les questions conjugales et familiales [5]. Enfin, un grand nombre d’ouvrages écrits pour des femmes, le sont par des femmes : la proportion d’auteures dans notre corpus est nettement plus élevée que la moyenne [6]. Les représentations du bonheur se cristallisent donc sur la question des femmes et la cible principale est d’abord féminine.
5 En outre, les discours sur le bonheur thématisent cette plus grande importance de la vie heureuse pour les femmes, la hiérarchie des valeurs n’étant pas la même selon les genres. Selon Montherlant, auteur des Jeunes Filles, roman à succès [7], « l’idée du bonheur est si forte chez la femme qu’elle ne voit que le bonheur » [8]. Et l’auteur de souligner « l’exigence qu’elles ont à son égard » [9]. Au contraire, le bonheur serait pour les hommes un « état négatif, insipide au sens littéral du mot » [10] et « celui qui avoue ce respect au bonheur » est « suspect » [11]. Tandis que « la plupart des hommes n’ont pas de conception du bonheur », « la femme, au contraire, se fait une idée positive du bonheur » [12] : « le bonheur est pour la femme un état nettement défini, pourvu d’une personnalité et d’une particularité, une réalité substantielle extrêmement vivante, puissante, sensible ». Les hommes, eux, ne conçoivent le bonheur que comme « satisfaction de la vanité » [13] : « bientôt une journée de bonheur devient pour eux une journée où ils ont passé beaucoup de coups de téléphone » [14]. Montherlant n’est pas un cas isolé. Nous l’avons présenté ici en raison de son audience très large et parce qu’il explicite la relation entre le bonheur et le genre. De fait, la plupart des auteurs considèrent que le bonheur des femmes et celui des hommes sont de nature distincte et le déclinent différemment selon le genre.
6 Tout concourt à ce que le bonheur ait plus de prégnance pour la femme que pour l’homme : cette norme s’applique moins à la vie publique qu’à la vie privée, à laquelle elles sont encore trop souvent reléguées. Tout se passe comme si les femmes ressentaient plus fréquemment l’influence de la norme de la vie heureuse : pour elles et depuis le xix e siècle, « la construction de l’individualité repose principalement sur la quête du bonheur » [15], tandis que les hommes ont d’autres échelles de valeur à leur disposition – la gloire et la réussite sociale constituent autant d’autres aunes pour se mesurer. En outre, la construction sociale de la virilité leur interdit l’attention excessive à leurs états d’âme. Dans ce cadre, le bonheur n’est qu’un artefact culturel débilitant et inutile.
7 Certes, les hommes aussi ont le droit d’être heureux et de se soucier de l’être, comme en témoigne Aviation, école de bonheur, ouvrage militaire qui met à profit l’attractivité du bonheur, afin de recruter [16]. Malgré cette exception, c’est d’abord aux femmes que l’on parle du bonheur et à qui l’on conseille d’être heureuses : le bonheur est pour les femmes une idée compensatrice qui surgit de « l’état d’insatisfaction qui est leur loi » [17]. En effet, « une femme ne peut jamais se réaliser complètement : elle dépend trop de l’homme » et « le mariage est la seule clef qui puisse [lui] ouvrir le bonheur » [18]. Comme à l’époque de Mme de Staël, le bonheur permet donc toujours de réguler les rapports sociaux de genre : décliné – et souvent instrumentalisé – dans sa version familiale, il contribue à cantonner la femme dans son rôle traditionnel. Idée consolatrice, le bonheur compense partiellement l’exclusion publique des femmes et s’inscrit parmi les technologies productrices de consentement.
8 Au cours des années 1950-1980, le genre du bonheur devient moins identifiable, sans toutefois disparaître. Le corpus d’ouvrages comportant « bonheur » offre, à cet égard, quelques indicateurs : dans la seconde partie des années 1970, les titres associant bonheur et prénom masculin deviennent possibles, à l’instar de Frédéric ou le Bonheur des autres et Et le bonheur, Aurélien ? [19] Le schéma narratif de ce dernier « roman d’apparence courtoise, d’écriture piquante, de mœurs parfois légères » [20] ne le distingue pas des romans à l’eau de rose accolant le mot bonheur à un prénom féminin : le genre du bonheur s’est partiellement dilué. D’ailleurs, on constate une diminution du nombre de titres associant prénom de femme et bonheur : six dans les années 1950, cinq dans les années 1960, deux dans les années 1970. Si le thème reste plus féminin, certaines femmes revendiquent un accès à la vie publique et refusent de voir leur exclusion compensée par le bonheur du cadre privé. De leur côté, les hommes aspirent de plus en plus au bonheur.
9 Toutefois, la vie heureuse se décline toujours en modèles variés. Dans son Cours de bonheur conjugal, André Maurois met en scène ce contraste [21]. Cette pièce radiophonique à succès est composée de scénettes sur les grands moments du mariage : la rencontre, la lune de miel, la fidélité, les disputes… Maryse, l’héroïne, reproche à son mari, Philippe, d’avoir gâché leur lune de miel :
Toi, homme, tu as ton métier […] tu es fier d’y réussir. Moi, qui n’ai pas la chance de créer, j’ai mon métier de femme, j’aurai voulu le faire merveilleusement. Et tu me donnes, à tout moment, le sentiment que j’ai échoué. Voilà, Philippe, ce qui m’arrive, et c’est très triste [22].
11 Cette fiction est tout entière construite sur l’opposition entre deux chemins du bonheur, l’un pour les femmes, l’autre pour les hommes. Or, cette représentation clivée de la vie heureuse n’est pas seulement l’objet de discours normatifs, mais participe du modelage des genres : bien que certaines femmes remettent en cause la hiérarchie des genres, une forte proportion de Françaises et de Français a intériorisé l’habitus propre à chaque sexe.
12 Les sondages successifs réalisés auprès d’échantillons représentatifs de la population l’attestent. En 1946, à la question ouverte : « Pouvez-vous me dire au juste ce que vous appelez “être heureux” ? », 16% des femmes se prononcent pour l’amour et la famille, tandis que seul 9% des hommes les mentionnent [23]. En 1955, les sondés doivent désigner la photographie qui correspond le mieux à leur idée du bonheur : 49% des femmes choisissent « les joies de la famille » pour 21% des hommes [24]. En 1957, un échantillon représentatif des jeunes de 18 ans à 30 ans est interrogé sur ce qu’ils aimeraient savoir de leur avenir – question qui renvoie à la hiérarchie des différents domaines de la vie. 34% des hommes et 16% des femmes souhaiteraient en savoir plus sur leur future carrière. En revanche, 35% des femmes voudraient avoir des informations sur leur vie familiale, contre 11% des hommes [25]. En 1961, une enquête sur les 16-24 ans pose aux jeunes la question suivante : « Beaucoup de gens estiment qu’il leur manque quelque chose pour être tout à fait heureux. Quelles sont, parmi les choses suivantes, les trois dont la privation est, selon vous, la plus grave ? ». Les réponses témoignent également de représentations variées selon le genre : 32% des hommes de 16 à 18 ans et 46% des hommes de 22 à 24 ans mentionnent l’amour parmi leurs trois réponses, contre 51% des femmes de 16 à 18 ans et 56% des femmes de 22 à 24 ans. Ici encore, la variation est significative [26].
13 Dix ans plus tard, en juin 1970, une enquête permet de souligner que l’évolution est lente : elle s’adresse à des étudiants de Nanterre, habitant l’ouest de la capitale ou la banlieue ouest. Ce sont des populations sensibles aux évolutions sociales et notamment à la question du rôle des femmes : plus jeunes, plus politisées, plus urbaines et plus riches qu’un échantillon représentatif de la population française. On pourrait donc s’attendre à ce que la différence entre hommes et femmes soit amoindrie. Le résultat réel est plus contrasté. D’une part, à la question : « parmi les choses suivantes, quelle est celle qui vous apparaît comme devant vous donner le plus de satisfaction dans la vie ? », 49% des femmes contre 29% des hommes citent les « relations familiales ». La différence est significative, bien que l’échantillon soit plus restreint. D’autre part, les femmes citent plus souvent la carrière (26%) que les hommes (21%), qui préfèrent les « activités de loisirs ou artistiques » (29%) et la « participation civique ou politique aux affaires du pays » (12% des hommes contre 3% des femmes) [27]. De même, si l’on s’intéresse maintenant à l’ensemble des réponses citées – l’enquête demandait de choisir trois priorités – il faut noter l’essor de l’importance du domaine professionnel pour les femmes : 89% (contre 77% des hommes) le cite parmi les trois, signe que le travail n’est pas la priorité princeps, mais qu’il est néanmoins devenu plus essentiel. C’est d’ailleurs l’option de réponse qui recueille le plus de suffrages, puisque les « relations familiales » n’en obtiennent que 87% (73% chez les hommes). 13% des étudiantes de Nanterre ne citent pas le domaine familial parmi les trois priorités principales de la vie. Une interprétation paraît valide : il se trouve parmi elles un pourcentage important de militantes féministes qui, publiquement – dans une situation d’enquête –, ne peuvent évoquer l’importance de la vie familiale [28]. Quoi qu’il en soit, une évolution est perceptible, mais le processus est lent : chez les étudiantes de Nanterre à l’avant-garde de cette transformation sociale, il ne paraît pas achevé, puisqu’elles évoquent toujours plus fréquemment que les étudiants le caractère premier des relations familiales.
Le bonheur des femmes : l’influence du genre
14 À l’échelle de l’ensemble des mesures réalisées dans le monde, le « bien-être subjectif » [29] n’est que faiblement corrélé au genre. Mais en France, les échantillons de jeunes femmes se déclarent un peu plus souvent heureuses que ceux de jeunes hommes, comme le remarque une méta-étude portant sur les données de la World Database of Happiness de 1946 à 1984 [30]. Puisque les réponses procèdent à la fois d’une expérience et d’un biais d’autoprésentation, il est difficile de savoir si ces résultats découlent d’un plus grand bonheur des jeunes femmes ou d’une plus forte prégnance de la norme du bonheur auprès d’elles [31]. Quoi qu’il en soit, la variation n’est pas considérable et l’appréciation globale n’est pas largement déterminée par le genre. Ce facteur est, en revanche, plus influent lorsqu’on s’intéresse aux bilans réalisés dans le domaine privé ou professionnel.
15 Une enquête de 1959 sur les Françaises et l’amour offre des informations sur leur bonheur dans la vie privée et la manière dont il se construit. Les enquêteurs soulignent la continuité entre les normes sociales – notamment celles diffusées par les modèles littéraires – et les aspirations : « le mariage est le but vers lequel la plupart des femmes tendent. Il apparaît aux sujets interrogés comme le moyen pour la femme d’atteindre le bonheur » [32]. Selon les commentateurs, « la condition de la femme française n’est ni idyllique, ni dramatique » : « 51% des femmes mariées estiment que le mariage leur a apporté des satisfactions de tous ordres (13% l’amour et le bonheur – 11% un bon mari et de beaux enfants – 27% surtout des satisfactions). Par ailleurs, 66% des femmes mariées n’ont jamais envié le sort des femmes seules. Ce qui permet de dire que le bilan du mariage est, somme toute, positif » [33].
16 Peu importe ici que le bilan du bonheur conjugal déclaré varie en ordre inverse de la durée du mariage ou qu’il soit moins élevé lorsque la femme travaille : il s’agit de mettre en évidence l’influence des normes – les discours libérateurs – sur les expériences – le bien-être conjugal des femmes – et de comprendre que les discours d’ouverture accroissent la complexité du monde social. En 1959, beaucoup de femmes pouvaient encore assez facilement s’aliéner au bonheur du conjoint et/ou des enfants et vivre au gré de leurs satisfactions respectives. Dans les années 1967-1968, la dépendance librement consentie engendre souvent des conflits identitaires, mais peut parfois encore conduire au bonheur [34]. Avec le « remodelage des rapports interindividuels », la posture traditionnelle de négation de soi est, dans les années 1970, régulièrement battue en brèche, tandis que l’attitude moderne est valorisée. Il ne s’agit pas ici de présenter un nouvel avatar du traditionnel argument antiféministe selon lequel les femmes auraient été les victimes du féminisme, mais de reconnaitre que ce processus n’est pas sans parfois grever la satisfaction de certaines femmes traditionnelles, qui ont pris connaissance des schèmes féministes et en ressentent un malaise, comme l’atteste une lettre envoyée en 1976 par une mère de famille de 23 ans vivant en Picardie :
Je refuse d’être considérée comme une arriérée par les femmes elles-mêmes parce que j’ai choisi de rester à la maison et d’élever mon enfant. Croyez-moi, ce n’est pas si facile et il y a des jours où, comme tout le monde je suppose, je rêve d’autre chose, où les murs de ma maison me semblent étouffants, où j’ai peur de cet « encroutement » qui guette les femmes [35].
18 Cette femme expérimente un conflit entre, d’une part, son désir d’être mère et, d’autre part, son « rêve d’autre chose ». Ce dernier désir préexistait chez de nombreuses femmes, mais était largement refoulé par les normes traditionnelles ; légitimé par l’éthique nouvelle, il se ravive à la fin des années 1960. Dans la lettre, elle déclare ensuite qu’elle veut d’autres enfants et restera au foyer. Cette décision lui suggère les commentaires suivants, qui lui permettent de tenir à distance un conflit psychique manifestement accru par la diffusion des thèmes féministes :
Voilà encore quelque chose qui fait pousser à d’aucuns des hurlements d’indignation. Je me suis entendu dire plusieurs fois : « mais alors, tu vas te sacrifier pendant quinze ans pour élever tes enfants ? Ta vie sera fichue… » Me sacrifier ? […] je n’ai pas l’impression de me sacrifier, moi qui regarde vivre mon fils, jour après jour, qui essaye de lui faire une vie gaie. Au contraire, mes enfants, je les fais pour mon bonheur et pour celui de mon mari, leur père émerveillé [36].
20 La libération inachevée n’apparaît donc pas toujours sous le jour d’un processus joyeux, mais se révèle parfois douloureuse : de nombreuses femmes investissent encore beaucoup dans le foyer conjugal, mais aspirent aussi à d’autres types de satisfaction. Ces désirs multiples sont souvent en conflit les uns avec les autres et la situation est loin d’être facile : les actives, majoritaires, ont un peu moins de chances que les autres de se trouver heureuses en ménage et se trouvent en contradiction avec ce qu’on leur a inculqué dans l’enfance, à savoir l’idéal de la mère au foyer ; la minorité au foyer risque de culpabiliser de son choix et de devoir s’en justifier [37]. Dans les deux cas, lorsque ces femmes mettent en récit leur vie privée, lorsqu’elles évaluent son caractère plus ou moins heureux, elles mobilisent des conventions narratives fortement genrées. Leurs attentes dans le domaine familial, plus élevées que celles des hommes [38], leur vision du mariage d’autrui, souvent négative, leur manière de concevoir l’équilibre entre les différentes parties de leur vie, en pleine évolution, ou encore l’existence ou l’absence de modèles valorisant l’indépendance et l’autonomie, constituent autant de paramètres normés, qui modifient la couleur des expériences. Dans la sphère professionnelle, la tonalité des récits est également liée aux normes et, partant, au genre.
21 En 1971, une enquête dirigée par Évelyne Sullerot – une des fondatrices de la Maternité heureuse en 1956 devenue experte auprès de la CEE et spécialiste des études sur les femmes – auprès de femmes françaises actives fournit quelques indicateurs de leur bonheur professionnel [39]. L’ouvrage s’inscrit dans une perspective militante, mais les informations qu’il fournit sont fiables : réalisée par l’IFOP et bénéficiant du soutien du Commissariat général au Plan, l’enquête porte sur un échantillon de 1 300 individus représentatif des 6,6 millions de salariées françaises, interrogées en 1971 [40]. Cent vingt-six questions ont été posées : la plupart portent sur les conditions objectives du travail – horaires, nature de l’emploi, revenu… – mais quelques-unes abordent ses aspects subjectifs.
22 Afin de vérifier combien l’accès au travail fut salutaire pour les femmes, Évelyne Sullerot a posé la question suivante : « Tout compte fait, êtes-vous satisfaite de travailler ? » [41]. On ne trouve pas d’équivalent dans les enquêtes générales élaborées en pensant au travailleur masculin pour lequel l’alternative travail-vie domestique ne se pose pas. L’insatisfaction semble peu répandue, puisque seules 12% des sondées répondent non. 15% ne se prononcent pas : ce taux élevé de non-réponses procède de l’addition de celles qui ne souhaitent pas répondre (peu nombreuses, si l’on se réfère aux autres sondages de satisfaction) et de celles qui choisissent cette réponse en lui donnant le sens d’une réponse neutre, absente de la question fermée, proportion sans doute supérieure à 10%. Enfin, 73% des femmes sondées se disent « satisfaites » de participer au monde de la production.
23 Dans la suite de l’enquête, on demande aux femmes, non plus si elles sont « satisfaites de travailler », mais si elles le sont dans l’emploi qu’elles occupent : « Tout compte fait, êtes-vous satisfaite ou mécontente de ce que vous faites actuellement ? » Les réponses sont plus positives que celles des hommes : 89% sont satisfaites, dont 34% « très satisfaites » ; seules 10% se déclarent mécontentes, dont 2% « très mécontentes » (1% ne se prononcent pas) [42]. Afin de vérifier la pertinence des informations relevées par cette question, Évelyne Sullerot teste la corrélation avec l’absentéisme, indicateur objectif classique du contentement des salariés. Les variables ne sont pas indépendantes : les travailleuses très contentes s’absentent très peu et les très mécontentes s’absentent beaucoup ; entre les deux, la proportion décroît régulièrement [43]. Les scores de satisfaction sont donc des indicateurs pertinents, congruents avec des comportements observables : les indicateurs subjectifs correspondent à une réalité expérimentée par l’agent, et ne sont pas seulement déterminés par une norme sociale de désirabilité.
24 En 1971, la plus grande satisfaction des femmes au travail ne résulte pas de variables liées à la qualité objective de leur activité ou du revenu procuré : elles occupent, le plus souvent, des statuts inférieurs aux hommes et sont moins bien payées [44]. Tout se passe comme si leur plus grand bonheur au travail procédait de l’influence des nouveaux idéaux biographiques féministes : Sullerot cite ainsi beaucoup d’extraits d’entretiens au cours desquels les femmes déclarent moins être heureuses de leur travail qu’être heureuses de ne pas être au foyer. Certes, ces extraits ont été sélectionnés afin de servir le propos féministe, qu’ils illustrent à merveille. Mais s’ils sont certainement surreprésentés dans l’ouvrage, ils ont bel et bien été tenus. Plusieurs locutrices ont ainsi évoqué les « œillères » des mères au foyer, ont magnifié leur « indépendance » ou le fait qu’elle « s’ennuierait à la maison tout le temps » [45]. De même, certaines remarquent que cela « fait du bien de faire autre chose que le ménage ou la cuisine » [46] : beaucoup jugeant que les « travaux ménagers, c’est abrutissant », elles expérimentent un « effet de contrecoup » [47] positif lorsqu’elles travaillent, même si elles estiment « être tenues par des horaires » et auraient aimé « un travail plus lucratif » [48].
25
Cette irruption des schèmes narratifs féministes est manifeste à plusieurs reprises dans les extraits cités et les femmes les mieux loties ne sont pas les seules à convoquer les thèmes féministes. Au contraire, les nouveaux récits permettent à certaines travailleuses, auxquelles l’activité déplait foncièrement, de mettre en forme leur expérience de manière positive, à l’instar de cette surveillante scolaire, à qui on demande si elle est satisfaite : « Dans l’absolu oui. Je travaille parce que je suis obligée et aussi parce que travailler c’est agrandir son champ d’activité, même si ce métier est mal rémunéré et peu satisfaisant » [49]. Dans ce cas, la mobilisation de la norme féministe
– « agrandir son champ d’activité » – permet à la travailleuse de se contenter de son travail. De fait, les thèmes féministes agissent comme de véritables rationalisations, au sens psychologique du terme. À la question de satisfaction, une travailleuse commence ainsi par dire : « Oui, j’aime assez travailler, je n’aimerais pas être toute la journée à la maison », puis poursuit immédiatement : « mais enfin la raison profonde est quand même l’argent » [50]. On saisit ici la prégnance et l’efficacité du schème selon lequel les femmes doivent travailler pour être heureuses : essentialisant une situation nécessaire, c’est lui qui surgit de prime abord dans l’extrait cité. Et il donne une tonalité joyeuse au travail. Ce caractère heureux aurait certainement été moins présent dans le récit d’un homme qui n’aurait travaillé que pour l’argent. Ainsi, le développement des récits féministes redouble l’effet plus objectif de l’amélioration du travail des femmes – titres scolaires plus élevés et tertiarisation des emplois [51] –, pour colorer de manière positive les romans personnels des travailleuses.
26 Signe de l’interaction entre les normes et les expériences, celles d’une proportion notable d’enquêtées portent l’empreinte des représentations modernes de la vertu féminine, qui incorporent, à ce moment de l’histoire, le fait de travailler : un récit positif sur leur vie professionnelle découle de la réalisation de leur désir et/ou du respect de ce nouveau devoir. Cette enquête témoigne donc de la transformation des romans personnels de certaines femmes, qui ont intégré dans leurs schèmes narratifs l’aspect professionnel. Dans cette perspective, il est d’ailleurs possible que le contentement de certaines femmes qui travaillaient de longue date, se soit accru en raison des discours féministes. Contre les penseurs réactionnaires, qui ont critiqué la mauvaise conscience que les féministes donnaient aux mères au foyer et selon lesquels les femmes auraient été « victimes du féminisme » [52], cette enquête révèle au contraire que le discours féministe a pu enjoliver le quotidien de certaines femmes, qui subissaient auparavant leur travail comme une malédiction.
27 Cette analyse a révélé que le bonheur reste lié au genre dans la France du second xx e siècle : les femmes demeurent les premières cibles du bonheur, bien que son caractère féminin s’atténue ; les déclinaisons du thème sont largement intériorisées et les aspirations statistiquement déterminées par le genre. Au cours de cette recomposition, le bonheur est une arme mobilisée par les deux camps : il justifie l’idéal proposé, qu’il soit traditionnel ou novateur, ou invalide le modèle rejeté. Dès lors le bonheur s’inscrit à la fois parmi les technologies de consentement et parmi les facteurs du changement social.
28 Les conflits et les clivages autour du bonheur se répercutent sur le plan des expériences des acteurs. Dans la sphère privée, l’existence de deux modèles antagonistes crée une tension vécue par de larges groupes de femmes. Elles subissent l’influence des idéaux biographiques concurrents et des conventions narratives adverses : il leur est plus difficile de valoriser le modèle de la vie par procuration ou de l’aliénation du moi ; mieux intégrées à la cité, elles doivent parvenir à trouver un équilibre entre les domaines privé et public. Désormais invitées à l’indépendance par des groupes de plus en plus nombreux, elles posent un regard plus heureux que les hommes sur leurs activités professionnelles : l’incitation féministe à l’autonomie agit parfois comme une rationalisation d’une situation antérieure qu’elle contribue à valoriser. Travaillant de longue date en France, non plus coupables mais fières de ne pas être au foyer, certaines femmes peuvent se faire un bonheur de participer, comme les hommes, à la sphère productive. C’est pourquoi leur bien-être déclaré au travail est plus élevé que celui des hommes, malgré leur statut généralement inférieur. Ici se révèle l’influence des normes sociales : elles canalisent le regard porté sur le monde objectif et potentialisent les expériences ; lorsqu’elles suscitent de l’adhésion, elles informent des idéaux auprès desquels les acteurs et les actrices mesurent leurs réalisations. Avec celui de la femme moderne, véhiculé par les nouvelles éthiques féminines, la gamme des bonheurs possibles est étendue : la nouvelle liberté a multiplié les chemins du bonheur et les femmes doivent désormais se frayer une route dans un monde social devenu plus complexe, mais aussi plus ouvert.
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Mots-clés éditeurs : représentation, expérience, bonheur, xxe siècle, genre, norme
Date de mise en ligne : 01/08/2014
https://doi.org/10.4000/clio.11939Notes
-
[1]
De Staël 1810. Cette citation est très largement connue des contemporains : quatre recueils de citations publiés entre 1945 et 1980 la compilent et Beauvoir, visiblement troublée par cette opposition entre gloire et bonheur, en fait de nombreux usages et gloses dans son autobiographie.
-
[2]
Bard 2004. Comme il est nécessaire d’étudier le « genre des territoires », il est possible de réfléchir au genre des idées.
-
[3]
Pawin 2011 : 24.
-
[4]
H. Champly, Le Bonheur de Josie, Paris, Gedalge, 1946, 236 p. ; E.H. Porter, Pollyanna et le secret du bonheur (1913), Paris, Jeheber, 1946 ; J. Mesnil, Marianne ou la Volonté du bonheur, Paris, Éditions « Claudine », 1946, 19 p. ; P. Ramber, Le Bonheur de Janine, Paris, les Éditions du Hublot, 1946, 32 p. ; J. Sveinsson, Comment Nonni trouva le bonheur, Paris, Éditions Alsatia, 1946, 176 p. ; Y. Prost, Le Bonheur de Madame Alphée, Paris, Dumas, 1948, 192 p.
-
[5]
Y. Trouard Riolle, Pour préparer le bonheur de votre foyer, Savennières, M.-et-L., 1947 ou Le Bonheur à la maison. Le conseiller pratique de la femme, périodique, 1947-1951.
-
[6]
Sauvy 1991 : 269-282.
-
[7]
Sur le tirage des Jeunes filles, voir Boschetti 1991 : 561 et 563.
-
[8]
Romans I, Les jeunes filles I, 1936.
-
[9]
Montherlant 1959 : 1006 et 1007.
-
[10]
Ibid. : 1003.
-
[11]
Ibid. : 1003.
-
[12]
Ibid. : 1003 et 1005.
-
[13]
Montherlant 1959 : 1004.
-
[14]
Ibid. : 1005.
-
[15]
Sohn 1996 : 1007.
-
[16]
Paquier 1947.
-
[17]
Montherlant 1959 : 1007.
-
[18]
Ibid. : 1008 et 1009.
-
[19]
Darras 1977 ; Meunier 1978.
-
[20]
Le Monde, 8 décembre 1978 : 15.
-
[21]
Maurois 1951.
-
[22]
Ibid. : 52.
-
[23]
Sondages, 16/7/1946 : 168.
-
[24]
Réalités, décembre 1955 : 80-88.
-
[25]
Sondages, 1957/3 : 38-42.
-
[26]
Duquesne 1963 : 206.
-
[27]
Sondages, 1970/1 et 2, p. 149.
-
[28]
Chaperon 2000 ; Picq 1993.
-
[29]
Le bien-être subjectif, traduction du subjective well-being, est évalué à partir de déclarations individuelles répondant à des questions du type « êtes-vous plutôt heureux, très heureux, plutôt malheureux, très malheureux ? » (Sur les diverses échelles de mesure, voir Diener 1984 : 542-575).
-
[30]
Veenhoven 1984 : 178 et 261.
-
[31]
L’effet d’autoprésentation désigne la propension des sondés à modifier leurs déclarations afin de se conformer aux attentes supposées de l’enquêteur et aux normes sociales légitimes : dans le cadre des études d’opinion sur le bonheur, il est particulièrement vif, dans la mesure où se déclarer malheureux constitue un aveu d’échec difficile, d’autant plus si le bonheur est considéré par le sondé comme son objectif principal. Comme on l’a montré, c’est plus souvent le cas chez les femmes. Dès lors, cet effet est sans doute plus fort pour elles.
-
[32]
Sondages, 1961/1 : 45.
-
[33]
Sondages, 1961/1 : 46.
-
[34]
Sohn 2000 : 197.
-
[35]
Arbois & Schidlow 1978 : 186.
-
[36]
Arbois & Schidlow 1978 : 186.
-
[37]
Sur la proportion des femmes au travail, voir Schweitzer 2002.
-
[38]
Jaffré 1978 : 190.
-
[39]
Sullerot 1973.
-
[40]
Sullerot 1973 : 13 ; Bard2001 ; Schweitzer 2002. Pour une comparaison avec la structure de la population active, Marchand & Thélot 1991.
-
[41]
Sullerot 1973 : 234.
-
[42]
Sullerot 1973 : 233.
-
[43]
Ibid. : 157.
-
[44]
Le statut et le revenu sont les facteurs les plus influents sur la satisfaction au travail : voir Baudelot & Gollac 2003.
-
[45]
Sullerot 1973 : 251, 254, 244.
-
[46]
Ibid. : 245.
-
[47]
Hirschman 1983 : 140.
-
[48]
Les trois extraits proviennent du même entretien, Sullerot 1973 : 248.
-
[49]
Sullerot 1973 : 252.
-
[50]
Sullerot 1973 : 246-247.
-
[51]
Sur la polémique à propos de l’amélioration objective du travail des femmes, cf. Lagrave 1991 : 443 sqq.
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[52]
Bard 1999 : 329.